Chapitre 16
Ch. 16 v. 1-12
Le chap. 16 va plus loin que la simple grâce de Dieu. Jésus révèle ce qui devait
se former dans les conseils de cette grâce où il était reconnu, en montrant que
les orgueilleux du peuple de Dieu sont rejetés, que Dieu les abhorre (Zach. 11
[v. 8]), comme ils l’abhorrent. [16:1] Fermant les yeux (par la perversité de
leur volonté) aux signes merveilleux et bienfaisants de sa puissance, qu’il
accordait sans cesse aux pauvres qui le cherchaient, les pharisiens et les
sadducéens — frappés cependant malgré eux de ce qui se manifestait en Lui, bien
qu’incrédules de volonté et de coeur — demandent un signe du ciel. [16:2] Le
Seigneur leur reproche cette incrédulité [16:3] en leur montrant que s’ils
savaient bien distinguer l’apparence du ciel (v. 2-3), les signes des temps
étaient bien autrement frappants. [16:4] Ils étaient la génération adultère et
méchante qui était devant Lui, et il les laisse : expression significative de ce
qui se passait alors en Israël. [16:6] Jésus prévient ses disciples oublieux
contre les ruses de ces subtils adversaires de la vérité et de Celui que Dieu
avait envoyé pour faire connaître cette vérité (v. 5-12). Israël comme peuple
est délaissé dans ses chefs. [16:11] En même temps, dans une grâce patiente, il
rappelle à ses disciples ce qu’il leur avait expliqué par ses paroles.
Ch. 16 v. 13-17 — Qui
est Jésus ?
[16:13] Ensuite Jésus questionne ses disciples sur ce que les hommes disent de
Lui (v. 13 et suiv.). [16:14] Toutes les pensées des hommes n’étaient que des
opinions, non la foi ; c’est-à-dire l’incertitude qui tient à l’indifférence
morale, à l’absence de ces besoins sentis de l’âme, qui ne se reposent que dans
la vérité, dans le Sauveur qu’on a trouvé. [16:15] Puis Jésus demande aux
disciples ce qu’ils disaient eux-mêmes de Lui. [16:17] Pierre, à qui le Père
avait daigné se révéler, [16:16] déclare sa foi, en lui répondant : « Tu es le
Christ, le Fils du Dieu vivant ». Point d’incertitude ici, point de simple
opinion, [16:17] mais l’effet puissant de la révélation, faite par le Père
lui-même, de la personne de Christ, au disciple qu’il avait élu pour jouir de ce
privilège.
Ici ressort d’une manière remarquable l’état du peuple, non à l’égard de la loi, comme dans le chapitre précédent, mais à l’égard du Christ qui leur avait été présenté. Nous le voyons en contraste avec la révélation de sa gloire à ceux qui l’avaient suivi. Nous avons ainsi trois classes : [16:4] premièrement, les pharisiens arrogants et incrédules ; [16:14] ensuite, les personnes sentant et reconnaissant qu’il y avait en Christ une puissance divine et une autorité, mais qui restaient indifférentes ; [16:17] enfin, la révélation de Dieu et la foi donnée divinement.
Dans le chap. 15, [15:28] la grâce envers celui qui n’a d’espoir que dans la grâce, est mise en contraste [15:3] avec la désobéissance et avec la perversion hypocrite de la loi, par laquelle les scribes et les pharisiens cherchaient à couvrir cette désobéissance sous prétexte de piété.
Le chap. 16, [16:4] en jugeant l’incrédulité des pharisiens à l’égard de la personne de Christ, [16:6] et en mettant de côté ces hommes pervers, [16:18] introduit la révélation de cette Personne comme fondement de l’Assemblée qui devait remplacer les Juifs comme témoin de Dieu sur la terre ; et puis il annonce les conseils de Dieu à l’égard de l’établissement de cette Assemblée. [16:19] Il nous montre, conjointement avec ceci, l’administration du royaume tel qu’il s’établissait alors sur la terre.
Ch. 16 v. 16-18 — La
révélation de Jésus
Considérons premièrement la révélation de la personne de Christ.
Jésus est le Christ, le
Messie
[16:16] Pierre confesse que Jésus est le Christ, l’accomplissement des promesses
de Dieu et des prophéties qui en annonçaient la réalisation. Il était Celui qui
devait venir, le Messie promis de Dieu.
Jésus est le Fils de
Dieu — Ps. 2
De plus, il était le Fils de Dieu. [Ps. 2:2] Le Ps. 2 avait annoncé que, malgré
les complots des chefs pervers du peuple et l’inimitié orgueilleuse des rois de
la terre, [Ps. 2:6] le Roi de Dieu serait consacré sur la montagne de Sion. [Ps.
2:7] C’était le Fils, engendré de Dieu. [Ps. 2:11] Les rois et les juges de la
terre1 sont appelés à se soumettre à Lui, [Ps. 2:9] de peur d’être frappés du
sceptre de sa puissance lorsqu’il prendrait les nations pour son héritage. Ainsi
le vrai croyant attendait le Fils de Dieu, né dans le temps convenable sur cette
terre. [16:16] Pierre confesse que Jésus est le Fils de Dieu. Nathanaël aussi
l’avait fait : « Tu es le Fils de Dieu ; tu es le roi d’Israël » (Jean 1:49).
Marthe le dit de même plus tard [(Jean 11:27)].
1 L’étude des Psaumes nous a fait comprendre que ceci est en rapport avec l’établissement du résidu juif en bénédiction aux derniers jours.
Jésus, Fils du Dieu
vivant, a la puissance de vie en lui pour bâtir son Assemblée
Pierre cependant, spécialement enseigné par le Père, ajoute à sa confession un
mot simple, mais puissant : « Tu es le Fils du Dieu vivant ». Jésus n’est pas
seulement Celui qui accomplit les promesses et qui répond aux prophéties ; c’est
du Dieu vivant qu’il est le Fils, de Celui en qui est la vie et le pouvoir de
donner la vie.
Il hérite de cette puissance de vie en Dieu, que rien ne peut vaincre ni détruire. Qu’est-ce qui peut vaincre la puissance de Celui — de ce Fils — qui était issu de « Celui qui vit » ? Satan a l’empire de la mort ; c’est lui qui tient l’homme sous la domination de cette affreuse conséquence du péché ; et cela par le juste jugement de Dieu, qui fait la force de cette domination. [16:18] L’expression du v. 18, « les portes du hadès », du lieu invisible, se rapporte à cet empire de Satan. C’est donc sur cette puissance, qui laisse sans force la forteresse de l’ennemi, que l’Assemblée est bâtie. La vie de Dieu ne sera pas détruite. Le Fils du Dieu vivant ne sera pas vaincu. Ce que Dieu fonde sur ce rocher de la puissance immuable de vie dans son Fils ne sera donc pas renversé par l’empire de la mort. Si l’homme a succombé et s’il est tombé sous la puissance de cet empire, Dieu, le Dieu vivant n’y succombe pas. C’est sur ce fondement que Dieu bâtit son Assemblée. Elle est l’oeuvre du Christ, fondée sur Lui comme Fils du Dieu vivant, et non du premier Adam, ni fondée sur lui ; elle est fondée sur son oeuvre accomplie selon la puissance que cette vérité révèle. La personne de Jésus, Fils du Dieu vivant, en est la force. Cette force, la résurrection l’a démontrée. Là il est déclaré Fils de Dieu en puissance [(Rom. 1:4)]. Aussi, ce n’est pas pendant sa vie, mais lorsqu’il est ressuscité, que Jésus commence cette oeuvre. La vie était en Lui ; mais c’est après que le Père a brisé les portes du hadès même (c’est Lui qui, par sa divine puissance, avait fait cela et était ressuscité) que, monté en haut, il commence, par le Saint Esprit, à bâtir ce que la puissance de la mort ou de celui en qui elle avait déjà été vaincue, ne pourra jamais détruire. C’est sa personne qui est en vue ici, et c’est sur sa personne que tout est fondé. La résurrection est la preuve qu’il est le Fils du Dieu vivant et que les portes du hadès ne peuvent rien contre Lui ; leur puissance est détruite par la résurrection. Par cela, nous voyons que l’Assemblée (bien que formée sur la terre) est beaucoup plus qu’une dispensation ; le royaume ne l’est pas.
Le Père lui-même révèle
qui est le Fils
[16:18] L’oeuvre de la croix était nécessaire ; mais ici il ne s’agit pas de
savoir ce que le juste jugement de Dieu exigeait, ou de la justification d’un
individu, mais de ce qui annulait la puissance de l’ennemi. [16:17] Il était
donné à Pierre de reconnaître la personne de Celui qui vivait selon la puissance
de la vie de Dieu. C’était une révélation particulière et directe du ciel, de la
part du Père. Sans doute, Christ avait donné assez de preuves de qui il était ;
mais les preuves n’avaient rien prouvé au coeur de l’homme. La révélation du
Père était le moyen de savoir qui il était, et cela allait bien au-delà des
espérances d’un Messie.
[16:17] Ici, le Père avait directement révélé la vérité de la personne même de Christ, révélation qui dépassait toute question de relation avec les Juifs. [16:18] Sur ce fondement, Christ bâtirait son Assemblée. Pierre, déjà nommé ainsi par le Seigneur, reçoit, à cette occasion, une confirmation de ce titre. [16:17] Le Père avait révélé à Simon, le fils de Jonas, le mystère de la personne de Jésus ; [16:18] et secondement, Jésus aussi indique, par le nom qu’il lui donne1, la stabilité, la fermeté, la durabilité, la force pratique de son serviteur favorisé par la grâce.
1 Le passage (chap. 16:18) doit être lu : « Et moi aussi, je te dis ».
Jésus a autorité pour
placer les siens dans son Assemblée qu’il bâtit
Le droit de donner un nom appartient à un supérieur qui peut assigner à celui
qui le porte sa place et son nom dans la famille ou dans la position où cet
inférieur se trouve. Ce droit, quand il est réel, suppose le discernement,
l’intelligence de ce qui se fait : Adam donne des noms aux animaux (Gen.
2:19-20). Nébucadnetsar donne de nouveaux noms aux Juifs captifs (Dan. 1:7) ; le
roi d’Égypte, à Éliakim, qu’il avait placé sur le trône (2 Rois 23:34). [16:18]
Jésus prend donc cette place en disant à Pierre : Le Père t’a révélé cela, et
moi aussi je vous donne une place et un nom qui se lie à cette grâce. C’est sur
ce que le Père t’a révélé que je m’en vais bâtir mon Assemblée1, contre laquelle
(fondée qu’elle est sur cette vie qui vient de Dieu) les portes de l’empire de
la mort ne prévaudront jamais ; et moi qui bâtis, et qui bâtis sur ce fondement
inébranlable, moi je te donne la place d’une pierre (Pierre) en relation avec ce
temple vivant. Par le don de Dieu, tu appartiens déjà par nature au bâtiment —
pierre vivante et ayant la connaissance de cette vérité qui en est le fondement
et qui fait de chaque pierre une partie de l’édifice. Pierre était par
excellence tel par cette confession ; il l’était par anticipation par l’élection
de Dieu. [16:17] Le Père lui fait la révélation dans sa souveraineté. [16:18] Le
Seigneur lui assigne en même temps sa place comme ayant, Lui, droit
d’administration et autorité dans le royaume qu’il allait établir.
1 Il est important ici de distinguer l’Église que Christ bâtit, non achevée encore, mais que lui-même bâtit, et qui, manifestée comme un tout dans le monde, est édifiée, sous responsabilité, par l’homme. En Éph. 2:20, 21, et en 1 Pierre 2:4, 5, nous avons cette construction qui croît et est édifiée. Il n’est fait aucune mention du travail de l’homme, dans l’un ou l’autre de ces passages ; c’est un travail divin. Dans 1 Cor. 3, Paul est un sage architecte ; d’autres peuvent édifier du bois, du foin, du chaume. La confusion de ces choses a été la base de la papauté et d’autres corruptions qui se rencontrent dans ce qu’on appelle l’Église. L’Église de Dieu, vue dans sa réalité, est une oeuvre divine que Christ accomplit, et dans laquelle il habite.
Voilà ce qui nous est dit à l’égard de l’Assemblée, nommée ici pour la première fois, les Juifs ayant été rejetés à cause de leur incrédulité, et l’homme convaincu de péché.
Ch. 16 v. 19 —
L’autorité dans le royaume des cieux sur la terre
[16:19] Un autre sujet se présente lié à celui de l’Assemblée que le Seigneur
allait bâtir ; savoir, le royaume qui devait être établi. Ce royaume devait
avoir la forme du royaume des cieux ; il en était ainsi dans les conseils de
Dieu ; mais le roi ayant été rejeté sur la terre, le royaume allait s’établir
maintenant d’une manière spéciale.
[16:19] Tout rejeté d’ailleurs qu’il fût, le Seigneur tenait les clefs de ce royaume, l’autorité lui en appartenait. Il devait les confier à Pierre qui, lorsque Lui, Christ, serait parti, ouvrirait les portes du royaume, premièrement aux Juifs, et puis aux gentils. Pierre devait exercer aussi l’autorité dans le royaume, de la part du Seigneur ; de sorte que ce qu’il lierait sur la terre au nom de Christ (le vrai Roi, quoique monté au ciel), serait lié dans le ciel, et que, s’il déliait quelque chose sur la terre, ce qu’il ferait serait ratifié dans le ciel. En un mot, Pierre avait l’autorité d’ordonner dans le royaume de Dieu sur la terre, ce royaume ayant maintenant le caractère de royaume des cieux, car son Roi était dans le ciel, et le ciel marquerait de son autorité les actes de Pierre. Mais le ciel sanctionnait ses actes terrestres, non le fait de lier ou de délier pour le ciel. L’Assemblée, rattachée au caractère de Fils du Dieu vivant, et bâtie par Christ, quoique formée sur la terre, appartient au ciel ; le royaume, bien que dirigé du ciel, appartient à la terre — c’est là qu’il a sa place et son service1.
1 Remarquez ceci dont j’ai parlé ailleurs : il n’y a point de clefs de ou pour l’Église ou l’Assemblée. Pierre avait les clefs de l’administration dans le royaume. Mais l’idée de clefs en rapport avec l’Église, ou le pouvoir des clefs dans l’Église est un pur sophisme. Il n’y a rien de semblable. L’Église est bâtie ; les hommes ne bâtissent pas avec des clefs, et c’est Christ (non Pierre) qui la bâtit. En outre, les actes ainsi sanctionnés étaient des actes d’administration ici-bas. Le ciel mettait sa sanction à ces actes ; ils n’ont pas de rapport au ciel, mais à l’administration terrestre du royaume.
De plus, il faut noter que ce qui est conféré ici est individuel et personnel. C’étaient un nom et une autorité, conférés à Simon, fils de Jonas.
Quelques autres remarques nous aideront à mieux comprendre la portée de ces chapitres. Dans la parabole du semeur (chap. 13), la personne du Seigneur ne nous est pas présentée ; il n’y est question que de semer, non de moissonner. Dans la première similitude du royaume, il est Fils de l’homme, et le champ est le monde. Jésus est tout à fait en dehors du judaïsme. Le chap. 14 nous montre l’état des choses, depuis le rejet de Jean jusqu’au temps où le Seigneur, à son retour, sera reconnu là où il a été rejeté. Dans le chap. 15, c’est la lutte morale, et Dieu s’y voit en grâce en lui-même, comme étant au-dessus du mal. Je ne m’arrêterai pas davantage sur ce sujet. Mais au chap. 16, nous avons la personne du Fils de Dieu, le Dieu vivant, puis l’Assemblée et Christ le constructeur ; au chap. 17, c’est le royaume avec le Fils de l’homme venant en gloire. Les clefs (quoique le ciel sanctionne l’usage que Simon en fait) étaient, comme nous l’avons vu, celles du royaume (non de l’Assemblée) ; et cela, la parabole de l’ivraie le montre, devait se corrompre et se détruire, irrémédiablement. Christ, et non Pierre, bâtit l’Église (comp. 1 Pierre 2:4, 5).
Les enseignements de
Matt. 16:16-19
Quatre choses donc sont signalées par le Seigneur dans ce passage :
1. [16:17] La révélation faite par le Père à Simon
2. [16:18] Le nom donné à ce même Simon par Jésus qui allait bâtir son Assemblée sur le fondement révélé dans ce que le Père avait communiqué à Simon ;
3. [16:18] L’Église bâtie par Christ lui-même, encore incomplète, sur le fondement de la personne de Jésus reconnu comme Fils du Dieu vivant ;
4. [16:19] Les clefs du royaume destinées à Pierre, c’est-à-dire l’autorité dans le royaume, donnée à Pierre comme administrant ce royaume de la part de Christ, et y ordonnant ce qui était sa volonté et qui serait ratifié dans le ciel. Tout ceci se rattache personnellement à Simon (en vertu de l’élection du Père qui l’avait choisi dans sa sagesse pour recevoir cette révélation), et en vertu de l’autorité de Christ (qui lui avait conféré le nom qui le signalait comme jouissant personnellement de cette faveur).
Ch. 16 v. 20 — Le
témoignage à Jésus comme Messie est terminé
[16:20] Le Seigneur ayant ainsi communiqué les desseins de Dieu à l’égard de
l’avenir — desseins qui s’accompliraient dans l’Assemblée et dans le royaume —
il n’y avait plus lieu à sa présentation comme Messie aux Juifs. Ce n’est pas
qu’il abandonnât ce témoignage plein de grâce et de patience envers le peuple,
témoignage qu’il avait rendu pendant tout son ministère. Non, ce témoignage
continuait de fait, mais ses disciples devaient comprendre que ce n’était plus
leur oeuvre de l’annoncer au peuple comme étant le Christ. [16:21] Dès lors
aussi il commence à faire comprendre à ses disciples qu’il devait souffrir, être
mis à mort, et ressusciter (v. 21 et suiv.).
Ch. 16 v. 21-28 —
Mortifier la chair est nécessaire pour marcher à la suite de Jésus
[16:23] Or, quelque béni et honoré que fût Pierre par la révélation que le Père
lui avait faite, son coeur tenait encore charnellement à la gloire humaine de
son maître (et pour dire vrai à la sienne propre), et était loin de s’élever à
la hauteur des pensées de Dieu. Hélas ! il n’est pas le seul. Autre chose est
d’être convaincu des vérités les plus élevées et d’en jouir même sincèrement
comme vérités, ou bien d’avoir le coeur formé à des sentiments et à une marche
ici-bas qui soient en rapport avec ces vérités. Ce n’est pas la sincérité dans
la jouissance de la vérité qui fait défaut. Ce qui manque, c’est d’avoir la
chair, le moi mortifiés, c’est d’être mort au monde. Nous pouvons jouir
sincèrement de la vérité telle que Dieu l’enseigne, et cependant n’avoir pas la
chair mortifiée, ni le coeur dans un état qui soit selon cette vérité dans
laquelle il se meut ici-bas. Pierre ([16:17] naguère si honoré par la révélation
de la gloire de Jésus, [16:19] et constitué, d’une manière toute particulière,
le dépositaire de l’administration du royaume confiée au Fils — ayant une place
éminente dans l’état de choses qui devait suivre le rejet de Christ par les
Juifs) [16:22] Pierre fait maintenant l’oeuvre de l’adversaire à l’égard de la
soumission parfaite de Jésus, à la souffrance et à l’ignominie qui devaient
introduire cette gloire et caractériser le royaume. [16:23] Hélas ! la chose
était simple ; Pierre pensait aux choses de l’homme et non à celles de Dieu.
Mais le Seigneur, dans sa fidélité, le repousse, [16:24] et enseigne à ses
disciples que la croix est le seul chemin, le chemin arrêté, nécessaire ; et qui
voulait le suivre, devait entrer dans ce chemin qu’il prit. [16:26] D’ailleurs,
que profiterait-il à un homme de gagner le monde entier, s’il fait la perte de
son âme ? Car c’était de cela qu’il s’agissait1, et non pas alors de la gloire
extérieure du royaume.
1 Dans la première épître de Pierre nous rencontrons fréquemment ces pensées — les mots « espérance vivante », « pierre vivante », — appliquées à Christ, puis aux chrétiens. Et, conformément à notre sujet, le salut par la vie en Christ, le Fils du Dieu vivant, nous trouvons encore ceci : « Recevant la fin de votre foi, le salut des âmes ». Voyez aussi tous les versets dans lesquels l’apôtre présente ses instructions.
Les formes de
l’incrédulité
Après avoir examiné le chap. 16, comme étant l’expression de la transition du
système messianique à l’établissement de l’Assemblée fondée sur la révélation de
la personne de Christ, je désire attirer aussi l’attention sur les caractères
d’incrédulité qui s’y développent, soit au milieu des Juifs, soit dans les
coeurs des disciples. Il nous sera utile d’observer un peu les formes de cette
incrédulité.
Ch. 16 v. 1-4 —
L’opposition de la volonté de l’homme aux œuvres du Seigneur
[16:1] D’abord elle prend une forme plus grossière, en demandant un signe du
ciel. Les pharisiens et les sadducéens s’unissent pour montrer leur
insensibilité à tout ce que le Seigneur avait fait. Ils demandent une preuve
pour leurs sens naturels, c’est-à-dire pour leur incrédulité. Ils ne veulent pas
croire Dieu, soit en écoutant ses paroles, soit en considérant ses oeuvres. Il
faudrait que Dieu contentât leur propre volonté, qui ne serait ni la foi, ni
l’oeuvre de Dieu. [16:3] Ils avaient de l’intelligence pour les choses humaines
bien moins clairement manifestées ; ils n’en avaient aucune pour celles de Dieu.
[16:4] Aussi ne leur sera-t-il accordé d’autre signe qu’un Sauveur perdu pour
eux, comme Juifs sur la terre. Il faudra qu’ils se soumettent, bon gré mal gré,
au jugement de l’incrédulité qu’ils manifestaient. Le royaume leur sera ôté ; le
Seigneur les quitte. Le signe de Jonas se rattache au sujet de tout le chapitre.
Ch. 16 v. 5-12 — La
faiblesse de la foi face aux signes du Seigneur
Ensuite, nous retrouvons cette même inattention pour la puissance manifestée
dans les oeuvres de Jésus ; [16:7] mais ce n’est plus l’opposition de la volonté
incrédule, la préoccupation du coeur pour les choses présentes le soustrait à
l’influence des signes déjà donnés. C’est la faiblesse, non pas la mauvaise
volonté. [16:8] Toutefois, les disciples sont coupables, et Jésus les appelle «
gens de petite foi », non pas « hypocrites » [(15:7)] et « génération méchante
et adultère » [(16:4)].
Ch. 16 v. 13-14 —
L’indifférence quant à la révélation de Dieu
[16:14] Puis nous voyons l’incrédulité se manifester sous la forme d’une opinion
oiseuse, qui montre que le coeur et la conscience de ceux dont il est question
ne s’intéressent pas à un sujet qui devrait les dominer — sujet tel que si le
coeur se plaçait vraiment en face de lui et de son importance, il ne pourrait
demeurer tranquille avant d’en avoir acquis une entière certitude. L’âme n’a pas
de besoins, et partant point de discernement. Quand l’âme sent ces besoins, une
seule chose y répond ; et il ne peut y avoir de repos qu’en la trouvant. La
révélation de Dieu qui a créé le besoin ne laisse pas l’âme tranquille jusqu’à
ce qu’elle possède avec toute certitude ce qui l’a réveillée. Ceux qui
n’éprouvent pas de besoins, peuvent rester dans les probabilités, chacun selon
son caractère naturel, son éducation, ses circonstances. Il y a assez pour
réveiller la curiosité — l’esprit en est occupé et en juge. La foi a des besoins
; elle a, en principe, l’intelligence de l’objet qui répond à ces besoins ;
l’âme est exercée jusqu’à ce qu’elle trouve ce qu’il lui faut. Le fait est que
Dieu est là.
Au contraire, la foi
recherche ce qui répond à ses besoins
C’est le cas de Pierre. [16:17] Le Père lui révèle son Fils. Quoiqu’il fût
faible, une foi vivante se trouvait en lui, et l’on reconnaît l’état de son âme
lorsqu’il dit : « Seigneur, auprès de qui nous en irions-nous ? Tu as les
paroles de la vie éternelle ; et nous, nous croyons et nous savons que toi, tu
es le Saint de Dieu » (Jean 6:68-69). Heureux l’homme à qui Dieu révèle de
telles vérités ! chez qui il réveille de pareils besoins ! Il peut y avoir
lutte, beaucoup à apprendre, beaucoup à mortifier ; mais le conseil de Dieu est
là avec la vie qui s’y rattache. Nous en avons vu l’effet dans le cas de Pierre.
[16:18] Chaque chrétien a sa place à lui dans le temple dont Simon était une
pierre si éminente. S’ensuit-il donc que le coeur soit en pratique à la hauteur
de la révélation qui lui a été faite ? Non ; la chair, après tout, peut n’être
pas mortifiée du côté où la révélation touche notre position terrestre.
Ch. 16 v. 21-26 — La
chair doit être mortifiée pour pouvoir suivre Christ
[16:21] En effet, la révélation faite à Pierre impliquait le rejet du Christ ici-bas
— amenait nécessairement l’humiliation de Christ et sa mort. C’était là le point
essentiel. Substituer la révélation du Fils de Dieu, de l’Assemblée et du
royaume céleste, à la manifestation du Messie sur la terre, qu’est-ce que cela
signifiait, sinon que Jésus devait être livré aux gentils, être crucifié, et
ensuite ressusciter ? [16:22] Or Pierre n’en était pas là moralement. Son coeur
charnel, au contraire, profitait de la révélation qui lui avait été faite et de
ce que le Seigneur lui avait dit, pour s’élever à ses propres yeux. Il voyait
donc la gloire personnelle de Jésus, sans en saisir les conséquences morales. Il
se met à reprendre le Seigneur lui-même et cherche à le détourner du chemin de
l’obéissance et de la soumission. [16:23] Le Seigneur, toujours fidèle, le
traite en adversaire. Hélas ! que de fois nous avons joui, joui sincèrement
d’une vérité, et manqué cependant aux conséquences pratiques qui en découlaient
pour nous sur la terre. [16:24] Un Sauveur céleste, glorifié, qui bâtit
l’Assemblée, cela implique la croix sur la terre. La chair ne comprend pas cela.
Elle élèvera son Messie au ciel, si l’on veut ; mais prendre sa part de
l’humiliation qui suit nécessairement, ce n’est pas ce qu’elle entend par un
Messie glorieux. [16:25] La chair doit être mortifiée pour prendre cette place.
Il faut pour cela la force de Christ par le Saint Esprit. Un chrétien qui n’est
pas crucifié au monde [(Gal. 6:14)] n’est qu’une pierre d’achoppement pour
quiconque cherche à suivre Christ.
Telles sont les formes d’incrédulité qui précèdent la vraie confession de Christ, et qui se trouvent, hélas ! en ceux qui l’ont sincèrement confessé et connu (la chair n’étant pas mortifiée, de manière à faire marcher l’âme à la hauteur de ce qu’elle a appris de Dieu, et l’intelligence spirituelle étant obscurcie par la pensée des conséquences dont cette chair ne veut pas).
Ch. 16 v. 27-28 — La
gloire du Fils de l’homme
[16:27] Mais si la croix est la porte du royaume, la gloire ne tardera pas à se
produire. Le Messie étant rejeté par les Juifs, un titre plus glorieux et d’une
portée bien autrement grande est révélé : le Fils de l’homme viendra dans la
gloire de son Père (car il est Fils de Dieu), et rendra à chacun selon sa
conduite (v. 27). [16:28] Même il y en avait de ceux qui se tenaient là, qui ne
goûteraient pas la mort (car on en parlait) avant de voir la manifestation de la
gloire du royaume, qui appartenait au Fils de l’homme.
On peut remarquer ici le titre de « Fils de Dieu » posé comme fondement ; le titre de Messie est abandonné, en tant que témoignage rendu dans ce temps-là, et remplacé par celui de « Fils de l’homme », que Jésus prend en même temps que celui de Fils de Dieu, et qui avait une gloire lui appartenant de plein droit. [16:27] Jésus devait venir dans la gloire de son Père, comme Fils de Dieu, [16:28] et dans son royaume, comme Fils de l’homme.
Le Fils de l’homme vu
dans Psaumes 2 à 8, et dans Matt. 16
Il est intéressant de rappeler ici l’instruction qui nous est donnée au
commencement du livre des Psaumes. L’homme juste distingué de l’assemblée des
méchants a été présenté dans le Ps. 1. [Ps. 2:2] Nous trouvons, au Ps. 2, la
révolte des rois de la terre et des princes contre l’Éternel et contre son Oint
(c’est-à-dire son Christ). [Ps. 2:7] Or là-dessus le décret de l’Éternel est
déclaré. [Ps. 2:4] Adonaï, le Seigneur, se moquera d’eux du ciel. [Ps. 2:6] En
outre, le Roi de Jéhovah sera établi sur la montagne de Sion. [Ps. 2:7] Voici ce
décret : « L’Éternel m’a dit : Tu es mon Fils ; aujourd’hui, je t’ai engendré
»1. [Ps. 2:12] Il est commandé aux rois de la terre et aux juges d'embrasser le
Fils.
1 Nous avons vu que Pierre allait plus loin que cela. Ici, Christ est envisagé comme le Fils, né sur la terre dans le temps, non pas comme Fils éternellement au sein du Père. Pierre, sans recevoir la pleine révélation de cette dernière vérité, le voit comme Fils selon la puissance de la vie divine en sa propre personne ; personne sur laquelle l’Assemblée, par conséquent, pouvait être bâtie. Mais ici, nous considérons ce qui se rapporte au royaume.
Dans les Psaumes suivants, toute cette gloire s’obscurcit. La détresse du résidu, à laquelle Christ a part, est racontée. Puis, au Ps. 8, [Ps. 8:4] Christ est salué Fils de l’homme, [Ps. 8:6] héritier de tous les droits conférés en souveraineté à l’homme par les conseils de Dieu. [Ps. 8:9]Le nom de Jéhovah devient excellent sur toute la terre. Ces Psaumes ne dépassent pas la partie terrestre de ces vérités, sauf dans le passage : « Celui qui habite dans les cieux se rira d’eux » (Ps. 2:4) ; [16:27] tandis que, dans Matthieu 16, le rapport du Fils de Dieu avec cela, sa venue avec ses anges (pour ne rien dire de l’Assemblée), nous sont présentés. C’est-à-dire que nous voyons que le Fils de l’homme viendra dans la gloire du ciel. Ce n’est pas que son séjour dans le ciel soit la vérité annoncée dans ce passage ; mais le Fils de l’homme arrivant pour établir son royaume sur la terre est revêtu de la gloire du ciel la plus élevée. [16:28] Il vient dans son royaume. Le royaume est établi sur la terre ; mais il arrive avec la gloire du ciel pour le prendre. C’est ce que le chapitre suivant va nous montrer, selon la promesse du v. 28 de celui-ci.
La transfiguration,
manifestation de la gloire de Jésus pour la foi
[16:28] Dans chaque évangile qui en parle, cette promesse de ne pas goûter la
mort avant de voir le royaume du Fils de l’homme, est suivie immédiatement de la
transfiguration. Et non seulement cela, mais Pierre (dans sa seconde épître,
chap. 1:16), en parlant de cette scène, déclare qu’elle était une manifestation
de la puissance et de la venue de notre Seigneur Jésus Christ. Il dit que la
parole prophétique leur avait été confirmée par la vue de sa majesté ; de sorte
que les apôtres savaient de quoi ils parlaient en annonçant la puissance et la
venue de Christ, ayant contemplé sa majesté. C’est dans ce sens effectivement
que le Seigneur parle ici de sa venue, ainsi que nous l’avons vu : c’était un
exemple de la gloire dans laquelle il reviendrait pour confirmer la foi de ses
disciples, en vue de sa mort qu’il venait de leur annoncer.