Conclusion

J'ai maintenant terminé la tâche que je m'étais proposée. Cependant les preuves ne sont pas encore épuisées ; mais avec celles que j'ai fournies, je le demande au lecteur, n'ai-je pas démontré tous les points que je m'étais engagé à prouver ? Si l'on a examiné consciencieusement les raisons que j'apporte, peut-on douter que Rome soit la Babylone de l'Apocalypse ? Osera-t-on nier que, depuis la base jusqu'au sommet, ce ne soit essentiellement un système de paganisme ?

Quelle sera donc ma conclusion pratique ? La voici :

1° Que désormais et pour toujours, chaque chrétien la traite comme étant en dehors du giron du christianisme ! Au lieu de parler de Rome comme d'une église chrétienne, qu'on la considère et qu'on la traite comme le mystère d'iniquité, bien plus, comme la synagogue même de Satan ! Avec une preuve aussi écrasante de son vrai caractère, ce serait une folie, ce serait pis encore, ce serait trahir la cause de Christ que de se tenir simplement sur la défensive, de discuter avec ses prêtres sur la légalité des ordres protestants, la validité des sacrements protestants ou la possibilité d'être sauvé hors de sa communion. Si Rome est maintenant admise à former une portion de l'Église du Christ, quel est le système païen qui ne puisse formuler la même prétention ? Pourquoi exclurait-on "de la république d'Israël" les anciens adorateurs de la madone primitive et de l'enfant d'autrefois, ou les donnerait-on comme étrangers aux alliances de la promesse ? Pourquoi mettrait-on aujourd'hui les adorateurs de Vichnou en dehors des limites d'une si vaste catholicité ? Les anciens Babyloniens avaient autrefois et les Hindous modernes ont encore des traditions claires et distinctes de la trinité, de l'incarnation, de l'expiation ! Et cependant qui osera dire qu'une telle connaissance nominale des principaux articles de la Révélation divine suffise pour enlever à l'un ou à l'autre de ces systèmes la flétrissure méritée par un paganisme si funeste et si injurieux pour la Divinité ? Il en est de même pour Rome Il est vrai qu'elle admet nominalement des expressions chrétiennes et des noms chrétiens ; mais tout ce qui est chrétien en apparence dans son système est plus que neutralisé par le paganisme odieux qu'il renferme. Le pain que la papauté présente à ses sectateurs peut avoir été fait à l'origine avec le grain le plus pur ; mais à quoi cela peut-il servir si chaque atome de ce pain est mêlé à de l'acide prussique ou à de la strychnine ? L'excellence du pain peut-elle détruire le virus ? Peut-il y avoir autre chose que la mort, la mort spirituelle et éternelle, pour ceux qui continuent à se nourrir de la substance empoisonnée qu'elle nous présente ? Oui, voilà la question, et il faut l'envisager courageusement. Peut-on trouver le salut dans une communion où l'on déclare comme un principe fondamental que la madone est notre plus grande espérance, et même le fondement unique de nos espérances ? Le temps est venu où la charité pour les âmes qui périssent aveuglées par un sacerdoce païen qui usurpe le nom de Christ, exige que la vérité sur cette question soit clairement, hautement, résolument proclamée. La bête et l'image de la bête sont maintenant dévoilées à la face de toute la chrétienté, et les menaces terribles de la Parole divine concernant leur culte, trouvent aujourd'hui leur entière application (Apoc. XIV, 9-10) : "Et le troisième ange les suivit disant : si quelqu'un adore la bête et son image, et s'il en prend la marque au front, ou à la main, celui-là aussi boira du vin de la colère de Dieu qui sera versé pur dans la coupe de sa colère, et il sera tourmenté dans le feu et dans le soufre en présence des saints anges et de l'agneau." Ces paroles sont d'une solonnelle importance ; malheur à celui qui sera enfin reconnu coupable du crime qu'elles désignent ! Comme Elliott l'a déjà admis, elles contiennent une prophétie chronologique, une prophétie qui ne se rapporte pas aux époques de ténèbres, mais à une époque qui n'est pas loin de la consommation, alors que l'Évangile sera largement répandu, et qu'une vive lumière sera jetée sur le caractère et la destinée de l'Église Romaine. Elles viennent, dans la chronologie divine des événements, immédiatement après cette proclamation faite par l'ange : "Babylone est tombée, elle est tombée !" Nous avons pour ainsi dire entendu de nos propres oreilles cette prédiction de la chute de Babylone faite des hauteurs de Rome elle-même, lorsque les sept collines de la ville éternelle furent éclairées par les coups de fusil qui proclamaient aux citoyens de la république romaine et au monde entier que la papauté avait perdu de facto et jure, son pouvoir temporel (1).

Or, dans l'ordre de la prophétie, cette formidable menace suit immédiatement la chute de Babylone. Peut-on douter dès lors que cette menace s'applique spécialement et particulièrement aux temps actuels ? Jamais la nature de la papauté ne s'était encore entièrement révèle ; jamais l'image de la bête n'avait été exposée à l'adoration. Jusque-là, jusqu'au jour où le décret blasphématoire de l'Immaculée Conception fut promulgué, jamais, même à Rome, on n'avait vu une pareille apostasie ; mais il ne s'était commis aucun péché semblable à celui qu'on voit maintenant à la porte de la grande Babylone. C'est donc un sujet de la plus grande importance pour quiconque vit dans l'Église de Rome, pour quiconque aussi tourne ses regards, comme tant de personnes le font aujourd'hui, vers la cité aux sept collines. Si quelqu'un peut prouver que le pape ne prend pas toutes les prérogatives et ne porte pas en substance tous les titres blasphématoires de cette bête Babylonienne qui fut blessée par l'épée et qui vivait cependant ; si on peut montrer que la madone qui a été dernièrement élevée d'un consentement unanime, n'est pas dans tous ses points essentiels la même que l'image chaldéenne de 1a bête, alors on peut mépriser la menace contenue dans ces paroles. Mais si on ne peut prouver ni l'un ni l'autre (et je défie sur ces deux points l'examen le plus minutieux), alors tous ceux qui se trouvent dans le sein de la papauté doivent trembler devant une pareille menace. Puisse donc aujourd'hui plus que jamais la voix divine, puisse la voix du plus tendre amour se faire entendre du trône éternel à chaque disciple de la Babylone mystique : "Sortez du milieu d'elle, mon peuple, afin de ne point participer à ses péchés, et de ne point être frappé de ses plaies !"

2° Mais si le crime et le danger sont si grands de ceux qui adhèrent à l'Église Romaine et qui croient qu'elle est la seule Église où l'on puisse trouver le salut, quel ne doit pas être le crime de ceux qui, professant le protestantisme, soutiennent néanmoins la Babylone moderne ! La constitution anglaise ordonne à la Reine de jurer avant qu'on ne lui ait mis la couronne sur la tête, avant qu'elle ne puisse s'asseoir sur le trône, qu'elle croit que les doctrines essentielles de Rome sont idolâtres. Toutes les églises de la Grande-Bretagne, dotées ou non dotées, font d'une voix unanime la même déclaration. Toutes proclament que le système de Rome est un système d'idolâtrie blasphématoire. Et cependant les membres de ces églises soutiennent avec l'argent protestant les écoles, les collèges, les chapelains de ce système idolâtre ! Si le péché des Romains est grand, le péché des protestants qui soutiennent un pareil système doit être dix fois plus grand.

Ce péché s'est aggravé d'une manière considérable pendant ces trois ou quatre dernières années. Tandis que le roi d'Italie dans les états même de l'église (qui étaient naguère les états du pape) a supprimé les monastères (et dans l'espace de deux ans il n'en a pas été supprimé moins de cinquante-quatre et leurs biens ont été confisqués), le gouvernement anglais a suivi une tactique entièrement différente ; non seulement il a contribué à l'érection de quelques monastères, qui sont interdits par la loi du pays, mais il a donné des dotations à ces institutions illégales, sous le nom de réformatoires. Il y a fort peu de temps qu'il fut déclaré sous l'autorité du Directoire Catholique que, dans l'espace de trois années, cinquante-deux nouveaux couvents avaient été ajoutés au système monastique de la Grande-Bretagne, presque le nombre de ceux qu'on a confisqués en Italie. Et cependant des chrétiens, des églises chrétiennes regardent tout cela avec indifférence ! Or, si jamais il y a eu une excuse pour traiter légèrement ce péché contracté par le support national de l'idolâtrie, cette excuse n'a plus aucune valeur. Le Dieu de la Providence a démontré dans l'Inde qu'il est aussi le Dieu de la Révélation (2). Il a prouvé à un monde frappé de terreur, par des événements qui faisaient tinter les oreilles, que toutes les paroles de colère écrites il y a trois mille ans contre l'idolâtrie sont encore aujourd'hui en vigueur autant qu'à l'époque où il désolait le pays de l'alliance à cause de ses idoles, et où il vendait son peuple à ses ennemis. Si les hommes commencent à voir qu'il est dangereux pour ceux qui professent le christianisme de soutenir dans l'Inde l'idolâtrie païenne, il faut qu'ils soient aveugles s'ils ne voient pas en même temps qu'il est tout aussi dangereux de soutenir l'idolâtrie païenne de Rome, En quoi le paganisme de Rome diffère-t-il de celui de l'Hindou ? Seulement en ceci, c'est que le paganisme romain est le plus complet, le plus dangereux !

Je crains, après tout ce que j'ai dit, que plusieurs chrétiens ne se révoltent à la comparaison que je viens de faire entre la papauté et le paganisme déclaré. Qu'on me permette donc de confirmer mon opinion par les témoignages de deux écrivains distingués, bien qualifiés pour trancher la question. Ils montreront au moins que je ne suis pas seul de mon avis. Ces écrivains sont Sir George Sinclair d'Ulbster, et le Dr. Bonar de Kelso. Peu d'hommes ont étudié le système de Rome plus complètement que Sir George, et dans ses "Lettres aux protestants d'Écosse", il a mis en oeuvre toute la fécondité de son style, et les ressources de son esprit hautement cultivé pour travailler à élucider son sujet. Or, voici son témoignage : le romanisme est un système perfectionné de paganisme christianisé, et il diffère entièrement de son prototype en ce qu'il est plus perfide, plus cruel, plus dangereux, plus intolérant. L'opinion du Dr. Bonar est absolument la même, et il l'expose en ayant particulièrement en vue le massacre de Cawnpore : "Nous faisons pour la papauté chez nous, dit-il, ce que nous avons fait au loin pour les idolâtres, et à la fin les résultats seront les mêmes ; que dis-je ? Ils seront pires ; car la cruauté papale, la soif du sang des innocents, ont été les plus sauvages et les plus impitoyables que la terre ait pu voir. Cawnpore, Delhi et Bareilly, ne sont que de la poussière, comparées aux brutalités diaboliques accomplies par l'inquisition, et par les armées du fanatisme papal (3)." Ce sont là des paroles de vérité et de modération, auxquelles un homme au courant de l'histoire de l'Europe moderne ne peut contredire. Les mépriser dans un temps comme le nôtre serait un grand danger. Ce serait une funeste erreur. Qu'on ne méprise pas ce fait énorme, que tandis que l'histoire apocalyptique se précipite vers la consommation de toutes choses, dans cette lumière divine, tous les autres paganismes du monde sont en un sens jetés dans l'ombre par le paganisme de la Rome papale.

C'est contre la Babylone assise sur sept collines que les Saints sont mis en garde ; c'est à cause du culte de la bête et de son image que les coupes, et de la colère du Dieuqui vit et demeure éternellement, sont destinées à être versées sur les nations. Or, si la voix de Dieu s'est fait entendre récemment dans les calamités de l'Inde, le protestantisme de la Grande-Bretagne se lèvera pour balayer, une fois pour toutes, tout le support national de l'idolâtrie de l'Hindoustani et de l'idolâtrie Romaine encore plus funeste. Alors, il y aurait vraiment pour nous accroissement de tranquillité, alors on pourrait espérer que la Grande-Bretagne serait élevée, et que son pouvoir serait établi sur une base ferme et solide. Mais si nous n'entendons pas la voix, si nous ne recevons pas la correction, si nous refusons de nous convertir, "si nous persistons à maintenir, aux frais de la nation, cette image de jalousie provoquant à la jalousie", alors après les coups répétés et redoublés dont la justice de Dieu nous a frappés, nous avons toute raison de craindre que les calamités tombées si cruellement sur nos compatriotes de l'Inde, ne tombent encore plus cruellement sur nous, dans les limites de notre patrie ; car ce fut le jour où l'image de jalousie fut élevée à Jérusalem par les anciens de Juda que le Seigneur dit : "C'est pourquoi je me mettrai en colère, mon oeil n'épargnera point, et je n'aurai point de pitié ; et quand ils crieraient à mes oreilles avec de grands cris, je ne les écouterai pas !" Celui qui a envoyé les Sepoys, dont nous avons tant encouragé les sentiments idolâtres et les tendances anti-sociales, pour nous punir de l'hommage que nous avions rendu à leur idolâtrie, peut tout aussi aisément lâcher sur nous le pouvoir papal pour tirer vengeance de nos criminelles bassesses devant la papauté !

3° Mais il y a plus ; si les affirmations émises dans ce livres sont justes, il est temps que l'église de Dieu se lève. Y a-t-il encore des témoins à immoler, et l'image de la bêtea-t-elle été élevée seulement depuis ces deux ou trois dernières années, elle qui a provoqué l'effusion de tout le sang ? Dès lors, serait-ce le moment d'être indifférent, indolent, tiède en matière de religion ? Hélas ! Qu'ils sont peu nombreux ceux qui font entendre leur voix comme une trompette, qui sonnent l'alarme sur la sainte montagne de Dieu, qui déploient l'activité que demande l'importance des événements pour réunir en bataille les armées du Seigneur en vue du conflit qui s'approche ? Les émissaires de Rome ont travaillé jour et nuit, pendant des années, en temps et hors de temps, de toutes les manières possibles, pour avancer la cause de leur maître, et ils ont réussi dans une large mesure. Mais les enfants de lumière se sont laissé bercer dans une trompeuse sécurité ; ils ont fermé les mains, ils se sont endormis aussi profondément que si Rome eût disparu de la surface de la terre, comme si Satan lui-même avait été précipité dans un abîme sans fond, et que l'abîme se fût refermé sur lui pour le tenir prisonnier pendant dix mille années. Combien de temps cet état de chose durera-t-il ? Oh ! Église de Dieu, réveille-toi, réveille-toi ! Ouvre les yeux, et regarde s'il n'y a pas à l'horizon des nuages noirs qui indiquent une tempête prochaine.

Examinez les Écritures par vous-mêmes ! Comparez-les avec les événements de l'histoire, et dites-moi s'il n'y a pas de raison après tout pour soupçonner qu'il y a devant les Saints plus de tristes perspectives que la plupart ne paraissent se l'imaginer. S'il se trouve que les opinions exposées dans ces pages sont scripturaires et bien fondées, elle méritent au moins d'être l'objet d'une recherche attentive et faite dans un esprit de prière. Il n'est jamais aval tageux de s'abstenir de recherches et de s'endormir dan une trompeuse sécurité. Si elles sont vraies, on ne peut être en sûreté que si l'on connaît le danger, et si par toute sorte d'activité, de zèle, d'exercice spirituel on se prépare à l'affronter. En supposant que des dangers spéciaux nous menacent et que Dieu dans sa parole prophétique nous les ait révélés, sa bonté est manifeste. Il nous a fait connaître le péril afin qu'étant prévenus, nous puissions nous armer ; afin que connaissant notre propre faiblesse, nous puissions nous en remettre à sa grâce toute-puissante ; afin que nous sentions la nécessité d'un nouveau baptême du Saint-Esprit, que fortifiés dans la joue de notre Seigneur, nous soyons pleins d'ardeur pour le Seigneur, et pour le Seigneur seulement ; afin que nous travaillions, chacun dans notre sphère, avec une activité et une énergie croissantes, dans la vigne du Seigneur, afin de sauver toutes les âmes que nous pourrons sauver pendant que cela se peut encore, et avant que n'arrive la sombre nuit annoncée, pendant laquelle nul ne peut travailler. Bien qu'il y ait de tristes perspectives devant nous, il n'y a pas lieu de désespérer, il n'y a pas lieu de dire qu'avec ces perspectives tout effort est inutile. Le Seigneur peut bénir et faire prospérer pour sa gloire les efforts de ceux qui se ceignent pour combattre dans les circonstances les plus désespérées et au moment même où l'ennemi vient comme un déluge, il peut par son esprit élever un étendard contre lui. Et ce n'est pas seulement une chose possible : il y a lieu de croire, d'après la parole prophétique, qu'il en sera réellement ainsi ; que le dernier triomphe de l'homme de péché ne s'achèvera pas sans un combat glorieux pour les disciples fidèles du Christ ! Mais si nous désirons réellement faire quelque chose dans ce but, il importe que nous connaissions et quenous ayons toujours devant les yeux le caractère monstrueux de ce mystère d'iniquité représenté dans la papauté que nous combattons.

La papauté se vante d'être l'ancienne religion ; et en vérité, d'après ce que nous avons vu, il paraît qu'elle est ancienne ! Elle peut faire remonter son origine bien au-delà de l'ère chré-tienne, à 4 000 ans en arrière, près de l'époque du déluge et de la construction de la tour de Babel. Pendant toute cette période, ses éléments essentiels ont été à peu prèsles mêmes, et ces éléments s'adaptent d'une manière particulière à la corruption de la nature humaine. Beaucoup de personnes pensent que la papauté est un système dont il faut simplement rire et se railler ; mais l'esprit de Dieu le caractérise sans cesse d'une manière bien différente. Chaque déclaration de l'Écriture montre qu'il a été décrit avec vérité quand il a été décrit comme étant le chef-d'oeuvre de Satan, comme la perfection de sa politique pour tromper et séduire le monde. Ce n'est pas la ruse des hommes d'État, la sagesse des philosophes, ou les ressources de la science humaine, qui pourraient lutter contre les fourberies et les subtilités de la papauté. Satan, qui en est l'inspirateur, a triomphé bien des fois de ces résistances. Les nations mêmes où le culte de la reine du ciel a fleuri dans tous les âges avec toutes ses abominations, ont été précisément les plus civilisées, les plus policées, les plus distinguées pour les arts et pour les sciences ; Babylone, où il prit naissance, était le berceau de l'astronomie, l'Égypte, qui le nourrit dans son sein, était la mère de tous les arts ; les cités grecques de l'Asie Mineure, où il trouva un refuge lorsqu'il fut chassé de Chaldée, étaient renommées pour leurs poètes et leurs philosophes, parmi lesquels il faut surtout citer Homère ; et les nations du continent européen, où la littérature a été longtemps cultivée, sont maintenant prosternées à ses pieds. La force physique, sans doute, est aujourd'hui employée en sa faveur, mais la question se pose : comment se fait-il que ce système plus que tous les autres ait tellement de prestige qu'il puisse obtenir la force physique pour faire exécuter ses ordres ? Il n'y a qu'une réponse : c'est que Satan, le dieu de ce monde, déploie en sa faveur son plus grand pouvoir La force physique n'a pas toujours été du côté du culte Chaldéen de la reine du ciel : les pouvoirs se sont plus d'une fois armés contre lui ; mais jusqu'ici il a surmonté tous les obstacles, il a triomphé de toutes les difficultés Cyrus et Xerxès, et bien des rois Mèdes-Perses, ont chassé ses prêtres de Babylone, et travaillé à l'arracher de leur empire ; mais il a trouvé une retraite assurée à Pergame, et le siège de Satan fut élevé dans cette ville. La gloire de Pergame et des cités de l'Asie Mineure s'est évanouie ; mais le culte de la reine du ciel n'a point disparu. Il a pris un grand essor, et s'est assis sur le trône même de la Rome impériale. Ce trône fut renversé. Les Goths Ariens vinrent, enflammés de colère, diriger leurs coups contre les adorateurs de la Reine-Vierge : mais ce culte survécut encore à tous les efforts qui voulaient le détruire, et les Goths Ariens eux-mêmes se prosternèrent bientôt aux pieds de la déesse Babylonienne glorieusement assise sur les sept collines de Rome. Dans des temps plus modernes, les pouvoirs temporels de tous les royaumes de l'Europe ont chassé de leur territoire les Jésuites, principaux promoteurs de ce culte idolâtre. La France, l'Espagne, le Portugal, Naples, Rome elle-même ont toutes adopté les mêmes mesures, et cependant que voyons-nous aujourd'hui ? Le même jésuitisme et le culte de la Vierge exaltés presque au-dessus de tous les trônes du continent. Quand nous parcourons l'histoire des 4000 dernières années, quel sens n'ont pas les paroles inspirées : "La venue de l'homme de péché se fait avec l'énergie, avec le pouvoir puissant de Satan." Maintenant est-ce là le système qui, année par année, a ainsi crû en force dans notre pays ? Et peut-on imaginer un moment que es protestants tièdes, temporisateurs, irrésolus, puissent opposer de la résistance à un pareil système ? Non, le moment est venu où il faut répéter dans tout le camp de l'Éternel la proclamation de Gédéon : "Que celui qui est timide et qui a peur s'en retourne et s'éloigne de la montagne de Galaad." Il est écrit des anciens martyrs : "Ils ont vaincu par le sang de l'agneau et par la parole de leur témoignage, et ils n'ont pas aimé leur vie jusqu'à craindre la mort." Le même esprit de renoncement et de résolution est aujourd'hui aussi nécessaire qu'autrefois. N'y ena-t-il pas qui soient prêts à résister, et dans ce même esprit, à se ceindre pour le grand combat qui se prépare avant que Satan ne soit enchaîné et jeté dans sa prison ? Croira-t-on qu'un pareil événement aura lieu sans un effrayant combat ? que le dieu de ce monde consentira paisiblement à abdiquer le pouvoir qu'il a possédé pendant des milliers d'années, sans être enflammé de colère et déployer toute son énergie et son adresse pour prévenir une pareille catastrophe ? Qui donc prendra parti pour le Seigneur ?

S'il en est qui pendant ces dernières années ont été réveillés, ranimés, remués, non par un simple entraînement humain, mais par la grâce toute-puissante de l'Esprit de Dieu, quel est le dessein miséricordieux de ce réveil ? Est-ce seulement de les délivrer eux-mêmes de la colère à venir ? Non ; c'est afin que, zélés pour la gloire de notre Seigneur, ils puissent agir comme de véritables témoins lutter courageusement pour la foi qui a été accordée aux saints, et maintenir l'honneur du Christ contre celui qui a usurpé avec impiété ses prérogatives. Si les serviteurs de l'Antéchrist sont fidèles à leur maître, s'ils travaillent sans se lasser à l'avancement de sa cause, dira-t-on que les serviteurs de Christ sont moins fidèles à leur Maître ? Si personne ne se réveille, certainement ce n'est pas en vain qu'on fera appel aux coeurs généreux des jeunes ministres de Christ, qui entrent au service du Maître avec la bonté de la jeunesse et l'amour de leurs noces, alors que nous leur parlons au nom de celui qui aime leur âme ! Certainement, dans la grande crise de l'église et du monde, ils viendront "aider le Seigneur, oui, aider le Seigneur contre le puissant" ! Ils feront tout ce qui est en leur pouvoir pour fortifier les mains et encourager le coeur de ceux qui cherchent à arrêter le flot de l'apostasie, et à résister aux efforts de ceux qui travaillent avec tant de zèle, et sous la protection orgueilleuse "des puissances actuelles", luttant pour ramener de nouveau ce pays sous le pouvoir de l'Homme de péché. Pour prendre une telle détermination, pour la poursuivre avec force et persévérance, il est indispensable que les chrétiens, en face d'une tiédeur qui se répand partout, déploient la fermeté de l'acier. Mais s'ils le font avec bonne grâce, ce ne sera pas sans avoir à la fin une riche récompense ; et ils ont la promesse ferme et fidèle que "comme est leur jour, ainsi sera leur force".

Tous ceux qui veulent remplir leur mission comme de bons soldats de Jésus-Christ ont les encouragements les plus riches et les plus puissants. Avec le sang de Christ sur la conscience, avec l'Esprit de Christ qui réchauffe le coeur et qui y fait son oeuvre, avec le nom de notre Père sur le front, notre vie aussi bien que nos lèvres rendant un témoignage incessant, nous serons préparés pour tous les événements. Mais pour des temps extraordinaires il ne faut pas des grâces ordinaires. Si nous avons devant nous de pareilles perspectives, comme j'ai cherché à le montrer, nous devons vivre, sentir et agir comme si nous entendions chaque jour résonner à nos oreilles les paroles du grand Capitaine de notre salut : "Celui qui vaincra, je le ferai asseoir sur mon trône, comme moi-même j'ai vaincu et je me suis assis sur le trône avec mon Père. Sois fidèle jusqu'à la mort, et je te donnerai la couronne de vie !"

Enfin, j'en appelle au lecteur de ce livre et je lui demande si ce livre ne contient pas une preuve de la divinité des Écritures aussi bien qu'un exposé des impostures de Rome. Certainement, si dans les pages qui précèdent il y a une chose qu'on puisse prouver mieux qu'une autre, c'est que la Bible n'est pas une fable habilement composée, mais que "les saints hommes de Dieu ont parlé et écrit comme guidés par le Saint-Esprit". Comment expliquer l'unité merveilleuse de tous les systèmes idolâtres du monde, sinon par ceci : c'est que les faits rapportés dans les anciens chapitres de la Genèse étaient des événements véritables concernant toute l'humanité, et que toutes les races humaines en ont conservé dans leurs différents systèmes des souvenirs distincts et incontestables, bien que ceux qui les ont ainsi conservés aient depuis longtemps perdu la vraie clef de leur signification ? Qui donc sinon l'Omniscience aurait pu prévoir qu'un système comme celui de la papauté serait jamais entré dans l'Église chrétienne, pour y agir et s'y développer comme il l'a fait ? Comment serait-il jamais venu à l'esprit de Jean, l'exilé solitaire de Patmos, d'imaginer qu'un des disciples de ce Sauveur qu'il aimait, et qui disait "mon royaume n'est pas de ce monde", réunirait en un système toute l'idolâtrie, la superstition et l'immoralité de 1a Babylone de Belshazzar, l'introduirait dans le sein de l'Église, et par ce moyen s'établirait sur le trône des Césars, et là, en qualité de prêtre de la reine du ciel et de dieu sur la terre, gouvernerait pendant 1 200 ans les nations avec un sceptre de fer ? Les prévisions humaines n'auraient jamais pu aller si loin ; mais l'exilé de Patmos a pu le faire. Sa plume doit donc avoir été guidée par celui "qui voit la fin depuis le commencement et qui appelle les choses qui ne sont point comme si elles étaient". Et si la sagesse de Dieu éclate maintenant d'une manière si resplendissante dans cette expression divine : "la Grande Babylone" où a été condensée une telle richesse de signification, cela ne devrait-il pas nous amener à respecter d'autant plus et à adorer la même sagesse qui est en réalité imprimée à chaque page de la Parole inspirée ? Cela ne devrait-il pas nous conduire à dire comme le Psalmiste : "C'est pourquoi, j'estime que tous tes commandements concernant toutes choses sont justes ?" Les commandements de Dieu peuvent parfois sembler durs à notre nature corrompue et perverse ! Ils peuvent exiger de nous des sacrifices pénibles, nous dire de renoncer à ce qui plaît à la chair et au sang. Mais que nous connaissions ou non la raison de ces commandements, si nous savons seulement qu'ils viennent du "seul Dieu sage, notre Sauveur", nous pouvons être certains "qu'il y a un grand salaire dans leur observation" ; nous pouvons aller aveuglément partout où la parole de Dieu veut nous conduire, et demeurer dans cette ferme conviction qu'en agissant ainsi, nous marchons dans le véritable sentier de la paix et de la sûreté. La sagesse humaine à son plus haut degré n'est qu'un guide impuissant ; la politique humaine est un météore qui éblouit et égare ; et ceux qui la suivent marchent dans les ténèbres et ne savent point où ils vont ; mais celui qui marche avec droiture, qui marche d'après la règle de la Parole infaillible, reconnaîtra toujours qu'il marche sûrement, et quelque devoir qu'il ait à remplir, quelque danger qu'il ait à affronter, il verra "qu'il y a toujours une grande paix pour ceux qui aiment la loi de Dieu, et que rien ne peut leur nuire !"

Appendice

Note A, p. 14

La femme qui tient une coupe d'or

Pausanias (liv. I, Attica, ch. 33, p. 81) parle d'une déesse ayant l'attitude même de la femme de l'Apocalypse. - "De cette pierre (du marbre de Paros), dit-il, Phidias fit une statue de Némésis ; et sur la tête de la déesse, on voit une couronne ornée de cerfs et des images de la victoire d'une grandeur ordinaire. Elle tient à la main gauche une branche de frêne et à la main droite une coupe sur laquelle sont représentés des Éthiopiens." Pausanias se déclare incapable de dire pourquoi les Éthiopiens sont sculptés sur cette coupe, mais si on lit, p. 70, 71, et 74, etc., on verra clairement ce que signifient ces Éthiopiens et ces cerfs. Nous voyons cependant, d'après des passages du même chapitre, que Némésis représentée d'ordinaire comme la déesse de la vengeance, doit cependant avoir été aussi connue sous un caractère tout différent.

Voici ce que dit Pausanias à propos de la statue : "Cette statue de la déesse n'a Pas d'ailes. Chez les Smyrniens, cependant, qui possèdent les très saintes statues de Némésis, je me suis aperçu plus tard que ces statues avaient des ailes. Car, comme cette déesse est surtout la déesse des amoureux, on peut supposer qu'ils ont donné des ailes à Némésis, aussi bien qu'à l'Amour, ou Cupidon." Le fait de donner des ailes à Némésis, la déesse des amoureux, parce que Cupidon lui-même en portait, montre que dans l'opinion de Pausanias, elle était la contrepartie de Cupidon, ou la déesse de l'amour, c'est-à-dire Vénus.

C'est bien là la conclusion qu'il faut tirer des paroles de Pausanias : de plus nous la trouvons confirmée par une déclaration expresse de Photius (Lexique, P. II, p. 482), à propos d'une statue de Némésis de Rhamnus : "Elle fut tout d'abord représentée sous la forme de Vénus, et portait aussi une branche de pommier." Bien qu'une déesse de l'amour et une déesse de la vengeance paraissent avoir des caractères bien différents, cependant n'est pas difficile de voir comment cette distinction a pu se faire. La déesse qui, dans les mystères, était révélée aux initiés de la manière la plus séduisante, était aussi impitoyable et inflexible dans ses vengeances envers ceux qui révélaient ses mystères car tous ceux qui étaient découverts étaient irrévocablement mis à mort (POTTER, Antiquités, vol. I, Eleusia, p. 354). Ainsi donc la déesse qui portait la coupe était en même temps Vénus, la déesse de la licence, et Némésis, la déesse sévère et impitoyable pour tous ceux qui se révoltaient contre son autorité. Quel type remarquable de la femme que vit Jean, et qu'il appela d'un côté "la mère des prostitutions" et de l'autre, "la femme qui s'enivre du sang des martyrs" !

Appendice

Note B, p. 15