Introduction
Jonas, histoire du cœur de l’homme ayant reçu le témoignage de Dieu
Le livre du prophète Jonas nous offre une histoire susceptible d’être appliquée
à bien des sentiments qui naissent dans les cœurs dans tous les temps. Son
histoire personnelle, histoire d’une âme intègre au fond, mais qui n’avait pas
le courage de marcher franchement dans la volonté de Dieu, se mêle assez avec sa
prophétie pour rendre cette application individuelle assez facile et assez
naturelle. Cependant, l’histoire de Jonas est celle d’un témoin envoyé de la
part de Dieu, plutôt que d’un fidèle dans sa vie ordinaire. C’est l’histoire du
cœur humain, lorsque le témoignage de Dieu envers le monde lui a été confié, et
des voies souveraines et gouvernementales de Dieu à la suite de ce que ce cœur
produit. C’est ce qui fait que nous trouvons dans l’histoire de Jonas un tableau
de celle des Juifs sous ce rapport, et même à certains égards du Messie, sauf
que le Messie y est entré en grâce et y a été toujours parfait. Nous allons
signaler les grands traits que l’Esprit de Dieu a voulu faire ressortir dans ce
récit, car, sous ce rapport, cette prophétie est d’un profond intérêt.
Enseignements de
l’histoire de Jonas, dont le fait prophétique fournit le cadre
Il est évident que les faits prophétiques ne forment que l’occasion et le cadre
des grands principes qui en découlent, ou plutôt le fait prophétique, car la
prophétie se borne à la menace de la destruction de Ninive dans quarante jours
[(3:4)] , menace détournée par la repentance de cette ville [(3:10)]. C’est
l’histoire de Jonas qui fait la plus grande partie du contenu du livre.
Témoignage de Dieu,
grâce manifestée et cœur de l’homme
Jonas doit annoncer le jugement, mais ne peut supporter la grâce, par orgueil
Ninive, qui représente le monde dans sa grandeur naturelle, pleine d’orgueil et
d’iniquité, et oublieuse de Dieu et de son autorité, avait mérité le juste
jugement de Dieu [(1:2)]. C’est là l’occasion de tout le développement des voies
de Dieu qui se trouve dans ce livre. Jonas est appelé à annoncer ce jugement. La
misère de l’homme auquel le témoignage de Dieu est confié, est d’attacher à
lui-même l’importance du message dont il est chargé. Que Dieu le fasse dans sa
grâce, c’est ce que l’histoire de cette grâce nous fait voir ; que l’homme qui
en est chargé le fasse, ce n’est qu’orgueil et vanité. Il en résulte qu’il ne
peut pas supporter la grâce dont Dieu use envers les autres, ni aucune
communication de ses pensées ou de sa nature qui soit par un autre moyen que
lui, lors même que ce serait en grâce. C’est lui qui fait la chose, selon lui ;
c’est lui qui doit en avoir la gloire, et ainsi toutes les pensées qu’il a de
Dieu se limitent à son point de vue, à la portion que Dieu lui a confiée dans
son message. Comparez ce que nous avons vu dans les cas de Moïse et d’Élie,
serviteurs si éminents de Dieu. Le sentiment de cette suprématie de Dieu, qui
peut faire grâce, est trop fort pour le cœur. On ne peut pas le supporter, à
moins qu’on ne s’anéantisse à ses propres yeux, pour faire simplement la volonté
de Dieu quelle qu’elle soit ; on laisse alors à Dieu toute sa gloire, et s’il se
glorifie en faisant grâce, on l’en bénit du fond de son cœur. Autrement, on aime
à manier l’épée de sa vengeance, ce qui est plus en harmonie, hélas ! avec nos
propres cœurs, et fournit le moyen de s’attribuer beaucoup plus d’importance.
L’homme veut se venger
pour manifester sa puissance, mais Dieu seul fait grâce
Veux-tu que nous fassions descendre le feu du ciel comme l’a fait Élie ? [(Luc
9:54)] voilà l’expression naturelle du cœur ; car la vengeance est la
manifestation de la puissance. La grâce laisse l’homme qui a manqué, jouir de la
bonté ; elle se refuse à faire intervenir la puissance, en épargnant ceux contre
lesquels on aurait pu l’exercer ; d’un autre côté, Dieu seul peut faire grâce.
La menace de vengeance se lie, dans la pensée, à celui qui a reçu l’autorité
pour l’annoncer. On craint le message et le messager. Un homme gracié est plus
occupé de sa propre joie et de celui qui a fait grâce, que de celui qui a
apporté le message. Au reste, la grâce se rapporte à la frayeur qu’inspire le
jugement dont on est menacé. Or, si le messager n’est pas imbu lui-même de
l’esprit d’amour, il sent la présence d’un Dieu qui est au-dessus de ses pensées
; il s’en effraie, car il ne le connaît pas. Il craint pour sa propre importance
aussi, si ce Dieu est meilleur que son cœur petit ne le voudrait et que
n’exprime le message qui lui est confié.
Jonas fuit Dieu car son
cœur étroit en sent la grâce qui le rabaisse
Tel était le cas de Jonas, quoiqu’il craignit Dieu. Il s’enfuit de devant la
présence de l’Éternel, sentant qu’il ne pouvait pas compter sur Lui pour
satisfaire des exigences qui trahissaient toute la petitesse de son cœur étroit
(comparez les chapitres 1:3 ; 4:2).
L’homme aime les
pensées de Dieu quand il peut s’en donner de l’importance
On sent que Dieu est au-dessus des pensées de nos cœurs. D’un autre côté, la
vérité de Dieu nous plaît, lorsque nous pouvons nous en revêtir pour notre
propre importance. Il en a été ainsi d’Israël.
Image d’Israël se
glorifiant du témoignage de Dieu et s’opposant à la grâce
Israël a été le vase du témoignage de Dieu dans le monde, et s’en glorifia, se
revêtant d’honneur lui-même. La grâce envers les gentils lui a été
insupportable. C’est par son opposition à cette grâce qu’il a comblé la mesure
de son iniquité, et a fait venir la colère de Dieu sur lui (comparez És. 43:10,
et 1 Thess. 2:16).
Principes selon
lesquels le témoignage de Dieu peut être rendu
L’homme doit rendre témoignage ; mais, dans cette position, Israël y a failli
En outre, dans cette prophétie, sont exposés deux principes sur lesquels le
témoignage de Dieu peut, de fait, être rendu. En premier lieu, l’homme est
appelé à rendre témoignage, acte de fidélité à Dieu pour lequel il est
responsable. C’est la position dans laquelle nous avons déjà vu qu’était placé
Israël. Toute son histoire est à l’appui de cette pensée. Favorisé de Dieu par
sa proximité de Lui, Israël aurait dû offrir à tout le monde le témoignage de ce
qu’était le seul vrai Dieu. Mais incapable de saisir la grâce envers les gentils
(et en tout temps la maison de l’Éternel était une maison de prière pour toutes
les nations [(És. 56:7)]), il a failli, même dans le maintien de sa propre
fidélité ; et ainsi en dernier résultat, ce peuple qui était, comme peuple, le
seul moyen dans le monde de faire valoir le caractère de Dieu, a entraîné les
autres dans l’orage des jugements divins qui devaient tomber sur lui. C’est le
tableau que nous présente Jonas dans sa propre histoire, à sa première réception
du message de Dieu. C’est ce qui aura lieu à la fin des temps. Israël, infidèle
à Dieu au milieu des flots de ce monde, insensible par son incrédulité stupide
au jugement qui s’avance pour l’engloutir, entraînera toutes les nations dans
les résultats de son péché, jusqu’à ce que l’intervention de Dieu seul les amène
à reconnaître sa puissance et sa gloire.
Nécessité de faire
valoir le témoignage en grâce devant tous, sous peine de manquer dans la marche
Disons ici que cela est toujours vrai. Si ceux auxquels Dieu, dans sa grâce, a
confié un témoignage, ne font pas valoir ce témoignage en faveur des autres,
selon la grâce qui l’a accordé, ils manqueront bientôt à la fidélité dans la
marche qui leur est propre devant Dieu. S’ils reconnaissaient vraiment Dieu, ils
se sentiraient tenus à faire connaître son nom, à apporter aux autres la
bénédiction qui s’y trouve. S’ils ne connaissent pas sa gloire et sa grâce, ils
ne sauront certainement pas se maintenir dans leur marche devant Lui. Dieu étant
notre seule force et plein de bonté, il ne saurait en être autrement.
John Nelson Darby