Chapitre 15
La grâce
Le contraste entre la grâce qui a sa source en Dieu et ce qui est de l’homme
Ayant ainsi développé la différence du caractère des deux économies de la loi et
de la grâce, et les circonstances de la transition de l’une à l’autre, le
Seigneur aborde des principes plus élevés et les sources de l’économie qui
s’introduisait par la grâce. Ici, elles sont bien mises en contraste, ainsi que
dans les chapitres précédents ; mais ce contraste remonte à sa source glorieuse,
la propre grâce de Dieu, laquelle fait contraste en effet avec la misérable
propre justice de l’homme.
Ch. 15 v. 1-2 — La
grâce attire les pécheurs, mais la propre justice la rejette
[15:1] Les publicains et les pécheurs s’approchaient de Jésus pour l’entendre.
Pour ceux qui avaient besoin de la grâce, cette grâce avait une vraie dignité ;
[15:2] mais la propre justice repoussait ce qui n’était pas aussi méprisable
qu’elle-même, et, en même temps, Dieu dans sa nature d’amour : les pharisiens et
les scribes murmuraient contre Celui qui était le témoin de la grâce en
l’accomplissant.
Les grands principes
liés à la grâce
Impossible de méditer proprement ici ce chapitre, qui a fait la joie de tant
d’âmes et fourni le sujet de tant de témoignages rendus à la grâce depuis le
temps où le Seigneur a prononcé ces paroles ; et cette difficulté à ne pas
s’étendre sur cette grâce parfaite, dans son application au coeur, se rencontre
constamment en méditant la portion de la Parole qui nous occupe. Je dois me
borner ici à relever les grands principes qui s’y trouvent, en laissant le
développement à ceux qui prêchent la Parole. C’est une difficulté qui se
présente constamment dans cette portion de la Parole.
La joie de Dieu à faire
grâce
Le grand principe que le Seigneur expose et sur lequel il fonde la justification
des voies de Dieu (triste est l’état du coeur qui l’exige ! — merveilleuses sont
la grâce et la patience qui l’accordent !), ce grand principe, dis-je, c’est que
Dieu trouve sa propre joie à faire grâce. [15:2] Quelle réponse à l’affreux
esprit des pharisiens qui en faisaient une objection contre Jésus ! [15:6] C’est
le berger qui éprouve de la joie, quand la brebis perdue est retrouvée ; [15:9]
c’est la femme qui en ressent, quand la drachme est dans sa main ; [15:32] le
père, quand son fils est dans ses bras. Quelle expression de ce que Dieu est !
Et que Jésus est bien celui qui peut nous le dire ! C’est sur cela seul que la
bénédiction de l’homme peut être fondée, et en cela que Dieu glorifie sa grâce.
Mais il y a dans cette grâce deux parties distinctes, l’amour qui cherche, et
l’amour avec lequel on est reçu.
Les deux caractères de
la grâce
Ch. 15 v. 3-10 — L’amour qui cherche ce qui est perdu
L’oeuvre de Christ et du Saint Esprit envers les pécheurs
Les deux premières paraboles dépeignent le premier caractère de cette grâce.
[15:4] Le berger cherche sa brebis, [15:8] la femme sa pièce de monnaie ; la
brebis et l’argent n’agissent en rien. [15:4] Le berger cherche, [15:8] ainsi
que la femme, jusqu’à ce qu’il trouve, parce qu’il s’intéresse à l’objet qu’il
poursuit ; [15:5] et quand la brebis est fatiguée de ses errements, elle n’a pas
besoin de marcher pour s’en retourner ; le berger la met sur ses épaules et la
porte chez lui. Il se charge de tout, heureux de ravoir sa brebis. C’est là
l’esprit du ciel, quel que soit le coeur de l’homme sur la terre : c’est
l’oeuvre de Christ, le bon Berger. [15:8] Le travail de la femme est une image
des soins que Dieu se donne dans son amour, de sorte que son oeuvre représente
davantage celle de l’Esprit ; on apporte la lumière, la femme balaie la maison
jusqu’à ce qu’elle retrouve sa pièce : c’est ainsi que Dieu en agit dans le
monde, cherchant les pécheurs. [15:2] L’odieuse et haïssable jalousie de la
propre justice ne trouve pas de place dans l’esprit du ciel où Dieu demeure et
où il reproduit, dans le bonheur qui l’entoure, le reflet de ses perfections.
Le travail effectué
dans le coeur n’est pas ce qui donne la paix
Toutefois, bien que ni la brebis, ni la drachme ne fassent rien pour être
retrouvées, il y a pourtant une oeuvre réelle opérée dans le coeur de celui qui
est ramené ; mais cette oeuvre, toute nécessaire qu’elle soit pour qu’un homme
ait la paix ou même qu’il la cherche, n’est pas ce sur quoi cette paix est
fondée.
Ch. 15 v. 11-32 —
L’amour qui reçoit celui qui est perdu
Le retour et la réception du pécheur sont dépeints dans la troisième parabole.
L’oeuvre de la grâce accomplie par la seule puissance de Dieu, et complète dans
ses effets, est décrite dans les deux premières ; [15:17-19] dans la troisième,
le pécheur revient avec des pensées que nous allons examiner, pensées produites
par la grâce, mais qui, avant qu’il ait été reçu, ne sont jamais montées à la
hauteur de la grâce manifestée dans l’accueil qui lui a été fait. — La Parole
nous dépeint d’abord son éloignement de Dieu. [15:13] Aussi coupable, au moment
où tournant le dos à son père, il franchit le seuil de la maison paternelle,
[15:16] qu’à l’époque où il mange les gousses avec les pourceaux, l’homme,
trompé par le péché, est présenté ici dans le dernier état de dégradation où le
péché le conduit. [15:14] Ayant dépensé tout ce qui lui est échu selon la
nature, le dénuement dans lequel il se trouve (plus d’une âme ressent la famine
qu’elle a attirée sur elle-même, le vide de tout ce qui l’entoure sans un désir
après Dieu ou la sainteté, et souvent dans l’avilissement du péché) ne le pousse
pas vers Dieu, [15:15] mais le conduit à chercher une ressource dans ce que lui
fournit le pays de Satan, où rien ne se donne ; et il se trouve avec les
pourceaux. [15:17] Mais la grâce agit, la pensée du bonheur qui se trouvait dans
la maison de son père se réveille dans son coeur, ainsi que celle de la bonté
qui rendait tout béni à l’entour d’elle. Lorsque l’Esprit de Dieu agit, on
trouve toujours deux choses : la conviction dans la conscience et l’attraction
du coeur. C’est réellement la révélation de Dieu à l’âme, et Dieu est lumière et
il est amour [(1 Jean 1:5 ; 4:8)] ; comme lumière, la conviction est produite
dans l’âme, mais comme amour, il y a l’attraction de la bonté et une vraie
confession est produite. [15:18] Ce n’est pas simplement que nous avons péché,
mais que nous avons affaire avec Dieu, retenus, tout en le désirant, par la
crainte de ce qu’il est, et cependant nous sommes conduits à aller. Ainsi la
femme du chap. 7, et Pierre, dans sa nacelle [(5:8)]. [15:17] Cela produit la
conviction que l’on périt, et un sentiment faible peut-être, mais réel, de la
bonté de Dieu et du bonheur qui se trouve en sa présence, quoique l’on ne soit
pas assuré d’être reçu : mais on ne reste pas où l’on périt. [15:18] Il y a
sentiment du péché et humiliation, sentiment qu’il y a de la bonté en Dieu, mais
pas encore sentiment de ce qu’est la grâce de Dieu : celle-ci attire, on va vers
Dieu, [15:19] mais on serait content d’être reçu comme un domestique — preuve
que, quoique le coeur ait été travaillé par la grâce, il n’a pas encore
rencontré Dieu. Mais le progrès de l’âme dans les choses spirituelles, bien que
réel, ne donne jamais la paix. Il y a un certain repos du coeur qui découle du
fait qu’on retourne vers Dieu, mais on ne sait quel accueil on trouvera après
l’abandon de Dieu dont on est coupable. Plus l’enfant prodigue approche de la
maison, plus son coeur doit battre à la pensée de sa rencontre avec son père.
[15:20] Mais le père prend les devants avant son arrivée, et agit envers son
fils, non selon les mérites de celui-ci, mais selon son coeur de père à lui,
seule mesure des voies de Dieu envers nous. Il est sur le cou de son fils encore
dans ses haillons, [15:21] avant que celui-ci ait pu dire : « Traite-moi comme
l’un de tes mercenaires ». Le fils, objet d’un pareil accueil, ne pouvait plus
parler ainsi : c’était la demande d’un coeur, anticipant comment il serait reçu,
et non pas d’une âme qui avait rencontré Dieu. Celle-là sait la manière dont
elle a été reçue. [15:18-19] Le prodigue se proposait de le dire (on parle
souvent d’un « humble espoir » et « d’une basse condition ») ; [15:21] mais,
quoique la confession fût complète, lorsqu’il arrive, il ne peut plus dire : «
Traite-moi comme l’un de tes mercenaires ». Comment aurait-il pu le dire ? La
position du fils était fixée par le coeur du père, par les propres sentiments du
père, par l’amour qu’il avait pour son enfant et par la position dans laquelle
son coeur l’avait mis à l’égard de celui-ci : la position du père décidait de
celle du fils. Voilà sur quoi se fondaient les relations entre le père et le
fils ; mais ce n’était pas tout. [15:22] Le père aimait son fils quelle qu’eût
été sa conduite ; mais il ne l’introduirait pas tel quel dans la maison : le
même amour qui l’accueillait comme fils, voulait qu’il y entrât tel que devait
être le fils d’un tel père. Les serviteurs sont invités à apporter la plus belle
robe et à l’en revêtir. — Ainsi aimés et accueillis de Dieu dans nos misères,
nous sommes revêtus de Christ pour être introduits dans la maison du Père ; nous
n’apportons pas cette meilleure robe ; notre Dieu et Père nous la fournit ;
c’est une chose entièrement nouvelle : c’est Christ lui-même ; et nous devenons
justice de Dieu en Lui. C’est la plus belle robe du ciel ! [15:23-24] Tout est
maintenant joie, [15:28] sauf chez l’homme à propre justice, le vrai Juif.
[15:23-24] La joie est la joie du père ; mais toute la maison y participe.
[15:25] Le fils aîné qui n’est pas dans la maison, quoique près, [15:28] refuse
d’y entrer : [15:30] il ne veut pas de la grâce qui fait d’un pauvre prodigue le
sujet de la joie de l’amour. [15:28] Néanmoins la grâce agit ; le père sort pour
le prier d’entrer. C’est ainsi que sous l’Évangile, Dieu en a fait pour le Juif
: [15:29-30] mais la justice de l’homme qui n’est qu’égoïsme et péché, repousse
la grâce. [15:32] Or, Dieu ne veut pas abandonner cette dernière qui est propre
à sa nature : Dieu veut être Dieu ; et il est amour.
Voilà ce qui vient remplacer les prétentions des Juifs qui ont rejeté le Seigneur et l’accomplissement des promesses en Lui. Ce qui donne la paix et qui caractérise notre position selon la grâce, ce ne sont pas les sentiments agissant dans nos coeurs et qui existent réellement, mais ceux de Dieu lui-même.