CHAPITRE
TROISIÈME
Notre vieille vie se termine à la Croix ; notre vie nouvelle commence à la résurrection. « Si donc quelqu'un est en Christ, il est une nouvelle créature : les choses vieilles sont passées ; voici que toutes choses sont devenues nouvelles » (2 Corinthiens 5, 17). La Croix met fin à la première création, et de la mort sort une nouvelle création en Christ, le second Homme. Si nous sommes « en Adam », tout ce qui est en Adam nous est forcément transmis ; tout cela devient nôtre, automatiquement, car nous n'avons rien à faire pour nous l'approprier. Nous n'avons pas besoin de prendre une décision pour nous mettre en colère ou pour commettre un autre péché ; cela nous arrive spontanément, et malgré nous. De la même manière, si nous sommes « en Christ », tout -ce qui est en Christ est à nous par pure grâce, sans aucun effort de notre part, mais sur la base d'une simple foi.
Mais dire que tout ce dont nous avons besoin est à nous en Christ, par pure grâce, bien que ce soit vrai, peut paraître dépourvu de réalisme. Comment cela se fait-il pratiquement? Comment cela devient-il réel dans notre expérience?
En étudiant les chapitres 6, 7 et 8 des Romains, nous allons voir qu'il y a quatre conditions nécessaires à la vie chrétienne normale. Ce sont : a) Savoir, b) Se considérer comme... c) S'offrir à Dieu, d) Marcher selon l'Esprit ; et c'est dans cet ordre qu'elles sont présentées. Si nous voulons vivre cette vie, il nous faudra faire ces quatre pas ; non pas un, ni deux, ni trois seulement, mais tous les quatre. A mesure que nous étudierons chacun d'eux, nous nous confierons au Seigneur, pour qu'Il illumine notre intelligence par Son Saint-Esprit; et nous Lui demandons maintenant Son secours pour faire le premier grand pas.
Notre Mort avec Christ est un Fait Accompli
Le passage qui est devant nous maintenant est Romains 6, 1-11 : « Que dirons-nous donc ? Que nous devons demeurer dans le péché ? Non certes ! Nous qui sommes morts au péché, comment vivrions-nous encore dans le péché ? Ou bien, ignorez-vous que nous tous qui avons été baptisés en Jésus-Christ, nous avons été baptisés en sa mort ? Nous avons donc été ensevelis avec lui par le baptême en sa mort, afin que, comme Christ est ressuscité des morts par la gloire du Père, de même, nous aussi, nous vivions d'une vie nouvelle. Car si nous sommes devenus une même plante avec lui par une mort qui ressemble à la sienne, nous le serons aussi par une résurrection semblable, sachant bien que notre vieil homme a été crucifié avec lui, afin que ce corps de péché soit détruit et que nous ne soyons plus asservis au péché. Car celui qui est mort est libéré du péché. Or si nous sommes morts avec Christ, nous croyons que nous vivrons avec lui, puisque nous savons que Christ, ressuscité des morts, ne meurt plus : la mort n'a plus d'empire sur lui. Car s'il est mort, il est mort pour le péché une fois pour toutes ; mais maintenant qu'il est vivant, il est vivant pour Dieu. Vous donc aussi, considérez-vous comme morts pour le péché et comme vivants pour Dieu en Jésus-Christ ». Dans ces versets, il nous est montré clairement que, dans sa Mort, le Seigneur Jésus a été notre représentant et qu'Il nous y a tous englobés. Dans Sa mort, nous sommes tous morts. Aucun de nous ne saurait progresser spirituellement sans comprendre cela. De même que nous ne pouvons être justifiés, si nous n'avons pas vu qu'Il a porté nos péchés sur la Croix,, ainsi nous ne pourrons réaliser la sanctification, si nous n'avons pas vu qu'Il nous a portés, nous, sur la Croix. Non seulement nos péchés ont été mis sur Lui, mais nous avons, nous-mêmes, été mis en Lui.
Comment avez-vous reçu le pardon ? Vous avez compris que le Seigneur Jésus était mort comme votre Substitut, qu'Il avait pris sur Lui vos péchés, et que Son Sang a été versé pour vous laver de votre souillure. Lorsque vous avez vu que tous vos péchés avaient été effacés sur la Croix, qu'avez-vous fait ? Avez-vous dit : « Seigneur Jésus, je Te prie, viens mourir pour mes péchés » ? Non, vous ne Lui avez rien demandé ; vous avez simplement remercié le Seigneur. Vous ne L'avez pas supplié de venir mourir pour vous, car vous aviez compris qu'Il l'avait déjà fait.
Or, ce qui est vrai de votre pardon est vrai aussi de votre délivrance. L'oeuvre est accomplie. Il ne s'agit plus de demander, mais seulement de louer. Dieu nous a tous mis en Christ, de sorte que, lorsque Christ a été crucifié, nous avons été crucifiés, nous aussi. Nous n'avons donc plus besoin de demander : « Moi qui suis une créature si mauvaise, Seigneur, je Te prie, crucifie-moi ». Ce serait faux. Vous n'avez pas prié au sujet de vos péchés ; pourquoi prier maintenant au sujet de vous-même ? La question de vos péchés a été réglée par Son Sang, et celle de votre nature a été réglée par Sa Croix. C'est un fait accompli. Tout ce qui vous reste à faire, c'est de louer le Seigneur de ce que, quand Christ est mort, vous êtes mort, vous aussi ; vous êtes mort en Lui. Louez-le pour cela, et vivez à cette lumière ! « Et ils crurent à ses paroles, ils chantèrent ses louanges » (Psaume 106, 12).
Croyez-vous en la mort de Christ ? Naturellement, vous y croyez. Eh ! bien, cette même Écriture qui dit qu'Il est mort pour nous, dit aussi que nous sommes morts avec Lui. Relisons encore : « Christ est mort pour nous » (Romains 5, 8). C'est la première déclaration, et elle est bien nette ; mais les suivantes, le seraient-elles moins ? « Notre vieil homme a été crucifié avec Christ » (Romains 6, 6). « Nous sommes morts avec Christ » (Romains 6, 8).
Quand avons-nous été crucifiés avec Lui ? Quelle est la date de la crucifixion de notre vieil homme ? Sera-ce demain ? Était-ce hier ? Ou aujourd'hui ? Pour répondre à cette question, il nous sera peut-être utile de renverser les termes de la déclaration de Paul et de dire : « Christ a été crucifié avec - c'est-à-dire, en même temps que, - notre vieil homme ». Quelques-uns d'entre vous, vous êtes arrivés ici à deux. Vous avez fait le chemin ensemble, jusqu'ici. Vous pouvez dire, - « Mon ami est venu ici avec moi » -, mais vous pouvez dire tout aussi exactement, - « Je suis venu ici avec mon ami ». Si l'un de vous était arrivé ici il y a trois jours, et l'autre aujourd'hui seulement, vous ne pourriez pas parler ainsi ; mais puisque vous êtes arrivés ensemble, vous pouvez exprimer ce fait. d'une manière ou de l'autre, avec une vérité égale, puisqu'il s'agit du même fait. De même aussi, au sujet du grand événement historique, nous pouvons dire, avec un plein respect, mais avec la même exactitude, - « J'ai été crucifié lorsque Christ a été crucifié » -, ou bien, - « Christ a été crucifié quand j'ai été crucifié » -, car ce ne sont pas deux événements séparés dans l'histoire, mais un seul. Ma crucifixion a eu lieu « avec Lui » *. Christ a-t-Il été crucifié ? Alors, peut-il en être autrement de moi ? Et s'Il a été crucifié il y a près de deux mille ans, et moi avec Lui, puis-je dire que ma crucifixion aura lieu demain ? La Sienne peut-elle être dans le passé, tandis que la mienne serait dans le présent ou le futur ? Que le Seigneur soit loué ! Lorsqu'Il mourut sur la Croix, je suis mort avec Lui. Non seulement Il mourut à ma place, mais Il m'a porté avec Lui à la Croix, de sorte que, lorsqu'Il mourut, je mourus aussi. Et si je crois à la mort du Seigneur Jésus, je puis croire à ma propre mort avec autant de certitude que je crois à la Sienne.
* L'expression « avec Christ a dans Romains 6, 6 a un sens doctrinal aussi bien qu'un sens historique - ou temporel. Ce n'est évidemment que sous ce dernier rapport qu'il nous est permis de renverser, les termes. - W.N.
Pourquoi croyez-vous que le Seigneur est mort ? Sur quoi fondez-vous cette foi ? Est-ce parce que vous sentez qu'Il est mort ? Non, vous ne l'avez jamais senti. Vous le croyez parce que la Parole de Dieu vous le dit. Lorsque le Seigneur a été crucifié, deux brigands ont été crucifiés en même temps que Lui. Vous ne doutez pas non plus qu'ils aient été crucifiés avec Lui, parce que les Écritures le disent clairement.
Vous croyez à la mort du Seigneur Jésus, et vous croyez à la mort des deux brigands avec Lui. Alors, qu'en est-il de votre propre mort ? Votre crucifixion est plus intimement liée à la Sienne que la leur. Ils ont été crucifiés en même temps que le Seigneur, mais sur des croix différentes, tandis que vous avez été crucifié avec Lui sur la même croix car vous étiez en Lui lorsqu'Il est mort. Comment pouvez-vous le savoir ? Vous pouvez le savoir parce que Dieu l'a dit, et que c'est une raison suffisante. Cela ne dépend point de vos sentiments. Si vous sentez que Christ est mort, Il est mort ; et si vous ne sentez pas qu'Il est mort, Il est mort. Si vous sentez que vous êtes morts, vous êtes mort ; et si vous ne sentez pas que vous soyez mort, vous êtes cependant, et tout aussi sûrement, mort. Ce sont des faits d'ordre divin. Que Christ soit mort, c'est un fait ; que les deux brigands soient morts, c'est un fait, et que vous soyez mort, c'est un fait aussi. Laissez-moi vous le dire, - Vous êtes mort ! C'en est fait de vous-même ! Vous avez été mis de côté. Ce moi dont vous avez horreur est sur la Croix en Christ. Et « celui qui est mort est libéré du péché » (Romains 6, 7). C'est cela l'Évangile pour les chrétiens.
Nous n'arriverons jamais à réaliser notre crucifixion par notre volonté ni par nos efforts, mais seulement en acceptant (recevant) ce que le Seigneur Jésus a fait sur la Croix. Il faut que nos yeux soient ouverts sur l'oeuvre accomplie au Calvaire. Peut-être quelques-uns d'entre vous, avant votre conversion, avez-vous essayé d'arriver au salut par vous-mêmes. Vous lisiez la Bible, vous priiez, vous alliez à l'église, vous faisiez des aumônes. Puis, un jour, vos yeux se sont ouverts, et vous avez vu qu'un salut parfait avait déjà été acquis pour vous sur la Croix. Vous l'avez simplement accepté* et vous avez remercié Dieu, et la paix et la joie ont inondé votre coeur.
*(Le terme approprié ici est "recevoir" et non "accepter"; il existe toute une marge de différence entre les deux mots, ex : on peut recevoir un coup, mais cela ne signifie pas qu’on l’a accepter. Le mot "accepter" implique un choix, un effort de l’individuel, tandis que "recevoir » implique l’inaction et donc la souveraineté de Dieu. Ceux qui acceptent Christ font de la foi une faculté intellectuelle et du salut, un salut par les œuvres et montrent par ce fait qu’ils ne connaissent pas la grâce et qu’ils en sont séparé.)
Or, le salut et la sanctification reposent exactement sur la même base. Vous recevez la délivrance du péché de la même manière que vous recevez le pardon des péchés.
Car les voies de Dieu, pour nous délivrer du péché, sont entièrement différentes des voies de l'homme. La voie de l'homme consiste à supprimer le péché en cherchant à le vaincre ; la voie de Dieu consiste à mettre de côté le pécheur. Beaucoup de chrétiens se lamentent sur leur faiblesse, pensant que, s'ils étaient plus forts, tout serait bien. L'idée que nous ne pouvons pas vivre une vie sainte à cause de notre faiblesse, et que quelque chose de plus nous est demandé, conduit tout naturellement à cette fausse conception du moyen de délivrance. Si nous sommes préoccupés par la puissance du péché et par notre incapacité à la surmonter, nous en concluons naturellement que, pour remporter la victoire sur le péché, il nous faut avoir plus de force. « Si seulement j'étais plus fort », disons-nous, « je pourrais surmonter mes violents accès de colère », - et nous demandons au Seigneur de nous fortifier, afin que nous puissions contrôler nos réactions.
Mais cela est une grave erreur ; ce n'est pas le christianisme. Les moyens par lesquels Dieu nous délivre du péché ne consistent pas à nous rendre de plus en plus forts, mais à nous rendre de plus en plus faibles. C'est sûrement une manière plutôt singulière de nous amener à la victoire, direz-vous ; mais c'est le chemin de Dieu. Dieu nous affranchit du pouvoir du péché, non pas en fortifiant notre vieil homme, mais en le crucifiant- ; non pas en l'aidant à arriver à quelque chose, mais en le mettant hors d'action.
Vous avez peut-être essayé, durant des années, mais en vain, d'exercer un contrôle sur vous-même, et peut-être estce encore votre expérience aujourd'hui; mais le jour où vous verrez la vérité, vous reconnaîtrez que vous êtes totalement impuissant pour arriver au résultat désiré, mais aussi que Dieu, en vous mettant de côté, a tout accompli. Une telle révélation met fin à tout effort humain et personnel.
Le Premier Pas : «Sachant bien Que... »
La vie chrétienne normale doit commencer par « savoir » de façon nette et précise, et non par avoir simplement une certaine connaissance de la vérité ou la compréhension d'une importante doctrine. Il ne s'agit pas d'une connaissance intellectuelle, mais il faut que les yeux de notre coeur s'ouvrent pour voir ce que nous avons en Christ.
Comment savez-vous que vos péchés sont pardonnés ? Est-ce parce que votre pasteur vous l'a dit ? Non, vous le savez tout simplement. Si je vous demande comment vous le savez, vous me répondrez simplement : « Je le sais ! » Une telle connaissance nous est donnée par une révélation divine. Elle nous vient du Seigneur Lui-même. Sans doute, le fait du pardon des péchés se trouve dans la Bible, mais pour que la Parole écrite de Dieu devienne pour vous une parole vivante de Dieu, il a fallu qu'Il vous donne « un esprit de sagesse et de révélation qui vous apprenne à le connaître » (Ephésiens 1, 17). Ce dont vous aviez besoin, c'était de connaître Christ de cette manière, et il en est toujours ainsi. Il arrive toujours un moment, à l'égard de toute nouvelle, et plus profonde, connaissance de Christ, où nous la recevons dans notre propre coeur, où nous la « voyons » dans notre esprit. Une lumière a lui dans votre être intérieur, et vous êtes pleinement convaincu de la réalité. Ce qui est vrai du pardon de vos péchés n'est pas moins vrai de votre délivrance du péché. Une fois que la lumière de Dieu a jailli dans votre coeur, vous vous voyez vous-même en Christ. Ce n'est pas parce que quelqu'un vous l'a dit, ni simplement parce que Romains 6 le dit. C'est quelque chose de plus que cela. Vous le savez parce que Dieu vous l'a révélé par Son Esprit. Vous pouvez ne pas le sentir ; vous pouvez ne pas le comprendre, mais vous le savez, car vous l'avez vu. Une fois que vous vous êtes vu, vous-même, en Christ, rien ne peut ébranler votre assurance de cette réalité bénie.
Si vous demandez à plusieurs croyants qui sont entrés dans la vie chrétienne normale de vous raconter les expériences qui les y ont amenés, les uns parleront d'une expérience spéciale, les autres d'une autre. Chacun retracera le chemin particulier par lequel il a été conduit et citera un passage des Écritures pour souligner sa propre expérience, et malheureusement, beaucoup de chrétiens s'appuient sur leur expérience personnelle et sur leurs passages favoris pour lutter contre d'autres chrétiens. Le fait est que, si les chrétiens peuvent entrer dans une vie chrétienne plus profonde par des chemins différents, nous ne devons pas considérer les expériences ou les doctrines* qu'ils soulignent comme s'excluant mutuellement, mais plutôt comme se complétant.
*(Cela ne signifie pas que les doctrines ne sont pas importantes, car toutes fausses doctrines amènent sur un chemin différent que celui de la vérité.)
Une chose est certaine, c'est que toute expérience véritable et précieuse aux yeux de Dieu doit naître d'une nouvelle découverte de la signification de la Personne et de l'oeuvre du Seigneur Jésus. C'est un critère sûr.
Or, ici, dans notre passage, l'apôtre fait dépendre toutes choses d'une telle découverte. « Sachant bien que notre vieil homme a été crucifié avec lui, afin que ce corps de péché soit détruit et que nous ne soyons plus asservis au péché » (Romains 6, 6).
La
Révélation Divine est la Base Essentielle
Le premier pas que nous aurons donc à faire sera de chercher auprès de Dieu une connaissance donnée par révélation - c'est-à-dire, non pas une révélation de nous-mêmes, mais de l'œuvre parfaite du Seigneur Jésus-Christ sur la Croix. C'est de cette manière que Hudson Taylor, le fondateur de la Mission Intérieure en Chine, découvrit la vie chrétienne normale. Vous vous souvenez comment il nous parle du problème qui le tourmentait depuis longtemps, - comment vivre « en Christ », comment tirer du Cep la sève pour qu'elle vive en lui. Car il savait qu'il devait avoir en lui la vie de Christ pour qu'elle paraisse à travers lui, et il sentait qu'il ne la possédait pas, tout en voyant qu'il avait besoin d'être en Christ. « Je savais », écrivait-il à sa soeur en 1869 de Chinkiang, « que si je pouvais seulement demeurer en Christ, tout irait bien, mais je ne pouvais pas ».
Plus il s'efforçait d'y parvenir, plus il s'en éloignait, jusqu'au jour où la lumière jaillit ; la révélation se fit, et il vit.
Il cite ensuite les paroles d'un ami qui l'avait aidé:
C'était comme si quelque chose, qui avait toujours été vrai, devenait soudain vrai de manière nouvelle et pour lui personnellement, et il écrivait encore à sa soeur:
Oh ! c'est immense de voir que nous sommes en Christ ! Imaginez combien il serait bizarre de chercher à entrer dans une pièce où l'on se trouve déjà ! Pensez combien il serait absurde de demander à y être introduit ! Si nous reconnaissons le fait que nous sommes dedans, nous ne ferons aucun effort pour entrer. Si nous avions une révélation plus profonde, nos prières seraient plutôt des louanges que des requêtes. Nous demandons beaucoup pour nous-mêmes, parce que nous sommes aveugles à l'égard de ce que Dieu a accompli.
Je me souviens d'un entretien que j'eus un jour à Shanghaï avec un frère très préoccupé de son état spirituel. Il me dit, - « Il y a tant de chrétiens qui ont une vie belle et sainte. J'ai honte de moi-même. Je porte le nom de chrétien, et cependant lorsque je me compare aux autres, je sens que je ne le suis pas du tout. J'aimerais connaître cette vie crucifiée, cette vie de résurrection, mais je ne la connais pas et ne vois aucun moyen d'y parvenir ». Il y avait encore un autre frère avec nous et, tous les deux, nous nous étions entretenus durant près de deux heures avec cet homme, en essayant de lui faire voir qu'il ne pouvait rien posséder en dehors de Christ, mais en vain. Notre ami dit, « La meilleure des choses que puisse faire un homme, c'est de prier ». - « Mais, si Dieu vous a déjà tout donné, qu'avez-vous encore besoin de demander ? » - lui répondîmes-nous. -- « Mais Il ne m'a pas tout donné », répliqua l'homme, «puisque je continue à me mettre en colère et à commettre toute sorte de fautes ; c'est pourquoi il faut que je prie davantage ». - Nous lui dîmes : « Eh bien, est-ce que vous recevez ce que vous demandez ? » - « Je regrette de dire que je ne reçois rien du tout », répliqua-t-il. Nous nous sommes alors efforcés de lui montrer que, de même qu'il n'avait rien fait pour sa justification, il n'avait rien à faire non plus pour sa sanctification.
* Les citations sont tirées de « Hudson Taylor et la Mission Intérieure en Chine », par le Docteur et Madame Howard Taylor, chapitre 12, « La Vie changée ». Il faudrait lire tout le passage. - Ed.
A ce moment-là, un troisième frère dont le Seigneur s'était servi beaucoup, vint se joindre à nous. Il y avait sur la table une bouteille thermos ; le frère la prit et demanda : « Qu'est ceci ? » - « Une bouteille thermos ».
- « Bien. Supposez un instant que cette bouteille puisse prier, et qu'elle se mette à demander : « Seigneur, j'aimerais tant être une bouteille thermos. Ne veux-tu pas faire de moi une bouteille thermos ? Seigneur, fais-moi la grâce de devenir une bouteille thermos. Fais-le, je t'en prie ! » Qu'en diriez-vous ? » - « Je ne pense pas que même une bouteille thermos puisse être aussi stupide », répliqua notre ami. « Ce serait un non-sens que de demander cela ; elle est une bouteille thermos ! » - « C'est exactement ce que vous faites », lui dit alors notre frère. « Dieu, dans le passé, vous a déjà mis en Christ. Quand Il est mort, vous êtes mort vous aussi ; lorsqu'Il est ressuscité, vous êtes ressuscité.
Vous ne pouvez donc plus dire aujourd'hui, - « Je veux mourir à moi-même ; je veux être crucifié ; je veux avoir la vie de résurrection », - le Seigneur vous regarde et vous dit simplement, - « Tu es mort ! Tu as la vie nouvelle ! » - « Toute votre façon de prier est aussi absurde que celle de la bouteille thermos. Vous n'avez plus besoin de demander au Seigneur de faire quelque chose pour vous ; vous avez simplement besoin que vos yeux s'ouvrent pour voir qu'Il a tout accompli. »
C'est là le point essentiel. Nous n'avons pas besoin de faire des efforts pour mourir, nous n'avons pas besoin d'attendre nôtre mort, nous sommes morts. Nous n'avons besoin que de reconnaître ce que le Seigneur a déjà fait, et de Le louer pour cela. La lumière jaillit en cet homme, et les larmes aux yeux, il dit : « Seigneur, je Te loue de ce que Tu m'as déjà mis en Christ. Tout ce qui est à Lui est à moi ! » La révélation était venue, et par la foi, il put s'en saisir ; et, si vous aviez rencontré ce frère plus tard, quel changement vous auriez trouvé en lui !
La Croix va à la Racine de notre Problème
Laissez-moi vous rappeler encore la nature fondamentale de l'oeuvre accomplie par le Seigneur sur la Croix. Je sens que l'on ne peut trop insister sur ce point, car il faut que nous le voyions.
Supposons, par exemple, que le gouvernement de votre pays veuille traiter radicalement la question des boissons fortes, et décide l'établissement du régime « sec » dans tout le pays, - comment cette décision pourra-t-elle être appliquée pratiquement ? Quelle aide pourrions-nous apporter ? Si nous allions chercher, dans tout le pays, dans tous les débits et les magasins, toutes les bouteilles de vin, de bière, ou de liqueurs, pour les prendre et les briser, cela résoudrait-il le problème ? Certainement pas. Nous pourrions débarrasser le pays de chaque goutte d'alcool qui s'y trouve, mais derrière ces bouteilles de boissons alcooliques, il y a les distilleries qui les fabriquent, et les brasseries et les caves qui les procurent, et si nous ne touchons qu'aux bouteilles en laissant de côté les sources de fabrication, la production continuera, et il n'y aura pas de solution définitive à ce problème. Les maisons qui les produisent, les brasseries et les distilleries doivent être fermées dans tout le pays, pour mettre fin une fois pour toutes à ce problème de l'alcoolisme*.
*Qui est alcoolique sinon celui qui a des problèmes avec l'alcool, qu'il en prenne ou non. Or, craignons de ne pas tomber ici dans un légalisme rigide car l’alcool n’est pas interdit par la Bible, Jésus lui-même buvait du vin, il ne faut simplement pas abuser de notre liberté en Christ.
Nous sommes la fabrique; nos actions sont les produits. Le Sang du Seigneur Jésus a réglé la question des produits, c'est-à-dire de nos péchés. La question de ce que nous avons fait est ainsi réglée, mais Dieu se serait-Il arrêté là ? Qu'en est-il de la question de ce que nous sommes ? C'est nous qui avons produit nos péchés. Ils ont été mis de côté, mais qu'en sera-t-il de nous ? Croyez-vous que le Seigneur veuille nous purifier de tous nos péchés et nous laisser ensuite le soin de nous débarrasser de cette fabrique, que nous sommes, et qui produit les péchés ? Croyez-vous qu'Il veuille mettre de côté les produits en nous laissant la responsabilité de la source de production ?
Poser cette question, c'est y répondre. Dieu n'a pas fait la moitié de l'oeuvre en abandonnant l'autre- moitié. Non, Dieu a fait disparaître les produits, et Il a aussi détruit la source d'où ils provenaient.
L'oeuvre accomplie par Christ est réellement allée jusqu'à la racine de notre problème, et elle l'a résolu. Pour Dieu, il n'y a point de demi-mesures. « Sachant bien », dit Paul, « que notre vieil homme a été crucifié avec lui, afin que ce corps de péché soit détruit et que nous ne soyons plus asservis au péché » (Romains 6, 6). « Sachant cela » ! Oui, mais le savez-vous ? « Ou bien, l'ignorez-vous ? » (Romains 6, 3). Que le Seigneur, dans Sa grâce, nous ouvre les yeux. |