CHAPITRE 2

Positions historiques de la Grande-Bretagne et de l’Empire romain au début de l’ère chrétienne.

JULES CÉSAR, pour justifier son invasion de la Grande-Bretagne, allègue que les Britanniques ont été les agresseurs, les levées anglaises prenant le champ de bataille contre lui dans toutes les campagnes gauloises. Ces singulières collections d’événements cardinaux connues sous le nom de « Triades de l’île de Bretagne » corroborent cette affirmation. Avant les campagnes de César dans le nord de la Gaule, une armée britannique de Cinq mille hommes, appelés dans ces triades la seconde armée d’argent, sous le commandement des deux neveux de Cassibelaunus ou Caswallon, envahirent l’Aquitaine, mirent en déroute le proconsul romain Lucius Valerius Præconinus à Tolosa, et forcèrent le consul Lucius Manilius à s’enfuir avec la perte de tout son commissariat. À la nouvelle de ces revers, César tourna ses armes contre les Vendéens, qui faisaient un commerce florissant avec la Bretagne, et dont la marine fournissait le transport de ces auxiliaires. Tant que la flotte vénitine, qui, d’après la description qu’en fit César, ne déshonorerait pas l’état actuel de l’architecture nautique, resta maîtresse des mers étroites, l’invasion fut impraticable. Après sa destruction, César s’avança à marches lentes jusqu’à Portius Iccius (Witsand), près de Calais, et le 5 août 55 avant J-C., la flotte romaine traversa la Manche en deux divisions. Cette première campagne dura cinquante-cinq jours, pendant lesquels César ne parvint pas à s’avancer au-delà de sept milles du lieu du débarquement, perdit une bataille et vit son camp tenté par l’ennemi victorieux, chose inouïe dans sa carrière continentale. 1

1Dion Cassius affirme que l’intention initiale de César était de porter la guerre à l’intérieur des terres, mais trouvant ses forces insuffisantes pour faire face aux Anglais sur le terrain, il décida brusquement de mettre fin à la campagne. (Lib. xxxix. p. 100). 115éd. 1606, fol.)

La seconde expédition s’embarqua sur plus d’un millier de navires, et, portant l’armée qui acheva ensuite la conquête du monde sur les champs de Pharsaleté et de Munda, partit de Witsand le 10 mai avant J-C. 54. La campagne dura jusqu’au 10 septembre, date à laquelle la paix fut conclue à Gwerddlan (Verulam, ou Saint-Albans), le point le plus éloigné (70 milles) de la côte que César avait pu atteindre. Les conditions ne sont pas précisées ni dans les Triades ni dans les Commentaires. Des otages et un tribut sont mentionnés par César, mais il est certain, d’après de nombreux passages des auteurs augustéens, qu’aucun Breton éminent n’a quitté l’île en otage ou en prisonnier. À la conclusion du traité, César quitta Verulam pour Londres, où il fut reçu au Bryn Gwyn (mont blanc9) par Cassibelaunus, le pendràgon, ou dictateur militaire britannique, avec une magnificence qui semble avoir trouvé une grande faveur aux yeux des anciens bardes, qui l’enregistrent avec une grande exactitude. Ne laissant pas un seul soldat romain derrière lui, César débarqua ses troupes à Rutupium, à dix heures du soir, et arriva à Witsand à l’aube le lendemain matin, 20 septembre avant. J-C. 54.

9La vieille croyance qu’une partie de la Tour de Londres a été construite par Jules César est connue de tout le monde, et la Tour Blanche a été désignée comme la partie. La Tour Blanche semble être une version du nom britannique original Bryn Gwyn, mais que César y ait été logé, ou qu’il ait posé sa première pierre, ou qu’il n’ait jamais été reçu à Londres, il nous semble qu’il y a tant de bon sens dans les sentiments exprimés par Shakespeare sur ce point dans la bouche du jeune roi Édouard V, que nous ne nous excusons pas de les transcrire :

« Le prince Édouard. Jules César a-t-il construit la Tour, milord ? Gloucester. C’est lui, mon gracieux seigneur, qui a commencé ce lieu, qui, depuis les siècles suivants, s’est réédifié.

Éd. Pr. Est-ce qu’il est consigné dans les annales, ou bien est-il rapporté successivement d’âge en âge qu’il l’a construit ?

D’après les annales, mon gracieux seigneur.

Mais dites, monseigneur, qu’il n’était pas enregistré ; Je pense que la vérité doit vivre d’âge en âge, comme elle l’a été pour toute la postérité, jusqu’au jour général de la fin.

Si sage, si jeune !

Je dis que sans personnages, la célébrité vit longtemps.

Le roi Richard IIIact. iii, sc. I.

Les tests du succès ou de l’échec d’une campagne sont ses effets. Le effets de la seconde invasion julienne démontrent qu’à Rome et en Gaule Il a été considéré comme un échec plus grave que le premier. La phrase citée par Lucain :

« Territa quæsitis ostendit terga Britannus3 », comme un sarcasme commun dans la bouche du parti pompéien contre César, peut être écarté comme l’exagération odieuse de la défaite sur le Darent et de la perte de son épée au profit de Nennius, frère de Caswallon ; mais il est indéniable que l’invasion coûta à César pour un temps la perte de toutes ses acquisitions continentales. Avant qu’il pût disposer de ses troupes dans ses quartiers d’hiver, les Trévires, les Éburons, les Sénons et les Sicambres prirent les armes, et l’œuvre de la conquête gauloise dut être rejouée.

3Aulus Gellius a écrit un récit de l’invasion de la Bretagne par César. Il commémore un cri britannique qui semble avoir produit une impression très vive sur l’esprit romain. Horribilis ille Britannorum clamor, Tori pen i Caisar » (« Ôtez la tête de César »).

Pour bien apprécier les capacités militaires de Caswallon et les ressources du peuple anglais à cette époque de la première collision de notre île avec le continent, il ne faut pas oublier qu’ils étaient engagés contre le général peut-être le plus habile de l’antiquité, à la tête d’une armée à laquelle, soit avant, soit après l’invasion, La France, l’Espagne, l’Allemagne occidentale, l’Afrique, l’Égypte, l’Asie et enfin Rome elle-même ont succombé ; les conquérants, en effet, de l’Europe, de l’Asie et de l’Afrique, et les véritables fondateurs de la dynastie impériale des Césars. La double répulsion de l’expédition julienne par les anciens Bretons n’a jamais reçu l’importance ni la considération qu’elles méritaient. Il reste pourtant sans précédent dans l’histoire britannique.

La barbarie est un terme très indéfini. Pour les Grecs et les Romains, toutes les autres nations étaient, dans le langage courant, des « barbares », c’est-à-dire des « étrangers ». S’il faut prendre les amusements populaires pour l’épreuve, les Romains étaient eux-mêmes les plus barbares des nations de l’Europe. Le Colisée est la preuve gigantesque de la race des loups humains qu’ils se considéraient eux-mêmes à juste titre. Lorsqu’on proposa d’introduire à Athènes les jeux brutaux des gladiateurs, le philosophe cynique lui-même s’écria : « Il faut d’abord abattre la statue de la Miséricorde que nos ancêtres ont érigée il y a quinze cents ans. » Un abîme semblable séparait les Anglais de l’humeur romaine, et les récits de ce dernier peuple à l’égard du premier doivent être reçus avec à peu près la même prudence que ceux des ennemis modernes de la même race insulaire réservée et peu communicative. Boadicée, dans son discours prononcé par Dion Cassius, observe que, bien que la Grande-Bretagne ait été ouverte au continent pendant un siècle, sa langue, sa philosophie et ses usages sont restés un aussi grand mystère que jamais pour les Romains eux-mêmes ; Et la même remarque, avec peu de modifications, s’applique encore. Toutes les preuves fournies par César réfutent la notion de barbarie matérielle. L’agriculture était universelle, le blé partout abondant, les pâturages une branche distincte de la richesse nationale, la population si nombreuse qu’elle excitait son étonnement. multitudo hominum » — la preuve la plus sûre et la plus satisfaisante d’un état social sain et de moyens de subsistance suffisants.4

4 « Hominum infinita multitude » est l’expression de César. Diodore appelle la Grande-Bretagne πολυάνθρωπον νσον. En 110 après. J-C. Ptolémée énumère cinquante-six villes ; plus tard, Marcianus cinquante-neuf, πόλεις ἐπὶσημους Les architectes britanniques étaient très demandés sur le continent. « Redundabat Britannia artificibus », dit Eumenius à son époque.

Les points qui paraissent être à l’origine de l’idée de barbarie certains esprits avec les anciens Bretons sont, qu’ils se sont dépouillés pour combattre, ce qui tous les Britanniques, tous les écoliers britanniques continuent de le faire, et aucune autre nation ne le fait ; et, deuxièmement, qu’ils se tatouaient le corps avec divers dispositifs d’un bleu profond C’est une pratique que le marin anglais chérit dans toute sa liberté originelle, et dont il ne sera probablement jamais sevré, car ces usages immémoriaux semblaient enracinés dans quelque chose de beaucoup plus profond que le goût ou l’imitation. Nos soldats conservent aussi encore la propension à se débarrasser de tout accoutrement et de tout encombrement dans la bataille, et à charger aussi nus que les règlements militaires le leur permettront. Pourtant, il serait ridicule de qualifier nos marins et nos soldats de barbares dans le sens moderne du mot, parce qu’ils continuent à cet égard à être « de vrais Bretons bleus et anciens ». Dans tous les éléments essentiels de l’humanité, nos ancêtres britanniques se compareront avec beaucoup d’avantage aux meilleures époques de la Grèce ou de Rome. Pendant la guerre, le Breton, après les invasions juliennes, marchait dans les rues de Rome en tant que seul homme libre d’Europe, désigné comme l’exception au monde :

« Invictus Romano Marte Britannus. » 10

Pendant quatre-vingt-dix-sept ans, aucun Romain ne s’aventura plus à poser un pied hostile sur la l’île, et quand l’aigle de Romulus étendit de nouveau ses pignons jusqu’à la vents tempétueux de l’océan, c’est alors qu’aucun autre ennemi, invaincu, n’affrontait son de l’Euphrate à Gibraltar, et les forces de tout l’empire étaient prêt à suivre sa direction contre la nationalité libre et solitaire de l’Occident.

10

Tibulle. Horace insinue que le Breton n’avait guère été touché par les campagnes de César :

« Intactus aut Britannus ut descenderet Sacra catenatus via. »

Dans une autre Ode, il écrit qu’il ne manquait rien d’autre que la conquête de la Bretagne pour faire d’Auguste « presens divus in terris », Od, lib. iii. 5.

Caswallon, l’habile antagoniste de César, régna sept ans après l’invasion. Auguste César succéda à Jules en 30 AV. J-C. Désormais, Rome doit être considérée comme l’unité du continent européen, de l’Afrique du Nord et de l’Asie, en action à partir d’une cour centrale sous une série d’autocrates s’écartant rarement de la politique impériale définie par la famille Julienne. Auguste envoya des ambassadeurs en Grande-Bretagne pour demander la restitution des trois Reguli des Coritani, ou Coraniaid, Dumno, Belaunus et Jernian, dans leurs domaines, confisqués pour trahison. Tenuantius, fils de Caswallon, monarque doux et pacifique, avait envoyé ses deux fils, Cynvèlin et Llyr (Lear), faire leurs études à Rome, où ils furent élevés avec ses neveux dans son palais par Auguste lui-même, qui s’était fait une règle, comme Suétone nous l’apprend, d’instruire en personne les branches cadettes de sa famille. Cynvèlin servit ensuite dans les campagnes d’Allemagne sous les ordres de Germanicus. Il avait succédé à son père, et reçut les ambassadeurs romains avec courtoisie, mais refusa péremptoirement l’ingérence d’un potentat étranger dans les affaires de l’île. Auguste déplaça la moitié des forces disponibles de l’empire dans les ports gaulois de la Manche, mais il n’eut jamais l’intention sérieuse d’une invasion. Cynvèlin concentra son armée à Douvres. Une flotte britannique, comme nous l’apprend Dion Cassius, a balayé la Manche. Les préparatifs d’Auguste, pressés tardivement, indiquaient que les motifs prudentiels avaient déjà supplanté les suggestions de l’orgueil. Il n’avait jamais conduit ses campagnes en personne, et là où le génie de Julius avait été déconcerté, une habileté inférieure n’encourait probablement que la disgrâce et le désastre. Un revers, comme Horace eut le courage de l’avertir (Ode 35, lib. v), serait suivi d’un soulèvement de la faction oligarchique en Italie. Cynvèlin ne tarda pas à profiter de cette réticence. Une conférence avec l’ami impérial et précepteur de sa jeunesse fut sollicitée. Le résultat fut le triomphe de la diplomatie britannique, un succès beaucoup plus rare que celui des armes britanniques. Non seulement l’empereur abandonna ses exigences, mais les lourds droits précédemment perçus sur les marchandises britanniques furent réduits à un tarif très léger (Strabon, lib. iv. c. 5). Des relations amicales ont été rétablies. Les nobles britanniques s’installèrent de nouveau à Rome et on les vit dédier leurs offrandes aux sanctuaires du Capitole.

Cymbeline, ou Cynvèlin, après un règne de trente-cinq ans, fut remplacé par son fils aîné Cuiderius (Gwyddyr), son cadet, Arviragus (Gweyrydd), recevant le duché de Cornouailles (Cernyw), qui, selon les lois britanniques, était un duché royal. Les nombreuses monnaies de Cynvèlin (Cunobelinus) qui subsistent de nos jours, sont les seuls monuments que nous possédions d’un atelier national en Europe occidentale, en dehors de celui de Rome. Le cheval, que l’on croit parfois avoir été introduit comme emblème national par les Saxons, est l’un des types les plus communs sur eux, la Grande-Bretagne étant bien avant le règne de Cymbeline célèbre pour sa race de coursiers, et l’audace et les réalisations de ses conducteurs de chars.

Nous entrons maintenant dans l’époque contemporaine de saint Paul.

Comme le personnage central du groupe des personnages historiques que nous allons dépeindre est Caràdoc, roi de Silurie, nous sommes appelés à noter un peu plus largement sa naissance et son caractère.11

11Dans la langue britannique, l’accent est invariablement sur l’avant-dernière syllabe d'un mot (penult): Caràdoc, Cynvèlin, Talièsin, Llewèlyn, &c. Les Romains ont latinisé Caràdoc par Caractacus, les Grecs l’ont hellénisé plus correctement par Caratacos.

C’est un sujet d’étonnement et d’indignation combien peu de héros patriotiques les longues annales de l’histoire présentent à nos yeux. Il n’y en a pas un sur un siècle. En feuilletant les pages qui relatent les agressions des Romains contre diverses nations, nous cherchons en vain pour la plupart des héros à leur affronter. Quand nous avons nommé un Viriathe pour l’Espagne, un Hannibal pour Carthage, un Arminius ou Herman pour la Germanie, un Mithridate pour l’Asie, nous avons épuisé le catalogue de trois continents. La Grande-Bretagne est ici aussi une exception pour le monde, car elle montre une succession presque ininterrompue de patriotes de premier ordre, depuis Caswàllon et Caràdoc, en passant par les Arthur et les Cadwallos, jusqu’aux Wallace et aux Glyndore de l’époque normande. Nous n’avons pas non plus de guerres aussi longues et aussi obstinées que celles qui furent disputées, d’abord entre les Bretons et les Romains, et ensuite entre les mêmes Bretons et les Saxons avec d’autres tribus teutons, après la chute du grand empire. Mais Caràdoc s’impose avant tout comme l’idéal de ce que devrait être un patriote sur le terrain. Avec Arminius, la dernière étincelle de liberté s’était éteinte sur le continent. L’Afrique du Nord avait finalement été incorporée, par les armes de Suétone, Paulin et Cneius Geta, à l’empire romain. La Gaule, l’Espagne, l’Allemagne méridionale, l’Italie, l’Europe de l’Est et l’Asie jusqu’à l’Euphrate jouissaient d’une paix profonde et d’une grande prospérité matérielle à l’ombre énorme du Capitole romain. Les Césars étaient assis, fermes comme les sept collines elles-mêmes, sur le trône. À l’est et à l’ouest, au nord et au sud, il n’y avait pas d’ennemi à rencontrer ; tout n’était que sujétion et repos. Les formidables armées de l’État impérial suspendaient leurs boucliers faute d’ennemi, ou étaient employées à la formation des nombreuses routes militaires qui rayonnaient comme un réseau de Rome à Finisterre et à Calais vers l’ouest, et vers les rives du golfe Persique vers l’est. C’était, en vérité, le plus grand et le plus magnifique des empires, dont l’étendue, bien qu’embrassant 1 600 000 milles carrés et une population de 120 000 000 de sang caucasien ou semi-caucasien, était sa moindre gloire. Rien n’a vu le jour depuis. Ses simples fragments ont suffi pour les royaumes modernes. Les pays gouvernés par des proconsuls appellent aujourd’hui leurs dirigeants empereurs. Fertiles et bien cultivés, non seulement ces pays étaient situés dans la partie la plus saine de la zone tempérée, mais ils fourmillaient de tous les matériaux de la plus belle soldatesque, de toutes les ressources d’une richesse physique inépuisable. « Urbs Roma orbs humana » n’était pas une vantardise sans fondement, car à l’intérieur de la circonférence de l’empire se trouvaient presque toutes les terres et toutes les races qui avaient contribué à la civilisation et au progrès de l’humanité. Tous les appareils de cette vaste unité de loi et d’armes étaient sous les ordres d’un seul despote, et allaient maintenant être dirigés vers les ports septentrionaux de la Gaule pour l’invasion de la seule terre non conquise de l’ancienne civilisation.

Une armée et un général formaient la force à laquelle Caswallon était appelé à résister ; mais Caràdoc fut sommé par la voix de son pays d’entrer en campagne contre un empire qui déployait une succession d’armées dans le plus haut état de discipline, sous une succession de commandants habiles et expérimentés. C’est la première fois que la Grande-Bretagne est confrontée au monde en armes, et la petite île s’en acquitte noblement.

Brân, ou Brennus, père de Carâdoc, était fils de Llyr, frère de Cynvèlin, surnommé Llyr Llediaith, à cause de l’accent étranger qu’il avait donné à la prononciation de sa langue maternelle par son éducation sous Auguste à Rome. Pendant la menace d’invasion d’Auguste, il commande la flotte britannique dans la Manche. Tibère Claude César succéda à Auguste et Caligula à Tibère en 37 apr. J-C., année marquée par la naissance de Néron, de Josèphe l’historien juif et de Julius Agricola, le futur commandant des forces romaines en Grande-Bretagne. La tranquillité qui régnait dans l’empire incita Caligula à renouveler les tentatives de conquête que le premier et le second Césars n’avaient pas réussi à réaliser, ou qu’ils avaient prudemment léguées à leurs successeurs. Cependant le caractère de cet empereur, mêlé de manie et de vice, laissa un mémorable sceau de ridicule sur toute l’expédition. Les armées de la Gaule et du Rhin se donnent rendez-vous à Boulogne. Une flottille romaine recueillie dans les ports espagnols était amarrée, ostensiblement préparée pour embarquer les troupes, dans la Seine. Cependant, l’apparition d’une flotte anglaise commandée par Arviragus déconcerta et mit un terme abrupt à l’entreprise, si tant est qu’elle ait jamais été sérieusement méditée. Caligula, qui éprouvait une satisfaction morbide à burlesquer les mesures les plus importantes de l’État, et à scandaliser ses sujets par les plus folles bizarreries du caprice impérial, fit une grande revue de son splendide corps expéditionnaire sur les sables de Boulogne. À son époque, Il expia la gloire qui entourait déjà son front, comme quelqu’un qui avait conduit ses troupes, comme Bacchus, Hercule et Sésostris, jusqu’aux confins de l’océan terrestre. Il demanda si cette renommée devait être compromise par l’exploration armée d’une île que la nature elle-même avait soustraite à la puissance et à la juridiction des dieux de Rome, et que les campagnes de César divin lui-même n’avaient fait que réussi à pointer du doigt les merveilles du monde continental. « Laissez-nous, mes camarades, continua-t-il, reprenant la phrase bien connue du grand Julius (commilitones), laissons ces Bretons tranquilles. Faire la guerre au-delà des limites de la nature n’est pas du courage, mais de l’impiété. Chargeons-nous plutôt du butin exsangue de l’océan Atlantique que la même déesse bienfaisante de la nature déverse si abondamment sur ces sables à nos pieds. Suivez l’exemple de votre empereur : voici, ajouta-t-il en joignant l’acte à la parole, je tresse pour le laurier cette guirlande d’algues vertes autour de mon front immortel, et pour les spolia optima je remplis mon heaume de ces coquilles lisses et brillantes. Décorés de ceux-ci, nous retournerons à Rome, et, au lieu d’un roi britannique, Neptune et Nérée, les dieux de l’océan eux-mêmes, suivront les captifs jusqu’au Capitole derrière notre char triomphal. À chacun de vous, mes compagnons d’armes dans cette entreprise ardue, je promets une gratification d’une année supplémentaire d’appointement en reconnaissance méritée de vos services et de votre fidélité à votre empereur.

Cette singulière harangue, que nous sommes tentés de regarder comme le sarcasme pratique d’un despote qui n’est pas tout à fait fou de l’ambition de toute la race des conquérants, fut accueillie par des tonnerres d’acclamations. L’expédition projetée avait d’abord été vue avec un extrême dégoût par les soldats, et, malgré l’indignation ouvertement exprimée par les officiers, ils n’hésitèrent pas à donner libre cours à leur satisfaction, et, par des plaisanteries militaires et des éclats de rire, à imiter l’exemple de leur maître impérial. La flotte anglaise regardait avec étonnement ces vétérans bronzés et vêtus de mailles, s’amusant à ramasser des coquillages sur le bord de la mer. Le camp fut démantelé, et Caligula entra dans Rome en procession triomphale, avec son armée, le jour de son anniversaire, le 31 août de l’an 40. Il fut assassiné l’année suivante, dans la 29e année de son âge (janvier 24), et succéda à Claudius, alors dans sa 50e année.

Le père de Tibère Claudius César fut Drusus Claudius Nero, élevé d’abord au poste de questeur, puis au préteur, puis chargé de conduire les campagnes de Rhénanie et de Germanie. Il fut le premier commandant romain à naviguer en force sur l’océan allemand. Il porta ses armes jusqu’au centre de la Germanie, et Suétone dit qu’il fut dissuadé d’aller plus loin par l’apparition soudaine dans sa marche d’une femme d’une stature et d’une beauté plus que mortelles, lui ordonnant d’arrêter les bannières romaines où elle apparaissait. Il mourut subitement, non sans soupçon d’escroquerie, dans la Castra Æstiva, appelée depuis Scelerata, alors qu’il se préparait à étendre ses conquêtes dans une autre direction. Son corps était transporté de ville en ville, et enterré avec les honneurs de l’État, Auguste prononçant lui-même le panégyrique funèbre, dans le champ de Mars à Rome. Presque lié aux Césars, Drusus resta jusqu’à la fin un républicain sévère. Il laissa trois enfants, Germanicus, Livilla et Claudius ; le dernier né à Lyon. La petite enfance, l’enfance et la jeunesse du futur empereur se passèrent sous la surveillance la plus stricte. Il n’était considéré que comme un idiot. « Il est aussi imbécile que mon fils Claude » était une phrase ordinaire dans la bouche de sa mère Livie lorsqu’elle voulait sous-entendre un degré extraordinaire de stupidité. Son apparence ne démentait pas son caractère. Grand et plein de corps, et possédant, lorsqu’il était assis, l’apparence extérieure de la dignité, en mouvement ses genoux tremblaient, sa tête tremblait perpétuellement, sa langue bégayait, son rire était outrageusement violent, et sa colère marquée par une écume abondante à la bouche. Cruel et sanguinaire par nature, comme l’était d’ailleurs tout Romain, il insistait pour être présent chaque fois qu’un criminel était mis à la torture. Il ne manquait jamais de faire le signe de « pas de quartier » contre les gladiateurs infirmes, et se plaisait avec une horrible voracité à se réjouir de l’expression mourante de leurs visages. Il s’asseyait du matin au soir, négligeant les heures ordinaires de rafraîchissement, à la bestiariaou combats de bêtes sauvages, et cependant il était personnellement le plus vil et le plus méprisable des lâches. Il ne se rendait jamais à une invitation qu’entouré de gardes, qui fouillaient tous les invités avant d’entrer dans l’appartement, précaution exercée sur tous les citoyens qui l’abordaient. Sur beaucoup de points, il y a une forte ressemblance entre Claude et notre Jacques Ier : tous deux étaient adonnés aux plus vils compagnons et à la bouffonnerie, tous deux étaient des poltrons, tous deux des gourmands grossiers, et tous deux étaient des pédants de la teinture la plus profonde. Cependant, il faut avouer que la perte de l’ouvrage de Claude sur les races et les antiquités de l’Italie primitive est de celles qui ne pourront jamais être remplacées, les quelques fragments que nous possédons prouvant qu’il a été une mine de matières non digérées, mais très précieuses et authentiques.

Opposons à l’empereur romain le patriote britannique. Caractacus est né à Trevran, le siège de son père Bran, dans l’actuelle paroisse de Llamlid, dans le Glamorganshire. Il reçut son éducation au cor druidique de Caerleon-on-Usk, où la plupart des nobles siluriens furent formés dans le cycle des accomplissements celtiques. Parmi ceux-ci, l’art oratoire était l’un des principaux, et nous possédons dans le discours du roi d’Angleterre devant Claude un beau spécimen du style hardi, libre et laconique inculqué dans ces anciens collèges nationaux. Il y est fait allusion à une longue lignée d’ancêtres illustres, « clari majores ». Il semble étrange à ceux qui sont habitués à penser qu’une généalogie normande, datant de 1066 après J-C., est ancienne, d’entendre ce roi britannique, mille ans auparavant, face à face avec un empereur romain, et au cœur du Capitole se délivrer fièrement d’une lignée royale dont la source, comme celle du Nil, se perdait dans son éloignement même. À l’époque des clans, cependant, la préservation d’un pedigree signifiait la préservation de tout ce qui avait de la valeur en termes de sang, de rang et de propriété. Sans elle, un homme était un hors-la-loi ; Il n’avait pas de clan, donc pas de droits légaux ni de statut. Les généalogies étaient donc gardées avec une extrême jalousie, et enregistrées avec une douloureuse exactitude par les bardes hérauts de chaque clan. Lors de l'accueil public, à l'âge de quinze ans, d'un enfant dans le clan, sa généalogie familiale était proclamée, et tous ceux qui la contestaient étaient commandés de se manifester. La généalogie et l’héritage, en effet, étaient tellement identifiés dans l’ancien code britannique, qu’un héritier, même dans la neuvième descendance, pouvait racheter, à l’aide d’une évaluation par jury, toute partie d’un domaine héréditaire dont la nécessité avait forcé ses ancêtres à se séparer. Comme la succession de ces clari majores peut intéresser l’antiquaire, nous l’extrayons des Manuscrits de Pantliwydd de Llan-sannor :

״ Généalogie de Caràdoc. Caràdoc ab Bran Fendigaid, ab Llyr Llediaith, ab Baran, ab Ceri Hirlyn Gwyn, ab Caid, ab Arch, ab Meirion, ab Ceraint, ab Greidiol, ab Dingad, ab Anyn, ab Alafon, ab Brywlais, ab Ceraint Feddw, ab Berwyn, ab Morgan, ab Bleddyn, ab Rhun, ab Idwal, ab Llywarch, ab Calchwynydd, ab Enir Fardd, ab Ithel, ab Llarian, ab Teuged, ab Llyfeinydd, ab Peredur, ab Gweyrydd, ab Ithon, ab Cymryw, ab Brwt, ab Selys Hên, ab Annyn Tro, ab Britain, ab Aedd Mawr. »

Trente ans pour une génération, ce pedigree nous ramène 1 080 ans en arrière, c’est-à-dire 330 ans avant la fondation de Rome. Tous ces ancêtres n’ont pas échappé à la réprobation des chroniqueurs bardiques – l’un d’entre eux en particulier, Ceraint Feddw, est stigmatisé comme un ivrogne irrécupérable, déposé par ses sujets pour avoir mis le feu juste avant la récolte aux terres à blé de Silurie. En l’an 36 apr. J-C., Bran résigna la couronne silurienne à Caràdoc et devint archi-druide du collège de Silurie, où il resta jusqu’à ce qu’on lui demande d’être l’otage de son fils. À l’époque de son avènement, Caràdoc avait trois fils, Cyllin ou Cyllinus, Lleyn ou Linus et Cynon, et deux filles, Eurgain et Gladys, ou Claudia.

En juillet de l’an 42, une ambassade britannique arriva à Rome de la part de Guiderius, se plaignant de l’encouragement que l’empereur avait donné aux intrigues de Beric et d’Adminius, deux réguli des Brigantes et des Coritani, qui, à la suite d’une correspondance traîtresse avec Caligula lors de la dernière invasion menacée, avaient été bannis par la Grande-Bretagne. Claude avait de bonnes raisons de refuser de recevoir les ambassadeurs. L’invasion de la Grande-Bretagne avait déjà été décidée, et les forces romaines se rassemblaient au rendez-vous habituel de Boulogne.

Quelles que fussent les insuffisances de l’empereur lui-même, jamais les grandes charges de l’État ne furent remplies par des hommes d’une plus grande capacité administrative, ou mieux à même de manier les vastes ressources militaires de l’empire. Aulus Plautius, général qui imitait les Scipions par la rigueur de sa discipline et la rapidité de ses marches, fut nommé au commandement de l’armée d’invasion. La flotte et les transports rassemblés étaient trop nombreux et trop bien équipés pour que la force navale britannique puisse y faire face, et elle retourna donc à Torbay. Cet obstacle ne fut pas plus tôt levé, qu’un autre, tout à fait sans pareil dans les annales de l’obéissance romaine, se présenta. L’armée refusa de s’embarquer et se mutina ouvertement. Les appels à leurs sacrements, ou serments d’allégeance militaires, n’ont pas réussi à les émouvoir, la seule réponse qu’ils ont suscitée étant : « Nous marcherons n’importe où dans le monde, mais pas hors de là. » Quatre-vingt-dix ans n’avaient pas effacé le souvenir des campagnes juliennes, du débarquement sanglant sur la plage de Walmer, des champs de bataille opiniâtres et des terribles charges de chars. La nouvelle de cet état de choses alarmant parvint bientôt à Rome, et Claude dépêcha aussitôt son affranchi et ministre favori, Narcisse, sur le théâtre de la désaffection. Convoquant l’armée, Narcisse, dont les fautes n’étaient pas celles d’une lâcheté morale ou physique, monta à la tribune du général et commença sa harangue. C’était la première fois qu’un eunuque osait s’adresser aux soldats romains. La stupéfaction et l’indignation tinrent quelque temps les légions muettes, mais lorsqu’il s’écria : « Il les conduirait lui-même en Bretagne », un cri d’exécration universel s’éleva, et se précipitant à la tente de Plautius, elles l’appelèrent pour donner le signal de l’embarquement. Profitant immédiatement de ce changement d’humeur, Plautius embarqua l’armée en trois divisions, et débarqua deux jours après à Rutupium, ou Ynys Ruthin, entre Thanet et Richborough.

De Douvres à Holyhead courait la chaussée britannique, construite par Dyfnwal et son fils, Beli le Grand, en 400 av. J-C., appelée Sarn Wyddèlin, ou la route irlandaise, Wyddèlin étant le terme britannique pour « Irlandais ». La corruption dans Watling Street n’est pas grande. Le long de la Sarn, Wyddèlin César avait dirigé sa marche, et Plautius déplaça ses troupes sur la même ligne. Il trouva l’armée britannique rassemblée sous les ordres de Guiderius et de Caràdoc à Southfleet, de l’autre côté de la Sarn, sur la plaine entre les collines du Kent et la Tamise. L’action s’est terminée par le repli des Britanniques sur Wimbledon Heath, où une deuxième bataille a été livrée, dans laquelle Guiderius est tombé. Son frère Arviragus lui succéda sur le trône, mais l’urgence nationale nécessita la création du pendragonate, ou militaire dictature, Caràdoc fut élu à l’unanimité à cette haute fonction, Arviragus donnant d’abord son vote en sa faveur, et consentant à agir sous ses ordres. Caràdoc retira ses forces de l’autre côté de la Tamise à Chertsey, Plautius suivant le long de la Sarn, aujourd’hui appelée « La Chaussée du Diable ». En tentant de forcer le passage de la Tamise à Kingston, le général romain fut déjoué trois fois. Il se rendit ensuite à Silchester, où il battit une division britannique à Nettlebed, à la tête de sa cavalerie allemande. dans l’Oxfordshire, et revenant par une marche forcée à Wallingford, il y traversa la Tamise, après une résistance désespérée. Dion Cassius, l’historien grec, donne une description vivante de l’action. Les Romains, conduits par Plautius, Flavius Vespasien, le futur empereur, et son frère, entrèrent dans le fleuve en trois colonnes, tandis que la cavalerie germanique le descendait à la nage et attaquait la position britannique en flanc. Mais la bêtise britannique, qui ne sait jamais quand elle est battue, semble être d’une date très ancienne. Dion dit que la lutte se poursuivit avec de légers interruptions pendant deux jours entiers du côté du nord, et que la défaite de Caràdoc fut finalement accomplie par une manœuvre audacieuse sur son flanc et sur ses derrières faite par Cneius Geta, le conquérant de la Mauritanie, qui en fut récompensé, bien qu’il n’eût pas encore atteint la dignité consulaire. avec les honneurs d’un triomphe. Cela en dit long sur les capacités de Caràdoc que, dans cette première bataille en tant que pendràgon, il ait pu tenir bon pendant deux jours de lutte incessante contre trois généraux tels que Plautius, Vespasien et Geta. Sans se décourager, il rassembla de nouveau ses forces, et Plautius, en essayant de le suivre, fut si rudement traité que des messages furent envoyés à Rome pour obtenir des instructions et des renforts. Claude lui-même quitta immédiatement Rome, et, traversant la Gaule, débarqua à Richborough, avec la deuxième et la quatorzième légion, leurs auxiliaires et un groupe d’éléphants amenés dans le but exprès de neutraliser les chars anglais. Il fit sa jonction avec Plautius à Verulam. Béric et Adminius l’avaient accompagné, et, comme il avait été convenu précédemment, les deux États des Icènes et des Coritani, ou Coraniaid, dès qu’ils firent leur apparition parmi eux, prirent les armes et proclamèrent leur alliance avec les envahisseurs, Caràdoc avait ainsi les Romains en avant et un pays insurgé en arrière. Dion appelle Caer Col, ou Colchester, le basileion ou résidence royale de Cynvèlin. Elle était connue à cette époque sous le nom de Comulodunum, la ville de Camul, un terme umbrien ou cymrique pour le dieu de la guerre.7 Pour sa défense, Caràdoc livra deux autres batailles, la première à Coxall Knolls, et la seconde au camp de Brandon, sur la Terne. Dans ce dernier cas, les chevaux des chars anglais, l’odeur des éléphants étant insupportable à cet animal, cédèrent dans toutes les directions, et Caràdoc subit sa première défaite décisive.

7 « Camulo Deo Sancto et Fortissimo ». — Inscription de l’autel de l’Ombrie.

En quelques jours, Colchester se rendit. On conclut un traité, connu sous le nom de traité claudien, par lequel il était stipulé que les Coranides et les Icènes, moyennant le paiement d’un certain tribut, devaient, en vertu du protectorat romain, qu’on garantisse leurs terres, leurs lois et leur gouvernement indigène. On dit que Claude promit aussi à Arviragus sa fille naturelle, Vénus Julia, appelée Venissa dans les récits britanniques. L’alliance eut lieu quelques années plus tard, et Arviragus construisit Caer Gloyw, ou Gloucester, en l’honneur de son beau-père impérial. Claude laissa à ses généraux le soin de poursuivre la guerre, et, de retour à Rome, il célébra son triomphe avec une magnificence signalée, d’autant plus impressionnante qu’elle était humble qu’il monta lui-même en montant les marches du Capitole à genoux, soutenu de chaque côté par ses gendres. Mais en réalité, la guerre ne faisait que commencer. Caràdoc, après avoir porté le feu et l’épée à travers les territoires des tribus révoltées, transféra les hostilités des champs des comtés de l’est aux districts montagneux du sud-ouest. C’est là qu’il se mit à lever et à armer des forces fraîches. Il est instructif d’étudier les mouvements des deux côtés, car jamais la guerre n’a été menée avec plus d’énergie et de travail. Plautius marcha contre le pendragon par terre, tandis que Vespasien fut envoyé avec la flotte romaine pour effectuer un débarquement à Torbay. Geta a été laissée à Colchester, ses légions commencèrent la construction de cette célèbre ligne de forteresses qui s’étendait de la tête des marais, formant aujourd’hui l’île d’Ely, jusqu’à Gloucester. Cet immense travail, dont le but était de délimiter immédiatement la Bretagne méridionale comme province romaine, fut exécuté jour et nuit avec l’infatigabilité et la science habituelles du service romain. Castra après Castra se levèrent, chacun d’eux étant occupé par sa garnison appropriée, et le pendràgon anglais apprit en même temps le soulèvement de la formidable circonvallation de ses derrières, l’avance de Plautius sur son flanc. et le débarquement de Vespasion sur son front. Le Devonshire (Dyvnaintles vallées profondes), le Dorset (le pays de l’eau) et le Somerset ( Gwlad yr hav, le pays d’été) étaient cependant admirablement adaptés à l’intrépidité et à la tactique britanniques. Les camps, romains et anglais, dressés à intervalles presque réguliers en front ennemi les uns des autres sur toute la surface de ces comtés, témoignent mieux que toute autre histoire du caractère désespéré et longtemps soutenu des campagnes qui s’ensuivirent. Dans l’art de la castramétation, nous ne trouvons aucune preuve de supériorité scientifique de la part des envahisseurs, il nous semble que c’est du côté britannique, surtout dans les remparts et dans la force des approches. Mais il est certain que le soldat anglais et le soldat romain devaient être dans le plus haut état de discipline militaire avant que des travaux de terrassement nécessitant un tel travail de construction et une telle vigilance de défense aient pu être exécutés dans le cadre de l’exercice ordinaire de l’époque. Le pouvoir des "déblayeurs" qu'ils déploient n'est pas indigne du siècle actuel. Là, la guerre se déroula en avant et en arrière pendant sept ans, absorbant pendant ce temps l’intérêt militaire presque sans partage du monde romain ; car, à l’exception de la rébellion, bientôt écrasée par Corbulo, en Arménie, le pendràgon britannique supportait tout le poids des armes de l'empire, sous les ordres d’une série de ses meilleurs généraux. Au cours de ces sept années, selon Suétone, trente, selon Eutrope, trente-deux batailles ont été livrées. Le camp central de Plautius était fixé entre Silbury Hill et Amesbury, celui de Vespasien et de son fils Titus sur Hampden Hill, près d’Ilchester, dont la région pouvait accueillir 100 000 hommes. Sur le terrain formant aujourd’hui une ferme appelée Conquest-farm, Bishops Lydiard, près d’un camp plus petit de vingt acres, Arviragus subit une défaite totale face à Vespasien, qui procéda à l’investissement de Caer Use (Exeter). Le huitième jour du siège, il fut surpris dans ses retranchements par Caràdoc et Arviragus, et mis en déroute avec un grand carnage. Titus eut à cette occasion la gloire de sauver la vie de son père. L’attaque des Anglais fut si soudaine que Vespasien fut sur le point d’être tué dans sa tente, lorsque Titus, devinant le danger de son père, chargea ses ravisseurs à la tête de la première cohorte de la quatorzième légion, et le délivra de leurs mains.8

8 « In Britannia circumdato a barbaris Vespasiano et in extremo, periculo versante Titus filius ejus patri metuens coronam hostium incredible audacia disjecit. » — Suétone dans Vita Vespas. Dion Cass., lib. ix.

Plautius, Vespasien, Geta et Titus furent successivement rappelés. Nous ne pouvons mieux faire qu’employer le langage significatif de Tacite pour décrire les fluctuations de la guerre, la victoire planant tantôt sur les Romains, tantôt sur les étendards britanniques : « Les Silures avaient une confiance sans bornes en Caractacus, énumérant les nombreuses batailles qu’il avait livrées contre les Romains, les nombreuses victoires qu’il avait remportées sur eux. » 12 L’attachement passionné de ses compatriotes à leur compatriote à l’âme élevée et incorruptible est abondamment attesté par les affectueuses allusions qu’on lui fait dans leurs anciennes Triades. « Trois ont été, disent ces annales, nos héros-rois : Cynvèlin, Caràdoc, Arthur. Sauf par la trahison, ils ne pouvaient pas être renversés. Trois d’entre eux ont été les principaux rois de bataille de l’île de Bretagne : Caswàllon, fils de Beli ; Arviragus, fils de Cynvèlin ; Caràdoc, fils de Brân. « Caràdoc, fils de Brân, que tous les Bretons, depuis le roi jusqu’au paysan, suivaient lorsqu’il levait sa lance au combat. »

12Annales de Taciti, lib. ii. c. 24. L’ère de Tacite était l'an 80.

Mais il faut retracer sa carrière militaire, qui est mais indirectement lié à cet essai, jusqu’à la fin. Au rappel de Plautius, qui avait épousé Gladys (Pomponia Græcina), sœur de Caractacus, une trêve fut conclue pour six mois, pendant laquelle devait être fixée la visite du chef anglais à Rome. Quelle crédibilité accorder à l’histoire anglaise dans les manuscrits I0l0, qui le représente comme comparaissant devant le sénat, et déclarant qu’il avait ordonné « que tous les arbres de la Silurie fussent abattus, afin que les Romains ne pussent plus prétendre que c’étaient les forêts britanniques, et non la valeur britannique, qui le déconcertaient », nous le savons à peine. C’est conforme à son caractère, que l’on reconnaît aussi dans l’anecdote rapportée par Dion. « Quand Caractacus, dit cet historien, « On lui montra les édifices publics de Rome, observa-t-il, il est singulier qu’un peuple possédant une telle magnificence chez lui m’envie la tente de mon soldat en Grande-Bretagne. » À l’expiration de la trêve et au retour de Caràdoc sous son commandement, Ostorius Scapula, avec la ligne de forteresses plautiennes pour base d’opérations, se mit à porter la guerre vers l’ouest. Soutenus par les Silures et les Ordoviciens, farouches et indomptables montagnards, que les armes romaines n’ont jamais Parvenus à se soumettre, les Pendràgon s’opposèrent à toutes les avancées des envahisseurs. Autour de Caer Essylt (le phare de Here-ford), une succession de rencontres a eu lieu pendant six mois. L’hiver n’interrompt pas les hostilités. Une division romaine qui avait pénétré jusqu’à Caerleon fut taillée en pièces. Ostorius, dans la campagne suivante, fixa son quartier général à Castra Ostorii, dans le comté de Dinder. Herefordshire, aujourd’hui ridiculement corrompu en " Oyster Hill « . Vers la fin de la campagne, à l’automne de l’an 52, la bataille qui mit fin à la carrière de Caràdoc sur le champ de bataille se déroula près des confins de la Terne et de la Clune dans le Shropshire. La victoire romaine était complète. 10 La femme de Caràdoc et sa fille Gladys tombèrent entre les mains des vainqueurs, et furent conduites au castra d’Urechean (Uriconium, Wrekin).

10 Annales de Taciti, lib. xii.

Caràdoc lui-même se réfugia, sur ses sollicitations réitérées, à Caer Evroc (York), auprès d’Arègwedd, ou Aricia, la Cartismandua de Tacite, reine des Brigantes, et petite-nièce de l’infâme traître de la guerre de Julien, Mandubratius ou Avarwy. Là, par ses ordres, par une trahison héréditaire, il fut saisi pendant qu’il dormait dans son palais, chargé de fers, et livré à Ostorius Scapula. À la nouvelle de l’événement, Claude ordonna qu’on l’envoyât à Rome, lui et toute la famille captive. Les Triades britanniques commémorent cette captivité de la famille royale silurienne à leur manière pittoresque. « Il y a eu trois familles royales qui ont été conduites en prison, de l’arrière-arrière-grand-père aux arrière-petits-enfants, sans permettre à l’une d’entre elles de s’échapper. D’abord la famille de Llyr Llediaith, qui fut emmenée en prison à Rome par les Césariens. Ni l’un ni l’autre ne s’échappa. Il s’agissait des incarcérations les plus complètes connues des familles. L’arrière-arrière-grand-père à cette occasion était Llyr, le père de Bran, qui mourut plus tard à Rome. Bran se rendit volontairement comme otage. L’approche et l’arrivée de Caràdoc à Rome sont finement décrites par les historiens de l’antiquité :

« Roma catenatum tremuit spectare Britannum11. »

Depuis l’époque d’Hannibal et de Mithridrate, le seul ennemi digne des armes romaines, entra dans la ville éternelle au milieu de l’excitation de trois millions d’habitants, qui bloquaient la ligne du cortège pour avoir la vue du formidable et illustre captif. Le Sénat est convoqué. Le procès et le discours de Caràdoc sont familiers à tous les écoliers. D’un air immuable, le héros des quarante champs de bataille, grand en armes, plus grand en chaînes, prit position devant le tribunal de l’empereur, et se livra ainsi : « Si mon gouvernement en Grande-Bretagne avait été dirigé uniquement en vue de la conservation de mes domaines héréditaires, ou de l'agrandissement de ma propre famille, j'aurais pu depuis longtemps entrer dans cette ville en allié, non en prisonnier ; et vous n’auriez pas dédaigné pour ami un roi descendant d’illustres ancêtres, et le dictateur de nombreuses nations. Mon état actuel, dépouillé de son ancienne majesté, m’est aussi préjudiciable qu’il est une cause de triomphe pour vous. Que se passe-t-il alors ? J’étais maître des hommes, des chevaux, des armes, des richesses : quoi d’étonnant si, sous votre dictée, j’ai refusé de les résigner ? S’ensuit-il que, parce que les Romains aspirent à la domination universelle, chaque nation doit accepter la vassalité qu’ils voudraient imposer ? Je suis maintenant en ton pouvoir, trahi, pas vaincu. Si, comme d’autres, j’avais cédé sans résistance, où serait le nom de Caràdoc ? Où est ta gloire ? Oblivion aurait enterré les deux dans le même tombeau. Dites-moi de vivre, je survivrai à jamais dans l’histoire à un exemple au moins de la clémence romaine.

Jamais on n’avait prononcé au sénat un pareil discours, digne d’un roi, d’un soldat et d’un homme libre. Tacite jugea digne d’être rapporté et immortalisé par sa plume. Son esprit lui rappelait le vieux temps républicain des Camilli, des Cincinnati, des Catones ; un esprit disparu depuis longtemps. La coutume, lors de ces manifestations révoltantes d’orgueil et de soif de sang romaines appelées « triomphes », était qu’à un certain endroit de la Sacra Via, les rois et les généraux captifs devaient être retirés du cortège, jetés dans les cachots tarpéiens, pour y être morts de faim, étranglés ou décapités, et leurs cadavres traînés par des crochets dans le Tibre. 12 Hélas ! pour la chevalerie de la guerre païenne. La conservation de Caràdoc constitue une exception isolée dans la longue liste des victimes de cette politique ignoble et infâme ; et on ne peut pas non plus l’expliquer, si l’on considère l’inflexibilité de l’usage militaire romain, autrement que par une intervention immédiate et surnaturelle de la Providence, qui conduisait par la main au palais même du roi britannique à Rome le grand apôtre des Gentils. La famille d’Aulus Plautius, en effet, était déjà liée à celle de Caràdoc, et des fiançailles existaient entre sa fille Gladys et Aulus Rufus Pudens Pudentinus, un jeune sénateur possédant de grandes possessions dans le Samnium. Mais leurs influences réunies n’auraient jamais suffi à changer une loi fixe de l’État romain en faveur d’un ennemi qui avait déployé ses plus grandes prouesses et ses plus grandes ressources pendant tant d’années. La défaite de Caer Caràdoc et la trahison de leur souverain n’avaient d’ailleurs pas servi à intimider, mais à exaspérer et à exciter à de plus grands efforts ses sujets en Grande-Bretagne. Les Silures élurent son cousin Arviragus comme successeur au pendràgonate. Les Romains ont été repoussés de l’autre côté de la Severn. Les désastres se succédaient. Tacite, qui répugne à s’étendre sur les malheurs des armes impériales, résume les revers de la guerre en quelques vers expressifs : « En Bretagne, après la captivité de Caractacus, les Romains furent à plusieurs reprises vaincus et mis en déroute par le seul État des Silures. » 13 Peut-être que le fait de savoir que l’exécution de Caràdoc pourrait encore mettre en péril les États romains de la Bretagne, et la considération que la clémence pourrait être la politique la plus sage envers un ennemi fougueux et loyal, dictèrent la conduite de Claude. Quoi qu’il en soit, la vie de Caràdoc fut épargnée, à condition qu’il ne porterait plus jamais les armes contre Rome. On lui imposa une résidence de sept ans en liberté de garde (libera custodia) à Rome. Son père Bran fut accepté comme l’un des otages, et il fut autorisé à jouir pleinement des revenus des domaines royaux siluriens, qui lui avaient été transmis par ses sujets et son conseil. Gladys, sa fille, a été adoptée par l’empereur Claude, et a pris, bien sûr, son nom de famille - Claudia. Caràdoc s’installa dans le Palatium Britannicum, du côté du Mons Sacer, converti par la suite par sa petite-fille, Claudia Pudentiana, en la première église chrétienne de Rome, connue d’abord sous le nom de « Titulus », et maintenant sous le nom de St. Pudentiana. C’est là que furent célébrés les noces de Claudia et de Rufus Pudens Pudentinus en 53 apr. J-C. Quatre enfants naquirent de ce mariage : saint Timothée, saint Novatus, sainte Pudentiana, sainte Praxède. Des fils de Caràdoc, Cyllinus et Cynon retournèrent en Bretagne, le premier lui succédant à sa mort sur le trône silurien. Le second, Lleyn, ou Linus, resta auprès de son père, et fut, comme nous le verrons plus loin, consacré par saint Paul, premier évêque de l’Église romaine.

12 Jugurtha, roi de Numidie, devint fou pendant la procession, alors qu’il suivait le char de son conquérant Marius.

L’épigrammatiste Martial naquit en 29 après. J-C. : il alla à Rome en 49 après. J-C., il quitta Rome en 86 après. J-C. et mourut dans sa ville natale, Bilbilis en Espagne, en 104 APRès. J-C., à l’âge de 75 ans. D’après ce que nous pouvons recueillir par collation, Claudia est née EN L’AN 36 de notre ère, et lors de son mariage avec Rufus, elle était dans sa 17e année. Martial était un habitué de la maison pudentinienne, et il avait l’habitude de soumettre ses vers à son héritier, Rufus. Nous avons une épigramme dans laquelle le poète spirituel, mais licencieux, se plaint de la sévérité des châtiments de son jeune critique. Il eût été bon pour sa réputation, sans perte d’esprit, qu’il laissât passer tous ses ouvrages entre les mains de Rufus avant de les avoir consignés à l’oreille du public. L’épigramme qu’il adressa au cousin de Rufus, Quintus Pomponius Rufus, alors en service militaire en Dalmatie, à l’occasion des noces de Claudia et de Rufus, auxquelles il paraît avoir assisté, est jointe dans la note ci-dessous.14

Macte esto tædis, O Hymenæe, tuis.

Tam bene rara suo miscentur cinnama nardo, Massica Theseis tam bene vina cadis, Nec melius teneris junguntur vitibus ulmi, Nec plus Lotos aquas, littora myrtus amat. Candida perpetuo, reside, Concordia, lecto, Tamque pari semper sit Venus æqua jugo.

Diligat ilia senem quondam: sed et ipsa marito, Tunc quoque quum fuerit, non videatur anus.”

Lib. iv. p. 18.

Quatre années plus tard, à la naissance de Pudentiana, Martial s’adressa à une seconde poème élogieux à la princesse britannique, célébrant sa beauté, sa grâce, son esprit, et la fascination. Il la représente comme unissant les réalisations séparées des dames romaines et athéniennes. Claudia, bien que mère de trois enfants, n’était que dans sa vingt-et-unième année, et on pourrait encore l’appeler « Puella " du poète. Dans l’intervalle entre la première et la présente épigramme, Pudens s’était converti au christianisme, c’est pourquoi on l’appelle Sancto Marito :

“Claudia Ceruleis quum sit Rufina Britannis Edita quam Latiae pectora plebis habet!

Quale decus formas! Romanam credere matres Italidum possunt Attides esse suam

Die bene quod sancto peperit foecunda marito Quod sperat generos quodque puella nurus Sic placeat superis ut conjuge gaudeat una Et semper natis gaudeat ipsa tribus."

Toute la famille de Caràdoc étaient attachés à des activités littéraires. Brân a introduit l’utilisation de vélin en Grande-Bretagne à partir de Rome ; 15 et par les membres les plus jeunes des copies des meilleurs auteurs romains circulaient en Silurie, et déposaient dans le principaux réceptacles de l’apprentissage druidique. Martial n’a pas fait exception, et ses vers semblent être devenus populaires :

“ Dicitur et nostros cantare Britannia versus.”—Lib. xi.

15 Coelbren, à la p. 25.

Claudia a écrit plusieurs volumes d’odes et Hymnes. Sa tante, Pomponia Græcina, reçut son agnomen des mains de sa connaissance intime de la littérature grecque. Le palais, en effet, du roi britannique formait un centre de concentration et un rendez-vous, et peut-être le plus sûr qu’ils pouvaient fréquents, pour les poètes et les écrivains de Rome. Et il n’en fut pas ainsi de son retourner dans son pays natal ; il continua d’être la résidence de Pudens et Claudia et leurs enfants. On peut se faire une idée de sa taille et de sa magnificence à partir du nombre de domestiques qui constituaient son établissement ordinaire. Ceux-ci, comme nous l’apprenons du Martyrologe romain, étaient au nombre de deux cents mâles et le même nombre de femelles, tous nés sur les domaines héréditaires de Pudens, en Ombrie.16

16 Adjacent au palais se trouvaient des bains à une échelle correspondante, connus par la suite sous le nom de Thermae Timothinæ et Thermæ Novatianæ. Les bains et les jardins du palais ont été légué par Timothée à l’Église de Rome. Et c’étaient les seuls bâtiments de quelque grandeur que l’Église romaine possédât jusqu’au règne de Constantine. Hermas appelle le Titulus « amplissima Pudentes domus ». C'était L’Hospitium pour chrétiens de toutes les parties du monde.

L’attachement entre Pudens et Claudia Il a grandi pour la première fois lorsque le premier a été affecté par Aulus Plautius en tant que préteur castrorum à Regnum, aujourd’hui Chichester. Nous possédons encore au musée de Chichester un monument remarquablement intéressant de la résidence de Pudens dans cette ville. Cogidunus, régulus des Regni, fut l’un des rois inclus comme alliés — en fait, tributaires — sous le protectorat romain dans le traité claudien de Colchester. Leurs dynasties, leurs lois et leurs terres indigènes étaient garanties à de tels les rois eux-mêmes devenant et étant titrés Legati Augusti, Lieutenants de l’empereur romain, car les chefs de nos comtés sont aujourd’hui appelés lieutenants de la Reine. Ils étaient tenus de permettre la construction d’un castra romain, par des légionnaires romains avec leur état-major habituel d’ingénieurs, dans leur chef-lieu. Le préteur de la castra détenait le commandement militaire au sein des forces alliées. territoire. De tels rois étaient considérés et traités comme des traîtres à la nation cause des Siluriens et des Bretons indépendants, et leurs noms soient marqués avec le stigmate honteux de bradwr (traître), ou relégués dans l’oubli par les chroniqueurs bardiques. C’est pourquoi nous trouvons un grand nombre de commémoré dans les pages des historiens romains, dont on peut ne trace aucun vestige chez les Britanniques. Cogidunus est l’un d’entre eux. Tacite se souvient lui, comme il le pourrait bien. Car Tacite naquit en L’AN 56 DE NOTRE ÈRE, l’année de la mort de Claude, et Cogidunus vivait en L’AN 76 DE NOTRE ÈRE. dix ans après le martyre de saint Paul, alors que Tacite était dans sa vingtième année. En L’AN 1723,lors de fouilles dans les fondations de certaines maisons, le monument auquel nous nous référons, généralement connue sous le nom de pierre de Chichester, a été découvert. L’inscription, qui a été en partie mutilé, et est coupé en caractères très gras, tels qu’ils ont été restaurés par Horsley et Gale, est la suivante :

Neptuno et Minervæ

Templum

Pro Salute Domus Divinæ

Ex Auctoritate Tib : Claudii

Cogiduni Regis Legati Augusti in Britannia

Collegium Fabrorum et qui in eo

À SACRIS SUNT DE SUO DEDICAVERUNT

Donante Aream Pudente Pudentini Filio.

 

« Le Collège des ingénieurs, et les ministres du culte qui y sont attachés, avec la permission de Tiberius Claudius Cogidunus, roi, légat d’Auguste en Bretagne, consacrés à leurs frais, en l’honneur de la famille divine [la famille Impériale] ce temple à Neptune et à Minerve. Le site a été donné par Pudens, fils de Pudentinus.

À part Du point de vue de sa valeur à d’autres égards, l’inscription est intéressante en tant que preuve du penchant naturellement pieux du tempérament du jeune commandant romain, et, deuxièmement, du fait qu’à chaque légion au service romain était attachée un état-major des ministres du culte, une partie de la discipline morale dans laquelle ces païens à l’esprit de fer qui font honte à notre propre pays et à d’autres Christianisme. Le temple semble avoir été érigé vers l’an 50 DE NOTRE ÈRE. avant, bien sûr, la conversion de Pudens ou son mariage avec Claudia.

Nous avons maintenant, EN L’AN 56 DE NOTRE ÈRE, la famille royale silurienne située à Rome sur cette partie du Mons Sacer appelée Scaurus, dans le Palatium Britannicum, appelé plus tard le Titulus, ou Hospitium Apostolorum, puis St. Pudentiana, nom que le bâtiment conserve encore. Le ministre de cette église, et de la famille de Pudens, était Hermas, mentionné par saint Paul,17 surnommé, d’après son ouvrage portant le titre du Pasteur, Hermas Pasteur. L’église a aussi été appelée d’après lui, pasteur. Devant cette relique des temps éminents britanniques et apostoliques, on peut encore voir, gravés en caractères corrodée par l’âge, l’inscription latine, attribuée au IIe siècle, dont voici la traduction :

« Dans ce lieu sacré et le plus ancien des églises, connue sous le nom de Pastor, consacrée par Sanctus Pius Papa, maison de Sanctus Pudens, sénateur, et la maison des saints apôtres, repos les restes de trois mille bienheureux martyrs, que Pudentiana et Praxède, vierges du Christ, avec leurs propres mains enterrées.18

17 Rom. xvi. 14.

18 In hac sanctâ antiquissima ecclesiâ, » &c., &c. — Baronius, ad Maii 19.

Baronius19 a la note suivante sur le Titulus : — « Il est nous a été transmis par la ferme tradition de nos ancêtres que la maison de Pudens fut le premier qui reçut saint Pierre à Rome, et que là les chrétiens rassemblés formaient l’Église, et celle de toutes nos Églises la plus ancienne c’est ce qui porte le nom de Pudens.

19 Annales Ecclesias, in Notis ad 19 Maii. Note sur le pasteur. Certains auteurs affirment qu’il y a Il y avait deux pasteurs d’Hermas distincts, l’un étant le ministre du Titulus, appelé parce qu’il appartenait à la famille sénatoriale du nom de pasteur ; le second de date postérieure, auteur du traité Pastor, et frère de Pius Papa. Si ce point de vue est exact, tous deux étaient ministres de Titulus, car il existe des lettres de ce dernier adressées par Titulus à Timothée en Grande-Bretagne.

Voir aussi Moncæus, Syntagma de Claudiâ Britannica, p. 18 ; Pastoris Epistolae ad Timotheum ; Justini Martyris Apologie; Ménologie grecque, ad dies Pudentianæ et Praxedis. Que le palais de Claudia était la maison des apôtres à Rome, semble être d’accord avec tous les historiens ecclésiastiques, et même Robert Parsons, le jésuite, l’admettent. " Claudia a été la première hôtesse ou hôte de Saint-Pierre et de Saint-Paul à le temps de leur venue à Rome. — Parsons' Trois conversions de l’Angleterre, vol. t. I, p. 16.