BELEHPAH CHI TZIH.

Are nabe u tihobal Xibalba ri ; x-e oc vi que chi eu u li-qaric qui chakatahic ta chic chi qui qux Xibalba. Nabe x-e oc pa Gekuma Ha : qatecut ta x-be ya-oc qui chah ca ti-louic, ta x-oponic ruq huhun qui ziq rumal u zamahel Hun-Came.

 

Vae qui chah e, ca cha ahau, ch’ul qui ya-chic ri chah ‘ zakaric, ruq ri ziq ch’ul qui moloba ca cha ahau. X-cha zamahel, ta x-oponic.   —   Utzbala, x-e cha cut.

Ma eu quitzihri chah, xa caka hu gexvach x-oquic; are u he cakix quehe richah x-qu’ilo varanel : are chi cu ri ziq xa gaga chicop x-qui coho chuvi ziq.

Hun agab chi yogouic cumal : Mi-x-e ca chako, x-e cha varanel. Ma-cu-habi x-־qiz ri chah, xavixere u vach, are cu ri ziq, mahabi nakila x-qui tzih chire, xavixere u vach.

X-be ya-oc cuq ahauab : Nakipa que uxic? apa x-e pe-vi, achinak x-e qaholanic, x-e alanic ? Quitzih ca qatat ka qux* rumal. Ma utz ca qui bano chike. Halan qui vach, ha-lan naipuch qui qoheic^ x״e chi quibil quib.

 

CHAPITRE NEUVIÈME.

C’était là la première épreuve de Xibalba ; et à leur entrée (dans ce lieu) devait commencer leur défaite, dans la pensée de ceux de Xibalba. D’abord ils entrèrent dans la Maison Ténébreuse : ensuite on leur apporta leurs échardes de pin, tout allumées, avec chacun son cigare, qui leur fut remis par les messagers de Hun-Camé.

Voici leurs flambeaux de pin, dit le roi ; mais ils devront être rendus ces flambeaux demain matin ainsi que les cigares, rendus entiers, dit le roi. Ainsi parlèrent les messagers, en arrivant.  —   C’est fort bien, répondirent (les deux jeunes gens).

En réalité ils ne (brûlèrent) point l’écharde de pin, ayant mis quelque chose de rouge à la place, c’est-à-dire une plume d’ara, qui leur parut comme le pin (allumé) aux veilleurs, et, pour les cigares, ils mirent des lucioles au bout des cigares.

Toute une nuit, ils furent gardés par ceux qui les veillaient et ceux-ci disaient : Ils sont tombés dans le piège. Mais l’écharde de pin n’était pas usée, sa forme était la même ; ainsi en était-il des cigares, dont ils n’avaient absolument rien allumé et qui avaient la même apparence (qu’auparavant).

On les porta aux princes : Comment ont pu se faire ces choses? d’où viennent ces gens-là, qui les a engendrés et mis au monde ? En vérité notre cœur en est brûlant ; car ce n’est pas bien ce qu’ils font avec nous. Etranges sont leurs visages, étranges sont leurs façons d’agir, se disaient-ils entre eux.

 

Ta x-e taken cut conohel ahauab : Oho chah-oc, yx qaholab, x-e uchaxic. Ta x-e tzonoxcut rumal Hun-Came, Vukub-Came : Apa qu’yx yx pe-vi, ch’y biyh-tah, yx qa-holab, x-cha־cu Xibalba chique ?

 

Alaba x-oh pe vi 10 ! mavi k’etaam, xa x-e cha, mavi x-qui biy.   —   Utzbala ; xa ka beco ka chaah, yxqaholab, x-e cha Xibalba chique?

Utz, x-e cha ; re-ba chi ka coh ri va ka quiq.   —   X-c cha Xibalba : Ma ta hare-ta ch’y coh, va ke.   —   X-e cha qaholab : Ma-habi are, chi ka coh va ke.

X-e cha chic Xibalba : Utzbala.   —   X-e cha qaholab : He-bala xa hu chil.   —   X-e cha Xibalba : Ma ba-la, xa holom coh.  —   Cha-chic, x-e cha qaholab.   —   Ma-habi, x־e cha Xibalba.   —   Utzbala, x-cha Hunahpu.

«

Ta x-zak cu uloc rumal Xibalba, qui cu takal chuvach u bate Hunahpu : qatepuch ta x-qu’il Xibalba ri zaki tog, ta x-elchupam ri quiq chi tzininic x-be he chuva tak uleuh ri chaa.

Nakipa-la, x-cha ri Hunahpu Xbalanque ! Xa camic qu’yv’ah chikech. Ma־ta x-oh bey taka, raa-ta-pu x-be y zamahel ? Quitzih togob ka vach ? Xa koh bee, x-e cha qaholab chique.

 

Alors tous les princes ensemble les envoyèrent chercher. Allons, jouons à la balle, jeunes gens, leur dirent-ils. Ensuite ils furent interrogés par Hun-Camé et Vukub-Camé: D’où donc venez-vous, vous autres, racontez-le nous, jeunes gens, leur répétèrent ceux de Xibalba ?

Qui saurait dire d’où nous venons ? nous ne le savons point nous-mêmes, dirent-ils, sans parler davantage.  —  Fort bien. Alors jetons notre ballon élastique, jeunes gens, reprirent ceux de Xibalba.

C’est bon, dirent-ils ; mais c’est avec celle-ci que nous jouerons, celle-ci, notre pelote élastique.  —  Ceux de Xibalba répondirent : Point du tout, n’employez pas celle-là, mais la nôtre que voici.  —  Les jeunes gens répliquèrent : Ce n’est pas celle-là, mais celle-ci la nôtre que nous mettrons (1).

(1) On sait que les Indiens de l'Amérique du Nord, qui ont gardé l’usage de jouer à la paume, sont aussi extrêmement réservés sur le choix de la balle : chaque parti a la sienne, que les devins ont soin de consacrer avec des rites et des enchantements mystérieux, et pour rien au monde ils n’accepteraient de jouer avec la balle du parti contraire; ce serait porter malheur à sa propre cause. On conçoit dès lors la discussion qui a lieu ici. C’est à M. César Daly, qui a été témoin de ces spectacles parmi les Indiens du Nord, que nous devons cette explication.

Ceux de Xibalba répondirent : C’est fort bien.  —  Les jeunes gens reprirent : Allez donc, pour un chil (2). —  Non certes, dirent ceux de Xibalba, mais pour une tête de lion.  —  C’est dit ! répondirent les jeunes gens.  —  Pas encore ! s’écrièrent ceux de Xibalba.  —  C’est bon, dit Hunahpu.

(2) Chil, insecte qui brûle là où il passe. (Ximenez, Tesoro de las lenguas quiche, cakchiquel y tzutohil, etc. MS.). Suivant le même auteur, chil est un verbe qui signifie écorcher, etc. Serait-ce une allusion au Xipe-totec, ou le dieu de l’Ecorchement humain ? Chil, chili ou chilin, en pokomchi, est un grillon. Chilli, piment en langue nahuatl. Ce dialogue est à peu près inintelligible ; pour le comprendre il faudrait être initié aux mystères du jeu de paume américain.

Alors le jeu commença avec ceux de Xibalba et ils envoyèrent donner (la pelote) devant l’anneau de Hunahpu : ensuite pendant que ceux de Xibalba regardaient le coup, la pelote s’élançant s’en alla bondissant partout sur le sol du jeu de paume.

Qu’est-ce que cela, s’écrièrent Hunahpu et Xbalanqué ! C’est la mort que vous nous souhaitez. Ne nous avez-vous donc pas envoyés chercher, ne sont-ce pas vos mandataires qui sont venus? En vérité.» malheureux que nous sommes ! Alors nous nous en allons, leur dirent les jeunes gens.

Are ta eu x-ahauax chique qaholab, huzu ta x-cam ri chiiî chi chaa, x-e chakatah-tah. Mavi quehe,xa Xibalba x־־e chakatah chic cumal qaholab.

Ma-ba qu’yx bee, yx qaholab, koh chaah na, xa are ca ka coho ri yvech, x-uchax-cut qaholab.  —  Utzbala , x-e cha-cut,·are eu x-oc ri qui quiq, ta x-kah cu chaah.

Qatecut ta x-qui choi qui chakon : Nakipa chi ka chako, x-e cha Xibalba? He na qui cut xax e cha qaholab, xa-cucha ca kah cah tzel cotzih, x-e cha Xibalba.

Utzbala. Nakipa chi cotzihal, x-e cha qaholab chique Xibalba? —  Huticab caka-muchih, huticab zaki-muchih, huticab gana-muchit, huticab carinimak, x-e cha Xibalba.  —  Utzbala, x-e cha-cut qaholab.

»

Ta x-kah cut qui cha, hunam qui chucab tzatz pu qui cha ri qaholab : xa eu qui r’utzqui qux ta x-qui ya quib chi chakatahicri qaholab.

Que quicot cut ri Xibalba, ta x-e chakatahic.  —  Utz mi-x-ka bano, nabe mi-x-e ca chako, x-e cha Xibalba : Apa x-ch’y be qu’y qama vi ri cotzih? x-e cha chi qui qux. Quitzih ta agab dry ya ri ka cotzih ; ka chakom puch,

Or c’était là précisément ce qu’ils désiraient, que les jeunes gens mourussent au plus tôt dans le jeu de paume et qu’ils fussent battus. Mais il n’en fut pas ainsi ; car ceux de Xibalba furent vaincus de nouveau par les jeunes gens.

Ne partez donc pas, jeunes gens, jouons à la balle ; mais prenons maintenant la vôtre, leur dit-on aux jeunes gens.  —  C’est bon, répondirent-ils, et ils lancèrent leur balle, ce qui mit aussitôt fin à la partie.

Ensuite de cela, ayant compté leurs défaites : Comment ferons-nous pour les vaincre, dirent ceux de Xibalba ? Qu’ils s’en aillent donc à l’heure même, ces jeunes gens, et qu’.entre temps ils nous apportent quatre vases de fleurs, dirent ceux de Xibalba.

C’est fort bien. Quelles sont les fleurs (que vous désirez) ? dirent les jeunes gens à ceux de Xibalba. —  Un bouquet de cakamuchih, un bouquet de zaki-muchih. un bouquet de gana-muchit et un bouquet de carinimak (1), dirent ceux de Xibalba.  —  Fort bien, répliquèrent les jeunes gens.

(1) Ces Heurs sont toutes de la classe de ce qu’on appelle chipilin dans l'Amérique centrale, mot de la langue nahuatl dont nous ignorons la traduction française, s’il y en a une.

Alors descendirent leurs ("gardes armés de) lances, tous égaux par la force, et nombreux (étaient également) les gardes de ces jeunes gens : mais tranquille était l’âme de ces jeunes gens, en se remettant à ceux qui étaient chargés de les vaincre (2).

(2) Chako, qui veut dire vaincre, combattre, humilier dans un combat, a également le même sens pour battre au jeu, tromper, tricher, etc. Chakatahic est le gérondif, pour être, devant être joue, battu.

Ceux de Xibalba se réjouissaient dans l’espoir qu’ils seraient vaincus (3) :  —  Nous avons bien fait (cette fois), ils vont tout d’abord être pris au piège, disaient ceux de Xibalba : Où donc irez-vous prendre les fleurs ? disaient-

 (3) Ta x-e chakatahic, mot à mot, tandis qu’ils. Ta est une conjonction exprimant le temps, l’espoir, le conditionnel et se traduit alternativement par alors, lorsque, pendant, en ce temps. Placé à la suite d’un verbe, ta ou tah exprime le subjonctif, le désir et le pouvoir de faire quelque chose.

 

x-e u chax puch qaholab Hunahpu, Xbalanque 1 umal Xi-balba.

Utzbala. Agaba chicut koh chaahic, x-e cha-cut, ta x-e pixaban ,quib. Qate chicut ta x-e oc chi qaholab pa Chaim-ha, 11 cab tihobal Xibalba : are־ta cut x-ahauax chic x-e gatacox-tah rlimal cha, clranim-tah chi qui qux, x-e cam-tah chi qui qux.

Ma-cu x-e camic. Ta x-e cha chire cha, ta x-qui pixa-bah : Are yve ri ronohel u tiohil chicop, x-e cha chire cha. Ma-cu x-ë zilab chic, xa-hun kah chi vi cha ronohel.

A reçut e qo chi chiri pa Chaim-ha ch’agab, ta x-qui ζΐ-quih ronohel zanic :Chai-zanic, Chequen-zanic, qu’yx pe-tic, qu’yx oho yvonohel, oh y qama ronohel u vach cotzih chi chacon ahauab.

Utzbala , x-e cha-cut. Ta x-e be cu ri zanic conohel e qamol cotzih u ticon Hun-Came,Vukub-Came. Mier-occut chi qui pixabah chahaI qui cotzih ri Xibalba : La qù’y ch’yv’ila ka cotzih, m’y ya chi elegaxic ruinai ri mi-x-e ka chako ri qaholab. Ana-vi x-pe vi r’ilo ka chacon cumal ? Ma-habi. Ch’y varahhun agab.  —  Utzbala, x-e cha cut. ilsen eux-mêmes. En vérité, c’est cette nuit que vous avez à nous donner nos fleurs ; nous sommes les gagnants maintenant, leur disait-on aux jeunes gens, Hunahpu et Xbalanqué, de la part de ceux deXibalba.

 

Fort bien. Cette nuit également nous jouerons à la paume, répondirent-ils , en s’avisant mutuellement. Ensuite de cela, les jeunes gens entrèrent dans la Maison des Lances, la seconde épreuve de Xibalba : or c’était bien encore le désir (des princes) qu’ils fussent tués par les lanciers et qu’au plus tôt ils fussent mis à mort, c’était ce qu’ils souhaitaient au fond du cœur.

Mais ils ne moururent point. Parlant alors aux lanciers (1), ils leur firent cette recommandation : C’est à vous qu’appartiendront les chairs de tous les animaux, dirent-ils aux lanciers. Ils cessèrent alors de se remuer et unanimement ils baissèrent leurs armes (2).

(1) Cha, pour chai, lance ou lancier, flèche ou archer. Chai proprement dit est le couteau d’obsidienne ou l’obsidienne. La beauté que les Indiens voient à répéter constamment les mêmes mots et à jouer sur le sens leur fait trouver souvent des significations différentes, ce qui dépend beaucoup de la prononciation plus ou moins accentuée et de l’ensemble de la phrase. Ainsi dans ce verset le mot cha signifie alternativement le verbe dire ou parler, lance et lancier.

(2) Par des promesses ils séduisent leurs gardiens.

C’est ainsi qu’ils étaient dans la Maison des Lances, durant la nuit, lorsqu’ils firent un appel à toutes les fourmis : Fourmis tranchantes et zampopos (3), venez et toutes ensemble allez chercher les têtes des fleurs que nous ont dit les princes.

(3) Zanic est le nom générique de la fourmi. Chequen-Zanic est une grosse fourmi qui rôde de nuit et qui coupe les tiges des légumes et fleurs tendres, comme avec des ciseaux. Son nom, parmi les populations hispano-guatémaliennes, est zanpopo.

Fort bien, répondirent-elles. Alors toutes les fourmis se mirent en chemin pour aller prendre les fleurs du jardin de Hun-Camé et de Vukub-Camé. D’avance, ceux-ci avaient averti les gardiens des fleurs de Xibalba. Quant à vous faites attention à nos fleurs ; n’en laissez point enlever par ces deux jeunes gens que nous avons pris au piège. Où donc pourraient-ils venir voir ailleurs celles que nous leur avons dit ? Il n’y en a point. Veillez donc bien toute la nuit.  —  C’est fort bien, répondirent-ils.

 

 

Macu x-qui na ri chahal licon : Xalog chi qui rakuh qui chi chu gab tak che ticon puch, que be chakala chiri, xa-vixere chi qui chabeh ri qui bix : Xpurpuvek, Xpurpu-vek cha ri hun la ch’ogic. —  Puhuyu, puhuyu ! cha chic ta ch’ogic.

Ri Puhuyu u bi e caib chi chahal ticon Hun-Came, Vu-kub-Came. Ma eu ca qui na ri zanic elegai qui chahem ca bolouic, ca tuguvic e rai cotzih, ri ca be ca toua uloc cot-zih chuvi che r’e ca ziqou cuq chuxeche ri cotzih־

Xa quehe chi qui rakuh qui chi ri chahalib mana r’e ca qui nao ca eux qui he, ca eux qui xic ! are ca quirixic cotzih, ca cu kah uloc r’e, ca ziqouic, r’e ca be ca toua uloc.

Libahchi cut x-noh cahib tzel cotzih, tiquitoh chicut ta x-zakiric. Qatecut ta x-ul zamahel takonel : Que petoc, ca cha ahau, huzuc chi qui qam ula ri ka chacon, x-e u chax cut qaholab.

Ulzbala, x-e cha-cut. Qui tique laon curi cotzih cahib tzel : ta x-e bec, ta x-e opon eu chi qui vach ahau, ahauab, c’u caam cotzih guz u vach. Quehecut x-e chaka-tah vi Xibalba.

 

Mais les gardes du jardin n’entendirent rien (de ce qui se passa) : En vain allaient-ils criant de toutes leurs forces entre les branches des arbres du jardin, cheminant sur leurs jambes et répétant le même chant : Xpurpuvek, Xpurpuvek ! disait l’un en chantant.  —  Puhuyu, Puhuyu (1), répétait l’autre en chantant (2).

(1) Xpurpuvek, Puhuyu. Ximenez, qui, dans tout l’ensemble de ce livre, a toujours cru reconnaître systématiqueinent des symboles chrétiens et apostoliques, même dans les personnages dont il est ici question et l’enfer dans Xibalba, laisse de côté la traduction de ces mots, comme de bien d’autres. Mais il est évident que ces gardiens des jardins de Xibalba sont des veilleurs de nuit, comme il y en avait chez tous les anciens peu-pies du Mexique, comme aujourd’hui les serenos, et ces deux mots sont deux phrases ou cris de nuit fort intelligibles. Le seul mot difficile peut-être est pur, qui n’est plus usité dans le sens où il apparaît ici et qu’on traduit par creuser, cavar, mais qui ici a le sens d’entrer. X-pur puvek, en espagnol, y a se entrô en la noche, on est entré dans la nuit. Pu est une contraction de pa u, dans la ; vek est pour gek, noir, ténèbres, nuit. Puhuyu, sur la montagne. Un veilleur crie : déjà la nuit est venue; l’autre répond : au-dessus des montagnes. Ce doit être l’ancien cri des veilleurs de nuit en Xibalba.

(2) Ta ch’ogic, tandis qu’il chantait.

Ogic de og, qui exprime le chant des oiseaux, le cri des bêtes, le hurlement et toute sorte de gémissement ou de chant mélancolique comme celui qu’emploient les veilleurs de nuit.

 

Puhuyu était le nom des deux gardes des plantations du jardin de Hun-Camé et de Vukub-Camé. Mais ils ne remarquèrent pas les fourmis dérobant ce qui était commis à leur garde, allant et revenant en troupes innombrables, coupant les plates bandes de fleurs, s’acheminant avec ces . fleurs qu’elles portaient avec leurs pinces par-dessus les arbres, et par-dessous les arbres ces fleurs répandaient une douce odeur.

Cependant les gardes continuaient à crier de toutes leurs forces, sans observer les dents qui sciaient à la fois leurs queues et leurs ailes (3) : c’était une moisson de fleurs que leurs dents descendaient et que leurs dents transportaient tout odoriférantes (dans la Maison des Lances.)

(3) Ca cux qui he, ca eux qui xic, étant à scier leurs queues, étant à scier leurs ailes. Il y a ici une allusion que nous ne comprenons point : nous nous contentons de la signaler.

Bien promptement se remplirent donc les quatre vases de fleurs, et ils étaient tout pleins, lorsque le jour se leva. Bientôt après entrèrent les messagers pour les chercher. Qu’ils viennent dit le roi et qu’ils apportent aussitôt ce dont nous avons parlé, dit-on aux jeunes gens־

Fort bien, dirent-ils. Ils allèrent ensuite chercher les quatre vases de fleurs : puis s’étant présentés devant le roi et les princes, ceux-ci prirent les fleurs dont l’aspect faisait plaisir (à voir). Ainsi furent joués ceux de Xibalba.

 

Xa zanic x-qui lak ri qaholab, xa bun agabil x-qui chap zanic ta qui ya pa tzel. Quehecut x-e zakcah e ri conohel Xibalba, zakbu e qui vach rumal ri colzih.

Quetecut x-qui tak ri chahal cotzih : Nakipa rumal m’yx ya ka cotzih chi elegaxic.‘ Are ka cotzih vae kav’ilo, x-e uchax chahal ?  —  Ma bax-ka nao, at ahau. Mi na-re x-cuyuka he, x-e cha-cut. Qatepuch x-hix qui chi quitoh-bal qui chahin chi elegaxic.

Quehecut qui chakatahic Hun-Came, Vukub-Came cumal Hunahpu, Xbalanqué, u xe ri banoh ri. Ta x-qui qam ri qui chi herebak qui chi Purpuek, herebak vacamic.

Qate-chi-cut ta x-kah chaah; xavixere hunam que chaa-hie : x-qu’eleh chicu chaah, ta x-e pixaban chicu quib zakaric chic. X-e cha'Xibalba.  —  Utzbala, x-e cha qaho-lab, tax-׳qu’eleh

LAHPAH CHI TZIH.

X-e oc chicut pa Teuh-Ha. Mavi ahilan ten : tzatz chi zak-bokom chupan ha, r’ochoch ten 2 huzu cu tzah ten rumal cutz mamai na, x-zach ri teu cumal qaholab.

 

Ce n’étaient que des fourmis que les jeunes gens avaient dépêchées, et, dans une seule nuit, les fourmis les enlevèrent et les placèrent dans les vases. A cet aspect tous les (princes) de Xibalba changèrent de couleur et leurs faces pâlirent à cause de ces fleurs.

Ensuite ils envoyèrent chercher les gardiens des fleurs : Pourquoi avez-vous laissé dérober nos fleurs. Ce sont nos propres fleurs que nous voyons ici, dirent-ils aux gardiens ?  —  Nous ne nous sommes aperçus de rien, seigneur. On n’a même pas épargné nos queues, répondirent-ils. Alors on leur fendit les lèvres, pour les châtier d’avoir laissé voler ce qui était commis à leur garde.

C’est de cette manière que furent vaincus Hun-Camé et Vukub-Camé par Hunahpu et Xbalanqué, et ce fut là le commencement de leurs travaux. Dès lors aussi les Purpuek ont eu la bouche fendue et fendue elle est aujourd’hui (1).

(1) Ici ces veilleurs rentrent dans le domaine de la fable; ils deviennent des oiseaux de nuit, l’un appelé Purpuek, et l’autre Puhuy, qui est une espèce de hibou : aujourd’hui le premier se prononce Parpuak.

Et ensuite de cela ils descendirent jouer à la paume ; ils jouèrent de même tous ensemble : mais ayant achevé de jouer, ils s’avisèrent mutuellement pour le lendemain matin. Ainsi le dirent ceux de Xibalba.  —  Fort bien, répondirent les jeunes gens, en terminant.

CHAPITRE DIXIÈME.

On fit entrer aussi (les deux frères) dans la Maison du Froid. Le froid y était insupportable, et cette maison était remplie de glace, (car véritablement c’était) la demeure des vents glacés du nord (2); mais le froid cessa promptement avec les glands de pin (qu’ils allumèrent) ; il cessa de se faire sentir et le froid disparut par les soins des jeu-

(2) Teu ou teuh, le froid et aussi le vent du Nord, la bise.

Mavi x-e camic; xavi e qazlic ta zakiric. Are ta cu x-c’ah Xibalba chiri ta x-e cam vi : mavi quehe, xavi c’utz qui vach, ta x-zakiric. X-e qu’el chi ula takol que x-e be chic e chahal.

Nakipa la mavi mi-x-e camic, x-cha chi rahaual Xi-balba ! X-qui maihah chic qui banoh qaholab Hunahpu , Xbalanqué.

Qate x-e oc chicut pa Balami-Ha ; tzatz chi balam r’o-choch’: Mavi kohy tio, qo yvech ch’uxic, x-e u chaxic balam. Qatepuch x-qui pukih bak chi qui vach chicop.

Qatecut que pagaquic chi ri chuvi bak : Mi cu x-e utzi-nic, mi-x-u tih qui qux; qate viri mi-x-qui ya quib. Are qui bakil ri caa x-uxic, x-e cha ri varanel, conohel quiy qui qux chire.

Ma-cux-e camic : xavixere utz qui vach; x-e el uloc pa Balami-Ha : Nakipa qui chi e vinakil? Apa qui x-e pe-vi? x-e cha ri Xibalba conohel.

Qate chic x-e oc chupam gag, hun Ha chi gag, xa utu-quel gag u pam : mavi x-e qatic rumal, xa bolol, xa tzi-mah vi. Xavixere utz chi qui vach, ta x-zakiric. Are ta c’ahauaxic huzuc ta que camic chupan ri que iqou vi ; mavi quehe, xavi ca zach qui qux Xibalba rumal.

 

Ils ne moururent donc point ; car ils étaient pleins de vie, quand le jour se montra. C’était bien là cependant ce qu’aurait voulu Xibalba, qu’ils y mourussent : mais il n’en fut pas ainsi, et ils étaient en bonne santé au lever du soleil. Ils sortirent donc encore une fois, leurs gardiens étant venus les chercher.

Comment donc, ils ne sont pas encore morts ! s’écria le monarque de Xibalba. Et ils considéraient avec étonnement les œuvres des jeunes gens, Hunahpu et Xbalanqué.

Après cela, ils entrèrent aussi dans la Maison des Ti-.grès ; et l’intérieur était rempli de Tigres : Ne nous mordez point, vous avez autre chose à faire, leur fut-il dit aux Tigres. Ensuite ils jetèrent des os devant ces brutes.

Aussitôt ils se jetèrent avec voracité sur les os : C’en est donc fait d’eux, ils ont appris (1) enfin (à connaître le pouvoir de Xibalba), et ils se sont livrés (aux bêtes). Voilà que leurs os sont broyés cette fois, disaient tous ceux qui veillaient (près d’eux), se réjouissant de leur (mort).

(1) Mi cu x-e utzinic, mi x-u tih qui qux, enfin donc ils ont achevé, enfin ils ont appris leurs cœurs. La particule mi, très-fréquente dans ce livre indique un passé actuel , comme d’une chose qui vient de se faire. Utzinic, utzin, verbe don tie radical est utz, bon, bien, parfait, en bonne santé, signifie achever, parfaire, finir, pouvoir.

Mais ils n’avaient point péri; leur visage portait le même air de santé, lorsqu’ils sortirent de la Maison des Tigres : De quelle race sont ces gens-là? D’où viennent-ils ? s’écrièrent tous ceux de Xibalba.

Après cela on les fit entrer au milieu du feu dans une Maison de Feu, où il n’y avait que du feu à l’intérieur : mais ils n’en furent pas embrasés, quoiqu’il fût extrêmement fort et des plus ardents. (Les deux frères) se portèrent également (2) bien au lever du soleil. C’était bien cependant le désir (de Xibalba) qu’ils y périssent promptement dans le lieu où ils passèrent encore celte fois ; mais il n’en fut pas ainsi, et le courage de Xibalba défaillait à cause d’eux.

(2) Xavixere utz chi qui vach, également (certainement) bons avec leurs visages ;  —  phrase pour dire qu’on se porte bien. Utz-pa a vach , bon comment ton visage, c’est-à-dire comment te portes-tu ?

 

X-e coh chic chupan Zotzin-Ha : utuquel zotz çhupam ,chi ha, him ha chi Camazotz, nimak chicop, queheri Chaki-tzam qui camizabal, huzu ch’utzmic chupan chi qui vach.

X-e qohe cu'chiri chupam, xa pa uub x-e var vi : mavi x-e tyic rumal ri e qo pa ha ; chiri eut x-qui ya vi quib hun vi rumal hun chi Camazotz chi cah x-pe vi, xavi u qutbal rib ta x-qui bano rumal־

Qo ca qui tzonoh vi qui naoh ,hun agab cari zotz que buhuhic : Quilitz, quilitz, que cha, que cha hun agab. X-tane eu ri zcaquin : Ma-habi chic que zilobic ri zotz chiri eu chakal viri hun tzam uub.

X-cha curi Xbalanque Hunahpu : Cahanic-pau zakiric, c’av’ilo.  —  Cahanican labalo, v’ila na, x-cha eut. Quïeu are ca r’ah mucum uloc chu chi uub, ca r’ah r’il uloc u zakiric, qatepuch ta x-cupix u holom rumal Camazotz, cupul chi canoc u nimal ri Hunahpu.

Huchatic : Ma mi-x-zakiric, x-cha ri Xbalanque? Ma-habichic chi zilobic ri Hunahpu. Hupacha ma-xa-on mi-

 

Alors on les fit entrer dans la Maison des Chauves-Souris (1) : il n’y avait que des Chauves-Souris dans le vestibule de cette maison, maison de Camazotz (2), grande brute dont les instruments de mort étaient comme ceux de Chaki-tzam (3) et qui achevaient aussitôt ceux qui (venaient) en leur présence.

(1) Ces maisons d’épreuves, images sans doute des épreuves réelles qui se pratiquaient en Xibalba, à l’imitation de celles d’Egypte, portent ici des noms de localités et de villes, telles que Balami-ha, la Maison des Tigres, nom d’une tribu qui, après la révolu-lion primitive de Tulan, émigra au Guatémala, où elle fonda une ville avec la même dénomination; Zotziha, la Maison des Chauves-Souris, berceau de la famille des Zotzil, qui régna à Tecpan-Guatémala jusqu’au temps de la conquête espagnole ; en tzendal, Zotzlem qui existe encore dans le pueblo indigène de Cinacantan, mieux Tzinacantlan, près des chauves-souris (nahuatl), à l’ouest de Ciudad-Réal de Chiapas.

(2) Camazotz est ici un nom propre plus ou moins symbolique: il signifie, qui prend ou commande les chauves-souris. Son sobriquet de Nimak chicop, que nous traduisons par grande brute, signifie mieux encore le plus grand des barbares; c’était probablement un chef de barbares à qui était commis le soin de défendre ]es frontières de l’empire de Xibalba; car Cinacantan commandait par sa position la seule entrée de la vallée de Hovel ou de Ciudad-Real, par où on pouvait entrer de ce côté dans les domaines de Xibalba. Aussi le MS. Cakchiquel dit-il avec raison que c’était une chauve-souris qui servait à fermer l’entrée de Tullan (en Xibalba), Xahun chi zotz tzapibal ru, chij ri Tullan (Mémorial des rois de Guatémala).

(3) Chaki-tzam, pointe séchée, est probablement encore un nom de lieu.

Ils se trouvaient là au dedans; mais, dormant sur leurs sarbacanes, ils ne furent pas touchés par ceux qui étaient dans la maison ; mais ils se rendirent à cause d’un autre Camazotz qui v.int du ciel (4) pour se manifester, lorsque les choses commencèrent à être faites par lui.

(4) .Chi cah, du ciel ou d’en haut.

Elles étaient donc (là) les Chauves-Souris tenant conseil toute la nuit et faisant un grand bruit : Quilitz, quilitz, disaient-elles, et elles le dirent toute une nuit. Elles cessèrent cependant un peu : il n’y eut plus de remuement parmi les Chauves-Souris, et elles restèrent de^ bout à une extrémité de la sarbacane.

Alors Xbalanqué dit à Hunahpu : Le jour commence-t-il à poindre, regarde donc?  —  Peut-être commence-t-il à poindre, je vais y voir tout à l’heure, répondit-il. Et comme il désirait ardemment regarder à la bouche de sa sarbacane, en voulant voir le lever de l’aurore, sa tête fut un moment après coupée par le Camazotz, et le corps de Hunahpu resta privé de la tête (5).

(5) Dans les images diverses sous lesquelles l’écrivain a enveloppé l’histoire on distingue la défaite de Hunhapu, probablement lorsqu’il était occupé au siège de Zotzlem ou Cinacantan.

Puis une autre fois : Ne fait-il pas encore jour ? demanda Xbalanqué. Mais Hunahpu ne remuait plus : Est-

 

x-bec Hunahpu ?hupacha mi-x’a bano?ma-habi chic chi zilabic, xa qui chi qo zoz chic.

Qatecut x-u qixbih Xbalanque : Acarok 1. mi-x-ka ya-van, x־cha cut. Chila cut x-be colana-vi u holom chuvi hom xavi u tzih Hun-Came, Vukub-Came, que quicot curi Xibalba conohel rumal u holom Hunahpu.

HULAHPAH CHI TZIH.

Qatecut ta x-u tak chicop ronohel, Ziz, Ak, ronohel chuti chicop, nima chicop, ch’agab xavixare r’agabal la x-u tzonoh cut qu’echa :

Naki-tak-pa yv’echa chi huhunal ? are qu’yx nu tak vi ch’y qam uloc ri yv’echa, x-cha cut Xbalanque chique.  —  Utzbala, x-e cha-cut.

Ta x-e bec e qamol rech, ta x-e ul he cut conohel; qo xa gumar rech x-be u qama ; qo xa tzalic x-be u qama ; qo xa abah x-be u qama ; qo xa uleu x-be u qama ; hat-ahoh qu’echa ri chicop, nima chicop.

Qui pu cu u xambe canah-oc ri tiz Coc, x-be u qama cubulcutih, chu tzam ca petic are cul x-oc halvachibal u holom Hunahpu : libahchi x-qotox u bak u vach.

 

ce que Hunahpu s'en est allé ? comment as-tu fait cela (lui dit-il après); mais il n’avait plus de mouvement, restant là seulement étendu (comme un mort).

Alors Xbalanqué se sentit rempli de honte et de tristesse : Hélas! s’écria-t-il, nous sommes assez vaincus. On alla ensuite placer la tête (de Hunahpu) au-dessus du jeu de paume, par l’ordre exprès de Hun-Camé et de Vukub-Camé, tout Xibalba étant dans l’allégresse à cause de la tète de Hunahpu.

CHAPITRE ONZIÈME.

Ensuite de cela, Xbalanqué convoqua toutes les brutes, les Porcs-Epics, les Sangliers, toutes les brutes, petites et grandes, durant la nuit, et la même nuit leur demanda quels étaient leurs aliments (1).

(1) Dans cette convocation de brutes au milieu de la nuit, dans celte demande de Xbalanqué au sujet de leurs aliments, on ne peut méconnaître un appel aux barbares du voisinage, de populations peut-être tout aussi civilisées que Xibalba, mais qu'il considérait comme des  barbares, ainsi que nous des Chinois et vice versa.

Quelle est votre nourriture à chacun en particulier I Voici que je vous ai appelés,1 afin que vous choisissiez votre alimentation, leur dit Xbalanqué.  —  C’est fort bien, répondirent-elles

Elles s’en allèrent alors prendre chacune la sienne, tous allant choisir (ce qui leur convenait) ; il y en eut qui allèrent prendre ce qui était en putréfaction ; il y en eut qui allèrent prendre des herbes; il y en eut qui-allèrent prendre de la pierre; il y en eut qui allèrent prendre de la terre, et les aliments des brutes, des grandes brutes, étaient fort variés.

A la suite des autres, la Tortue, qui était demeurée en arrière enveloppée dans sa carapace, allait pour prendre (sa part des aliments) en faisant des zigzags, et, venant se mettre à l’extrémité (du cadavre), se plaça en échange de la tête de Hunahpu; et à l’instant même il s’y sculpta des yeux.

 

Tzatz chi ahnaoh chi cah x-pe-vi, are u Qux cah, Hu-rakan x-cul coloc, x’ulu c’uloc chiri pa Zotziha : Ma cu atan x-utzinic u vach, utz chic x־uxic xavixare u chunk hebel x־vachinic, xavixare'x-chauic.

Are cut la chi r’ah zakiric chi caktarin u xecahjca xa-quinuchic^ Ama x-u ch’ux ri vuch?  — Ve,x־cha ri mama. Ta chi xaquinic : qale ta chi gekumar chic; cahmul xa-quin ri mama.

Ca xaquin-Vuch, ca cha vinak vacamic.

Xa c’u cakraxatzinic ta x-u tiqiba u qoheic : Ma utz, cha, ch’ux cut Hunahpu he? —  Utz, cba-cut. Xavixare ch’u bakitila u 11010m quehe ri quitzih u hoiom x-uxic.

Qatecut ta x-qui ban qui tzih x-e pixaban quib, mana qui cut chaahic : Xaki ch’a yequh avib.  —  Xa in hun qui qui banouic, x־cha Xbalanque chire.

Qatecut ta x-u pixabah hun Umul : C’at qole-ta chiri chuvi horn, chivi c’at qohe vi chupan pixc, x-u chax Umul rumal Xbalanque. Ch’opon na quiq avuq, qate c’at die, ca in qui banouic, x’u chax ri Umul, la x-pixabaxic ch’agab.

Un grand nombre de sages vinrent d’en haut, le Cœur du ciel, Hurakan même vint planer au-dessus de la maison des Chauves-Souris. Mais le visage de Hunahpu ne s'acheva pas si promptement (quoique) on réussit également à le faire ; sa ·chevelure crut de même avec sa beauté, et il parla également.

Et voilà qu’il voulait faire jour et que l’aurore colorait l’horizon, et le jour parut (1). Le Sarigue se fait-il (demanda-t-on)?  — Oui, répondit le vieillard (2) Alors il ouvrit ses jambes : puis l’obscurité se fit de nouveau, et quatre fois le vieillard ouvrit ses jambes.

(1) Ca xaquinuchic, le jour parut. Ce verbe est fort étrange dans son étymologie. Xaquin signifie ouvrir les jambes, et uch ou vuch est le sarigue. Pour exprimer que le jour paraît, on dit textuellement, le sarigue entr’ouvre les jambes. La ligne suivante est encore plus explicite. Ama x-u ch’ux ri vuch, est-ce que c’est fait le sarigue ? Le verbe allégorique tochtecomatica de l’Hist. des soleils dans le Codex Chimalpopoca doit avoir la même origine.

(2) Au lieu du sarigue ici c’est un vieillard, ou pour mieux dire un ancien de la civilisation, le demi-dieu ou héros Hun-Ahpu-Vuch, un tireur de sarbacane au sarigue, dont il est parle au commencement. Tout ce verset, d’ailleurs, couvre un mystère en rapport avec les antiques théories génésiaques du Mexique et de l’Amérique centrale.

Voilà que le Sarigue ouvre ses jambes (3), dit le peuple encore aujourd’hui (pour donner à entendre que le soleil se lève).

(3) Proverbe qui parait inusité aujourd’hui.

Au moment où l’aurore couvrit l’horizon de ses brillantes couleurs, il commença à exister : Est-elle bien ainsi, la tête de Hunahpu ? demanda-t-on.  —  Elle est bien, répondit-on. Et l’on acheva ainsi de fabriquer sa tête, et véritablement elle devint comme une vraie tête.

Ensuite, ils tinrent conseil, s’avisant mutuellement de ne pas jouer à la paume : Expose-toi seul alors (au danger, dirent-ils à Xbalanqué).  — - Eh bien, je ferai tout par moi-même, lui répondit Xbalanqué.

Après cela, il donna ses ordres à un Lapin : Va te placer là-haut sur le jeu de balle et reste entre les glands de la corniche, lui fut-il dit au Lapin par Xbalanqué. Dès que la balle élastique arrivera à toi, tu sortiras et je ferai le reste, lui fut-il dit au lapin, lorsqu’il reçut cet ordre au milieu de la nuit.

(4) Tout ce qui précède parait renfermer des faits historiques très-importants sous les voiles d’un profond mystère.

 

Qatecut ta x-zakiric, xavixare utz qui vach qui cabichal. X-kah chicu qui chaah colan chi cu u holom Hunahpu chuvi hom.

Mi-x-ka chakoyaù ! mi-x-y yano qui yan, mi-x-y yao, x-e u chaxic. Xavixere chi ziquin Hunahpu : Ch’a cuk a ri holom chi quiq, que u chaxic. Ma cu chi ca qaxou chic chi yegoub quib.

Are cu x-etzako u quiq rahaual Xibalba. X-u cul cut Xbalanqué ; takal curi quiq chuvach bate, chi tanenic ta x-elic huzu cu x-iqo u quiq chuvi hom, xahun xa canab vi takal pa pix. .

Ta x-el curi Umul chi coxcotic la x-bec; ocotal cut ta x-be cumal ri Xibalba que huminic, que chaninic x-ό be chirih ri Umul, x-e qiz be conohel Xibalba.

Qatecutx-qui qamix-tah ri u holom Hunahpu, x-tiquix-tah chic u coc Xbalanqué : are chicut x-be qui cuba ri coc chuvi hom; quitzih holom chi cu u holom ri Hunahpu, que quicot chi eu qui cabichal. ־

Are cut que be tzuku na quiq ri Xibalba : qatecut x-qui quamix-tah chiri quiq pa pix, ta x-e ziquin chicut : qu’yx petoc; vae quiq que mi-x-ka riqo, x-e cha qui colem chicut.

Ta x-e ul Xibalba : Nakipa ri mi-x-k’ilo, x-e cha-cut, ta x-qui tiqiba chicut chaahic ? Hunam chaahic chicut x-qui ban chic qui cabichal.

 

Et déjà le soleil s’était levé et leurs visages de l’un et de l’autre annonçaient également la santé. (Les princes de Xibalba) descendirent à leur tour jouer à la paume (au lieu où) était suspendue la tête de Hunahpu, au-dessus de la salle du jeu.

C’est nous qui avons vaincu! Vous avez subi toutes les hontes! Vous nous avez rendu (la palme)! lui disaient-ils. C’est ainsi qu’ils défiaient Hunahpu : Repose la tête maintenant (de cette fureur que tu avais) du jeu déballé, lui disait-on. Mais il ne souffrait pas des insultes dont on l’abreuvait.

Et voilà que les rois de Xibalba lancèrent la balle élastique. Xbalanqué sortit à sa rencontre; or elle arriva droit devant l’anneau, s’arrêta, et aussitôt elle sortit, passa en haut du jeu de paume et d’un seul bond entra tout droit entre les glands (qui en ornaient Sa corniche).

Le Lapin sortit aussitôt et s’en allait sautillant ; mais il fut au même instant poursuivi par tous ceux de Xibalba, qui couraient en tumulte, vociférant derrière le Lapin, et tout Xibalba acheva bientôt par se trouver en chemin (derrière lui).

Xbalanqué s’empressa aussitôt de saisir la tête de Hunahpu et de la replacer au lieu de la tortue : il alla ensuite colloquer la tortue sur le jeu de paume ; et cette tête était véritablement la tête de Hunahpu, et l’un et l’autre en furent dans l’allégresse.

Et voilà que ceux de Xibalba s'en allaient cherchant la pelote élastique : ensuite l’ayant ramassée avec empressement entre les glands, ils crièrent : Venez ; voici la pelote que nous venons de trouver, dirent-ils en !,élevant (pour la faire voir).

Ceux de Xibalba arrivant alors : Qu’est-ce donc que nous avons vu, dirent-ils, en commençant à jouer de nouveau à la paume? Et ils jouèrent pareillement, en se remettant encore une fois deux ensemble.

 

Qatecut x-cakatah ricoc rumal Xbalanqué, chi puka* bin ri coc x-kah pa horn, zakquiram çuri u zakilal chi qui vach.

Nakipa ri ch’y be y qama, apa qo-vi ri qamol re, x-cha Xibalba? Quehecut qui chakatahic r’ahaual Xibalba ru-mal Hunahpu, Xbalanqué. Nima qaxcol x-e qohe vi,mavi are x־ecam viri ronohel x-ban chique.

CABLAHPAH CHI TZIH.

Are cul vae.qui nabal qui camic Hunahpu, Xalanque : are va qui nabal qui camic x-chi ka biyh chic.

Ta x-e pixabah cut x-qui bano ronohel qaxcol rail x-ban chique, mavi x־e camic rumal u tihobal Xibalba, mavi x-e chakatahic rumal ronohel tionel chicop qo chi Xibalba.

Qatecut ta x-qui tak chi câib nicvachinel queheri e ilol are qui bi va Xulu, Pacam, e etamanel : Uve qoh tzonoxic chyve cumal rahaual Xibalba rumal ri ka camic, qui naoh ca qui nuk, rumal ri mavi mi-x-oh camic, ma pu mi-x-oh chakatahic, mi״x-ka zach qui tihobal, ma xa chicop ch’oc chique.

 

Alors précisément la tortue fut atteinte d’un coup de pierre (lancée) par Xbalanqué, et roulant d’en haut, elle tomba en pièces dans le jeu de paume, brisée en mille morceaux comme de la faïence aux yeux de ceux (de Xibalba).

Qui devons ira la chercher, où est celui qui va la prendre? s’écria-t-on (dans) Xibalba. Ainsi donc furent joués les princes de Xibalba par Hunahpu et Xbalanqué. Or ceux-ci endurèrent de grands travaux ; mais ils ne moururent point de tout le mal qu’on leur fit.

CHAPITRE DOUZIÈME.

Or voici ce que la mémoire (a conservé) de la mort de · Hunahpu et de Xbalanqué : Voici que nous raconterons à son tour le souvenir de leur mort.

Après avoir été avertis de tous les travaux et souffrances qu’ils endureraient et qu’ils endurèrent, ils ne moururent pas cependant dans les épreuves de Xibalba et ne furent point vaincus par toutes les attaques des brutes qu’il y avait en Xibalba.

Ensuite ils appelèrent deux devins qui étaient comme des voyants et dont les noms sont Xulu et Pacam, des sages (l’un et l’autre) : Si par hasard on vous pose la question de la part des rois de Xibalba, au sujet de notre mort qu’ils méditent et conjurent actuellement, pourquoi nous ne sommes pas encore morts, pourquoi nous n’avons pu être vaincus, ni abattus par leurs épreuves, (vous leur direz) que c’est parce que les brutes ne sont pas entrés (dans la conjuration) avec eux (1).

(1) Les brutes, c’est-à-dire les barbares soumis au sceptre de Xibalba s’étaient apparemment unis aux rebelles. La même idée se produit dans les anciens documents mexicains, où Quauhtli-Oceloll, Aigle et Tigre, Tlotti-Cuitlachtli, Epervier et Loup, symbolisent le peuple.

 

Are eu retal va chi ka qux chohim-abah camizabal ke cumal. Mi־x־e cuchu quib ronohel Xibalba : macu quitzih ta koh camic. Are eu y naoh va x-chi ka biyh :

Uve qu’yx ul tzonobex x-oc cumal chirech ka camic ta koh gat־oc, naki x-ch’y eu chah, yx Xulu, yx Pacam? Uve que cha chyve : Chi ka lix־ta qui bakil pa zivân, uve ma־ba utz? —  Xavixere chic chi qaztah qui vach, qu’yx cha.

Uve ba are utz xa chika xequeba chuvi che ta, que cha chic ch’yve? —  Xax ma utz vi, xavixere ch’yv’il chi qui vach, qu’yx cha. Ta que cha chicut chir’oxmul : Xa-ba־re r’utzil xa chi ka tix qui bakil pa r’akan ha? Ve eut qu’yx uchax chic cumal :

Are utzbala que camic ; qatecu utz chi hok qui bakil chuvach abah, queheri chi queex qahim hal, huhunal cu chiqueic. Qatecu ch’y tixubic chi r’akan a, chiri kah quva, chi be chuti huyub, nima huyub ; qu’yx cha-cut, ta chi qutunizah ri ka pixab mi-x-ka biyh chyve, x־e cha Xhu-nahpu, Xbalanque, ta x-e pixabic, x־qu’etaamah qui ca-mic.

Are ca-ban ri nima chohim abah, queheri chohibalqui x-qui ban Xibalba, nimak xak x-qui coho. Qatecut x-ul

 

Voici donc dans noire pensée que le signe (de notre mort) est un bûcher (1) qui doit leur servir à nous donner la mort. Tout Xibalba achève de se réunir : mais en vérité nous ne mourrons point. Mais voici que nous allons vous inspirer ce que vous avez à dire :

(1) Chohim-abah, bûcher, mot à mot rocher embrasé. Voici la troisième fois déjà qu’il est question du chohim-abah, pierre ou rocher embrasé, bûcher. Les détails qui y ont rapport rappellent le teotexcalli, rocher divin qui s’embrase à Teotihuacan, ainsi que la mort de Nanahuatl, le syphilitique, et de Metztli, son compagnon, transformés ensuite en soleil et en lune. Voir le commentaire.

Si l’on vient vous demander de leur part au sujet de notre mort, quand nous aurons été condamnés, comment répondrez-vous, ô Xulu, ô Pacam (2)? S’ils vous disent : Jetterons-nous leurs os dans le précipice, ne sera-ce pas bien?  —  Si vous faites cela, ils ressusciteront, direz-vous.

(2) Xulu, substantif et verbe qui a le sens de deviner, d’où Ahxulu, devin. Pacam peut venir de Pag, qui signifie une pelote et une sorte de tomate.

S’ils vous disent encore : Serait-il bon que nous les pendissions à des arbres? —  Certainement que ce n’est pas bon ; car ainsi vous verriez de nouveau leurs visages, direz-vous. S’ils vous disent enfin une troisième fois : Ferons-nous bien de jeter leurs os à la rivière? Si donc la question vous est répétée par eux, (vous leur direz) :

C’est bien là ce qu’il faut pour qu’ils meurent; il sera bon ensuite que leurs os soient moulus sur la pierre comme on moud le maïs en farine, et que chacun soit moulu séparément. Ensuite vous les jetterez à la rivière, à l’endroit où tombe la fontaine (3), afin que (leurs cendres) s’en aillent à toutes les montagnes grandes et petites ; (c’est là ce) que vous leur répondrez, quand ils vous interrogeront sur les avis que nous vous avons donnés, dirent Xhunahpu (4) et Xbalanqué, en prenant congé d’eux, sachant qu’ils allaient mourir.

(3) Quva, fontaine, eau cristalline, signifie aussi émeraude. Dans le Codex Chimalpopoca, la femme serpent, appelée Quilachtli, prend les os apportés à Tamoanchan par Quetzalcohuatl, les broie et les met dans un vase d’émeraude, chalchiuh-apazco.

(4) Ici le nom se modifie ; au lieu de Hun-Ahpu, il y a Xhunahpu, Hunahpu, le petit, le jeune ou le second.

Voilà donc qu’on fit un grand bûcher, semblable à un foyer demi-souterrain, que firent (élever) ceux de Xi-

 

zamahel achbilay que u zamahel Hun-Came, Vukub-Came.

Que petoc. Koh be-ta cuq qaholab, chi beta qu’ila, ca qu’yxka chohih, cacha ahau, yx qaholab, x-e uchaxic.  —  Utzbala, x-e cha-cut.

Anim x-e bee, x-e opon cut chu chi choh; chiri cut x-e r’ah chih vi chi etzanem : Ka chopih vae ri ka quiy, cah-tak-mul tah chi ka xicah chi ka huhunal, yx qaholab, x-e chax cut rumal Hun-Came.

Mavi are koh y mich viri. Ma-pa k’etaam ka camic, yx ahauab, chi vi tana, x-e cha-cut ? Ta x-qui culavachih qui vach, x-qui rip qui gab qui cabichal e pu hupuhuh ta x-e bee pa choh, chiri cut x-e cam vi qui cabichal.

Que quicot chicut ronohel Xibalba, takal qui yuyub, takal qui xulcab : Mi-xe ka chako quitzih , mavi atan x-qui ya quib, x-echa.

Qatecut qui takic ri Xulu, Pacam x-çanah vi qui tzih. Xavixare x-tzonox ri x-be vi qui bakil, ta x-e gihin, Xi-balba x-hok qui bakil, x-be tix־oc chi r’akan a. Ma-cu x-e be ta chi nah : xa huzu x-e kah chuxe a, e chaom qaholab x-e uxic; xavixere qui vach x-uxic x-e qutun chicut.

 

balba, et l’on y mettait beaucoup de branchages. Après quoi vinrent les officiers qui devaient les accompagner, mandataires de Hun-Camé et de Vukub-Camé.

Qu'ils viennent. Allons donc avec les jeunes gens et qu’ils viennent voir que nous allons vous brûler, dit le roi, ô jeunes gens, leur fui-il dit.  —  Fort bien, répondirent-ils.

Rapidement ils cheminèrent, et ils arrivèrent auprès du bûcher; là donc on voulut les obliger à badiner : Prenons donc ici nos doux, breuvages, et quatre fois volons-y chacun de son côté (1), ô jeunes gens, leur fut-il dit alors par Hun-Camé.

(1) Chi ka xicah chi ka huhunal, volons-nous chacun en particulier ; chi, signe de l’impératif ou du futur; ka, nous; xicah, voler avec des ailes, ouvrir, étendre les bras, de xic, aile.

Cessez de nous plaisanter ainsi. Ne saurions-nous pas par hasard que la mort nous attend ici, mes seigneurs? répondirent-ils. Et s’embrassant face contre face, ils croisèrent leurs bras et allèrent s’étendre le visage en bas sur le bûcher et y moururent ensemble.

En même temps, tous ceux de Xibalba étaient remplis d’allégresse et ils manifestaient leur joie par des cris et des murmures confus : Enfin nous avons vaincu véritablement, et ce n’est pas trop tôt qu’ils se sont rendus, disaient-ils.

Ensuite ils appelèrent Xulu et Pacam, à qui ils avaient laissé leur (dernière) parole. De même (qu’ils l’avaient annoncé), on leur demanda ce qu’il fallait faire de leurs os, et lorsqu’ils eurent achevé leur divination, Xibalba ayant fait pulvériser les os, les envoya jeter dans la rivière. Mais (ces cendres) n’allèrent pas bien loin : elles descendirent immédiatement au fond de l’eau, où elles furent (changées en) de beaux jeunes gens; véritablement ce furent leurs traits qui se manifestèrent de nouveau (2).

(2) Le phénix, qui renaît de ses cendres, aurait-il donc une origine amé-ricaine ?

R'OXLAHPAH CHI TZIH.

Chi r’obix cut x-e qutun chic, x-e il chi ya rumal vinâk^ e caib queheri xa vinak-car x-e vachinic, ta x-il qui vach cumal Xibalba, x-e tzukux cut chi tak ya.

X-chueka cut, que qutun-oc*e caib chi meba, atziyak qui vach, atziyak pu gih, atziyak qui qui qu, mana chi banan-ta qui vach. Ta qui x-e ilic rumal Xibalba; hala chicut x-quibano, xa xahoh Puhuy, xahoh Cux, xa iboy, x-qui xaho, xa Xtzul, xa Chitic x-qui xahchic.

Quia maihabal x-qui ban chic, x-qui poroh ha queheri quitzih chi qatic, libahchi cut chi viuakir chic ; tzatz chi Xibalba chi cayic.

Qate chi qui puz quib, chi cam hun chique, chi pane na chi caminakil nabe chi qui camizah quib ; xavixere li-bahchi qaztah vi chi u vach, xa qui cay Xibalba, ta chi

 

CHAPITRE TREIZIÈME.

Au cinquième jour donc ils apparurent de nouveau, et furent vus dans l’eau par les gens (1); semblables à deux hommes-poissons, ils se montrèrent, et leurs faces furent vues de ceux de Xibalba, et ils furent cherchés partout dans les eaux (2).

(1) Vinak-car, exactement homme-poisson. C’est le nom d’une espèce de poisson du pays, appelé en mexicain tlacamichin. L’idée qu’on attache encore à ces deux mots est celle d’une sorte de sirène.

(2) Les noms d’animaux et de choses inanimées n’ont ordinairement pas de pluriel ; on y supplée par une particule qui l’indique, comme ici tak, qui signifie plusieurs, beaucoup, tous en général. Chi tak ya, dans les eaux ou les rivières.

Mais le lendemain matin apparurent deux pauvres, aux traits vieillis, d’une apparence misérable, (qui n’avaient que) des haillons pour vêtements ; leur aspect n’avait rien d’avenant. Lorsqu’ils furent aperçus par ceux de Xibalba, ils ne faisaient que peu de chose, se contentant de danser la danse du Puhuy, la danse du Cux et l'Iboy et ils dansaient aussi le Xtzul et le Chitic(3).

(3) Le Puhuy. en nahuatl Mecatecolotl, sorte de hibou à longues oreilles: on appelle aussi puhuy certains épis courts de maïs de terre chaude. — Cux, espèce de belette, appelée en nahua cuçatl ou cuçamatl. —  Iboy, armadille ou tatou, en mexicain Yaotochtli. —  Le Xtzul est un insecte fort venimeux, le mille-pieds d’Amérique, connu au Mexique sous le nom de petlaçol-co-huatl ou cents on-maye. —  Chitic, qui va sur des échasses. Ces noms sont ! ceux de certains divertissements scéniques, tantôt mimiques seulement, tantôt mêlés de danse, de dialogue et de musique ; la plupart sont encore aujourd’hui en usage parmi les Indiens.

Les nombreux prodiges qu’ils opéraient, brûlant des maisons, comme si vraiment elles eussent brûlé et immédiatement les faisant renaître , (firent accourir) tout Xibalba à ce spectacle (4).

(4) On trouve dans Sahagun une curieuse confirmation de ce texte et qui peut en quelque sorte lui servir de paraphrase : « Les Cuextecas, dit-il, en » parlant des populations de la côte » de Panuco, retournant à Panutla, » emportèrent avec eux les chants י> dont ils se servaient lorsqu’ils dansaient, ainsi que les ornements י> dont ils usaient dans leur, danse ou » comédie. Ces mêmes gens aimaient » à faire des tours de subtilité, avec » lesquels ils trompaient le monde » donnant à entendre pour vrai ce « qui est faux, comme faire qu’ils » brûlaient des maisons, lorsqu’il n’y » avait rien de semblable; comme » faire apparaître une fontaine avec « des poissons, quand il n’y avait » rien, sinon une illusion des yeux ; י> gens qui se tuaient eux-mêmes, en » se coupant et en se mettant en י> pièces et autres choses qui n’étaient « qu’apparentes et point véritables. י> (Sahagun, Hist, gen. de las cosas de Nuera-Espana, lib. x, cap. 20, § 12.)

Ensuite ils se sacrifièrent, l’un des deux donnant la mort à l’autre, et celui qui s’était le premier laissé tuer s’étendait mort ; mais à l’instant même ils se ressuscitaient éga-

 

qui bano ronohel, x-qui ban chic u xenaahic chic chakbal quech Xibalba cumaî.

Qate chi puch r’oponic chic u tzihel qui xahoh chi xi-quin ahauab Hun-Came, Vukub-Came x־cha ta x-qui tao : Naki ri e caib meba la quitzih vi chi cuz ?

Quitzih vi pu chi hebelic qui xahouic ronohel ca qui bano, x-cha-cut qui tzihoxic x-oponic cuq ahauab. Cuz · x-qui tao ta x-bochi eut qui zamahel takol chique : Petoc * ch’ul ta qui bana ka cay que ka maihah-tah, que ka cayih-ta puch, que cha ahauab, qu’yx cha chique, x-u chax ri zamahel.

Xe-opon eut cuq tixahol, lax-chaocut qui tzih ahauab chique. Ma ba chi k’ah, rumal ri quitzih koh xobic. Ma xa mavi koh qixbic, koh oc apanoc chi ahaual ha, rumal qui itzel ka vach, ma xaki nimak u bak ka vach chi meba ? Ma-xa-on r’il chire xa oh xahol ? Nakita chi ka biyh chike k’achmeba qo qam cu raih naipu rika xahoh, ca qui qaz-tah qui vach kuq ? Ma-quehela u x-chi ka ban chique ri ahauab ? Quehecu mavi ca k’ah vi, vx zamahel, x-e cha-eut ri Hunahpu, Xbalanqué. ־

X־elehebex na qui vach chuvi ra, chuvi qaxcakrailx-e bec : mavi atan x-c’ah benam quïamul x-e chihic, xa chi

 

lement : et ceux de Xibalba les regardaient avec stupeur, tandis qu’ils faisaient tout cela, (car) ils faisaient (ces choses comme) le commencement de leur nouvelle victoire sur Xibalba. ?

Or, après cela, la nouvelle de leurs danses arriva aux oreilles des rois Hun-Camé et Vukub-Camé, et ils dirent en l’entendant : Quels sont donc ces deux pauvres, vraiment donc est-ce si agréable (à voir) ?

Oui, leur danse est vraiment admirable, ainsi que tout ce qu’ils font, répondit celui qui en avait porté le récit aux rois. Flattés de ce qu’ils entendaient> ils envoyèrent leurs mandataires pour les chercher : Qu’ils viennent faire (ici ces choses), que nous les puissions voir et admirer, que nous les applaudissions, dirent les rois; dites-leur cela, leur dit-on aux mandataires.

En arrivant auprès des danseurs, ils leur dirent les paroles des rois. Nous ne voulons pas répondirent-ils), car en vérité nous sommes honteux. Ne rougirions-nous pas de paraître devant des princes de ce rang, à cause que nos figures sont si laides et non-seulement que nos yeux sont si grands(1), et que nous sommes des pauvres? Qu’y a-t-il donc à voir avec nous qui ne sommes que des danseurs ? Que diront nos compagnons de misère qui sont là désirant également de prendre (part à) notre danse et de se réjouir avec nous ? Ce n’est pas de cette façon certainement que nous en agirions avec les rois ? Ainsi donc nous ne le voulons pas, ô messagers, répondirent Hunahpu et Xbalanqué (2).

(1) Ma xaki nimaku bak ka vach, ne (sont-ils) certainement pas très-grands les globes de nos yeux ? Cette indication est assez intéressante, les Indiens n'ayant d’ordinaire pas de bien grands yeux; maison sait que la race caraïbe les avait grands et déprimaient la tète de leurs enfants pour les faire ressortir.

(2) Voici la quatrième génération de Hun-Ahpu et de Xbalanqué, qui paraît dans cette épopée en comptant les premiers qui furent sacrifiés en Xibalba.

A force d’être importunés et portant sur le visage les marques de leur mauvaise humeur et de leur chagrin, ils

 

machcay zamahel chi qui vach qamol que la x-e be cut ruq ahau.

X-e opon puch cuq ahauab, que mocho chic, chi qui xule la qui vach, x-e oponic, x-qui quemelah quib, chi qui luequib, chi mayo gih chi atziyak, quitzih ri chi meba qui vachibal x־e oponic.

Ta x-tzonox cut qui huyubal, c’amag puch, x-tzonox naipuch qui chuch, qui cahau : A pa qu’yx pevi, x-e u chaxic?  —  Maba k’etaon, at ahau. Mavi x-k’etamah u vach ka chuch, ka cahau, ca oh chutic-oc ta x-e camic, xa x-e cha, mavi nakila x-qui byih.

Utzbala. Ch’y ban-ta ba ka cay , naki ch’yv’ah, yv’ahil chi ka yao, x-e u chaxic.  —  Ma ba ca k’ah ; quitzih chi ca ka xibih kib, x*e cha chic chi re ahau.

M’yx xibih yvib, m’yx xobic, qu’yx xahon-oc. Are ta nabe ch’y xah ri qu’yx puzu ta yvib, ch’y poroh-ta curi v’ochoch ; ch’y bana ronohel ri yv’etaam ; koh cay-tah, ca c’ah are nma ka qux. Qu’yx be-tak-oc rumal, yx me-ba, chi ka ya yv’ahil; y-e uchax cut.

Ta x-qui tiqiba cut qui bix, qui xahoh ta x-ul cut rono-hel ri Xibalba, x-e pulice cayel ronohel. Cut x-qui xaho, x-qui xah Cux, x-qui xah Puhuy, x-qui xah Iboy.

X־cha eu ahau chique : Ch’y puzu ri nu tzi, chi qaztah

 

partirent, malgré eux : mais ils refusaient d’aller vite, et bien des fois les envoyés les obligèrent, en négociant avec eux, pour les amener auprès du roi.

Ils arrivèrent ainsi devant les rois, et s'humiliant avec affectation, ils baissèrent In tête, en se présentant, s’inclinèrent profondément et se prosternèrent avec leur air misérable et leurs vêlements usés, (montrant) ainsi à leur arrivée un aspect véritablement pauvre.

On leur demanda alors quelles étaient leurs montagnes et leur tribu ; on leur demanda aussi qui étaient leur mère et leur père. —  D’où venez-vous ? leur dit-on.' —  C’est à peine s’il nous en est resté un souvenir, seigneur. Nous n’avons point connu la face de notre mère et de notre père, et nous étions petits, lorsqu’ils moururent, dirent-ils, sans parler davantage.

Fort bien. Maintenant faites que nous puissions vous admirer, (faites tout) ce que vous voudrez, et nous vous donnerons votre récompense, leur fut-il dit.  —  Nous ne désirons rien ; mais véritablement nous sommes remplis de crainte, répondirent-ils au roi.

Ne vous effrayez pas et ne soyez pas timides, dansez (1). Et d’abord représentez où vous vous tuez, et brulez ma maison; faites tout ce que vous savez, que nous puissions jouir de votre spectacle, c’est tout ce que nos cœurs désirent. Après cela vous partirez, pauvres gens, et nous vous donnerons votre récompense, leur répéta-t-on.

(1) Qu’yx xahon-oc, vous dansez maintenant, du verbe xah, xaho, xahou, danser, battre du pied, du talon, en figurant des pas. De là xahbal et xahoh, la danse ou le ballet, représentation, comme aussi toute scène de théâtre, parce que chez les Indiens le dialogue, le chant, la mimique et la danse avaient lieu souvent dans, la même représentation, ainsi que chez nous, et dans les spectaclcs anciens.

Alors ayant commencé leur chant et leur danse, tout Xibalba vint s’asseoir à l’entour pour tout voir. Et aussitôt se mettant à danser, ils représentèrent le Cux, ils représentèrent le Puhuy et dansèrent l'Iboy.

Et le roi leur dit : Tuez mon chien que voici et qu’il

 

chi u vach yvumal, x-e a chaxic. —  Ve, x-e cha, ta x-qui puz tzi, x-qaztai chi u vach, quitzih eu chi q’dicot ri tzi, ta x-qaztah u vach, ch’u zakbizala u he, ta x-qaztah u vach.

X-cha eu ahau chique : Ch’y poroh na ba v’ochoch, x-e u chaxic. Ta x-qui poroh cut r’ochoch.ahau, e pulinak ahauab pa ha conohel, mavi x-e qatic. Libahchichic x-c’utzinizah, mana huzu zachic ri r’ochoch Hun-Came.

X-qui maihah cut conohel ahauab, xavi-cu-xere que xahouic nim que quicotic. X-e uchax chicut rumal ahau 1 Ch’y camizah na-cuhun vinak, ch’y puzu, ma-ta cu chi camic, x-e u chax-cul.

LTzbala , x-e cha. Ta* x-qui chap cut hun vinak, qate x-qui puzu, x-qui pogoh eu akanoc u qux rihun vinak, x-qui coloba cut chi qui vach ahauab. X-qui maiha chicut HumCame, Vukub-Came ; libah chicut x-qazta chi u vach ·ri hun vinak cum al, nim· chi quicot u qux ta x-qaztah u vach.                              ■

X-qui maihah cut ahauab : Ch׳y puzu chi na-cu yvib, chi k’il — tah, quitzih c’u raih ka qux ri y xahoh, x-e cha chicu ahauab.  —  Utzbala, at ahau, x-e cha cut.

Qatepuch x-qui puz quib ; are cu x-puz ri Xhunahpu rumal Xbalanque, huhunal cu x-perepoxic r’akan u gab, x-el u holom, x־cole aponocchi nah, x-qotix uloc u qux, x-cheque chuvach tzalic que gabar cu ri ronohel rahaual Xibalba.

 

soit rendu à la vie par vous, leur dit-il.  —  C’est bien, dirent-ils, tout en tuant le chien ; puis ils le ressuscitèrent : et vraiment le chien était tout joyeux d’être rendu à la vie et il remuait sa queue, (dans la joie) d’avoir été ressuscité(1).

(1) Qazl {pour qazil}, substantif qui exprime la vie, de qaz, vivre. Qaztah, faire vivre ou vivifier, qazlem est la vie encore, qaztah u vach, faire vivre ou vivifier sa face ou ses yeux, se dit pour ressusciter quelqu’un.

Puis le roi leur dit : Bridez donc maintenant ma maison, leur dit-il. Alors aussitôt ils embrasèrent la maison du roi, tous les princes étant assis dans son enceinte, sans qu’ils se brûlassent. Et l’instant d’après, ils la rendaient bonne, et à peine un moment la maison de Hun-Camé fut perdue.

Tous les princes étaient émerveillés et ils éprouvaient également un grand plaisir de la danse. Alors il leur fut dit de la part du roi : Tuez maintenant un homme, immolez-le, mais qu’il n’en meure point, ajouta-t-on.

Fort bien, dirent-ils. Alors ils saisirent un homme, et, lui ayant ouvert la poitrine, ils retirèrent le cœur de cet homme, en l’élevant, et le passèrent devant les yeux des princes. Hun-Camé et Vukub-Camé étaient également étonnés ; mais un moment après l’homme était rendu à la vie par eux, et il se montrait plein d’allégresse d’avoir été ressuscité.

Les princes continuaient à être émerveillés : Tuez-vous maintenant vous-mêmes ; voilà ce que nous désirons voir, c’est vraiment ce que notre cœur souhaite, ce spectacle qui vous est spécial, dirent encore les princes.  —  Fort bien, seigneur, répondirent-ils.

Après cela commença l’immolation de l’un par l’autre ; ce fut Xhunahpu qui fut tué par Xbalanqué; ses bras et ses jambes furent tranchés l’un après l’autre, sa tête fut séparée (du tronc) et emportée loin de lui, tandis que son cœur était arraché et exposé devant tous les rois de Xibalba, qui (2) tournaient enivrés (de ce spectacle).

(2) X-cheque chuvach tzalic que gabar cu ri ronohel rahaual Xibalba, mot à mot : il mettait devant tournés eux ivres certainement tous les rois de Xibalba. Mais cette ivresse était-elle l’ivresse de l’étonnement ou produite par les narcotiques que pouvaient employer Xhunahpu et Xbalanqué pour halluciner les spectateurs? Voici à ce sujet ce qu’on trouve dans l’ouvrage du célèbre médecin Hernandez, envoyé par Philippe H pour recueillir les notions des plantes et autres sciences naturelles des Mexicains, « Ololiuhqui, quam coaxihuitl, seu herba serpentis alii vocant.....Indorum sacrifici, cum videri vellent versati cum Superis, ac » responsa accipere ab eis, eâ vesce» bantur planta, ut desiperent, milleque fantasmata et'dæmonum obversantium effigies circumspectarent : qua in re solano manico » Dioscoridis similis fortassis alicui videri possit.» (Hernandez, apud Nieremberg, Hist. Nat. lib. XV, cap. 75.)

 

Chi cay xa-cu-hun chi ca xahouilabic ri Xbalanqué : Ca valih־oc! x-cha-cut, x-qaztah u vach. Nim que quicotic. Xavi quehe que quicotic ahauab ; xaviare que banouic ca quicotqui qux Hun-Came, Vukub-Came, queheri are que xahouic ca qui nao.

Qatepuch u rainic, u malinic pu qui qux ahauab chire qui xahoh Xhunahpu, Xbalanqué, ta x-el eu qui tzih Hun-Came, Vukub-Came : Ch’y bana chike, koh y puzu, x-e cha-cut Hun-Came, Vukub-Came chique ri Xhunahpu, Xba-lanque.                   י           .

Utzbala, chi qaztah y vach ; ma-pa yx qo cam ? oh pu quicotirizay yve, yx, pu rahaual yv’al, yqahol. x-e cha-cut chique ahauab.

Àrecu nabe x-puz ri qui u holom ahau, Hun-Came ubi, rahaual Xibalba. Caminak chicut Hun-Came, ta x-fhap chic Vukub-Came, mavi x-qaztah chi qui vach.

« י

Qatepu x-elic Xibalba chi c’akan are x־qu’il ri ahauab x-e camic e xaraxoh : ch’ubic e pu xaraxoxinak qui cabi-chai, xa cu kahizabal qui vach x-banic. Huzuc x-u cami-beh ri hun ahau ; mana x-qui qaztah chi u vach.

Are curi hun ahau x-elah na, x-oc na chi qui vach ri e xahol, mavi x-u culu, ma pu x-u riqo : Togob nu vach, x-cha, la x-u na rib.

 

Ils regardaient avec stupéfaction (1) mais (ne voyaient) qu’une chose, le spectacle que donnait Xbalanqué : Lève-loi ! dit-il ensuite, et (Xhunahpu) fut rendu à la vie. (L’un et l’autre) ils se réjouirent beaucoup. Les princes se réjouirent de même; en effet, ce qu’ils faisaient transportait le cœur de Hun-Camé et de Vukub-Camé, et ils l’éprouvaient comme s’ils eussent eux-mêmes été les acteurs.

(1) Chi cay xa-cu-hun, regardait donc à la fois (ou ensemble). Cay, qui forme cayic, etc., signifie assister à un spectacle, regarder avec étonnement ou admiration, etc. Xahun, composé de xa, seulement, et de hun, un; le cu est une conjonction intercalée.

Ensuite !,excès du désir et de la curiosité (emportant) le cœur des princes vers le spectacle (que leur avaient donné) Xhunahpu et Xbalanqué, Hun-Camé et Vukub-Camé laissèrent échapper ces paroles : Faites de même avec nous, immolez-nous, dirent Hun-Camé et Vukub-Camé à Xhunahpu et à Xbalanqué.

Fort bien, vous ressusciterez ; est-ce que pour vous peut exister la mort? mais nous réjouir, c’est votre droit, ô vous, les rois de vos serviteurs et de vos vassaux, répondirent-ils aux princes.

Et voilà que celui qu’ils sacrifièrent d’abord fut le chef-roi, Hun-Camé était son nom, le monarque de Xibalba. Hun-Camé étant une fois mort, ils s’emparèrent de Vukub-Camé, et ils ne leur rendirent pas la vie.

Alors s’enfuirent tous les princes de Xibalba, en voyant les rois morts et la poitrine entr’ouverte : en un moment ils furent eux-mêmes sacrifiés deux à deux, comme un châtiment qui leur était dû. Il ne fallut qu’un instant pour donner la mort au roi, et ils ne lui rendirent pas la vie.

Mais voilà qu’un des princes s’humilia alors, en se présentant devant les danseurs, n'ayant pas été trouvé ni pris (jusqu’à ce moment). Ayez pitié de moi, dit-il, lorsqu’il se vit reconnu.

 

X-e quiz cu bee ronohel c’al qui qabol pa nima zivan, xahun x-qui balih vi quib pa nima xolobacban ; chirj cut e lubul vi ta x-qutun cut mavi ahilan chi Zanic, tu-culiy ula que pa zivan.

Queheri x-e beyox uloc, ta x-e ul cut, x-qui xul qui ya chi quib conohel x-e ul elah-oc, x-e ul pu oc׳oc. Quehecut qui chakatahic rahaual Xibalba, xa·maihabal, xa pu qui halvachibal quib la x-qui bano.

CAHLAHPAH CHI TZIH.

Qatepuch ta x-qui byih qui bi, x-qui cobizah quib chi qui vach conohel Xibalba.

Ch’y taa kâ bi, x-chi ka byih naipuch u bi ka cahau chyve. Oh va, oh Xhunahpu, Xbalanqué, ka bi. Are cu ka cahau ri x-y camizah Hunhun-Ah'pu, Vukub-Hunahpu, qui bi. Oh pakol re vae qui rail, qui qaxcol ri ka cahau. Quehecut mi-x-ka cuyu vi ronohel qaxcol mi-x-y ban chique : quehecut qu’yx ka zach vi yv’onohel, qu’yx cami-zah, mahabi chic colotahel chyve, x-e uchax cut.

Qatepuch que tahic c’ogic conohel Xibalba : Togob ka vach, yx Hunahpu, Xbalanqué! Quitzih vi x־oh makunic chique ri y cahau qu’y byih la cute e mukul chi Pucbal-chah, x-echacut.

Utzbala ! are ba ri ka tzih x-chi ka byih chyve. Ch’y taa yv’onohel, yx Xibalba! Rumal mana nim ch’y gih,

Leurs vassaux s’enfuirent tous en fouie à une ravine profonde, remplissant comme une seule masse le vaste précipice ; c’est là qu’ils étaient amoncelés, lorsque d’innombrables Fourmis vinrent les découvrir et les acculer dans le ravin.

Ainsi ils furent emmenés par le chemin, et en arrivant (devant les vainqueurs) ils se prosternèrent avec humilité et se rendirent tous, se soumettant sans réserve en se présentant à eux. C’est ainsi que furent vaincus les rois de Xibalba, et seulement par un prodige, et par leur métamorphose (Xhunahpu et Xbalanqué) accomplirent (cette victoire).

CHAPITRE QUATORZIÈME.

Ensuite (les danseurs) dirent leurs noms et s'exaltèrent à la face de tous (les sujets) de Xibalba.

Vous, entendez nos noms, et nous vous dirons également les noms de nos pères. Nous voici, nous, Xhunahpu et Xbalanqué, (tels sont) nos noms. Et ce sont nos pères, ceux que vous avez mis à mort, et qui se nomment Hun-hun-Ahpu et Vukub-Hunahpu. Nous voici les vengeurs des tourments et des souffrances de nos pères. Ainsi c’est nous qui prenons tous les maux que vous leur avez faits : ainsi donc nous vous achèverons tous, nous vous mettrons à mort sans qu’un seul d’entre vous puisse s’échapper, leur fut-il déclaré. ’

Après quoi tous les sujets de Xibalba se prosternèrent en gémissant. Ayez pitié de nous, ô Hunahpu, Xbalanqué ! En vérité, nous avons péché contre vos pères, que vous dites, et qui sont enterrés dans le Cendrier, répondirent-ils.

Fort bien! Voici donc notre sentence que nous prononçons sur vous. Ecoutez, vous tous, vous sujets de Xi-

 

yv’alaxic ch’uxic, ruq naipuch mavi nim y cochi bal, x-zcaquin chic ch’y quiq holomax mavi chu hom quiq yve, xa xot, xa akam, xa chuch chire x-heraxic; xa naipu r’al quim, r’al lolob chyve chah. Ma cu yvech ri ronohel zakil r’al, zakil qahol ; xa noh chi tzako ribch’y vach. Are ri ahmak, ahlabal, ahbiz, ahmoquen ch’oc na u mak, qu’yx ogvi.Ma na xa rax chapom ronohel vinak ch’y bano; qu’yx ta־on puch chuvi ri quiq holomax. X-e uchax cut conohel Xibalba.

Quehecul liqarinak qui zachic u maixic, naipuch qui ziquixic. Mavi nim qui gih oher : xa x-r’ah tza vi vinak oher ; quitzih mana qabauil qui bi oher : xavi xibal itzel qui vach, e ah-Tza, ah-Tucur, e takchinel chi mak? chi labal.

E naipu ahmukulic qux, e gekail-zakiil, ahmoxvach, ahlatzab que n chaxic. Chi x-e on qui vach que culutahic : quehecut u zachic qui nimal gagalj mavi nim chi c’ahaua-rem x’uxic. Are x-e banou ri Xhunahpu, Xbalanque.

 

balba ! Puisque voire éclat et votre puissance ne sont plus et qu’il ne vous reste même plus de droit à la clémence, votre sang dominera bien encore un peu· (1), mais votre pelote ne (roulera) plus dans le Jeu de Paume. (Vous ne serez plus bons qu’à) faire des choses de terre cuite, des tourtières, des marmites, à égrener le maïs; elles bêtes qui vivent dans les broussailles et dans la solitude seront seules votre partage (2). Tous les vassaux heureux, les sujets civilisés, cessent d’être à vous, les abeilles seules continueront à se reproduire devant vos yeux. Vous donc, hommes pervers, hommes cruels et tristes, misérables, qui avez commis le mal, pleurez-le. On ne prendra phis à l'improviste les hommes, comme vous faisiez; mais soyez attentifs (à ce que j’ai dit) sur cette balle dominatrice. C’est ainsi qu’ils parlèrent à tous les sujets de Xibalba.

Ainsi commença leur destruction et leur ruine, comme aussi l’invocation qu’on leur adressa (3). Mais leur éclat ne fut jamais bien grand auparavant : seulement ils aimaient à faire la guerre aux hommes; et véritablement on ne les nommait pas non plus des dieux anciennement : mais leur aspect inspirait l’effroi; ils étaient méchants (comme) les Hiboux (4), inspirant le mal et la discorde.

(3) Cet aveu est curieux; on commença à les invoquer comme des dieux, lorsque leur puissance fut tombée. Le principal de ces dieux parait avoir été le même qu’on retrouve dans la mythologie mexicaine sous le nom de Mictlanteuctli, seigneur du séjour des morts.

(4) Xavi xibal itzel qui vach, certainement terribles, méchantes leurs faces. Ils étaient méchants comme les hiboux; il y a dans le texte ah-tza, ah-tueur, mot à mot : ceux du mal, ceux des hiboux. Mais ces mots ont probablement un autre sens beaucoup plus complet. Tza ou itza parait se rapporter aux anciennes populations; ah-itza, habitants du Peten, et ah-tucur, à ceux de l’ancien Tucuru, également sujets de Xibalba; du ne saurait douter que la capitale de cet empire ne fût fort peu éloignée du pays et du lac de Peten-Itza.

Ils étaient également de mauvaise foi, en même temps blancs et noirs, hypocrites et tyranniques, disait-on. En outre, ils se peignaient le visage et s’oignaient avec de la couleur (5). Ainsi leur puissance fut ruinée et leur domination cessa de grandir (6). Voilà ce que firent Xhunahpu et Xbalanqué.

(5) Cet usage de se peindre le visage est demeuré en vigueur jusqu’au temps de la conquête parmi les Mayas d’Yucatan, qui paraissent avoir appartenu à la même race que les anciens maîtres de Xibalba.

(6) Mavi nim chi c’ahauarem x'uxic, non grande plus leur domination (ou empire) fut.

 

Are cut c’ogic ca ziquin ri c’atit chuvach ri ah ri x-qui tic canoc; x-pe û tux ri ah, qate x-chakih chic are cut ta x-e qat pa choh ta x-pe chicut u tux ri ah.

Qatecut x-qatonri c’atit,x-u qat ri pom chuvach ri ah, u natabal quech r’yi. Are x-quicot ri u qux c’atit ri chu camul x-pe u tux ri ah : ta x-qabauilax rumal c’atit, ta x-u binatizah cut Nicah-Ha, Nicah bi ch’oc.

Qazam-Ah, Chatam-Uleu u bi x-uxic; are cut x-u binaah-vi Nicah-Ha, Nicah bi ch’oc, rumal xa chu nica-hal upa c’ochoch x-qui tic ah : are chicu x-u binaah vi Chatam-Uleu, Qazam-Ah chuvi Chatam-Uleu qui tic-vi ah ; are naipu x-u binaah vi Qazam-Ah, rumal x-pe u tux ah ; ta x-çoh u bi rumal Xmucane x-qui tic canoc Hun-ahpu, Xbalanqué, xa natabal que rumal c’atit.

Arecuri nabe qui cahau x-oher-oc que cam-oc ri Hun-hun-Ahpu, Vukub-Hunahpu ; x-qu’il chicut u vach ri qui cahau chila chi Xibalba, x-chau chic qui cahau chi qu’e-tax, x-qui chak Xibalba.

Va cute u vikic chic qui cahau cumal are x-qui vik ri Vukub-Hunahpu : chila x-be qui vika vi chi Pucbal-Chah, xavixere u vach x-r’ah uxic. X-tzonox cut

 

Cependant leur aïeule gémissait et se lamentait devant les cannes qu’ils avaient laissé plantées : ces cannes avaient repoussé; ensuite elles s’étaient desséchées de nouveau; mais lorsqu’ils avaient (été) brûlés sur le bâcher, elles avaient reverdi encore une fois.

Après quoi leur aïeule ayant, allumé (le brasier), brûla du copal devant les cannes, en mémoire de ses petits-fils׳. Le cœur de leur aïeule se réjouie lorsque les cannes reverdirent pour la seconde fois : elles reçurent alors les honneurs divins de leur aïeule qui les nomma « le Centre de la Maison, et le Centre » elles furent appelées (1).

(1) Elles reçurent les honneurs divins, x-qabauilax, mot à mot : furent déifiées, de qabauil, dieu, d’où qa-bauilah, déifier, adorer, qabauilax, être déifié.

« Cannes-Vives, Terre-Aplanie, » devint le nom (du lieu); et le nom de « Centre de la Maison מ de « Centre » lui fut donné, parce qu’ils plantèrent leurs cannes au milieu de la salle de leur maison : et elle nomma (le lieu) « Terre-Aplanie, Cannes-Vives sur la terre aplanie » pour planter leurs cannes, qu’elle appela les a Cannes-Vives, » parce que les cannes reverdirent , et ce nom fut donné par Xmucané (à ces cannes), que laissèrent plantées Hunahpu et Xbalanqué, comme un souvenir d’eux à leur aïeule (2).

(2) Le lieu où ces choses se passèrent paraît avoir été Gumarcaah, capitale des Quichés; ce nom signifie Maison ou hutte de cannes vieillies. Les Mexicains appelaient cette ville Otlatlan, c’est-à-dire, entre les bambous. De là partit Xbalanqué pour aller à la conquête de l'Enfer, c’est-à-dire de Xibalba. (Torquemada, Monarq. Ind., lib. vi, cap. 26.)

Or leurs premiers pères, qui moururent anciennement, étaient Hunhun-Ahpu et Vukub-Hunahpu ; ils virent aussi · les faces de leurs pères là-bas en Xibalba; et leurs pères parlèrent avec leurs descendants (3), qui vainquirent Xibalba.

(3) X-chau chic qui cahau chi qu’etax, parlèrent aussi leurs pères à leurs signalés, c’est-à-dire à leurs descendants.

Or, voici comment leurs pères reçurent d’eux les honneurs funèbres (4) : et ce fut Vukub-Hunahpu, à qui ils furent rendus: on alla pour les solenniser au Cendrier, et

(4) Va cute u vikic chic qui cahau, voici donc les funérailles aussi de leurs pères.

 

chiri u bi, ronohel ט chi,· 11 tzam, ט bak, ט vach.

X-u riq nabe ט bi, xa cu zcaquin chic : x-cha-tah-vi xere, mavi x-u byih chi u bi ri u Hunahpuil u chixere pu x-cha־tah chivi. Quehecut ta x-qui nimah vi canah-oe u Qux qui cahau xavi x-canah chi Pucbal-Chah chiri.

Qu’yx ziquix-vi ch’uxic, x-e cha chi u qahol chirech, ta x־cubax u qux. Nabe ch’el yve, nabe naipueh qu’yx gihiloxic rumal zakil al, zakil qahol ! Mavi chi zachic y bi ! la ch’uxoc! Xe cha chirech qui cahau, ta x־qui cuba u qux. Xa oh pakol y camic, y zachic, qaxcol rail x-ban chyve.

Quehecut qui pixabic ri x-chakatahinak-oc ronohel Xibalba. Ta x-e akan c’uloc varale nicah zak, huzu cu x-e akan chi cah : hun eu gih,hun naipu iq chique, ta x-zakiric u pam cah, u vach uleu, chi cah x-e qohe vi.

Are cut ca ch’akanic ri omuch qaholab x-e cam rumal Zipacna, arecut c’achbil x־uxic e U-chiimilal cah x-e uxic.

 

pour cela même, on voulut faire sa figure (1). On y chercha donc son nom (2), sa bouche, son nez, ses os, sa face.

(1) Xavixere u vach x-r’ah uxic, cela-même sa figure on voulut se fit. Usage antique chez ces peuples qui, après avoir brûlé le mort, réunissaient ses cendres et en pétrissaient avec de Vulli, ou gomme élastique liquide, une statue, en lui mettant un masque qui représentait les traits du défunt; on enfermait cette statue dans une grande urne funéraire que l’on déposait ensuite dans le tombeau qui lui était destiné, avec des statuettes d’argile, dont la tête réduite avait été moulée sur le cadavre,

On arriva d’abord à son nom ; mais (on obtint) bien peu en plus : c’est là. tout ce qu’il voulut dire, ne consentant pas à prononcer avec son nom celui des Hunahpu (3), et c’est là seulement ce que sa bouche voulut dire. Or, voici comment ils exaltèrent la mémoire de leurs pères, qu’ils laissaient ainsi dans le Cendrier.

(3) Ce texte semble dire qu’on ne trouva que les cendres de Vukub-Hunahpu. Hunahpuil, pluriel dans les langues tzendale et maya, a un sens collectif, dans le quiché, signifiant l'ensemble des Hunahpu.

Soyez invoqués désormais, leur dirent leurs fils, pour consoler leurs âmes (4). Les premiers vous sortirez (sur la voûte du ciel); les premiers, également, vous serez adorés par les peuples civilisés ! et votre nom ne se perdra point; ainsi soit-il ! dirent-ils à leurs pères, pour consoler leurs mânes. Nous sommes les vengeurs de votre mort et de votre ruine,’ des souffrances et des travaux qu’on vous a fait endurer.

(4) Ta x-cubax u qux, afin que soit consolée (reposée) leur âme (leur cœur).

Tels furent leurs ordres en parlant à tout le peuple de Xibalba, qu’ils avaient vaincu. Alors ils montèrent par ici au milieu de la lumière, et aussitôt (leurs pères) montèrent aux cieux : à l’un échut le soleil, et à l’autre la lune, qui éclairent la voûte du ciel et la surface de la terre, et au ciel ils demeurent (5).

(5) C’est une véritable apothéose, comme on le voit. Serait-ce la même dont il est parlé dans les traditions mexicaines, celle· de Nanahuatl et de Metztli, et qui eut lieu à Teotihuacan. Ce qui vient à l’appui de cette hypothèse, ce sont les nombreux détails que donne dans sa partie héroïque le Codex-Chimalpopoca. Voir le corn men taire, § viii.

Alors s’élevèrent également les quatre cents jeunes gens qui avaient été mis à mort par Zipacna : or ils avaient été les compagnons (de Hunhun-Ahpu et de Vukub-Hunahpu), et ils devinrent des étoiles au ciel (6).

(6) Omuch-qaholab, les quatre cents jeunes gens, en mexicain Centzon-To-tochtin ou Quatre cents-Lapins, corn-pagnons de Hunhun-Ahpu, avaient péri pour sa cause, la cause toltèque, dont l'ère commence avec le signe I. Lapin, Ce-Tochtli.