Chapitre 3
Le Jourdain, image de la mort comme puissance spirituelle
Contraste entre la mer Rouge et le Jourdain, deux images différentes de la mort
La mort, délivrance du jugement de Dieu ou opposition de l’ennemi
Maintenant le peuple va entrer dans la terre de la promesse. Mais comment y
entrer ? Voilà le Jourdain, au plus fort de la crue de ses eaux [(3:15)], qui se
présente comme une barrière devant le peuple de Dieu, gardant les domaines de
ceux qui s’opposent à ses espérances. Or, le Jourdain représente la mort, mais
la mort envisagée plutôt comme terme de la vie humaine et signe de la puissance
de l’ennemi, que comme fruit et témoin du juste jugement de Dieu. Le trajet de
la mer Rouge était bien aussi la mort, mais le peuple était là comme participant
à la mort et à la résurrection de Jésus (en figure), comme accomplissant son
rachat et les libérant pour toujours de l’Égypte, lieu de leur esclavage, c’est-à-dire
de leur place dans la chair et ainsi de toute la puissance de Satan, comme le
sang sur les linteaux des portes les avait délivrés du jugement de Dieu1. C’est
alors que le peuple entrait dans le pèlerinage du désert.
Œuvre accomplie par
Jésus dans Sa mort, et notre position avec Lui
1 Il est important de considérer d’abord Jésus seul, soit dans la vie, soit dans
la mort. C’est là que nous voyons dans sa perfection la position chrétienne. Il
est également important de savoir que Dieu nous voit comme ayant été en Lui dans
la mort et que sa position exprime la nôtre, que Dieu nous voit comme étant en
Lui dans sa vie, et que telle est notre place actuelle devant Dieu. Mais nous
sommes aussi appelés à prendre de fait et par la foi cette position en Esprit.
La mer Rouge vient en premier lieu : c’est la mort, mais la mort de Christ. Le
Jourdain est notre entrée dans la mort avec Christ. La mer Rouge était la
délivrance d’Égypte, le Jourdain, l’entrée en Canaan ou plutôt un état subjectif
qui s’y rapporte spirituellement. Ce n’est pas la possession du pays, tel que
Christ ressuscité seul nous l’a acquise, mais cette possession réalisée par la
foi en ceux qui sont maintenant ressuscités avec Christ.
Être assis dans les lieux célestes est une chose entièrement distincte, établie sur un pied distinct, comme étant absolument l’œuvre de Dieu.
La mer Rouge était la condamnation du péché dans la chair en Christ fait péché et mort pour le péché et pour nous la délivrance quand elle est connue par la foi. De fait, cette délivrance est le Jourdain, seulement ce dernier va plus loin : il nous amène, comme ressuscités avec Lui, dans l’état qui convient à ceux qui ont part à l’héritage des saints dans la lumière. En traversant le Jourdain, le peuple suivait l’arche, mais cette dernière restait au milieu du fleuve, y déployant sa puissance contre la mort jusqu’à ce que tout le peuple eût passé [(3:17)].
La mer Rouge : salut
acquis par la mort de Christ, introduisant dans le pèlerinage terrestre
Le rachat, le salut parfait qui a été acquis par le précieux sang de Jésus,
introduit le chrétien dans ce pèlerinage. Avec Dieu, il ne fait que traverser le
monde comme une terre déserte, altérée et sans eau [(Ps. 63:1)]. Cependant ce
pèlerinage, tout en étant la vie d’un racheté, n’est que la vie ici-bas1.
1 À cela répond l’épître aux Romains.
Épreuve de la position
chrétienne ici-bas, et combats spirituels contre Satan
Mais, ainsi que nous avons vu, il y a la vie céleste, les combats qui se livrent
dans les lieux célestes, en même temps que la traversée du désert. Quand je dis
en même temps, je ne veux pas dire dans le même moment, mais dans la même
période de notre vie naturelle en ce monde. Autre chose sont les moments où nous
traversons ce monde fidèlement ou infidèlement dans les circonstances de chaque
jour, sous l’influence de l’espérance d’une meilleure patrie [(Héb. 11:16)] ;
autre chose est de livrer des combats spirituels pour la possession des
promesses et des privilèges célestes. Cela suppose que nous sommes réellement
nés de nouveau. (Rom. 8:29-30). Le voyage du désert après Sinaï suppose le fait
de cette position chrétienne, mais sa réalité individuelle y est mise à
l’épreuve. C’est à cela que se rapportent tous les « si » du Nouveau Testament.
Ils envisagent le chrétien comme étant en chemin pour atteindre le pays céleste,
mais ayant la promesse certaine, s’il est dans la foi, d’être gardé jusqu’à la
fin. Les « si » nous gardent dans la dépendance, mais dans celle de la fidélité
infaillible de Dieu quand il s’agit de remporter la victoire sur le pouvoir de
Satan. Il n’y a pas de « si » pour la rédemption ou pour la position actuelle de
ceux qui ont été scellés. Nous sommes des hommes déjà morts et ressuscités,
comme n’étant absolument plus de ce monde. Ces deux choses se réalisent dans la
vie chrétienne. Or, c’est comme mort et ressuscité en Christ qu’on est dans le
combat spirituel. Pour faire la guerre en Canaan, il faut avoir passé le
Jourdain1.
1 À cela répond l’épître aux Éphésiens ; seulement cette épître n’a rien à faire avec notre mort au péché. On n’y trouve quant à cette question que l’acte de Dieu qui nous a pris, quand nous étions morts dans nos péchés, pour nous placer en Christ dans les lieux célestes. L’épître aux Colossiens touche partiellement ces deux points et nous présente une vie de résurrection ici-bas, mais elle ne nous place pas dans les lieux célestes — seules nos affections s’y trouvent. Par « vie céleste » j’entends : vivre en Esprit dans les lieux célestes. Christ ici-bas y était divinement ; nous y sommes comme unis à Lui par le Saint Esprit.
Le Jourdain : Position
céleste nouvelle de ceux morts et ressuscités avec Christ — Lien avec Phil. 3
Le Jourdain est donc la mort et la résurrection avec Christ, considérées dans
leur puissance spirituelle, non dans leur efficace pour la justification du
pécheur, mais dans le changement de position et d’état opéré en ceux qui ont
part à la mort et à la résurrection pour réaliser la vie en rapport avec les
lieux célestes où Christ est entré1. La comparaison de Phil. 3 et Col. 2 et 3
montre la liaison de la mort et de la résurrection avec le vrai caractère de la
circoncision de Christ. En Phil. 3 [(v. 20-21)], le retour de Christ est
introduit comme devant mettre la dernière main à l’œuvre par la résurrection du
corps. [Phil. 3:14] Nous ne sommes pas considérés comme étant maintenant
ressuscités avec Lui, mais dans les Philippiens nous sommes engagés pratiquement
dans la course vers le but, ayant en vue Christ et la résurrection qui
caractérisent cette épître. On n’y trouve pas ce que la foi affirme au sujet de
notre position, mais la course présente, en vue de l’atteindre et de la
posséder. [Phil. 3:8-10] Cet état est donc objectif en ce sens qu’il n’est pas
question d’être en Christ ou même avec Lui, mais de gagner Christ et la
résurrection d’entre les morts. Paul avait fait la perte de toutes choses à
cause de l’excellence de cette connaissance et il désirait connaître la
puissance de la résurrection de Christ. Même la justification est considérée
dans cette épître comme étant à la fin de la course. Dans l’un et l’autre
passage, il y a une application du moment actuel à la vie céleste, mais il y a
séparation complète, même ici-bas, entre le pèlerinage et cette vie céleste,
quoique cette dernière influe puissamment sur le caractère de notre vie de
pèlerinage, et cela introduit un sujet très important, mais que je ne puis
traiter à fond ici : le rapport entre la vie, en tant que manifestée ici-bas, et
les objets qu’elle poursuit. « Ceux qui sont selon l’Esprit » ont leurs pensées
« aux choses de l’Esprit » [(Rom. 8:5)]. La vie nouvelle découle de ce qui est
divin et céleste — de Christ (et ceci est le sujet spécial de l’enseignement de
Jean) ; de là vient qu’elle appartient à l’état de résurrection en gloire, où
elle a sa place et son plein développement. — [Phil. 3:20] Notre « bourgeoisie »
est céleste, ce qui fait de nous des pèlerins — la vie céleste appartient au
ciel : « Le second homme est venu du ciel » (1 Cor. 15:47). Le plein
développement de cette vie ne comporte pas le pèlerinage ; nous sommes chez
nous, dans la maison du Père, comme Christ, tandis qu’ici-bas cette vie se
développe dans notre pèlerinage et a le caractère de son origine céleste. Son
développement est croissant, croissante son intelligence de ce qui est céleste
(voyez 2 Cor. 3:3, 17, 18 ; Éph. 4:15 ; 1 Jean 3:2, 3 et beaucoup d’autres
passages).
1 Ceci n’est pas simplement : posséder une vie communiquée par le Fils de Dieu, mais passer comme être moral d’une condition dans une autre, d’Égypte en Canaan, le désert étant omis et considéré comme un autre sujet. Sous cet aspect la mer Rouge et le Jourdain sont en liaison immédiate.
Mort et résurrection de
Jésus nous introduisant dans la vie céleste qu’Il a vécue
Notre vie ici-bas découle de la mort et de la résurrection de Christ, à Son
image
Notre objet étant dans le ciel, cela fait nécessairement de nous des étrangers
et des pèlerins ici-bas, déclarant dans la mesure de notre fidélité que nous
recherchons une patrie (Hébr. 11:14), la patrie à laquelle notre vie appartient.
En vertu de cela cette vie se forme pour représenter Christ ici-bas ; elle
s’adapte à la scène que nous traversons, y a des devoirs, une obéissance, un
service. Le point de départ de cette vie se trouve en ce que, sous un aspect,
nous sommes morts et ressuscités avec Christ, et que, sous l’autre, nous sommes
assis en Lui dans les lieux célestes [(Éph. 2:6)]. Le second aspect n’est pas
notre sujet ici ; il touche à la doctrine des Éphésiens, tandis que le premier
est plutôt la doctrine des Colossiens. Christ, comme homme dans ce monde,
quoiqu’il fût lui-même cette vie et sa manifestation ici-bas durant le
pèlerinage, avait cependant des objets : « À cause de la joie qui était devant
lui, il a enduré la croix, ayant méprisé la honte, et est assis… » (Hébr. 12:2),
et cela est d’un profond intérêt. Sa vie — Dieu lui-même — est davantage la
doctrine de Jean ; elle était ce qui devait être exprimé — exprimé dans son
adaptation à la terre qu’il traversait ; mais, étant un vrai homme, il marchait,
ayant des objets devant lui qui agissaient sur sa conduite.
Vie céleste manifestée
en Christ, sans rien de commun avec ce qui est de la terre
Le fait qu’il était cette vie et que, pour la vivre, il n’avait pas à mourir à
Lui-même, comme nous avons à mourir à notre mauvaise nature, rend son cas plus
difficile à saisir ; mais l’obéissance (et il l’a apprise [(Héb. 5:8)]), la
souffrance, la patience, tout cela se rapportait à sa position ici-bas ; la
compassion, la grâce envers ses disciples et tous les traits de sa vie (bien
qu’elle fût divine et qu’il pût dire : le fils de l’homme qui est dans le ciel
[(Jean 3:13)]) toutes ces choses étaient le développement de la vie céleste et
divine ici-bas. Son influence était absolue et parfaite dans le cas du Seigneur
Jésus. Mais sa vie en relation avec les hommes, bien qu’expression toujours
parfaite de l’effet de sa vie de communion céleste et de nature divine, en était
évidemment distincte. La joie de la vie céleste mettait absolument de côté tous
les motifs d’agir de la vie terrestre ; et, amenant les souffrances de sa vie
terrestre en relation avec l’homme, produisait la vie de patience parfaite
devant Dieu. En lui tout était sans péché, mais sa joie elle-même était ailleurs
— sauf en agissant en grâce au milieu de l’affliction et du péché — une joie
divine. Dans le chrétien, aussi, rien n’est commun entre ses deux vies. La
nature n’entre nullement dans celle d’en haut. Dans celle d’ici-bas, il est des
choses qui tiennent à la nature et au monde, non dans le mauvais sens du mot
monde, mais en tant que création. Rien de cela n’entre dans la vie de Canaan.
Christ traverse la mort
et ressuscite par la puissance divine, nous frayant le chemin
Christ seul a pu traverser la mort, épuisant sa force en se tenant là pour
répandre le sang de l’alliance éternelle, et a pu en ressortir dans la réalité
de la puissance de la vie qui était en lui, « car en lui était la vie » [(Jean
1:4)]. Mais cela eut lieu par une puissance divine propre. Dieu a ressuscité
Christ d’entre les morts en témoignage de la pleine acceptation de son œuvre.
Christ étant Dieu pouvait dire : « Détruisez ce temple, et en trois jours je le
relèverai » [(Jean 2:19)]. Et : « Il n’était pas possible qu’il fût retenu par
la mort » (Actes 2:24), mais ce n’est pas par aucune puissance de vie
spirituelle comme homme, qu’il s’est ressuscité lui-même ; quoique nous sachions
que, comme il laissa sa vie lui-même, il la reprit, et cela par le commandement
qu’il avait reçu de son Père [(Jean 10:18)]. En sorte qu’en ceci nous ne pouvons
séparer la déité et l’humanité. Je parle de l’acte et non de la personne. Il
avait le pouvoir de reprendre sa vie, mais c’était toujours l’obéissance. C’est
ainsi que nous sentons à chaque pas que nul ne connaît le Fils sinon le Père
[(Matt. 11:27)]. Il a frayé ce chemin. Il a fait de la mort une puissance qui
détruit cette chair qui nous entrave, et une délivrance de ce qui, en nous,
donne prise à l’ennemi avec lequel nous avons à combattre, étant dès lors
introduits en Canaan. C’est pour cela que l’apôtre dit : « Toutes choses sont à
vous,… soit vie, soit mort » [(1 Cor. 3:22)]. Or, tout vrai chrétien est mort et
ressuscité en Jésus ; le savoir et le réaliser, c’est autre chose. Mais la
parole de Dieu nous présente les privilèges du chrétien selon leur vraie force
en Christ.
Jésus nous ouvre le
chemin à travers la mort qu’il a vaincue
[3:4] L’arche de l’Éternel passait devant le peuple qui devait laisser la
distance de deux mille coudées entre elle et lui, afin qu’il connût le chemin où
il devait marcher ; car il n’avait pas ci-devant passé par ce chemin-là. Qui, en
effet, a traversé la mort pour ressusciter au delà de sa puissance, avant que
Christ, vraie arche de l’alliance, ait frayé ce chemin ? L’homme innocent et
l’homme pécheur n’y pouvaient rien. Ce chemin leur était également inconnu,
ainsi que la vie céleste qui en est la suite. Celle-ci, dans sa propre sphère,
et dans les exercices dont il est parlé ici, est tout entière au delà du
Jourdain ; les scènes des combats spirituels n’appartiennent pas à l’homme dans
la vie d’ici-bas, bien que, comme nous l’avons vu, la réalisation des choses
célestes dans lesquelles nous sommes introduits, agisse sur le caractère de
notre marche, et que les afflictions et les épreuves que nous rencontrons,
tendent, par la grâce de Dieu, à nous rendre plus claire la vision de la gloire
que nous espérons (voyez Rom. 5:2, 5, et comment le v. 5 revient à l’espérance
du v. 2). Toute l’expérience du désert, quelque fidèle qu’elle soit, n’y entre
directement pour rien, bien que les grappes de Canaan puissent encourager sa
marche [(Nomb. 13)]. Mais Christ a détruit pour les siens toute puissance de
mort, en tant que puissance de l’ennemi et symbole de son empire ; elle n’est
que le témoin de la puissance de Jésus. C’est bien la mort mais, comme nous
l’avons dit, c’est la mort de ce qui nous entrave.
Accomplissement de tous
les conseils éternels de Dieu
Dieu accomplira, en puissance et en gloire, Ses conseils auxquels l’homme a
manqué
J’ajouterai quelques courtes remarques. [3:11] C’est le titre de « Seigneur de
toute la terre », que Josué répète comme étant celui que Dieu prend ici ; car
c’est en témoignage de cette puissante vérité que Dieu avait planté Israël en
Canaan. Aussi Il établira en puissance selon ses conseils ce qui avait été placé
entre les mains d’Israël, pour qu’il le gardât selon sa responsabilité. Ce
dernier principe est la clef de toute l’histoire de la Bible, quant à l’homme, à
Israël, à la loi et à tout ce dont elle s’occupe. Toutes choses sont d’abord
confiées à l’homme qui faillit toujours, et alors Dieu les accomplit en
bénédiction et en puissance, mais avec une gloire infiniment supérieure, selon
ses conseils dans le second Adam, avant la création du monde.
L’établissement
d’Israël, accomplissement du but final de Dieu pour Son peuple
Ainsi ce chapitre nous fournit des indices très clairs de ce dont Dieu assure
l’accomplissement dans les derniers jours, [3:11] lorsqu’il se montrera en effet
Seigneur de toute la terre, en Israël ramené en grâce par sa puissante efficace.
Et il faut être attentif à ce témoignage rendu au but de Dieu en établissant
Israël dans sa terre. [3:15] Le temps de la moisson viendra et la force de
l’ennemi débordera. Mais comme chrétien on est déjà au delà. La force de
l’ennemi a franchi toute limite dans la mort de Jésus, et l’on ne dit pas
maintenant : « Seigneur de toute la terre », mais : « Il a toute puissance dans
les cieux et sur la terre ».
Remarquons encore comment Dieu encourage son peuple. [1:2-3] Il faut combattre, il faut que la plante des pieds soit posée en chaque lieu de la terre de promesse pour la posséder, et que dans les combats on sente et la force de l’ennemi et l’entière dépendance de Dieu. Mais quand on combat franchement pour lui, Dieu veut aussi qu’on sache que la victoire est assurée. [2:24] Les espions disent à Josué : « Oui, l’Éternel a livré tout le pays en nos mains, et aussi tous les habitants du pays se fondent devant nous ». Voilà ce qu’on sait et ce qu’on éprouve par le témoignage du Saint Esprit, si différent de celui de la chair, apporté par les dix hommes qui étaient revenus avec Caleb et Josué [(Nomb. 13:32-34)].