Zoroastre, chef des adorateurs du feu

Zoroastre était le chef des adorateurs du feu. Les détails suivants pourront l'établir. Bien qu'il ne dise pas que le nom de Zoroastre est presque synonyme d'adorateur du feu, le témoignage de Plutarque est d'un grand poids : "Plutarchus agnoscit Zoroastrem apud Chaldaeos Magos instituisse, ad quorum imitationem Persae etiam suos habuerunt (1), Arabica quoque historia, (ab Erpenio edita) tradit Zaradussit non primum instituisse, sed reformasse religionem Persarum et Magorum qui divisi erant in plures sectas." (CLERICUS, liv. I, De Chaldoeis, vol. II, ch 2, art. 1, p. 195). Plutarque reconnaît que Zoroastre institua chez les Chaldéens les mages, à l'imitation des Perses. L'histoire Arabe (éditée par Erpenius) nous raconte aussi que Zaradussit (ou Zerdusht) n'a pas institué, mais seulement réformé la religion des Perses et des mages qui avaient été divisés en plusieurs sectes. Le témoignage d'Agathias tend au même but. Il croit que le culte du feu vint des Chaldéens chez les Perses (liv. II, ch. 25, p. 118-119).

Les mages étaient chez les Perses les gardiens du feu sacré et éternel ; on peut le conclure de Curtius (liv. III, ch. 3, p. 41-42) qui dit que ce feu était porté devant eux sur des autels d'argent ; de Strabon (Géograph., liv. XV, p. 696) qui dit que les mages gardaient sur l'autel une certaine quantité de cendres et de feu éternel ; et de la déclaration d'Hérodote (liv. I, p. 63) qui dit que sans eux, on ne pouvait offrir de sacrifice. Le culte du feu était une partie essentielle du système des mages Persans (WILSON, La religion des Parsis, p. 228, 235). Ils ne

prétendaient pas avoir inventé ce culte du feu ; mais leur histoire populaire en fait remonter l'origine jusqu'aux jours de Hoshang père de Thamurs, qui fonda Babylone (WILSON, p. 202-203 et 579), c'est-à-dire aux jours de Nemrod. Pour le confirmer nous avons un fragment d'Apollodore (MULLER, 68) qui fait de 450

Ninus le chef des adorateurs du feu. Layard, citant ce fragment, suppose que Ninus est distinct de Zoroastre (Ninive et ses ruines, vol. II, p. 443, note), mais, on peut le prouver, bien que beaucoup d'autres aient porté le nom de Zoroastre, les lignes d'évidence convergent toutes de manière à démontrer que Ninus, Nemrod et Zoroastre étaient la même personne. Les légendes de Zoroastre montrent qu'il était connu comme mage et comme guerrier (ARNOBE, liv. I, p. 327). Platon nous dit qu'Éros Armenius (d'après CLERICUS, De Chaldoeis, vol. II, p. 495, il serait le même que le 4e Zoroastre) mourut dans une bataille et ressuscita le 10e jour ; ce qu'il prétendait avoir appris dans l'Hadès, il l'enseigna aux hommes dans sa nouvelle vie (PLATON, De Republica, liv. X, vol. II, p. 614). Nous avons vu que la mort de Nemrod, le Zoroastre original, ne fut pas celle d'un guerrier tué au combat ; mais cependant cette légende du guerrier Zoroastre favorise entièrement l'hypothèse qui dit que le Zoroastre original, premier chef des Mages, n'était pas simplement un prêtre, mais un roi guerrier. Partout les Zoroastriens, ou adorateurs du feu, étaient appelés Guèbres ou Gabrs. Or le passage dans Genèse X, 8, prouve que Nemrod fut le premier des Gabrs. Comme Zoroastre était le chef des adorateurs du feu, Tammuz avait évidemment le même caractère. Nous avons déjà assez de preuves qui établissent l'identité de Tammuz et de Nemrod ; mais quelques mots de plus le prouveront plus clairement et jetteront plus de lumière sur le culte primitif du feu.

1° Tout d'abord, Tammuz et Adonis sont la même divinité. Jérôme qui vivait en Palestine à l'époque où les rites de Tammuz étaient observés au temps même où il écrivait, identifie expressément Tammuz et Adonis (vol. II, p. 353) dans son Commentaire sur Ézéchiel VIII, 14, où les femmes Juives, est-il dit, pleuraient sur Tammuz. Le témoignage de Jérôme sur ce sujet est généralement adopté. De plus, les rites de Tammuz ou Adonis en Syrie étaient célébrés comme ceux d'Osiris. La déclaration de Lucien (De Dea Syria, vol. III, p. 454), le montre d'une manière frappante, et Bunsen (vol. I, p. 443), l'admet distinctement. L'identité de Nemrod et Osiris a été largement prouvée dans cet ouvrage. Quand donc Tammuz ou Adonis est identifié avec Osiris, l'identité de Tammuz s'ensuit tout naturellement. Et dès lors ceci s'accorde entièrement avec le langage de Bion, dans sa lamentation sur Adonis, alors qu'il représente Vénus s'abandonnant à un accès de douleur, comme une Bacchante après la mort d'Adonis, à travers bois et vallées, et appelant à elle son mari Assyrien (BION, Idylle, Id. I, v. 24 dans Poetoe Minores Groeci, p.

304). Cela s'accorde aussi avec la déclaration de Maimonide : lorsque Tammuz fut mis à mort, il eut sur cette une grande scène dans le temple de Babylone (p. 97).

2° Si Tammuz et Nemrod ne font qu'un, le sens de ce mot confirme la relation de Nemrod avec le premier culte du feu. Après ce que nous avons déjà avancé, nul besoin d'argument pour montrer que comme les Chaldéens furent les premiers à introduire le nom et la puissance des rois (SYNCELLUS, vol. I,p. 169) et comme Nemrod fut évidemment le premier de ces rois et le premier par conséquent à porter le titre de Moloch, ce fut en son honneur que les enfants passaient à travers le feu de Moloch. Mais cette action avait incontestablement pour but de purifier. Le nom de Tammuz se rapporte évidemment à cette intention, car il signifie rendre parfait, soit purifier par le feu (2) ; et si Nemrod était, comme le représentent la Chronique Paschale (vol. I, p. 50-51) et la voix générale de l'antiquité le créateur du culte du feu, ce nom même désigne exactement son caractère. Il est évident, toutefois, d'après le vers de Zoroastre cité que le feu lui-même était adoré, comme Tammuz, car il est appelé le Père qui a tout accompli. En un sens, ce nom se rapportait à l'accomplissement des hommes par la purification. Il rendait parfait ceux qu'il consumait. C'est la même idée qui depuis un temps immémorial jusqu'à ces derniers jours, amenait en Inde tant de veuves à s'immoler sur le bûcher funéraire de leur mari ; la femme qui se brûlait ainsi était réputée bienheureuse, parce qu'elle devenait Suttee, c'est-à-dire pure par le feu (3). Cela réconciliait sans doute avec ce cruel sacrifice les parents qui faisaient passer leurs enfants par le feu, car on croyait que ce feu qui les consumait les rendait aussi parfaits, et propres au bonheur éternel. Comme le double fait de passer dans le feu et de brûler dans le feu faisait partie des rites essentiels du culte de Moloch ou de Nemrod, c'est là une preuve que Nemrod était le même Tammuz. Comme prêtre et représentant du feu qui purifie qui accomplit, c'est lui qui remplissait les fonctions de rendre parfait ou de purifier par le feu, et c'est ainsi qu'il empruntait son nom à cette purification même, Si nous parcourons les légendes de l'Inde, nous trouvons là une preuve aussi concluante que celle que nous avons à propos de Zoroastre et de Tammuz, chefs des adorateurs du feu. La cinquième tête de Brahma qui fut coupée pour avoir épouvanté les trois mondes par l'éclat de ses rayons éblouissants s'identifie elle-même avec Nemrod. Cette cinquième tête étant représentée comme ayant lu les Védas ou les livres sacrés produit par les quatre autres têtes, montre, je crois, une succession (4).

Or venant de Noé, que serait cette succession ? Nous avons dans Berose la preuve que déjà aux jours de Bélus, ou Nemrod, on faisait des images à deux têtes comme celle de Janus. Supposons donc que Noé, qui avait vécu dans deux mondes, avait deux têtes. Ham est la troisième, Cush la quatrième, et Nemrod est naturellement la cinquième. Et celle-ci fut coupée parce qu'elle avait accompli la même action qui causa la mort de Nemrod Je soupçonne ce mythe Hindou d'être la clef qui explique un passage de Plutarque qui semble à première vue absurde. Le voici : "Plutarque, dans le Livre IV des Symposiaca quest. 5, vol. II, p. 670, B, dit que les Égyptiens croyaient que la nuit a précédé la lumière, et que celle-ci a été produite par des souris, à la 4e génération, à l'époque de la nouvelle lune." Dans l'Inde, nous voyons que la nouvelle lune était produite différemment du sens ordinaire de cette expression, et que la production de cette nouvelle lune était non seulement importante dans la mythologie Hindoue, mais qu'évidemment elle s'accordait pour l'époque avec le temps où la cinquième tête de Brahma brûla le monde par son insupportable ardeur. Voici comment se fit cette création : les dieux et l'humanité étaient tout à fait mécontents de la lune qu'ils avaient créée, car elle ne donnait aucune lumière, les plantes étaient pauvres et les productions insuffisantes ; aussi agitèrent-ils l'Océan et tout fut mis en confusion. Une nouvelle lune, avec un nouveau surveillant, fut établie, et dès lors régna un système de choses entièrement nouveau (Recherches Asiatiques, vol. IX, p. 98).

D'après les Antiquités Indiennes de Maurice (vol. II, art. 6), à cette même époque de l'agitation de l'Océan, le feu fut allumé sur la terre et il en résulta un embrasement général. Mais le nom de la lune, en Indien Soma, ou Som avec le a final aspiré, se retrouve dans le nom du fameux temple de Somnaut, qui signifie le Seigneur de la lune, la lune étant masculine en Inde. Comme cet événement est symbolique, on se demande naturellement que pouvait signifier la lune ou le surveillant de la lune qui fut rejeté dans la cinquième génération du monde ? Le nom de Som est précisément le nom de Sem car celui-ci vient de Shem, désigner, et il est légitimement représenté par Som ou Sem, comme il l'est en grec : c'était précisément pour se débarrasser de Sem (après la mort de son père ou quand il fut atteint par les infirmités de l'âge), le grand instructeur du monde, soit le grand propagateur de la lumière spirituelle, qu'à la cinquième génération le monde fut jeté dans la confusion et la terre mise à feu. Nous comprenons aisément pourquoi Sem est comparé à la lune si nous considérons la symbolisation de son père Noé. Le chef de la famille est divinement comparé au soleil, comme dans le songe de Joseph (Genèse XXXVII, 9) et on conçoit facilement comment Noé fut regardé par sa postérité en général, comme occupant le premier rang, le rang du soleil dans le monde ; aussi Bryant, Davies, Faber et d'autres s'accordent-ils à reconnaître dans l'astre le symbole de Noé. Cependant quand son fils Sem lui fut substitué (Sem était plus jeune que Joseph), Sem devait naturellement, surtout pour ceux qui ne l'aimaient pas et se révoltèrent contre lui, être comparé à une lumière moins vive, ou à la lune (5). Or, la production de la lumière par les souris à cette époque reculée vient exactement confirmer cette déduction. Une souris en chaldéen est Aakbar ; et Gheber, ou Kheber, en arabe, en turc et dans quelques autres dialectes orientaux, devient Akbar, comme dans le proverbe bien connu des Musulmans : Allah Akbar, Dieu est grand. Ainsi le passage de Plutarque revient à ceci : la lumière fut produite par les Guèbres, ou adorateurs du feu, quand Nemrod fut mis, en opposition avec Shem, comme représentant de Noé, et la grande lumière du monde.

Appendice

Note O, p. 345

456