CHAPITRE XV.
RÉGÉNÉRATION.
Le changement subjectif opéré dans l’âme par la grâce de Dieu est diversement désigné dans l’Écriture. C’est ce qu’on appelle une nouvelle naissance, une résurrection, une nouvelle vie, une nouvelle créature, un renouvellement de l’esprit, une mort au péché et une vie à la justice, une translation des ténèbres à la lumière, etc. En langage théologique, cela s’appelle régénération, rénovation, conversion. Ces termes sont souvent utilisés de manière interchangeable. Ils sont aussi parfois utilisés pour l’ensemble du processus de rénovation spirituelle ou la restauration de l’image de Dieu, et parfois pour une étape particulière de cette processus. C’est ainsi que Calvin donne au terme sa portée la plus large : « Uno vcrbo pœnitentiam interpreter regenerationem, cujus non alius est scopus nisi ut imago Dei, quæ per Adm transgressionem foedata et tantum non obliterata fuerat, in nobis reformetur ..... Atquc hæc quidem instauratio non uno niomcnto, vel die, vel anno impletur, sed per continues, imo etiam lentos interdum profectus abolet Deus in electis suis carnis corruptelas. » 1
1 Institutio, lib. in. cap. iii. 9, édit. Berlin, 1834, t. I, p. 389.
Pour les théologiens du XVIIe siècle, conversion et régénération étaient des termes synonymes. Dans les actes du synode de Dort, nous trouvons des expressions telles que « Status conversionis aut regencrationis » et « cffecta ad conversionem sivc regenerationem prmvia ». John Owen, dans son ouvrage sur le Saint-Esprit, suit le même usage. Le cinquième chapitre du troisième livre de cet ouvrage s’intitule : « La nature de la régénération », et l’un des titres de celui-ci est : « La conversion ne s’opère pas seulement par la persuasion morale. » « Si le Saint-Esprit, dit-il, n’agit pas autrement sur les hommes dans la régénération ou la conversion », alors ceci et cela s’ensuit. Turrettin, comme nous l’avons vu, fait la distinction entre ce qu’il appelle la « conversio habitualis » et la « conversio actualis ». Conversio habitualis sen passiva, fit per habituum supernaturalium infusionem a Spiritu Sancto. Actualis vero seu activa per bonorum istorum exercitium..... Per illam homo renovatur et convertitur a Deo.
Per istam homo a Deo renovatus et convertus convertit se ad Deuni, et actus agit. Illa melius regeneratio dicitur, quia se habet ad modum nova ! nativitatis, qua homo reformatur ad imag-iiiem Creatoris sui. Ista vero conversio, quia includit hominis ipsius operationeni. » 1 C’est clair et précis. Comme ces deux choses sont distinctes, elles doivent être désignées par des termes différents. Une grande confusion naît de cette ambiguïté des termes. Il faut répondre à la question de savoir si l’homme est actif ou passif dans la régénération, et si la régénération s’effectue par l’influence intermédiaire ou immédiate de l’Esprit, si la régénération comprend la conversion, et d’une autre si elle est prise dans son sens restreint. Dans la Bible, la distinction est généralement conservée ; μετάνοια , le repentir, le changement d’esprit, le recours à Dieu, c’est-à-dire la conversion, voilà ce que l’homme est appelé à faire ; ά»׳αγά׳1׳ψτι9, la régénération, est l’acte de Dieu. Dieu régénère ; L’âme est régénérée. Dans l’Église romaine, la justification consiste à rendre subjectivement juste, c’est-à-dire exempt de péché et intérieurement saint. Il en va de même pour la régénération. Il en va de même pour la sanctification. Ces termes, par conséquent, dans la théologie de cette église, sont constamment intervertis.
1 Locus XV. quæs. iv. 13, édit. Édimbourg, 1847, vol. II. à la p. 460.
Même chez les luthériens, dans l’Apologie de la Confession d’Augsbourg, la régénération est faite pour inclure la justification. C’est-à-dire qu’il est fait pour inclure tout le processus par lequel le pécheur est transféré d’un état de péché et de condamnation à un état de salut. Dans la « Forme de la Concorde », il est dit : « Vocabuluni regenerationis interdum in eo sensu accipitur, ut simul et remissionem peccatorum (qua ; duntaxat propter Christum contingit) et subsequentem renovationem complectatur, quam Spiritus Sanctus in illis, qui per fidem justificati sunt, operatur, quandoque etiam solan ! remissionem peccatorum, et adoptionem in filios Dei significat. Et in hoc posteriore lisu sæpe multumque id vocabu-him in Apologia Confessionis ponitur. Verbi gratia, cum dicitur : Justificatio est regeneratio..... Quin etiam vivificationis vocabuluni interdum ita accipitur, ut remissionem peccatorum notet. Cum enim homo per fidem (quam quidem solus Spiritus Sanctus operatur) justificatur, id ipsum révéra est quædam regeneratio, quia ex filio iræ fit filins Dei, et hoc modo e morte in vitam transfertur..... Deinde etiam regeneratio sæpe pro sanctificatione et renovatione (quæ fidei justificationem sequitur) usurpatur. In qua significatione D. Lutherus hac voce, turn in libro de ecclesia et conciliis, turn alibi etiam, multum usu est.» 1
1 hi. 19, 20, 21 ; Hase , Lîbrî Symbolici, 3e édit., p. 686.
Comme ce relâchement dans l’emploi des termes s’accompagnait inévitablement d’une grande confusion, la « forme » de Concord » lui-même, et les théologiens luthériens ultérieurs ont été plus précis. Ils distinction nette entre la justification et toute autre signifiant un changement subjectif chez le pécheur.
Dans l’Église primitive, la régénération s’exprimait souvent, non pas un changement moral intérieur, mais un changement extérieur d’état ou de relation. Chez les Juifs, lorsqu’un païen devenait un prosélyte de leur religion, on disait qu’il était né de nouveau. Le changement de son statut de l’extérieur à l’intérieur de la théocratie s’appelait la régénération. Cet usage passa dans une certaine mesure à l’Église chrétienne. Quand un homme devenait membre de l’Église, on disait qu’il naquait de nouveau ; et le baptême, qui était le rite de l’initiation, s’appelait régénération. Cet usage du mot n’a pas encore tout à fait disparu. On fait encore parfois une distinction entre la régénération et la rénovation spirituelle. L’un est externe, l’autre interne. Quelques-uns des partisans de la régénération baptismale font cette distinction et interprètent le langage des formules de l’Église d’Angleterre en conséquence. La régénération opérée par le baptême, selon eux, n’est pas un changement spirituel dans l’état de l’âme, mais simplement une naissance dans l’Église visible.
§ 2. Nature de la régénération.
Par un consentement presque universel, le mot régénération est maintenant utilisé pour désigner, et non pas toute l’œuvre de sanctification, ni les premières étapes de cette œuvre dans la conversion, encore moins la justification ou un simple changement d’état extérieur, mais le passage instantané de la mort spirituelle à la vie spirituelle. La régénération est donc une résurrection spirituelle ; le début d’une nouvelle vie. Parfois, la parole exprime l’acte de Dieu. Dieu régénère. Parfois, il désigne l’effet subjectif de son acte. Le pécheur est régénéré. Il devient une nouvelle créature. Il est né de nouveau. Et c’est là sa régénération. Ces deux applications du mot sont si liées qu’elles ne produisent pas de confusion. La nature de la régénération n’est pas expliquée dans la Bible plus loin que le récit qui y est donné de son auteur, Dieu, dans l’exercice de l’extrême grandeur de son pouvoir ; son sujet, l’âme tout entière ; et ses effets, la vie spirituelle, et tous les actes et états saints qui en découlent. Sa nature métaphysique reste un mystère. Ce n’est ni à la philosophie ni à la théologie de résoudre ce mystère. Il est cependant du devoir du théologien d’examiner les diverses théories concernant la nature de ce changement salvifique, et de rejeter toutes celles qui sont incompatibles avec la Parole de Dieu.
Ce n’est pas un changement dans la substance de l’âme.
La régénération ne consiste en aucun changement dans la substance de l’âme. Le seul défenseur de la doctrine opposée parmi les théologiens protestants était Flacius Illyricus, ainsi appelé du lieu de sa naissance. Il était l’un des théologiens luthériens les plus éminents de ce qu’on appelle la seconde Réforme en Allemagne. Il rendit un grand service à la cause de la vérité en résistant à la synergie de Mélancthon et aux concessions que cet éminent mais réformateur docile était disposé à faire aux papistes. Il a contribué à la justification de la foi protestante quelques-unes des œuvres les plus importantes de l’époque où il vivait. Son Catalogus testium veritatis, destiné à prouver que les doctrines de la Réforme avaient eu leurs témoins dans tous les temps ; ses Clavis Scripturæ Sacræ, et surtout le grand ouvrage historique Les Centuries de Magdebourg (en treize volumes, in-folio), dont il fut l’auteur et le principal auteur, attestent son savoir, ses talents et son infatigable travail. Son Un esprit fervent et intransigeant l’entraîna dans bien des difficultés et des chagrins. Il mourut épuisé par les souffrances et le travail, dit son biographe ; un de ces hommes de foi dont le monde n’était pas digne. Toujours extrême dans ses opinions, il soutenait que le péché originel était une corruption de la substance de l’âme, et la régénération un changement de cette substance tel qu’il lui rendait sa pureté normale. Tous ses amis qui s’étaient rangés de son côté dans sa controverse avec les synergistes et les partisans de l’intérim de Leipzig, l’abandonnèrent maintenant, et il resta seul. Dans la « Forme de la Concorde », adoptée pour régler toutes les controverses de l’époque, ces vues particulières de Flacius furent condamnées comme une renaissance virtuelle de l’hérésie manichéenne. On a insisté sur le fait que si la substance de l’âme est pécheresse, Dieu, par qui chaque âme individuelle est créée, doit être l’auteur du péché ; et que le Christ qui, en assumant notre nature, s’est fait consubstantiel à nous, doit participer au péché. Aucune Église chrétienne n’a assumé la responsabilité de la doctrine de Flacius, ou soutenu que la régénération implique un changement de l’essence de l’âme.
La régénération ne consiste pas en un acte de l’âme.
La régénération ne consiste en aucun acte ou aucun acte de l’âme. Le mot ici, bien sûr, ne doit pas être compris comme incluant la conversion, encore moins toute l’œuvre de sanctification, mais dans son sens restreint pour le commencement de la vie spirituelle. Le point de vue opposé, qui fait de la régénération, même dans son sens le plus étroit, un acte de l’âme, a été soutenu par des classes très différentes de théologiens. Elle est, bien sûr, impliquée dans la doctrine pélagienne qui nie le caractère moral à tout, sauf aux actes de la volonté. Si « tout péché est péché » et « tout amour d’amour », alors tout changement moral dans l’homme doit être un changement d’une forme d’activité volontaire à une autre. Comme les remontrants ultérieurs ont soutenu le principe en question, ils ont fait consister la régénération dans l’acte du pécheur lui-même de se tourner vers Dieu. L’influence qu’il exerçait sur lui était de celles auxquelles il pouvait céder ou résister. S’il cédait, c’était une décision volontaire, et c’est en cette décision que consistait sa régénération, ou le début de sa vie religieuse.
Le Dr Emmons, soutenant que tout péché et toute sainteté consistent dans des actes, lesquels actes, qu’ils soient pécheurs ou saints, sont immédiatement créés par Dieu, fait consister la régénération en ce que Dieu donne naissance au commencement d’une série d’actes saints. Dans son discours sur la régénération, la première proposition qu’il entreprend d’établir est que « l’Esprit de Dieu, dans la régénération, ne produit rien d’autre que l’amour ». Ceci est maintenu en opposition à ceux qui disent que l’Esprit produit une nouvelle nature, un nouveau principe, une nouvelle disposition ou un nouveau goût. « Ceux qui sont dans l’état de nature, dit-il, n’ont pas besoin d’avoir en eux un nouveau pouvoir, une nouvelle faculté, un nouveau principe d’action pour devenir saints. Ils sont tout aussi capables d’aimer que de haïr Dieu..... Cela est vrai de tous les pécheurs, qui sont autant des agents moraux et des sujets propres du gouvernement moral, avant qu’après la régénération. Toutes les fois donc que l’Esprit divin les renouvelle, les régénère ou les sanctifie, il n’a pas l’occasion de produire dans leur esprit autre chose que l’amour. 1 « L’amour que l’Esprit de Dieu produit dans la régénération est l’amour de la bienveillance, et non l’amour de la complaisance. »2 «Bien qu’il n’y ait pas de lien naturel ou nécessaire entre le premier exercice de l’amour et tous les exercices futurs de la grâce, il y a cependant un lien constitué qui rend les exercices futurs de la grâce aussi certains que s’ils découlaient d’une nouvelle nature ou d’un principe sacré, comme beaucoup le supposent.» 1 La première conclusion qu’il tire de la doctrine de son sermon est la suivante : « Si l’Esprit de Dieu ne produit rien d’autre que de l’amour dans la régénération, alors il n’y a pas de raison pour la distinction qui est souvent faite entre la régénération, la conversion et la sanctification. Ce sont, en nature et en espèces, précisément les mêmes fruits de l’Esprit. Dans la régénération, il produit de saints exercices ; dans la conversion, il produit de saints exercices ; et dans la sanctification. Il produit des exercices saints. 2 Deuxièmement, « Si l’Esprit de Dieu dans la régénération ne produit rien d’autre que l’amour, alors les hommes ne sont pas plus passifs dans la régénération que dans la conversion ou la sanctification. Ceux qui soutiennent que l’Esprit divin dans la régénération produit quelque chose d’antérieur à l’amour comme fondement de celui-ci, c’est-à-dire une nouvelle nature ou un nouveau principe de sainteté, soutiennent que les hommes sont passifs dans la résénération, mais actifs dans la conversion et la sanctification. Mais si ce qui a été dit dans ce discours est vrai, il n’y a pas de nouvelle nature, ni de principe d’action, produit dans la régénération, mais seulement l’amour, qui est l’activité même.» 3
1 Sermon 51 ; Œuvres, édit. Boston, 1842, vol. v, p. 112.
2 Idem. , p. 114.
1 Sermon 51 ; Œuvres, édit. Boston, 1842, vol. v, p. 116.
2 Idem. , p. 116.
3 Ibid., p. 117 et 118.
La doctrine du professeur Finney.
Le professeur Finney, dans ses Lectures on Systematic Theology, enseigne : 1° Que la satisfaction, le bonheur, la béatitude, est le seul bien absolu ; que la vertu n’est que relativement bonne, c’est-à-dire qu’elle tend à produire le bonheur. 2° Que toute vertu réside dans l’intention de favoriser le bonheur de l’être, c’est-à-dire de l’être universel. Il n’y a aucune vertu dans l’émotion, le sentiment ou aucun état de la sensibilité, car ceux-ci sont involontaires. L’amour pour Dieu n’est même pas de la complaisance dans son excellence, mais « lui vouloir du bien ». (3) Tout péché est égoïsme, ou le choix de notre propre bonheur de préférence au bien de l’être universel. (4) Tout agent moral est toujours « aussi pécheur ou saint qu’il peut l’être avec sa connaissance ». (5) « Comme la loi morale est la loi de la nature, il est absurde de supposer que l’entière obéissance à elle ne soit pas la condition immuable du salut. » 4 (6.) La régénération est un « changement instantané » de l’état de pécheur à la sainteté totale.» 5 Il s’agit d’un simple changement d’objectif.
4 Lectures on Systematic Theology, par Charles G. Finney, édit. Oberlin, Boston et New York, 1846, p. 364.
5 Idem. , p. 500.
Le système du professeur Finney est un produit remarquable d’une logique implacable. C’est un avertissement précieux. Il montre à quelles extrémités l’esprit humain peut être porté lorsqu’il est abandonné à sa propre direction. Il commence par certains axiomes, ou, comme il les appelle, des vérités de la raison, et il en tire des conclusions qui sont en effet des déductions logiques, mais qui choquent le sens moral, et ne prouvent rien d’autre que que ses prémisses sont fausses. Son principe fondamental est que la capacité limite l’obligation. Le libre arbitre est défini comme « le pouvoir de choisir, ou de refuser de choisir, en conformité avec l’obligation morale dans tous les cas ». 1 « La conscience de l’affirmation de la capacité de se conformer à une réquisition est une condition nécessaire de l’affirmation de l’obligation de se conformer à cette réquisition. » 2 « Parler de l’incapacité d’obéir à la loi morale, c’est dire de pures absurdités. » 3
1 Lectures on Systematic Theology, par Charles G. Finney, édit. Oberlin, Boston et New York, 1846, p. 2G.
2 Ibid., p. 33.
3 Idem. à la p. 4.
Mais il est reconnu que la capacité de l’homme est limitée aux actes de la volonté, de sorte que le caractère moral ne peut être fondé que sur de tels actes. Les actes de la volonté sont soit des choix, soit des volitions. « Par choix, on entend la sélection ou le choix d’une fin. Par volition, on entend les efforts exécutifs de la volonté d’assurer la fin visée.» 4 Nous ne sommes donc responsables que de nos choix dans le choix d’une fin ultime. « Il est généralement admis que l’obligation morale ne respecte strictement que l’intention ultime ou le choix d’une fin pour elle-même. » 5 « J’ai dit que l’obligation morale ne concerne que l’intention ultime. Je suis maintenant prêt à dire, encore plus loin, que c’est là une première vérité de la raison.» 6 « Le bien ne peut être fondé que sur la bonne volonté, et le mal que sur l’égoïsme..... Il est juste qu’il [pour un homme] ait l’intention d’être le plus grand bien d’être comme une fin. S’il fait cela honnêtement, il ne peut pas, en faisant cela, se tromper sur son devoir, car en faisant cela, il accomplit réellement tout le devoir.»7 Le caractère moral n’appartient qu’à l’intention ultime de l’esprit, ou au choix, en tant qu’il est séparé de la volonté.» 8
4 Idem. à la p. 44.
5 Idem. à la p. 26.
6 Idem. à la p. 36.
7 Ibid., p. 149.
8 Idem. , p. 157.
La fin à choisir est « le plus grand bien de l’être ». « Le bien peut être naturel ou moral. Le bien naturel est synonyme de précieux. Le bien moral est synonyme de vertu.» 9 Le bien moral n’est qu’un bien relatif. Elle répond à une exigence de notre être, et produit donc de la satisfaction. Cette satisfaction est le bien ultime de l’être.» 10 « J’en viens maintenant à énoncer le point sur lequel la question est abordée, à savoir : que la jouissance, la béatitude, ou la satisfaction mentale, est le seul bien ultime. » 11 « Quelle est la valeur du vrai, du droit, du juste, etc., en dehors du plaisir ou de la satisfaction mentale qui en résulte pour les existences sensibles ? »1
9 Idem. à la p. 45.
10 Idem. à la p. 48.
11 Idem. , p. 120.
1 Lectures on Systematic Theology, par Charles G. Finney, édit. Oberlin, Boston et New York, 1846, p. 122.
Il résulte de ces principes que les hommes accomplissent tout leur devoir, et qu’ils sont parfaits, s’ils ont l’intention d’être en général. Il n’y a pas de moralité dans les émotions, les sentiments ou les sentiments. Ce sont des états involontaires de la sensibilité, qui ne sont en eux-mêmes ni bons ni mauvais. S’il existe une action extérieure ou un état du sentiment en opposition à l’intention ou au choix de l’esprit, il ne peut en aucun cas avoir un caractère moral. Tout ce qui échappe au contrôle d’un agent moral, il ne peut en être responsable.» 2 «L’amour peut exister, et il existe souvent, comme chacun le sait, sous la forme d’un simple sentiment ou d’une simple émotion..... Cette émotion ou ce sentiment, comme nous le savons tous, est un état d’esprit purement involontaire. Parce qu’il s’agit d’un phénomène de la sensibilité, et bien sûr d’un état d’esprit passif, il n’a en lui-même aucun caractère moral.» 3 La gratitude, « en tant que simple sentiment ou phénomène de la sensibilité, [...] n’a pas de caractère moral.» 4 Il en est de même de la bienveillance, de la compassion, de la miséricorde, de la conscience, etc. La doctrine est la suivante : « Aucun état de la sensibilité n’a de caractère moral en lui-même. » 5 L’amour qui a une excellence morale, et qui est l’accomplissement de la loi, n’est pas un sentiment de complaisance, mais de " bonne volonté « , voulant le bien ou le bonheur de son objet. Si donc un homme, sous l’impulsion d’un sentiment bienveillant ou d’un sentiment de devoir, accomplissait une bonne action, il pécherait aussi réellement que si, sous l’impulsion de la malice ou de la cupidité, il accomplissait une mauvaise action. L’illustration est que payer une dette par un sentiment de justice est aussi méchant que de voler un cheval à l’acquisition. Un homme « peut être empêché [de commettre une injustice commerciale] par une conscience constitutionnelle ou phrénologique ou par un sens de la justice. Mais ce n’est là qu’un sentiment de la sensibilité, et s’il n’est retenu que par cela, il est tout aussi absolument égoïste que s’il avait volé un cheval pour obéir à l’avidité.» 6 «Si l’homme égoïste prêchait l’Évangile, ce ne serait que parce que, dans l’ensemble, il lui était le plus agréable ou le plus gratifiant, et pas du tout pour le bien d’être comme une fin. S’il devenait pirate, ce serait exactement pour la même raison..... Quel que soit le parti qu’il prend, il le fait précisément pour la même raison, et avec le même degré de lumière, il doit impliquer le même degré de culpabilité.» 7 Nourrir les pauvres par un sentiment de bienveillance, et assassiner un parent par un sentiment de malice, c’est le même degré de culpabilité ! Un tel sacrifice à la logique n’avait jamais été fait par aucun homme auparavant. Mais ce qui est encore plus merveilleux, si possible, c’est la déclaration qu’un homme peut « éprouver des sentiments profondément malveillants et vengeurs envers Dieu. Or, le péché ne consiste pas dans ces sentiments, et ne les implique pas nécessairement.» 1
2 Idem. , p. 164.
3 Idem. , p. 213.
4 Idem. , p. 278.
5 Idem. , p. 521.
6 J’aienchéri.p. 317 et 318.
7 Idem. , p. 355.
1 Lectures on Systematic Theology, par Charles G. Finney, Oberlin, Boston et New York, 1846, p. 296.
L’excellence morale n’est pas un objet d’amour. Dire que nous sommes tenus d’aimer Dieu parce qu’il est bon, est dit être « très absurde. Qu’est-ce qu’aimer Dieu ? Eh bien, comme on en convient, ce n’est pas pour exercer en Lui une simple émotion de complaisance. C’est Lui vouloir quelque chose.» 2 « Si l’on dit que la sainteté de Dieu est le fondement de notre obligation de l’aimer, je demande en quel sens cela peut l’être ? Quelle est la nature ou la forme de cet amour que sa vertu nous oblige à exercer ? Il ne peut s’agir d’une simple émotion de complaisance, car les émotions étant des états d’esprit involontaires et de simples phénomènes de la sensibilité, sont dépourvues de la législation et de la moralité» 3 « Nous avons l’obligation infinie d’aimer Dieu et de vouloir son bien de toutes nos forces, à cause de la valeur intrinsèque de son bien-être, qu’il soit saint ou pécheur. À condition qu’il soit saint, nous sommes dans l’obligation de vouloir sa béatitude réelle, mais nous sommes certainement dans l’obligation de le vouloir de tout notre cœur, de toute notre âme, de tout notre esprit et de toute notre force. Mais nous sommes tenus de le faire à cause de la valeur intrinsèque de sa béatitude, quel que soit son caractère.» 4 Certes, un tel système est un υπόδειγμα της αττε 0είαΐ.
2 Idem. à la p. 64.
3 à savoir. , p. 91.
4 Idem. , p. 99.
Le système du Dr Taylor, de New-Haven, s’accorde avec celui du professeur Finney en ce qu’il fait que le libre arbitre inclut le pouvoir plénier, qu’il limite la responsabilité et le caractère moral à des actes volontaires, qu’il considère le bonheur comme le bien principal, et qu’il fait en sorte que la régénération consiste en un changement de but. Les deux systèmes diffèrent cependant essentiellement quant au fondement de l’obligation morale ou à la nature de la vertu ; et quant à la nature de ce changement de but en quoi consiste la régénération. Le professeur Finney adopte la théorie eudémoniste commune qui fait du bonheur d’être , c’est-à-dire de l’univers, le bien principal, et par conséquent de la vertu consistent dans le dessein de promouvoir ce bonheur, et tout péché dans le dessein de chercher notre propre bonheur, au lieu du bonheur d’être ; par conséquent, la régénération est un changement de ce but ; c’est-à-dire qu’il s’agit d’un passage de l’égoïsme à la bienveillance.
Le Dr Taylor, d’autre part, a reconnu le fait que, comme le désir du bonheur est un élément constitutif de notre nature, ou loi de notre être, il doit être innocent et ne doit donc pas l’être confondu avec l’égoïsme. Il en a donc déduit que ce désir de bonheur est à juste titre le principe directeur de l’action chez toutes les créatures sensibles et raisonnables. Le péché consiste à chercher le bonheur dans la créature ; la sainteté dans la recherche du bonheur en Dieu ; La régénération est le but ou la décision d’un pécheur de chercher son bonheur en Dieu et non dans le monde. Ce changement de but, il l’appelle tantôt un « changement de cœur », tantôt « donner son cœur à Dieu », tantôt « aimer Dieu ». Comme la régénération est le choix de Dieu comme notre bien principal, c’est un acte intelligent et volontaire de l’âme, et par conséquent elle doit avoir lieu selon les lois établies de l’action mentale. Elle suppose les actes préliminaires de considération, d’appréciation et de comparaison. Le pécheur contemple Dieu comme une source de bonheur, estime qu’il convient aux nécessités de sa nature, le compare à d’autres objets de choix et décide de choisir Dieu comme sa part. Parfois, le mot régénération est utilisé dans un sens global, incluant l’ensemble du processus de considération et de décision ; parfois dans un sens restreint, pour la décision elle-même.
Telle étant la nature de la régénération, elle est bien sûr provoquée par l’influence de la vérité. La Bible révèle la nature de Dieu, sa capacité et sa volonté de rendre ses créatures heureuses ; il présente tous les motifs qui doivent déterminer l’âme à prendre Dieu pour sa part. La régénération étant un acte rationnel et volontaire, il est inconcevable qu’elle ait lieu si ce n’est en vue de considérations rationnelles. L’influence de l’Esprit dans ce processus n’est pas niée. Le fait est admis que toutes les considérations qui doivent déterminer le pécheur à choisir Dieu, demeureront sans effet salvateur, à moins que l’Esprit ne les rende efficaces.
Ces points de vue sont longuement présentés dans le " Christian Spectator " (une revue trimestrielle) de 1829. Sur la nature du changement en question, le Dr Taylor dit : « La régénération, considérée comme un changement moral dont l’homme est le sujet – donner le cœur à Dieu – faire un cœur nouveau – aimer Dieu suprêmement, etc., sont des termes et des expressions qui, dans l’usage populaire, dénotent un acte complexe. Ces mots, dans tous les discours et écrits ordinaires, sont utilisés pour désigner un acte, et pourtant cet acte unique comprend un processus d’actes mentaux, consistant en la perception et la comparaison des motifs, l’estimation de leur valeur relative, et le choix ou la volonté de l’action extérieure. « Quand nous parlerons des moyens de régénération, nous emploierons le mot régénération dans une signification plus limitée que son sens populaire ordinaire ; et il le bornera, principalement pour des raisons de phraséologie commode, à l’acte de la volonté ou du cœur, en distinction des autres actes mentaux qui s’y rattachent ; ou à cet acte de la volonté ou du cœur qui consiste dans la préférence de Dieu à tout autre objet ; ou à cette disposition du cœur, ou à l’affection ou au dessein de l’homme, qui le consacre au service et à la gloire de Dieu.» 1
1 Christian Spectator, vol. Î. New Haven, 1829, p. 16-19.
L’amour de soi, ou désir de bonheur, est la cause ou la raison première de tous les actes de préférence ou de choix qui fixent suprêmement sur un objet quelconque. Dans tout être moral qui forme un caractère moral, il doit y avoir un premier acte moral de préférence ou de choix. Cela doit respecter un seul objet, Dieu ou Mammon, comme le bien principal, ou comme un objet d’affection suprême. Or, d’où vient un tel choix ou une telle préférence ? Non pas d’un choix ou d’une préférence antérieur du même objet, car nous parlons du premier choix de l’objet. La réponse que donne la conscience humaine, c’est que l’être constitué d’une capacité de bonheur, désire être heureux ; et sachant qu’il est capable de tirer le bonheur de différents objets, considère d’où peut être le plus grand bonheur dérivés, et comme à cet égard il juge ou estime leur valeur relative, de même il choisit ou préfère l’un ou l’autre comme son bien principal. Bien que ce soit là le processus par lequel un être moral forme sa première préférence morale, le même processus est essentiellement indispensable à un changement de cette préférence. Le changement implique la préférence d’un nouvel objet comme bien principal ; une préférence que la première préférence n’a pas tendance à produire, mais une tendance directe à prévenir ; une préférence, donc, qui ne résulte pas d’une préférence antérieure d’un objet donné, ni qui en est occasionnée de quelque manière que ce soit, mais qui résulte de ces actes de considérer et de comparer les sources du bonheur, qui sont dictés par le désir du bonheur ou de l’amour de soi.» 2
2 Idem. p. 2L ״
La régénération étant un changement de but, le mode dans lequel elle est produite est ainsi expliqué. « Si l’homme sans la grâce divine est un agent moral, alors il est qualifié pour considérer, comparer et estimer les objets de choix comme des moyens de bonheur, et capable aussi d’une excitation constitutionnelle du bien et du mal qui lui est proposé, qu’il pourrait en résulter qu’il donne son cœur à Dieu, sans grâce..... L’acte de donner son cœur à Dieu doit se faire en parfaite conformité avec les lois du libre arbitre moral et de l’action volontaire. Si la grâce interposée viole ces lois, l’effet ne peut pas être l’action morale ; et il faut qu’il viole ces lois, s’il se dispense de la classe d’actes mentaux dont il s’agit maintenant. Par conséquent, quelle que soit l’influence qui assure un changement de cœur chez le plus sage, le changement lui-même est un changement moral et implique l’exercice de tous les pouvoirs et de toutes les capacités de l’agent moral, qui, dans la nature des choses, sont essentiels à un acte moral.» 1 À la page précédente, il avait été dit : « Les Écritures nous autorisent à affirmer, d’une manière générale, que le mode d’influence divine est compatible avec la nature morale de ce changement en tant qu’acte volontaire de l’homme ; et, aussi, que c’est par la vérité, et qu’elle implique l’attention à la vérité de la part de l’homme.» 2 « Celui qui a formé l’esprit de l’homme ne peut-il pas l’atteindre avec une influence de son Esprit, qui s’accordera avec toutes les lois de l’action volontaire et morale ? Parce que les motifs, sans l’intervention divine, n’assureront pas ce changement moral dans l’homme pécheur, et parce qu’ils n’ont pas d’efficacité positive dans sa production, Dieu doit-il, en le produisant, se passer complètement des motifs ? Les liens appropriés entre les motifs et les actes de volonté, ou entre l’exercice des affections et la perception de leurs objets, doivent-ils être dissous et n’avoir pas de place ? Dieu doit-il, si par sa grâce il amène les pécheurs à lui donner leur cœur dans le saint amour, accomplir le changement de telle manière qu’ils n’aient aucune perception ou vue préalable de l’objet de leur amour ; et ne savent pas ce qu’ils aiment, ni qui ils aiment, ni pourquoi ils l’aiment, plutôt que leurs anciennes idoles ? Une théologie conséquente limite-t-elle ainsi le Saint et l’oblige-t-elle à accomplir les impossibilités les plus réelles en transformant le caractère moral ? de l’homme pécheur ?» 3 C’est peut-être là un compte rendu exact du processus de conversion avec lequel ce système confond la régénération. La conversion est en effet un détournement volontaire de l’âme du péché vers Dieu. D’après la nature de l’affaire, elle est produite par des motifs appropriés, sinon elle ne serait ni rationnelle ni sainte. Mais cela ne prouve rien quant à la nature de la régénération. L’analyse la plus exacte des lois de la vision ne peut jeter aucune lumière sur la manière dont le Christ a ouvert les yeux des aveugles.
1 Christian Spectator, 1829, p. 223.
2 Ibid., p. 10. 17
3 Idem. , p. 489.
Il est clair que ces vues de la régénération ne sont que des théories philosophiques. Le Dr Emmons suppose que telle est la dépendance d’une créature vis-à-vis du créateur, qu’elle ne peut pas agir. Aucune créature ne peut être une cause. Il n’y a pas d’efficacité dans les causes secondes. Alors, bien sûr, la première cause doit produire tous les effets. Dieu crée tout, même les volitions. Dans l’âme, il n’y a que des actes ou des exercices. La régénération est donc un acte ou une volition créée par Dieu ; ou bien, c’est le nom donné au commencement d’une nouvelle série d’exercices qui sont saints au lieu d’être pécheurs.
Le professeur Finney suppose que la capacité plénière est essentielle à l’action morale ; qu’un homme, dans la mesure où sa vie intérieure est concerné, n’a de pouvoir que sur ses choix et ses volitions ; Par conséquent, tout ce dont il est responsable, tout ce qui constitue le caractère moral, doit tomber dans la catégorie du choix, le choix d’une fin ultime. En supposant, en outre, que le bonheur soit le seul bien absolu, tout péché consiste dans la poursuite indue de notre propre bonheur, et toute vertu dans la bienveillance ou dans le but de rechercher le bonheur de l’être. La régénération consiste donc dans le changement du dessein de chercher notre propre bonheur, dans le but de chercher comme fin ultime le bonheur de l’univers.
Le Dr Taylor, d’accord avec le professeur Finney sur la nature du libre arbitre et sur la doctrine que le bonheur est le bien principal, soutient avec lui que tout péché et toute sainteté consistent dans l’action volontaire. Mais en supposant que l’amour-propre, par opposition à l’égoïsme, est le motif de toute action morale rationnelle, il fait consister la régénération dans le choix de Dieu comme source de notre propre bonheur.
Toutes ces spéculations sont en dehors de la Bible. Ils n’ont pas d’autorité ou de valeur qu’ils ne tirent de leur vérité inhérente, et tout homme est libre de les contester, s’ils ne se recommandent pas à sa propre raison et à sa propre conscience. Mais outre le caractère purement philosophique de ces vues, il serait facile de montrer, non seulement qu’elles n’ont pas de fondement valable sur lequel s’appuyer, mais encore qu’elles sont incompatibles avec les enseignements de l’Écriture et avec l’expérience chrétienne authentique. C’est ce que nous tenterons lorsque nous examinerons le récit biblique de la régénération.
La régénération n’est pas un changement dans une faculté de l’âme.
La régénération ne consiste pas en un changement dans l’une quelconque des facultés de l’âme, qu’il s’agisse de la sensibilité, de la volonté ou de l’intellect. Selon certains théologiens, les sentiments, ou cœur, au sens restreint de ce mot, sont les excréments exclusifs du péché originel. En d’autres termes, la corruption héréditaire consiste dans l’aversion du cœur pour les choses divines et dans la préférence pour les choses du monde. Le but à atteindre dans la régénération est donc simplement de corriger cette aversion. L’intelligence, insiste-t-on, en ce qui concerne la vérité morale et religieuse, appréhende correctement et apprécie ce qui est aimé ; Et de la même manière, dans la même sphère, nous croyons ce que nous appréhendons comme juste et bon. Si donc les sentiments sont faits ce qu’ils doivent être, toutes les autres opérations de l’esprit, ou de l’homme intérieur, seront justes. Cette théorie est fondée en partie sur une vision erronée de la signification du mot « cœur » tel qu’il est utilisé dans les Écritures. Dans une multitude de cas, et dans tous les cas où l’on parle de régénération, il s’agit de l’âme entière ; c’est-à-dire qu’il comprend l’intellect, la volonté et la conscience aussi bien que les affections. C’est pourquoi la Bible parle des yeux, des pensées, des desseins, des desseins, aussi bien que des sentiments ou des affections du cœur. Par conséquent, dans le langage des Écritures, un « cœur nouveau » ne signifie pas simplement un nouvel état de sentiment, mais un changement radical dans l’état de toute l’âme ou de l’intérieur homme. D’ailleurs, cette théorie néglige ce que la Bible suppose constamment : l’unité de notre vie intérieure. Les Écritures ne considèrent pas l’intellect, la volonté et les affections comme des éléments indépendants et séparables d’un tout composite. Ces facultés ne sont que des formes différentes d’activité dans une seule et même subsistance. Il ne peut y avoir d’exercice des affections sans l’exercice de l’intellect et, si l’objet est moral ou religieux, sans y inclure un exercice correspondant de notre nature morale.
La régénération et pas seulement l’illumination.
Une autre théorie, tout aussi unilatérale, est que l’intellect seul est en faute, et que la régénération se résout en illumination. Ce point de vue est beaucoup plus plausible que le précédent. La Bible fait de la vie éternelle qu’elle consiste dans la connaissance ; le péché, c’est l’aveuglement, ou l’obscurité ; le passage d’un état de péché à un état de sainteté est une translation des ténèbres à la lumière ; On dit que les hommes sont renouvelés à la connaissance, c’est-à-dire que la connaissance est l’effet de la régénération ; on dit que la conversion s’effectue par la révélation du Christ ; le rejet de Lui comme Fils de Dieu et Sauveur des hommes se réfère au fait que les yeux de ceux qui ne croient pas sont aveuglés par le dieu de ce monde. Ces représentations bibliques prouvent beaucoup. Ils prouvent que la connaissance est essentielle à tous les saints exercices ; que la vérité, en tant qu’objet de la connaissance, est d’une importance vitale, et que l’erreur est toujours mauvaise et souvent fatale ; et que les effets de la régénération, dans la mesure où ils se révèlent dans notre conscience, consistent en grande partie dans l’appréhension spirituelle ou le discernement des choses divines. Ces représentations prouvent aussi que, dans l’ordre de la nature, la connaissance, ou discernement spirituel, est antérieure et causale relativement à tous les saints exercices des sentiments ou des affections. C’est l’appréhension spirituelle de la vérité qui éveille l’amour, la foi et les délices ; et non l’amour qui produit le discernement spirituel. C’est la vision que Paul a eue de la gloire divine de Christ qui a fait de lui instantanément et pour toujours son adorateur et son serviteur. Les Écritures, cependant, n’enseignent pas que la régénération consiste exclusivement dans l’illumination, ou que les facultés cognitives sont exclusivement le sujet de la puissance rénovatrice de l’Esprit. C’est l’âme en tant que telle qui est spirituellement morte ; et c’est à l’âme qu’un nouveau principe de vie qui contrôle tous ses exercices, qu’il s’agisse de l’intellect, de la sensibilité, de la conscience ou de la volonté, est communiqué.
Il y a un autre point de vue sur le sujet, qui relève de ce qu’on peut appeler la régénération partielle. Elle est fondée sur la trichotomie, c’est-à-dire sur l’assomption de trois éléments dans la constitution de l’homme, à savoir le corps, l’âme et l’esprit (le σώμα, le ι/׳υχ>7 et le 7r !׳eû/za) ; le premier matériel, le second animal, le troisième spirituel. C’est à la seconde, c’est-à-dire à l’âme ou ψυχή, que l’on rapporte ce que l’homme a de commun avec les animaux inférieurs : la vie, la sensibilité, la volonté et l’entendement, et à l’esprit ce qui nous est propre en tant qu’êtres raisonnables, moraux et religieux, c’est-à-dire la conscience et la raison. Ce troisià ̈me élémentaire, le 7r1׳€Û^a, ou raison, est souvent appelé divin ; tantôt au sens littéral, tantôt au sens figuré. Dans l’un et l’autre cas, selon la théorie considérée, il n’est pas le siège du péché et n’est pas corrompu par la chute. Elle reste, bien qu’obscurcie et pervertie par le désordre dans les départements inférieurs de notre nature, le point de contact et de connexion entre l’homme et Dieu. C’est au moins un point de vue sur la question. Selon un autre point de vue, ni le corps ni l’âme (ni σώμα ni <A(׳.X7), l1 en tant quecaractère y moral. Le squelette de la vie morale et divine est exclusivement le mw, ou l’esprit. On dit qu’il est paralysé par la chute. Il est mort au sens figuré ; insensible à l’impression des choses divines. Il y a autant de théories sur la nature de la régénération chez les partisans de cette triple division dans la constitution de l’homme, qu’il y a de systèmes d’anthropologie. L’idée commune Pour tous, ou pour la majorité d’entre eux, c’est que la régénération consiste à rétablir le πνεύμα ou esprit dans son influence normale de contrôle sur l’homme tout entier. Selon certains, il s’agit d’un processus naturel dans lequel un homme animal, c’est-à-dire un homme gouverné par le ψυχή, en vient à être raisonnable, ou pneumatique, c’est-à-dire gouverné par les 7׳״cfyza ou puissances supérieures de sa nature. Selon d’autres, il s’agit d’un effet surnaturel dû à l’action de l’Esprit divin (rbeîyxa) sur le πνιυμα ou esprit humain. Dans l’un et l’autre cas, cependant, le -ρευματικός, ou homme spirituel, n’est pas celui en qui le Saint-Esprit habite comme principe d’une vie nouvelle et spirituelle ; mais celui qui est gouverné par son propre πνεύμα ou esprit. Selon d’autres encore, le πνεύμα ou raison dans l’homme est Dieu, la conscience de Dieu, le Logos, et la régénération est l’ascendant graduellement acquis de cet élément divin de notre nature.
En ce qui concerne ces vues de la régénération, il suffit de remarquer (1) : Que la triple division de notre nature sur laquelle ils sont fondés est anti-scripturaire, comme nous avons déjà essayé de le prouver. (2) En admettant qu’il y ait un fondement à une telle distinction, elle n’est pas du genre de celles que supposent ces théories. L’âme et l’esprit ne sont pas des substances ou des essences distinctes, dont l’une peut être sainte et l’autre impie ou négative. Cela est incompatible avec l’unité de notre vie intérieure que les Écritures supposent constamment. (3) Il subvertit la doctrine scripturaire de la régénération et de la sanctification pour faire en sorte que le principe directeur dans le renouvelé soit leur propre πνεύμα ou esprit, et non le Saint-Esprit.
Vues spéculatives modernes sur ce sujet.
La philosophie spéculative moderne a introduit un changement si radical dans les vues qu’on se fait de la nature de Dieu, de ses rapports avec le monde, de la nature de l’homme et de ses rapports avec Dieu, de la personne et de l’œuvre de Christ, et de l’application de sa rédemption au salut des hommes, que tous les anciens, et, on peut le dire, les formes scripturaires de ces doctrines ont été remplacées, et d’autres ont été introduites qui sont inintelligibles sauf à la lumière de cette philosophie, et qui réduisent dans une large mesure les vérités de la Bible à la forme des dogmes philosophiques. Nous cessons d’entendre parler du Saint-Esprit comme de la troisième personne de la Trinité, appliquant aux hommes la rédemption racheté par le Christ ; de régénération par sa toute-puissance, ou de sa demeure dans le cœur des croyants. Les formes de cette nouvelle théologie sont très diversifiées. Ils sont peut-être tous compris sous trois classes : 1° ceux qui sont avoués panthéiste, bien qu’il se prétende chrétien ; deuxièmement, ceux qui sont théistes mais n’admettent pas la doctrine de la Trinité ; et troisièmement, ceux qui s’efforcent d’introduire la théologie en tant que philosophie dans les formes de la doctrine chrétienne. Dans tous les cas, cependant, l’anthropologie, la christologie, la sotériologie et l’ecclésiologie préconisées sont tellement modifiées qu’il est impossible de conserver dans leur exposition les termes et les formules avec lesquels l’Église a été familière dès le commencement. La régénération, la justification et la sanctification sont des termes presque désuets ; Et ce qui reste des vérités que ces termes étaient utilisés pour exprimer, se fond dans l’idée unique du développement d’une nouvelle vie divine dans l’âme. Quant à l’anthropologie, ces théologiens modernes spéculatifs, ou comme ils s’appellent souvent eux-mêmes, et sont appelés par d’autres, mystiques, enseignent (1). Qu’il n’y a pas de dualisme dans l’homme entre l’âme et le corps. Il n’y a qu’une seule vie. Le corps, c’est l’âme qui se projette extérieurement. Sans corps, il n’y a pas d’âme. (2) Qu’il n’y a pas de dualisme réel entre Dieu et l’homme. L’identité entre Dieu et l’homme est le dernier résultat de la spéculation moderne ; et c’est l’idée fondamentale du christianisme.
En ce qui concerne le premier de ces points, Schleiermacher1 dit : « Il n’y a pas de monde spirituel et corporel, d’existence corporelle et spirituelle de l’homme. De telles représentations ne mènent à rien d’autre qu’au mécanisme mort d’une harmonie préétablie. Le corps et l’esprit ne sont réels que l’un dans l’autre et l’un avec l’autre, de sorte que l’action corporelle et l’action spirituelle ne peuvent être distinguées que relativement. Le regretté président Rauch2 dit : « Un dualisme qui admet deux principes pour un seul être, offre beaucoup de difficultés, et la plus grande est qu’il ne peut pas dire comment les principes peuvent être unis en un troisième. Une rivière peut naître de deux sources, mais une science ne le peut pas, et encore moins la vie individuelle. « Il serait faux de dire que l’homme se compose de deux substances essentiellement différentes, celle de la terre et celle de l’âme ; mais il n’est que l’âme, et ne peut être autre chose. Cette âme, cependant, se déploie extérieurement dans la vie du corps, et intérieurement dans la vie de l’esprit. Ainsi Olshausen 3 enseigne que l’âme n’a de subsistance que dans le corps. Le Dr J. W. Nevin4 dit : « Nous n’avons pas le droit de penser au corps de quelque manière que ce soit comme une forme d’existence de et par lui-même, dans laquelle l’âme, en tant qu’autre forme d’une telle existence, est poussée d’une manière mécanique. Les deux forment une seule vie. L’âme, pour être complète, pour se développer en tant qu’âme, doit s’extérioriser, se jeter dans l’espace ; Et cette extériorisation, c’est le corps.
1 Di’tlekiik, sect. 290-235 ; llWs, Berlin. 1839, 3e div. vol. iv.part 2, pp. 245-255.
2 Psycholoyy, New York, 1840, p. 169, 173.
3 Commentaire, 1 Corinthiens xv. 20
4 Mystical Presence, édit. Philadelphie, 1846, p. 171.
Dieu et l’Homme ne font qu’un.
Quant au second point, ou l’unité de Dieu et de l’homme, de même que l’âme s’extériorise dans le corps, « se divisant seulement pour que son unité devienne ainsi plus libre et plus intensément complète »,1 de même Dieu s’extériorise lui-même dans le monde. Schleiermacher dit qu’il est vain d’essayer de concevoir Dieu comme existant avant ou hors du monde. On peut les distinguer en pensée, mais ce ne sont que « zwei Werthe für dieselbe Fördung, deux valeurs d’un même postulat ». Selon cette philosophie, il est tout aussi vrai : « Pas de monde, pas de Dieu » que « Pas de corps, pas d’âme ». Le monde,2 dans sa vision inférieure, n’est pas simplement le théâtre extérieur ou la scène sur laquelle l’homme doit jouer son rôle en tant que candidat au ciel. Au milieu de toutes ses différentes formes d’existence, elle est imprégnée de la puissance d’une vie unique, qui n’atteint finalement son sens et sa pleine force que dans la personne humaine. Le monde, par conséquent, est imprégné par « la puissance d’une seule vie » ; la forme la plus élevée de cette vie (sur terre) est l’homme. Qu’est-ce que c’est que cette vie ? Quel est ce principe pénétrant qui se révèle dans de si multiples formes d’existence et qui culmine dans l’homme ? C’est, bien sûr, Dieu. L’homme est donc, comme le dit Schleiermacher, « la forme d’existence » de Dieu sur la terre. 3 Ullmann 4 dit que les mystiques allemands du Moyen Âge enseignaient « l’unicité de la Divinité et l’humanité. Les résultats obtenus par les mystiques sous la direction du sentiment, dit-il, la philosophie moderne les a obtenus par la spéculation. Cette doctrine de l’unité essentielle de Dieu et de l’homme, les théologiens spéculatifs l’adoptent comme idée fondamentale du christianisme. Élaborer cette idée d’une manière compatible avec le théisme et l’Évangile, tel est le problème que ces théologiens ont tenté de résoudre. Ces tentatives ont abouti, dans certains cas, à un panthéisme chrétien avoué, comme on l’appelle ; dans d’autres, dans des formes de doctrine si proches du panthéisme qu’elles se distinguent à peine du panthéisme lui-même ; et en tout, dans une modification radicale, non seulement de la théologie de l’Église telle qu’elle s’exprime dans ses normes reçues, mais aussi de la forme scripturaire des doctrines chrétiennes, sinon de leur essence. C’est ce que l’on voit dans l’anthropologie de ce système, qui détruit la différence essentielle entre le créateur et ses créatures, entre Dieu et l’homme.
1 Présence mystique, édit. Philadelphie, 184G, p. 172.
2 Mercersburg Review, 1850, vol. II, p. 550.
3 Domer’s Christologie, 1re édit., Stuttgart, 1839, p. 488.
4 Charakter des Christenthums, Studien und Krttiken, 1845, erstes Heft, p. 59. Voir aussi une traduction de cet article au début de The Mystical Presence, par J. W. Nevin, D. I)., Philadelphie, 1846.
La christologie de cette théologie moderne a déjà été présentée dans ses traits essentiels. Il n’y a pas de dualisme en Christ entre l’âme et le corps. Les deux ne font qu’un. Il n’y a pas non plus de dualisme entre la divinité et l’humanité en Lui. Le divin et l’humain en sa personne ne font qu’un. En étant l’idéal ou l’homme parfait, Il est le vrai Dieu. La déification à laquelle l’humanité est parvenue dans le Christ n’est pas un acte surnaturel de la part de Dieu ; elle est atteinte par un processus de développement naturel dans son peuple, c’est-à-dire l’Église.
Sotériologie de ces philosophes.
La sotériologie de ce système est simple. L’âme se projette dans le corps. Ils sont une seule vie, mais le corps peut être trop pour l’âme. Le développement de cette vie unique sous sa double forme, intérieure et extérieure, peut ne pas être symétrique. Ainsi, l’humanité en tant que vie générique, une forme de la vie de Dieu, telle qu’elle est projetée à l’extérieur dans le monde à partir d’Adam, ne s’est pas développée correctement. S’il n’était pas aidé, il n’atteindrait pas le but, ou se déploient comme divins. Il faut donc lui donner un nouveau départ, un nouveau commencement. Cela se fait par une intervention surnaturelle qui aboutit à la production de la personne du Christ. En lui, la divinité prend la forme d’un homme, la forme d’existence de l’homme, Dieu devient homme, et l’homme est Dieu. Cette nouvelle l’entrée, pour ainsi dire, de Dieu dans le monde, cette forme particulière de divino-humain la vie, c’est le christianisme, qui est constamment déclaré être « une vie », « la vie de Christ », « une nouvelle vie théanthropique ». Les hommes deviennent chrétiens en participant à la cette vie. Ils deviennent participants de cette vie par l’union avec l’Église et la réception des sacrements. L’incarnation de Dieu se poursuit dans l’Église ; et ce nouveau principe de la « vie divine et humaine » descend du Christ jusqu’à la membres de son Église, aussi naturellement et autant par un processus d’organisation l’humanité, issue d’Adam, s’est déployée dans ses descendants. Christ nous sauve donc, non pas tant par ce qu’il a fait que par ce qu’il est. Il n’a donné aucune satisfaction à la justice divine ; pas d’expiation pour le péché ; Non l’application de la loi. Il n’y a donc vraiment aucune justification, aucune pardon même, dans le sens ordinaire du mot. Il y a une guérison de l’âme, et avec cette guérison, l’élimination des maux inhérents à la maladie. Ceux qui participants de ce nouveau principe de vie, qui est vraiment humain et vraiment divin, ne faites plus qu’un avec Christ. Tout le mérite, la justice, l’excellence et inhérents à cette « vie divino-humaine » appartiennent bien sûr à ceux qui participer à cette vie. Cette justice, cette excellence, etc., nous appartiennent. Ils sont subjectives en nous, et forment notre caractère, de même que la nature dérivée de Adam était à nous, avec toutes ses corruptions et ses infirmités.
Si l’on demandait ce qu’est la régénération selon ce système, la réponse correcte serait probablement qu’il s’agit d’un terme obsolète. Il n’y a pas de place pour la chose habituellement signifiée par le mot, et aucune raison de la retenir le mot lui-même. La régénération est une œuvre du Saint-Esprit. Mais ce système, dans son intégrité, ne reconnaît pas le Saint-Esprit comme une personne ou un agent distinct. Et ceux qui sont contraints de reconnaître sa personnalité sont évidemment embarrassés par cet aveu. Ce que les Écritures et l’Église attribuent à l’Esprit travaillant avec la liberté d’une agent, quand et où il le juge bon, ce système attribue à la « vie théanthropique » du Christ, agissant comme une force nouvelle, selon les lois naturelles du développement.1
1 Mystical Presence, édit. Philadelphie, 1846, pp. 225-229.
L’impression produite sur les lecteurs des théologiens modernes de cette école est celle que produit toute autre forme de dissertation philosophique. Il n’en a pas, et de par sa nature, il ne peut rien avoir de plus que l’autorité humaine. Ce système peut être adopté comme une question d’opinion, mais il ne peut pas être un objet de foi. Et par conséquent, il ne peut pas soutenir les espoirs d’une âme consciente de la culpabilité. En se tournant de ces écrits vers la Parole de Dieu, le passage que ces théologiens voudraient nous faire croire, est de γιώτις à πίστις ; mais pour la conscience du chrétien, c’est comme le passage de la confusion des langues à Babel, où personne ne comprenait son prochain, à l’expression symphonique de ceux « qui parlaient sous l’impulsion du Saint-Esprit ».
Parmi les écrivains qui appartiennent à la classe générale des théologiens « spéculatifs », certains adhèrent beaucoup plus étroitement aux Écritures que d’autres. Le Dr J. H. A. Ebrard, d’Erlangen, a déjà été mentionné à plusieurs reprises comme étant accro à la foi réformée ; et lorsqu’il s’en écarte consciemment, il considère qu’il ne fait qu’en appliquer les principes légitimes. Sa " Dogmatik " a, en fait, un caractère beaucoup plus scripturaire que la plupart des systèmes allemands modernes. Chez Ebrard, comme chez d’autres, nous trouvons un compromis entre la doctrine de l’Église sur la régénération et la théorie moderne de l’incarnation de Dieu dans la race humaine. Non seulement on fait une distinction entre le repentir, la conversion et la régénération ; mais aussi la vraie repentance et la conversion authentique sont faites pour précéder la régénération. Les deux premiers se déroulent dans la sphère de la conscience. Dans tous les états et tous les exercices qui se rattachent au repentir et à la conversion, l’âme est active et coopérative ; et la seule influence exercée par Dieu ou par son Esprit, est médiate et morale. Ce n’est que lorsque le pécheur a obéi au commandement de se repentir, de croire en Christ et de retourner à Dieu, que Dieu donne à l’âme ce quelque chose de divin qui fait d’elle une nouvelle créature et réalise son union organique vivante avec Christ. Dans ce dernier processus, l’âme est simplement passive. Dieu est le seul agent. Ce qu’on dit être communiqué à l’âme, c’est le Christ ; la personne du Christ ; la vie du Christ ; sa substance, ou une nouvelle substance. Une distinction est cependant faite entre l’essence et la substance. Ebrard insiste1 sur le fait que le germe le plus caché et le plus substantiel de notre être renaît dans la régénération – non seulement changé, mais nouveau-né. Néanmoins, il dit que l'« essentia animæ humanæ » n’est pas changée, et approuve la déclaration de Bucan : « Renovatio fit non quoad essentiam ut deliravit Illyricus, sed quoad qualitates inhærentes. » Ce qu’il affirme,2 souvent ailleurs, c’est que « le Christ, réel et substantiel, est né en nous ». Mais il ajoute que les mots « réel et substantiel » sont utilisés pour se prémunir contre la supposition que la régénération consiste simplement en un exercice intérieur ou un état transitoire de la conscience. C’est, comme il l’enseigne véritablement, beaucoup plus ; quelque chose d’inférieur à la conscience ; un changement dans l’état de l’âme, qui détermine les actes et les exercices qui se révèlent dans la conscience et se manifestent dans la vie. Il trouve sa doctrine de la régénération, non pas dans ce que Calvin et quelques théologiens réformés ont enseigné sous ce titre, mais dans ce qu’ils enseignent de la Cène du Seigneur et de l’union mystique. Calvin 3 dit : « Sunt qui mauducare Christi camera, et sanguinem ejus bibcre, uno verbo definiunt, nihil esse aliud, quam in Christum ipsum credere. Sed mihi expressius quiddam ac sublimius videtur voluisse docere Christus .... nempe vera sui partieipatione nos vivificari..... Quemadmodum enim non aspectus sed esus panis corpori alimentum sufficit, ita vere ac penitus participem Christi animam fieri convenit, ut ipsius virtute in vitam spiritualem vegetetur. « Nous avons ici certainement, dit Ebrard,1 la doctrine d’une communication secrète et mystique de la substance du Christ au centre substantiel de l’homme (l’anima), qui se développe d’une part dans la vie physique et de l’autre dans la vie noétique. » Ces auteurs ont raison de nier que la régénération est un simple changement dans les desseins, ou les sentiments, ou les états de conscience de quelque nature que ce soit chez l’homme ; et aussi en affirmant qu’elle implique la communication d’un principe de vie nouveau et durable à l’âme. Mais ils s’écartent de l’Écriture et de la foi de l’Église universelle en substituant au Saint-Esprit « la nature théanthropique du Christ », « sa vie divine et humaine », « l’humanité générique guérie et exaltée à la puissance d’une vie divine » (c’est-à-dire divinisée). Cette substitution est faite de manière avouée dans l’obéissance à la science moderne, à la nouvelle philosophie qui a découvert une véritable anthropologie et révélé « l’unité réelle de Dieu et de l’homme ». Comme nous l’avons déjà fait remarquer, il est supposait que cette communication de la « nature théanthropique du Christ » portait en elle ses mérites aussi bien que sa béatitude et sa puissance. Tout ce que nous avons de Christ, nous l’avons en nous. Et si nous pouvons découvrir peu de Dieu, et peu de divinité dans nos âmes, tant pis. C’est tout ce à quoi nous devons nous attendre, jusqu’à ce que notre vie intérieure soit plus développée. Le Christ à l’intérieur (comme l’enseignent aussi certains Amis) est, selon ce système, tout le Christ que nous avons. Ebrard, par conséquent, dans un point de vue, identifie la régénération et la justification. « La régénération,» dit-il,2 « en tant qu’acte du Christ, est la cause (causa efficiens) de la justification ; Il nous communique sa vie et éveille en nous une vie nouvelle. C’est la justification, un changement subjectif intérieur, qui implique le mérite aussi bien que la sainteté. Cette confusion entre l’œuvre du Saint-Esprit dans la régénération et l’acte judiciaire et objectif de la justification appartient au système. Du moins, ce n’est que sur la base de cette vie infusée que nous sommes déclarés justes aux yeux de Dieu. Ce que nous recevons, c’est « la vraie vie divine et humaine du Christ », et « tout ce qu’il peut y avoir de mérite, de vertu, d’efficacité ou de valeur morale de quelque manière que ce soit, dans l’œuvre de médiation du Christ, tout est logé dans la vie, par la seule puissance de laquelle cette œuvre a été accomplie, et en présence de laquelle elle seule peut avoir une réalité ou une stabilité. L’imagination que les mérites de la vie de Christ peuvent être séparés de sa vie elle-même, et transmis à son peuple sous cette forme abstraite, sur la base d’une constitution légale purement extérieure, est à la fois contraire aux Écritures et contraire à toute raison.» 1 La régénération consistant à communiquer à l’âme la vie du Christ, sa substance, et cette vie divino-humaine comprenant tout le mérite, la vertu ou l’efficacité qui appartiennent au Christ et à son œuvre, — la régénération implique la justification, dont elle est le fondement et la cause.
1 Dogmalik, édit. Ki’nigsberg, 1852, t. II, p. 320.
2 Idem. , p. 309.
3 Institutio, iv. xvii. 5, édit. Berlin, 1834, vol. II. p. 403·
1 Dogmatik, t. II, p. 310.
2 Idem. , p. 315.
1 Présence mystique, par J. W. Nevin, D. D., Philadelphie, 1846, p. 191.
Delitzsch consacre une section de sa " Psychologie biblique " au sujet de la régénération. Il commence la discussion par un discours sur la personne du Christ. « Quand nous voulons considérer le nouveau fifre spirituel de l’homme racheté, nous partons de l’archétype humain divin, la personne du Rédempteur. » 2 L’homme était, quant à son esprit et à son âme, constitué à l’origine à l’image de Dieu ; l’esprit était l’image « de sa nature trinitaire et celle-ci [l’âme] de sa « doxa » septuple. L’homme était libre de conformer sa vie à l’esprit, ou principe divin en lui, ou de permettre à l’âme d’assumer le contrôle de sa vie. La ruine totale fut la conséquence de la chute. Cela ne pouvait être corrigé et l’homme racheté que par « un nouveau commencement d’une intensité créatrice similaire ». 3 Ce nouveau commencement s’est opéré dans l’incarnation. Le Fils de Dieu s’est fait homme, non pas en assumant notre nature, dans le sens ordinaire de ces mots, mais en cessant d’être tout-puissant, omniscient et omniprésent, et en se contractant aux limites de l’humanité. C’est une vie humaine dans laquelle il est ainsi entré ; une vie comprenant un esprit, une âme et un corps. Il n’y a pas de dualisme dans la personne du Christ, entre le corporel et le spirituel, ou entre l’humain et le divin. C’est la nature divine sous la forme de l’humanité, ou cette nature divine-humaine, qui est purement et simplement, quoique parfaitement, humaine, qui est communiquée au peuple de Dieu dans sa régénération. À cette communion dans la vie du Christ, la foi est indispensable, et c’est pourquoi Ebrard dit que les enfants ne peuvent pas être les sujets de la régénération, tandis que Delitzsch, un luthérien, soutient que les enfants sont capables d’exercer la foi, et sont donc capables d’être régénérés. Ce qui est reçu du Christ, ou ce dont son peuple est rendu participant, c’est « l’Esprit, l’âme, le corps du Christ ». 1 L’homme nouveau, ou second Adam, a été fait un « esprit vivifiant », et subjugue peu à peu le vieil homme, ou notre nature adamique, et amène l’homme tout entier (τπείγια et σώμα), l’esprit , l’âme et le corps, au niveau de la vie du Christ, en qui le divin et l’humain se confondent en un seul, ou plutôt apparaissent dans leur vie. l’unité originelle.
2 A System of Biblical Psychology, par Franz Delitzsch, D. D., traduit par R. E. Wallis, Ph. D. ; édit. Édimbourg, 1867, p. 381.
3 Idem. , p. 382.
1 A System of Biblical Psychology, par Franz Delitzsch, D. D., traduit par R. E. Wallis, Ph. I). : édit. Edinburgh, 1897, p. 398.
La communication de la vie théanthropique à l’âme est un acte de l’Esprit divin dans lequel nous n’avons ni libre arbitre. conscience. Delitzsch déduit de ce que Notre-Seigneur a dit à Nicodème, Jean III. que « l’opération de l’Esprit de régénération est donc (1.) Un homme libre, soustrait au pouvoir de la volonté humaine, de l’action spéciale de l’homme. (2) Un mystérieux, qui se trouve au-delà de la conscience humaine, et qui ne peut être reconnu que par ses effets.» 2 « Il est propre à tous les agents créateurs de Dieu, que la créature qui est ainsi amenée à l’existence, ou dans laquelle ceci ou cela est amené à l’existence, n’a aucune conscience de ce qui se passe. » 3
2 Idem. , p. 402.
3 Idem. , p. 403.
Quelles que soient les modifications de cette doctrine, telles qu’elles ont été présentées par les différents auteurs de cette école générale, la régénération est comprise par tous comme la communication de la vie du Christ à l’âme. Par la vie du Christ, on entend sa virilité, sa nature humaine, qui était en même temps divine, et donc théanthrope. On peut l’appeler humaine, et on peut l’appeler divine, car bien qu’elle soit une, une vie, elle est vraiment divine parce qu’elle est parfaitement humaine. Nous participons tous à l’humanité polluée et dégradée par l’apostasie d’Adam. Le Christ, ou plutôt le Fils éternel de Dieu, a assumé la nature humaine, en ce sens qu’il s’est fait homme, et qu’étant Dieu, l’humanité en lui a été remplie des trésors de la sagesse, de la connaissance, de la grâce et de la puissance ; de ce l’humanité, nous devons y participer afin d’avoir une part quelconque au salut du Christ. La communication de cette vie à nous, qui est notre régénération, est par l’Église, qui est son corps, parce qu’animée par sa vie humaine. De même que nous tirons notre humanité détériorée de la descendance d’Adam, nous sommes rendus participants de cette humanité divine rénovée par l’union avec l’Église, dans laquelle le Christ en tant qu’homme, et Dieu-homme, vit et habite. Et comme la communication de l’humanité telle qu’elle existait dans l’Adam déchu à ses descendants se fait par un processus naturel de développement organique ; de sorte que la communication de l’humanité rénovée telle qu’elle existe dans le Christ, à son peuple et à travers le monde, est aussi un processus naturel. Elle ne suppose aucune interférence ou intervention particulière de la part de Dieu, pas plus que tout autre développement organique dans le monde végétal ou animal. La seule chose surnaturelle à ce sujet est le point de départ en Christ.
Dans l’Église latine ultérieure, le mot régénération est utilisé comme synonyme de justification, et est pris dans un sens large comme englobant tout ce qui est impliqué dans la translation de l’âme du royaume des ténèbres dans le royaume du Fils bien-aimé de Dieu. Dans la régénération, le pécheur devient un enfant de Dieu. Il est donc fait pour inclure, (1.) L’élimination du « reatus » ou culpabilité du péché. (2) La purification de la corruption morale inhérente. (3) L'« infusion de nouvelles habitudes de grâce » ; et (4.) Adoption ou la reconnaissance de ceux qui ont été renouvelés comme fils de Dieu. Le Concile de Trente dit 1 : « Justificatio... non est sola peccatorum remissio, sed et sanctificatio, et renovatio interioris hominis per voluntariam susceptionem gratiæ, et donorum, unde homo ex injusto fit justus, et ex inimico amicus, ut sit heres secundum spem vitæ æternæ. » La cause instrumentale de la justification, en ce sens, est déclarée « sacramentum baptism !, quod est sacramentum fidei, sine qua null ! umquam contigit justificatio. Quant à l’effet du baptême, il est enseigné2 qu’il enlève non seulement la culpabilité, mais tout ce qui est de la nature du péché, et qu’il communique une vie nouvelle. « Si quis per Jesu Christi Domini gratiam ; qme in baptismate confertur, reatuin originalis peccati remitti uegat, aut etiam Affirmez, non péage ! totum. id, quod veram, et propriam peccati rationem habet ; sed illud dicit tantum radi, aut non imputari : anathema sit. In renatis enim nihil odit Deus, quia nihil est damnationis iis qui vere consepulti sunt cum Christo per baptisma in mortem : qui non secundum carnem ambulant, sed veterem hoininein exuentes, et novum, qui secundum Deum creatus est, incluentes, innocentes, immaculati. puri, innoxii, ac Deo dilecti effet ! Sunt!! érode quidem Dei, coheredcs autem Christi, ita ut nihil prorsus eos ab ingressu cœli remoretur. » 3
1 Sessio vi. cap. 7. Le
2 Idem. v. 5.
3 Streitwolf, Libri Symbolici, Göttingen, 184G, p. 24, 25, 19.
La régénération, telle qu’elle s’effectue dans le baptême, est donc l’élimination de la culpabilité et de la pollution du péché, l’infusion de nouvelles habitudes de grâce et l’introduction dans la famille de Dieu. C’est dans le baptême que tous les bienfaits de la rédemption de Christ sont transmis à l’âme, et c’est sa régénération ou sa naissance dans le royaume de Dieu.
Doctrine de l’Église d’Angleterre.
1. Il y a toujours eu dans l’Église anglaise une classe de théologiens qui tiennent la théologie de l’Église de Rome dans ses caractéristiques principales. Ils acceptent donc la définition de la régénération, ou de la justification, comme ils l’appellent, telle qu’elle a été donnée par le Concile de Trente, et citée ci-dessus.
2. D’autres font une distinction entre la conversion et la régénération. Celle-ci est la grâce qui accompagne le baptême, et comme ce sacrement sans sacrilège ne peut être répété, de même la régénération ne peut être expérimentée qu’une seule fois. La conversion est « un changement de cœur et de vie du péché à la sainteté ». « Pour les païens et les infidèles, la conversion est absolument et toujours nécessaire au salut. » Pour le chrétien baptisé, la conversion n’est pas toujours nécessaire. Certaines personnes ont confondu conversion et régénération, et ont enseigné que tous les hommes, les baptisés, et donc en fait régénérés, doivent être régénérés par la suite, sinon ils ne peuvent pas être sauvés. Or, cela est faux à bien des égards : car la régénération, que le Seigneur Jésus-Christ lui-même a liée au saint baptême, ne peut pas être répétée : de plus, tous les hommes (bien que la plupart des hommes le fassent) ne tombent pas dans un tel péché après le baptême, que la conversion, ou comme ils l’appellent, la régénération, soit nécessaire à leur salut ; et si une régénération leur était nécessaire, elle ne pouvait être obtenue que par la répétition du baptême, qui était un acte de sacrilège. « Ceux qui s’opposent à l’expression régénération baptismale, entendent par régénération, pour la plupart, le premier afflux de la grâce irrésistible et indéfectible ; grâce qui ne peut être repoussée par son sujet, et qui doit jaillir dans son salut final. Or, de cette grâce, notre Église ne sait rien, et par conséquent, bien sûr, elle ne veut pas dire par la régénération au baptême, le premier afflux d’une telle grâce. Que les péchés, originels et actuels, du fidèle destinataire du baptême, soient lavés, elle le croit en effet ; et aussi que la grâce lui est donnée par l’intermédiaire immédiat du Saint-Esprit ; mais afin que la conscience ainsi purifiée soit de nouveau souillée, et que le baptisé puisse, et il le fait souvent, par sa propre faute, retomber dans le péché, dans lequel s’il meurt, il périra sans doute éternellement ; sa condamnation n’étant pas évitée, mais plutôt augmentée, par son privilège baptismal.»1
1 A Church Dictionary, par Walter Farquhar Hook, D. D., vicaire de Leeds, article « Conversion » ; 6e édition, Philadelphie, 1854.
3. Une troisième forme de doctrine sur ce sujet, soutenue par certains théologiens de cette église, est que la régénération exprime proprement un changement externe de relation, et non un changement intérieur de l’état de l’âme et de sa relation avec Dieu. De même qu’un prosélyte a été régénéré lorsqu’il s’est déclaré juif, de même tout celui qui est initié à l’Église visible est ainsi régénéré. Ceci est considéré comme entièrement différent de la rénovation spirituelle. La régénération, dans ce sens extérieur, est admise par le baptême ; la rénovation se fait par l’Esprit.
4. Une classe nombreuse de théologiens anglais est toujours restée fidèle à la doctrine évangélique sur ce sujet, conformément aux vues des réformateurs de leur Église, qui étaient en pleine sympathie à la fois dans la doctrine et dans la communion ecclésiastique et chrétienne avec les autres Églises protestantes.
Dans les Symboles luthériens, la doctrine de la régénération, qui inclut la conversion, est ainsi énoncée : « Conversio hominis talis est immutatio, per operationem Spiritus Sancti, in hominis intellectu, voluntate et corde, qua homo (operatione videlicet Spiritus Sancti) potest oblatam gratiam apprehendere. » 2
2 Forme de la concorde, 11. 83.
Hominis autem nondum renati intellectus et voluntas tantum sunt subjectum convertendum, sunt enim hominis spiritualiter mortui intellectus et voluntas, in quo homine Spiritus Sanctus conversionem ct renovationem operator, ad quod opus hominis convertendi voluntas nihil confert, sed patitur, ut Deus in ipsa operetur, donee regeneretur. Postea vero in aliis sequentibus bonis operibus Spiritui Sancto cooperatur, ea faciens, quæ Deo grata sunt. » 3
3 Idem. 91.
« Sicut igitnr homo, qui corporal !ter mortuus est, scipsum propriis viribus præparare ant accommodare non potest, ut vitam externam recipiat : ita homo spiritualiter in peccatis mortuus, seipsum propriis viribus ad consequendam spiritualem et cœlestem justitiam et vitam præparare, applicare, aut vertere non potest, nisi per Filium Dei a morte peccati liberetur et vivificctur.» 4
4 Idem. 11.
« Rejicimus errorcm eorum qui fingunt, Dcum in conversione et regeneratione hominis substantiam et essential !! veteris Adami, ct præcipue animam rationalem penitus abolere, novamque animae essentiam ex nihilo, in ilia conversione et regeneratione creare. »1
1 Ibid., p. 14 ; Hase, Libri Symbolici, 3e édit. Leipzig, 181G, pp. 679, 681, 658 et 581.
Les doctrines enseignées dans les Symboles et par les théologiens des Églises réformées s’accordent parfaitement avec ces déclarations. Il suffit de citer les normes de notre propre Église. La « Confession de Westminster » dit : « L’homme, en tombant dans un état de péché, a entièrement perdu toute capacité de volonté pour tout bien spirituel accompagnant le salut ; de même qu’un homme naturel, répugnant tout à fait à ce qui est bon, et mort dans le péché, n’est pas capable, par ses propres forces, de se convertir ou de s’y préparer. « Quand Dieu convertit un pécheur et le convertit à l’état de grâce, il le libère de son esclavage naturel sous le péché, et par sa seule grâce il lui permet de vouloir librement et de faire ce qui est spirituellement bon. » « Tous ceux que Dieu a prédestinés à la vie, et ceux-là seuls. Il lui plaît, en son temps fixé et accepté, d’appeler effectivement, par sa Parole et son Esprit, de cet état de péché et de mort dans lequel ils sont par nature, à la grâce et au salut par Jésus-Christ ; éclairant leurs esprits, spirituellement et salvateur, pour qu’ils comprennent les choses de Dieu, leur enlevant un cœur de pierre, et leur donnant un cœur de chair ; renouvelant leur volonté, et, par sa toute-puissance, les déterminant à ce qui est bon, et les attirant efficacement à Jésus-Christ ; mais de la même manière qu’ils viennent le plus librement, étant rendus disposés par sa race. « Cet appel efficace provient de la grâce gratuite et spéciale de Dieu seule, et non de quelque chose de prévu dans l’homme, qui y est tout à fait passif, jusqu’à ce qu’il soit vivifié et renouvelé par le Saint-Esprit, il soit ainsi rendu capable de répondre à cet appel et d’embrasser la grâce offerte et transmise en lui. » 2
2 ix. 3, 4; x. 1 et 2.
Le Grand Catéchisme3 dit : « Qu’est-ce qu’un appel efficace ? L’appel efficace est l’œuvre de la toute-puissance et de la grâce de Dieu, par laquelle (par amour gratuit et spécial pour ses élus, et à partir de rien en eux qui ne l’y pousse) il les invite et ne les attire à Jésus-Christ par sa Parole et son Esprit ; éclairant leurs esprits, renouvelant et puissamment déterminant leurs volontés, de sorte qu’ils (bien qu’ils soient morts en eux-mêmes dans le péché) sont par la présente rendus disposés et capables de répondre librement à son appel, et d’accepter et d’embrasser la grâce qui y est offerte et transmise.
3 Question n° 67.
Selon la doctrine commune des protestants, c’est-à-dire des luthériens et des réformés, ainsi qu’il ressort des citations ci-dessus :
La régénération est un acte de Dieu.
1. La régénération est un acte de Dieu. Il n’est pas simplement désigné comme son donateur et, en ce sens, son auteur, car il est le donneur de la foi et de la repentance. Ce n’est pas un acte que, par l’argument et la persuasion, ou par la force morale, il induit au pécheur à exécuter. Mais c’est un acte dont il est l’agent. C’est Dieu qui régénère. L’âme est régénérée. En ce sens, l’âme est passive dans la régénération, qui (considérée subjectivement) est un changement opéré en nous, et non un acte accompli par nous.
La régénération est un acte de la puissance de Dieu.
2. La régénération n’est pas seulement un acte de Dieu, mais aussi un acte de sa toute-puissance. Conformément aux déclarations expresses des Écritures, il est ainsi présenté dans les Symboles des Églises protestantes. S’il s’agit d’un acte de toute-puissance, il est certainement efficace, car rien ne peut résister à la toute-puissance. Les luthériens le nient en effet. Mais les plus orthodoxes d’entre eux signifient simplement que le pécheur peut se tenir à l’écart des moyens par lesquels, ou plutôt, en relation avec lesquels il plaît à Dieu d’exercer son pouvoir. Il peut s’absenter de la prédication de la Parole et de l’usage des sacrements. Ou bien il peut se placer volontairement dans une posture intérieure de résistance telle qu’elle détermine Dieu à ne pas exercer sa puissance dans sa régénération. L’affirmation que la régénération est un acte de la toute-puissance de Dieu, est, et est nié qu’il s’agit d’un acte de persuasion morale. C’est une affirmation qu’elle est « physique » dans l’ancien sens du mot, par opposition à morale ; et qu’elle est immédiate, par opposition à la médiation, ou par ou par la vérité. Quand, soit dans l’Écriture, soit dans les écrits théologiques, le mot régénération est pris dans un sens large comme incluant la conversion ou le retour volontaire de l’âme à Dieu, alors en effet il est dit que c’est par la Parole. Le rétablissement de la vue aux aveugles, par l’ordre du Christ, était un acte de toute-puissance. Ça a été immédiat. Rien ne gêne d’influence coopérative instrumentale ou secondaire s’interposait entre la volonté divine et l’effet. Mais tous les exercices de la faculté restaurée se faisaient à travers et par la lumière. Et sans lumière, la vue est impossible. Ressusciter Lazare d’entre les morts était un acte de toute-puissance. Rien n’intervenait entre le vouloir et l’effet. L’acte de vivification était l’acte de Dieu. Dans cette affaire, Lazare était passif. Mais dans tous les actes de la vitalité restaurée, il était actif et libre. Selon le système évangélique, c’est en ce sens que la régénération est l’acte de la toute-puissance de Dieu. Rien ne s’interpose entre sa volonté que l’âme, spirituellement morte, vive, et l’effet désiré. Mais dans tout ce qui appartient à la conscience ; Tout ce qui précède ou suit la transmission de cette nouvelle vie, l’âme est active et est influencée par la vérité agissant selon les lois de notre constitution mentale.
La régénération au sens subjectif du mot n’est pas un Acte.
3. La régénération, considérée subjectivement, ou considérée comme un effet ou un changement opéré dans l’âme, n’est pas un acte. Ce n’est pas un nouveau dessein créé par Dieu (si ce langage est intelligible), ou formé par le pécheur sous son influence. Il ne s’agit pas non plus d’un exercice conscient d’aucune sorte. C’est quelque chose qui se situe au-dessous de conscience.
Il ne s’agit pas d’un changement de fond.
4. Il ne s’agit pas, cependant, selon la doctrine de l’Église, d’un changement dans la substance de l’âme. Ceci est rejeté universellement comme manichéisme, et comme incompatible avec la nature du péché et de la sainteté. On suppose, en effet, qu’il n’y a dans l’âme que sa substance et ses actes ; Et par conséquent, si la régénération n’est pas un changement dans les actes, elle doit être un changement de la substance de l’âme. Cette hypothèse, cependant, n’est pas seulement arbitraire, mais elle s’oppose aussi aux convictions intimes de tous les hommes. C’est-à-dire de tous les hommes dans leur état normal, quand ils ne spéculent pas ou ne théorisent pas. Que tel soit le jugement commun des hommes, cela a déjà été prouvé sous les chefs de la justice originelle et du péché originel. Tout le monde reconnaît, en premier lieu, que des principes constitutionnels tels que l’amour parental, les affections sociales, le sentiment de la justice, la pitié, etc., sont des états immanents de l’âme qui ne peuvent être résolus ni dans son essence ni dans ses actes. De même, les habitudes acquises sont des états permanents et immanents semblables qui ne sont pas des actes, encore moins des modifications ou des changements d’essence. Il en est de même des tempéraments, aimables et peu aimables. Le raffinement du goût et du sentiment dû à l’éducation et à la culture n’est pas un changement dans l’essence de l’esprit. On ne peut raisonnablement nier qu’un état d’esprit produit par la culture puisse être produit par la volonté de Dieu. Ce qui est vrai dans tous les autres domaines de notre vie intérieure est vrai dans notre nature morale et religieuse. Outre les actes et les états qui se révèlent dans la conscience, il y a des états permanents, des dispositions, des principes ou des habitudes, comme on les appelle indifféremment, qui constituent le caractère et lui donnent de la stabilité, et sont la cause immédiate et déterminante pour laquelle nos exercices volontaires et nos états de conscience sont ce qu’ils sont. C’est ce que la Bible appelle le cœur, qui a le même rapport avec tous nos actes que la nature d’un arbre, bon ou mauvais, a au caractère de son fruit. Un bon arbre est connu pour être bon si ses fruits sont bons. Mais ce n’est pas la bonté du fruit qui constitue ou détermine la bonté de l’arbre, mais l’inverse. De la même manière, ce ne sont pas les bonnes actions qui rendent l’homme bon ; La bonté de l’homme détermine le caractère de ses actes.
5. Tout en niant que la régénération soit un changement dans l’essence ou dans les actes de l’âme, les chrétiens évangéliques déclarent qu’elle est, dans le langage de l’Écriture, « une vivification », une ^ωοττο !. ׳״, une communication d’un nouveau principe de vie. Il est difficile, voire impossible, de définir ce qu’est la vie. Pourtant, chaque homme est familier avec ses manifestations. Il voit et connaît la différence entre la mort et la vie, entre une plante ou un animal mort et vivant. C’est pourquoi, lorsque la Bible nous dit que, dans la régénération, Dieu donne une nouvelle forme de vie à l’âme, le langage est aussi intelligible que le langage humain peut l’être par rapport à un tel sujet. Nous savons que lorsqu’un homme est mort quant au corps, il ne voit pas, ne sent pas et n’agit plus. Les objets adaptés pour impressionner les sens des vivants ne font aucune impression sur lui. Ils n’éveillent aucun sentiment correspondant et n’appellent aucune activité. Les morts sont insensibles et impuissants. Quand les Écritures déclarent que les hommes sont spirituellement morts, elles ne leur refusent pas la vie physique, intellectuelle, sociale ou morale. Ils admettent que les objets des sens, les vérités de la raison, nos rapports sociaux et nos obligations morales, sont plus ou moins bien appréhendés ; Ceux-ci ne manquent pas d’éveiller le sentiment et d’exciter à l’action. Mais il y a une classe d’objets plus élevée que ceux-ci, ce que la Bible appelle « les choses de Dieu », « les choses de l’Esprit », « les choses qui se rapportent au salut ». Ces choses, bien qu’elles soient intellectuellement appréhendées telles qu’elles sont présentées à nos facultés cognitives, ne sont pas discernées spirituellement par l’homme non renouvelé. Un bel objet dans la nature ou dans l’art peut être dûment appréhendé comme un objet de vision par un homme inculte, qui n’a aucune perception de son excellence esthétique, et aucun sentiment correspondant de plaisir dans sa contemplation. Ainsi en est-il de l’homme non renouvelé. Il peut avoir une connaissance intellectuelle des faits et les doctrines de la Bible, mais aucun discernement spirituel de leur excellence, et aucun plaisir à les posséder. Le même Christ, tel qu’il est dépeint dans les Écritures, est pour un seul homme sans forme ni beauté que nous devrions le désirer ; pour un autre, il est le chef entre dix mille et celui qui est tout à fait charmant ; « Dieu manifesté dans la chair », qu’il est impossible de ne pas adorer, aimer et obéir.
Cette vie nouvelle se manifeste donc par de nouvelles vues de Dieu, de Christ, du péché, de la sainteté, du monde, de l’Évangile et de la vie à venir ; en un mot, de toutes ces vérités que Dieu a révélées comme nécessaires au salut. Cette illumination spirituelle est si importante et si nécessaire et un effet si immédiat de la régénération, que la connaissance spirituelle n’est pas seulement représentée dans la Bible comme la fin de la régénération (Col. iii. 10 ; 1 Tim. II. 4), mais toute la conversion (qui est l’effet de la régénération) se résume dans la connaissance. Paul décrit son la conversion comme consistant en ce que le Christ lui est révélé (Gal. i. 16) ; et les Écritures font de toute religion, et même de la vie éternelle, une forme de connaissance. Paul a renoncé à tout pour l’excellence de la connaissance de Christ (Phil., III, 8), et Notre-Seigneur dit que la connaissance de lui-même et du Père est la vie éternelle. (Jean XVII, 3). L’ensemble du processus du salut est décrit comme une translation du royaume des ténèbres dans le royaume de la lumière. Il n’y a donc rien d’étonnant à ce que les anciens aient appelé la régénération une <£ωτ4σ//ός, une illumination. Si un aveugle-né recouvrait subitement la vue, un tel flot de connaissance et de délices se déverserait sur lui, par l’organe de la vision, qu’il pourrait bien penser que toute vie consiste à voir. Ainsi, les auteurs du Nouveau Testament représentent le changement résultant de la régénération, l’ouverture des yeux sur la certitude, la gloire et l’excellence des choses divines, et en particulier de la révélation de Dieu dans la personne de son Fils, comme comprenant presque tout ce qui se rapporte à la vie spirituelle. Inséparablement liée à cette connaissance et incluse en elle, la foi, sous toutes les formes et dans tous les exercices où les vérités spirituelles sont ses objets. La jouissance dans les choses ainsi révélées est la conséquence nécessaire de l’illumination spirituelle ; Et avec la joie viennent la satisfaction et la paix, l’élévation au-dessus du monde, ou l’esprit spirituel, et un tel sentiment de l’importance des choses invisibles et éternelles, que toutes les énergies de l’âme renouvelée sont (ou, il est reconnu, elles devraient être) consacrées à les assurer pour nous-mêmes et pour les autres.
C’est l’une des formes sous lesquelles la Bible expose la doctrine de la régénération. C’est ressusciter l’âme morte dans le péché à la vie spirituelle. Et cette vie spirituelle se déploie ou se manifeste comme toute autre forme de vie, dans tous les exercices appropriés à sa nature.
La même doctrine sur ce sujet est enseignée en d’autres termes, lorsque la régénération est déclarée être une nouvelle naissance. À la naissance, l’enfant entre dans un nouvel état d’existence. La naissance n’est pas un acte en soi. Il est né. Il provient d’un état d’obscurité, dans lequel les objets adaptés à sa nature ne peuvent pas agir sur lui ou éveiller ses activités. Dès qu’il vient au monde, toutes ses facultés sont éveillées ; Il voit, sent et entend, et déploie peu à peu toutes ses facultés en tant qu’être rationnel et moral, aussi bien que physique. Les Écritures enseignent qu’il est ainsi en régénération. L’âme entre dans un nouvel état. Il est introduit dans un nouveau monde. Toute une classe d’objets auparavant inconnus ou méconnus lui sont révélés et exercent sur lui l’influence qui lui convient. Les « choses de l’Esprit » deviennent les principaux objets du désir et de la poursuite, et toutes les énergies de l’âme naissante sont dirigées vers le spirituel, par opposition au visible et au temporel. Cette représentation est conforme à la doctrine évangélique à ce sujet. Elle n’est compatible avec aucune des fausses théories de la régénération, qui considèrent la régénération comme l’acte même du pécheur : comme un simple changement de dessein ; ou comme un processus graduel de culture morale.
Une autre façon dont cette doctrine est exposée se trouve dans les passages où Dieu est représenté comme donnant à son peuple un cœur nouveau. Dans l’Écriture, le cœur est celui qui pense, qui sent, qui veut et qui agit. C’est l’âme ; le soi. Un cœur nouveau est donc un nouveau moi, un homme nouveau. Cela implique un changement de caractère tout entier. C’est une nouvelle nature. C’est du cœur que partent tous les exercices conscients, volontaires, moraux. Un changement de cœur est donc un changement qui précède ces exercices et en détermine le caractère. Un cœur nouveau est à l’homme ce que la bonté est à l’arbre dans la parabole de notre Seigneur.
Dans la régénération, il y a donc une vie nouvelle communiquée à l’âme ; l’homme fait l’objet d’une nouvelle naissance ; Il reçoit une nouvelle nature ou un nouveau cœur, et devient une nouvelle créature. Comme le changement n’est ni dans la substance, ni dans les simples exercices de l’âme, il est dans les dispositions, les principes, les goûts ou les habitudes immanents qui sont à la base de tous les exercices conscients, et qui déterminent le caractère de l’homme et de tous ses actes.
L’âme tout entière est le sujet de ce changement.
6. Selon la doctrine évangélique, l’âme entière est le sujet de la régénération. Ce n’est ni l’intellect à l’exclusion des sentiments, ni les sentiments à l’exclusion de l’intellect ; Ce n’est pas non plus la volonté seule, soit dans son sens le plus large, soit dans son sens le plus restreint, qui est l’objet du changement en question. C’est évident, —
(1) Parce que l’âme est une unité, et qu’elle est reconnue comme telle dans l’Écriture. Ses facultés ne sont pas dissociées au point que l’une puisse être bonne et l’autre mauvaise, l’une sauvée et l’autre perdue, l’une active dans la sphère de la morale et de la religion et les autres inactifs. Dans tout exercice de ce genre, l’intelligence, les sentiments, la volonté et la conscience, ou conscience morale, sont nécessairement impliqués.
(2) Dans la description de cet ouvrage, toutes les facultés de l’âme sont représentées comme affectées. L’esprit s’illumine, les yeux de l’entendement s’ouvrent ; le cœur se renouvelle ; La volonté est vaincue, ou l’homme est rendu disposé.
(3) Lorsque Lazare fut ramené à la vie, ce n’était pas un seul membre du corps, ni aucune faculté qui recevait l’influence vivifiante. Ce n’est pas le cœur qui a été mis en mouvement, le cerveau et les poumons étant restaurés par son action. C’est l’homme tout entier qui a été rendu vivant. Et c’est toute l’âme qui est régénérée.
(4) C’est ce qui ressort encore des effets attribués à la régénération. Ces effets ne sont pas limités à un seul département de notre nature. La régénération assure la connaissance juste aussi bien que le sentiment juste ; Et le sentiment juste n’est pas l’effet de la connaissance juste, pas plus que la connaissance juste n’est l’effet du sentiment juste. Les deux sont les effets inséparables d’une œuvre qui touche toute l’âme.
(5.) Quand Notre-Seigneur enseigne que l’arbre doit être rendu bon pour que le fruit soit bon, ce n’est pas une partie de l’arbre qui doit être changée, mais l’arbre tout entier. De même, c’est l’âme, au centre et dans l’unité de sa vie, qui est le sujet de cette puissance vivifiante du Saint-Esprit, par laquelle elle devient une nouvelle créature. La doctrine selon laquelle la régénération est un changement qui n’affecte qu’une seule des facultés de l’âme a sa fondation entièrement en dehors des Écritures. Il s’agit simplement d’une inférence à partir d’une théorie psychologique particulière, et n’a aucune autorité en théologie.
Les mêmes objections que l’on oppose à d’autres doctrines de la grâce sont opposées à la conception augustinienne de la nature de la régénération. Ces objections sont de trois catégories.
1. La première classe d’objections est fondée sur la négation du théisme ; ou du moins sur la négation de la doctrine biblique de la relation de Dieu avec le monde. C’est une supposition commune à la plupart des formes de la philosophie moderne que le seul agent de l’Être suprême (qu’il soit personnel ou impersonnel) est conforme à la loi. Elle est ordonnée, uniforme, et dans, avec et par les causes secondes, si de telles causes sont admises. Tout est naturel, et rien de surnaturel, ni dans le monde extérieur, ni dans le domaine des choses spirituelles. Il ne peut y avoir de création « ex nihilo », pas de miracles, pas de révélation immédiate, pas d’inspiration au sens ecclésiastique de ce terme ; Pas d’œuvre surnaturelle sur le cœur, et donc pas de régénération dans le sens d’une opération immédiate de la toute-puissance sur l’âme. Ceux qui s’écartent de leurs principes jusqu’à admettre la personne de Christ comme étant surnaturel dans son origine soutiennent que le surnaturel en Lui devient naturel, et qu’à partir de Lui la diffusion de la vie spirituelle se fait par un processus régulier de développement, aussi simplement naturel que le développement de l’humanité depuis Adam jusqu’à toute sa postérité.
Il s’agit d’une théorie purement philosophique. Il n’a aucune autorité pour les chrétiens. Comme elle est contraire à l’enseignement exprès des Écritures, elle ne peut être adoptée par ceux qui les reconnaissent comme la règle infaillible de la foi et de la pratique. Comme elle est en contradiction avec les convictions morales et religieuses qui découlent de la constitution de notre nature, elle doit être nuisible dans toutes ses tendances, et ne peut être adoptée que par ceux qui sacrifient à la spéculation leur vie intérieure.
Reposant sur de fausses théories psychologiques.
2. Une deuxième classe d’objections est fondée sur certaines théories psychologiques sur le libre arbitre, sur la nature de l’âme et sur les conditions de l’obligation morale. Aucune théorie sur ces sujets, ou sur d’autres sujets, n’a d’autorité, à l’exception de celles qui sous-tendent et sont nécessairement supposées dans les faits et les doctrines de l’Écriture. S’il y a une théorie qui enseigne que la plénitude est essentielle au libre arbitre ; que Dieu ne peut pas contrôler avec certitude les actes des agents libres sans détruire leur liberté; ou que les actes libres ne peuvent être prévus, prédits ou préordonnés, alors une telle théorie doit être fausse si les Écritures affirment des faits qui impliquent au contraire. Si une théorie enseigne que les hommes ne sont responsables que des actes de la volonté, sous leur propre contrôle, cette théorie doit être rejetée si la Bible enseigne que nous sommes responsables d’états d’esprit sur lesquels la volonté n’a aucun pouvoir direct. Les faits Les personnes impliquées dans la doctrine évangélique de la régénération, comme nous l’avons dit plus haut, contredisent les théories sur lesquelles reposent les arguments des remontrants, des pélagiens et d’autres contre cette doctrine, et par conséquent ces théories doivent partager le sort de toute doctrine qui contredit les faits établis. Cela a été démontré à maintes reprises à différentes époques de l’Église. Les principes qui sous-tendent ces objections ont été discutés dans les pages précédentes et il n’est pas nécessaire de les examiner de nouveau.
Objections fondées sur la Perfection divine.
3. Une troisième classe d’objections est tirée de la prétendue incompatibilité de cette doctrine avec les perfections morales de Dieu. Si tous les hommes sont morts dans le péché, privés du pouvoir de se rendre à la vie, alors non seulement il est injuste qu’ils le soient. condamné, mais il est aussi incompatible avec la rectitude divine que Dieu exerce sa toute-puissance dans la régénération des uns, tandis qu’il laisse périr les autres. La justice, dit-on, exige que tous aient une chance égale ; que tous doivent avoir, par nature ou par grâce, le pouvoir d’assurer leur propre salut. Il est évident que de telles objections ne sont pas particulièrement opposées au système augustinien. Ils sont exhortés par les athées contre le théisme. S’il y a un Dieu personnel d’une puissance infinie, pourquoi permet-il au péché et à la misère de détenir une suprématie commune sur la terre ? Pourquoi le bien et le mal sont-ils si inégalement répartis, et pourquoi la répartition est-elle si arbitraire ?
Les déistes font les mêmes objections contre l’autorité divine de la Bible. Ils ne peuvent pas la recevoir comme la Parole de Dieu parce qu’elle représente le Créateur et le Gouverneur du monde comme plaçant les hommes dans des circonstances qui assurent d’une certaine manière l’universalité du péché, et les punissant ensuite avec une sévérité inexorable même pour leurs vaines paroles.
Il est clair aussi que les différents systèmes anti-augustiniens n’apportent aucun soulagement réel à ces difficultés. Admettre que la régénération est l’acte même du pécheur ; En admettant que tout homme ait toute la connaissance et toute la capacité nécessaires pour assurer son salut, il reste vrai que peu sont sauvés, et que Dieu n’intervient pas pour empêcher la grande majorité des hommes adultes dans l’état actuel du monde de périr dans leurs péchés.
Les Augustins ne nient pas ces difficultés. Ils soutiennent seulement qu’ils ne sont pas particuliers à leur système ; et ils se contentent de la solution qu’ils ont donnée dans les Écritures. Cette solution s’accorde avec tous les faits de la conscience et de l’expérience, dans la mesure où la conscience et l’expérience s’étendent. La Bible enseigne que l’homme a été créé saint ; que, par sa transgression volontaire de la loi divine, il a apostasié de Dieu ; qu’à la suite de cette apostasie, tous les hommes viennent au monde dans un état de mort spirituelle, à la fois coupables et souillés ; que Dieu n’exerce aucune influence pour les conduire au péché, mais qu’au contraire, par sa vérité, sa providence, et par son Esprit, il exerce sur eux toute l’influence qui doit amener les êtres raisonnables à se repentir et à rechercher son Dieu. la miséricorde qui pardonne et la grâce sanctifiante ; que tous ceux qui cherchent sincèrement et fidèlement la réconciliation avec Dieu dans la voie de sa nomination, Il les sauve réellement ; que, par sa grâce souveraine, dans l’exercice de sa puissance puissante, il renouvelle et sanctifie une multitude que personne ne peut compter, qui autrement aurait persévéré dans ses péchés. Avec ces représentations des Écritures, tout ce qui relève de notre connaissance s’accorde. La conscience et l’expérience attestent que nous sommes une race apostate ; que tous les hommes sont pécheurs, et, étant pécheurs, ont perdu tout droit à la faveur de Dieu ; qu’en persévérant dans le péché et en rejetant les ouvertures de la miséricorde, les hommes agissent volontairement, en suivant les désirs de leur propre cœur. De plus, la conscience de chaque homme lui enseigne qu’il n’a jamais cherché le salut de son âme avec la sincérité et la persévérance avec lesquelles les hommes recherchent les choses du monde, et qu’il a cependant échoué dans ses efforts. Tout homme qui n’a pas la vie éternelle sait que la responsabilité repose sur lui-même. D’autre part, l’expérience de chaque croyant lui témoigne que c’est de Dieu et non de lui-même qu’il est en Christ (1 Corinthiens i. 30) ; chaque croyant sait que si Dieu l’avait laissé à lui-même, il aurait persévéré dans l’incrédulité et le péché. Pourquoi Dieu intervient pour sauver l’un et non l’autre, alors que tous sont également indignes ; pourquoi les choses de Dieu sont révélées aux tout-petits alors qu’elles sont cachées aux sages et aux prudents, ne peut être répondue que dans le langage de notre Seigneur : « Ainsi donc, Père, car c’est ainsi qu’il a semblé bon à tes yeux. » (Matthieu xi. 26.)
Les objections les plus populaires et les plus communes que la doctrine augustinienne de la régénération conduit à négliger les moyens de la grâce, à « attendre le temps de Dieu », à l’indifférence ou au désespoir ; Qu’elle soit incompatible avec les exhortations et les commandements adressés aux pécheurs de se repentir et de croire, et incompatible avec la responsabilité morale, cela a déjà été considéré à plusieurs reprises. Qu’il suffise de dire encore une fois que ces objections sont fondées sur l’hypothèse que l’incapacité, même lorsqu’elle provient de notre propre péché, est incompatible avec l’obligation. En outre, c’est la tendance naturelle et actuelle d’un sentiment d’impuissance sous le fardeau du mal, de conduire à une demande sérieuse et importune de soulagement à Celui qui est en mesure de se le permettre, et par qui il est offert.
CHAPITRE XVI.
FOI.
Le premier exercice conscient de l’âme renouvelée, c’est la foi ; comme le premier acte conscient d’un aveugle de naissance dont les yeux ont été ouverts, c’est de voir. L’exercice de la vision chez un tel homme est en effet accompagné de tant de sensations et d’émotions nouvelles qu’il ne peut pas déterminer quelle part de cette nouvelle expérience vient de l’œil, et quelle part provient d’autres sources. Il en est ainsi pour le croyant. Dès que ses yeux sont ouverts par le renouvellement du Saint-Esprit, il est dans un monde nouveau. Les choses anciennes ont disparu, toutes les choses sont devenues nouvelles. L’appréhension des « choses de Dieu » comme vraies est à la base de tous les exercices de l’âme renouvelée. Les discussions sur la question de savoir si la foi précède la repentance, ou la foi de repentance, ne peuvent avoir leur place si l’on s’accorde sur le sens de ces mots. À moins que la foi ne soit limitée à quelques-uns de ses exercices spéciaux, il ne peut y avoir de doute que, dans l’ordre de la nature, elle doit précéder le repentir. La repentance est le détournement de l’âme du péché vers Dieu, et à moins qu’elle ne soit produite par l’appréhension croyante de la vérité, ce n’est même pas un acte rationnel. Comme on accorde une grande importance à la foi dans les Écritures, que toutes les promesses de Dieu s’adressent aux croyants, et que tous les exercices conscients de la vie spirituelle impliquent l’exercice de la foi, sans lequel ils sont impossibles, on ne saurait surestimer l’importance de cette grâce. Pour le théologien et pour le chrétien pratique, il est indispensable d’avoir des idées claires et justes sur le sujet. C’est un cas particulièrement difficile. Cette difficulté provient en partie de la nature du sujet ; en partie de ce que l’usage a attribué au mot foi tant de significations différentes ; en partie à cause des définitions arbitraires qu’en donnent les philosophes et les théologiens ; et en partie à cause de la grande diversité des aspects sous lesquels elle est présentée dans la Parole de Dieu.
La question : Qu’est-ce que la foi ? est très complet. D’un certain point de vue, il s’agit d’une question métaphysique. Quelle est la nature psychologique de l’acte ou de l’état d’esprit que nous désignons par la foi ou la croyance ? Sous cet aspect, la discussion concerne le philosophe autant que le théologien. Deuxièmement, la foi peut être considérée comme son exercice dans toute la sphère de la religion et de la morale. Troisièmement, elle peut être considérée comme une grâce chrétienne, fruit de l’Esprit ; c’est-à-dire les exercices de foi qui sont propres au peuple régénéré de Dieu. C’est ce que l’on entend par la foi qui sauve. Quatrièmement, elle peut être considérée dans sa relation avec la justification, la sanctification et la vie sainte, ou dans les exercices spéciaux de la foi qui sont requis comme les conditions nécessaires de l’acceptation du pécheur avec Dieu, ou comme essentiels à la sainteté du cœur et de la vie.
§ 2. La nature psychologique de la foi.
La foi, dans le sens le plus large du mot, est l’assentiment à la vérité, ou la persuasion de l’esprit qu’une chose est vraie. Dans le langage populaire ordinaire, on dit que nous croyons tout ce que nous considérons comme vrai. L’élément principal de la foi est la confiance. Le mot hébreu אמן signifie soutenir, soutenir. Dans le Niphil, être ferme et, dans un sens moral, être digne de confiance. Dans l’Hiphil, considérer comme ferme, ou digne de confiance, placer sa confiance ou sa confiance. De même, le grec πιστεύω (de πίστις, et celui de πει^ω, persuader), signifie avoir confiance, c’est-à-dire être persuadé qu’une personne ou une chose est digne de confiance. C’est pourquoi l’épithète πιστός s’applique à quiconque est digne de confiance et qui se montre digne de confiance. En latin , credere (d’où notre mot crédit) a le même sens. En matière mercantile, c’est prêter, faire confiance à ; et puis, en général, d’exercer la confiance. « Crede mihi », croyez-moi, fiez-vous à ma parole. Fides (de fido, et celui de πείθω), c’est aussi la confiance, la confiance exercée à l’égard d’une personne ou d’une chose ; puis la disposition ou la vertu qui excite la confiance ; puis la promesse, la déclaration ou le gage qui est le fondement extérieur de la confiance. Dans les mots apparentés , fidens, fide lis, fiducia, la même idée est prédominante. Le mot allemand " Glaube " a le même sens général. Il est défini par Heinsius (Worterbuch) : « der Zustand des Gcmiithes, da man cine Sache für wahr halt und sieh darauf verliisst », c’est-à-dire « cet état d’esprit dans lequel un homme reçoit et se fie à une chose comme vraie ». On dit que le mot anglais « faith » vient de l’anglo-saxon « fægan » pour faire alliance. C’est cet état d’esprit qu’une alliance exige ou suppose ; c’est-à-dire qu’il est confiez-vous à une personne ou à une chose comme digne de confiance. « Croire » est défini par le latin « credere, fidem dare sive habere ». « Les étymologistes, dit Richardson, n’essaient pas d’expliquer ce mot important : il est indubitablement formé sur le Dut. Le-ven ; Ger. Leben; A.-S. Lif-ian, Be-lif-ian ; Goth. Liban, vivere, vivre, ou être-vivre, habiter. Vivre ou leve, être ou bi-vivre ou leve , sont employés indifféremment par les anciens écrivains, soit pour désigner vivere, soit pour credere..... Croire , c’est donc vivre par ou selon , se conformer à ; guider, conduire, réglementer, gouverner ou diriger la vie par ; de prendre, d’accepter, d’assumer ou d’adopter comme règle de vie ; et, par conséquent, de penser, de juger ou de juger juste ; d’être fermement persuadé de, d’accorder du crédit à ; faire confiance, ou penser digne de confiance ; d’avoir ou de donner foi ou confiance ; de se confier, de penser ou de juger fidèle.
L’idée première de la foi est la confiance.
De tout cela, il ressort que l’idée première de la foi est la confiance. L’idée première de la vérité est celle qui est digne de confiance ; ce qui soutient nos attentes, qui ne déçoit pas, parce qu’il est vraiment ce qu’il est supposé ou déclaré être. Elle s’oppose à la tromperie, au faux, à l’irréel, au vide et à l’insignifiant. Considérer une chose comme vraie, c’est la considérer comme digne de confiance, comme étant ce qu’elle prétend être. La foi, au sens large et légitime du mot, est donc confiance.
D’après cette idée générale de la foi, saint Augustin 1 dit : Credere, nihil aliud est, quam cum assensione cogitare. C’est ainsi que Reid 2 dit : « La croyance admet tous les degrés, depuis le plus léger soupçon jusqu’à l’assurance la plus complète..... Il y a beaucoup d’opérations de l’esprit dans lesquelles.... Nous trouvons que la croyance est un ingrédient essentiel..... La croyance est un ingrédient de la conscience, de la perception et du souvenir..... Nous donnons le nom de preuve à tout ce qui est un motif de croyance..... Ce qu’est cette preuve est plus facile à sentir qu’à décrire..... Les occasions communes de la vie nous amènent à distinguer les preuves en différentes sortes, .... comme l’évidence des sens, l’évidence de la mémoire, l’évidence de la conscience, l’évidence du témoignage, l’évidence des axiomes, l’évidence du raisonnement..... Il me semble qu’ils ne sont d’accord qu’en ceci, qu’ils sont tous aptes par nature à produire la croyance dans l’esprit humain.
1 De Prcedestlnatione Sanctorum [11.], 5 ; Œuvres, édit. Bénédictines, Paris, 1838, t. X, p. 1349 b.
2 Sur les puissances intellectuelles, Essai 11. ch. xx. ; Works, Édimbourg, 1849, p. 327 b, 328 a, b.
Le sens plus restreint du mot.
Il y a cependant dans la plupart des cas une grande différence entre la signification générale d’un mot et sa signification spéciale et caractéristique. Bien qu’il y ait donc un élément de croyance dans toutes nos connaissances, il y a une différence importante entre ce qu’on appelle proprement et proprement foi, et les états ou actes de l’esprit que nous désignons comme la vue ou la perception, l’intuition, les opinions, les conclusions ou les jugements apodictiques. Quelle est cette différence caractéristique, c’est le point qu’il faut déterminer. Il y a des modes d’affirmation à ce sujet qui sont courants parmi les une certaine classe de philosophes et de théologiens, qui ne peuvent guère être considérés comme des définitions de la foi. Ils enlèvent le mot à son sens ordinaire et établi, ou le limitent arbitrairement à une sphère spéciale de nos opérations mentales. C’est ainsi que Morell1 dit : « La foi est l’intuition des vérités éternelles. » Mais les vérités éternelles ne sont pas les seuls objets de la foi ; L’intuition n’est pas non plus le seul mode d’appréhension de la vérité qui soit de la nature de la croyance. Les mêmes objections s’opposent à l’affirmation que « la foi est l’organe du surnaturel et du divin » ou, comme l’exprime Eschenmayer, « Ein vom Denken, Fiihlen und Wollen verschiedenes, eigenthiimliches Organ für das Ewige und Ileilige ; un organe spécial pour l’éternel et le saint. Le surnaturel et le divin, cependant, ne sont pas les objets exclusifs même de la foi religieuse. C’est par la foi que nous savons que les mondes ont été faits par la parole de Dieu ; c’est par la foi que Noé prépara l’arche, et Abraham, appelé de Dieu, sortit sans savoir où il allait. Les objets de la foi dans ces cas ne sont pas ce que l’on entend par « vérités éternelles ». C’est, en outre, une supposition arbitraire que la foi est « un organe spécial », même lorsque des choses surnaturelles et divines en sont l’objet. Notre nature est adaptée à la réception de toutes sortes de vérités dont nous pouvons avoir une idée. Mais il n’est pas nécessaire de supposer un organe spécial pour les vérités historiques, un organe spécial pour les vérités scientifiques. et un autre pour les vérités générales de la révélation, et un autre encore pour « l’éternel et le saint ». Dieu nous a créés capables de croire, et l’état d’esprit complexe impliqué dans l’acte de foi est bien sûr différent selon la nature de la vérité crue, et la nature de l’évidence sur laquelle notre foi est fondée. Mais cela n’exige pas l’hypothèse d’un organe distinct pour chaque espèce de vérité.
1 Philosophie de la religion.
La foi ne doit pas être considérée comme une simple grâce chrétienne.
Non moins insatisfaisantes sont les descriptions de la foi qui ne la considèrent que dans son caractère de grâce chrétienne et salvifique. Delitzsch, par exemple1, décrit la foi comme l’acte le plus central de notre être ; le retour à Dieu, la sortie de notre vie intérieure vers Lui. « Ce désir ardent de l’amour gratuit et miséricordieux de Dieu, comme le déclare sa propre Parole, — un désir ardent, qui tend la main et le saisit ; ce désir nu et désintéressé, se sentant satisfait de rien d’autre que de la grâce promise par Dieu ; cet empressement, absorbant chaque rayon de lumière qui procède de l’amour réconcilié de Dieu ; ceci convaincus, avides de sécurité, d’appropriation et d’attachement à la parole de grâce ; — C’est la foi. Selon sa nature, il est le pur corrélatif réceptif de la parole de promesse ; un moyen de s’approcher de nouveau à Dieu, qui, comme le mot lui-même, est désigné par l’éloignement de Dieu en conséquence du péché ; pour la foi doit se confier à la parole, en dépit de tout manque de compréhension, de tout manque de vue, de tout défaut d’expérience. Aucun actus reflexi expérimental n’appartient à la nature de la foi. C’est, selon sa nature , actio directa, c’est-à-dire fiducia supplex. Tout cela est sans doute vrai pour le croyant. Il désire ainsi Dieu, et s’approprie l’assurance de son amour, et s’accroche à ses promesses de grâce ; Mais la foi a une portée plus large que cela. Il y a des exercices de foi qui ne sont pas inclus dans cette description, rapportés dans l’Écriture, et en particulier dans le onzième chapitre de l’épître aux Hébreux.
1 Psychologie biblique, p. 174.
Erdmann2 dit que la foi religieuse, la foi sur laquelle les Écritures insistent tant, est : « Bewusstseyn der Versohnung mit Gott, la conscience de la réconciliation avec Dieu ». Il insiste sur le fait que la foi ne peut être séparée de son contenu. Ce n’est pas l’homme qui tient ceci ou cela pour vrai, qui est croyant ; mais l’homme qui est convaincu d’une vérité spécifique, à savoir qu’il est réconcilié avec Dieu. Appeler la foi une conscience n’est pas une définition de sa nature. Et la limiter à une conscience de réconciliation avec Dieu est contraire à l’usage de l’Écriture et de la théologie.
2 Vorlesungen über Glauben und Wissen, von Johann Eduard Erdmann, Berlin, 1837, p. 30.
Définitions de la foi fondées sur sa nature subjective.
Les définitions les plus communes et les plus généralement reçues de la foi peuvent peut-être être réduites à trois classes, qui comprennent toutes l’idée générale de persuasion de la vérité. Mais certains cherchent le caractère distinctif de la foi dans sa nature subjective ; d’autres, dans la nature de son objet ; d’autres, par la nature de la preuve ou par le fondement sur lequel elle repose.
La foi par opposition à l’opinion et à la connaissance.
À la première de ces classes appartiennent les définitions suivantes : On dit que la foi ou la croyance est une persuasion de la vérité plus forte que l’opinion et plus faible que la connaissance. Les métaphysiciens divisent les objets de nos cognitions en possible, réel et nécessaire. En ce qui concerne le simple possible, nous ne pouvons former que des conjectures, ou des opinions, plus ou moins plausibles ou probables. À l’égard des choses que l’esprit a plus ou moins La confiance considère comme certaine, bien qu’elle ne puisse justifier cette confiance à elle-même ou aux autres, c’est-à-dire qu’elle ne puisse pas démontrer la certitude de l’objet, dit-on. Ce dont elle est parfaitement assurée, et ce qu’elle peut démontrer être vrai pour contraindre à la conviction, on dit qu’elle le sait. Ainsi, Locke définit la foi comme l’assentiment de l’esprit à des propositions qui sont probablement, mais pas certainement vraies. Bailey1 dit : « Je me propose de la limiter [la croyance ou la foi] d’abord, à l’effet sur l’esprit des prémisses dans ce qu’on appelle le raisonnement probable, ou ce que j’ai appelé le raisonnement contingent – en un mot le raisonnement contingent – en un mot le raisonnement contingent – en un mot le raisonnement contingent – en un mot, le raisonnement conditionnel, le raisonnement contingent, le raisonnement contingent, le raisonnement conditionnel, prémisses dans tout raisonnement, sauf ce qui est démonstratif ; et deuxièmement, à l’état de tenir vrai quand cet état, loin d’être l’effet de prémisses discernées par l’esprit, est dissocié de toute évidence. Croire, c’est admettre une chose comme vraie, selon Kant, pour des raisons suffisantes subjectivement, insuffisantes objectivement. Ou, comme nous l’avons dit plus en détail, « Tenir pour vrai, ou la validité subjective d’un jugement par rapport à la conviction (qui est, en même temps, objectivement valide) a les trois les degrés suivants : l’opinion, la croyance et la connaissance. L’opinion est un jugement consciemment insuffisant, subjectivement aussi bien qu’objectivement. La croyance est subjectivement suffisante, mais elle est reconnue comme étant objectivement insuffisante. La connaissance est à la fois subjectivement et objectivement suffisante. La suffisance subjective s’appelle conviction (pour moi) ; La suffisance objective s’appelle la certitude (pour tous) ». 2 Erdmann 3 dit : « Man versteht unter Glauben eine jede Gewissheit, die geringer ist als das Wissen, und etwa starker 1st als ein blosses Meinen oder Fiirmoglichhalten (z. B. ich glaube, dass es heute regnen wird). » » Par foi, on entend toute persuasion qui est plus faible que la connaissance, mais un peu plus forte qu’une simple considération possible ou probable, comme, par exemple, je crois qu’il pleuvra aujourd’hui. C’est ce qu’il donne comme le sens communément accepté du mot, bien qu’il le répudie complètement en tant que définition de la foi religieuse.
1 Lettres sur la philosophie de l’esprit humain, Londres, 1855, p. 75. 76.
2 Meiklejobn’s Translation of Critic of Pure Reason, Londres, 1855, p. 498.
3 Glauben und H7.wen, Berlin, 1837, p. 29.
À l’appui de cette définition de la foi, on prétend qu’à l’égard de tout ce dont nous ne sommes pas absolument sûrs, et dont nous sommes cependant persuadés ou convaincus de la vérité, nous disons que nous croyons. Ainsi à l’égard des choses dont on se souvient ; Si le souvenir est indistinct et incertain, nous disons que nous pensons , c’est-à-dire que nous croyons avoir vu une certaine personne à un moment et à un endroit donnés ; nous n’en sommes pas sûrs, mais telle est notre impression. Si notre persuasion du fait est plus forte, nous disons que nous le croyons. Si nous n’avons, et ne pouvons avoir, aucun doute à ce sujet, nous disons que nous le savons. De même, le témoignage de nos sens peut être si faible qu’il ne produit qu’une probabilité que la chose soit telle qu’elle paraît ; si elle est plus claire, elle produit une croyance plus ou moins décidée ; Si elle est si claire qu’elle exclut tout doute, l’effet est la connaissance. Si nous voyons une personne à distance, et que nous ne sommes pas du tout sûrs de qui il s’agit, nous pouvons seulement dire que nous pensons que c’est quelqu’un que nous connaissons. Si cette persuasion devient plus forte, disons-nous, nous croyons que c’est lui. Si nous en sommes parfaitement sûrs, disons-nous, nous le savons. Dans tous ces cas, la seule différence entre l’opinion, la croyance et la connaissance, c’est leur force relative. Les objets sont les mêmes, leur relation avec l’esprit est la même, et le fondement ou l’évidence sur lequel ils reposent individuellement est du même genre. On dit qu’il serait inexact de dire : « Nous croyons que nous avons dormi dans notre maison la nuit dernière ; » si nous en étions parfaitement sûrs. Si un témoin devant une cour de justice dit simplement : « Je crois que j’étais à un certain endroit à un moment donné », son témoignage n’aurait aucune valeur. Il doit pouvoir dire qu’il est sûr du fait, qu’il le sait.
Objections à cette définition.
À propos de cette définition de la foi, on peut remarquer :
1. Que le sens qu’il donne au mot est certainement légitime, soutenu par l’usage établi. Les états d’esprit exprimés par les mots, je pense qu’une chose est vraie ; Je le crois ; Je le sais, se distinguent l’un de l’autre simplement par les différents degrés de certitude qui entrent respectivement en eux. Le motif probable de cet emploi du mot croire, c’est qu’il y a plus d’élément de confiance (ou de donner volontairement à l’évidence une plus grande influence sur l’esprit qu’il ne lui appartient nécessairement), manifesté dans notre conscience, qu’il n’est exprimé en disant : nous pensons, ou nous savons. Quoi qu’il en soit, on ne peut nier que le mot croyance exprime souvent un degré de conviction supérieur à l’opinion et inférieur à la connaissance.
2. Mais ce n’est pas là le trait distinctif de la foi, ni sa différence. Il y a des exercices de foi dans lesquels cette L’incertitude n’entre pas. Certaines des convictions les plus fortes dont l’esprit est capable sont les croyances. Même si l’on n’a pas l’assurance de la véracité de la conscience, fondement de toutes les autres convictions, est de la nature de la foi. Ainsi, les vérités premières qui sont, et doivent être assumées dans toutes nos recherches et arguments, sont les croyances. Ils sont pris sur la confiance. Ils ne peuvent pas être prouvés. Si quelqu’un les nie, il n’y a plus rien à dire. Il ne peut pas être convaincu. Sir William Hamilton1 dit : « Saint Austin dit avec justesse : « Nous savons ce qui repose sur la raison ; Nous croyons ce qui repose sur l’autorité. Mais la raison elle-même doit enfin s’appuyer sur l’autorité ; Car les données originelles de la raison ne reposent pas sur la raison, mais sont nécessairement acceptées par la raison sur l’autorité de ce qui est au-delà d’elle-même. Ces données sont donc en la bienséance, les croyances ou les fiducies. C’est ainsi qu’en dernier ressort, nous devons, par la force des choses, admettre philosophiquement que la croyance est la condition première de la raison, et non la raison le fondement ultime de la croyance. Nous sommes forcés d’abandonner l’orgueilleuse Intellige ut credas d’Abélard, pour nous contenter de l’humble Crede ut intelligas d’Anselme.
1 Œuvres de Reid ; édit. Édimbourg, 1849, note A, § 5, p. 760 b.
Il en va de même dans d’autres domaines. L’effet produit sur l’esprit par le témoignage humain est universellement reconnu comme étant la foi. Si ce témoignage est insuffisant, il n’exclut pas le doute ; mais elle peut être si forte qu’elle rend tout doute impossible. Pas sain d’esprit l’homme peut douter de l’existence de villes telles que Londres et Paris. Mais pour la plupart des hommes, cette existence n’est pas une question de connaissance, qu’elle soit intuitive ou discursive. C’est quelque chose qui se prend sur la confiance, sur l’autorité d’autrui ; qui prend la confiance est admise par les philosophes, les théologiens et la masse des hommes, comme une forme de foi. De plus, dans certains états d’esprit moraux, la conviction d’un homme de la réalité d’un état futur de récompense et de punition est aussi forte que sa croyance en sa propre existence, et beaucoup plus forte que sa croyance en sa propre existence. confiance dans le témoignage de ses sens. Et pourtant, un état futur d’existence n’est pas une question de connaissance. C’est un objet de foi, ou une chose que l’on croit. Nous trouvons donc que les Écritures enseignent qu’il y a une pleine assurance de la foi ; une foi qui exclut la possibilité de douter. Paul dit : « Je sais en qui j’ai cru, et je suis persuadé qu’il est capable de garder ce que je lui ai confié jusqu’à ce jour-là. » (2 Tim. i. 12.) Comme Job l’avait dit des siècles auparavant : « Je sais que mon Rédempteur est vivant. » L’Apôtre déclare : Hébreux xi. 1, la foi pour être un υπόστασή et έλεγχος, qu’on ne saurait choisir de termes plus forts pour exprimer une conviction assurée. De même, la puissance que la Bible attribue à la foi comme principe directeur de la vie, comme vainqueur du monde, soumettant les royaumes, fermant la gueule des lions, éteignant la violence du feu, mettant en fuite les armées des étrangers, est une preuve suffisante qu’elle n’est pas une faible persuasion de la vérité. Par conséquent, cette définition qui fait de la foi une mesure de confiance supérieure à l’opinion, mais inférieure à la connaissance, ne peut donc pas être considérée comme satisfaisante.
La foi n’est pas une conviction volontaire.
Une deuxième définition de la foi, fondée sur sa nature, est celle qui en fait « une conviction ou une persuasion volontaire de la vérité ». C’est une vision très ancienne de la question. Selon Théodoret1, πίστις άττϊν ίκοΰσιος τής ψυχής συγκατάθ&τις, c’est-à-dire « un assentiment volontaire de l’esprit ». Et Thomas d’Aquin dit :2 « Credere est actus intellectus assentientis veritati divinæ ex imperio voluntatis a Deo motæ per gratiam. » 3 Il distingue entre la connaissance et la foi en représentant la première comme la conviction produite par l’objet lui-même vu intuitivement ou discursivement (« sicut patet in principiis primis, .... Vel.... sicut patet de conclusionibus « ) pour être vrai ; tandis que dans ce dernier cas, l’esprit n’est pas assez mû pour donner son assentiment « ab objecto proprio, sed per quandam electionem, voluntarie declinans in unam partem magis quam in alteram. Et siquidem hæc sit cum dubitatione et formidine alterius partis, erit opinio. Si autem sit cum certitudine absque tali formidine, erit tides. »
1 Grœcarum Affcctionum Curatio, sermo i. édit. Commelinus. Heidelberg ( ?), 1592, p. 16, lignes 11, 12.
2 Summa, n. ii. quæst. ii. art. 9, édit. Cologne, 1040, p- 8 b, de la troisième série.
3 Ibid., quæst. i. art. 4, p. 3 b, 4 a, de la troisième série.
Cette définition admet différentes explications. Le mot « volontaire », si sa signification est déterminée par le sens large du mot « volonté », comprend toutes les opérations de l’esprit qui ne sont pas purement intellectuelles. Et par conséquent, dire que la foi est un assentiment volontaire, c’est dire que la foi n’est pas seulement un assentiment spéculatif, un acte du jugement déclarant qu’une chose est vraie, mais qu’elle comprend le sentiment. Nitsch définit donc la foi comme un « gefühlsinassiges Erkennen ». « Die Einheit des Gefiihls and der Erkenntniss ; 1 la connaissance ou la persuasion de la vérité combinée avec le sentiment, — l’unité du sentiment et de la connaissance. Mais si le mot « sera pris dans le sens du pouvoir d’autodétermination, alors rien n’est volontaire qui n’implique l’exercice de ce pouvoir. Si, en ce sens, la foi est volontaire, alors nous devons avoir le pouvoir de croire ou de ne pas croire à notre guise. Si nous croyons la vérité, c’est parce que nous choisissons ou nous déterminons à la recevoir ; Si nous la rejetons, c’est parce que nous voulons ne pas y croire. La décision n’est déterminée ni par la nature de l’objet, ni par la nature ou le degré de la preuve. Parfois, ces deux significations du mot volontaire semblent être combinées par ceux qui définissent la foi comme un assentiment volontaire de l’esprit, ou un assentiment de l’intellect déterminé par la volonté. C’est ce qui ressort de ce que dit Thomas d’Aquin, par exemple, lorsqu’il discute de la question de savoir si la foi est une vertu. Il soutient que si la foi est une vertu, ce qu’il admet qu’elle est, elle doit inclure l’amour, parce que l’amour est la forme ou le principe de toutes les vertus ; et elle doit être autodéterminée parce qu’il ne pourrait y avoir de vertu dans la foi si elle était l’effet inévitable de la preuve ou du témoignage. S’il s’agit d’une vertu, elle doit inclure un acte de l’autodétermination ; Nous devons décider de faire ce que nous avons le pouvoir de ne pas faire.
1 System der Christlidien Lehre, Einl. 11. A. § 8. 3, 5e édition. Bonn, 1844, p. 18.
Remarques sur cette définition de la foi.
Cette définition de la foi contient de nombreux éléments de vérité. En premier lieu, il est vrai que la foi et le sentiment sont souvent inséparables. Ensemble, ils constituent l’état d’esprit auquel on donne le nom de foi. La perception de la beauté est nécessairement liée au sentiment de plaisir. L’assentiment à la vérité morale implique le sentiment d’approbation morale. De la même manière, le discernement spirituel (la foi quand elle est le fruit de l’Esprit) inclut la joie dans les choses de l’Esprit, non seulement comme vraies, mais comme belles et bonnes. C’est la différence entre une foi vivante et une foi morte. C’est la part de vérité impliquée dans la doctrine romaine d’une foi formée et non formée. La foi (l’assentiment à la vérité) liée à l’amour est la fides formata ; La foi sans l’amour est Fides informis. S’il est vrai que la foi est souvent nécessairement liée au sentiment, et que, par conséquent, dans un sens du terme, elle est un assentiment volontaire, il n’en est pas toujours ainsi. Que le sentiment accompagne et entre dans l’exercice de la foi, cela dépend de son objet (ou de la chose que l’on croit) et de l’évidence sur lequel elle est fondée. Lorsque l’objet de la foi est une vérité spéculative, ou un événement historique passé ou futur ; ou lorsque la preuve ou le témoignage sur lequel la foi est fondée est S’adressant uniquement à l’entendement et non à la conscience ou à notre nature affective ou religieuse, alors la foi n’implique pas le sentiment. Nous croyons que la grande masse des faits historiques auxquels nous donnons notre assentiment est vraie, simplement sur la base d’un témoignage historique, et sans qu’aucun sentiment n’y entre ou ne s’y rattache nécessairement. Il en va de même pour une grande partie du contenu de la Bible. Ils sont, dans une large mesure, historiques, ou les prédictions d’événements historiques. Lorsque nous croyons ce que les Écritures rapportent au sujet de la création, du déluge, de l’appel d’Abraham, du renversement des villes de la plaine, de l’histoire de Joseph, et ainsi de suite, notre foi n’inclut pas le sentiment. Ce n’est pas un exercice de la volonté dans l’un ou l’autre sens de ce mot. Il s’agit simplement d’une déclaration de culpabilité rationnelle fondée sur des preuves suffisantes. On peut dire, comme le dit Thomas d’Aquin, que c’est l’amour ou la révérence envers Dieu qui incline la volonté à croire de tels faits sur l’autorité de sa Parole. Mais les méchants les croient, et ne peuvent s’empêcher de les croire. Il est difficile de trouver un homme qui ne croie pas que les Israélites ont habité en Égypte, qu’ils se sont échappés de la servitude et qu’ils ont pris possession du pays de Canaan.
En second lieu, il est vrai non seulement que la foi est souvent inséparable du sentiment, mais aussi que le sentiment a beaucoup d’influence sur la détermination de notre foi. Cela est particulièrement vrai lorsque les vérités morales et religieuses sont les objets de la foi. Vouloir de la sympathie avec la vérité produit l’insensibilité à l’évidence qui la soutient. Notre Seigneur dit aux Juifs : « Vous ne croyez pas, parce que vous n’êtes pas de mes brebis. » (Jean, x, 26.) Et dans un autre endroit : « Si quelqu’un veut faire sa volonté, il connaîtra la doctrine, si elle est de Dieu. » (VII. 17.) Et l’Apôtre dit de ceux qui sont perdus : « Le dieu de ce monde a aveuglé l’esprit de ceux qui ne croient pas, de peur que la lumière de l’Évangile glorieux de Christ, qui est l’image de Dieu, ne brille sur eux. » (2 Corinthiens iv. 4.) La vérité était présente, accompagnée de preuves appropriées et abondantes, mais il n’y avait aucune susceptibilité. Le défaut était dans l’organe de la vision, et non dans le manque de lumière. Les Écritures rapportent uniformément l’incrédulité de ceux qui rejettent l’Évangile à l’état de leur cœur. Il ne peut y avoir aucun doute que tous les vrais enfants de Dieu ont reçu Christ comme leur Dieu et Sauveur sur la preuve que le mensonge a donnée de son caractère divin et de sa mission, et qu’il n’a été rejeté que par les non renouvelés et les méchants, et à cause de leur méchanceté.
C’est pourquoi l’incrédulité est un si grand péché. Les hommes sont condamnés parce qu’ils ne croient pas au Fils unique de Dieu. (Jean iii. 18.) Tout cela est vrai. C’est vrai de la foi qui sauve. Mais il n’en est pas de même de toutes les formes de foi religieuse ; c’est-à-dire de la foi qui a pour objet la vérité religieuse. Et, par conséquent, il ne peut pas fournir la différence ou le critère pour distinguer la foi des autres formes d’assentiment à la vérité. Il y a des états d’esprit non seulement communément appelés, mais à juste titre croyance, dont il n’est pas vrai que l’amour, ou la sympathie, soit un élément. Il y a une chose telle que la foi morte, ou l’orthodoxie. Il y a une chose telle que la foi spéculative. Simon le Magicien y croyait. Même les démons croient. Et si nous nous tournons vers d’autres vérités que les religions, il est encore plus évident que la foi n’est pas nécessairement un assentiment volontaire de l’esprit. Un homme peut entendre parler de quelque chose qui répugne à ses sentiments, comme, par exemple, le triomphe d’un rival. Il peut d’abord refuser d’y croire ; mais le témoignage peut devenir si fort qu’il force la conviction. Cette conviction est, d’un commun accord, une foi ou une croyance. Ce n’est pas la vue ; ce n’est pas de l’intuition ; il ne s’agit pas d’une déduction ; c’est la croyance ; une conviction fondée sur des témoignages. Ce sujet, c’est-à-dire le lien entre la foi et le sentiment, reviendra en examinant d’autres définitions.
En troisième lieu, si l’on prend le mot volontaire dans le sens qui implique la volonté ou l’autodétermination, il est encore plus évident que la foi ne peut pas être définie comme un assentiment volontaire. C’est, en effet, un proverbe qu’un homme convaincu contre son gré n’est pas convaincu. Mais ce n’est là qu’une manière populaire d’exprimer la vérité que nous venons d’admettre, à savoir que les sentiments ont, dans de nombreux cas, une grande influence sur la détermination de notre foi. Mais, comme nous venons de le remarquer, un homme peut être contraint de croire contre sa volonté. Il peut lutter contre la conviction ; Il peut décider qu’il ne croira pas, et pourtant la conviction peut lui être imposée. Napoléon, à la bataille de Waterloo, apprend que Grouchy approche. Il le croit volontiers. Bientôt, le bruit lui parvient que les colonnes qui avancent sont des Prussiens. Cela, il ne le croira pas. Bientôt, cependant, alors que les courriers confirment les uns après les autres le fait importun, il est forcé d’y croire. Il n’est donc pas vrai que dans la foi en tant que foi, il y ait toujours, comme le dit Thomas d’Aquin, une élection « voluntarie dcclinans in unam partem magis quam in alteram ». Il y a une autre expérience fréquente. Nous entendons souvent des hommes dire qu’ils donneraient le monde s’ils pouvaient croire. Grotius mourant dit qu’il donnerait tout son savoir pour la foi simple de son serviteur illettré. סייד dire à un homme qu’il peut croire s’il le veut, c’est contredire sa conscience. Il essaie d’y croire. Il prie avec ferveur pour la foi ; mais il ne peut pas l’exercer. Il est vrai, en ce qui concerne les le pécheur par rapport à l’Évangile, que cette incapacité de croire provient de l’état de son esprit. Mais cet état d’esprit se trouve au-dessous de la volonté. Elle ne peut être déterminée ou modifiée par l’exercice d’un pouvoir volontaire. Pour ces raisons, la définition de la foi, qu’elle soit générique ou religieuse, en tant qu’assentiment volontaire à la vérité, doit être considérée comme insatisfaisante.
Définitions fondées sur l’objet de la foi.
Les définitions précédentes sont toutes fondées sur la nature subjective supposée de la foi. La définition suivante est d’un autre genre. Elle est fondée sur la nature de son objet. On dit que la foi est la persuasion de la vérité des choses qu’on ne voit pas. Il s’agit d’une définition très ancienne et familière. « Quid est fides, demande Augustin 1, nisi credere quod non vides. » Et Lombard 2 dit : « Fides est virtue qua creduntur quæ non videntur. » C’est pourquoi on dit que la foi est engloutie dans la vision ; et l’un est contrasté avec l’autre ; comme quand l’Apôtre dit : « Nous marchons par la foi, non par la vue. » Et dans l’épître aux Hébreux, onzième chapitre, tous les objets de la foi, sous l’aspect sous lequel elle est considérée dans ce chapitre, sont compris sous les catégories de τά ελτπΑψενα et τά où βλιπόμενα ., « les choses qu’on espère et les choses qu’on ne voit pas. » Ce dernier comprend le premier. « Nous espérons, dit l’Apôtre, que nous ne voyons pas. » (Romains viii. 25.) Le mot vue, sous ce rapport, peut être pris dans trois sens. D’abord, au sens littéral. On ne dit pas de nous que nous croyons ce que nous voyons de nos yeux. Ce que nous voyons, nous savons que c’est vrai. Nous croyons que la planète Saturne est entourée d’une ceinture, et que Jupiter a quatre satellites, sur le témoignage unanime des astronomes. Mais si nous regardons à travers un télescope et voyons la ceinture de l’un et les satellites de l’autre, notre foi passe à la connaissance. Nous croyons qu’il y a une ville telle que Rome, et qu’elle contient le Colisée, l’arc de Trajan et d’autres monuments de l’antiquité. Si nous visitons cette ville et voyons ces choses par nous-mêmes, notre foi devient connaissance. La conviction n’est pas plus forte dans un cas que dans l’autre. Nous sommes tout aussi sûrs qu’il y a une telle ville avant de l’avoir vue, comme si nous y étions allés cent fois. Mais la condamnation est d’un autre ordre. Deuxièmement, on dit que l’esprit voit quand il perçoit un objet de pensée comme étant vrai dans sa propre lumière, ou par son propre rayonnement. Cette vision mentale peut être immédiate ou médiate, soit intuitive, soit par le biais d’un processus de preuve. Un enfant peut croire que les angles d’un triangle sont égaux à deux angles droits, sur l’autorité de son enseignant. Lorsqu’il comprend la démonstration de cette proposition, sa foi devient connaissance. Il voit que c’est vrai. Les objets de la perception sensorielle, les objets de l’intuition et ce que nous reconnaissons comme vrai dans un processus de preuve, ne sont pas, selon cette définition du terme, des objets de foi. Nous savons que ce que nous voyons est vrai ; Nous croyons quand nous reconnaissons comme vrai ce que nous ne voyons pas. Il est vrai que la même chose peut être un objet de foi et un objet de connaissance, mais pas en même temps. Nous pouvons reconnaître comme vraie l’existence de Dieu, ou l’immortalité de l’âme, parce que les propositions : « Dieu est », « l’âme est immortelle », sont susceptibles d’être prouvées. Les arguments à l’appui de ces propositions peuvent satisfaire complètement notre esprit. Mais ce sont des vérités de révélation qu’il faut croire sur l’autorité de Dieu. Ces états d’esprit, que nous appelons connaissance et foi, ne sont pas identiques, ils ne coexistent pas non plus strictement. L’effet produit par la démonstration est une chose. L’effet produit par le témoignage de la parole de Dieu est une autre chose. Dans les deux cas, il s’agit d’une persuasion de la vérité. Mais cette persuasion est de sa nature différente dans un cas de ce qu’elle est dans l’autre, car elle repose sur des motifs différents. Quand les arguments sont devant l’esprit, la conviction qu’ils produisent est la connaissance. Quand le témoignage de Dieu est devant l’esprit, la conviction qu’il produit est la foi. À ce sujet, Thomas d’Aquin dit :1 « Necessarium est honiini accipere per moduin fidei non solum ea, quæ sunt supra rationem : sed etiam ea, quæ per rationem cognosci possunt. Et hoc propter tria, Primo quidem, ut citius homo ad veritatis divinæ cognitionem perveniat..... Secundo, ut cognitio Dei sit communion Multi enim in studio sciential proficere non possunt..... Tertio modo propter certitudinem. Ratio enim humana in rebus divinis est multnm deficiens. »
1 Dans Joannïs Evangelium Tractatus, XL. 9 ; TKorÂ־s, édit. Bénédictines, Paris, 1837, t. III. p. 2088 b.
2 Liber Sententiarum, in. xxiii. B., édit. 1472 ( ?).
1 Summa, n. ii. quæst. ii. art. 4, édit. Cologne, 1630, pp. C b, 7 a, de la troisième série.
Troisièmement, sous les « choses invisibles », certains incluraient toutes les choses qui ne sont pas présentes à l’esprit. Une distinction est faite entre les savoirs représentatifs et les savoirs représentatifs. Dans le premier cas, l’objet est présent à ce moment-là ; Nous le percevons, nous en sommes conscients. Dans la connaissance représentative, il y a un objet maintenant présent, représentant un objet absent. Ainsi nous avons la conception d’une personne ou d’une chose. Cette conception est présente, mais la chose représentée est absente. C’est vrai. pas devant l’esprit. Il appartient à la catégorie des choses invisibles. La conception qui est présente est l’objet de la connaissance ; La chose représentée est un objet de foi. C’est-à-dire que nous savons que nous avons la conception ; Nous croyons que la chose qu’elle représente, existe ou a existé. Si nous visitons un endroit particulier alors que nous sommes présents à nos sens, nous savons qu’il Existe; Lorsque nous nous en éloignons et que nous en formons une idée ou une conception, c’est-à-dire lorsque nous nous en souvenons par un effort de mémoire, alors nous croyons à son existence. « Chaque fois que nous avons dépassé la connaissance présentative, et que nous sommes assurés de la réalité d’un objet absent, il y a la foi... est entré en tant qu’élément.»1
1 McCosh , Intuitions de l’esprit, partie II, ch. 1, édit. New York, 18S0, p. 197.
Sir William Hamilton 2 dit : « À proprement parler, nous ne connaissons que le réel et le présent, et toute connaissance réelle est une connaissance immédiate. Ce que l’on dit être connu médiatement, n’est, en vérité, pas connu pour être, mais seulement cru être. Ceci, remarquons-le en passant, s’appliquerait à toutes les propositions d’Euclide. Car elles sont « médiatement connues », c’est-à-dire qu’elles sont vues comme vraies au moyen d’un processus de preuve. Parlant de la mémoire, Hamilton dit : « Ce n’est pas du tout une connaissance du passé ; mais une connaissance du présent et une croyance du passé. « On nous dit, » selon le Dr McCosh, « se connaître soi-même, et connaître les objets présentés aux sens et les représentations de l’esprit (toujours cependant comme des présentations) ; mais de croire à des objets que nous avons vus dans le passé, mais qui ne sont pas présents maintenant, et à des objets que nous n’avons jamais vus, et tout particulièrement à des objets que nous ne pourrons jamais connaître pleinement, comme un Dieu infini.» 3
2 Conférences sur la métaphysique et la logique, t. I. « Métaphysique », lect. xii. sub fin., édit. Boston, 1859, j»p. 152, 153.
3 intuitions de l’esprit, p. 198.
Objections à cette définition.
Selon ce point de vue, nous savons ce qui est présent à l’esprit et croyons ce qui est absent. La première objection à cette représentation est l’ambiguïté des mots présents et absents tels qu’ils sont ainsi utilisés. Quand un objet est-il présent ? Et quand est-il absent ? Il est facile de répondre à cette question lorsque l’objet est quelque chose de matériel ou un événement extérieur. De tels objets sont présents ( » præ sensibus « ) lorsqu’ils affectent les sens ; et absents quand ils ne le font pas. Une ville ou un bâtiment est présent quand on le voit ; absent, lorsque nous quittons l’endroit où il est, et que nous nous souvenons de l’image de celui-ci. Mais qu’en est-il des propositions ? La Bible dit que tous les hommes sont pécheurs. La vérité ainsi annoncée est présente à l’esprit.
Nous ne le savons pas. Nous ne pouvons pas le prouver. Mais nous croyons cela sur l’autorité de Dieu. Les Écritures enseignent que Christ est mort en rançon pour beaucoup. Ici, non seulement le fait historique qu’il est mort est annoncé, mais le but pour lequel il est mort. Ici, amiin, nous avons une vérité présente à l’esprit, qui est un objet de foi.
La seconde objection est impliquée dans la première. Les termes présent et absent ne sont pas seulement ambigus à cet égard, mais il n’est pas vrai, comme nous venons de le dire, qu’un objet doive être absent pour être un objet de foi. La différence, c’est-à-dire entre la connaissance et la foi, ne se trouve pas dans la présence ou l’absence de leurs objets. Nous pouvons savoir ce qui est absent, et nous pouvons croire ce qui est présent.
La troisième objection est que la conviction que nous avons de la réalité ou de la vérité de ce dont nous nous souvenons distinctement est la connaissance, et non pas distinctement la foi, à moins que nous ne choisissions d’établir une définition nouvelle et arbitraire du mot connaissance. Nous savons ce qui est perçu par les sens ; Nous savons ce que l’esprit voit, soit intuitivement ou discursivement, est et doit être vraie ; et nous savons distinctement ce dont nous nous souvenons. Dans tous ces cas, la condamnation est de même nature. En tout, elle se résout en confiance dans la véracité de la conscience. Nous sommes conscients que nous percevons des objets sensibles. Nous sommes conscients que nous connaissons certaines vérités. Nous sommes conscients que nous nous souvenons de certains événements. Dans tous ces cas, cette conscience implique la conviction de la réalité ou de la vérité de ce que l’on voit, de ce que l’on appréhende mentalement ou de ce dont on se souvient. Cette conviction est, ou peut être, aussi forte dans l’un ou l’autre de ces cas que dans l’un ou l’autre ; et elle repose en tous en fin de compte sur le même terrain. Il n’y a donc aucune raison d’appeler l’une connaissance et l’autre croyance. La mémoire est autant une connaissance du passé, que d’autres formes de conscience sont une connaissance du présent.
La quatrième objection, c’est que nier que la mémoire nous donne la connaissance du passé, c’est contraire à l’usage établi. Il est vrai qu’on dit de nous que nous croyons que nous nous souvenons de tels ou tels événements, quand nous en sommes incertains. Mais c’est parce que, dans l’un des sens établis du mot, la croyance exprime un degré de certitude inférieur à celui de la connaissance. Mais les hommes ne parlent jamais de croire dans leur expérience des événements passés dont ils sont absolument certains. Nous savons que nous étions en vie hier. Aucun homme ne dit qu’il croit avoir vu son père ou sa mère ou un ami intime, qu’il connaissait depuis des années. Choses dont on se souvient distinctement sont connus, et pas seulement crus.
La définition qui fait de la foi la persuasion de la vérité des choses qu’on ne voit pas, est cependant correcte, si l’on entend par « choses non vues » des choses qui ne sont ni des objets des sens, ni de l’intuition, ni de la preuve démonstrative. Mais il ne semble pas correct d’inclure parmi les « choses invisibles », qui sont les objets spéciaux de la foi, les choses dont on se souvient et qui ne sont pas présentes à l’esprit. Cette définition de la foi, bien qu’elle soit correcte en la limitant quant à ses objets aux choses qu’on ne voit pas, dans le sens que nous venons d’indiquer, est cependant défectueuse en ce qu’elle n’assigne pas le fondement de notre conviction de leur vérité. Pourquoi croyons-nous que des choses que nous n’avons jamais vues et que nous ne pouvons pas prouver ? Différentes réponses sont données à cette question ; et, par conséquent, la définition qui n’y répond pas, doit être considérée comme défectueuse.
Définitions fondées sur la nature de l’évidence sur laquelle repose la foi.
Certaines définitions de la foi, comme nous l’avons vu, sont fondées sur sa nature subjective, d’autres sur ses objets. En plus de ceux-ci, il y en a d’autres qui cherchent son caractère distinctif dans le terrain sur lequel repose la conviction qu’il comprend. La première est celle qui fait que la foi est une conviction ou une persuasion de la vérité fondée sur le sentiment. Celle-ci est considérée par beaucoup comme la plus généralement reçue. Hase 1 dit : « Toute langue cultivée a un mot pour désigner cette forme de conviction qui, en opposition à l’évidence et à la démontrabilité, repose sur des bases morales et émotionnelles. » Ce mot en grec est πίστις ; en anglais « faith ». Dans son « Hutterus Redivivus »2, il dit : « L’idée commune de la foi est : unmittelbar Fiirwahrhalten, ohne Vermittelung eines Schlussbeweises, durch Neigung mid Bediirfniss », c’est-à-dire « Une persuasion de la vérité, sans l’intervention de l’argumentation, déterminée par l’inclination et la nécessité intérieure ». Il cite la définition de la foi de Twesten, comme « une persuasion ou la conviction de la vérité produite par le sentiment ; » et celle de Nitzsch, donnée ci-dessus, « l’unité de la connaissance et du sentiment ». Strauss3 dit : « La manière dont un homme s’approprie le contenu d’une révélation, l’assentiment intérieur qu’il donne au contenu des Écritures et à la doctrine de l’Église, non pas à cause d’une recherche critique ou philosophique, mais souvent en opposition avec eux, dominé par un sentiment que l’Église évangélique appelle le témoignage de l’Esprit, mais qui n’est en fait que la perception de l’identité de sa propre vie religieuse avec celle décrite dans l’Écriture et qui prévaut dans l’Église, cet assentiment déterminé par le sentiment, dans le langage ecclésiastique, s’appelle la foi. Il dit encore1 : « L’homme pieux reçoit la vérité religieuse parce qu’il en sent la réalité et parce qu’elle satisfait ses besoins religieux », et c’est pourquoi il ajoute : « Aucune religion n’a jamais été propagée au moyen d’arguments adressés à l’entendement, ou de preuves historiques ou philosophiques, et cela est indéniablement vrai du christianisme. Tout prédicateur d’une religion nouvelle suppose chez ceux à qui il la présente une nécessité religieuse insatisfaite, et tout ce qu’il a à faire, c’est de leur faire sentir que la religion qu’il propose répond à cette nécessité. Celse, nous dit-il, en fit un sujet de reproche aux chrétiens de croire aveuglément ; qu’ils ne pouvaient justifier les doctrines qu’ils tenaient à la barre de la raison. À cela, Origène répondit que cela n’était vrai que du peuple ; qu’avec les instruits, la foi s’est élevée au rang de connaissance, et le christianisme s’est transformé en philosophie. L’Église était divisée entre les croyants et les sachants. La relation entre la foi et la connaissance, entre la religion et la philosophie, a fait l’objet de controverses depuis ce jour jusqu’à aujourd’hui. Quelques-uns ont pris le parti d’Origène et de l’école d’Alexandrie en général, qu’il incombe aux chrétiens instruits de justifier leurs doctrines à la barre de la raison, et de prouver qu’elles sont vraies sur des bases philosophiques. D’autres soutenaient que les vérités de la révélation étaient, au moins dans beaucoup de cas, d’un genre qui n’admettait pas de démonstration philosophique, bien qu’elles ne fussent pas pour autant considérées comme contraires à la raison, mais seulement comme dépassant sa sphère. D’autres, encore, ont enseigné qu’il y a un conflit direct entre la foi et la connaissance ; que ce que les croyants Ce que le chrétien tient pour vrai, peut être démontré par le philosophe comme étant faux. C’est la doctrine de Strauss lui-même, et, par conséquent, il conclut sa longue discussion sur ce point en disant : « Le croyant doit laisser le connaissant suivre son propre chemin en paix, tout comme le connaissant le fait pour le croyant. Nous leur laissons leur foi, qu’ils nous laissent notre philosophie..... Il y a eu assez de fausses tentatives iréniques. Désormais, seule la séparation de principes opposés peut conduire à quelque bien.» 2 À la même page, il admet la grande vérité : « Que la nature humaine a une excellente caractéristique : ce que l’homme ressent est pour lui une nécessité spirituelle, il ne permet à personne de le lui enlever. »
1 Dogmatik, 3e édit. Leipzig, 1842, p. 307.
2 Sixième édition. Leipzig, 1845, p. 4.
3 Dogmatik, § 20, édit. Tübingen et Stuttgart, 1840, t. I, p. 282.
1 Dogmatik, édit. Tiibingen et Stuttgart, 1840, t. I, p. 298.
2 Idem. , p. 356.
Remarques sur cette définition.
En ce qui concerne la définition de la foi qui la rend Une conviction fondée sur le sentiment, on peut le remarquer,
Premièrement, qu’il y a des formes de foi dont cela n’est pas vrai. Comme nous l’avons fait remarquer plus haut, lorsqu’on considère la définition apparentée de la foi comme un assentiment volontaire de l’esprit, il n’en est pas de même de la foi en général. Nous croyons souvent à contrecœur, et ce qui répugne tout à fait à nos sentiments.
Deuxièmement, ce n’est pas vrai même de la foi religieuse, ou de la foi qui a pour objet la vérité religieuse. Car il peut y avoir une foi sans amour, c’est-à-dire une foi spéculative ou morte.
Troisièmement, ce n’est pas le cas de beaucoup d’exercices de la foi chez les hommes de bien. Isaac croyait que Jacob serait préféré à Esaü, cruellement contre sa volonté. Jacob croyait que ses descendants seraient esclaves en Égypte. Les prophètes croyaient aux soixante-dix ans de captivité de leurs compatriotes. Les apôtres croyaient qu’une grande apostasie dans l’Église devait se produire entre leur âge et la seconde venue du Seigneur. La réponse de Thomas d’Aquin à cela est que l’homme est contraint par sa volonté (c’est-à-dire ses sentiments) de croire aux Écritures, et alors il croit que toutes les Écritures contiennent. De sorte que sa foi, même dans la classe des vérités dont nous venons de parler, repose en définitive sur le sentiment. Mais cette réponse n’est pas satisfaisante. Car si l’on pose la question : Pourquoi les prophètes ont-ils cru à la captivité, et les apôtres à l’apostasie ? la réponse serait, non pas de l’effet de ces vérités sur leurs sentiments, mais de l’autorité de Dieu. Et si l’on demande encore : Pourquoi ont-ils cru au témoignage de Dieu ? la réponse est peut-être parce que le témoignage de Dieu est porteur de conviction. Il peut faire entendre sa voix même aux sourds ou aux morts. Ou, la réponse peut être, parce qu’ils étaient des hommes bons. Mais dans un cas comme dans l’autre, la question nous transporte au-delà du terrain de leur foi. Ils croient parce que Dieu a révélé les faits mentionnés. Leur bonté les a peut-être rendus vulnérables à la preuve fournie, mais elle ne constituait pas cette preuve.
Quatrièmement, il est admis que l’exercice de la foi salvifique , c’est-à-dire de cette foi qui est le fruit de l’Esprit et le produit de la régénération, s’accompagne d’un sentiment approprié à son objet. Mais cela dépend de la nature de l’objet. Si l’on en croit un bon rapport, l’effet est la joie ; S’il s’agit d’un mauvais rapport, l’effet est le chagrin. La perception de la beauté produit le plaisir ; d’excellence morale, une lueur d’approbation ; des choses spirituelles, dans de nombreux cas, une joie indicible et pleine de gloire.
Cinquièmement, il est également vrai que toutes ces vérités, si ce n’est toutes les vérités, ont une lumière qui se manifeste d’elle-même, et qui ne peut être appréhendée sans la conviction qu’elle est réellement ce qu’elle est appréhendée comme étant . On peut aussi admettre qu’en ce qui concerne la conscience des vrais croyants, l’évidence de la vérité est la vérité elle-même ; En d’autres termes, que le fondement de leur foi est, en un sens, subjectif. Ils voient la gloire de Dieu dans le visage de Jésus-Christ, et croient donc qu’Il est Dieu manifesté dans la chair. Ils voient que les représentations faites par les Écritures de l’état de pécheur, de la culpabilité et de l’impuissance de l’homme déchu correspondent à leur propre expérience intérieure, et ils sont donc contraints de recevoir ces représentations comme vraies. Ils voient que le plan de salut proposé dans la Bible convient à leurs besoins, à leurs jugements moraux et à leurs aspirations religieuses, ils l’embrassent. Tout cela est vrai, mais cela ne prouve pas que la foi soit une conviction fondée sur le sentiment ; car il y a beaucoup de formes de foi qui, de l’aveu même, ne sont pas fondées sur le sentiment ; Et même dans le cas des vrais croyants, leurs sentiments ne sont pas le fondement ultime de la foi. Ils s’en remettent toujours à l’autorité de Dieu, qui est considéré comme l’auteur de ces sentiments, par lesquels le témoignage de l’Esprit est révélé à la conscience. « Nous pouvons être émus et induits,» dit la «Confession de Westminster,»1 par le témoignage de l’Église à une haute et révérende estime de l’Écriture sainte ; et le caractère céleste de la matière, l’efficacité de la doctrine, la majesté du style, le consentement de toutes les parties, la portée du tout (qui est de donner toute gloire à Dieu), la pleine découverte qu’il fait de l’unique voie du salut de l’homme, les nombreuses autres excellences incomparables, et l’entière perfection de celle-ci, sont des arguments par lesquels elle prouve abondamment qu’elle est la parole de Dieu ; néanmoins, notre pleine persuasion et assurance de la vérité infaillible et de son autorité divine provient de l’œuvre intérieure du Saint-Esprit, témoignant par et avec la parole dans nos cœurs.» Le fondement ultime de la foi est donc le témoignage de l’Esprit.
1 Chapitre i. § 5.
La foi est une conviction de la vérité fondée sur le témoignage.
La seule autre définition de la foi à considérer, c’est celle qui en fait une conviction de vérité fondée sur le témoignage. Nous avons déjà vu qu’Augustin dit : « Nous savons ce qui repose sur la raison ; nous croyons qu’Avhat repose sur l’autorité. Une définition à laquelle Sir William Hamilton donne son adhésion. 2 Dans l’école d’Alexandrie aussi, le πάπ-ις chrétien, était Auctoritiits-Glaube, une foi fondée sur l’autorité, opposée, d’une part, aux païens έπιστήμη, et d’autre part au chrétien γι׳ώσ :5, ou explication philosophique et preuve des vérités crues. Parmi les scolastiques aussi, c’était l’idée dominante. Quand ils définissaient la foi comme la persuasion de choses qu’on ne voit pas, ils voulaient dire des choses que nous recevons comme vraies par autorité, et non parce que nous les connaissons ou que nous pouvons les prouver. C’est pourquoi il a été On le dit sans cesse, la foi est humaine quand elle repose sur le témoignage des hommes ; divin lorsqu’il repose sur le témoignage de Dieu. Thomas d’Aquin1 dit : « Non fides, de qua loquimur, assentit alicui, nisi quia est a Deo revelatum. » « La foi, dont nous parlons, n’acquiesce à rien si ce n’est parce qu’elle est révélée par Dieu. » Nous croyons sur l’autorité de Dieu, et non pas parce que nous voyons, savons ou sentons qu’une chose est vraie. C’est là le sens de l’enseignement de la grande masse des théologiens scolastiques. Telle était aussi la doctrine des réformateurs et des théologiens de l’époque suivante, luthériens et réformés. Parlant de l’assentiment, qu’il considère comme le second acte ou élément de la foi, Thomas d’Aquin dit : « Hie actus fidei non rerum evidentia aut causarum et proprietatum notitia, sed Dei dicentis infallibili auctoritate. » Turrettin 2 dit : « Non quæritur, An fides sit scientia, quæ habeat evidential !! : Sic enim distinguitur a scientia, quæ habet assensum certum et evidentem, qui nititur ratione clara et certa, et ab opinione, quæ nititur ratione tantum probabili ; ubi fides notât assensum certum quidem, sed inevidentem, qui non ratione, sed testimonio divino nititur. De Moor 3 dit : « Fides subjectiva est persuasio de veritatc rei, alterius testimonio nixa, quomodo fides ilia generatim descripta, scientiæ et conjecturæ opponitur..... Dividitur .... in fidem divinam, quæ nititur testimonio divino, et humanam, quæ fundata est in testimonio humano fide accepto. Owen,4 « Toute foi est un assentiment sur le témoignage ; et la foi divine est un assentiment à un témoignage divin. John Howe5 demande : « Pourquoi est-ce que je crois que Jésus est le Christ ? Parce que l’Éternel Dieu a rendu témoignage de Lui qu’Il en est ainsi. « La croyance d’un homme ne sert à rien sans cela, qu’il y a un témoignage divin. » Et encore 6 : « Je crois une telle chose, telle que Dieu la révèle, parce qu’elle m’est rapportée par l’autorité de Dieu. » L’évêque Pearson 1 dit : « Quand quelque chose qui nous est proposé n’est ni apparent à nos sens, ni évident à notre entendement, en soi, et qu’il ne peut certainement pas être recueilli à partir d’un lien clair et nécessaire avec la cause d’où il procède, ou les effets qu’il produit naturellement, ni qu’il n’est pris sur la base d’arguments réels ou d’une référence à d’autres vérités reconnues, et cependant elle nous paraît vraie, non par une manifestation, mais par une attestation de la vérité, et nous pousse ainsi à donner notre assentiment non par elle-même, mais en vertu du témoignage qui lui est rendu ; on dit à juste titre que c’est crédible ; et d’y consentir, sur une telle crédibilité, c’est dans la notion correcte de foi ou de croyance.
2 Voir page 46.
1 Summa, n. ii. quacst. i. art. 1, édit. Cologne, 1640, p. 2, a, de la troisième série.
2 Institutio, xv. ix. 3, édit. Édimbourg, 1847, vol. II. p. 497.
8 Commentarius in Johannis Marckii Compendium, cap. xxii. § 4, Leyde, 1766, t. IV, p. 299.
4 Doctrine de la justification, ch. i. édit. Philadelphie, 1841, p. 84.
5 ICoris, vol. II, p. 885, édition Carter, New York, 1869.
6 Idem. , p. 1170.
1 Exposition de la. Creed, 7e édit. Londres, 1701, p. 3.
Ce point de vue est presque universellement partagé.
Ce point de vue sur la nature de la foi est presque universellement reçu, non seulement par les théologiens, mais aussi par les philosophes et la masse des chrétiens. La grande question a toujours été de savoir si nous devons recevoir la vérité sur la base de l’autorité, ou seulement sur la base de preuves rationnelles. Leibnitz commence son Discours de la Conformité de la Foi avec la Raison, en disant : « Je suppose, que deux vérités ne sauroient se contredire ; que l’objet de la foi est la vérité que Dieu a révélée d’une manière extraordinaire, et que la raison est l’enchaînement des vérités, mais particulièrement (lorsqu’elle est comparés avec la foi) de celles où l’esprit humain peut atteindre naturellement, sans être aidé dos lumières de la foi. »2
2 Théodicée, Œuvres, édit. Berlin, 1810, 1839, t. II, p. 479.
On a déjà admis que l’élément essentiel de la foi est la confiance, et par conséquent, dans le sens général du mot, croire, c’est faire confiance. La foi est la confiance de l’esprit en quelque chose de vrai et digne de confiance. Dans ce sens large du mot, il importe peu quels peuvent être les objets ou les motifs de cette confiance. Le mot, cependant, est couramment utilisé en référence à des vérités que nous recevons sur la foi sans pouvoir les prouver. C’est ainsi qu’on dit que nous croyons à notre propre existence, à la réalité du monde extérieur et à toutes les vérités premières de la raison. Celles-ci, d’un commun accord, sont appelées croyances. La raison commence par croire, c’est-à-dire par prendre confiance à ce qu’elle ne comprend ni ne prouve. Encore une fois, il a été admis que le mot croyance est souvent et légitimement employé pour exprimer un degré de certitude inférieur à la connaissance et plus fort que la probabilité ; Comme quand nous disons, nous ne sommes pas sûrs, mais nous croyons qu’une certaine chose s’est produite.
Mais dans le sens strict et spécial du mot, comme séparé de la connaissance ou de l’opinion, la foi signifie la croyance en des choses qu’on ne voit pas, sur la base du témoignage. Par témoignage, cependant, on n’entend pas simplement l’affirmation d’un témoin intelligent. Il y a d’autres méthodes que l’affirmation pour témoigner. Un sceau est une forme de témoignage ; Il en va de même pour un signe. Il en est de même de tout ce qui donne en gage l’autorité de l’attestant de la vérité à établir. Quand Élie déclara que l’Éternel était Dieu, et que Baal était un mensonge, il dit : « Le Dieu qui répond par le feu, qu’il soit Dieu. La descente du feu était le témoignage de Dieu de la véracité de la déclaration du prophète. Ainsi, dans le Nouveau Testament, il est dit que Dieu a rendu témoignage à la vérité de l’Évangile par des signes, des prodiges, divers miracles et des dons du Saint-Esprit (Héb. ii. 4) ; et il est dit que l’Esprit de Dieu rend témoignage à nos esprits que nous sommes enfants de Dieu (Rom. viii, 16). Le mot dans ces cas est μαρτνρεω, témoigner. Il ne s’agit pas d’un usage laxiste ou abusif du mot témoignage ; car une affirmation n’est témoignage que parce qu’elle donne le serment de l’autorité de celui qui la rend à la vérité. Et par conséquent, tout ce qui promet cette autorité, est aussi véritablement de la nature du témoignage, en tant qu’affirmation. Quand donc on dit que la foi est fondée sur le témoignage, on veut dire qu’elle n’est pas fondée sur le sens, la raison ou le sentiment, mais sur l’autorité de celui par qui elle est authentifiée.
Preuve de l’usage général du mot.
Que tel soit le fondement et le caractère distinctif de la foi, on peut soutenir : — 1. De l’usage général du mot. On dit que nous savons ce que nous voyons ou ce que nous pouvons prouver ; et de croire ce que nous considérons comme vrai sur l’autorité des autres. C’est ce qu’on appelle la foi historique. Cela comprend beaucoup de choses ; tout ce qui est enregistré du passé ; tout ce qui est vrai des réalités présentes, qui n’entrent pas dans le domaine de notre observation personnelle ; tous les faits de la science tels qu’ils sont reçus par les masses ; et presque tout le contenu de la Bible, qu’il s’agisse de l’Ancien ou du Nouveau Testament. Les Écritures sont un récit de l’histoire de la création, de la chute et de la rédemption. L’Ancien Testament est l’histoire des étapes préparatoires de cette rédemption. Le Nouveau Testament est une histoire de l’accomplissement des promesses et des types de l’Ancien dans l’incarnation, la vie, les souffrances, la mort et la résurrection du Fils de Dieu. Quiconque croit à ce récit a apposé sur son sceau que Dieu est vrai et qu’il est un enfant de Dieu.
2. En second lieu, la conscience nous enseigne que telle est la nature de la foi, non seulement quand les faits historiques sont ses objets, mais quand les propositions sont les choses que l’on croit. Les deux sont en effet souvent indissociables. Que Dieu soit le créateur du monde est à la fois un fait et une doctrine. C’est, comme le dit l’Apôtre, une question de foi. Nous croyons sur l’autorité des Écritures, qui déclarent qu'« Au commencement, Dieu créa le ciel et la terre ». Que Dieu ait présenté son Fils comme propitiation pour nos péchés, c’est une doctrine. Elle repose uniquement sur l’autorité de Dieu. Nous le recevons sur la base de son témoignage. Ainsi en est-il de toutes les grandes doctrines de la grâce ; de régénération, de justification, de sanctification et d’une vie future. Comment savons-nous que Dieu acceptera tous ceux qui croient en Christ ? Qui peut connaître les choses de Dieu, si ce n’est l’Esprit de Dieu, et celui à qui l’Esprit les révélera (1 Corinthiens II, 10, 11) ? D’après la nature du cas, « les choses de l’Esprit », les pensées et les desseins de Dieu, ne peuvent être connus que par révélation, et ils ne peuvent être reçus que par l’autorité de Dieu. Ce ne sont des objets ni des sens ni de la raison.
3. C’est l’enseignement uniforme de la Bible que la foi est fondée sur le témoignage ou l’autorité de Dieu.
La première preuve en est le fait que les Écritures nous parviennent sous la forme d’une révélation de choses que nous ne pourrions pas connaître autrement. Les prophètes de l’Ancien Testament étaient des messagers, la bouche de Dieu, pour déclarer ce que le peuple devait croire et ce qu’il devait faire. Le Nouveau Testament s’intitule « Le témoignage de Jésus ». Le Christ est venu, non pas en tant que philosophe, mais en tant que témoin. Il dit à Nicodème : « Nous parlons de ce que nous savons, et nous rendons témoignage que nous avons vu ; et vous ne recevez pas notre témoignage. (Jean, III, 11). « Celui qui vient d’en haut est au-dessus de tout..... Et ce qu’il a vu et entendu, il l’atteste ; et personne ne reçoit son témoignage. Celui qui a reçu son témoignage a mis à son sceau que Dieu est vrai » (versets 31-33). De la même manière, les apôtres ont été témoins. C’est ainsi qu’ils furent ordonnés (Luc, XXIV, 48). Après sa résurrection, et immédiatement avant son ascension, notre Seigneur leur dit : « Vous recevrez une puissance, après que le Saint-Esprit sera venu sur vous, et vous serez mes témoins, tant à Jérusalem, que dans toute la Judée, dans la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre. » (Actes, I, 8). Lorsqu’ils Ils déclarèrent la mort et la résurrection de Christ, comme des faits qu’il fallait croire, et ils dirent : « Nous en sommes témoins » (Actes, II. 32, iii. 15, v. 32). Dans ce dernier passage, les apôtres disent qu’ils étaient témoins non seulement du fait de la résurrection du Christ, mais que Dieu l’avait « exalté » de sa main droite pour être un prince et un sauveur, afin de donner la repentance à Israël et le pardon des péchés. Voir Actes x. 39-43, où il est dit : « Il nous a ordonné de prêcher au peuple, et de rendre témoignage que c’est lui qui a été ordonné par Dieu pour être le juge des vivants et des morts. Rendez-lui témoignage à tous les prophètes, afin que, par son nom, quiconque croit en lui reçoive la rémission de ses péchés.
Le grand reproche qu’on faisait aux Apôtres, surtout dans les villes grecques, c’était qu’ils ne présentaient pas leurs doctrines comme des propositions à prouver ; Ils n’ont même pas énoncé les motifs philosophiques sur lesquels ils reposaient, ni essayé de les soutenir à la barre de la raison. La réponse donnée à cette objection par saint Paul est double : premièrement, que la philosophie, la sagesse des hommes, s’est révélée tout à fait incompétente pour résoudre les grands problèmes de Dieu et de l’univers, du péché et de la rédemption. En fait, ce n’était ni plus ni moins qu’une folie, en ce qui concerne toutes ses spéculations sur les choses de Dieu. Deuxièmement, que les doctrines qu’il enseignait n’étaient pas des vérités de la raison, mais des choses de révélation ; à recevoir non pas sur des bases rationnelles ou philosophiques, mais sur l’autorité de Dieu ; qu’eux, les Apôtres, n’étaient pas des philosophes, mais des témoins ; qu’ils n’argumentaient pas en utilisant les paroles de la sagesse de l’homme, mais qu’ils déclaraient simplement les conseils de Dieu, et que la foi en leurs doctrines ne devait pas reposer sur la sagesse des hommes, mais sur le puissant témoignage de Dieu.
La seconde preuve que les Écritures enseignent que la foi est la réception de la vérité sur la base du témoignage ou de l’autorité de Dieu, c’est que la chose qu’il nous est commandé de faire, c’est de recevoir le témoignage que Dieu a donné de son Fils. C’est cela la foi ; recevoir comme vrai ce que Dieu a témoigné, et parce qu’Il l’a témoigné. « Celui qui ne croit pas en Dieu a fait de lui un menteur ; parce qu’il ne croit pas au témoignage que Dieu a rendu de son Fils. Le grec ici , oi πεπίστευκεν εΙς την μαρτυρίαν ην μεμαρ-τί’ρηκεν ό Θεός περί του υίοί ) αυτοί, « ne croit pas au témoignage que Dieu a rendu au sujet de son Fils ». « Et voici le témoignage (η μαρτυρία') que Dieu nous a donné la vie éternelle, et que cette vie est en son Fils » (1 Jean v. 10, 11). Il pourrait difficilement y avoir une déclaration plus distincte de la doctrine biblique quant à la nature de la foi. Son objet est ce que Dieu a révélé. Son fondement est le témoignage de Dieu. Recevoir ce témoignage, c’est mettre à notre sceau que Dieu est vrai. Le rejeter, c’est faire de Dieu un menteur. Si nous recevons le témoignage des hommes, le témoignage de Dieu est plus grand, car c’est là le témoignage de Dieu qu’il a rendu de son fils.
Tel est l’enseignement constant de l’Écriture. Le motif sur lequel nous sommes autorisés et commandés à croire n’est pas la conformité de la vérité révélée à notre raison, ni son effet sur nos sentiments, ni sa satisfaction des nécessités de notre nature et de notre condition, mais simplement : « Ainsi parle le Seigneur. » Les vérités de la révélation se recommandent à la raison ; ils affectent puissamment et légitimement nos feélings ; ils répondent à toutes les nécessités de notre nature de créatures et de pécheurs ; et ces considérations peuvent nous incliner à croire, fortifier notre foi, nous conduire à la chérir, et la rendre joyeuse et efficace ; mais ils n’en sont pas le fondement. Nous croyons au témoignage ou à l’autorité de Dieu.
On objecte à ce point de vue que nous croyons que la Bible est la Parole de Dieu pour une autre raison que le témoignage. L’accomplissement des prophéties, les miracles de ses auteurs, son contenu et les effets qu’elle produit, sont des raisons rationnelles de croire qu’elle vient de Dieu. A cette objection, on peut répondre deux fois : 1° que les événements surnaturels, tels que les prophéties et les miracles, sont quelques-unes des formes sous lesquelles le témoignage divin est donné. Paul dit que Dieu rend « témoignage par des signes et des prodiges » (Hébreux ii. 4). Et, deuxièmement, que le but prochain de ces manifestations de prévoyance et de puissance surnaturelles était d’authentifier la mission divine des messagers de Dieu. Cela étant établi, le peuple était appelé à recevoir son message et à croire en l’autorité de Dieu, par qui il était envoyé.
La troisième preuve, que les Écritures enseignent que la foi est une réception de la vérité sur la base du témoignage, se trouve dans les exemples et les illustrations de la foi donnés dans les Écritures. Immédiatement après la chute, la promesse fut faite à nos premiers parents que la semence de la femme écraserait la tête du serpent. Sur quel fondement possible la foi en cette promesse pourrait-elle reposer, si ce n’est sur l’autorité de Dieu ? Lorsque Noé fut averti par Dieu de l’arrivée du déluge, et qu’il reçut l’ordre de préparer l’arche, il crut, non pas parce qu’il voyait les signes du déluge qui approchait, non parce que son jugement moral l’assurait qu’un Dieu juste vengerait ainsi sa loi violée ; mais simplement sur le témoignage de Dieu. Ainsi, lorsque Dieu promit à Abraham la possession du pays de Canaan, que lui, vieillard sans enfants, deviendrait le père d’un grand nombre de nations, afin que, par sa postérité, toutes les nations de la terre fussent bénies, sa foi ne pouvait avoir d’autre fondement que l’autorité de Dieu. Il en est de même de toutes les illustrations de foi données par l’apôtre dans le onzième chapitre de son épître aux Hébreux. Il en va de même pour toute la Bible. Nous n’avons aucun fondement pour notre foi dans un monde spirituel, dans le ciel et l’enfer décrits dans les Écritures, dans les doctrines de la rédemption, dans la sécurité et le triomphe final de l’Église autre que le témoignage de Dieu. Si la foi ne repose pas sur le témoignage, elle n’a rien sur quoi s’appuyer. Paul nous dit que tout l’Évangile repose sur le fait de la résurrection du Christ d’entre les morts. Si Christ n’est pas ressuscité, notre foi est vaine, et nous sommes encore dans nos péchés. Mais notre assurance que Christ est ressuscité le troisième jour repose uniquement sur le témoignage que Dieu a donné de diverses manières à ce fait.
C’est un point d’une grande importance pratique. Si la foi, ou notre persuasion des vérités de la Bible, repose sur des bases philosophiques, alors la porte est ouverte au rationalisme ; S’il repose sur le sentiment, alors il est ouvert au mysticisme. Le seul fondement sûr et le seul fondement satisfaisant est le témoignage de Dieu, qui ne peut pas se tromper et qui ne trompera pas.
La foi peut donc être définie comme la persuasion de la vérité fondée sur le témoignage. La foi du chrétien est la persuasion de la vérité des faits et des doctrines consignés dans les Écritures sur le témoignage de Dieu.
§ 3. Différentes sortes de foi.
Bien que la définition donnée ci-dessus soit acceptée, il faut qu’il y a différentes sortes de foi. En d’autres termes, l’état d’esprit que le mot désigne est très différent dans un cas de ce qu’il est dans d’autres. Cette différence provient en partie de la nature de ses objets, et en partie de la nature ou de la forme du témoignage sur lequel elle est fondée. La foi en un fait historique ou en une vérité spéculative est une chose ; la foi en la vérité esthétique autre chose ; la foi en la vérité morale autre chose ; La foi en la vérité spirituelle, et surtout la foi en la promesse du salut, nous a fait autre chose. C’est-à-dire l’état d’esprit La foi dénommée est très différente dans l’un ou l’autre de ces cas de ce qu’elle est dans les autres. Encore une fois, le témoignage que Dieu rend à la vérité est de différentes sortes. Sous une forme, il s’adresse particulièrement à l’entendement ; dans un autre à la conscience ; dans un autre à notre nature régénérée. C’est la cause de la différence entre la foi spéculative, la foi temporaire et la foi qui sauve.
Il y a beaucoup d’hommes qui croient que la Bible est la Parole de Dieu ; qui reçoivent tout ce qu’elle enseigne ; et qui sont parfaitement orthodoxes dans leur croyance doctrinale. Si on leur demande pourquoi ils croient, ils peuvent être à court de réponse. La réflexion peut leur permettre de dire qu’ils croient parce que les autres croient. Ils reçoivent leur foi par héritage. Dès leur plus jeune âge, on leur a appris à croire ainsi. L’Église à laquelle ils appartiennent inculque cette foi, et elle leur est enjointe comme vraie et nécessaire. D’autres, plus cultivés, diront peut-être que l’évidence de l’origine divine de la Bible, à la fois externe et interne, satisfait leur esprit et produit une conviction rationnelle que les Écritures sont une révélation de Dieu, et qu’ils en reçoivent le contenu sur son propre autorité. Une telle foi, l’expérience nous l’enseigne, est parfaitement compatible avec une vie mondaine ou mauvaise. C’est ce que la Bible appelle une foi morte.
Encore une fois, rien n’est plus commun que de voir l’Évangile produire une impression passagère, plus ou moins profonde et durable. Ceux qui sont ainsi impressionnés y croient. Mais, n’ayant pas de racine en eux-mêmes, tôt ou tard ils tombent. C’est aussi une expérience commune que des hommes tout à fait indifférents ou même sceptiques, dans les moments de danger ou à l’approche de la mort, sont profondément convaincus de la certitude de ces vérités religieuses connues auparavant, mais jusqu’ici ignorées ou rejetées. Cette foi passagère est due à la grâce commune ; c’est-à-dire aux influences de l’Esprit, communes dans une mesure plus ou moins grande à tous les hommes, qui agissent sur l’âme sans la renouveler, et qui révèlent la vérité à la conscience et la font produire la conviction.
Cette foi qui assure la vie éternelle ; qui nous unit au Christ comme membres vivants de son corps ; qui fait de nous les fils de Dieu ; qui nous intéresse dans tous les bienfaits de la rédemption ; qui agit par l’amour, et qui est fécond en bonnes œuvres ; est fondée, non sur l’évidence extérieure ou morale de la vérité, mais sur le témoignage de l’Esprit avec et par la vérité à l’âme renouvelée.
Qu’entend-on par le témoignage de l’Esprit.
Il est nécessaire, avant d’aller plus loin, de déterminer ce que l’on entend par le témoignage de l’Esprit, qui est dit être le fondement de la foi qui sauve.
Dieu, ou l’Esprit de Dieu, témoigne de la vérité des Écritures et des doctrines qu’elles contiennent. Ce témoignage, comme on l’a vu, est en partie extérieur, consistant en prophéties et en miracles, en partie dans la nature des vérités elles-mêmes en ce qui concerne les éléments intellectuels et moraux de l’âme, et en partie spécial et surnaturel. Les hommes non renouvelés peuvent sentir la puissance des deux premiers types de témoignage, et croire avec une foi soit purement intellectuelle et spéculative, soit avec ce qu’on peut appeler de son fondement, une foi morale, qui n’est que temporaire. La forme spirituelle du témoignage est réservée aux régénérés. C’est, bien sûr, impénétrable. Les opérations de l’Esprit ne se révèlent dans la conscience que par leurs effets. Nous savons que les hommes sont nés de l’Esprit, que l’Esprit habite dans le peuple de Dieu et influence continuellement leurs pensées, leurs sentiments et leurs actions. Mais nous ne le savons que par l’enseignement de la Bible, et non parce que nous sommes conscients de ses opérations. « Le vent souffle où il veut, et tu en entends le bruit, mais tu ne peux pas dire d’où il vient, ni où il va, ainsi est celui qui est né de l’Esprit. » (Jean iii. 8.)
Ce témoignage de l’Esprit n’est pas une affirmation que la Bible est la Parole de Dieu. Ce n’est pas non plus la production d’une conviction aveugle et inintelligente de ce fait. Elle n’est pas, comme c’est le cas avec le témoignage humain, adressée de l’extérieur à l’esprit, mais elle est à l’intérieur de l’esprit lui-même. C’est une influence destinée à produire la foi. On l’appelle un témoignage ou un témoignage parce qu’il est appelé ainsi dans l’Écriture ; et parce qu’il a le caractère essentiel du témoignage, en tant qu’il est le gage de l’autorité de Dieu à l’appui de la vérité.
Les effets de ce témoignage intérieur sont les suivants : (1) Ce que les Écritures appellent le « discernement spirituel ». Cela signifie deux choses : un discernement dû à l’influence de l’Esprit ; et un discernement non seulement de la vérité, mais aussi de la sainteté, de l’excellence et de la gloire des choses discernées. Le mot spirituel, dans ce sens, signifie conforme à la nature de l’Esprit. C’est pourquoi on dit que la loi est spirituelle, c’est-à-dire sainte, juste et bonne. (2) Un second effet qui découle nécessairement de celui que nous venons de mentionner, c’est la joie et la complaisance, ou l’amour. (3.) L’appréhension de l’adéquation des vérités révélées à notre nature et à nos besoins. (4) La ferme conviction que ces choses ne sont pas seulement vraies, mais divines. (5.) Les fruits de cette conviction, i. e., de la foi ainsi produite, des bonnes œuvres, — sainteté du cœur et de la vie.
C’est pourquoi, lorsqu’on demande à un chrétien pourquoi il croit aux Écritures et aux doctrines qu’elles contiennent, sa réponse simple est : Sur le témoignage ou l’autorité de Dieu. Sinon, comment aurait-il pu savoir que les mondes ont été créés par Dieu, que notre race apostasiée de Dieu, ce mensonge a envoyé son Fils pour notre rédemption, que la foi en Lui assurera le salut. La foi en de telles vérités ne peut avoir d’autre fondement que le témoignage de Dieu. Si on lui demande : Comment Dieu témoigne-t-il de la vérité de la Bible ? Si un homme instruit dont l’attention a été attirée sur le sujet, il répondra, de toutes les manières imaginables : par des signes, des prodiges et des miracles ; par l’exposition que la Bible fait de la connaissance, de l’excellence, de l’autorité et de la puissance divines. S’il s’agit d’un homme inculte, il peut simplement dire : « · Alors que j’étais aveugle, maintenant je vois. Un tel homme ; et, en effet, tout vrai chrétien passe d’un état d’incrédulité à un état de foi salvatrice, non par un processus de recherche ou d’argumentation, mais par une expérience intérieure. Le changement peut, et c’est souvent le cas, se produire en un instant. La foi d’un chrétien dans la Bible est, comme nous l’avons déjà remarqué, analogue à celle que tous les hommes ont dans la loi morale, qu’ils reconnaissent non seulement comme la vérité, mais comme ayant l’autorité de Dieu. Ce que l’homme naturel perçoit à l’égard de la loi morale, l’homme renouvelé est capable de le percevoir à l’égard des « choses de l’Esprit », par le témoignage de cet Esprit à son cœur et par la vérité qu’il a reçue.
Preuve tirée des déclarations expresses de l’Écriture.
1. Le Que ce soit là la doctrine biblique sur le sujet, c’est ce qui ressort clairement de l’exprès déclarations des Écritures. Notre Seigneur a promis d’envoyer l’Esprit pour cela l’objectif même. « Il réprimandera le monde du péché », en particulier du péché de ne pas croire en Christ ; « Et de justice », c’est-à-dire de sa justice, la légitimité de ses prétentions à être considéré et reçu comme le Fils de Dieu, Dieu manifesté dans la chair et le Sauveur du monde ; « et du jugement », c’est-à-dire du renversement final du royaume des ténèbres et du triomphe du royaume de la lumière. (Jean xvi. 8.) La foi, par conséquent, est toujours représenté dans l’Écriture comme l’un des fruits de la L’Esprit, en tant que don de Dieu, en tant que produit de son énergie (ττίστις τής tvepydas του Θεού) (Colossiens ii. 12). On dit que les hommes croient en vertu de la même puissance qui a opéré en Christ, lorsque Dieu l’a ressuscité d’entre les morts. (Éphésiens i. 19, 20.) L’apôtre Paul expose en détail le fondement de la foi dans le deuxième chapitre de la première épître aux Corinthiens. Il déclare qu’il s’est appuyé pour réussir non pas sur les paroles séduisantes de la sagesse de l’homme, mais sur la démonstration de l’Esprit, afin que la foi du peuple puisse reposer non pas sur la sagesse des hommes, mais sur la puissance de Dieu. La foi ne devait pas reposer sur des arguments, sur des preuves historiques ou philosophiques, mais sur le témoignage de l’Esprit. L’Esprit démontre la vérité à l’esprit, c’est-à-dire qu’il produit la conviction que c’est la vérité, et conduit l’âme à Embrassez-le avec assurance et plaisir. Des passages ont déjà été cités qui enseignent que la foi repose sur le témoignage de Dieu, et que l’incrédulité consiste à rejetant ce témoignage. Le témoignage de Dieu est donné par l’Esprit, dont l’office est de prendre les choses de Christ et de nous les montrer. Le L’apôtre Jean dit à ses lecteurs : « Vous avez une onction du Saint, et vous savez toutes choses..... L’onction que vous avez reçue de lui demeure en vous, et vous n’avez pas besoin qu’on vous enseigne, mais comme la même onction vous enseigne de toutes choses, qu’elle est la vérité et qu’elle n’est pas un mensonge, et qu’elle demeure en lui comme elle vous l’a enseigné. (1 Jean, II, 20, 27.) Ce passage enseigne, (1.) Que les vrais croyants reçoivent de Christ (le Saint) une onction. 2° Que cette onction est le Saint-Esprit. (3) Qu’elle assure la connaissance et la conviction de la vérité. (4) Que cet enseignement intérieur qui fait d’eux des croyants est durable et les préserve de l’apostasie.
Tout aussi explicite est le passage de 1 Corinthiens ii. 14 : « L’homme naturel ne reçoit pas les choses de l’Esprit de Dieu ; car elles sont folie pour lui, et il ne peut pas les connaître, parce qu’elles sont discernées spirituellement. Mais celui qui est spirituel juge toutes choses, et pourtant lui-même n’est jugé par personne. Les choses de l’Esprit, ce sont les choses que l’Esprit a révélées. À propos de ces choses, il est enseigné : 1° que l’homme naturel ou non renouvelé ne les reçoit pas. 2° Que l’homme spirituel, c’est-à-dire l’homme en qui l’Esprit habite, les reçoit. 3° Que la raison de cette différence est que le premier n’a pas, et que le second a le discernement spirituel. (4) Ce discernement spirituel est l’appréhension de la vérité et l’excellence des choses discernées. (5) Elle est spirituelle, comme nous venons de le dire, à la fois parce qu’elle est due à l’opération de l’Esprit, et parce que la conformité des vérités discernées à la nature de l’Esprit est appréhendée.
Quand Pierre a confessé que Jésus était le Christ, le Fils du Dieu vivant, notre Le Seigneur dit : « Béni sois-tu, Simon Barjona, car ce n’est pas la chair et le sang qui te l’ont révélé, mais mon Père qui est dans les cieux. » (Matt. xvi. 17.) D’autres hommes avaient les mêmes preuves extérieures de la divinité de Christ que Pierre. Sa foi n’était pas due à cette seule évidence, mais au témoignage intérieur de Dieu. Notre-Seigneur rendit grâces de ce que Dieu avait caché les mystères de son royaume aux sages et aux prudents et il les révéla aux tout-petits. (Matt. xi. 25.) La révélation extérieure a été faite aux deux classes. En plus de cette révélation extérieure, ceux qu’on appelait les enfants recevaient un témoignage intérieur qui les rendait croyants. C’est pourquoi notre Seigneur a dit : Nul ne peut venir à moi, s’il n’est attiré ou enseigné par Dieu. (Jean vi. 44, 45.) L’Apôtre nous dit que le même Évangile, les mêmes vérités objectives, avec les mêmes preuves extérieures et rationnelles, qui étaient une offense pour le Juif et une folie pour le Grec, étaient pour les appelés la sagesse et la puissance de Dieu. Pourquoi cette différence ? Non pas la connaissance supérieure ou la plus grande excellence des appelés, mais l’influence divine intérieure, le κλ^σις, dont ils étaient les sujets. La conversion instantanée de Paul ne doit pas être rapportée à un processus rationnel d’argumentation ; ni à sa susceptibilité morale à la vérité ; ni à la manifestation visible du Christ, car aucun miracle, aucune lumière extérieure ou splendeur ne pouvait changer le cœur et transformer tout le caractère en un instant. C’était, comme nous le dit l’Apôtre lui-même (Gal., liv. 15, 16), la révélation intérieure du Christ par la grâce spéciale de Dieu. C’était le témoignage de l’Esprit qui, étant intérieur et surnaturel, lui permettait de voir la gloire de Dieu dans le visage de Jésus-Christ. Le psalmiste a prié Dieu pour qu’il lui ouvre les yeux afin qu’il puisse voir des choses merveilleuses de sa loi. L’apôtre a prié pour les Éphésiens afin que Dieu leur donne le Saint-Esprit, afin que les yeux de leurs âmes s’ouvrent, afin qu’ils puissent connaître les choses qui leur ont été données gratuitement par Dieu. (Éph. i. 17 et 18.) Partout dans la Bible, le fait que quelqu’un croie ne se réfère pas à son état subjectif, mais à l’œuvre de l’Esprit sur son cœur.
La preuve de la manière dont les Apôtres ont agi.
2. Comme les Écritures enseignent ainsi expressément que le fondement de la foi vraie ou salvatrice est le témoignage intérieur de l’Esprit, les apôtres ont toujours agi d’après ce principe. Ils annoncèrent la vérité et demandèrent qu’elle fût reçue sur-le-champ, sous peine de mort éternelle. Notre Seigneur a fait de même. « Le mensonge qui ne croit pas est déjà condamné, parce qu’il n’a pas cru au nom du Fils unique de Dieu. (Jean iii. 18.) La foi immédiate était exigée. Exigée par le Christ, et sur son ordre par les Apôtres, cette demande doit être juste et raisonnable. Cependant, il ne pouvait être ni l’un ni l’autre, à moins que l’évidence de la vérité ne l’accompagnât. Cette preuve ne pouvait pas être les preuves extérieures de la divinité du Christ et de son Évangile, car ces preuves étaient présentes à l’esprit d’un nombre relativement restreint d’auditeurs de l’Évangile ; Il ne pouvait pas non plus s’agir d’une preuve rationnelle ou d’arguments philosophiques, car encore moins pouvaient apprécier de telles preuves, et s’ils le pouvaient, cela ne servirait à rien à la production de la foi salvatrice. L’évidence de la vérité, à laquelle Dieu exige son assentiment au moment où elle est annoncée, doit être dans la vérité elle-même. Et si cet assentiment est obligatoire, et que la dissidence ou l’incrédulité soit un péché. alors l’évidence doit être d’une nature à laquelle un état corrompu de l’âme rend l’homme insensible. « Si notre Évangile est caché, dit l’Apôtre, il est caché à ceux qui sont perdus, en qui le Dieu de ce monde a aveuglé l’esprit de ceux qui ne croient pas, de peur que la lumière de l’Évangile glorieux de Christ, qui est l’image de Dieu, ne brille sur eux..... [Mais] Dieu, qui a ordonné à la lumière de briller du milieu des ténèbres, a brillé dans nos cœurs, pour donner la lumière de la connaissance de la gloire de Dieu sur la face de Jésus-Christ. (2 Corinthiens iv. 3-6.) Il est enseigné ici, (1.) Que partout et chaque fois que le Christ est prêché, l’évidence de sa divinité est présentée. La gloire de Dieu brille sur son visage. (2.) Que si quelqu’un ne le voit pas, c’est parce que le Dieu de ce monde lui a aveuglé les yeux. (3) Que si quelqu’un le perçoit et le croit, c’est à cause d’une illumination intérieure produite par Celui qui a le premier ordonné à la lumière de briller hors des ténèbres.
Preuve de la pratique dans l’Église.
3. De même que le Christ et les apôtres ont agi selon ce principe, tous les ministres et missionnaires fidèles depuis ce jour jusqu’à aujourd’hui. Ils ne s’attendent pas à convaincre et à convertir les hommes par des preuves historiques ou par des arguments philosophiques. Ils dépendent de la démonstration de l’Esprit.
4. Cette doctrine, que le fondement véritable et immédiat de la foi dans les choses de l’Esprit est le témoignage de l’Esprit, produisant le discernement spirituel, est soutenue par l’analogie. Si un homme ne peut pas voir la splendeur du soleil, c’est parce qu’il est aveugle. S’il ne peut percevoir les beautés de la nature et de l’art, c’est qu’il n’a pas de goût. S’il ne peut appréhender « l’accord des sons doux », c’est qu’il n’a pas l’oreille musicale. S’il ne peut voir la beauté de la vertu, ou l’autorité divine de la loi morale, c’est que son sens moral est émoussé. S’il ne peut pas voir la gloire de Dieu dans ses œuvres et dans sa Parole, c’est parce que sa nature religieuse est pervertie. Et de la même manière, s’il ne peut pas voir la gloire de Dieu dans le visage de Jésus-Christ, c’est parce que le dieu de ce monde lui a aveuglé les yeux.
Personne n’excuse l’homme qui ne voit pas d’excellence dans la vertu, et qui répudie l’autorité de la loi morale. La Bible et le jugement instinctif des hommes condamnent l’athée. De la même manière, les Écritures prononcent maudit tous ceux qui ne croient pas que Jésus est le Christ, le Fils du Dieu vivant. C’est la négation de l’excellence suprême ; le rejet de la manifestation la plus claire de Dieu jamais faite à l’homme. Le jugement solennel de Dieu est : « Si quelqu’un n’aime pas le Seigneur Jésus-Christ, qu’il soit anathème maranatha. » (1 Corinthiens xvi. 22.) Dans ce jugement, l’univers intelligent tout entier finira par acquiescer.
La foi dans les Écritures est donc fondée sur le témoignage de Dieu. Par témoignage, comme nous l’avons déjà dit, on entend attestation, tout ce qui promet l’autorité de l’attestateur à l’appui de la vérité à établir. De même que ce témoignage est de différentes sortes, de même la foi qu’il produit est également différente. Dans la mesure où le témoignage n’est qu’extérieur, la foi qu’il produit est simplement historique ou spéculative. En ce qui concerne le témoignage, morale, consistant dans le pouvoir que l’Esprit donne à la vérité sur la conscience naturelle, la foi est passagère, dépendant de l’état d’esprit qui en est la cause prochaine. En outre, il y a le témoignage intérieur de l’Esprit, qui est d’une nature et d’une puissance telles qu’il produit une révolution parfaite dans l’âme, comparée dans l’Écriture à celle qui s’effectue en ouvrant les yeux des aveugles à la réalité, aux merveilles et aux gloires de la création. Il y a donc toute la différence qu’il y a entre une foi qui repose sur ce témoignage intérieur de l’Esprit, et une foi purement spéculative, qu’il y a entre la conviction qu’un aveugle a des beautés de la nature, avant et après l’ouverture des yeux. Comme ce témoignage est instructif, permettant à l’âme de voir la vérité et l’excellence de la. « choses de l’Esprit », en ce qui concerne la conscience du croyant, sa foi est une forme de connaissance. Il voit comme vrai ce que l’Esprit révèle et authentifie.
Le rapport de la foi à la connaissance est un vaste domaine. Les discussions sur le sujet ont été variées et interminables. Il est peu probable que les points en litige soient un jour réglés à la satisfaction de toutes les parties. Le fondement de la foi est l’autorité. Le fondement de la connaissance est le sens ou la raison. Nous ne nous occupons ici que de la foi chrétienne, c’est-à-dire de la foi qui reçoit les Écritures comme la Parole de Dieu et tout ce qu’elles enseignent comme vrai sur son autorité.
Une révélation surnaturelle est-elle nécessaire ?
La première question est de savoir s’il y a besoin d’une révélation surnaturelle, si la raison humaine n’est pas compétente pour découvrir et authentifier toutes les vérités nécessaires. Cette question a déjà été examinée sous le titre du rationalisme, où elle a été montrée (1). Que la conscience de chaque homme lui dise qu’il y a des questions concernant Dieu, sa propre origine et sa destinée, auxquelles sa raison ne peut répondre. 2° Qu’il sait a priori que la raison d’aucun autre homme ne peut y répondre d’une manière satisfaisante. (3.) Qu’il sait par expérience qu’elles n’ont jamais été répondues par la sagesse des hommes, et (4.) Que les Écritures déclarent que le monde ne connaît pas Dieu par la sagesse ; que la sagesse du monde est folie à son avis, et que Dieu a donc lui-même fait connaître des vérités indécouvrables par la raison, pour le salut de l’homme.
Les vérités de la révélation doivent-elles être démontrables par la raison ?
Une seconde question est de savoir si les vérités, révélées surnaturellement, doivent pouvoir s’authentifier à la barre de la raison avant de pouvoir être reçues rationnellement ; de sorte qu’ils sont reçus, non pas sur la base de l’autorité, mais sur la base d’une preuve rationnelle. Cela a également été discuté précédemment. Il a été démontré que la supposition que Dieu ne peut rien révéler que la raison humaine ne puisse, lorsqu’elle est connue, démontrer comme étant vraie, suppose que la raison humaine est la mesure de toute vérité ; qu’il n’y a pas dans l’univers d’intelligence supérieure à celle de l’homme ; et que Dieu ne peut pas avoir de desseins et de plans dont nous ne sommes pas capables de découvrir et d’apprécier les fondements ou les raisons. Il émancipe l’âme de l’autorité de Dieu, refusant de croire quoi que ce soit sauf sur l’autorité de la raison. Pourquoi ne pouvons-nous pas croire sur le témoignage de Dieu qu’il y a un monde spirituel, aussi bien que croire qu’il existe une nation telle que les Chinois sur le témoignage des hommes ? Aucun homme n’agit selon le principe de ne croire que ce qu’il peut comprendre et prouver, dans un autre domaine. Il y a des multitudes de vérités que tout homme sain d’esprit reçoit sur confiance, sans pouvoir ni les prouver ni les comprendre. Si nous ne pouvons croire que ce que nous pouvons prouver à la barre de la raison comme étant vrai, alors le royaume des cieux serait fermé à tous, sauf aux sages. Il ne pouvait y avoir de chrétien qui ne fût aussi un philosophe. En fait, personne n’agit selon ce principe. Elle est assumée dans l’orgueil de la raison, ou comme une excuse pour avoir rejeté des vérités désagréables, mais les hommes croient en Dieu, au péché, à la liberté de la volonté, à la responsabilité, sans la capacité de comprendre ou de réconcilier ces vérités les unes avec les autres ou avec d’autres faits de conscience ou d’expérience.
Les vérités révélées ne peuvent-elles pas être confirmées philosophiquement ?
Une troisième question est de savoir s’il admet une révélation surnaturelle, et s’il admet en outre l’obligation de recevoir sur l’autorité de Dieu Les doctrines que la révélation fait connaître, les doctrines révélées ne peuvent pas être philosophiquement justifiées, de manière à les recommander à l’acceptation de ceux qui nient la révélation. Que les doctrines de l’Écriture concernant Dieu, la création, la providence, la trinité, l’incarnation, le péché, la rédemption et l’état futur ne soient pas énoncées et soutenues philosophiquement de manière à contraindre l’acquiescement à elles comme des vérités de la raison. C’est sur ce terrain que se sont appuyés dans l’Église primitive les théologiens de l’école d’Alexandrie, qui ont entrepris d’élever le τγίστις du peuple en un γνώσις pour les philosophes. C’est ainsi que les écrivains sacrés sont devenus platoniciens, et que le christianisme a été transmuté en platonisme. Une grande partie de l’activité intellectuelle des scolastiques, pendant le moyen âge, s’est dépensée de la même manière. Ils ont reçu la Bible comme une révélation surnaturelle de Dieu., Ils ont reçu l’interprétation de l’Église de ses enseignements. Ils admettaient leur obligation de croire ses doctrines sur l’autorité de Dieu et des Chureh. Néanmoins, ils soutenaient que toutes ces doctrines pouvaient être prouvées philosophiquement. Plus tard, Wolf entreprit de faire des démonstrations toutes les doctrines du christianisme sur les principes du Leibnitzian. philosophie. De nos jours, ce principe et ces tentatives ont été mis en œuvre plus loin que jamais. Les systèmes théologiques, construits sur la philosophie de Hegel, de Schelling et de Schleiermacher, ont presque supplanté les anciens systèmes bibliques. Si un homme d’une culture et d’une intelligence ordinaires prenait un volume de ce qu’on appelle la théologie spéculative (c’est-à-dire la théologie présentée sous les formes de la philosophie spéculative), il ne comprendrait pas une page et comprendrait à peine une phrase. Il ne pouvait dire si la théologie qu’il se proposait de présenter était le christianisme ou le bouddhisme. Ou, au mieux, il trouverait quelques gouttes de vérité biblique si diluées par des flots de spéculations humaines que le plus délicat des tests chimiques ne parviendrait pas à détecter l’élément divin.
Tentatives de le faire Futile.
Toutes ces tentatives sont vaines. La preuve empirique de ceci est qu’aucune tentative de ce genre n’a jamais réussi. L’expérience a été faite des centaines de fois, et toujours avec le même résultat. Où sont maintenant les exposés philosophiques et les justifications des doctrines de l’Écriture par les pères platoniciens ? par les scolastiques ; par les cartésiens ; par les Leibnitziens ? Quel pouvoir sur la raison, sur la conscience, sur la vie, a l’un des systèmes spéculatifs de notre temps ? Qui, au-delà des dévots des systèmes qu’ils représentent, comprend ou adopte la théologie de Daub, de Marheinecke, de Lange et d’autres ? Strauss a donc raison de répudier toutes ces vaines tentatives de concilier le christianisme avec la philosophie, ou de donner à la doctrine chrétienne une forme qui satisfasse le penseur philosophique.1
1 Voir ci-dessus, p. 58.
Mais en dehors de cet argument tiré de l’expérience, il est absurde de supposer que le faible intellect de l’homme puisse expliquer et, par ses propres ressources, justifier et prouver les choses profondes de Dieu. Un enfant pourrait tout aussi bien entreprendre d’exposer les Principia de Newton. S’il y a des mystères dans la nature, dans chaque brin d’herbe, dans l’insecte, dans le corps et dans l’âme de l’homme, il doit y avoir des mystères dans la religion. La Bible et notre la conscience nous enseigne que Dieu est incompréhensible, et que ses voies sont insondables ; que nous ne pouvons expliquer ni sa nature ni ses actes ; nous ne savons pas comment il crée, soutient et gouverne sans interférer avec la nature de ses créatures ; comment il peut y avoir trois personnes dans la Divinité ; comment dans l’unique personne du Christ il peut y avoir deux intelligences et deux volontés ; comment l’Esprit inspire, renouvelle, sanctifie ou réconforte. Il appartient à la classe des philosophes « auto-déifiants » de prétendre savoir tout ce que Dieu sait, et de bannir l’incompréhensible de la religion qu’il a révélée. À l’école de Hegel », dit Bretschneider, « il n’y a de mystères dans la religion que pour ceux qui ne se sont pas élevés au niveau hégélien de la connaissance. Pour ces derniers, tout est clair ; tout est connaissance ; et le christianisme est la solution, et donc la révélation de tous les mystères.» 1 Cela peut être cohérent chez ceux qui soutiennent que l’homme est Dieu dans la forme la plus élevée de son existence, et le philosophe le style le plus élevé de l’homme. Cependant, une telle affirmation, quel qu’en soit le fait, est l’aliénation mentale de la présomption.
1 Systematïsche Ent wick elung, § 29, 4e édit. Leipzig, 1841, p. 163.
Ce qui est vrai en religion peut-il être faux en philosophie ?
Une quatrième question comprise dans ce sujet général est de savoir s’il y a ou peut y avoir un conflit réel entre les vérités de la raison et celles de la révélation ? Ce qui est vrai dans la religion peut-il l’être dans la philosophie ? À cette question, différentes réponses ont été apportées.
D’abord, tandis que les Pères grecs étaient disposés à mettre en harmonie la religion et la philosophie, en donnant une forme philosophique aux doctrines chrétiennes, les Latins étaient enclins à représenter les deux comme inconciliables. « Qu’est-ce qu’Athènes, demande Tertullien, a à voir avec Jérusalem ? L’académie avec l’Église ? Qu’est-ce que les hérétiques ont à voir avec les chrétiens ? Notre instruction vient du porche de Salomon, qui lui-même a enseigné que le Seigneur devait être recherché dans la simplicité du cœur..... Nous n’avons pas besoin de chercher la vérité après Christ ; pas de recherche après l’Évangile. Quand nous croyons, nous ne désirons rien au-delà de la foi, parce que nous croyons qu’il n’y a rien d’autre que nous devrions faire..... Ne rien connaître au-delà, c’est connaître toutes choses.» 2 Il alla jusqu’à dire : « Prorsus credibile est, quia ineptum est ; . . . . certum est, quia impossibile est. » 3 Sans aller jusque-là, les théologiens de l’Église latine, ceux d’entre eux du moins les plus zélés pour les doctrines de l’Église, étaient enclins à refuser à la raison même la prérogative de a judicium contradictionis. Ils ont été contraints de prendre ce terrain parce qu’ils étaient appelés à défendre des doctrines qui contredisaient non seulement la raison, mais les sens. Quand on objectait à la doctrine que l’hostie consacrée est le corps réel du Christ, que nos sens déclarent que c’est du pain, et qu’il est impossible qu’un corps humain soit dans le ciel et dans toutes les parties de la terre en même temps, que pouvaient-ils dire, sinon qu’il ne faut pas se fier aux sens et à la raison dans le domaine de la foi ? Que ce qui est faux à la raison et aux sens puisse l’être dans la religion ?
2 De Prœscriptionibus ndeersus Ilareticos, cap. 7, 8, 14, IPbrZ’S, Paris, 1608 (t. iii.), p. 331 : « Quid ergo Athenïs et Ilierosolymis ? quid Academiæ et Eeclesiæ ? quid hæreti-cis et Christianis ? Nostra institutio de porticu Solomonis est, qui et ipse tradiderat : Dominum in simplicitate cordis esse qnscrendum. Viderint qui Stoicum, et Platonicum, et Dialccticum, Christianissimum protulerunt. Nobis curiositate opus non est post Christum .lesum, nee inqnisitione post Evangelium. Cum credimus, nihil desideramus ultra credere. Hoe enim prius credimus, non esse quod idtra credere debeamns..... Cedat enriositas fidei, cedat gloria saluti. Certe aut non obstrepant, aut quiescant adversus regulam. Nihil ultra scire, omnia scire est. »
3 De Carne Christi, cap. 5, IForÂts (t. iii.), p. 555 : « Natus est Dei filins : non pudet, quia pudendum est. Et mortuus est Dei filius : prorsus credibile est, quia ineptum est. Et sepultus, resurrexit : certum est, quia impossibile est. »
L’enseignement luthérien sur ce point.
Les luthériens étaient dans la même nécessité. Leur doctrine de la personne du Christ implique la négation de la vérité première, à savoir que les attributs ne peuvent être séparés de la substance dont ils sont la manifestation. Leur doctrine concernant la Cène du Seigneur implique l’hypothèse de l’ubiquité du corps du Christ, ce qui semble être une contradiction dans les termes.
Les déclarations de Luther à ce sujet ne sont pas très cohérentes. Argumentant contre le maintien de l’obligation des vœux monastiques, il n’hésitait pas à dire que ce qui était contraire à la raison était contraire à Dieu. « Was nun der Vernunft entgegen 1er, 1st gewiss dass es Gott vielmehr entgegen 1er. Denn wie sollte es nicht wider die gottliche Wahrheit seyn, das wider Vernunft und menschliche Wahrheit 1st. » 1 Mais dans la controverse sacramentaire, il ne permettra pas que la raison soit entendue. « Dans les choses de Dieu,» dit-il, la raison ou la nature est aveugle comme une étoile et une pierre. « C’est, en effet,» ajoute-t-il, « assez audacieux pour plonger et trébucher comme un cheval aveugle ; mais tout ce qu’elle explique ou conclut est aussi certainement faux et erroné que le fait que Dieu vit.» 2 Dans un autre endroit, il dit que la raison, lorsqu’elle essaie de spéculer sur les choses divines, devient folle ; ce qui, en effet, est tout à fait ce que Paul dit. (Rom. i. 22 ; 1 Cor. i. 18-31.)
1 Œuvres, édit. Walcli, t. XIX, p. 1940.
2 Idem. Vol. XII. pp. 399, 400.
Les théologiens luthériens ont fait une distinction entre la raison dans l’abstrait, ou la raison telle qu’elle était dans l’homme avant la chute, et la raison telle qu’elle est maintenant. Ils admettent qu’aucune vérité de révélation ne peut contredire la raison en tant que telle ; mais elle peut contredire la raison des hommes dont toutes les facultés sont obscurcies et détériorées par le péché. On ne voulait pas dire par là simplement que l’homme non renouvelé s’oppose à la vérité de Dieu ; que « les choses de l’Esprit » sont folie pour lui ; qu’il lui semble absurde que Dieu se trouve à la mode comme un homme ; qu’il exigerait une satisfaction pour le péché ; ou sauver un homme et pas un autre, selon son bon plaisir. C’est ce que la Bible enseigne clairement et que tous les chrétiens croient. En tout cela, il n’y a pas de contradiction entre la raison et la religion. L’être de Dieu est folie pour l’athée ; et l’immortalité personnelle est une folie pour le panthéiste. Mais qui admettrait que ces doctrines soient contraires à la raison ? Les théologiens luthériens avaient l’intention d’enseigner, non seulement que les mystères de la Bible sont au-dessus de la raison, qu’ils ne peuvent être ni compris ni démontrés ; et non seulement que « les choses de l’Esprit » sont folie pour l’homme naturel, mais qu’elles sont réellement en conflit avec l’entendement humain ; qu’il est possible de démontrer qu’elles sont fausses par un raisonnement correct ; de sorte que, dans le sens strict des termes, ce qui est vrai en religion est faux en philosophie. « La Sorbonne,» dit Luther, « a pris une décision des plus abominables en disant que ce qui est vrai en religion l’est aussi en philosophie ; et, de plus, condamnant comme hérétiques tous ceux qui affirment le contraire. Par cette horrible doctrine, il a donné à entendre clairement que les doctrines de la foi doivent être soumises au joug de la raison humaine.» 1
1 Œuvres, édit. Walch, t. X, p. 1-399.
Deuxièmement, le point de vue adopté par Sir William Hamilton à ce sujet n’est pas exactement le même que celui adopté par les luthériens. Ils sont d’accord, en effet, sur ce point, que nous sommes obligés de croire ce que nous pouvons prouver faux, mais ils diffèrent entièrement quant à la cause et à la nature de ce conflit entre la raison et la foi. Selon les luthériens, elle provient de la corruption et de la détérioration de notre nature par la chute. Elle est enlevée en partie dans ce monde par la régénération, et entièrement dans l’au-delà par la perfection de notre sanctification. Selon Hamilton, ce conflit découle de la limitation nécessaire de la pensée humaine. Dieu nous a faits de telle sorte que la raison, agissant selon ses propres lois, arrive nécessairement à des conclusions directement opposées aux doctrines de la religion, à la fois naturelles et révélées. Nous pouvons prouver de manière démontrable que l’être Absolu ne peut pas connaître, ne peut pas être une cause, ne peut pas être conscient. On peut prouver avec la même clarté que l’Infini ne peut pas être une personne ou posséder des attributs moraux. Ici donc, ce qui est vrai dans la religion, ce que nous sommes tenus de croire, et ce que tous les hommes, en vertu de la constitution de leur nature, croient, peut être prouvé comme faux. Il y a donc un conflit irréconciliable entre notre nature intellectuelle et notre nature morale. Mais comme, selon l’idéaliste, la raison nous force à conclure que le monde extérieur n’existe pas, alors qu’il est néanmoins prudent et convenable d’agir sur la supposition qu’il est, et qu’il est ce qu’il semble être ; ainsi, selon Hamilton, il est non seulement sûr, mais obligatoire pour nous d’agir sur la supposition que Dieu est une personne, bien qu’infinie, tandis que notre raison démontre qu’une personne infinie est une contradiction. Le conflit entre la raison et la foi est avoué, tandis que l’obligation de la foi sur le témoignage de notre nature morale et religieuse et de la Parole de Dieu est affirmée. Ce point a déjà été Discuté.
Le point de vue des philosophes spéculatifs.
Troisièmement, nous notons le point de vue adopté par les philosophes spéculatifs. Eux aussi soutiennent que la raison démontre que les doctrines de la révélation et même de la religion naturelle sont fausses. Mais ils ne reconnaissent pas leur obligation de les recevoir comme des objets de foi. Étant contraires à la raison, ces doctrines sont fausses, et étant fausses, elles doivent, par les hommes éclairés, être rejetées. Si quelqu’un s’y accroche par sentiment, il doit être autorisé à le faire, mais il doit renoncer à toute prétention à la perspicacité philosophique.
Les objets de la foi peuvent-ils être au-dessus, et pourtant non pas contre la raison ?
Une cinquième question est de savoir si les objets de la foi peuvent être au-dessus de la raison, et cependant non contraires à la raison. La réponse à cette question est affirmative, car la distinction implicite est valable et presque universellement admise. Ce qui est au-dessus de la raison est tout simplement incompréhensible. Ce qui est contraire à la raison est impossible. Il est contraire à la raison que les contradictions soient vraies ; qu’une partie doit être plus grande que le tout ; qu’une chose doit être et ne pas être en même temps ; que le bien doit être le mal et le mal le bien. Il est incompréhensible que la matière attire la matière ; comment l’esprit agit sur le corps, et le corps sur l’esprit. La distinction entre l’incompréhensible et l’impossible est donc claire et admise. Et la distinction entre ce qui est au-dessus de la raison et ce qui est contre la raison est également évidente et juste. Le grand corps des théologiens chrétiens a toujours considéré que les doctrines de la Bible ne sont pas contraires à la raison, bien qu’elles soient au-dessus d’elle. C’est-à-dire qu’il s’agit de questions de foi qui doivent être reçues sur l’autorité de Dieu, et non parce qu’elles peuvent être comprises ou prouvées. Comme il est incompréhensible qu’une âme et un corps puissent être unis en une seule vie consciente ; il est donc incompréhensible qu’une nature divine et une nature humaine puissent être unies en une seule personne dans le Christ. Ni l’un ni l’autre n’est impossible, et par conséquent ni l’un ni l’autre n’est contraire à la raison. Nous connaissons le seul fait de la conscience ; nous croyons l’autre sur le témoignage de Dieu. Il est impossible, et par conséquent contraire à la raison, que trois soient un. Mais il n’est pas impossible que la même essence numérique subsiste dans trois personnes distinctes. Les réalistes nous disent que l’humanité, en tant qu’essence numérique, subsiste dans les millions d’individus humains. Thomas d’Aquin prend le vrai terrain quand il dit : « Ea quæ sunt supra naturam, sola fide tenemus. Quod autem credimus, auctoritati debemus. Unde in omnibus asserendis sequi debemus naturam rerum, printer ea, quæ auctoritate divina traduntur, quæ sunt supra naturam.'' 1 " Quæ igitur fidei sunt, non sunt tentanda probare nisi per auctoritates his, qui auctoritates suscipiunt. Apud alios vero sufficit defendere non esse impossibile quod prædicat tides. » 2 « Quidquid in aliis scientiis invenitur veritati hujus scientiæ [sacræ doctrinæ] repugnans, totum condemnatur ut falsum. »3
1 Summa, 1. quæst. xcix. art. 1, édit. Cologne, 1040, p. 185, a.
2 Ibid., quæst. xxxii. art. 1, p. 64, a.
3 Ibid., quæst. i. art. 6, p. 2, b.
Les objets de la foi sont compatibles avec la raison.
Par conséquent, bien que les objets de la foi, tels qu’ils sont révélés dans la Bible, ne soient pas des vérités de la raison, c’est-à-dire que la raison humaine puisse découvrir, comprendre ou démontrer, ils sont néanmoins parfaitement compatibles avec la raison. Ils n’impliquent ni contradictions ni absurdités ; rien d’impossible, rien d’incompatible avec les intuitions de l’intellect ou de la conscience ; rien d’incompatible avec une vérité bien établie, que ce soit du monde extérieur ou du monde de l’esprit. Au contraire, le contenu de la Bible, dans la mesure où il se rapporte à des choses qui relèvent du domaine légitime de la connaissance humaine, se trouve être cohérent, et doit être cohérent, avec tout ce que nous savons certainement d’autres sources qu’une révélation divine. Tout ce que les Écritures enseignent concernant le monde extérieur s’accorde avec les faits de l’expérience. Ils n’enseignent pas que la terre est une plaine ; qu’il est stationnaire dans l’espace ; que le soleil tourne autour d’elle. D’autre part, ils enseignent que Dieu a fait toutes les plantes et tous les animaux, chacun selon son espèce ; et, par conséquent, toute l’expérience montre que les espèces sont immuables. Toutes les doctrines anthropologiques de la Bible s’accordent avec ce que nous savons de l’homme par la conscience et l’observation. La Bible enseigne que Dieu a fait d’un seul sang toutes les nations qui habitent sur la surface de la terre. Nous trouvons donc que toutes les variétés de notre race ont la même structure anatomique ; la même nature physique ; les mêmes facultés rationnelles et morales. La Bible enseigne que l’homme est un agent libre et responsable ; que tous les hommes sont pécheurs ; que tous ont besoin de rédemption, et que personne ne peut se racheter lui-même ou trouver une rançon pour son frère. La conscience de tous les hommes est d’accord avec ces enseignements. Tout ce que les Écritures révèlent concernant la nature et les attributs de Dieu correspond à notre nature religieuse, satisfaisant, élevant et sanctifiant toutes nos puissances et répondant à toutes nos nécessités. Si le contenu de la Bible ne correspondait pas aux vérités que Dieu a révélées dans ses œuvres extérieures et dans la constitution de notre nature, il ne pourrait pas être reçu comme venant de Lui, car Dieu ne peut pas se contredire. Rien, par conséquent, ne peut être plus désobligeant pour la Bible que l’affirmation que ses doctrines sont contraires à la raison.
La foi dans l’irrationnel est impossible.
L’hypothèse que la raison et la foi sont incompatibles ; que nous devons devenir irrationnels pour devenir croyants, c’est quelle que soit l’intention qu’on lui donne, le langage de l’infidélité ; Car la foi dans l’irrationnel est nécessairement elle-même irrationnelle. Il est impossible de croire que ce que l’esprit voit comme faux soit vrai. Ce serait croire et ne pas croire la même chose en même temps. Si donc, comme l’affirment les philosophes modernes, il est impossible qu’un être infini puisse être une personne, alors la foi dans la personnalité de Dieu est impossible. Alors il ne peut y avoir de religion, pas de péché, pas de responsabilité, pas d’immortalité. La foi n’est pas une conviction aveugle et irrationnelle. Pour croire, nous devons savoir ce que nous croyons et les fondements sur lesquels repose notre foi. Et c’est pourquoi le refuge que certains voudraient prendre dans la foi, contre le scepticisme universel auquel ils disent que la raison conduit nécessairement, est incertain et sans valeur.
Tout en admettant que les vérités de la révélation doivent être reçues sur l’autorité de Dieu ; que la raison humaine ne peut ni ne les comprendre ni les éprouver ; qu’un homme doit se convertir et devenir comme un petit enfant avant de pouvoir vraiment recevoir les doctrines de la Bible ; et en admettant, en outre, que ces doctrines sont inconciliables avec tous les systèmes philosophiques, jamais formulés par ceux qui refusent d’être enseignés de Dieu, ou qui étaient ignorants de sa Parole, il faut cependant toujours soutenir que ces doctrines sont inattaquables , qu’aucun intellect créé ne peut prouver qu’ils sont impossibles ou irrationnels. Paul, tout en rejetant la sagesse du monde, prétendait toujours qu’il enseignait la plus haute sagesse, c’est-à-dire la sagesse de Dieu. (1 Corinthiens ii. 6, T.) Et qui osera dire que la sagesse de Dieu est irrationnelle ?
Connaissance essentielle à la Foi.
Une sixième question, comprise sous le titre de la relation de la foi à la connaissance, est la suivante : La connaissance est-elle essentielle à la foi ? C’est-à-dire, faut-il connaître une vérité pour être crue ? C’est ce que les protestants affirment et que les romanistes nient.
Les protestants admettent bien sûr que les mystères, ou les vérités que nous sommes incapables de comprendre, peuvent être, et sont, des objets de foi appropriés. Ils répudient la doctrine rationaliste selon laquelle nous ne pouvons croire que ce que nous comprenons et ce que nous pouvons prouver, ou, du moins, élucider pour qu’elle apparaisse vraie sous son propre jour. Ce que les protestants soutiennent, c’est que la connaissance, c’est-à-dire la connaissance de l’importance de la proposition à croire, est essentielle à la foi, et, par conséquent, que la foi est limitée par la connaissance. Nous ne croyons que ce que nous savons, c’est-à-dire ce que nous appréhendons intelligemment. Si une proposition nous est annoncée dans une langue inconnue, nous ne pouvons rien affirmer à son sujet. Nous ne pouvons ni le croire ni ne pas le croire. Si l’homme qui fait la déclaration affirme qu’elle est vraie, si nous avons confiance en sa compétence et en son intégrité, nous pouvons croire qu’il a raison, mais la proposition elle-même ne fait pas partie de notre foi. L’Apôtre reconnaît cette vérité évidente lorsqu’il dit : « Si vous ne prononcez pas par la langue des paroles faciles à comprendre ^υσημον λόγον), comment saura-t-on ce qui est dit ? car vous parlerez dans les airs..... Si je ne connais pas le sens de la voix, je serai pour celui qui parle un barbare, et celui qui parle sera un barbare pour moi..... Quand tu béniras de l’Esprit, comment celui qui occupe la chambre des ignorants dira-t-il Amen à ton action de grâces ? puisqu’il ne comprend pas ce que tu dis. (1 Corinthiens xiv. 9-16.) Dire Amen, c’est consentir à, faire sien. Selon l’Apôtre, la connaissance, c’est-à-dire l’appréhension intelligente du sens de ce qui est proposé, est donc essentielle à la foi. Si la proposition « Dieu est Esprit » est annoncée aux ignorants en hébreu ou en grec, il est impossible qu’ils acquiescent à sa vérité. S’ils comprennent la langue ; s’ils savent ce que signifie le mot « Dieu » et ce que signifie le mot « Esprit », alors ils peuvent recevoir ou rejeter la vérité que cette proposition affirme. La déclaration « Jésus est le Fils de Dieu » admet différentes interprétations.
Certains disent que le terme Fils est un titre officiel, et donc la proposition « Jésus est le Fils de Dieu » signifie que Jésus est un dirigeant. D’autres dis-le que c’est un terme d’affection, alors la proposition signifie que Jésus était l’objet spécial de l’amour de Dieu. D’autres disent que cela signifie que Jésus est de même nature que Dieu ; qu’Il est une personne divine. Si c’est là le sens de l’Esprit en déclarant que Jésus est le Fils de Dieu, alors ceux qui n’attachent pas ce sens aux paroles, ne croient pas à la vérité destinée à être enseignée. Quand il est dit que Dieu a présenté Christ comme propitiation pour nos péchés, si nous ne comprenons pas ce que signifie le mot propitiation, la proposition pour nous ne signifie rien, et rien ne peut être un objet de foi.
La connaissance est la mesure de la foi.
Il résulte de ce qui y a été dit, ou plutôt de ce qui y est inclus, que la connaissance étant essentielle à la foi, elle doit en être la mesure. Ce qui se trouve au-delà de la sphère de la connaissance, se trouve au-delà de la sphère de la foi. De l’invisible et de l’éternel, nous ne pouvons croire que ce que Dieu a révélé ; et de ce que Dieu a révélé, nous ne pouvons croire que ce que nous savons. Il a été dit que celui qui croit que la Bible est la Parole de Dieu, peut à juste titre être considéré comme croyant tout ce qu’elle enseigne, bien qu’une grande partie de ses instructions puisse lui être inconnue. Mais ce n’est pas une représentation correcte. L’homme qui croit en la Bible est prêt à croire sur son autorité tout ce qu’elle déclare être vrai. Mais on ne peut pas dire qu’il en croit plus qu’il n’en sait. Si on lui demandait s’il croyait que les hommes mordus par des serpents venimeux étaient jamais guéris simplement en regardant un serpent d’airain, il pourrait, s’il ignorait le Pentateuque, répondre honnêtement : Non. Mais s’il arrivait à lire et à comprendre le récit de la guérison des Israélites mourants, tel qu’il se trouve dans la Bible, il répondrait rationnellement et sincèrement : Oui. Cette disposition à croire tout ce que la Bible enseigne, dès que nous savons ce qui est enseigné, peut être appelée une foi implicite, mais ce n’est pas une vraie foi. Il n’a aucune de ses caractéristiques et aucune de ses puissances.
Preuve que la connaissance est essentielle à la foi.
Que la connaissance, dans le sens indiqué ci-dessus, soit essentielle à la foi, c’est évident.
1. De la nature même de la foi. Elle inclut la conviction de la vérité de son objet. C’est une affirmation de l’esprit qu’une chose est vraie ou digne de confiance, mais que l’esprit ne peut rien affirmer de ce dont il ne sait rien.
2. La Bible enseigne partout que sans connaissance, il ne peut y avoir de foi. Telle est, comme nous venons de le dire, la doctrine de l’apôtre Paul. Il condamnait le fait de parler en langue inconnue dans une assemblée de promiscuité, parce que les auditeurs ne pouvaient pas comprendre ce qui était dit ; et s’ils ne connaissaient pas le sens des paroles prononcées, ils ne pouvaient ni y consentir, ni en tirer profit. Dans un autre passage (Rom. x. 14), il demande : « Comment croiront-ils en celui dont ils n’ont pas entendu parler ? » « La foi, dit le mensonge, vient de ce qu’on entend. » Le commandement du Christ était de prêcher l’Évangile à toute la création ; pour instruire toutes les nations. Ceux qui recevaient les instructions ainsi données, devaient, assurait-il à ses disciples, être sauvés ; Ceux qui les ont rejetés devraient être damnés. Cela va de soi que sans la connaissance de l’Évangile, il ne peut y avoir de foi. C’est sur ce principe que les apôtres ont agi partout. Ils sont allés prêcher le Christ, prouvant par les Écritures qu’il était le Fils de Dieu et le Sauveur du monde. La communication de la connaissance a toujours précédé l’exigence de la foi.
3. Le lien intime entre la foi et la connaissance est tel que, dans les Écritures, l’un est souvent employé pour désigner l’autre. Connaître Christ, c’est croire en Lui. Connaître la vérité, c’est l’appréhender et se l’approprier avec intelligence et croyance. La conversion s’effectue par la connaissance. Paul dit qu’il a été rendu croyant par la révélation de Christ en lui. On dit que l’Esprit ouvre les yeux de l’entendement. On dit que les hommes se renouvellent pour savoir. Nous sommes transférés du royaume des ténèbres au royaume de la lumière. Les croyants sont des enfants de la lumière. On dit que les hommes périssent par manque de connaissance. Rien n’est plus caractéristique de la Bible que l’importance qu’elle attache à la connaissance de la vérité. On dit que nous sommes engendrés par la vérité ; d’être sanctifié par la vérité ; et l’on dit que tout le devoir des ministres et des docteurs est d’annoncer la parole de vie. C’est parce que les protestants croient que la connaissance est essentielle à la foi, qu’ils insistent si vigoureusement sur la circulation des Écritures et l’instruction du peuple.
Doctrine romaine sur ce sujet.
Les romanistes font une distinction entre la foi explicite et la foi implicite. Par le premier, on entend la foi en une vérité connue ; par ces derniers, la foi en des vérités inconnues. Ils enseignent qu’il n’est nécessaire de connaître que quelques vérités primaires de la religion, et que la foi sans connaissance, comme pour toutes les autres vérités, est authentique et suffisante. Sur
Thomas d’Aquin dit à ce sujet : « Quantum ad prima crcdibilia, quæ sunt articuli fidei, tcnetur homo explicite credere. Quantum autem ad alia credibilia non tenetur homo explicite credere, sed solum implicite, vel in præparatione animi, in quantum paratus est credere quidquid divina Scriptura continet.» 1 La foi implicite est définie comme suit : « Assensus, qui omnia, quamvis ignota, quæ ab ecclesia probantur, amplectitur. » 2 Bellarmin 3 dit : « In eo qui credit, duo sunt, apprehensio et judicium, sive assensus : sed apprehensio non est fides, sed aliud fidem præcedens. Possunt enim infidèles apprehendere mysteria fidei. Præterea, apprehensio non dicitur proprie notifia..... Mysteria fidei, quæ rationem superant, credimus, non intelligimus, ac per hoc fides distinguitur contra scientiam, et melius per ignorantiam, quam per notitiam definitur. La foi exigée du peuple est simplement : « Une intention générale de croire tout ce que l’Église croit. » 4 L’Église enseigne qu’il y a sept sacrements. Un homme qui n’a aucune idée de ce que signifie le mot sacrement, ou quels rites sont considérés par l’Église comme ayant un caractère sacramentel, est tenu de croire que les ordres, la pénitence, le mariage et les rites extrêmes l’onction, sont des sacrements. Il en est de même de toutes les autres doctrines de l’Église. On dit que la vraie foi est compatible avec l’ignorance absolue. Selon cette doctrine, un homme peut être un vrai chrétien, s’il se soumet à l’Église, bien que dans ses convictions intérieures et ses modes de pensée, il soit panthéiste ou païen.
1 Summa, II. ii. quæst. ii. art. 5, édit. Cologne, 1040, p. 7, a, de la troisième série.
2 Ilutterus Redivivus, § 108, 6e édit. Leipzig, 1845, p. 271.
3 De Justificntione, lib. i. eap. 7, Disput at.iones, édit. Paris, 1608, t. IV, p. 714, a,'c.
4 Strauss, Dogmatik, Die Christliche Glaubenslehre, Tübingen et Stuttgart, 1840, t. I, p. 284
C’est à cette grave erreur quant à la nature de la foi qu’il faut rapporter beaucoup de choses dans le caractère et la pratique de l’Église romaine :
1. C’est la raison pour laquelle les Écritures sont cachées au peuple. Si la connaissance n’est pas nécessaire à la foi, il n’est pas nécessaire que les gens sachent ce que la Bible enseigne.
2. Pour la même raison, les services du culte public sont dans une langue inconnue.
3. D’où aussi le symbolisme qui caractérise leur culte. La fin à accomplir est une révérence et une crainte aveugles. À cette fin, il n’est pas nécessaire que ces symboles soient compris. Il suffit qu’ils affectent l’imagination.
4. C’est au même principe qu’il faut rapporter la pratique de la réserve dans la prédication. La vérité peut être cachée ou dissimulée.
La croix est brandie devant le peuple, mais il n’est pas nécessaire que la doctrine du sacrifice pour le péché qui y est fait soit enseignée. Il suffit que le peuple soit impressionné ; Peu importe qu’ils croient que le signe, ou le matériel, ou la doctrine symbolisée, assure le salut. Bien plus, plus l’esprit est sombre, plus le sentiment excité est vague et mystérieux, et plus la soumission est aveugle, plus l’exercice de la foi est authentique. « La lumière religieuse, dit M. Newman, c’est l’obscurité intellectuelle. » 1
1 Sermons, t. I, p. 124.
5. C’est sur le même principe que les missions catholiques romaines ont toujours été conduites. Le peuple n’est pas converti par la vérité, non par une instruction, mais par le baptême. Ils sont faits chrétiens par milliers, non par l’adoption intelligente du christianisme comme système de doctrine, afin qu’ils soient profondément ignorants, mais par la simple soumission à l’Église et à ses rites prescrits. Il en est résulté que les missions catholiques, bien qu’elles aient continué dans certains cas pendant plus de cent ans, n’ont plus d’emprise sur le peuple, mais s’éteignent presque uniformément, dès que l’approvisionnement des ministres étrangers est coupé.
On l’a déjà vu, —
1. Cette foi, c’est-à-dire l’acte de croire, ne peut pas être correctement définie comme l’assentiment de l’entendement déterminé par l’artillerie. Il y a, sans aucun doute, de nombreux cas dans lesquels un homme croit contre sa volonté.
2. On a également soutenu qu’il n’est pas correct de dire que la foi est un assentiment fondé sur le sentiment. Sur ce point, il a été admettait que les sentiments d’un homme ont une grande influence sur sa foi ; qu’il est relativement facile de croire ce qui est agréable, et difficile de croire ce qui est désagréable. Il a été admis aussi que dans la foi salvifique, don de Dieu, reposant sur le témoignage intérieur et lumineux de l’Esprit Saint, il y a un discernement non seulement de la vérité, mais de l’excellence divine des choses de l’Esprit, qui est inséparablement lié au sentiment approprié. Il a en outre été admis qu’en ce qui concerne la conscience du croyant, il semble recevoir la vérité sur sa propre évidence, sur son excellence et son pouvoir sur son cœur et sa conscience. Ceci, cependant, est analogue à d’autres faits de son expérience. Quand un homme se repent et croit, il est conscience seulement de ses propres exercices et non des influences surnaturelles de l’Esprit, auxquelles ces exercices doivent leur origine et leur nature. C’est ainsi que, dans l’exercice de la foi, la conscience n’atteint pas le témoignage intérieur de l’Esprit sur lequel cette foi est fondée. Néanmoins, malgré ces aveux, il est encore faux de dire que la foi est fondée sur le sentiment, parce que ce n’est que de certaines formes ou exercices de la foi que l’on peut même dire vraisemblablement ; et parce qu’il y a beaucoup d’exercices de foi même salvatrice (c’est-à-dire de foi en un vrai croyant) qui ne sont pas suivis de sentiment. C’est le cas lorsque l’objet de la foi est un fait historique. De plus, les Écritures enseignent clairement que le fondement de la foi est le témoignage de Dieu, ou la démonstration de l’Esprit. Il a révélé certaines vérités, et il les accompagne d’une telle quantité et d’une telle sorte de preuves qu’elles produisent la conviction, et nous les recevons sur son autorité.
3. La foi n’est pas nécessairement liée au sentiment. Parfois c’est le cas, et parfois ce n’est pas le cas. Qu’il le soit ou non, cela dépend, — (a) de la nature de l’objet. La croyance en une bonne nouvelle est nécessairement accompagnée de joie ; de mauvaises nouvelles avec chagrin. La croyance en l’excellence morale implique un sentiment d’approbation. La croyance qu’un certain acte est criminel implique la désapprobation. (b.) Sur le terrain immédiat de la foi. Si un homme croit qu’un tableau est beau sur le témoignage de juges compétents, il n’y a pas de sentiment esthétique lié à sa foi. Mais s’il a personnellement perçoit la beauté de l’objet, alors le plaisir est inséparable de la conviction qu’il est beau. De la même manière, si un homme croit que Jésus est Dieu manifesté dans la chair, sur la simple témoignage extérieur de la Bible, il n’éprouve aucune impression due à partir de cette vérité. Mais si sa foi est fondée sur l’intériorité témoignage de l’Esprit, par lequel la gloire de Dieu sur la face de Jésus-Christ lui est révélée, alors il est rempli d’admiration et d’amour adorateurs.
La foi religieuse plus qu’un simple assentiment.
4. Une autre question agitée à ce sujet est de savoir si la foi est un exercice purement intellectuel, ou si elle est aussi un exercice des affections. Cette question est à peu près liée à la question précédente, et doit recevoir sensiblement la même réponse. Bellarmin1 dit : « Tribus in rebus ab hæreticis Catholic ! dissidence ; Primum, in objecto fidei justificantis, quod hærctici restringunt ad solam promissiouem misericordiæ specialis, catholique ! tarn late patere volunt, quam late patet verbum Dei. . . . Deinde in facilitate et potentia animi quæ sedes est fidei. Siquidem illi fidem collocant in voluntate [sen in corde] cum fiduciam esse definiunt ; ac per hoc earn cum spe confundunt. Fiducia enim nihil est aliud, nisi spes roborata. . . . Catholique! fidem dans l’intellect !! Sedem Habere Docent. Denique, in ipso actu intellectus. Ipsi enim per notitiam fidem definiunt, nos per assensum. Assentimur enim Deo, quamvis ea nobis credenda proponat, quæ non intelligimus. » Considérant la foi comme un simple acte intellectuel ou spéculatif, ils nient systématiquement qu’elle soit nécessairement liée au salut. Selon leur doctrine, un homme peut avoir la vraie foi, c’est-à-dire la foi que les Écritures exigent, et pourtant périssent. Sur ce point, le concile de Trente dit : « Si quis dixerit, amissa per peccatum gratia, simul et fidem semper amitti, aut fidem, quæ remanet, non esse veram fidem, licet non sit viva ; aut eum, qui fidem sine caritate habet, non esse Christianum ; anathème, assieds-toi.» 1
1 De Justificalione, lib. i. cap. 4, Disputationes, édit. Paris, 1608, t. IV, p. 706, d, e.
1 Session vi., canon 28 ; Strcitwolf , Libri Symbolic !, Göttingen, 1848, t. I, p. 37.
D’autre part, les protestants soutiennent d’une seule voix que la foi, qui est liée au salut, n’est pas un simple exercice intellectuel. Calvin dit :2 « Verum observemus, fidei sedem non in cerebro esse, sed in corde : neque vero de co contenderim, qua in parte corporis sita sit tides : sed quoniam cordis nomen pro serio et sincero affectu fere capitur, dico firmam esse et efficacem fiduciam, non nudam tantum notionem. » Il dit aussi :3 Quodsi expenderent illud Pauli, Corde creditur ad justitiam (Rom. x. 10) : fingere desinerent frigidam illam qualitatem. Si una hæc nobis suppeteret ratio, valere deberet ad litem finiendam ; assensiouem scilicet ipsam sicuti ex parte attigi, et fusius iterum repetam, cordis esse magis quam cerebri, et affectas magis quam intelligentiæ. »
2 Sur Romains, x. 10 ; Commentaires, édit. Berlin, 1831, t. V, p. 139.
3 Institutio , hi. ii. 8 ; édit. Berlin, 1834, t. I, p. 358.
La réponse dans le Catéchisme de Heidelberg, à la question : Qu’est-ce que la foi ? est : « Ce n’est pas seulement une certaine connaissance, par laquelle je reçois comme vrai tout ce que Dieu nous a révélé dans sa Parole, mais aussi une confiance cordiale, que le Saint-Esprit opère en moi par l’Évangile, que non seulement pour les autres, mais pour moi aussi, le pardon des péchés, la justice et la vie éternelles sont donnés par Dieu, par pure grâce, et uniquement à cause des mérites de Christ.» 4
4 Question n° 21.
Que la foi qui sauve n’est pas une simple spéculation l’assentiment de l’entendement, c’est la doctrine uniforme des symboles protestants. Sur ce point, cependant, on peut remarquer, en premier lieu, que, comme on l’a souvent dit auparavant, les Écritures ne font pas la distinction nette entre l’entendement, les sentiments et la volonté, qui est commune de nos jours. Une grande partie de nos actes et de nos états intérieurs sont si complexes qu’ils sont des actes de l’âme tout entière, et non pas exclusivement de l’une de ses facultés. Dans le repentir, il y a nécessairement une appréhension intellectuelle de nous-mêmes en tant que pécheurs, de la sainteté de Dieu, de sa loi à laquelle nous n’avons pas été conformés et de sa miséricorde en Christ ; il y a une désapprobation morale de notre caractère et de notre conduite ; un sentiment de tristesse », de honte et de remords ; et un but d’abandonner le péché et de mener une vie sainte. L’état d’esprit n’est guère moins complexe exprimée par le mot foi telle qu’elle existe chez un vrai croyant. En second lieu, il y a une distinction à faire entre la foi en général et la foi qui sauve. Si nous prenons cet élément de foi qui est commun à tout acte de croyance ; Si nous entendons par là l’appréhension d’une chose comme vraie et digne de confiance, qu’il s’agisse d’un fait de l’histoire ou de la science, alors on peut dire que la foi, dans sa nature essentielle, est un assentiment intellectuel ou intelligent. Mais si la question est : Quel est cet acte ou cet état d’esprit qui est requis dans l’Évangile, quand il nous est commandé de croire ; La réponse est très différente. Croire que le Christ est « Dieu manifesté dans la chair » n’est pas la simple conviction intellectuelle que personne, qui n’est pas vraiment divin, ne peut être et faire ce que Christ a été et fait ; Pour cette conviction, les démoniaques avouèrent ; mais c’est pour le recevoir comme notre Dieu. Cela inclut l’appréhension et la conviction de sa gloire divine, et la révérence d’adoration, l’amour, la confiance et la soumission, qui sont dus à Dieu seul. Lorsqu’il nous est commandé de croire en Christ comme le Sauveur des hommes, nous ne sommes pas simplement tenus d’acquiescer à la proposition qu’il sauve les pécheurs, mais aussi de recevoir et de nous reposer sur lui seul pour notre propre salut. Ce que les Écritures entendent donc par foi, à cet égard, la foi qui est requise pour le salut, est un acte de toute l’âme, de l’intelligence, du cœur et de la volonté.
Preuve de la doctrine protestante.
La doctrine protestante selon laquelle la foi qui sauve inclut la connaissance, l’assentiment et la confiance, et n’est pas, comme l’enseignent les romanistes, un simple assentiment, est soutenue par d’abondantes preuves.
1. En premier lieu, elle est prouvée par la nature de l’objet de la foi salvifique. Cet objet n’est pas seulement la vérité générale de l’Écriture, ni le fait que l’Évangile révèle le plan de Dieu pour sauver les pécheurs ; mais c’est le Christ lui-même ; sa personne et son œuvre, et l’offre du salut pour nous personnellement et individuellement. D’après la nature du cas, nous ne pouvons, comme nous venons de le remarquer, croire au Christ sur le témoignage intérieur de l’Esprit qui révèle sa gloire et son amour, sans que les sentiments de révérence, d’amour et de confiance ne se mêlent à l’acte et n’en constituent le caractère. Il n’est pas non plus possible qu’une âme opprimée par le sentiment du péché reçoive la promesse d’être délivrée de sa culpabilité et de sa puissance, sans aucun sentiment de gratitude et de confiance. L’acte de foi en une telle promesse est par nature un acte d’appropriation et de confiance.
2. Nous constatons donc que, dans de nombreux cas, dans la Bible, le mot confiance est utilisé au lieu de foi. Le même acte ou état de mind qui, dans un endroit, est exprimé par un mot, est exprimé dans d’autres par l’autre. Les mêmes promesses sont faites à la confiance qu’à la foi. Les mêmes effets sont attribués à l’un, qui sont attribués à l’autre.
3. L’emploi d’autres mots et d’autres formes d’expression pour expliquer l’acte de foi, et substitués à ce mot, montre qu’il inclut la confiance comme un élément essentiel de sa nature. Il nous est commandé de regarder à Christ, comme les Israélites mourants ont levé les yeux vers le serpent d’airain. Cette recherche impliquait la confiance ; et regarder, c’est déclarer croire. Les pécheurs sont exhortés à fuir vers le Christ comme refuge. Le tueur d’hommes s’est enfui vers la ville de refuge parce qu’il comptait sur elle comme lieu de sécurité. On dit que nous recevons Christ, que nous nous reposons sur Lui, que nous nous saisissons de Lui. Tous ces modes d’expression, et d’autres qui nous enseignent ce que nous devons faire quand il nous est commandé de croire, montrent que la confiance est un élément essentiel dans l’acte de la foi qui sauve.
4. Le commandement de croire est exprimé par le mot πιστεύω non seulement lorsqu’il est suivi de l’accusatif, mais aussi lorsqu’il est suivi du datif et des prépositions επί, εις, <h׳. Mais le sens littéral de πιστεύειν ds, ou επί, ou εν, n’est pas simplement de croire, mais de croire, de se confier, de faire confiance. La foi en une promesse faite à nous-mêmes, de par la nature du cas, est un acte de confiance en celui qui fait la promesse.
5. L’incrédulité s’exprime donc par le doute, la peur, la méfiance et le désespoir.
6. Le croyant sait par sa propre expérience que lorsqu’il croit, il reçoit et se repose sur Jésus-Christ pour le salut, tel qu’il nous est offert gratuitement dans l’Évangile.
La controverse entre romanistes et protestants à ce sujet tourne autour de la conception du plan du salut. Si, comme le soutiennent les protestants, tout homme, pour être sauvé, doit recevoir le témoignage que Gcd a donné de son Fils ; Si nous croyons qu’il est Dieu manifesté dans la chair, propitiation pour nos péchés, prophète, prêtre et roi de son peuple, alors il faut admettre que la foi implique la confiance en Christ comme étant pour nous la source de la sagesse, de la justice, de la sanctification et de la rédemption. Mais si, comme l’enseignent les romanistes, les bienfaits de la rédemption ne se transmettent que par les sacrements , efficaces ex opere operato, alors la foi est le contraire de l’infidélité dans son sens populaire. Si un homme n’est pas croyant, il est un infidèle, c’est-à-dire un rejeteur du christianisme. L’objet de la foi est la révélation divine telle qu’elle est contenue dans la Bible. C’est un simple assentiment au fait que les Écritures viennent de Dieu, et que l’Église est un institut divinement constitué et doté de dons supranataux pour le salut des hommes. Croyant cela, le pécheur vient à l’Église et reçoit par son ministère, à sa mesure, tous les bienfaits de la rédemption. Selon ce système, la nature et l’office de la foi sont entièrement différents de ce qu’ils sont selon la théorie protestante de l’Évangile.
En ce qui concerne le rapport entre la foi et l’amour, il y a trois points de vue différents :
1. Que l’amour est le fondement de la foi ; que les hommes croient la vérité parce qu’ils l’aiment. La foi est fondée sur le sentiment. Ce point de vue a déjà été suffisamment discuté.
2. Que l’amour est l’accompagnateur invariable et nécessaire et la conséquence de la foi qui sauve. Comme aucun homme ne peut voir et croire qu’une chose est moralement bonne sans le sentiment de l’approbation ; de sorte que personne ne peut voir et croire la gloire de Dieu telle qu’elle est révélée dans les Écritures sans que la révérence adoratoire ne s’éveille dans son âme ; personne ne peut croire au salut que Christ est le Fils de Dieu et le Fils de l’homme ; qu’il nous a aimés et qu’il s’est livré lui-même pour nous, et qu’il fait de nous des rois et des prêtres pour Dieu, sans amour et sans dévotion, en proportion de la clarté et de la force de cette foi, remplissant le cœur et contrôlant la vie. C’est pourquoi on dit que la foi agit par l’amour et purifie le cœur. Les romanistes, en effet, rendent ττίστις δι αγάπης èi’epyov/jίνη dans ce passage (Gal. v. 6), « la foi perfectionnée ou complétée par l’amour ». Mais cela est contraire à l’usage constant du mot ε’νεργείσ^αι dans le Nouveau Testament, qui est toujours employé dans un sens moyen, « vim suam exscrere ». Selon l’enseignement de l’Apôtre dans Rom. vii. 4-6, l’amour sans la foi, ou antérieur à celle-ci, est impossible. Tant que nous ne croyons pas, nous sommes sous la condamnation de la loi. Tant que nous sommes sous la condamnation, nous sommes en inimitié avec Dieu. Lorsque nous sommes en inimitié avec Dieu, nous produisons du fruit jusqu’à la mort. Ce n’est que lorsque nous sommes réconciliés avec Dieu et unis à Christ que nous portons du fruit pour Dieu. Croyant que Dieu nous aime, nous l’aimons. Croyant que le Christ s’est donné lui-même pour nous, nous lui consacrons notre vie. Croyant que la mode de ce monde passe, que les choses invisibles sont éternelles, ceux qui ont cette foi qui est la substance des choses qu’on espère, et l’évidence des choses qu’on ne voit pas, fixent leurs affections sur les choses d’en haut où Christ est assis à la droite de Dieu. Ce lien nécessaire entre la foi et l’amour a déjà été suffisamment insisté.
Les romanistes font de l’amour l’essence de la foi.
3. Le troisième point de vue doctrinal sur ce sujet est celui des romanistes, qui font de l’amour l’essence de la foi. En d’autres termes, l’amour avec eux est la forme (au sens scolastique du mot) de faitli ; c’est ce qui lui donne l’être ou le caractère d’une vertu ou d’une grâce chrétienne. D’un côté, ils enseignent, comme nous l’avons vu avec le concile de Trente, que la foi n’est en elle-même qu’un assentiment intellectuel, sans aucune vertu morale, et qui peut être exercée par ceux qui ne sont pas renouvelés ou par ceux qui sont en état de péché mortel ; d’autre part, ils soutiennent qu’il y a une grâce chrétienne telle que la foi ; Mais dans ce cas, la foi n’est qu’un autre nom pour l’amour. Ce n’est pas la distinction entre une foi vivante et une foi morte que les Écritures et tous les chrétiens évangéliques reconnaissent. Chez les romanistes, la fides informis est la vraie foi, et la fides formata est l’amour. Sur ce point, Pierre Lombard 1 dit : « Fides qua dicitur [créditin' ?], si cum caritate sit, virtue est, quia caritas ut ait Ambrosius mater est omnium virtutura, quæ onines informât, sine qua nulla vera virtus est. » Thomas d’Aquin2 dit : « Actus fidei ordinatur ad objectuni voluntatis, quod est bonum, sicut ad finem. Hoc autem bonum quod est finis fidei, scilicet bonum divinum, est proprium objectum charitatis : et ideo charitas dicitur forma fidei. in quantum per charitatem actus fidei perficitur et formatur.'' Bellarmin 3 dit : « Quod si charitas est forma fidei, et fides non justifient formaliter, nisi ab ipsa caritate formata certc multo magis chantas ipsa justificat..... Fides quæ agitur, ac movetur, formatai·, et quasi animatin' per dilectionem..... Apostolus Paulus .... explicat dilectionem forma !! esse extrinsecam fidei non intrinsecam, quæ det illi, non ut sit, sed ut moveatur. » Tout cela est intelligible et raisonnable, pourvu que nous admettions la justification subjective et le mérite des bonnes œuvres. Si la justification est la sanctification, alors on peut admettre que l’amour a plus à voir avec la sainteté des hommes que la foi considérée comme un simple assentiment intellectuel. Et si l’on admet que nous sommes acceptés par Dieu sur la base de notre propre vertu, alors on peut accorder que l’amour a plus de valeur que n’importe quel simple exercice de l’intellect. Les romanistes argumentent : « Maxima virtue maxime justificat. Dilectio est maxima virtue. Ergo maxime justificat. » C’est parce que cette distinction entre une « foi formée et une foi non formée » a été faite dans l’intérêt de la justification sur la base de notre propre caractère et de notre propre mérite, que Luther, avec sa véhémence habituelle, dit : « Ipsi duplicem faciunt fidem, informe !! Et formatai!, hanc pestilentissimam et satanican ! glossam non possum non vehementer detestari. » Ce n’est qu’en ce qui concerne les fausses conceptions de la justification que cette question a une importance réelle. Car il est admis par tous les protestants que la foi et l’amour qui sauvent sont inséparablement liés ; que la foi sans amour, c’est-à-direי qu’une foi qui ne produit pas l’amour et les bonnes œuvres, est morte. Mais les protestants s’obstinent à nier que nous soyons justifiés à cause de l’amour, ce qui est le vrai sens des romanistes quand ils disent : « fides non justificat formalité !·, nisi ab ipsa caritate formata ».
1 Liber Sententiarum, HI. xxiii. C. édit. 1472 ( ?).
2 Summa, u. ii. quæst. iv. art. 3, édit. Cologne, 1640, p. 11, a, de la troisième série.
3 De Justificatione, lib. ii. cap. 4 ; Disputatlones, édit. Paris, 1603, t. IV, p. 789, a, b, 790, ch.
§ 7. L’objet de la foi qui sauve.
Il est admis que tous les chrétiens sont tenus de croire, et que tous croient tout ce qui est enseigné dans la Parole de Dieu, dans la mesure où le contenu des Écritures leur est connu. Il est donc correct de dire que l’objet de la foi est toute la révélation de Dieu telle qu’elle est contenue dans sa Parole. Comme la Bible est pour les protestants la seule règle infaillible de foi et de pratique, rien qui ne soit expressément enseigné dans l’Écriture, ou déduit d’elle par une inférence nécessaire, ne peut être imposé au peuple de Dieu comme un article de foi. C’est « la liberté par laquelle le Christ nous a rendus libres » et dans laquelle nous sommes tenus de nous tenir fermement. C’est notre protection, d’une part, contre les usurpations de l’Église. Les romanistes revendiquent pour l’Église la prérogative d’un enseignement infaillible et faisant autorité. Le peuple est tenu de croire tout ce que l’Église, c’est-à-dire ses organes, les évêques, déclare faire partie de la révélation de Dieu. Ils ne s’arrogent pas, en effet, le droit de « faire » de nouveaux articles de foi. Mais ils prétendent avoir le pouvoir de décider, de manière à lier la conscience du peuple, de ce que la Bible enseigne ; et ce que l’Église sait par tradition inclure dans l’enseignement du Christ et de ses apôtres. Cela leur donne assez de latitude pour enseigner les doctrines, les commandements des hommes. Bellarmin1 dit : « Omnium dogmatum firmitas pendet ab auctoritate præsentis ecclesiæ. » D’un autre côté, cependant, ce n’est pas seulement contre les usurpations de l’Église, que le principe dont nous venons de parler est notre sécurité, mais aussi contre la tyrannie de l’opinion publique. Les hommes sont aussi impatients de la contradiction aujourd’hui qu’ils ne l’ont jamais été. Ils manifestent le même désir de voir leurs propres opinions promulguées dans des lois et appliquées par l’autorité divine. Et ils sont tout aussi féroces dans leurs dénonciations de tous ceux qui osent s’opposer à eux. C’est pourquoi ils se réunissent en conventions ou autres assemblées, ecclésiastiques ou volontaires, et décident de ce qui est vrai et de ce qui est faux dans la doctrine, et de ce qui est juste et de ce qui est mal dans les mœurs. Contre toute présomption indue d’autorité, les vrais protestants s’accrochent fermement aux deux grands principes : le droit de juger en privé, et que les Écritures sont la seule règle infaillible de la foi et de la pratique. L’objet de la foi, c’est donc toutes les vérités révélées dans la Parole de Dieu. Tout ce que Dieu déclare vrai dans la Bible, nous sommes tenus de le croire. C’est ce que les théologiens appellent fides generalis.
1 De Sacram. lib. ii. c. 2. ( ?)
Mais, en plus de cela, il y a une fides specialis nécessaire au salut. Dans le contenu général des Écritures, il y a certaines doctrines concernant Christ et son œuvre, et certaines promesses de salut faites par lui aux hommes pécheurs, que nous sommes tenus de recevoir et sur lesquelles nous sommes tenus de nous confier. L’objet spécial de la foi est donc Christ et la promesse du salut par lui. Et l’acte spécial et défini de la foi qui assure notre salut est l’acte de le recevoir et de se reposer sur lui tel qu’il nous est offert dans l’Évangile. C’est enseigné si clairement et si diversement dans les Écritures qu’il est difficile d’admettre qu’on puisse le contester.
En premier lieu, notre Seigneur déclare à plusieurs reprises que ce que les hommes sont tenus de faire, et ce qu’ils sont condamnés parce qu’ils ne le font pas, c’est de croire en Lui. Il a été soulevé « Afin que quiconque croit en lui ne périsse point, mais qu’il ait la vie éternelle. » (Jean iii. 15.) « Celui qui croit en lui n’est pas condamné, mais celui qui ne croit pas est déjà condamné, parce qu’il n’a pas cru au nom du Fils unique de Dieu. » (v. 18.) « Celui qui croit au Fils a la vie éternelle, mais celui qui ne croit pas au Fils ne verra pas vie; mais la colère de Dieu demeure sur lui. (v. 36.) « Telle est la volonté de celui qui m’a envoyé, afin que quiconque voit le Fils, et croit en lui, ait la vie éternelle, et je le ressusciterai au dernier jour. » (Jean vi. 40.) « En vérité, en vérité, je vous le dis, celui qui croit en moi a la vie éternelle. Je suis ce pain de vie..... C’est le pain qui descend du ciel, .... Si quelqu’un mange de ce pain, il vivre éternellement. (vers. Dans un autre passage, notre Seigneur dit : « C’est là l’œuvre de Dieu, que vous croyiez en celui qu’il a envoyé. » (Jean vi. 29.) Mais les passages où la foi en Christ est expressément exigée comme condition du salut sont aussi nombreux à citer.
On dit que nous sommes sauvés en recevant Christ.
Que Christ soit l’objet immédiat de la foi salvifique, c’est aussi enseigné dans tous les passages où l’on dit que nous recevons Christ, ou le témoignage de Dieu concernant Christ, et où l’on dit que cet acte de recevoir assure notre salut. Par exemple, dans Jean i. 12 : « À tous ceux qui l’ont reçu, il leur a donné le pouvoir de devenir fils de Dieu. » « Je suis venu au nom de mon Père, et vous ne me recevez pas. » (Jean v. 43.) Si nous recevons le témoignage des hommes, le témoignage de Dieu est plus grand, car c’est là le témoignage de Dieu qu’il a rendu de son Fils. Celui qui croit au Fils de Dieu a le témoignage en lui-même : celui qui ne croit pas en Dieu a fait de lui un menteur ; parce qu’il ne croit pas au témoignage que Dieu a rendu de son Fils. (1 Jean v. 9, 10.) « Celui qui a le Fils a la vie ; celui qui n’a pas le Fils de Dieu n’a pas la vie. (v. 12.) « Quiconque croit que Jésus est le Christ est né de Dieu. » (v. 1.) C’est donc recevoir le Christ ; recevant le témoignage que Dieu a donné de son Fils ; croire qu’Il est le Christ, le Fils du Dieu vivant, ce qui est l’acte spécifique qui nous est demandé pour le salut. Le Christ est donc l’objet immédiat des exercices de la foi qui assurent le salut. Et, par conséquent, la foi s’exprime en regardant vers le Christ ; venir au Christ : Lui confier l’âme, etc.
C’est pourquoi l’apôtre enseigne que nous sommes justifiés « par la foi du Christ ». Ce n’est pas la foi en tant que disposition pieuse de l’esprit ; non pas la foi en tant que confiance générale en Dieu ; non pas la foi en la vérité de la révélation divine ; encore moins la foi « dans les vérités éternelles », ou les principes généraux de la vérité et du devoir, mais cette foi dont Christ est l’objet. Romains iii. 22 : « La justice de Dieu, qui est par la foi en Jésus-Christ, pour tous et sur tous ceux qui croient. » Galates ii. 16 : « Sachant que l’homme n’est pas justifié par les œuvres de la loi, mais par la foi de Jésus-Christ, nous avons cru en Jésus-Christ, afin d’être justifiés par la foi de Christ, et non par les œuvres de la loi. » 24 : « La loi était notre maîtresse d’école pour nous conduire à Christ, afin que nous soyons justifiés par la foi. » v. 26 : « Car vous êtes tous enfants de Dieu par la foi en Jésus-Christ. » Galates ii. 20 : « Je vis par la foi au Fils de Dieu », etc., etc.
Le Christ déclare qu’il s’est donné lui-même en rançon pour beaucoup ; Il a été présenté comme une propitiation pour les péchés ; Il s’est offert lui-même en sacrifice à Dieu. C’est par le mérite de sa justice et de sa mort que les hommes sont sauvés. Toutes ces représentations qui imprègnent les Écritures supposent nécessairement que la foi qui assure le salut doit avoir une référence spéciale à Lui. S’il est notre Rédempteur, nous devons le recevoir et lui faire confiance en tant que tel. S’il est propitiation pour les péchés, c’est par la foi en son sang que nous sommes réconciliés avec Dieu. Tout le plan du salut, tel qu’il est exposé dans l’Évangile, suppose que le Christ, dans sa personne et dans son œuvre, est l’objet de la foi et le fondement de la confiance.
Nous vivons en Christ par la foi.
La même chose découle des représentations données de la relation du croyant avec Christ. Nous sommes en Lui par la foi. Il habite en nous. Il est la tête de laquelle nous, en tant que membres de son corps, tirons notre vie. Il est la vigne, nous sommes les sarments. Ce n’est pas nous qui vivons, mais le Christ, qui vit en nous. Ces représentations et d’autres sont tout à fait incompatibles avec la doctrine selon laquelle c’est une foi vague et générale en Dieu ou dans les Écritures qui assure notre salut. C’est une foi qui se termine directement sur Christ, qui le prend pour notre Dieu et notre Sauveur. Dieu a envoyé son Fils dans le monde, revêtu de notre nature, pour révéler sa volonté, pour mourir pour nos péchés et ressusciter pour notre justification. En Lui habite la plénitude de la Divinité, de sa plénitude nous sommes remplis. Il est pour nous la sagesse, la justice, la sanctification et la rédemption. Ceux qui reçoivent ce Sauveur comme étant tout ce qu’il prétend être, et remettent leur âme entre ses mains pour être utilisées à son service et sauvées pour sa gloire, sont, dans le sens biblique du terme, des croyants. Christ n’est pas seulement l’objet de leur foi, mais toute leur à l’intérieur, la vie spirituelle se termine sur Lui. Rien donc ne peut être plus étranger à l’Évangile que la doctrine romaine, substantiellement ravivée par la philosophie moderne qui détourne l’esprit du Christ historique, réellement existant, objectif, vers l’œuvre en nous ; ne nous laissant rien à aimer et à confier, si ce n’est ce qu’il y a dans nos cœurs misérables.
Le Christ n’est pas seulement reçu dans un office spécial.
En admettant que le Christ soit l’objet immédiat et spécial des actes de foi qui assurent le salut, on se demande si c’est le Christ dans tous ses offices, ou le Christ dans son office sacerdotal en particulier, qui est l’objet de la justification de la foi. Cette question semble inutile. Il n’est pas soulevé dans la Bible ; Elle ne se suggère pas non plus au croyant. Il reçoit le Christ. Il ne se demande pas pour quelle fonction spéciale de son œuvre salvifique il l’accepte ainsi. Il Le prend comme un Sauveur, comme un libérateur de la culpabilité et de la puissance du péché, de la domination de Satan et de tous les maux de son apostasie de Dieu. Il Le prend comme sa sagesse, sa justice, sa sanctification et sa rédemption. Il Le prend comme son Dieu et Sauveur, comme la portion pleine, complète, satisfaisante et vivifiante de l’âme. Si l’on analysait cet acte complexe d’appréhension et d’abandon, on trouverait sans doute qu’il comprend la soumission à tout son enseignement, la confiance en sa justice et son intercession, la soumission à sa volonté, la confiance en sa protection et le dévouement à son service. Comme Il nous est offert comme prophète, prêtre et roi, en tant que tel, Il est accepté. Et comme il nous est offert comme source de vie, de gloire et de béatitude, comme objet suprême d’adoration et d’amour, il est accepté avec joie.
Le pécheur est-il tenu de croire que Dieu l’aime ?
On se demande encore si l’objet de la foi qui sauve est que Dieu soit réconcilié avec nous ; que nos péchés sont pardonnés ; que nous sommes les objets de l’amour salvifique de Dieu ? Ce n’est pas là la question examinée ci-dessus, à savoir si, comme le disent les romanistes, l’objet de la foi est toute la révélation de Dieu, ou, comme le prétendent les protestants, Christ et la promesse de la rédemption par lui. bien que beaucoup d’arguments des romanistes soient dirigés contre la forme spéciale de la doctrine que nous venons d’énoncer. Ils soutiennent qu’il est contradictoire de dire que nous sommes pardonnés parce que nous croyons ; et, du même souffle, de dire que ce qu’il faut croire, c’est que nos péchés sont déjà pardonnés. De plus, ils soutiennent que le seul objet propre de la foi est une révélation de Dieu, mais il n’est révélé nulle part que nous sommes individuellement réconciliés avec Dieu, ou que nos péchés sont pardonnés, ou que nous sommes les objets de cet amour spécial que Dieu a pour son propre peuple.
En réponse à la première de ces objections, les théologiens réformés avaient coutume de dire qu’il faut faire une distinction entre la rémission du péché de jure déjà obtenue par la mort du Christ, et la rémission de fait par l’application efficace qu’elle nous a faite. Dans le premier sens, la « remissio peccatorum jam impetrata » est l’objet de la foi. Dans ce dernier sens, c’est la remissio impetranda, parce que la foi est la cause instrumentale de la justification et qu’elle doit la précéder. « Unde, dit Turrettin1, ad obtinendam remissionem peccatorum, non debeo credere peccata mihi jam remissa, ut perperam nobis impingunt ; sed debeo credere peccata mihi credent ! et pœnitenti, juxta promissionem factam credentibus et pœnitentibus, remissum iri certis-sime, quæ postea actu secundari et reflexo ex sensu fidei credo mihi esse remissa. »
1 Institutio, xv. xii. 6 ; Œuvres, édit. Édimbourg, 1847, vol. II. à la p. 508.
On a répondu à la deuxième objection en distinguant entre l’acte de foi direct et l’acte de foi réflexe. Par l’acte direct de la foi, nous accueillons le Christ comme notre Sauveur ; par l’acte réflexe, issu de la conscience de croire, nous croyons qu’il nous a aimés et qu’il est mort pour nous, et que rien ne pourra jamais nous séparer de son amour. Ces deux actes sont inséparables, non seulement en tant que cause et effet, antécédent et conséquent ; mais ils ne sont pas séparés dans le temps, ni dans la conscience du croyant. Ce ne sont que des éléments différents de l’acte complexe d’accepter le Christ tel qu’il est offert dans l’Évangile. Nous ne pouvons pas séparer la joie et la gratitude avec lesquelles une grande faveur est acceptée. Bien qu’une analyse psychologique puisse résoudre ces émotions en effets de l’acte d’acceptation, elles appartiennent, telles qu’elles sont révélées dans la conscience, à la nature même de l’acte. C’est l’acceptation cordiale et reconnaissante d’une promesse faite à tous ceux qui l’acceptent. Si l’on promet généralement le pardon aux criminels à la condition de l’aveu de culpabilité, chacun d’entre eux qui fait l’aveu sait ou croit que la promesse lui a été faite. Sur ce point, les premiers théologiens réformés et luthériens étaient d’accord pour enseigner que lorsque le pécheur exerce la foi salvatrice, il croit que pour l’amour du Christ, il est pardonné et accepté de Dieu. En d’autres termes, que le Christ l’a aimé et s’est donné lui-même pour lui. Nous avons déjà vu que le «Catéchisme de Heidelberg» 1, le livre symbolique d’une si grande partie de l’Église réformée, déclare que la foi salvifique est « Certa fiducia, a Spiritu Sancto per evangelium in corde meo accensa, qua in Deo acquiesco, certo statuons, non solum aliis, sed mihi quoque remissionem peccatorum æternam, justitiam et vitam donatam esse, idque gratis, ex Dei misericordia, propter unius Christi meritum.» «Dans l’Apologie de la Confession d’Augsbourg de l’Église luthérienne,» il est dit2 : « Nos præter illam fidem [fidem generalera] requirimus, ut credat sibi quisque remitti peccata ». Calvin dit 3 : « Gratiæ promissione opus est, qua nobis testificetur se propitium esse Patrem : quando nec aliter ad euni appropinquare possumus, et in earn solam reclinare cor hominis potest..... Nunc justa fidei definitio nobis constabit, si dicamus esse divinæ erga nos benevolentiæ firmam certainque cognitionem, quæ gratuitæ in Christo promissionis veritate fundata, per Spiritum Sanctum et revelatur mentibus nostris et cordibus obsignatur. « Hic præciptius fidei cardo vertitur, ne quas Dominas offert misericordiæ promissiones, extra nos tantum veras esse arbitremur, in nobis minime : sed ut potius eas intus complectendo nostras faciamus..... In surama, vere fidelis non est nisi qui solida persuasione Deum sibi propitium benevolumque patrem esse persuasus, de ejus benignitate omnia sibi pollicetur : nisi qui divinæ erga se benevolentiæ promissionibus fretus, indubitatam salutis expectationem præsumit. »
1 xxi. ; Niemeyer, Collectio Confessionum, Leipzig, 1840, p. 434.
2 v. ALLER ; Hase, Libri Symbolic'., Leipzig, 184G, p. 172.
3 Institutio, lib. in. ii. 7, 16 ; édit. Berlin, 1834, t. I, p. 357, 364.
C’est un langage fort. La doctrine, cependant, n’est pas que la foi implique l’assurance. La question porte sur la nature de l’objet vu, non sur la clarté de la vision ; ce que l’âme croit, et non la force de sa foi. C’est ce que Calvin lui-même exprime magnifiquement ailleurs, en disant : « Quand la moindre goutte de foi est instillée dans notre esprit, nous commençons à voir le visage serein et placide de notre Père réconcilié ; Loin et en haut, c’est peut-être, mais on le voit quand même. Un homme dans un donjon peut ne voir qu’un rayon de lumière traversant une crevasse. C’est très différent de la lumière du jour. Néanmoins, ce qu’il voit est lumière. Donc, ce que le pécheur pénitent croit, c’est que Dieu, pour l’amour de Christ, est réconcilié avec lui. C’est peut-être avec une vision très obscure et douteuse qu’il appréhende cette vérité ; mais c’est la vérité sur laquelle repose sa confiance.
Il s’agit là de l’appropriation de la promesse générale de l’Évangile. Les Écritures déclarent que Dieu est amour ; qu’il a présenté son Fils comme propitiation pour le péché ; qu’en Lui Il est réconcilié ; qu’Il recevra tous ceux qui viennent à Lui par Christ. S’approprier ces déclarations générales, c’est croire qu’elles sont vraies, non seulement par rapport aux autres, mais par rapport à nous-mêmes ; que Dieu est réconcilié avec nous. Nous n’avons pas le droit de nous exclure. Cette auto-exclusion est de l’incrédulité. C’est refuser de prendre les eaux de la vie, offertes gratuitement à tous.
C’est pourquoi l’Apôtre dans Galates, II, 20, dit : « La vie que je vis maintenant dans la chair, je la vis par la foi du Fils de Dieu, qui m’a aimé et s’est livré lui-même pour moi. » L’objet de la foi de l’Apôtre était donc les vérités auxquelles il croyait, et dans lesquelles la foi donnait la vie à son âme, (1). Que le Christ est le Fils de Dieu ; (2.) Qu’il l’aimait ; (3.) Qu’Il s’est donné Lui-même pour lui. La foi par laquelle vit un croyant n’est pas spécifiquement différente dans sa nature ou son objet de la foi requise de tout homme pour son salut. La vie de foi n’est que la répétition continuelle, peut-être avec une force et une clarté toujours croissantes, de ces exercices par lesquels nous recevons d’abord le Christ, dans toute sa plénitude et dans toutes ses fonctions, comme notre Dieu et Sauveur. « Qui fit ut vivamus Christi fide ? Quia nos dilexit, et se ipsum tradidit pro nobis. Amor, inquam, quo nos com plexus est Christus, fecit ut se nobis coadunaret. Id implevit morte sua : nam se ipsum tradendo pro nobis, non secus atque in persona nostra passus est..... Neque parum energiæ habet pro me : quia non satis fuerit Christum pro mundi salute mortuum reputare, nisi sibi quisque effectum ac possessionem hujus gratiæ privatim vindicet. » 1
1 Calvin in loco.
On objecte à ce point de vue que par « l’amour de Dieu » ou « de Christ », dans l’affirmation ci-dessus, on n’entend pas la bienveillance générale ou la philanthropie de Dieu, mais son amour spécial, élisant et salvifique. Quand Paul dit qu’il vivait par la foi de Christ qui l’aimait et se donnait lui-même pour lui, il voulait dire quelque chose de plus que le fait que Christ aimait tous les hommes et donc lui parmi les autres. De toute évidence, il se croyait un objet spécial de l’amour du Sauveur. C’est cette conviction qui a donné de la force à sa foi. Et une conviction semblable entre dans la foi de tout vrai croyant. Mais à cela on objecte que la foi doit avoir pour objet une révélation divine. Mais il n’y a pas de révélation de l’amour spécial de Dieu pour les individus, et, par conséquent, aucun individu n’a de fondement biblique pour croire que Christ l’a aimé et s’est donné lui-même pour lui. Quelle que soit la force de cette objection, elle va à l’encontre de la déclaration et de l’expérience de Paul. Il croyait certainement que le Christ l’aimait et qu’il était mort pour lui. Il ne suffit pas de dire que c’était une conclusion tirée de sa propre expérience ; ou de supposer que l’apôtre s’est convaincu que le Christ l’aimait. Christ aime particulièrement tous ceux qui croient en Lui. Je crois en Lui. C’est pourquoi le Christ m’aime particulièrement. Mais une conclusion à laquelle on arrive par l’argumentation n’est pas un objet de foi. La foi doit reposer sur le témoignage de Dieu. Il faut donc que Dieu atteste en quelque sorte à l’âme qu’elle est l’objet de son amour. Il le fait de deux manières. D’abord, par les invitations et les promesses générales de l’Évangile. L’acte de s’approprier, ou d’accepter ces promesses, c’est de croire qu’elles nous appartiennent aussi bien qu’aux autres. Deuxièmement, par le témoignage intérieur de l’Esprit. Paul dit (Rom., v. 5) : « L’amour de Dieu est répandu dans nos cœurs par le Saint-Esprit qui nous est donné. » C’est-à-dire que le Saint-Esprit nous convainc que nous sommes les objets de l’amour de Dieu. Cela se fait, non seulement par les diverses manifestations de son amour dans la providence et la rédemption, mais aussi par ses relations intérieures avec l’âme. « Celui qui m’aime sera aimé de mon Père, et je l’aimerai, et je me manifesterai à lui. » (Jean, xiv, 21). Cette manifestation n’est pas extérieure à travers la parole. C’est à l’intérieur. Dieu a la communion ou les rapports avec les âmes de son peuple. L’Esprit appelle notre amour à Dieu et nous révèle son amour. Encore une fois, dans Romains viii. 10, l’Apôtre dit : « L’Esprit lui-même rend témoignage à notre esprit que nous sommes enfants de Dieu. » Cela ne veut pas dire que l’Esprit excite en nous des sentiments filiaux envers Dieu, d’où nous concluons que nous sommes ses enfants. L’apôtre se réfère à deux sources distinctes de preuves de notre adoption. La première, c’est qu’on peut appeler Dieu Père ; l’autre, le témoignage de l’Esprit. Ce dernier est joint au premier. Le mot est συμμαρτυρεί, s’unit dans le témoignage. C’est pourquoi on dit que nous sommes mis à l’échelle, non seulement marqués et sécurisés, mais assurés par l’Esprit ; et l’Esprit est un gage, une assurance, que nous sommes, et serons toujours, les objets de l’amour salvifique de Dieu. (Éph. i. 13 et 14 ; iv. 30. 2 Corinthiens i. 22.)
Cela ne veut pas dire qu’un homme doit croire qu’il est l’un des élus. L’élection est un dessein secret de Dieu. L’élection d’une personne particulière n’est pas révélée et, par conséquent, n’est pas un objet de foi. C’est une chose qui doit être prouvée, ou assurée, comme le dit l’apôtre Pierre, par les fruits de l’Esprit. Tout ce que la doctrine de la Les réformateurs sur ce sujet incluent que l’âme, en s’engageant à Christ, le fait comme à quelqu’un qui l’a aimée et qui est mort pour son salut. La femme guérie en touchant le vêtement de notre Sauveur, croyait qu’elle était son objet l’amour compatissant, parce que tous ceux qui l’ont touché avec foi ont été inclus dans ce nombre. Sa foi incluait cette conviction.
§ 8. Effets de la foi.
Le premier effet de la foi, selon les Écritures, est l’union avec le Christ. Nous sommes en Lui par la foi. Il y a bien une union fédérale entre le Christ et son peuple, fondée sur l’alliance de rédemption entre le Père et le Fils dans les conseils de l’éternité. Il est donc dit que nous étions en Lui avant la fondation du monde. C’est une des promesses de cette alliance, que tous ceux que le Père avait donnés au Fils viendraient à Lui ; afin que son peuple soit rendu disposé au jour de sa puissance. Christ a donc été élevé à la droite de Dieu, pour donner la repentance et la rémission des péchés. Mais c’était aussi, comme nous l’apprenons des Écritures, inclus dans les stipulations de cette alliance, que son peuple, en ce qui concerne les adultes, ne devait pas recevoir les bienfaits salvateurs de cette alliance avant d’être uni à lui par un acte de foi volontaire. Ils sont « par nature les enfants de la colère, comme les autres ». (Éph. ii. 3.) Ils restent dans cet état de condamnation jusqu’à ce qu’ils croient. Leur union est consommée par la foi. Être en Christ, et croire en Christ, sont donc, dans les Écritures, des formes d’expression convertibles. Ils signifient essentiellement la même chose, et, par conséquent, les mêmes effets sont attribués à la foi que ceux qui sont attribués à l’union avec Christ.
La justification, un effet de la foi.
L’effet immédiat de cette union, et, par conséquent, le second effet de la foi, c’est la justification. Nous sommes « justifiés par la foi du Christ ». (Gal. ii. 16.) « Il n’y a donc plus de condamnation pour ceux qui sont en Jésus-Christ. » (Rom. viii. 1.) « Celui qui croit en lui n’est pas condamné. » (Jean iii. 18.) La foi est la condition à laquelle Dieu promet, dans l’alliance de la rédemption, d’imputer aux hommes la justice de Christ. Par conséquent, dès qu’ils croient, ils ne peuvent pas être condamnés. Ils sont revêtus d’une justice qui répond à toutes les exigences de la justice. « Qui mettra quelque chose à la charge des élus de Dieu ? C’est Dieu qui justifie. Qui est celui qui condamne ? C’est le Christ qui est mort, ou plutôt qui est ressuscité, qui est à la droite de Dieu, qui intercède aussi pour nous. (Rom., VIII, 33, 34.)
La participation à la vie du Christ est un effet de la foi.
Le troisième effet de la foi, ou de l’union avec le Christ, est la participation à sa vie. Ceux qui sont unis au Christ, enseigne l’Apôtre (Rom. VI, 4-10), afin d’avoir part à sa mort, participent aussi à sa vie. « Parce que je vis, vous vivrez aussi. » (Jean xiv. 19.) Christ habite dans nos cœurs par la foi. (Éph. iii. 17.) Le Christ est en nous. (Rom. viii. 10.) Ce n’est pas nous qui vivons, mais Christ vit en nous. (Gal. ii. 20.) L’illustration de Notre-Seigneur de cette union vitale est dérivée d’une vigne et de ses sarments. (Jean xv. De même que la vie de la vigne se répand à travers les sarments, et qu’ils ne vivent qu’en tant qu’ils sont liés à la vigne, de même la vie de Christ se répand à travers son peuple, et ils ne participent à la vie spirituelle et éternelle qu’en vertu de leur union avec lui. Une autre illustration familière de ce sujet est dérivée du corps humain. Les membres tirent leur vie de la tête, et périssent s’ils en sont séparés. (Éph. i. 22 ; 1 Corinthiens xii. 12-27, et souvent). Dans Éphésiens iv. 15, 16, l’apôtre réalise cette illustration en détail. « La tête, c’est-à-dire le Christ, de qui le corps tout entier est convenablement uni et compacté par ce que chaque articulation fournit, selon l’action efficace dans la mesure de chaque partie, fait croître le corps jusqu’à l’édification de lui-même dans l’amour. » Comme le principe de la vie animale situé dans la tête, par le système compliqué mais ordonné de nerfs s’étendant à chaque membre, diffuse la vie et l’énergie dans tout le corps ; de même l’Esprit Saint, donné sans mesure au Christ, chef de l’Église, qui est son corps, répand la vie et la force à tous ses membres. Par conséquent, selon les Écritures, la demeure de Christ en nous est expliquée comme la demeure de l’Esprit en nous. Le séjour de l’Esprit est le séjour de Christ. Si Dieu est en vous ; si le Christ est en vous ; si l’Esprit est en vous, tous signifient la même chose. Voir Romains viii. 9-11.
Expliquer cette union vitale et mystique entre le Christ et son peuple comme une simple union de pensée et de sentiment, c’est tout à fait inadmissible. (1) En premier lieu, elle est contraire au sens ordinaire de ses paroles. Personne ne parle jamais de la demeure de Platon dans les hommes ; qu’il est leur vie, de sorte que sans lui ils ne peuvent rien faire ; et beaucoup moins, de sorte que la sainteté, le bonheur et la vie éternelle dépendent de cette union. (2) Une telle interprétation suppose que notre relation avec le Christ est analogue à la relation d’un homme avec un autre. Tandis que c’est une relation entre les hommes et une personne divine, qui a la vie en elle-même, et donne la vie à autant de personnes qu’elle veut. (3) Elle ignore tout ce que les Écritures enseignent de l’œuvre du Saint-Esprit et de sa demeure dans le cœur des hommes. (4) Elle néglige le caractère surnaturel du christianisme et le réduirait à un simple système philosophique et éthique.
La paix comme fruit de la foi.
Le quatrième effet de la foi est la paix. « Étant justifiés par la foi, nous avons la paix avec Dieu, par notre Seigneur Jésus-Christ. » (Rom. v. 1.) La paix naît d’un sentiment de réconciliation. Dieu promet de pardonner, de recevoir en sa faveur, et finalement de sauver tous ceux qui croient au témoignage qu’il a rendu de son Fils. Croire, c’est donc croire à cette promesse ; et s’approprier cette promesse, c’est croire que Dieu est réconcilié avec nous. Cette foi peut être faible ou forte. Et la paix qui en découle peut être tremblante et intermittente, ou elle peut être constante et assurée.
Faire de l’assurance du salut personnel un élément essentiel de la foi est contraire à l’Écriture et à l’expérience du peuple de Dieu. La Bible parle d’une foi faible. Il regorge de consolations destinées à ceux qui doutent et à ceux qui sont découragés. Dieu accepte ceux qui ne peuvent que dire : « Seigneur, je crois ; Viens au secours de mon incrédulité. Ceux qui font de l’assurance l’essence de la foi, réduisent généralement la foi à un simple assentiment intellectuel. Ils sont souvent censeurs, refusant de reconnaître comme frères ceux qui ne sont pas d’accord avec eux ; et parfois ils sont antinomiques.
En même temps, les Écritures et l’expérience enseignent que l’assurance n’est pas seulement réalisable, mais qu’elle est un privilège et un devoir. Il peut en effet y avoir une assurance, là où il y a pas de vraie foi du tout ; Mais là où il y a la vraie foi, le manque d’assurance doit être rapporté soit à la faiblesse de la foi, soit à des vues erronées du plan du salut. Beaucoup de croyants sincères sont trop introspectifs. Ils regardent trop exclusivement à l’intérieur, de sorte que leur espérance est graduée par le degré de preuve de régénération qu’ils trouvent dans leur propre expérience. Ceci, sauf dans de rares cas, ne peut jamais conduire à l’assurance de l’espoir. Nous pouvons examiner nos cœurs avec tous les soins microscopiques prescrits par le président Edwards dans son ouvrage sur « Les Relisions Affections », et ne soyez jamais satisfaits d’avoir éliminé tout motif de méfiance et de doute. Les motifs de l’assurance ne sont pas tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de nous. Ils sont, selon l’Écriture, (1.) La promesse universelle et inconditionnelle de Dieu que ceux qui viennent à Lui en Christ, Il ne les rejettera en aucune façon ; afin que quiconque le veuille puisse prendre de l’eau de la vie sans argent et sans prix. Nous devons être assurés que Dieu est fidèle et qu’il sauvera certainement ceux qui croiront. (2) L’amour infini, immuable et gratuit de Dieu. Dans les dix premiers versets du cinquième chapitre de l’épître aux Romains, et dans le huitième chapitre de cette épître, depuis le trente-et-unième verset jusqu’à la fin, l’apôtre s’attarde sur ces caractéristiques de l’amour de Dieu, comme fournissant un fondement inébranlable de l’espérance du croyant. (3) Le mérite infini de la satisfaction de Christ, et la prévalence de son intercession continue. Payé, dans Romains viii. 34, insiste particulièrement sur ces points. (4) L’alliance de la rédemption dans laquelle il est promis que tous ceux que le Père a donnés au Fils viendront à lui, et qu’aucun d’eux ne sera perdu. (5.) D’après le témoignage de l’Esprit, Paul dit : « Nous... réjouissez-vous dans l’espérance de la gloire de Dieu », parce que l’amour de Dieu est répandu dans nos cœurs par le Saint-Esprit qui nous a été donné. C’est-à-dire que le Saint-Esprit nous assure que nous sommes les objets de cet amour qu’il décrit ensuite comme infini, immuable et gratuit. (Rom. v. 3-5.) Et encore : « L’Esprit lui-même rend témoignage à notre esprit que nous sommes enfants de Dieu. » Si donc un vrai croyant n’a pas l’assurance de la foi, la faute est en lui-même et non dans le plan du salut, ni dans les promesses de Dieu.
La sanctification, fruit de la foi.
Le cinquième effet de la foi est la sanctification. « Qui sont sanctifiés, dit le Seigneur, par la foi qui est en moi. » Bien que, dans ce verset (Actes, XXVI, 18), les mots « par la foi » ne qualifient pas la clause précédente, « sont sanctifiés », mais doivent être rapportés à tous les détails précédents, — l’illumination, la délivrance de Satan, le pardon des péchés, et l’héritage éternel, — cependant l’antécédent immédiat ne doit pas être omis. Nous sommes sanctifiés par la foi, comme cela est clairement enseigné ailleurs. « La foi qui agit par l’amour et purifie le cœur. » (Gal. v. 6, et Actes xv. 9.)
La relation de la foi à la sanctification est ainsi exposée dans les Écritures :
1. Nous sommes justifiés par la foi. Tant que nous sommes sous la loi, nous sommes sous la malédiction, et nous portons du fruit jusqu’à la mort. Il n’y a et il ne peut y avoir d’amour pour Dieu, et il n’y a pas de vie sainte tant que nous n’avons pas sont délivrés de la colère qui nous est due pour le péché. Nous sommes libérés de la loi, délivrés de sa condamnation, par le corps ou la mort du Christ. C’est par la foi en Lui comme la fin de la loi pour la justice, que nous sommes personnellement libérés de la condamnation et rétablis dans la faveur de Dieu. Voyez tout cela clairement enseigné dans Romains VI, et dans les six premiers versets du septième chapitre. C’est donc par la foi que nous passons de la mort judiciaire à la vie judiciaire, ou justification. C’est le premier et indispensable pas de la sanctification dans la mesure où il se révèle dans la conscience du croyant.
2. C’est par la foi que nous recevons le séjour de l’Esprit. Christ (ou l’Esprit de Christ) habite dans nos cœurs par la foi. La foi est la condition indispensable (pour les adultes sont concernés) de ce séjour de l’Esprit. Et le séjour de l’Esprit est la source de toute vie spirituelle. La foi est en effet le fruit de l’Esprit, et c’est pourquoi le don de l’Esprit doit précéder l’exercice de la foi. Il n’en est pas moins vrai que la foi est la condition du séjour de l’Esprit, et par conséquent de la vie spirituelle. La vie doit précéder la respiration, et pourtant la respiration est la condition nécessaire de la vie.
3. La foi n’est pas seulement la condition de l’Esprit qui habite en nous en tant que source de vie spirituelle, mais nous vivons par la foi. C’est-à-dire que la continuation et l’exercice de la vie spirituelle impliquent et supposent l’exercice constant de la foi. Nous vivons en exerçant la foi en Dieu, en ses attributs, en sa providence, en ses promesses et en toutes les vérités qu’il a révélées. Cette vie est surtout soutenue par les exercices de la foi dont le Christ est l’objet ; sa personne divine et mystérieusement constituée, telle que Dieu se manifeste dans la chair ; son œuvre achevée pour notre rédemption ; son intercession constante ; sa relation intime avec nous, non seulement comme notre prophète, notre prêtre et notre kino·, mais comme notre homme vivant en qui notre vie est cachée en Dieu, et de qui elle coule dans nos âmes. Nous sommes ainsi sanctifiés par la foi, parce que c’est par la foi que toutes les religions, toutes les affections et toutes les activités de la vie spirituelle sont appelées à s’exercer.
4. Nous sommes sanctifiés par la foi, car elle est la substance des choses qu’on espère, et l’évidence des choses qu’on ne voit pas. « Les choses de Dieu », les vérités qu’il a révélées concernant le monde spirituel et éternel n’existent pour nous que comme objets de foi. Mais la foi est à l’âme ce que l’œil est au corps. Elle nous permet de voir les choses invisibles et éternelles. Elle leur donne de la substance, de la réalité, et par conséquent de la puissance, — une puissance dans une certaine mesure en proportion de leur valeur. Ainsi les choses visibles et temporelles perdent leur pouvoir dominant sur l’âme. Ils ne sont pas dignes d’être comparés aux choses que Dieu a préparées pour ceux qui l’aiment. Le croyant, l’idéal, et parfois le croyant réel, comme nous l’apprenons de l’Écriture et de l’histoire, s’élève au-dessus des choses du temps et des sens, vainc le monde et devient céleste. Il vit dans le ciel, respire son atmosphère, est pénétré de son esprit et a une prélibation de ses joies. Cela le rend pur, spirituel, humble, abnégation, laborieux, doux, doux, indulgent, ainsi que ferme et courageux. Tout le onzième chapitre de l’épître aux Hébreux est consacré à l’illustration de la puissance de la foi, en particulier sous cet aspect. L’Apôtre montre que dans les temps passés, même sous la faible lumière de l’ancienne dispensation, elle a permis à Noé de se tenir seul contre le monde, à Abraham d’offrir son fils unique, à Moïse de préférer l’opprobre de Christ aux trésors de l’Égypte ; que d’autres, par la foi, ont soumis les royaumes, opéré la justice, fermé la gueule des lions, éteint la violence du feu ; que d’autres ont été fortifiés par la foi à partir de la faiblesse, devenus vaillants dans le combat ; que d’autres se soumettaient à l’épreuve de moqueries et de flagellations cruelles ; que d’autres, par la foi, ont enduré d’être lapidés, sciés ou tués par l’épée ; et que d’autres encore, par la foi, ont consenti à errer vêtus de peaux de brebis et de peaux de chèvres, démunis, affligés et tourmentés. Tout cela, nous dit-on, par la foi, a obtenu une bonne réputation.
5. La foi sanctifie parce qu’elle est la condition nécessaire de l’efficacité des moyens de la grâce. C’est par le biais de la Parole, les sacrements et la prière, que Dieu communique des apports constants de grâce. Ils sont le moyen d’appeler les activités de la vie spirituelle à l’exercice. Mais ces moyens de grâce sont inopérants à moins qu’ils ne soient reçus et utilisés par la foi. La foi ne leur donne pas, certes, leur puissance, mais c’est la condition à laquelle l’Esprit de Dieu les rend efficaces.
Que les bonnes œuvres soient les effets certains de la foi est inclus dans la doctrine selon laquelle nous sommes sanctifiés par la foi. Car il est impossible qu’il y ait de la sainteté intérieure, de l’amour, de la spiritualité, de la bonté fraternelle et du zèle, sans une manifestation extérieure de ces grâces dans toute la vie extérieure. La foi sans les œuvres est donc morte. Nous sommes sauvés par la foi. Mais le salut inclut la délivrance du péché. Si donc notre foi ne nous délivre pas du péché, elle ne nous sauve pas. L’antinomisme implique une contradiction dans les termes.
Un sixième effet attribué à la foi dans les Écritures est la sécurité, ou la certitude du salut. « Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne périsse point, mais qu’il ait la vie éternelle. » (Jean iii. 16.) « Celui qui écoute ma parole, et qui croit en celui qui m’a envoyé, a la vie éternelle, et ne sera pas condamné ; mais il passe de la mort à la vie. (Jean v. 24.) « Je suis le pain vivant qui est descendu du ciel : si quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement. » (Jean vi. 51.) « Tout ce que le Père me donnera viendra à moi ; et celui qui vient à moi, je n’en sortirai point à l’est..... Et telle est la volonté de celui qui m’a envoyé, afin que quiconque voit le Fils, et croit en lui, ait la vie éternelle, et je le ressusciterai au dernier jour. (Jean VI, 37, 40.) « Mes brebis entendent ma voix, et je les connais, et elles me suivent, et je leur donne la vie éternelle ; et ils ne périront jamais, et personne ne les arrachera de ma main. (Jean, X, 27, 28.)
Le huitième chapitre de l’épître aux Romains.
Tout le huitième chapitre de l’épître aux Romains est destiné à prouver le salut certain de tous ceux qui croient. La proposition à établir est qu’il n’y a « aucune condamnation pour ceux qui sont en Jésus-Christ ». C’est-à-dire qu’ils ne peuvent jamais périr; ils ne peuvent jamais être séparés de Christ au point d’être condamnés. Le premier argument de l’apôtre pour établir cette proposition, c’est que les croyants sont délivrés de la loi par le sacrifice de Christ. Le croyant n’est donc pas sous la loi qui condamne, comme Paid l’avait déjà dit (Rom., liv. 14) : « Vous n’êtes pas sous la loi, mais sous la grâce. » Mais s’il n’est pas en vertu de la loi, il ne peut pas être condamné. La loi a suivi son cours et a trouvé pleine satisfaction dans l’œuvre de Christ, qui est la fin de la loi pour la justice de tous ceux qui croient. Il rend juste, aux yeux de la loi, quiconque croit en Lui. C’est la première raison que donne l’Apôtre pour que ceux qui sont en Christ ne soient jamais condamnés.
Son deuxième argument est qu’ils ont déjà en eux le principe de la vie éternelle. Ce principe, c’est l’Esprit de Dieu ; « celui qui donne la vie », comme l’appelait l’ancienne Église. Avoir un esprit charnel, c’est la mort. Avoir un esprit spirituel, c’est la vie et la paix. Le péché, c’est la mort ; La sainteté, c’est la vie. C’est une contradiction de dire que ceux en qui habite l’Esprit de vie doivent mourir. C’est pourquoi l’Apôtre dit : Bien que le corps meurt, l’âme vit. Et si l’Esprit de Celui qui a ressuscité Jésus d’entre les morts habite en vous, Celui qui a ressuscité Christ d’entre les morts vivifiera aussi vos corps mortels par son Esprit qui habite en vous. Le séjour de l’Esprit assure donc non seulement la vie de l’âme, mais aussi la vie ultime et glorieuse du corps.
Le troisième argument en faveur de la sécurité des croyants, c’est qu’ils sont les fils de Dieu. Tous ceux qui sont conduits par l’Esprit de Dieu, ils sont fils de Dieu. C’est-à-dire qu’ils participent à sa nature, qu’ils sont les objets spéciaux de son amour, et qu’ils ont droit à l’héritage qu’il donne. S’il s’agit de fils, ils sont héritiers, héritiers de Dieu et cohéritiers du Christ. Selon le mode de pensée de l’Apôtre, il est impossible qu’aucun des fils de Dieu ne périsse. S’ils ont des fils, ils seront sauvés.
Le quatrième argument vient du dessein de Dieu. Ceux qu’il a prédestinés à être conformes à l’image de son Fils, il les appelle à l’exercice de la foi et du repentir ; et ceux qu’il appelle ainsi il les justifie, il pourvoit à leurs besoins et leur impute une justice qui satisfait aux exigences de la loi, et qui leur donne droit en Christ et à cause de lui à la vie éternelle ; et ceux qu’il justifie, il les glorifie. Il n’y a pas de faille dans cette chaîne. Si les hommes étaient prédestinés à la vie éternelle parce qu’ils se repentent et croient par leurs propres forces, ou par une coopération avec la grâce de Dieu que d’autres n’exercent pas, alors leur maintien dans un état de grâce pourrait dépendre d’eux-mêmes. Mais si la foi et la repentance sont les dons de Dieu, les résultats de sa vocation effective, alors l’octroi de ces dons est une révélation du dessein de Dieu de sauver ceux à qui ils sont donnés. C’est une preuve que Dieu les a prédestinés à être conformes à l’image de son Fils , c’est-à-dire à lui ressembler par le caractère, la destinée et la gloire, et qu’il accomplira infailliblement son dessein. Personne ne peut les lui arracher des mains.
Le cinquième argument de Paul vient de l’amour de Dieu. Comme nous l’avons dit 1, l’Apôtre soutient de la grandeur, de la liberté et de l’immuabilité de cet amour que ses objets ne peuvent jamais être perdus. « Mensonge qui n’a pas épargné son propre Fils, mais qui l’a livré pour nous tous, comment ne nous donnera-t-il pas aussi toutes choses avec lui ? » S’il a fait plus grand, n’en fera-t-il pas moins ? S’il a donné même son propre Fils, ne nous donnera-t-il pas la foi pour recevoir et la constance de persévérer jusqu’à la fin ? Un amour aussi grand que l’amour de Dieu pour son peuple ne peut manquer son objet. Cet amour est aussi gratuit. Elle n’est pas fondée sur l’attractivité de ses objets. Il nous a aimés « alors que nous étions encore pécheurs » ; « Quand nous étions ennemis. » À plus forte raison donc, étant maintenant justifié par son sang, nous serons sauvés de la colère par Lui. Car si, lorsque nous étions ennemis, nous avons été réconciliés avec Dieu par la mort de son Fils, à plus forte raison sommes-nous réconciliés par sa vie. L’amour de Dieu sous cet aspect est comparé à l’amour parental. Une mère n’aime pas son enfant parce qu’il est beau. Son amour l’amène à faire tout ce qu’elle peut pour le rendre attrayant et le garder ainsi. Ainsi l’amour de Dieu, étant de la même manière mystérieux, inexplicable par quoi que ce soit dans ses objets, lui assure d’orner ses enfants des grâces de son Esprit, et de les revêtir de toute la beauté de la sainteté. Ce n’est que l’erreur lamentable de Dieu qui nous aime pour notre bonté qui peut amener quelqu’un à supposer que son amour dépend de notre attrait personnel, alors que nous devrions regarder son amour paternel comme la source de toute bonté et le fondement de l’assurance qu’il ne permettra pas à Satan ou à nos propres cœurs mauvais de détruire les linéaments de sa ressemblance qu’il a imprimés dans nos âmes. Ayant aimé les siens, il les aime jusqu’à la fin. Et le Christ prie pour eux afin que leur foi ne défaille pas.
1 Planche 107.
Il faut se rappeler que ce que l’Apôtre prétend prouver n’est pas seulement la certitude du salut de ceux qui croient ; mais leur certaine persévérance dans la sainteté. Le salut dans le péché, selon le système de Paul, est une contradiction dans les termes. Cette persévérance dans la sainteté est assurée en partie par l’influence secrète intérieure de l’Esprit, et en partie par tous les moyens propres à atteindre cette fin : instructions, remontrances, exhortations, avertissements, moyens de grâce et dispensations de sa providence. Ayant déterminé par l’amour la fin, il a déterminé les moyens de l’accomplir.
Le sixième argument de l’Apôtre est que, comme l’amour de Dieu est infiniment grand et tout à fait gratuit, il est aussi immuable, et, par conséquent, les croyants seront certainement sauvés. D’où cette conclusion : « Je suis persuadé que ni la mort, ni la vie, ni les anges, ni les principautés, ni les puissances, ni les choses présentes, ni les choses à venir, ni la hauteur, ni la profondeur, ni aucune autre créature, ne pourront nous séparer de l’amour de Dieu, qui est en Jésus-Christ notre Seigneur. »
On verra que l’Apôtre ne fonde pas la persévérance des saints sur la nature indestructible de la foi, ou sur la nature impérissable du principe de la grâce dans le cœur, ou sur la constance de la volonté du croyant, mais uniquement sur ce qui est hors de nous. La persévérance, nous enseigne-t-il, est due au dessein de Dieu, à l’œuvre du Christ, au séjour du Saint-Esprit et à la source primordiale de tout, l’amour infini, mystérieux et immuable de Dieu. Nous ne nous gardons pas nous-mêmes ; nous sommes gardés par la puissance de Dieu, par la foi pour le salut. (1 Pierre i. 5.)
CHAPITRE XVII.
JUSTIFICATION.
§ 1. Énoncé symbolique de la doctrine.
La justification est définie dans la loi de Westminster Catéchisme, « Un acte de la grâce gratuite de Dieu, par lequel Il pardonne tous nos péchés, et nous accepte comme justes à ses yeux, uniquement pour la justice de Christ qui nous est imputée, et reçue par la foi seule.
Le Catéchisme de Heidelberg, en réponse à la question : « Comment devient-on juste devant Dieu ? » répond : « Sola fide in Jesum Christum, adeo ut licet mea me conscientia accuset, quod adversus omnia mandata Dei graviter peccaverim, nec ullum eorum servaverim, adhæc etiamnum ad omne malum propensus sim, nihilominus tamen (modo hæc bénéficia vera animi fidncia amplectar), sine nllo meo merito, ex mera Dei misericordia, mihi perfecta satisfactio, justitia, et sanctitas Christi, imputetur ac donetur ; perinde ac si nec ullum ipse peccatum admisissem, nec ulla mihi labos inhæreret ; imo vero quasi earn obedientiam, quam pro me Christus præstitit, ipse perfecte præstitissem. » Et en réponse à la question : Pourquoi la foi seule justifie ? dit-il. « Non quod dignitate meæ fidei Deo placeam, sed quod sola satisfactio, justitia ac sanctitas Christi, mea justitia sit coram Deo. Ego vero earn non alia ratione, quam fide amplecti, et mihi applicare queam. »
La deuxième confession helvétique1 dit : « Justificare signifient Apostolo in disputatione de justificatione, peccata remittere, a culpa et pœna absolvere, in gratiam recipere, et justum pronunciare. Etenim ad Romanos elicit apostolus, ' Dens est, qui justificat, quis ille, qui condemnet ? ' opponuntur justificare et condamner..... Etenim Christus peccata mundi in se recepit el sustnlit, divinæque justitiæ satisfecit. Deus ergo propter solum Christum passum et resuscitatum, propitius est peccatis nostris, nec ilia nobis imputât, imputât autem justifiant Christi pro nostra : ita ut jam sinius non solum mundati a peccatis et purgati, vel sancti, sed etiam donati justitia Christi, adeoque absolut ! a peccatis, morte vel condemnatione, justi denique ac hæredes vitæ ætemæ. Proprie ergo loquendo, Deus solus nos justificat, et duntaxat propter Christum justificat, non imputans nobis peccata. sed imputans ejus nobis justitiam. » 1
1 Chapitre xv.
1 Voir Niemeyer, Collectio Confessionum, Leipzig, 1840.
Ce sont les normes les plus généralement reçues et faisant autorité des Églises réformées, avec lesquelles tous les autres symboles réformés s’accordent. Les confessions luthériennes enseignent exactement la même doctrine à ce sujet. 2 " Unanimi consensu, docemus et confitemur..... quod homo peccator coram Deo justificetur, hoc est, absolvatur ab omnibus suis peccatis et a judicio justissimæ condemnationis, et adoptetur in numerum filiorum Dei atque hæres æternæ vitæ scribatur, sine ullis nostris mentis, aut dignitate, et absque ullis præcedentibus, præsentibus, aut sequentibus nostris operibus, ex mera gratia, tantummodo propter unicum meritum, perfectissimam obedientiam, passionem acerbissimam, mortem et resurrectionem Domini nostri, Jesu Christi, cujus obedientia nobis ad justitiam imputatur.» 3
2 Les principaux passages sont la Confession d’Augsbourg, première partie, article iv, l’Apologie de cette confession, article III , et la Forme de la concorde, article III.
3 Forme de la Concorde, in. 9.
De même, « Credimus, docemus, et confitemur, hoc ipsum nostram esse coram Deo justitiam, quod Dominus nobis peccata remittit, ex mera gratia, absque ullo respectu præcedentium, præsentium, aut consequentium nostrorum operum, dignitatis, aut menti. Hie enim donat atque imputât nobis justitiam obedientiæ Christi ; propter earn justitiam a Deo in gratiam recipimur et justi reputamur. » 4 « Justificari signifient hic non ex impio justum effici, sed usu forensi justum pronuntiari. » Et « Justificare hoc loco » (Rom. v. 1.) forensi consuetudine significat reum absolvere et pronuntiare justum, sed propter alienam justitiam, videlicet Christi, quæ aliéna justifia communicatur nobis per fidem. » 5 De même « Vocabulum justificationis in hoc negotio significat justum pronuntiare, a peccatis et æteniis peccatorum suppliciis absolvere, propter justitiam Christi, quæ a Deo fidei imputatur ». 6
4 Idem. Epitome, dans. 4. Le
5 Apologie de la Confession d’Augsbourg, art. in. 131, 184.
6 Forme de la concorde en. 17. Voir Hase, Llbri Symbolic !, 3e édit., Leipzig, 1836.
Hase,7 expose de façon concise la doctrine luthérienne à ce sujet en ces termes : « Justificatio est actus forensis, quo Deus, sola gratia ductus, peccatori, propter Christi meritum fide apprehensum, justitiam Christi imputât, peccata remittit, eumque sibi reconciliat. »
7 Hutterus Redivivus, § 109, Gth édit. Leipzig, 1845, p. 274.
La « Forme de la Concorde » dit : « Hie articulas, de justifia fidei, præcipuus est (ut Apologia loquitur) in tota doctrina Christiana, sine quo conscientiæ perturbatæ nullam veram et firmam consolationeni habere, aut divitias gratiæ Christi recte agnoscere possunt. Id D. Lutherus suo etiam testimonio confirmavit, cum inquit : Si unions his articulus sincerus permanserit, etiam Christiana Ecclesia sincera, concors et sine omnibus sectis permanet : sin vero corrumpitur, impossibile est, ut uni error ! aut fanatico spiritui recte obviam iri possit. » 1 C’est pourquoi les théologiens luthériens en parlent comme de « ακρόπολη totius Christianæ religionis, ac nexus, quo omnia corporis doctrinæ Christianæ membra continentur, quoque rupto solvuntur ». 2
1 !! I. G.
2 Quenstedt.
Cette déclaration de la doctrine de la justification a conservé une autorité symbolique dans les Églises luthériennes et réformées, jusqu’à nos jours. Le président Edwards, qui est considéré comme l’initiateur de certains écarts par rapport à certains points de la foi réformée, était fermement attaché à cette conception de la justification, qu’il considérait comme d’une importance vitale. Dans son discours sur « La justification par la foi seule », il définit ainsi la justification : « On dit d’une personne qu’elle est justifiée lorsqu’elle est approuvée par Dieu comme étant exempte de la culpabilité du péché et de son châtiment mérité ; et comme ayant cette justice qui lui appartient et qui a droit à la récompense de la vie. Que nous devrions prendre le mot dans ce sens et comprenez-le comme le fait que le juge accepte une personne comme ayant à la fois une justice négative et positive qui lui appartient, et la considère donc non seulement comme abandonnée ou libre de toute obligation de punition, mais aussi comme juste et juste, et donc ayant droit à une récompense positive, n’est pas seulement très conforme à l’étymologie et à la signification naturelle du mot, ce qui signifie rendre juste, ou passer pour juste dans le jugement, mais aussi manifestement agréable à la force de la parole telle qu’elle est utilisée dans l’Écriture. Il montre ensuite comment c’est, ou pourquoi la foi seule justifie. Ce n’est pas à cause d’une vertu ou d’une bonté dans la foi, mais parce qu’elle nous unit à Christ, et implique l’acceptation de Lui comme notre justice. C’est ainsi que nous sommes justifiés « par la foi seule, sans aucune sorte de vertu ou de bonté qui nous soit propre ».
Le fondement de la justification est la justice de Christ imputée au croyant. « Par cette justice qui nous est imputée,» dit Edwards, « on n’entend rien d’autre que ceci, que cela la justice de Christ est acceptée pour nous, et admise à la place de cette justice inhérente parfaite qui doit être en nous-mêmes : l’obéissance parfaite de Christ sera comptée pour nous, de sorte que nous en aurons le bénéfice, comme si nous l’avions accomplie nous-mêmes : et ainsi nous supposons qu’un titre à la vie éternelle nous est donné comme récompense de cette justice..... Les adversaires de cette doctrine supposent qu’il y a là une absurdité : ils disent que supposer que Dieu nous impute l’obéissance du Christ, c’est supposer que Dieu se trompe, et pense que nous avons accompli cette obéissance que le Christ a faite. Mais pourquoi cette justice ne peut-elle pas être comptée pour nous, et être acceptée pour nous, sans aucune absurdité de ce genre ? Pourquoi y a-t-il plus d’absurdité à cela que dans le fait qu’un marchand transfère une dette ou un crédit du compte d’un homme à un autre, lorsqu’un homme paie un prix pour un autre, de sorte qu’il sera accepté, comme si cet autre l’avait payé ? Pourquoi y a-t-il plus d’absurdité à supposer que l’obéissance du Christ nous soit imputée, que sa satisfaction ne nous soit imputée ? Si Christ a souffert le châtiment de la loi pour nous et à notre place, il s’ensuivra que sa souffrance nous est imputée, c’est-à-dire qu’il est accepté pour nous et à notre place, et qu’il est compté pour nous, comme si nous l’avions subi. Mais pourquoi son obéissance à la loi de Dieu ne peut-elle pas être comptée aussi rationnellement à notre compte, que le fait qu’il souffre le châtiment de la loi ?» 1
1 Œuvres du président Edwards, New York, 1868, vol. IV, p. 66, 91, 92.
Points inclus dans l’énoncé de doctrine ci-dessus.
D’après les affirmations ci-dessus, la justification est, —
1. Un acte, et non, en tant que sanctification, une œuvre continue et progressive.
2. C’est un acte de grâce envers le pécheur. En lui-même, il mérite d’être condamné quand Dieu le justifie.
3. Quant à la nature de l’acte, il ne s’agit pas, en premier lieu, d’un acte efficace ou d’un acte de puissance. Elle ne produit aucun changement subjectif chez la personne justifiée. Cela n’opère pas un changement de caractère, rendant bons ceux qui étaient mauvais, ceux qui étaient saints qui étaient impies. Cela se fait dans la régénération et la sanctification. En second lieu, ce n’est pas un simple acte exécutif, comme lorsqu’un souverain gracie un criminel et le rétablit ainsi dans ses droits civils, ou dans son ancien statut dans la République. En troisième lieu, il s’agit d’un acte médico-légal, ou judiciaire, l’acte d’un juge, et non d’un souverain. C’est-à-dire que, dans le cas du pécheur, ou, inforo Dei, c’est un acte de Dieu non pas dans son caractère de souverain, mais dans son caractère de juge. Il s’agit d’un acte déclaratif dans lequel Dieu déclare le pécheur juste ou juste, c’est-à-dire qu’il déclare que les prétentions de la justice, en ce qui le concerne, sont satisfaites, de sorte qu’il ne peut pas être condamné à juste titre, mais qu’il a droit en justice à la récompense promise ou due à la justice parfaite.
4. Le motif méritoire de la justification n’est pas la foi ; nous ne sommes pas justifiés à cause de notre foi, considérée comme un acte vertueux ou saint ou un état d’esprit. Nos œuvres, quelles qu’elles soient, ne sont pas non plus le fondement de la justification. Rien de ce que nous avons fait ou fait en nous ne satisfait aux exigences de la justice, ni ne peut être le fondement ou la raison de la déclaration que la justice en ce qui nous concerne est satisfaite. Le fondement de la justification est la justice de Christ, active et passive, c’est-à-dire incluant son obéissance parfaite à la loi en tant qu’alliance, et sa souffrance du châtiment de la loi à notre place et en notre faveur.
5. La justice de Christ est dans la justification imputée au croyant. C’est-à-dire qu’il est mis à son compte, de sorte qu’il a le droit de l’invoquer la barre de Dieu, comme si elle lui appartenait personnellement et intrinsèquement.
6. La foi est la condition de la justification. C’est-à-dire qu’en ce qui concerne les adultes, Dieu n’impute pas la justice de Christ au pécheur, jusqu’à ce qu’il (par grâce) reçoive et repose sur Christ seul pour son salut.
Que telle soit la doctrine des Églises réformée et luthérienne sur cette importante doctrine, cela ne peut être contesté. Les énoncés des normes de ces Églises sont si nombreux, explicites et discriminants qu’ils excluent tout doute raisonnable à ce sujet. Que telle soit la doctrine de la Parole de Dieu, c’est ce qui ressort des considérations suivantes.
Il ne sera pas nécessaire de discuter séparément de tous les points ci-dessus spécifiés, car certains d’entre eux sont nécessairement inclus dans d’autres. Les propositions suivantes comprennent tous les points essentiels de la doctrine.
§ 2. La justification est un acte médico-légal.
Par là, les réformateurs entendaient, en premier lieu, nier la doctrine romaine de la justification subjective. C’est-à-dire que la justification consiste en un acte ou un agent de Dieu qui rend le pécheur subjectivement saint. Les romanistes confondent ou unissent la justification et la sanctification. Ils définissent la justification comme « la rémission des péchés et l’infusion de nouvelles habitudes de grâce ». Par rémission des péchés, ils n’entendent pas simplement le pardon, mais l’élimination de tout ce qui est de la nature du péché de l’âme. La justification, par conséquent, chez eux, est purement subjective, consistant dans la destruction du péché et l’infusion de la sainteté. En opposition à cette doctrine, les réformateurs soutenaient que par justification, les Écritures signifient quelque chose de différent de la sanctification. Que les deux dons, bien qu’inséparables, sont distincts, et que la justification, au lieu d’être un acte efficace qui change le caractère intérieur du pécheur, est un acte déclaratif, annonçant et déterminant sa relation avec la loi et la justice de Dieu.
En second lieu, les Symboles de la Réforme, rien de moins Enseignez explicitement que la justification n’est pas simplement le pardon et la restauration. Il comprend le pardon, mais il comprend aussi une déclaration selon laquelle le croyant est juste ou juste aux yeux de la loi. Il a le droit de plaider une justice qui satisfait pleinement à ses Demandes.
Et donc, en troisième lieu, affirmativement, ces symboles enseignent que la justification est un acte judiciaire ou médico-légal, c’est-à-dire un acte de Dieu en tant que juge procédant selon la loi, déclarant que Le pécheur est juste , c’est-à-dire que la loi ne le condamne plus, mais l’acquitte et le déclare avoir droit à la vie éternelle.
Ici, comme souvent dans d’autres cas, l’ambiguïté des mots est susceptible de créer de l’embarras. Le mot grec δίκαιος, et le mot anglais righteous, ont deux sens distincts. Ils expriment parfois un caractère moral. Quand nous disons que Dieu est juste, nous voulons dire qu’Il a raison. Il est libre de toute imperfection morale. Ainsi, quand nous disons qu’un homme est juste, nous voulons généralement dire qu’il est droit et honnête ; qu’il est et fait ce qu’il doit être et faire. En ce sens, le mot exprime le rapport qu’un homme entretient avec la règle de la conduite morale. D’autres fois, cependant, ces paroles expriment, non pas le caractère moral, mais le rapport qu’un homme entretient avec la justice. En ce sens, est juste un homme à l’égard duquel la justice est satisfaite ; ou contre qui la justice n’a pas d’exigences. Les lexiques nous disent donc que δίκαιος signifie parfois, leges observans ; dans d’autres insons , culpa vacans (exempts de culpabilité ou d’obligation de punition) — juclicio Dei insons. Pilate (Matth., XXVII, 24) dit : « Je suis innocent du sang de ce juste ; » c’est-à-dire de cette personne qui est exempte de culpabilité, libre de tout ce qui justifie sa condamnation à mort. « Le Christ aussi, dit l’Apôtre, a souffert une fois pour les péchés, le juste pour l’injuste, l’innocent pour le coupable. Voir Romains ii. 13 ; v. 19. « De même que par la désobéissance d’un seul beaucoup ont été rendus pécheurs, de même par l’obéissance d’un seul beaucoup seront rendus justes. » Comme le prédicat de judicandus dans ] !est la relation avec le juge, la « justice » exprime, non pas une vertu positive, mais une liberté judiciaire négative de reatus. En présence de son juge , il est צדיק qui se tient libre de la culpabilité et du désert du châtiment (straflos), soit parce qu’il n’a contracté aucune culpabilité (comme, par exemple, le Christ), soit parce que, de la manière exigée par le Juge (sous l’Ancien Testament par le sacrifice expiatoire), il a expié la faute contractée. Si donc nous prenons le mot juste dans le premier des deux sens dont nous venons de parler, lorsqu’il exprime le caractère moral, il serait contradictoire de dire que Dieu déclare le pécheur juste. Cela équivaudrait à dire que Dieu déclare que le pécheur n’est pas un pécheur, que le méchant est bon, que l’impie est saint. Mais si nous prenons le mot dans le sens où les Écritures l’emploient si souvent, comme exprimant la relation avec la justice, alors quand Dieu déclare le pécheur juste ou juste, il déclare simplement que sa culpabilité est expiée, que la justice est satisfaite, qu’il a la justice que la justice exige. C’est précisément ce que Paul dit, quand il dit que Dieu « justifie les impies ». (Rom. iv. 5.) Dieu ne déclare pas que l’impie est pieux ; Il déclare qu’en dépit de son péché personnel et de son indignité, il est accepté comme juste sur la base de ce que Christ a fait pour lui.
1 ChrMiche Dogmntik, von Johannes Heinrich August Ebrard, § 402, édit. Königsberg, 1852, t. II, p. 163.
Preuve de la Doctrine qui vient d’être énoncée.
Que justifier ne signifie ni simplement pardonner, ni rendre intrinsèquement juste ou bon est prouvé.
1. Par l’usage uniforme du mot justifier dans l’Écriture . Il n’est jamais utilisé dans l’un ou l’autre de ces sens, mais toujours pour déclarer ou prononcer juste. Il n’est pas nécessaire de citer des passages pour prouver un usage uniforme. Les quelques exemples suivants suffisent. Deutéronome xxv. 1 : « S’il y a une controverse entre les hommes, et qu’ils viennent au jugement, afin que les juges les jugent ; alors ils justifieront les justes, et condamnez les méchants. Exode xxiii. 7 : « Je ne justifierai pas les méchants. » Ésaïe v. 23 : « Qui justifient les méchants pour la récompense. » Proverbes xvii. 15 : « Celui qui a justifié ! le méchant » est « en abomination à l’Éternel ». Luc, x, 29 : « Il veut se justifier. » Luc xvi. 15 : « Vous êtes ceux qui vous justifiez devant les hommes. » Matthieu xi. 19 : « La sagesse est justifiée à l’égard de ses enfants. » Galates ii. 16 : « L’homme n’est pas justifié par les œuvres de la loi. » v. 6, « Quiconque d’entre vous est justifié par la loi ; vous sont tombés en disgrâce. C’est ainsi qu’on dit que les hommes justifient Dieu. Job xxxii. 2, " Parce qu’il s’est justifié lui-même, plutôt que Dieu. Psaumes Li. 4 : « Afin que tu sois justifié quand tu parles. » Luc vii. 29 : « Tout le peuple qui l’entendit, et les publicains, justifièrent Dieu. » Le seul passage du Nouveau Testament où le mot δικαιόω est utilisé dans un sens différent est Apocalypse xxii. 11, ύ δίκαιος, δικαιω-θητω « η, « Celui qui est juste, qu’il soit encore juste. » Ici, le premier passif de l’aoriste semble être utilisé dans un sens moyen : « Qu’il se montre juste, ou qu’il reste juste. » Même si l’interprétation de ce passage était indubitable, ce seul cas n’aurait aucune force contre l’usage établi du mot. La lecture, cependant, n’est pas seulement douteuse, mais elle est, de l’avis de la majorité des éditeurs critiques, Tischendorf parmi les autres, incorrecte. Ils donnent, comme texte véritable, δικαιοσυ^ι׳ ποιησάτω ert. Même si cette dernière lecture est, comme le pense De Wette, une glose, elle montre que ό δίκαιος 8ικαιωθητω ετι était aussi intolérable à une oreille grecque que le serait pour nous l’expression « Celui qui est juste, qu’il se justifie encore ».
L’usage de la vie commune quant à ce mot est tout aussi uniforme que celui de la vie commune. Bible. Ce serait un solécisme parfait que de dire d’un criminel que l’exécutif avait pardonné, qu’il était justifié ; ou qu’un ivrogne ou un voleur réformé a été justifié. Le mot exprime toujours un jugement, qu’il soit de l’esprit, comme lorsqu’il Un homme en justifie un autre pour sa conduite, ou officiellement celle d’un juge. Si tel est le cas, le sens établi du mot, il devrait trancher toute controverse la nature de la justification. Nous sommes obligés de prendre les paroles de l’Écriture dans leur véritable sens établi. Et c’est pourquoi, quand la Bible dit : « Dieu justifie le croyant », nous ne sommes pas libres de dire que cela signifie qu’Il pardonne ou qu’il le sanctifie. Cela signifie, et ne peut signifier que qu’Il le déclare juste.
La justification est le contraire de la condamnation.
2. C’est ce qui ressort encore plus clairement de l’antithèse entre la condamnation et la justification. La condamnation n’est pas le contraire soit de pardon, soit de réforme. Condamner, c’est déclarer coupable ; ou digne d’être puni. Justifier, c’est déclarer non coupable ; ou que la justice ne le fait pas ne pas exiger de punition ; ou que la personne concernée ne peut être condamnée à juste titre.
C’est pourquoi, quand l’Apôtre dit (Rom., VIII, chap. 1) : Il n’y a donc plus de condamnation à ceux qui sont en Jésus-Christ », il déclare qu’ils sont absous de toute culpabilité, que la peine de la loi ne peut leur être justement infligée. « Qui, demande-t-il, mettra quelque chose à la charge des élus de Dieu ? Dieu qui justifie ? Qui est celui qui condamne ? Le Christ qui est mort ? » (vers. 33, 34.) Contre les élus en Christ, aucun motif de condamnation ne peut être présenté. Dieu les déclare justes, et donc personne ne peut les déclarer coupables.
Ce passage est certainement décisif contre la doctrine de la subjectivité justification sous quelque forme que ce soit. Cette opposition entre la condamnation et la La justification est familière à la fois dans l’Écriture et dans la vie courante. Job ix. 20, « Si Je me justifie, ma propre bouche me condamnera. 17 : « Et tu vas condamne celui qui est le plus juste. Si condamner ne signifie pas rendre méchant, justifier ne signifie pas rendre le bien. Et si la condamnation est un acte judiciaire, par opposition à un acte exécutif, la justification l’est aussi. Dans la condamnation, c’est un juge qui prononce la sentence sur le coupable. En guise de justification, c’est un juge qui prononce ou déclare la personne mise en accusation exempte de culpabilité et qui a le droit d’être traitée comme juste.
Argument tiré de Formes d’expression équivalentes.
3. Les formes d’expression qui sont utilisées comme équivalents du mot « justifier » déterminent clairement la nature de l’acte. C’est ainsi que Paul parle de « la béatitude de l’homme à qui Dieu impute la justice sans les œuvres ». (Rom. iv. 6.) Imputer la justice, ce n’est pas pardonner ; ce n’est pas non plus pour sanctifier. Cela signifie justifier, c’est-à-dire attribuer la justice. La forme négative sous laquelle la justification est décrite est tout aussi significative. « Heureux ceux dont les iniquités sont pardonnées, et dont les péchés sont couverts. Heureux l’homme à qui le Seigneur n’imputera pas le péché. (Rom. iv. 7, 8.) De même que « imputer le péché » ne signifie jamais et ne peut pas signifier rendre méchant ; Ainsi, l’affirmation négative « ne pas imputer le péché » ne peut pas signifier sanctifier. Et comme « imputer le péché » signifie mettre le péché sur le compte de quelqu’un et le traiter en conséquence ; Justifier signifie donc rendre compte de la justice et le traiter en conséquence. « Dieu n’a pas envoyé son Fils dans le monde pour condamner le monde..... Celui qui croit en lui n’est pas condamné, mais celui qui ne croit pas est déjà condamné. (Jean, III, 17, 18.)
Car, « comme par l’offense d’un seul jugement sont venus sur tous les hommes à la condamnation ; De même, par la justice d’un seul, le don gratuit est venu sur tous les hommes pour la justification de la vie. (Rom. v. 18.) C’était κρίμα, une sentence judiciaire, qui est venue sur les hommes pour l’offense d’Adam, et c’est une sentence judiciaire (justification, a δικαίωσή ) qui vient pour la justice de Christ, ou, comme il est dit au verset 16 du même chapitre, c’était une κρίμα εις κατάκριμα, une sentence de condamnation qui est venue pour un délit ; et un χάρισμα el ? δικαίωμα, une peine de justification gratuite pour de nombreuses infractions. Le langage ne peut pas être plus clair. Si une condamnation est un acte judiciaire, alors la justification est un acte judiciaire.
Argument tiré de l’énoncé de la doctrine.
4. Le caractère judiciaire de la justification est impliqué dans la manière dont la doctrine est présentée dans la Bible. Les Écritures parlent de la loi, de ses exigences, de sa peine, des pécheurs traduits à la barre de Dieu, du jour du jugement. La question est : Comment l’homme sera-t-il juste devant Dieu ? La réponse à cette question détermine toute la méthode du salut. La question n’est pas : Comment un homme peut-il devenir saint ? mais, comment peut-il devenir juste ? Comment peut-il satisfaire aux prétentions que la justice a contre lui ? Il est évident que s’il n’y a pas d’attribut tel que la justice en Dieu ; Si ce que nous appelons justice n’est que bienveillance, alors il n’y a pas de pertinence dans cette question. L’homme n’a pas besoin d’être juste pour être sauvé. Il n’y a pas de revendications de justice à satisfaire. La repentance est tout ce qui doit être rendu comme condition de la restauration de la faveur de Dieu. Ou bien, toute déclaration didactique ou manifestation de la désapprobation de Dieu à l’égard du péché ouvrirait la voie au pardon sûr des pécheurs. Ou, si les exigences de la justice étaient facilement satisfaites ; si l’obéissance partielle et imparfaite et les châtiments paternels, ou les pénitences auto-infligées, suffisaient à satisfaire ses prétentions, alors le pécheur n’a pas besoin d’être juste avec Dieu pour être sauvé. Mais l’âme humaine sait intuitivement que ce sont des refuges de mensonges. Il sait qu’il existe un attribut tel que la justice. Il sait que les exigences qui en découlent sont inexorables parce qu’ils sont justes. Elle sait qu’elle ne peut être sauvée que si elle est justifiée, et elle sait qu’elle ne peut être déclarée juste que si les exigences de la justice sont pleinement satisfaites. Les vues basses du mal du péché et de la justice de Dieu sont à la base de toutes les fausses vues de cette grande doctrine.
L’argument de l’apôtre dans l’épître aux Romains.
L’apôtre commence la discussion de ce sujet en supposant que la justice de Dieu, son dessein de punir tout péché, d’exiger une parfaite conformité à sa loi, est révélée du ciel, c’est-à-dire qu’elle est révélée par le ciel. , de telle sorte qu’aucun homme, qu’il soit juif ou païen, ne peut le nier. (Rom., i, 18.) Les hommes, même les païens les plus dégradés, connaissent le juste jugement de Dieu que ceux qui pèchent sont dignes de mort (verset 32). Il prouve ensuite que tous les hommes sont plus simiesques, et qu’étant pécheurs, ils sont sous la condamnation. Le monde entier est « coupable devant Dieu ». (iii. 19.) Il en déduit, comme intuitivement certain (parce qu’il est clairement inclus dans les prémisses), qu’aucune chair vivante ne peut être justifiée devant Dieu « par les actes de la loi », c’est-à-dire sur la base de son propre caractère et de sa propre conduite. S’il est coupable, il ne peut pas être déclaré non coupable ou juste. Dans l’argumentation de Paid, justifier, c’est prononcer juste. Δίκαιος est l’opposé de ύττόδικος (c’est-à-dire « reus, satisfactionem alter ! debens » ). C’est-à-dire que juste est le contraire de coupable. Se prononcer coupable, c’est condamner. Déclarer juste , c’est-à-dire non coupable, c’est justifier. Si un homme nie l’autorité de l’Écriture ; ou s’il se sent libre, tout en tenant ce qu’il considère comme la substance des doctrines de l’Écriture, d’en rejeter la forme, il est concevable qu’il puisse nier que la justification soit un acte judiciaire ; mais il semble impossible que quelqu’un nie qu’elle soit ainsi représentée dans la Bible. Certains hommes qui prétendent croire à la Bible, nient qu’il y ait quoi que ce soit surnaturel dans l’œuvre de régénération et de sanctification. ' Naître de l’Esprit ; ' ' vivifié par la puissante puissance de Dieu ; « Créé de nouveau en Jésus-Christ », ne sont, disent-ils, que des expressions orientales fortes pour une réforme qu’ils ont eux-mêmes accomplie. Par un organisme similaire Il est facile de se débarrasser, non seulement de la doctrine de la justification en tant qu’acte judiciaire, mais de toutes les autres doctrines distinctives des Écritures. Il ne s’agit cependant pas d’interpréter, mais de pervertir.
L’Apôtre, après avoir enseigné que Dieu est juste , c’est-à-dire qu’il exige la satisfaction de la justice, et que les hommes sont pécheurs et ne peuvent pas donner eux-mêmes une telle satisfaction, annonce qu’une telle justice a été donnée et qu’elle est révélée dans l’Évangile. Ce n’est pas notre propre justice, qui est de la loi, mais la justice de Christ, et, par conséquent, la justice de Dieu, en vertu de laquelle, et sur la base de laquelle, Dieu peut être juste et cependant justifier le pécheur qui croit en Christ. Tant que la Bible subsiste, cela doit être une simple déclaration de ce que Paul enseigne quant à la méthode du salut. Les hommes peuvent se disputer sur ce qu’il veut dire, mais c’est sûrement ce qu’il dit.
Argument tiré du motif de justification.
5. La nature de la justification est déterminée par son fondement. Il s’agit en effet d’une anticipation d’une autre partie du sujet, mais c’est ce qui est en cause ici. Si la Bible enseigne que le fondement de la justification, la raison pour laquelle Dieu nous remet le châtiment de la loi et nous accepte comme justes à ses yeux, est quelque chose qui sort de nous-mêmes, quelque chose qui est fait pour nous, et non ce que nous faisons ou expérimentons, alors il s’ensuit nécessairement que la justification n’est pas subjective. Elle ne consiste pas à infuser la justice, ni à sanctifier personnellement la personne justifiée. Si l’option « cause formelle » de notre justification soit notre bonté ; alors nous sommes justifiés pour ce que nous sommes. La Bible, cependant, enseigne qu’aucun homme vivant ne peut être justifié pour ce qu’il est. Il est condamné pour ce qu’il est et pour ce qu’il fait. Il est justifié pour ce que Christ a fait pour lui.
La justification, pas le simple pardon.
Pour la même raison, la justification ne peut pas être un simple pardon. Le pardon ne se fonde pas sur la base d’une satisfaction. Un prisonnier délivré par une rançon n’est pas gracié. Le débiteur dont les obligations ont été annulées par un ami a droit à l’exonération des créances de son créancier. Lorsqu’un souverain gracie un criminel, ce n’est pas un acte de justice. Ce n’est pas pour le motif de la satisfaction à la loi. La Bible, par conséquent, en enseignant que la justification est sur le terrain d’une expiation ou d’une satisfaction ; que la faute du pécheur est expiée ; qu’il est racheté par le précieux sang du Christ ; et le fait que le jugement soit prononcé sur lui comme juste, enseigne par là même que la justification n’est ni le pardon ni l’infusion de justice.
Argument tiré de l’immutabilité de la loi.
6. La doctrine selon laquelle la justification consiste simplement dans le pardon et la restauration qui en résulte, suppose que la loi divine est imparfaite et muable. Dans les gouvernements humains, il est souvent opportun et juste que les hommes justement condamnés à subir la peine de la loi soient pardonnés. Les lois humaines doivent être générales. Ils ne peuvent pas tenir compte de toutes les circonstances de chaque cas particulier. Leur exécution était souvent synonyme de difficultés ou d’injustices. Les jugements humains peuvent donc souvent être mis de côté. Il n’en est pas ainsi de la loi divine. La loi du Seigneur est parfaite. Et étant parfait, il ne peut pas l’être Négligé. Il n’exige rien qui ne doive être exigé. Il ne menace rien qui ne doive être infligé.
Il est en fait son propre bourreau. Le péché, c’est la mort. (Rom. viii. 6.) La justice de Dieu rend le châtiment aussi inséparable du péché que la vie l’est de la sainteté. La peine de la loi est immuable, et aussi peu susceptible d’être écartée que le précepte. C’est pourquoi les Écritures enseignent partout que, dans la justification du pécheur, il n’y a pas de relâchement de la peine. Il n’y a pas de mise de côté, ni de mépris des exigences de la loi. Nous sommes délivrés de la loi, non par son abrogation, mais par son exécution. (Gal. ii. 19.) Nous sommes libérés de la loi par le corps de Christ. (Rom. vii. 4.) Christ ayant pris notre place, a porté nos péchés dans son propre corps sur le bois. (1 Pet. ii. 24.) L’écriture qui était contre nous, il l’a écartée du chemin, l’a clouée sur sa croix. (Col. ii. 14.) Nous ne sommes donc pas sous la loi, mais sous la grâce. (Rom. vi. 14.) De telles représentations sont incompatibles avec la théorie qui suppose que la loi peut être dispensé ; que le rétablissement des pécheurs dans la faveur et la communion de Dieu, n’exige aucune satisfaction à ses exigences ; que le croyant est pardonné et rétabli dans la communion avec Dieu, tout comme un voleur ou un faussaire est pardonné et rétabli dans ses droits civils par l’exécutif dans les gouvernements humains. C’est contraire aux Écritures. Dieu est juste en justifiant le pécheur. Il agit selon la justice.
On verra que tout tourne autour de la question de savoir s’il y a en Dieu un attribut tel que la justice. Si la justice n’est qu’une « bienveillance guidée par la sagesse », alors il n’y a pas de justification. Ce que les chrétiens évangéliques considèrent ainsi, ce n’est que le pardon ou la sanctification. Mais si Dieu, comme l’enseignent les Écritures et la conscience, est un Dieu juste, aussi immuable dans sa justice que dans sa bonté et sa vérité, alors il ne peut y avoir de rémission de la peine du péché que sur le terrain de l’expiation, et aucune justification que sur le terrain de la satisfaction de la justice ; C’est pourquoi la justification doit être un acte judiciaire, et non pas simplement le pardon ou l’infusion de la justice. Ces doctrines se soutiennent mutuellement. Ce que la Bible enseigne de la justice de Dieu prouve que la justification est une déclaration judiciaire que la justice est satisfaite. Et ce que la Bible enseigne de la nature de la justification prouve que la justice en Dieu est quelque chose de plus que la bienveillance. C’est ainsi que toutes les grandes doctrines de la Bible sont concaténées.
Argument tiré de la nature de notre union avec le Christ.
7. La théorie qui réduit la justification au pardon et à ses conséquences, est incompatible avec ce qui est révélé au sujet de notre union avec le Christ. Cette union est mystique, surnaturelle, représentative et vitale. Nous étions en Lui avant la fondation du monde (Eph. i. 4) ; nous sommes en Lui comme nous étions en Adam (Rom. v. 12, 21 ; 1 Cor. xv. 22) ; nous sommes en Lui comme les membres du corps sont dans la tête (Eph. i. 23, iv. 16 ; 1 Corinthiens xii. 12, 27, et souvent) ; nous sommes en Lui comme les sarments sont dans la vigne (Joignez-nous ! xv. 1-12). Nous sommes en lui en ce sens que sa mort est notre mort, nous avons été crucifiés avec lui (Gal. ii. 20 ; Rom. vi. 1-8) ; nous sommes tellement unis à Lui que nous sommes ressuscités avec Lui et que nous nous asseyons avec Lui dans les lieux célestes. (Éph. ii. 1 à 6.) En vertu de cette union, nous sommes (dans notre mesure) ce qu’Il est. Nous sommes les fils de Dieu en Lui. Et ce qu’Il a fait, nous l’avons fait. Sa justice est notre justice. Sa vie est notre vie. Son exaltation est notre exaltation. Telle est la représentation omniprésente des Écritures. Tout cela est négligé par les partisans de la théorie opposée. Selon ce point de vue, le Christ n’est pas plus uni au peuple d’Iris, sauf dans les sentiments, qu’aux autres hommes. Il a simplement fait ce qui le rend conforme au caractère de Dieu et aux intérêts de son royaume, de pardonner à tout homme qui se repent et croit. Sa relation est purement extérieure. Il n’est pas si uni à son peuple que son mérite devienne son mente et sa vie sa vie. Christ n’est pas en eux l’espérance de la gloire. (Col. i. 27.) Il n’est pas de Dieu fait pour eux la sagesse, la justice, la sanctification et la rédemption. (1 Corinthiens i. 30.) Ils ne sont pas en Lui de telle sorte qu’en vertu de cette union, ils soient remplis de toute la plénitude de Dieu. (Col. ii. 10 ; et Eph. iii. 19.) D’autre part, la doctrine protestante de la justification s’harmonise avec toutes ces représentations. Si nous sommes si unis à Christ que nous sommes rendus participants de sa vie, nous sommes aussi participants de sa justice. Ce qu’il a fait en obéissant et en souffrant, il l’a fait pour son peuple. L’un des éléments essentiels de son œuvre rédemptrice était de satisfaire aux exigences de la justice en leur faveur, de sorte qu’en Lui et à cause de lui, ils aient droit au pardon et à la vie éternelle.
Arguments tirés des effets attribués à la justification.
8. Les conséquences attribuées à la justification sont incompatibles avec l’hypothèse qu’elle consiste soit dans le pardon, soit dans l’infusion de la justice. Ces conséquences sont la paix, la réconciliation et un titre à la vie éternelle. « Justifiés par la foi, dit l’Apôtre, nous avons la paix avec Dieu. » (Rom. v. 1.) Mais le pardon ne produit pas la paix. Cela laisse la conscience insatisfaite. Un criminel gracié n’est pas seulement aussi criminel qu’il l’était auparavant, mais son sentiment de culpabilité et ses remords de conscience n’en sont nullement diminués. Le pardon ne peut supprimer que la peine extérieure et arbitraire. L’aiguillon du péché demeure. Il ne peut y avoir de satisfaction pour l’esprit tant qu’il n’y a pas de satisfaction de la justice. La justification assure la paix, non seulement parce qu’elle inclut le pardon, mais parce que ce pardon est accordé sur la base d’une pleine satisfaction de la justice. Ce qui satisfait la justice de Dieu, satisfait la conscience du pécheur. Le sang de Jésus Christ purifie de tout péché (1 Jean i. 7) en enlevant la culpabilité, et en produisant ainsi une paix qui surpasse toute intelligence. Quand l’âme voit que Christ a porté ses péchés sur la croix, et qu’il a enduré le châtiment qu’il avait encouru ; que toutes les exigences de la loi sont pleinement satisfaites ; que Dieu est plus honoré dans son pardon que dans sa condamnation ; que toutes les fins du châtiment sont accomplies par l’œuvre de Christ, à un degré beaucoup plus élevé qu’elles ne pourraient l’être par la mort du pécheur ; et qu’il a le droit de plaider le mérite infini du Fils de Dieu à la barre de la justice divine, alors il est satisfait. Alors il a la paix. Il est humble ; Il ne perd pas le sentiment de son démérite personnel, mais la conscience cesse d’exiger satisfaction. On sait souvent que les criminels se rendent à la justice. Ils ne pouvaient pas se reposer tant qu’ils n’avaient pas été punis. L’infliction de la peine encourue leur a donné la paix. C’est un élément de l’expérience chrétienne. Le pécheur convaincu ne trouve jamais la paix tant qu’il n’a pas déposé son fardeau de péché sur l’Agneau de Dieu ; jusqu’à ce qu’il comprenne que ses péchés ont été punis, comme le dit l’Apôtre (Rom., liv. VIII, chap. 3), dans le Christ.
De plus, il est dit que nous sommes réconciliés avec Dieu par la mort de son Fils. (Rom. v. 10.) Mais le pardon ne produit pas la réconciliation. Un criminel gracié peut être rétabli dans ses droits civils, dans la mesure où la peine prononcée implique leur confiscation, mais il n’est pas réconcilié avec la société. Il n’est pas rétabli dans ses faveurs. La justification, cependant, assure une restauration de la faveur et de la communion de Dieu. Nous devenons les fils de Dieu par la foi en Jésus-Christ. (Gal. iii. 26.) Personne ne peut lire le huitième chapitre de l’épître aux Romains sans être convaincu que, dans l’appréhension de Paul, un croyant justifié est quelque chose de plus que criminel gracié. C’est un homme dont le salut est assuré parce qu’il est libre de la loi et de toutes ses exigences ; parce que la justice de la loi (c’est-à-dire toutes ses justes exigences) a été accomplie en lui ; parce qu’il est ainsi uni à Christ au point de devenir participant de sa vie ; parce que personne ne peut rien mettre à la charge de ceux pour qui Christ est mort et que Dieu a justifiés ; et parce que de tels croyants étant justifiés sont révélés comme les objets du mystère, l’amour immuable et infini de Dieu.
Encore une fois, la justification inclut ou transmet un titre à la vie éternelle. Le pardon est purement négatif. Il supprime simplement une pénalité. Il ne confère aucun droit à des avantages dont il n’a pas bénéficié auparavant. La vie éternelle, cependant, est suspendue à la condition positive de l’obéissance parfaite. Le pécheur simplement pardonné n’a pas une telle obéissance. Il est dépourvu de ce qui, par les principes immuables du gouvernement divin, est la condition indispensable de la vie éternelle. Il n’a aucun droit à l’héritage promis aux justes. Ce n’est pas la condition du croyant. Le mérite de Christ a droit à la récompense. Et le croyant, ayant part à ce mérite, participe à ce titre. C’est ce que reconnaissent constamment les Écritures. Par la foi en Christ, nous devenons les fils de Dieu. Mais la filiation implique l’héritage, et l’héritage implique un titre à l’héritage. « S’il y a des enfants, alors des héritiers ; héritiers de Dieu, et cohéritiers avec Christ. (Rom. viii. 17.) C’est la doctrine enseignée dans Romains v. 12-21. Pour l’offense d’un seul, le jugement a été rendu sur tous les hommes pour être condamnés. Pour la justice d’un seul, la sentence de la justification de la vie a été prononcée sur tous ; c’est-à-dire d’une justification qui donne droit à la vie. De même que le péché d’Adam était le fondement judiciaire de notre condamnation (c’est-à-dire qu’il était le motif sur lequel la justice exigeait la condamnation), de même la justice de Christ est le fondement judiciaire de la justification. C’est-à-dire que c’est le fondement sur lequel la vie promise aux justes devrait être accordée en justice au croyant. L’Église de tous les temps a reconnu cette vérité. Les croyants ont senti qu’ils avaient un titre à la vie éternelle. C’est pour cela qu’ils ont loué Dieu dans les plus hautes expressions. Ils ont toujours considéré comme intuitivement vrai que le ciel doit être mérité. La seule question était de savoir si ce mérite était en eux ou en Christ. Étant en Christ, c’était un don gratuit pour eux ; et c’est ainsi que la justice et la paix s’embrassèrent. La grâce et la justice s’unissent pour placer la couronne de justice sur la tête du croyant.
Il n’est pas moins certain que les conséquences attribuées à la justification ne découlent pas de l’infusion de la justice. La quantité de sainteté possédée par le croyant ne lui donne pas la paix. Même la sainteté parfaite n’enlèverait pas la culpabilité. Le repentir n’expie pas le crime de meurtre. Elle n’apaise pas la conscience du meurtrier ; elle ne satisfait pas non plus le sens de la justice dans l’esprit du public. C’est le πρώτον !/׳«υοος du romanisme, et de toute théorie de la justification subjective, qu’ils ne font rien de la culpabilité, ou la réduisent au minimum. S’il n’y avait pas de culpabilité, alors l’infusion de justice serait tout ce qui est nécessaire pour le salut. Mais s’il y a de la justice en Dieu, alors aucune sainteté ne peut expier le péché, et la justification ne peut pas consister à sanctifier le pécheur. En outre, même en admettant que le passé puisse être ignoré, que la culpabilité qui pèse sur l’âme puisse être négligée ou si facilement éliminée, la justice subjective, ou sainteté, est si imparfaite qu’elle ne pourrait jamais donner la paix au croyant. Que le plus saint des hommes regarde en lui-même et dise si ce qu’il y voit satisfait sa propre conscience. Si ce n’est pas le cas, comment cela peut-il satisfaire Dieu ? Il est plus grand que nos cœurs, et il connaît toutes choses. Aucun homme ne peut donc avoir la paix avec Dieu fondée sur ce qu’il est ou sur ce qu’il fait. Les romanistes admettent que rien de moins qu’une sainteté parfaite ne justifie ou ne donne la paix à l’âme. En réponse à l’argument protestant fondé sur cet aveu, Bellarmin dit :1 « Hoc argumentum, si quid probat, probat justitiam actualem non esse perfectam : non autem probat, justitiam habitualem, qua formaliter justi sumus, .... non esse ita perfectam, ut absolute, simpliciter, et proprie justi nominemur, et simus. Non enim formaliter justi sumus opere nostro, sed opere Dei, qui simul maculas peccatorum tergit, et liabitum fidei, spei, et caritatis infundit. Dei autem perfecta sunt opera..... Unde parvuli baptizati, vere justi sunt, quamvis nihil operis fecerint. » Encore une fois, " Justifia enim actualis, quamvis aliquo modo sit imperfecta, propter admixtionem venalium delictorum, et egeat quotidiana remissione peccati, tamen non propterea desinit esse vera justifia, et suo etiam quodam modo perfecta. Ce système ne prévoit aucune disposition relative à la culpabilité. Si l’âme est sanctifiée par l’infusion d’habitudes ou de principes de grâce, elle est juste aux yeux de Dieu. Il n’y a plus de culpabilité ni de désert. « Reatus, dit Bellarmin2 [...] « est relatio », mais si l’on enlève la chose dont elle est une relation, où est la relation. Il est impossible qu’une telle conception de la justification puisse donner la paix. Il ne prévoit rien pour la satisfaction de la justice, et place toutes nos espérances dans ce qui est à l’intérieur, et dont notre conscience témoigne qu’il ne peut pas répondre aux justes exigences de Dieu.
1 De Justificatione, ii. 14 ; Disputationes, édit. Paris, 1608, t. IV, p. 819, a, b.
2 De Amissîone Gratiæ et Statu Peccati, v. 7 ; Ibid. p. 287.
La théorie de la justification subjective ne peut pas non plus rendre compte de la réconciliation avec Dieu, et pour les mêmes raisons. Quoi Infusé, le degré de sainteté conféré ne fait pas de nous les objets de la complaisance et de l’amour divins. Son amour pour nous est de la nature de la grâce ; l’amour pour ce qui n’est pas aimable. Nous sommes réconciliés avec Dieu par la mort de son Fils. Cela enlève l’obstacle qui s’élève de la justice à l’écoulement vers nous de l’amour mystérieux et immérité de Dieu. Nous sommes acceptés dans le bien-aimé. Nous ne sommes pas en nous-mêmes aptes à la communion avec Dieu. Et si nous sommes poussés à dépendre de ce qui est à l’intérieur, de notre justice subjective, au lieu de la paix, nous devrions désespérer.
Encore une fois, la justification selon les Écritures donne un titre à la vie éternelle. Pour cela, notre propre justice est tout à fait inadéquate. Loin qu’il y ait en nous quelque chose de méritoire ou de digne de récompense, l’état intérieur et les exercices du plus saint des hommes, corné soit si loin de la perfection qu’il mérite d’être condamné. En nous, il n’y a rien de bon. Quand nous voudrions faire le bien, le mal est présent avec nous. Il y a toujours une loi chez nos membres qui fait la guerre à la loi de l’esprit. Le péché intérieur demeure. Cela obligea même Paul à s’écrier : « Ô misérable que je suis ! qui me délivrera du corps de cette mort. (Rom. vii. 24.) « Nullum unquam exstitisse pii hominis opus, quod, si severo Dei judicio examinaretur, non essct damnabile. » 1 Ignorant cette pure vérité de l’Écriture et de l’expérience chrétienne qui s’exprime par la confession quotidienne et à chaque heure, l’humiliation et les prières pour le pardon, la doctrine de la justification subjective suppose qu’il n’y a pas de péché dans le croyant, ni de péché qui mérite la condamnation de Dieu, mais au contraire qu’il y a en lui ce qui mérite la vie éternelle. Les romanistes font une distinction entre une première et une seconde justification. La première, ils l’admettent comme étant gratuite, et comme étant fondée sur le mérite du Christ, ou plutôt, comme étant donnée gratuitement pour l’amour du Christ. Cela consiste en l’infusion de la grâce habituelle (c’est-à-dire la régénération). Cela justifie de rendre l’âme subjectivement juste ou sainte. La seconde justification n’est pas une question de grâce. Elle est fondée sur le mérite des bonnes œuvres, fruits de la régénération. Mais si ces fruits sont, comme notre La conscience témoigne, souillée par le péché, comment peuvent-elles mériter la vie éternelle ? Comment peuvent-ils annuler l’écriture qui est contre nous ? Comment peuvent-ils être le fondement du défi confiant de Paul : « Qui mettra quelque chose à la charge des élus de Dieu ? » Ce n’est pas ce qui est en nous, mais ce qui est hors de nous ; non pas ce que nous sommes ou faisons, mais ce que Christ est et a fait, c’est le fondement de la confiance et de notre titre à la vie éternelle. C’est la doctrine admise de la Réforme protestante. « Un pud theologos Augustanæ confession est très controversé !! positum est,» dit la «Forme de la Concorde,»1 «totam justifiai !! nostram extra nos, et extra omnium hominum mérita, opera, virtutes atque dignitatem quærendam, earaque in solo Domino nostro, Jesu Christo consistere. » Aussi haut que les cieux sont au-dessus de la terre, aussi haute est une espérance fondée sur l’œuvre de Christ pour nous, au-dessus d’une espérance fondée sur le mérite de tout ce qui a été accompli en nous. Calvin enseigne la même doctrine que Luther. 2 Il cite Lombard disant que notre justification en Christ peut être interprétée de deux manières : « Primum, mors Christi nos justifient, dun ! per earn excitatur caritas in cordibus nostris, qua justi efficimur : deinde quod per eanden ! exstinctnm est peccatum ; quo nos captivos distinebat diabolus, ut jam non habeat unde nos damnet. » Ce à quoi Calvin répond : « Scriptiira autern, quern de fidei justifia loquitur, longe alio nos ducit : iiempe ut ab intuitu open !!! nostrorum aversi, in Dei misericordiam ac Christi perfectionem, tantum respiciamus..... Hic est fidei sensus, per quern peccator in possessionem venit suæ salutis, dum ex Evangelii doctrina agnoscit Deo se reconciliation : quod intercedente Christi justifia, impetrata peccatorum remissione, justificatus sit : et quanquam Spirit !! Dei regenerate, non in bonis operibus, quibus incumbit, sed sola Christi justifia repositam sibi perpetual !! justifiai !! cogitât.
1 Calvin, Instilutio, in. xiv. 11 ; édit. Berlin, 1831, partie ii. à la p. 38.
1 Solldci Declaratio, in. 55 ; Hase, Libri Symbolici, 3e édit. Leipzig, 1846, p. 695.
2 - /nstitutio, 111. xi. 15 et 16 ; UT précité, p. 17.
Cette justification n’est pas simplement le pardon, et ce n’est pas l’infusion de justice par laquelle le pécheur est rendu intrinsèquement juste ou saint, mais un jugement de la part de Dieu qui Les exigences de la loi à l’égard du croyant sont satisfaites, et le fait qu’il a droit à une justice qui lui donne droit à la vie éternelle, a été argumenté, (1). De l’usage uniforme de l’Écriture à la fois dans l’Ancien et le Nouveau Testament. (2) De l’opposition constante entre la justification et la condamnation. (3.) À partir de formes d’expression équivalentes. (4) De toute la conception et de la dérive de l’argument de l’Apôtre dans ses épîtres aux Romains et aux Galates. (5) Du motif de la justification, c’est-à-dire de la justice de Christ. (6) De l’immuabilité de la loi et de la justice de Dieu. (7) De la nature de notre union avec Christ. (8) De ce que la paix, la réconciliation avec Dieu et le titre à la vie éternelle qui, selon l’Écriture, sont les conséquences de la justification, ne découlent ni du simple pardon, ni de la justice subjective, ni de la sanctification. Que ce soit là la doctrine des protestants, luthériens et réformés, on ne peut le contester avec aucune apparence de raison.
Il est vrai, en effet, que chez les premiers réformateurs, et surtout chez Calvin, la justification consiste souvent dans le pardon des péchés. Mais il est évident que cela n’était pas une négation du caractère judiciaire de la justification, ou une exclusion de l’imputation de la justice de Christ par laquelle le croyant est compté juste aux yeux de la loi.
1. De la nature de la controverse dans laquelle ces réformateurs étaient engagés. Le La question qui se posait entre eux et les romanistes était la suivante : La justification consiste-t-elle en ce que l’acte de Dieu rend le pécheur intrinsèquement juste ou saint ? ou, exprime-t-il le jugement de Dieu par lequel le croyant est déclaré juste ? Ce que Calvin a nié, c’est que la justification est une sanctification. Ce qu’il affirmait, c’était qu’elle délivrait le croyant de la condamnation de la loi et l’introduisait dans un état de faveur devant Dieu. Les romanistes ont exprimé leur doctrine en disant que la justification consiste dans la rémission des péchés et l’infusion de la charité ou de la justice. Mais par la rémission du péché, ils entendaient l’enlèvement du péché ; Le fait de remettre à plus tard le vieillard. En d’autres termes, la justification chez eux consistait (pour employer le langage scolastique alors en vogue) dans l’élimination des habitudes de péché et l’infusion d’habitudes de grâce. Il n’y avait donc pas de péché chez ceux qui étaient justifiés, et par conséquent rien à punir. Le pardon s’ensuivit donc comme une conséquence nécessaire. Ce n’était qu’un accessoire. Ce point de vue ne tient rien de la culpabilité ; rien des exigences de la justice. Calvin insistait donc sur le fait qu’outre la rénovation subjective liée à la conversion du pécheur, sa justification concernait l’élimination de la culpabilité, la satisfaction de la justice, qui, dans l’ordre de la nature, mais non dans le temps, doit précéder la communication de la vie de Dieu à l’âme. Que Calvin ne différait pas des autres réformateurs et de l’ensemble de l’Église réformée sur ce sujet, c’est ce qui ressort de ses propres déclarations explicites et des déclarations parfaitement sans ambiguïté des Confessions auxquelles il a donné son assentiment. C’est ainsi qu’il dit :1 « Porro ne impingamus in ipso limine (quod ficret si de re incognita disputationem ingrediremur) primum explicemus quid sibi velint istæ loquutioncs, Hominem coram Deo justificari, Fide justificari, vel opcribus. Justificari coram Deo dicitur qui judicio Dei et censetur Justus, et aeceptus est ob suam justitiam : siquidem ut Deo abominabilis est iniquitas, ita nec peecator in ejus oculis potest invenire gratiam, quatenus est peecator, et quamdiu tabs censetur. Proinde ubiennque peccatuni est, illic etiam se profert ira et ultio Dei. Justificatur autem qui non loco peccatoris, sed justi habetur, eoque nomine consistit eoram Dei tribunal !, ubi peccatores omnes eorruunt. Quemadmodum. si reus innocens ad tribunal æqui judieis addueatur, ubi secundum innocentiam eJus Judicatum fuerit, justifieatus apud Judicem dicitur : sic apud Deum justificatur, qui numéro peecatorum exemptus, Deum habet suæ justitiæ testeur et assertorem. Justificari, ergo, operibus ea ratione dicetur, in cujus vita reperietur ea puritas ac sanctitas quæ testimonium justitiæ apud Dei thronum mereatur : seu qui operum suorum integritate respondere et satisfacere illius judicio queat. Contra, justifieabitur ille fide, qui operum justitia exclusus, Christi justitiam per fidem apprehendit, qua vestitus in Dei eonspectu non ut peecator, sed tanquam Justus apparet. Ita nos justificationem simplicité !' interprétai !!!!· aceeptionem, qua nos Deus in gratiam receptos pro justos habet. Eamque in peccatorum remissione ac justitiæ Christi imputatione positam esse dici inns.
1 Institutio, Hi. xi. 2 ; ut supra, p. G.
Ce passage est décisif pour les vues de Calvin ; car il s’agit d’une déclaration formelle du " Status Quæstionis " donnée avec la plus grande clarté et la plus grande précision. La justification consiste « dans la rémission des péchés et l’imputation de la justice de Christ ». Il est justifié aux yeux de Dieu, qui est tiré de la classe des pécheurs, et qui a Dieu pour témoin et celui qui affirme sa justice.
§ 3. Les œuvres ne sont pas le Fondement de la Justification.
Dans référence aux hommes depuis la chute l’affirmation est si explicite et si souvent répété, que la justification n’est pas des œuvres, que cette proposition n’a jamais été mise en doute par quiconque professe recevoir les Écritures comme la parole de Dieu. Étant expressément affirmé que le monde entier est coupable devant Dieu, que par les œuvres de la loi aucune chair vivante ne peut être justifiée, la seule question ouverte à la discussion est celle-ci : Qu’entend-on par les œuvres de la loi ?
À les réponses suivantes ont été données à cette question : Premièrement, que par les travaux de la sont des œuvres prescrites dans la loi juive. On suppose que, comme la controverse de Paul était avec ceux qui enseignaient que si les hommes n’étaient pas circoncis et n’observaient pas la loi de Moïse, ils ne pouvaient pas être sauvés (Actes XV. 1, 24), tout ce qu’il avait l’intention d’enseigner était le contraire de cette proposition. Il est comprendre que l’observance des rites et des cérémonies juives n’est pas essentielle au salut ; que les hommes ne sont pas rendus justes ou bons par des œuvres cérémonielles extérieures, mais par des œuvres moralement bonnes. C’est le terrain emprunté par les pélagiens et par la plupart des rationalistes modernes. Ce n’est qu’une modification de cette opinion que les hommes ne sont pas justifiés, c’est-à-dire que leur caractère devant Dieu n’est pas tant déterminé par leurs actes ou leurs œuvres particulières, que par leur disposition générale et leurs principes directeurs. Être justifié par la foi, c’est donc être justifié sur la base de notre confiance, ou de notre pieuse confiance en Dieu et en la vérité. Ainsi Wegseheider 1 dit : « Homines non singulis quibusdam recte factis operibusque operatis, nee propter meritum quoddam iis attribuendum, sed sola vera fide, c’est-à-dire animo ad Christi exemplmn ejusdemque præcepta composite et ad Deum et sanctissimum et benignissimum converso, ita, ut omnia cogitata et facta ad Deum ejusque voluntatem sanctissimam pie référant, Deo vere probantur et benevolentiæ Dei confisi spe beatitatis fnturæ pro dignitate ipsorum moral ! IIS concedendæ eertissima iinbuuntur. « Steudlin, 2 exprime le même point de vue. » Toute vraie réforme, toute bonne action, dit-il, doit naître de la foi, pourvu que nous entendions par la foi la conviction que quelque chose est juste, la conviction de principes moraux et religieux généraux. Kant dit que le Christ, sous un aspect religieux, est l’idéal de l’humanité. Quand un homme le considère ainsi et s’efforce de conformer son cœur et sa vie à cet idéal, il est justifié par la foi. 3 D’après tous ces points de vue, les simples œuvres cérémonielles sont exagérées, et le fondement de la justification est fait pour être notre propre caractère moral naturel et notre propre conduite.
1 Institution(« Theologiœ, in. III. § 155, 5e édit. Halle, 182G, p. 47C.
2 Dogme. , p. 417.
3 Voir Strauss, Dogmatik, Tübingen et Stuttgart, 1841, t. II, p. 493 et 494.
Deuxièmement. La doctrine des romanistes sur ce sujet est beaucoup plus élevée. Le romanisme conserve l’élément surnaturel du christianisme dans l’ensemble. En effet, c’est un sujet de pieuse reconnaissance envers Dieu que sous les nombreuses erreurs graves et destructrices de l’Église romaine, les grandes vérités de l’Évangile soient préservées. La Trinité, la vraie divinité du Christ, la vraie doctrine concernant sa personne en tant que Dieu et homme en deux natures distinctes et en une seule personne pour toujours ; le salut par son sang, la régénération et la sanctification par la toute-puissance de l’Esprit, la résurrection du corps et la vie éternelle, sont des doctrines sur lesquelles vit le peuple de Dieu dans cette communion, et qui ont produit des hommes aussi saints que saint Bernard, Fénélon, et sans doute des milliers d’autres qui sont du nombre des élus de Dieu. Tout vrai adorateur du Christ doit reconnaître dans son cœur comme un frère chrétien, où qu’il se trouve, quiconque aime, adore et fait confiance au Seigneur Jésus-Christ comme Dieu manifesté dans la chair et le seul Sauveur des hommes. Sur la question de la justification, les théologiens romains ont et ont défiguré la vérité comme ils l’ont fait pour presque toutes les autres doctrines relatives à la manière dont les mérites de Christ sont mis à la disposition de notre salut. Ils admettent, en effet, qu’il n’y a rien de bon dans l’homme déchu ; qu’il ne peut rien mériter et ne rien revendiquer sur la base de tout ce qu’il est ou peut faire de lui-même. Il est par nature mort dans le péché ; et jusqu’à ce qu’il soit rendu participant d’une vie nouvelle par la puissance surnaturelle du Saint-Esprit, il ne peut rien faire d’autre que pécher. Pour l’amour du Christ, et seulement par ses mérites, comme une question de grâce, cette vie nouvelle est communiquée à l’âme dans la régénération (c’est-à-dire, comme l’enseignent les romanistes, dans le baptême). Comme la vie expulse la mort ; De même que la lumière bannit les ténèbres, de même l’entrée de cette nouvelle vie divine dans l’âme expulse le péché (c’est-à-dire les habitudes pécheresses) et produit les fruits de la justice. Les travaux effectués après la régénération ont un réel mérite, « meritum condigni », et sont le fondement de la seconde justification ; La première justification consiste à rendre l’âme intrinsèquement juste par l’infusion de la justice. D’après ce point de vue, nous ne sommes pas justifiés par les œuvres faites avant la régénération, mais nous sommes justifiés par les œuvres de grâce, c’est-à-dire par les œuvres qui naissent du principe de la vie divine infusée dans le cœur. Tout le fondement de notre acceptation avec Dieu est ainsi fait pour être ce que nous sommes et ce que nous faisons.
Troisièmement. Selon les remontrants ou arminiens, les œuvres qui sont exclues de notre justification sont des œuvres de la loi, par opposition aux œuvres de l’Évangile. Dans l’alliance conclue avec Adam, Dieu exigeait l’obéissance parfaite comme condition de la vie. Pour l’amour du Christ, Dieu, dans l’Évangile, a conclu une nouvelle alliance avec les hommes, leur promettant le salut à condition de l’obéissance évangélique. Celle-ci s’exprime sous différentes formes. On dit parfois que nous sommes justifiés à cause de la foi. La foi est acceptée à la place de cette justice parfaite exigée par la loi adamique. Mais par foi, on n’entend pas l’acte de recevoir et de se reposer sur Christ seul pour le salut. Il est considéré comme un état d’esprit permanent et contrôlant. C’est pourquoi on dit souvent que nous sommes justifiés par une « marée obsequiosa », une foi obéissante ; une foi qui inclut l’obéissance. D’autres fois, on dit que nous sommes justifiés par l’obéissance évangélique, c’est-à-dire par le genre et la mesure d’obéissance que l’Évangile exige, et que les hommes depuis la chute, dans le bon usage de la « grâce suffisante » accordée à tous les hommes, sont capables de rendre. Limborch dit : « Sciendum, quando dieimus, nos fide justificari, nos non excludere opera, quæ tides exigit et tanquam fœeunda mater producit ; sed ea indudere. Et encore : « Est itaque [tides] talis actus, qui, licet in se spectatus perfectus nequaquam sit, sed in multis deficiens, tamen a Deo, gratiosa et liberrima vohultate, pro pleno et perfecto acceptatur, et propter quern Deus homini gratiose remissionem peccatorum et vitæ æternæ premium eonferre vult. » De plus,1 Dieu, dit-il, exige : « obedientiam fidei, hoc est, non rigidam et ab omnibus æqualem, prout exigebat lex ; sed tantam, marées quantiques, id est, certa de divinis promissionibus persuasio, in unoquoque efficere potest. C’est pourquoi la justification, dit-il,2 « Est gratiosa æstimatio, sen potins acceptatio justitiæ nostræ imperfectæ pro perfecta, propter Jesum Christum.
1 Theologia Christiana, vi. iv. 32, 31, 37 ; édit. Amsterdam, 1725, p. 705, b, a, 706, a.
2 Limborch, VI. iv. 18 ; ut supra, p. 703, a.
Quatrièmement. Selon la doctrine des luthériens et des réformés, les œuvres exclues du fondement de notre justification ne sont pas seulement les œuvres rituelles ou cérémonielles, ni simplement les œuvres faites avant la régénération, ni l’obéissance parfaite requise par la loi donnée à Adam, mais les œuvres de toutes sortes, tout ce que nous avons fait ou opéré en nous. Que ce soit là la doctrine de la Bible, c’est clair.
1. Parce que le langage de l’Écriture est illimité. La déclaration est que nous ne sommes pas justifiés « par les œuvres ». Aucun type spécifique d’œuvres n’est désigné à l’exclusion de tous les autres. Mais c’est « fonctionne » ce que nous faisons ; tout ce que nous faisons. Il est donc sans autorité que l’on limite ces déclarations générales à une classe particulière d’œuvres.
2. Le mot loi est utilisé dans un sens large. Elle comprend toutes les révélations de la volonté de Dieu comme règle de l’obéissance de l’homme ; et, par conséquent, par « œuvres de la loi » il faut entendre toutes sortes d’œuvres. Comme νό/w » signifie ce qui lie, il est employé pour la loi de nature, ou la loi écrite dans le cœur (Rom. II, 14), pour le Décalogue, pour la loi de Moïse, pour l’ensemble des Écritures de l’Ancien Testament. (Rom. iii. 19.) Quelquefois, l’un ou l’autre de ces aspects de la loi est spécialement mentionné. Paul assure aux Juifs qu’ils ne pouvaient pas être justifiées par les œuvres de la loi, qui les liait particulièrement. Il assure aux païens qu’ils ne pourraient pas être justifiés par la loi écrite dans leurs cœurs. Il assure aux croyants sous l’Évangile qu’ils ne peuvent pas être justifiés par les œuvres de la loi qui les obligent. La raison invoquée comprend tous les travaux possibles. C’est que toute obéissance humaine est imparfaite ; Tous les hommes sont pécheurs, et la loi exige une obéissance parfaite. (Gal. iii. 10.) C’est pourquoi « par les œuvres de la loi, aucune chair ne sera justifiée ». (Rom. iii. 20.)
3. La loi dont parle Paul est la loi qui dit : « Tu ne convoiteras point » (Rom. vii. 7) ; la loi qui est spirituelle (v. 14) ; qui est « saint, juste et bon » (verset 12) ; la loi dont le grand commandement est : Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, et ton prochain comme toi-même. D’ailleurs, ce qu’on appelle les œuvres de la loi se trouve dans Tite, III. 5 " œuvres de justice « . Il ne peut y avoir d’œuvres plus élevées que celles-ci. L’Apôtre rejette tout motif de confiance en ses propres la justice » (Phil. iii. 9), c’est-à-dire l’excellence propre, qu’elle soit habituelle ou actuelle. Il blâme les Juifs parce qu’ils sont allés de l’avant pour établir leur propre justice, et qu’ils n’ont pas voulu se soumettre à la justice de Dieu. (Rom. x. 3.) D’après ces passages et beaucoup d’autres semblables, il est clair que ce n’est pas un ou plusieurs genres spécifiques de travail qui sont exclus du motif de la justification, mais toutes les œuvres, toutes les excellences personnelles de toute espèce.
4. C’est ce qui ressort encore plus clairement de l’opposition constamment présentée entre la foi et les œuvres. Nous ne sommes pas justifiés par les œuvres, mais par la foi en Jésus-Christ. (Gal. ii. 16, et souvent ailleurs.) Il ne s’agit pas d’un type d’œuvres par opposition à un autre ; juridique par opposition à évangélique ; naturel par opposition à gracieux ; morale par opposition au rituel ; mais des œuvres de toute espèce par opposition à la foi.
5. La même chose est évidente d’après ce qui est enseigné de la gratuité de notre justification. La grâce et les œuvres sont antithétiques. « Or, à celui qui fait les œuvres, le salaire ne lui est pas imputé comme une grâce, mais comme une chose due. (Rom. iv. 4.) « Or, si c'est par la grâce, ce n'est plus par les œuvres; autrement la grâce n'est plus la grâce. Mais si c'est par les œuvres, ce n'est plus par la grâce; autrement l'œuvre n'est plus une œuvre. (Rom. xi. 6.) La grâce de nécessité exclut les ouvrages de toute espèce, et plus particulièrement ceux de la plus haute espèce, qui pourraient avoir quelque mérite.
Mais le mérite, quel qu’il soit, est nécessairement exclu, si notre salut est par la grâce.
6. Quand le motif positif de la justification est énoncé, il est toujours déclaré qu’il ne s’agit pas de quelque chose que nous avons fait ou opéré en nous, mais de ce qui a été fait pour nous. Elle est toujours représentée comme quelque chose d’extérieur à nous-mêmes. Nous sommes justifiés par le sang de Christ (Rom. v. 9) ; par son obéissance (Rom. v. 19) ; par sa justice (verset 18). Ceci est impliqué dans toute la méthode du salut. Le Christ nous sauve en tant que prêtre ; Mais un prêtre ne sauve pas en rendant bons ceux qui viennent à lui. Il ne travaille pas en eux, mais pour eux. Le Christ nous sauve par un sacrifice ; Mais un sacrifice est efficace, non pas à cause de son effet subjectif sur celui qui l’offre, mais comme une expiation ou une satisfaction à la justice. Le Christ est notre Rédempteur ; Il s’est donné lui-même en rançon pour beaucoup. Mais une rançon n’infuse pas la justice. C’est le paiement d’un prix. C’est la satisfaction des prétentions du ravisseur sur le captif. Par conséquent, tout le plan du salut, tel qu’il est présenté dans la Bible et tel qu’il est la vie de l’Église, est changé, si le fondement de notre acceptation avec Dieu est transféré de ce que Christ a fait pour nous, à ce qui est opéré en nous ou fait par nous. Les théologiens romains ne sont pas exactement d’accord sur la question de savoir si la justice habituelle ou réelle est le fondement de la justification. Bellarmin dit que c’est le premier. 1 Il dit : « Solam esse habitualem justitiam, per quam formaliter justi nominamur, et sumus : justitiam vero actualem, id est, opera vere justa justificare quidem, ut sanctus Jacobus loquitur, cum ait cap. 2 ex operibus hominem justificari, sed meritorie, non formaliter. C’est, dit-il, clairement la doctrine du concile de Trente, qui enseigne :2 « Causam formalem justificationis esse justitiam, sive caritatem, quam Deus unicuique propriam infundit, secundum mensuram dispositionuni, et quæ in cordibus justificatorum inhæret. Cela découle aussi, soutient-il, du fait que les sacrements justifient,3 « per modum instrumenti ad infusionem justitiæ habitualis ». Mais cela ne fait que la distinction, déjà mentionnée, entre la première et la seconde justification. L’infusion de la justice rend l’âme intrinsèquement juste ; alors les bonnes œuvres méritent le salut. L’une est la cause formelle, l’autre la cause méritoire de la justification du pécheur. Mais selon les Écritures, la justice habituelle et la justice actuelle, à la fois la grâce inhérente et sa Les fruits sont exclus de toute part dans le motif de notre justification.
1 De justi, ficatione, 11. 15 ; Dispute Clones, éd. Taris, 1608, t. IV, p. 820, a.
2 Sec Session vi. eap. 7. Le
3 Bellarniin, ut supra, p. 820, b.
7. C’est ce qui ressort encore plus nettement de la grande objection à sa doctrine, à laquelle Paul était constamment appelé à répondre. Cette objection était que, si notre la bonté ou l’excellence morale n’est pas le fondement de notre acceptation par Dieu, alors toute nécessité d’être bon est niée, et tout motif de bonnes œuvres est supprimé. Nous pouvons persévérer dans le péché afin que la grâce abonde. Cette objection a été réitérée mille fois depuis qu’elle a été invoquée contre les Apôtres. Il semble que oui déraisonnable et tellement démoralisant à dire comme Paul le dit, Romains iii. 22, qu’en ce qui concerne la justification, il n’y a pas de différence entre le Juif et le Gentil ; entre un adorateur du vrai Dieu et un adorateur des démons ; entre le plus grand pécheur et l’homme le plus moral du monde, que les hommes aient jamais senti qu’ils rendaient service à Dieu en dénonçant cette doctrine comme une hérésie destructrice de l’âme. Si Paul avait enseigné que les hommes sont justifiés pour leurs bonnes œuvres morales, comme disent les pélagiens et les rationalistes ; ou pour leur obéissance évangélique, comme disent les remontrants ; ou pour leur droiture inhérente et les bonnes œuvres subséquentes, comme disent les romanistes, il n’y aurait pas eu de place pour cette formidable objection. Ou bien, si, par suite d’une mauvaise compréhension de son enseignement, l’objection avait été soulevée, combien il avait été facile à l’apôtre de la mettre de côté. Comme la réponse aurait été évidente : « Je ne nie pas que les œuvres vraiment bonnes soient le fondement de notre acceptation par Dieu. Je dis seulement que les œuvres rituelles n’ont aucune valeur à ses yeux, qu’il regarde au cœur ; ou que les travaux faits avant la régénération n’ont ni excellence ni mérite réels ; ou, que Dieu est plus indulgent maintenant qu’il ne traite avec Adam ; qu’il n’exige pas une obéissance parfaite, mais qu’il accepte nos efforts imparfaits et bien intentionnés pour garder ses saints commandements. Dans quelle mesure une telle réponse aurait-elle été raisonnable et satisfaisante ? Paul, cependant, n’y arrive pas. Il adhère à sa doctrine, que notre propre excellence morale personnelle n’a rien à voir avec notre justification ; que Dieu justifie les impies, qu’il reçoit le chef des pécheurs. Il répond l’objection, en effet, et y répond efficacement ; mais sa réponse suppose qu’il enseigne exactement ce que les protestants enseignent, que nous sommes justifiés sans les œuvres, non pas pour notre propre justice, mais gratuitement, sans argent et sans prix, uniquement sur la base de ce que Christ a fait pour nous. Sa réponse est que, loin d’être vrai que nous devons être bons avant de pouvoir être justifiés, nous devons être justifiés avant de pouvoir être bons ; que tant que nous sommes sous la malédiction de la loi, nous produisons du fruit jusqu’à la mort ; que ce n’est que lorsque nous sommes réconciliés avec Dieu par la mort de son Fils, que nous produisons du fruit pour la justice ; que lorsque nous sommes justifiés par la justice de Christ, nous sommes rendus participants de son Esprit ; étant justifiés, nous sommes sanctifiés ; que l’union avec Christ par la foi assure non seulement l’imputation de sa justice à notre justification, mais la participation de sa vie à notre sanctification ; de sorte qu’aussi sûrement qu’il vit et vit pour Dieu, ainsi ceux qui croient en lui vivront pour Dieu ; et qu’il n’y a personne qui participe au mérite de sa mort qui ne participe à la puissance de sa vie. Nous ne rendons donc pas, dit-il, la loi de Dieu. Oui, c’est nous qui établissons la loi. Nous enseignons le seul vrai moyen de devenir saint ; bien que cette voie paraisse insensée aux sages de ce monde, dont la sagesse est folie aux yeux de Dieu.
§4. La justice de Christ, le fondement de la justification.
La question impérative demeure : Comment un homme sera-t-il juste devant Dieu ? Si notre excellence morale n’est pas le fondement sur lequel Dieu nous déclare justes, quel est ce fondement ? La grande raison pour laquelle des réponses si différentes sont données à cette question est qu’elle est comprise dans des sens différents. La réponse scripturaire et protestante est absurde, si la question signifie ce que les romanistes et d’autres comprennent qu’elle signifie. Si « juste » signifie bon, c’est-à-dire si l’on prend le mot dans son sens moral, et non dans son sens juridique, alors il est absurde de dire qu’un homme peut être bon avec la bonté d’un autre ; ou de dire que Dieu peut déclarer bon un homme qui ne l’est pas. Bellarmin dit qu’un Éthiopien vêtu d’un vêtement blanc n’est pas blanc. Curcellæus, le remontrant, dit : « Un homme ne peut pas plus être juste avec la justice d’un autre, qu’il ne peut être blanc avec la blancheur d’un autre. » Moehler 1dit qu’il est impossible qu’une chose apparaisse à Dieu autrement qu’elle n’est réellement ; qu’un homme injuste doit paraître. lui, ou être prononcé par lui justement. Tout cela est vrai dans le sens voulu par ces auteurs : « Le jugement de Dieu est selon la vérité. » (Rom. ii. 2.) Tout homme est vraiment juste celui qu’il justifie ou déclare juste. C’est en vain qu’on discute jusqu’à ce que le " status quæstionis " soit clairement déterminé. Le mot 8i״»׳oç, « juste » ou « juste », a deux sens distincts, comme nous l’avons dit plus haut. Il a un sens moral, mais aussi juridique, médico-légal ou judiciaire. Il exprime tantôt un caractère moral, tantôt simplement un rapport au droit et à la justice. En un sens, déclarer un homme juste, c’est déclarer qu’il est moralement bon. En un autre sens, c’est déclarer que les prétentions de la justice contre lui sont satisfaites, et qu’il a droit à la récompense promise aux justes. Quand Dieu justifie les impies, il ne déclare pas qu’il est pieux, mais que ses péchés sont expiés, et qu’il a un titre fondé sur la justice à la vie éternelle. En cela, il n’y a ni contradiction ni absurdité. Si un homme mis en accusation comparaissait devant le tribunal compétent et indiquait les raisons pour lesquelles l'accusation devrait, en toute justice, être annulée, et s'il était déclaré avoir droit à son rang, à ses titres et à ses biens, une décision en sa faveur constituerait une justification. Elle le déclarerait juste aux yeux de la loi, mais elle ne déclarerait rien et n’aurait aucun effet sur son caractère moral. De la même manière, lorsque le pécheur se tient à la barre de Dieu, il peut montrer de bonnes raisons pour lesquelles il ne peut pas être condamné justement, et pourquoi il devrait être déclaré droit à la vie éternelle. Maintenant, la question est : « Sur quelle base Dieu peut-il prononcer un pécheur juste dans ce sens légal ou médico-légal ? » Il a été démontré que justifier, selon l’usage uniforme de l’Écriture, c’est prononcer juste dans le sens indiqué, que ce n’est pas simplement pardonner, et que ce n’est pas rendre intrinsèquement juste ou saint. Il a également été démontré que la doctrine de l’Écriture, qui est en effet intuitivement vraie pour la conscience, est que notre excellence morale, habituelle ou actuelle, n’est pas et ne peut pas être le fondement d’une telle déclaration judiciaire. Qu’est-ce donc que le sol ? La Bible et le peuple de Dieu répondent d’une seule voix : « La justice de Christ. » L’ambiguïté des mots, les spéculations des théologiens et les malentendus peuvent amener beaucoup de gens du peuple de Dieu à nier en paroles que telle est la bonne réponse, mais c’est néanmoins la réponse rendue par le cœur de chaque croyant. Pour son acceptation auprès de Dieu, il s’appuie non pas sur lui-même, mais sur le Christ, non pas sur ce qu’il est ou a fait, mais sur ce que Christ est et a fait pour lui.
1 Symbolisme, § 14, 6e éd. Mayence, 1843, p. 139.
Par la justice de Christ est tout ce qu’il est devenu, fait et souffert pour satisfaire aux exigences de la justice divine, et mériter pour son peuple le pardon des péchés et le don de la vie éternelle. La justice de Christ est communément représentée comme incluant son obéissance active et passive. Cette distinction est, quant à l’idée, scripturaire. La Bible enseigne que Christ a obéi à la loi dans tous ses préceptes, et qu’il a enduré son châtiment, et que cela a été fait dans un tel sens pour son peuple qu’on dit qu’il l’a fait. Ils sont morts en Lui. Ils ont été crucifiés avec Lui. Ils ont été délivrés de la malédiction de la loi parce qu’il a été fait malédiction pour eux. Il a été fait sous la loi afin qu’il puisse racheter ceux qui étaient sous la loi. Nous sommes libérés de la loi par le corps de Christ. Il a été fait péché afin que nous devenions justice de Dieu en Lui. Il est la fin de la loi pour la justice de tous ceux qui croient. C’est par son obéissance que beaucoup sont rendus justes. (Rom. v. 19.) Nous avons obéi en lui, selon l’enseignement de l’apôtre, dans Romains v. 12-21, dans le même sens que nous avons péché en Adam. L’obéissance active et l’obéissance passive du Christ, cependant, ne sont que des phases ou des aspects différents de la même chose. Il obéissait dans la souffrance. Ses plus hauts actes d’obéissance ont été accomplis dans le jardin et sur la croix. C’est pourquoi cette distinction n’est pas présentée dans l’Écriture comme si l’obéissance de Christ répondait à un but, et ses souffrances à un autre dessein distinct. Nous sommes justifiés par son sang. Nous sommes réconciliés avec Dieu par sa mort. Nous sommes affranchis de toutes les exigences de la loi par son corps (Rom. VII, 4), et nous sommes affranchis de la loi parce qu’il a été soumis à elle et qu’il lui obéit à notre place. (Gal. iv. 4, 5.) Ainsi, le même effet est attribué à la mort ou aux souffrances de Christ, et à son obéissance, parce que les deux sont des formes ou des parties de son obéissance ou de sa justice par lesquelles nous sommes justifiés. En d’autres termes, l’obéissance de Christ comprend tout ce qu’il a fait pour satisfaire aux exigences de la loi.
La Justice de Christ est la Justice de Dieu.
La justice de Christ sur la base de laquelle le croyant est justifié est la justice de Dieu. Elle est ainsi désignée dans l’Écriture, non seulement parce qu’elle a été pourvue et qu’elle est acceptée par Lui ; ce n’est pas seulement la justice qui profite devant Dieu, mais c’est la justice d’une personne divine ; de Dieu manifesté dans la chair. Dieu a racheté l’Église avec son propre sang. (Actes xx. 28.) C’est le Seigneur de gloire qui a été crucifié. (1 Corinthiens ii. 8.) Celui qui était dans la forme de Dieu et qui pensait que ce n’était pas un vol d’être égal à Dieu, est devenu obéissant jusqu’à la mort, même jusqu’à la mort de la croix. (Phil. ii. 6-8.) Celui qui est l’éclat de la gloire du Père, et l’image expresse de sa personne, qui soutient toutes choses par la parole de sa puissance ; que les anges adorent ; qui s’appelle Dieu ; qui, au commencement, posa les fondements de la terre, et dont les mains sont l’ouvrage des cieux ; qui est éternel et immuable, a, enseigne l’Apôtre, détruit par la mort celui qui a le pouvoir de la mort et délivré ceux qui, par crainte de la mort (I. e., de la colère de Dieu) ont été toute leur vie soumis à la servitude. (Héb. i., ii.)
Celui que Thomas reconnut et avoua être son Seigneur et Dieu était la personne dans le côté blessé de laquelle il enfonça sa main. Celui que Jean dit avoir vu, regardé et manipulé, il déclare être le vrai Dieu et la vie éternelle. L’âme, dans laquelle réside la personnalité, ne meurt pas quand l’homme meurt, mais c’est l’âme qui donne de la dignité à l’homme, et qui rend sa vie d’une valeur indiciblement plus grande aux yeux de Dieu et de l’homme que la vie de toute créature irrationnelle. Ce n’est donc pas la nature divine en Christ dans laquelle réside sa personnalité, le Logos éternel, qui est morte à la mort du Christ. Néanmoins, l’union hypostatique entre le Logos et la nature humaine du Christ rend vrai que la justice de Christ (son obéissance et ses souffrances) était la justice de Dieu. C’est la raison pour laquelle elle peut servir devant Dieu pour le salut du monde entier. C’est la raison pour laquelle le croyant, lorsqu’il est revêtu de cette justice, n’a à craindre ni la mort ni l’enfer. C’est la raison pour laquelle Paul met l’univers au défi de mettre quoi que ce soit à la charge des élus de Dieu.
La justice de Christ est imputée au croyant pour sa justification. Le mot imputer est familier et sans ambiguïté. Imputer, c’est attribuer, compter, mettre à sa charge. Quand nous disons que nous imputons un bon ou un mauvais motif à un homme, ou qu’une action bonne ou mauvaise lui est imputée, personne ne se méprend sur ce que nous voulons dire. Philémon n’avait aucun doute sur ce que Paul voulait dire quand il lui dit de lui imputer la dette d’Onésime. « Que le roi n’impute rien à son serviteur. » (1 Sam. XXII. 15.) « Que mon seigneur ne m’impute pas l’iniquité. » (2 Sam. xix. 19.) « Elle ne sera pas imputée à celui qui l’offre. » (Lév. vii. 18.) « On imputera du sang à cet homme ; il a versé son sang. (Lév. XVII. 4.) « Heureux l’homme à qui le Seigneur n’impute point d’iniquité. » (Psaume xxxii. 2.) « À qui Dieu impute la justice sans les œuvres. » (Rom. iv. G.) Dieu est « en Christ, ne leur imputant pas leurs offenses ». (2 Corinthiens v. 19.)
Le sens de ces passages et d’autres semblables de l’Écriture n’a jamais été contesté. Tout le monde les comprend. Nous employons le mot imputer dans son sens simple et admis, quand nous disons que la justice de Christ est imputée au croyant pour sa justification.
Il semble inutile de remarquer que cela ne signifie pas et ne peut pas signifier que la justice de Christ est infusée dans le croyant, ou qu’elle lui est communiquée d’une manière telle qu’elle change ou constitue son caractère moral. L’imputation ne change jamais l’état intérieur et subjectif de la personne à qui l’imputation est faite. Quand le péché est imputé à un homme, il n’est pas rendu pécheur ; quand on lui a imputé le zèle de Phinées, il n’a pas été rendu zélé. Quand vous imputez un vol à un homme, vous n’en faites pas un voleur. Quand vous imputez la bonté à un homme, vous ne le rendez pas bon. Ainsi, lorsque la justice est imputée au croyant, il ne devient pas pour autant subjectivement juste. Si la justice est adéquate et si l’imputation est faite pour des motifs suffisants et par l’autorité compétente, la personne à qui l’imputation est faite a le droit d’être traitée comme juste. Et, par conséquent, dans le sens légal, mais pas dans le sens moral ou subjectif, l’imputation de la justice de Christ rend le pécheur juste. C’est-à-dire qu’elle lui donne droit au pardon complet de tous ses péchés et à la justice à la vie éternelle.
Que ce soit là le point de vue simple et universellement accepté de la doctrine telle qu’elle était défendue par tous les protestants à la Réforme, et qu’ils considéraient comme la pierre angulaire de l’Évangile, cela a déjà été suffisamment prouvé par des extraits des symboles luthérien et réformé, et n’a jamais été contesté par aucun candide ou de l’autorité compétente. Telle a continué d’être la doctrine des deux grandes branches de l’Église protestante, dans la mesure où elles prétendent adhérer à leurs normes. Schmid 1 le prouve par toute une série de citations en ce qui concerne l’Église luthérienne. Schweizer 2 fait de même pour l’Église réformée. Quelques citations d’auteurs d’un caractère représentatif reconnu suffiront donc sur ce point. Turrettin dit avec la précision qui le caractérise : « Cum dicimus Christi justitiam ad justificationem nobis imputari, et nos per justitiam illam imputatam justos esse coram Deo, et non per justitiam ullam quæ nobis inhæreat ; Nihil aliud volumus, quam obedientiam Christi Deo Patri nomine nostro præstitam, ita nobis a Deo donari, ut vere nostra censeatur, eamque esse unicam et solam illam justitiam propter quam, et cujus merito, absolvant you’re a reatu peccatorum nostrum, ct jus ad vitam obtinemus ; nec ullam in nobis esse justitiam, aut ulla bona opera, quibus bénéficia tanta promereamur, quæ ferre possint severum judicii divini examen, si Deus juxta legis suæ rigorem nobiscum agcre vcllet ; nihil nos illi posse opponerc, nisi Christi meritum et satisfactionem, in qua sola, peccatorum conscientia territi, tutum adversus iram divinam perfugiuni, et animarum nostrarum pacem in venire possumus. » 1
1 La dogmatique de l’Église évangélique, présentée et attestée par les sources, 3e édit. Francfort et Erlangen, 1853.
2 La vie de foi de l’Église évangélique réformée présentée et documentée à partir des sources, Zurich, 1844, 1847.
1 Institutio, 10c. XVI. iii. 9, édit. Édimbourg, 1847, vol. II. à la p. 570.
Sur les éléments suivants page il se réfère à Bellarmin,2 qui dit : « Si [Protestantes hoc] solum vellent, nobis imputai· ! Christi mérita, quia [a Deo] nobis donata sunt, et possumus ea [Deo] Patri offere pro peccatis nostris, quoniam Christus suscepit super se onus satisfaciendi pro nobis, nosque Deo Patri reconciliandi, recta esset eorum sententia. À ce sujet, Turrettin remarque : « Atqui nihil aliud volumus ; Nam quod addit, nos velle 'ita imputari nobis Christi justitiam, ut per earn formaliter justi nominemur et simus,' hoc gratis et falso supponit, ex perversa et præpostera sua hypothesi de justificatione morali. Sed quæritur, Ad quid imputatio ista fiat ? An ad justificationem et vitam, ut nos pertendimus, An vero tantum ad gratiæ internæ et justitiæ inhærentis infusionem, ut illi volunt ; Id est, an ita imputentur et communicentur nobis mérita Christi, ut sint causa meritoria sola nostræ justificationis, nec ulla alia detur justifia propter quam absolvamur in conspectu Dei ; quod volumus ; An vero ita imputentur, ut sint conditiones causæ formalis, id. justitiæ inhærentis, ut ea homo donari possit, vel causæ extrinsecæ, quæ mereantur infusionem justitiæ, per quam justificatur homo ; ut ita non meritum Christi proprie, sed justifia inhæreiis per meritum Christi acquisita, sic causa propria et vera, propter quam homo justificatur ; quod illi statuunt. Remarquons en passant que, selon la doctrine protestante, il n’y a pas à proprement parler de « cause formelle » de justification. La justice de Christ est la cause méritoire, mais non la cause formelle de la déclaration de justice du pécheur. Une cause formelle est ce qui constitue la nature inhérente et subjective d’une personne ou d’une chose. La cause formelle de l’être bon d’un homme, c’est la bonté ; de sa sainteté, de sa sainteté ; de sa méchanceté, de sa méchanceté. La cause formelle du rouge d’une rose, c’est la rougeur ; Et d’un mur qui est blanc, c’est la blancheur. Comme nous ne sommes pas rendus intrinsèquement justes par la justice de Christ, il n’est guère correct de dire que sa justice est la cause formelle de notre justice. Owen et d’autres écrivains éminents emploient en effet souvent l’expression mentionnée, mais ils enlèvent le mot « formel » à son sens scolastique ordinaire.
2 De Justification ?, ii. 7 ; Disputationes, Paris, 1608, p. 801, b.
Campegius Vitringa3 dit : « Tenendum est certissimum boo fundamentum, quod jnstificare sit vocabulum forense, notetque in Scriptura actum judicis, quo causam alicujus in judicio justam esse dcclarat ; sive euni a crimine, cujus postulatus est, absolvat (quæ est genuina, et maxime propria vocis significatio), sive etiam jus ad hanc, vel illam rem ei sententia addicat, et adjudicet. »
3 Doctrina Christianes Relipionis, in. xvi. 2 ; Leyde, 1764, vol. iii. p. 254 et suiv.
« 17. Per justificationem peccatoris intelligimus actum Dei Patris, ut judicis, quo pcccatorem credentem, natura filium iræ, neque ullum jus ex sc habentem bona cœlestia petendi, declared immunem esse ab omni reatu, et condemnatione, adopté in filium, et in eum ex gratia confert jus ad suam communionem, salute aeterna, bonisquc omnibus ea conjunctis, postulandi. »
« 27. Teneamus nullam carnem in se posse reperirc et ex se a produit causam, et fundamentum justificationis. 29. Quærendum igitur id, propter quod peccator justificatur, extra peccatorem in obedientia Filii Dei, quam præstitit Patri in liumana natura ad mortem, imo ad mortem cru cis, et ad quam præstandam se obstrinxerat in sponsione. (Rom. v. 19.) 32. Hæc [obedientia] imputatur peccatori a Deo judice ex gratia juxta jus sponsionis, de quo ante dictum.
Owen, dans son ouvrage élaboré sur la justification,1 prouve que le mot justifier, « que l’acte de Dieu envers les hommes, ou des hommes envers Dieu, ou des hommes entre eux, ou de l’un envers l’autre, soit exprimé par là, est toujours utilisé dans un sens « médico-légal », et ne désigne pas une opération physique, une transfusion ou une transmutation. » Il conclut ainsi la discussion : « C’est pourquoi, comme la condamnation n’est pas l’infusion d’une habitude de méchanceté en celui qui est condamné, ni le fait de rendre intrinsèquement méchant celui qui était juste auparavant, mais le fait de prononcer une sentence contre un homme à l’égard de sa méchanceté ; La justification n’est plus le changement d’une personne de l’injustice inhérente à la justice, par l’infusion d’un principe de grâce, mais une déclaration sentencielle de sa part pour être juste.» 2
1 Justification, chap. 4, édit. Philadelphie, 1841, p. 144.
2 Idem. , p. 154.
Le fondement de cette justification dans le cas du pécheur croyant est l’imputation de la justice de Christ. Ceci est exposé en détail. 3 « Le jugement des Églises réformées à cet égard, dit-il, est connu de tous et doit être confessé, à moins que nous n’ayons l’intention, par de vaines querelles, d’augmenter et de perpétuer les querelles. L’Église d’Angleterre, en particulier, est expresse dans sa doctrine quant à l’imputation de la justice de Christ, à la fois active et passive, telle qu’elle est généralement distinguée. C’est ce qui s’est manifesté dernièrement si pleinement dans ses écrits authentiques, c’est-à-dire : les articles de religion et les livres d’homélies, et d’autres écrits publiquement autorisés, qu’il est tout à fait inutile de donner une nouvelle démonstration de celui-ci.
3 Idem. chap. 7, p. 187.
Le président Edwards, dans son sermon sur la justification 1, expose la doctrine protestante dans toute sa plénitude. « Supposer, dit-il, qu’un homme soit justifié par sa propre vertu ou obéissance, c’est déroger à l’honneur du Médiateur, et attribuer à la vertu de l’homme ce qui n’appartient qu’à la justice du Christ. Elle met l’homme à la place de Christ, et fait de lui son propre sauveur, en ce sens que Christ seul est le Sauveur : et c’est donc une doctrine contraire à la nature et au dessein de l’Évangile, qui est d’abaisser l’homme, et d’attribuer toute la gloire de notre salut à Christ le Rédempteur. C’est incompatible avec la doctrine de l’imputation de la justice de Christ, qui est une doctrine de l’Évangile. Ici, je voudrais (1.) Expliquez ce que nous entendons par l’imputation de la justice de Christ. (2.) Prouvez que la chose qu’elle veut dire est vraie. (3) Montrez que cette doctrine est tout à fait incompatible avec la doctrine selon laquelle nous sommes justifiés par notre propre vertu ou notre obéissance sincère.
1 Serm. IV. Œuvres, édit. N. Y. 1868, t. IV, p. 91 et 92.
« Premièrement. J’expliquerais ce que nous voulons dire par l’imputation de la justice de Christ. Quelquefois l’expression est prise par nos théologiens dans un sens plus large, pour l’imputation de tout ce que Christ a fait et souffert pour notre rédemption, par laquelle nous sommes libérés de la culpabilité, et nous sommes justes aux yeux de Dieu ; et implique ainsi l’imputation à la fois de la satisfaction et de l’obéissance du Christ. Mais je l’entends ici dans un sens plus strict, car l’imputation de cela la justice ou la bonté morale qui consiste dans l’obéissance de Christ. Et par cette justice qui nous est imputée, on n’entend rien d’autre que ceci, que cette justice de Christ est acceptée pour nous, et admise à la place de cette parfaite inhérente justice qui doit être en nous-mêmes : l’obéissance parfaite de Christ sera comptée pour nous, de sorte que nous en aurons le bénéfice, comme si nous l’avions accomplie nous-mêmes : et ainsi nous supposons qu’un titre à la vie éternelle nous est donné comme récompense de cette justice. Dans le même ordre d’idées, il demande : « Pourquoi y a-t-il plus d’absurdité à supposer que l’obéissance du Christ nous est imputée, que sa satisfaction nous est imputée ? Si Christ a souffert le châtiment de la loi pour nous et à notre place, il s’ensuivra que sa souffrance nous est imputée, c’est-à-dire qu’elle est acceptée pour nous et à notre place, et qu’elle est comptée pour nous, comme si nous l’avions subie. Mais pourquoi son obéissance à la loi de Dieu ne peut-elle pas être comptée aussi rationnellement à notre compte, que le fait qu’il subisse le châtiment de la loi ? Il poursuit en affirmant qu’il y a la même nécessité pour l’un que pour l’autre.
Le Dr Shedd dit : « Une deuxième différence entre la sotériologie ansellique et la sotériologie protestante se voit dans la distinction formelle de l’œuvre de Christ en sa justice active et sa justice passive. Par sa droiture passive, on entend ses souffrances expiatoires, par lesquelles il satisfaisait aux exigences de la justice, et par sa droiture active, on entend son obéissance à la loi comme règle de vie et de conduite. Ceux qui ont fait cette distinction ont soutenu que le but de Christ, en tant que substitut par procuration, était de répondre à toutes les exigences de la loi pour le pécheur. Mais la loi exige une obéissance présente et parfaite, ainsi que la satisfaction de la désobéissance passée. La loi n’est pas complètement accomplie par la seule endurance de la peine. Il faut aussi y obéir. Christ a à la fois enduré le châtiment dû à l’homme pour sa désobéissance, et a parfaitement obéi à la loi pour lui ; de sorte qu’il était un substitut par procuration à la fois en ce qui concerne le précepte et la peine de la loi. Par son obéissance active, il a obéi à la loi, et par son obéissance passive, il a enduré le châtiment. De cette façon, son œuvre par procuration est achevée.» 1
1 Histoire de la doctrine chrétienne, New York, 1803, vol. II, p. 341.
Les premiers Symboles de la Réforme ne font pas cette distinction. En ce qui concerne l’Église luthérienne, elle apparaît d’abord sous la « forme de la concorde » (A. D. 1576). Sa déclaration est la suivante : « Cette justice qui est imputée à la foi, ou aux croyants, par pure grâce, est l’obéissance, la souffrance et la résurrection de Christ, par laquelle il a satisfait à la loi pour nous, et a expié nos péchés. En effet, puisque le Christ n’était pas seulement homme, mais vraiment Dieu et homme en une seule personne indivise, il n’était pas plus soumis à la loi qu’il ne l’était à la souffrance et à la mort (si l’on ne tient compte que de sa personne), parce qu’il était le Seigneur de la loi. C’est pourquoi non seulement l’obéissance à Dieu son Père Il l’a manifesté dans sa passion et dans sa mort, mais aussi l’obéissance qu’il a montrée en se soumettant volontairement à la loi et en l’accomplissant pour nous, nous est imputée pour justice, de sorte que Dieu, à cause de l’obéissance totale que Christ a accomplie (præstitit) pour nous devant son Père céleste, tant dans l’action que dans la souffrance, dans la vie et dans la mort, qu’ils nous remettent nos péchés, qu’ils nous considèrent comme bons et justes, et qu’ils nous donnent le salut éternel.» 2 Sur ce point, les normes réformées ou calvinistes sont d’accord.
2 Hase, Libri Symbolici, 3e édit., Leipzig, 1816, p. 684, 685.
On a déjà remarqué que la distinction entre l’obéissance active et l’obéissance passive du Christ est, à un certain avis, sans importance. De même que le Christ obéissait dans la souffrance, ses souffrances faisaient autant partie de son obéissance que son observance des préceptes de la loi. Les Écritures ne font pas expressément cette distinction, car elles incluent tout ce que Christ a fait pour notre rédemption sous le terme de justice ou d’obéissance. La distinction ne devient importante que lorsqu’il est nié que son obéissance morale soit une partie de la justice pour laquelle le croyant est justifié, ou que tout son travail pour faire satisfaction a consisté dans l’expiation ou le fait de supporter la peine de la loi. C’est contraire à l’Écriture et vicie la doctrine de la justification telle qu’elle est présentée dans la Bible.
Que la doctrine protestante, telle qu’elle a été énoncée ci-dessus, soit la doctrine de la parole de Dieu, ressort des considérations suivantes :
1. Le mot δικαιδω, comme on l’a montré, signifie déclarer δίκαιος. Personne ne peut être honnêtement prononcé δίκαιος à qui δικαιοσύνη ne puisse légitimement être attribué. Le pécheur (ex vi verbi) n’a pas de justice propre. Dieu lui impute donc une justice qui n’est pas la sienne. La justice ainsi imputée est déclarée être la justice de Dieu, de Christ, la justice qui est par la foi. C’est presque en tant de mots la déclaration de la Bible sur le sujet. Comme la question, Quelle est la méthode de justification ? est une question biblique, elle doit être tranchée exégétiquement, et non par des arguments tirés de principes supposés de la raison. Nous n’avons pas la liberté de dire que la justice d’un homme ne peut être imputée à un autre ; qu’il s’agirait là d’une erreur ou d’une absurdité ; que la justice de Dieu n’exige pas une justice telle que la loi le prescrit, comme condition de la justification ; qu’il puisse pardonner et sauver comme un père sans aucune considération, à moins que ce ne soit celle du repentir ; qu’il est incompatible avec sa grâce que les exigences de la justice soient satisfaites avant que la justification ne soit accordée ; que cette conception de la justification en fait une imposture, une accusation de justice, alors qu’il n’est pas juste, etc. Tout cela n’est rien. Tout se rapporte à cette sagesse qui est folie devant Dieu. Tout ce que nous avons à faire, c’est de déterminer, (1.) Quel est le sens du mot justifier tel qu’il est utilisé dans l’Écriture ? (2.) Sur quelle base la Bible affirme-t-elle que Dieu déclare que les impies sont justes ? Si la réponse à ces questions est celle que l’Église de tous les temps, et en particulier l’Église de la Réforme, a donnée, alors nous devrions être satisfaits. L’apôtre dit expressément que Dieu impute la justice au pécheur. (Rom. iv. 6, 24.) Par justice, tout le monde admet qu’on entend ce qui rend un homme juste, ce que la loi exige. Elle ne consiste pas dans l’obéissance du pécheur lui-même, ou l’excellence morale, car on dit qu’elle est « sans œuvres », et il est déclaré qu’aucun homme ne peut être justifié par son propre caractère ou sa propre conduite. Cette justice ne consiste pas non plus dans la foi ; car elle est « de la foi », « par la foi », « par la foi ». On ne dit jamais que nous sommes justifiés à cause de la foi. Ce n’est pas non plus une justice, ou une forme d’excellence morale jaillissant de la foi, ou dont la foi est la source ou la cause prochaine ; parce qu’elle est déclarée être la justice de Dieu ; une justice qui se révèle ; qui est offert ; qui doit être accepté comme un cadeau. (Rom. c. 17.) Il est déclaré que c’est la justice de Christ ; son obéissance. (Rom. v. 19.) C’est donc la justice de Christ, son obéissance parfaite dans l’accomplissement et la souffrance de la volonté de Dieu, qui est imputée au croyant, et sur la base de laquelle le croyant, bien qu’impie en lui-même, est déclaré juste, et par conséquent libre de la malédiction de la loi et ayant droit à la vie éternelle.
2. Tous les points énoncés ci-dessus ne sont pas seulement clairement affirmés par l’Apôtre, mais ils sont également exposés dans un ordre logique, et minutieusement soutenus et justifiés dans l’épître aux Romains. L’apôtre commence par déclarer que l’Évangile « est la puissance de Dieu pour le salut ». Elle n’est pas ainsi divinement efficace à cause de la pureté de ses préceptes moraux ; ni parce qu’elle met en lumière l’immortalité ; ni parce qu’elle nous présente l’exemple parfait de Notre-Seigneur Jésus-Christ ; ni parce qu’elle nous assure de l’amour de Dieu ; ni à cause de l’influence élevante, sanctifiante et vivifiante par laquelle elle est assistée. Il y a quelque chose de préliminaire à tout cela. La première et indispensable condition du salut est que les hommes soient justes devant Dieu. Ils sont sous sa colère et sa malédiction. Tant que la justice n’est pas satisfaite, tant que Dieu n’est pas réconcilié, il n’y a aucune possibilité qu’une influence morale soit d’une quelconque utilité. C’est pourquoi l’Apôtre dit que la puissance de l’Évangile est due au fait que « c’est là que la justice de Dieu est révélée ». Cela ne peut pas signifier la bonté de Dieu, car ce n’est pas le sens du mot. Elle ne peut pas signifier ici sa justice, parce que c’est une justice qui est « de foi », parce que la justice de Dieu est révélée du ciel et à tous les hommes ; parce que la révélation de la justice terrifie et éloigne de Dieu ; parce que ce qu’on appelle ici la justice de Dieu, est ailleurs opposé à notre « propre justice » (Rom. x. 3 ; Phil. iii. 9) ; et parce qu’il est déclaré que c’est la justice de Christ (Rom. v. 18), qui est (Rom. v. 19) expliquée par son « obéissance », et dans Romains v. 9 et ailleurs déclaré être « son sang ». Cette justice de Christ est la justice de Dieu, parce que Christ est Dieu ; parce que Dieu l’a pourvu, révélé et offert ; et parce qu’elle se sert devant Dieu comme d’un motif suffisant sur lequel Il peut déclarer le pécheur croyant juste. C’est là que réside la puissance salvatrice de l’Évangile. La question : Comment l’homme sera-t-il juste devant Dieu ? résonnait aux oreilles des hommes depuis le commencement. On n’y avait jamais répondu. Pourtant, il faut y répondre, sinon il n’y aura aucun espoir de salut. Il est exaucé dans l’Évangile, et donc l’Évangile est la puissance de Dieu pour le salut de tous ceux qui croient ; c’est-à-dire à quiconque, qu’il soit juif ou païen, esclave ou libre, bon ou mauvais, qui, au lieu d’aller çà et là pour établir sa propre justice, il se soumet avec une joyeuse confiance à la justice que son Dieu et Sauveur Jésus-Christ a opérée pour les pécheurs, et qui leur est offerte gratuitement dans l’Évangile sans argent et sans prix.
C’est le thème de Paul, qu’il entreprend de développer et d’établir, comme nous l’avons déjà dit sous un titre précédent. Il commence par affirmer, comme il est indiscutablement vrai d’après la révélation de Dieu dans la constitution de notre nature, que Dieu est juste, qu’il punira le péché ; qu’Il ne peut pas déclarer juste celui qui n’est pas juste. Il montre ensuite par l’expérience et par l’Écriture, d’abord à l’égard des Gentils, puis à l’égard des Juifs, qu’il n’y a pas de juste, pas un seul ; que le monde entier est coupable devant Dieu. Il n’y a donc pas de différence, puisque tous ont péché.
Puisque la justice que la loi exige ne peut être trouvée dans le pécheur ni rendue par lui, Dieu a révélé une autre justice (Rom. iii, 21) ; « la justice de Dieu », accordée à tous ceux qui croient. Les hommes ne sont pas justifiés pour ce qu’ils sont ou pour ce qu’ils font, mais pour ce que Christ a fait pour eux. Dieu l’a mis en avant comme propitiation pour le péché, afin qu’il soit juste et qu’il soit le justicier de ceux qui croient.
L’apôtre enseigne que telle a été la méthode de justification dès le commencement. La loi et les prophètes en ont été témoins. Il n’y avait jamais, depuis la chute, d’autre moyen de justification possible pour les hommes. Comme Dieu a justifié Abraham parce qu’il croyait en la promesse de la rédemption par le Messie ; Il justifie donc ceux qui croient maintenant en l’accomplissement de cette promesse. (Rom. iv. 3, 9, 24.) Ce n’est pas l’état d’esprit croyant d’Abraham qui a été pris pour justice. Ce n’est pas la foi dans le croyant maintenant ; non pas la foi comme vertu, ou comme source d’une vie nouvelle, qui nous rend justes. C’est la foi en une promesse spécifique. La justice, dit l’Apôtre, nous est imputée, « si nous croyons en Celui qui a ressuscité Jésus notre Seigneur d’entre les morts ». (Rom. iv. 24.) Ou, comme il l’exprime dans Romains x. 9 : « Si tu confesses de ta bouche le Seigneur Jésus, et si tu crois dans ton cœur que Dieu l’a ressuscité d’entre les morts, tu seras sauvé. » La promesse à laquelle Abraham a cru, c’est la promesse à laquelle nous croyons (Gal., III, 14) ; Et le rapport de la foi à la justification, dans son cas, est précisément ce qu’il est dans le nôtre. Lui et nous sommes justifiés simplement parce que nous faisons confiance au Messie pour notre salut. C’est pourquoi, comme le dit l’Apôtre, les Écritures sont pleines d’actions de grâces à Dieu pour le pardon gratuit, pour la justification gratuite, pour l’imputation de la justice à ceux qui n’ont pas de justice par eux-mêmes. Cette méthode de justification, continue-t-il, est adaptée à toute l’humanité. Dieu n’est pas seulement le Dieu des Juifs, mais aussi celui des païens. Elle assure la paix et la réconciliation avec Dieu. (Rom. v. 1-3.) Elle rend le salut certain, car si nous sommes sauvés non par ce que nous sommes en nous-mêmes, mais par ce que Christ a fait pour nous, nous pouvons être sûrs que si nous sommes sauvés. sont « justifiés par son sang, nous serons sauvés de la colère par lui ». (Rom. v. 9.) Cette méthode de justification, il le montre encore, et cela seul, assure la sanctification, c’est-à-dire la sainteté du cœur et de la vie. Il n’y a que ceux qui sont réconciliés avec Dieu par la mort de son Fils qui sont « sauvés par sa vie ». (v. 10.) Cette idée, il la développe et la justifie dans les sixième et septième chapitres de cette épître.
Le parallèle entre Adam et Christ.
3. Non content de cette affirmation claire et formelle de la vérité que les pécheurs ne peuvent être justifiés que par l’imputation d’une justice qui n’est pas la leur, et que la justice ainsi imputée est la justice (active et passive si l’on insiste sur cette distinction) du Seigneur Jésus-Christ, il poursuit en illustrant cette doctrine en établissant un parallèle entre Adam et Christ. Le premier, dit-il, était un type du second. Il y a une analogie entre notre relation avec Adam et notre relation avec Christ. Nous sommes tellement unis à Adam que sa première transgression a été le fondement de la sentence de condamnation prononcée contre toute l’humanité, et à cause de cette condamnation, nous tirons de lui une nature corrompue, de sorte que toute l’humanité, descendant de lui par génération ordinaire, vient dans le monde dans un état de mort spirituelle. De la même manière, nous sommes tellement unis à Christ, quand nous croyons que son obéissance est le fondement sur lequel une sentence de justification passe sur tous ceux qui sont ainsi en lui, et qu’en conséquence de cette sentence ils tirent de lui un principe nouveau, saint, divin et impérissable de vie spirituelle. Ces vérités sont exprimées en termes explicites. « Le jugement a été rendu par un (infraction) à la condamnation, mais le don gratuit est de nombreuses offenses à la justification. (Rom. v. 16.) « C’est pourquoi, comme par l’offense d’un seul jugement sont venus sur tous les hommes à la condamnation ; De même, par la justice d’un seul, le don gratuit est venu sur tous les hommes pour la justification de la vie. Car, de même que par la désobéissance d’un seul beaucoup ont été rendus pécheurs, de même par l’obéissance d’un seul beaucoup seront rendus justes. (v. 18, 19.) Ces deux grandes vérités, à savoir l’imputation du péché d’Adam et l’imputation de la justice de Christ, se sont gravées dans la conscience de l’Église universelle. Ils ont été vilipendés, déformés et dénoncés par les théologiens, mais ils ont tenu bon dans la foi du peuple de Dieu, tout comme les vérités premières de la raison ont toujours conservé le contrôle sur la masse des hommes, en dépit de toutes les spéculations des philosophes. Il ne s’agit pas de dire que les vérités qui viennent d’être mentionnées ont toujours été exprimés dans les termes qui viennent d’être donnés ; mais les vérités elles-mêmes ont été et sont encore tenues par le peuple de Dieu, où qu’elles se trouvent, chez les Grecs, les Latins ou les Protestants. Le fait que la race est tombée en Adam ; que les maux qui nous arrivent à cause de sa transgression sont pénaux ; et que les hommes naissent dans un état de péché et de condamnation, sont des faits remarquables de l’Écriture et de l’expérience, et sont avoués chaque fois que le sacrement du baptême est administré à un enfant. Non moins universelle est la conviction de l’autre grande vérité. Elle est impliquée dans tout acte de foi salvatrice, qui inclut la confiance en ce que Christ a fait pour nous comme fondement de notre acceptation avec Dieu, par opposition à tout ce que nous faisons ou ce qui a fait en nous. Comme preuve unique de l’emprise de cette conviction sur la conscience chrétienne, on peut se référer à l’ancienne direction de la visite des malades, attribuée à Anselme, mais dont la paternité est douteuse : « Crois-tu que tu ne puisses être sauvé que par la mort du Christ ? Le malade répond : Oui. Qu’on lui dise donc : Va donc, et tant que ton âme demeure en toi, mets toute ta confiance en cette seule mort, ne mets ta confiance en rien d’autre, confie-toi tout entier à cette mort, couvre-toi tout entier de cette seule mort, rejette-toi tout entier sur cette mort, enveloppe-toi tout entier dans cette mort. Et si Dieu te jugeait, dis, Seigneur, je mets la mort de notre Seigneur Jésus-Christ entre moi et ton jugement ; sinon, je ne disputerai pas, et je n’entrerai pas en jugement avec toi. Et s’il te dit que tu es pécheur, dis : Je mets la mort de notre Seigneur Jésus-Christ entre moi et mes péchés. S’il te dit que tu as mérité la damnation, dis : Seigneur, je mets la mort de notre Seigneur Jésus-Christ entre toi et tous mes péchés ; et j’offre ses mérites pour les miens, que j’aurais dû avoir, et que je n’ai pas. S’il dit qu’il est irrité contre toi, dis : Seigneur, je mets la mort de notre Seigneur Jésus-Christ entre moi et ta colère.» 1
1 Voir « Les Considérations générales », préfixé par Owen à son ouvrage sur la Justification.
Telle étant le véritable et unique base de l’espérance d’un pécheur envers Dieu, il est de la dernière importance qu’elle ne soit pas seulement tenue par le peuple, mais qu’elle soit aussi clairement présentée et maintenue par le clergé. Ce n’est pas ce que nous faisons ou sommes, mais seulement ce que Christ est et a fait qui peut nous servir de justification devant la barre de Dieu.
D’autres passages enseignent la même doctrine.
4. Cette doctrine de l’imputation de la justice de Christ ; ou, en d’autres termes, que sa justice est le fondement judiciaire de la justification du croyant, n’est pas seulement formellement et argumentativement présentée comme dans les passages cités, mais elle est constamment affirmées ou sous-entendues dans la parole de Dieu. L’apôtre soutient, dans le quatrième chapitre de son épître aux Romains, que toute affirmation ou promesse de pardon gratuit des péchés que l’on trouve dans les Écritures implique cette doctrine. Il part du principe que Dieu est juste ; qu’il exige la justice de ceux qu’il justifie. S’ils n’ont pas de justice propre, il faut leur en imputer une pour de justes raisons. Si donc il pardonne le péché, il faut que le péché soit couvert, que la justice soit satisfaite. « David aussi, dit-il, décrit la béatitude de l’homme, à qui Dieu impute la justice sans les œuvres ; en disant : Heureux ceux dont les iniquités sont pardonnées, et dont les péchés sont couverts ! Heureux l’homme à qui le Seigneur n’imputera pas le péché. (Rom. iv. 6-8.) Ne pas imputer le péché implique l’imputation de la justice.
Dans Romains v. 9, il est dit que nous sommes justifiés par son sang. Dans Romains iii. 25, il est dit que Dieu l’a mis en avant comme propitiation pour le péché, afin qu’il soit juste en justifiant les impies. Justifier ne veut pas dire pardonner, mais judiciairement pour prononcer juste, ce passage affirme clairement que l’œuvre de Christ est le fondement sur lequel la sentence de justification est prononcée. Dans Romains, x. 3, 4, il dit des Juifs : « Ceux qui ignoraient la justice de Dieu, et qui allaient çà et là pour établir leur propre justice, ne se sont pas soumis à la justice de Dieu. Car Christ est la fin de la loi pour la justice à tous ceux qui croient. On ne peut guère douter que le mot (δ«καωσΰη/) justice doive avoir le même sens dans les deux membres du premier de ces versets. Si la « justice propre » d’un homme est ce qui le rendrait juste, alors « la justice de Dieu », à cet égard, doit être une justice justificatrice. On l’appelle la justice de Dieu, parce que, comme nous l’avons déjà dit, il en est l’auteur. C’est la justice de Christ. Elle est fournie, offerte et acceptée par Dieu. Voici donc deux justices ; l’un humain, l’autre divin ; l’un sans valeur, l’autre infiniment méritoire. La folie des Juifs, et de milliers d’autres depuis leur époque, consiste à refuser les seconds et à se confier aux premiers. Cette folie, l’apôtre la met en évidence dans le quatrième verset. Les Juifs ont agi en supposant que la loi en tant qu’alliance, c’est-à-dire en tant que prescrivant les conditions du salut, était toujours en vigueur, que les hommes étaient toujours tenus de satisfaire à ses exigences par leur obéissance personnelle afin d’être sauvés, alors que Christ avait mis fin à la loi. Il l’avait abolie comme une alliance, afin que les hommes puissent être justifiés par la foi. Christ, cependant, lias a ainsi mis fin à la loi, non seulement en la mettant de côté, mais en satisfaisant à ses exigences. Il nous délivre de sa malédiction, non pas par un simple pardon, mais en devenant une malédiction pour nous. (Gal. iii. 13.) Il nous rachète de la loi en étant fait sous elle (Gal. iv. 4, 5), et en accomplissant toute justice.
Dans Philippiens iii. 8, 9, dit l’Apôtre, il « a souffert la perte de toutes choses », afin d’être trouvé en Christ, n’ayant pas sa propre justice, qui est de la loi, mais celle qui est par la foi de Christ, la justice qui est de Dieu par la foi. Ici encore, la justice de chacun est opposée à celle qui est de Dieu. Le mot doit avoir le même sens dans les deux membres. Ce à quoi Paul se confiait n’était pas le sien la justice, non pas sa propre bonté subjective, mais une justice qui lui est donnée et reçue par la foi. De Wette (aucun augustinien) sur ce passage dit, la justice de Dieu signifie ici « une justice reçue de Dieu (gracieusement imputée) à condition de foi » (« die von Gott empfangene (aus Gnaden zugerechnete) Gerechtigkeit nm des Glaubenswillen. »)
L’Apôtre dit (1 Cor., I, 30) : « Christ de Dieu est fait pour la sagesse, la justice, la sanctification et la rédemption. Dans cette énumération, la sanctification et la justice sont distinguées. L’un nous rend saints ; l’autre nous rend justes, c’est-à-dire qu’elle satisfait aux exigences de la justice. De même que Christ est pour nous la source de la vie spirituelle intérieure, de même il est le dispensateur de cette justice qui assure notre justification. La justification n’est pas référée à la sanctification comme sa cause et son fondement immédiats. Au contraire, le don de la justice précède celui de la sanctification. Nous sommes justifiés afin d’être sanctifiés. Ce qu’il faut retenir ici, cependant, c’est que la justice se distingue de tout ce qui en nous peut nous recommander à la faveur de Dieu. Nous sommes acceptés, justifiés et sauvés, non pas pour ce que nous sommes, mais pour ce que le mensonge a fait en notre faveur. Dieu « l’a fait péché pour nous, qui n’avons pas connu le péché ; afin que nous devenions justice de Dieu en lui. (2 Corinthiens v. 21.) Comme le Christ n’a pas été fait péché au sens moral du terme ; Nous ne sommes donc pas (dans la justification) rendus justice dans un sens moral. De même qu’il a été fait péché en ce qu’il a « porté nos péchés », de même nous sommes rendus justice en ce que nous portons sa justice. Nos péchés ont été le fondement judiciaire de son humiliation devant la loi et de toutes ses souffrances ; Sa justice est donc le fondement judiciaire de notre justification. En d’autres termes, comme nos péchés Lui ont été imputés ; ainsi sa justice nous est imputée. Si l’imputation du péché ne l’a pas rendu moralement corrompu ; L’imputation de la justice ne nous rend pas saints ou moralement bons.
Argument tiré des Enseignements généraux de la Bible.
5. Il n’est pas nécessaire de s’attarder sur des passages particuliers à l’appui d’une doctrine qui imprègne toute l’Écriture. La question est : Quel est le fondement du pardon des péchés et de l’acceptation du croyant comme juste (dans le sens médico-légal ou judiciaire du mot), aux yeux de Dieu ? Est-ce quelque chose que nous faisons, quelque chose que nous expérimentons, ou qui s’opère en nous ? ou est-ce ce que le Christ a fait pour nous ? Toute la révélation de Dieu concernant la méthode du salut montre que c’est la seconde et non la première. En premier lieu, cela ressort clairement de ce que les Écritures enseignent de l’alliance de rédemption entre le Père et le Fils. On ne peut nier l’existence d’une telle alliance si l’on s’accorde une fois sur le sens de ces mots. Il est clair, d’après les Écritures, que Christ est venu dans le monde pour accomplir une certaine œuvre, à une certaine condition. La promesse qui lui avait été faite était qu’une multitude qu’aucun homme ne peut compter, de la race déchue de l’homme, serait sauvée. Cela incluait la promesse qu’ils seraient justifiés, sanctifiés et rendus participants de la vie éternelle. La nature même de cette opération implique l’idée de substitution par procuration. Il suppose que ce qu’il devait faire devait être le fondement de la justification, de la sanctification et du salut de son peuple.
En second lieu, cela est impliqué dans la nature de l’œuvre qu’Il est venu accomplir. Il devait assumer notre nature, naître d’une femme, prendre part à la chair et au sang avec toutes leurs infirmités, mais sans péché. Il devait prendre sa place parmi les pécheurs ; qu’ils soient soumis à la loi à laquelle ils sont tenus d’obéir, et qu’ils endurent la malédiction qu’ils ont encourue. S’il en est ainsi, alors ce qu’il a fait est le fondement de notre salut du début à la fin ; de notre pardon, de notre réconciliation avec Dieu, de l’acceptation de nos personnes, du séjour de l’Esprit, de notre transformation à son image et de notre admission au ciel. « Ce n’est pas à nous, Seigneur, ce n’est pas à nous, mais à ton nom que donne gloire », a donc été le langage spontané de chaque croyant depuis le commencement jusqu’à présent.
En troisième lieu, la manière dont Christ devait accomplir l’œuvre assignée telle qu’elle était décrite dans les prophètes, et la manière dont elle a été effectivement accomplie telle qu’elle a été décrite par lui-même et par ses apôtres, prouvent que ce qu’il a fait et souffert est le fondement de notre salut. Il dit qu’il est venu « donner sa vie en rançon pour beaucoup ». (Matt. XX. 28.) « Il n’y a qu’un seul Dieu, dit l’Apôtre, et un seul médiateur entre Dieu et les hommes, l’homme Jésus-Christ, qui s’est donné lui-même en rançon pour tous. » (1 Tim. ii. 5, G.) La délivrance opérée par une rançon n’a aucune référence au caractère ou à la conduite des rachetés. Ses effets sont dus exclusivement à la rançon payée. C’est donc nier que Christ ait été une rançon, que nous soyons rachetés par son sang, que d’affirmer que le motif prochain de notre délivrance de la malédiction de la loi et de notre introduction dans la liberté des fils de Dieu, c’est tout ce qui a été opéré en nous ou fait par nous. Encore une fois, du débutà la fin de la Bible, le Christ est représenté comme un sacrifice. Depuis la première institution des sacrifices dans la famille d’Adam ; pendant la période patriarcale ; dans tout le rituel varié et coûteux de la loi mosaïque ; dans les prédictions des prophètes ; dans les déclarations didactiques claires du Nouveau Testament, il est enseigné avec une constance, une solennité et une amplitude qui prouvent que c’est un élément fondamental et vital du plan divin de la rédemption, que le Rédempteur devait sauver son peuple en s’offrant lui-même en sacrifice à Dieu en sa faveur. Il n’y a pas de caractéristique du plan du salut plus profondément gravée dans le cœur des chrétiens, qui détermine plus efficacement leur vie spirituelle intérieure, qui imprègne tant leurs prières et leurs louanges, ou qui soit aussi directement le fondement de leurs espérances, que la nature sacrificielle de la mort du Christ. Rayez de la Bible la doctrine de la rédemption par le sang du Christ, et que nous reste-t-il ? Mais si Christ nous sauve en sacrifice, alors c’est ce qu’Il fait pour nous, son œuvre objective, et rien de subjectif, rien en nous, qui est le fondement de notre salut, et de tout ce que le salut inclut. Car même notre sanctification est due à sa mort. Son sang purifie de tout péché. (1 Jean i. 7.) Il purifie de la culpabilité du péché par l’expiation ; et assure la sanctification intérieure en obtenant le don du Saint-Esprit.
Encore une fois, toute la Bible est pleine de l’idée de substitution.
Christ a pris notre place. Il s’est engagé à faire pour nous ce que nous ne pouvions pas faire pour nous-mêmes. Ceci est enseigné de toutes les manières possibles. Il a porté nos péchés. Il est mort pour nous et à notre place. Le mensonge a été fait en vertu de la loi pour nous. Il est devenu une malédiction pour nous. Il a été fait péché pour nous, afin que nous devenions justice de Dieu en Lui. Le châtiment de notre paix a été déposé sur Lui. Par conséquent, tout ce que la Bible enseigne de la méthode du salut est inconciliable avec la doctrine de la justification subjective sous toutes ses formes. Nous sommes toujours et partout référés à quelque chose en dehors de nous-mêmes comme le fondement de notre confiance en Dieu.
En quatrième lieu, les effets attribués à l’œuvre de Christ, comme nous l’avons déjà remarqué, sont tels qu’ils ne découlent de rien dans le croyant lui-même, mais doivent être rapportés à ce qui a été fait pour lui. Ces effets sont l’expiation du péché, la propitiation, le don et le séjour de l’Esprit vivifiant de Dieu ; la rédemption, ou la délivrance de toutes les formes de mal ; et un titre à la vie éternelle et à la participation effective à l’exaltation, à la gloire et à la béatitude du Fils de Dieu. Il est hors de question que ces effets merveilleux soient rapportés à ce que nous sommes personnellement ; à notre mérite, à notre sainteté, à notre participation à la vie du Christ. Quel que soit le sens que l’on puisse donner à ces derniers mots, ils se réfèrent à ce que nous sommes ou devenons personnellement. Sa vie en nous est après tout une forme de notre vie. C’est ce qui fait notre caractère. Et il est évident pour la conscience que notre caractère n’est pas et ne peut pas être le fondement de notre pardon, de l’amour particulier de Dieu, ou de notre gloire et de notre béatitude éternelles dans le ciel.
En cinquième lieu, la condition à laquelle notre participation aux bienfaits de la rédemption est suspendue est incompatible avec toute forme de doctrine de la justification subjective. On ne dit jamais de nous que nous sommes justifiés à cause de la foi, considérée soit comme un acte, soit comme un principe, soit comme un exercice, soit comme un état permanent de l’esprit. Il n’est jamais dit que la foi est le fondement de la justification. Nous ne sommes pas non plus sauvés par la foi en tant que source de sainteté ou de vie spirituelle dans l’âme, ni en tant qu’organe de réception de la vie infusée de Dieu. Nous sommes sauvés simplement par la foi, en recevant et en nous reposant sur Christ seul pour le salut. La chose reçue est quelque chose qui sort de nous-mêmes. C’est Christ, sa justice, son obéissance, le mérite de son sang ou de sa mort. Nous nous tournons vers Lui. Nous fuyons vers Lui. Nous nous accrochons à Lui. Nous nous cachons en Lui. Nous sommes revêtus de sa justice. Le romaniste dit en effet qu’un Éthiopien en robe blanche ne devient pas blanc. C’est vrai, mais une armure donne une sécurité contre l’épée ou la lance, et c’est ce dont nous avons besoin avant de nous occuper de l’état de notre teint. Nous avons besoin d’être protégés de la colère de Dieu en premier lieu. La transformation intérieure de l’âme à sa ressemblance est par d’autres moyens.
En sixième lieu et finalement, le fait que nous soyons sauvés par la grâce prouve que le fondement du salut n’est pas en nous-mêmes. La grâce de Dieu, son amour pour les méchants, pour les coupables et les souillés, est représentée dans la Bible comme la plus mystérieuse des perfections divines. C’était caché en Dieu. Il ne pouvait pas être découvert par la raison, il n’a pas non plus été révélé avant la rédemption de l’homme. L’objet spécifique du plan du salut est la manifestation de cet attribut le plus merveilleux, le plus attrayant et le plus glorieux de la nature divine. Tout ce qui se rapporte à notre salut, dit l’Apôtre, est destiné à la « louange de la gloire de sa grâce » (Eph. i. 6.) Dieu nous a vivifiés, dit-il, et nous a ressuscités, et nous a fait asseoir ensemble dans les lieux célestes en Jésus-Christ, afin « afin que, dans les siècles à venir, il puisse montrer l’extrême richesse de sa grâce, dans sa bonté envers nous, par Jésus-Christ ».
De par leur nature, la grâce et les œuvres sont antithétiques. L’un exclut l’autre. Ce qui est de la grâce n’est pas des œuvres. Et par œuvres de l’Écriture, en relation avec ce sujet, on entend non seulement des actes individuels, mais des états d’esprit, tout ce qui est intérieur et tout ce dont le caractère moral peut être attribué. Quand donc on dit que le salut vient de la grâce et non des œuvres, on dit par là qu’il n’est fondé sur rien dans le croyant lui-même. Ce n’était pas une quelconque excellence morale dans l’homme qui déterminait Dieu à s’interposer pour sa rédemption, tandis qu’il abandonnait les anges apostats à leur sort. C’était une question de grâce. Nier cela, et faire de la disposition d’un plan de salut pour l’homme une question de justice, est en contradiction si directe avec tout ce qui se trouve dans la Bible, qu’elle n’a presque jamais été ouvertement affirmée. Le don de son Fils pour la rédemption de l’homme est toujours représenté comme la manifestation la plus merveilleuse de l’amour immérité. Que quelques-uns des hommes, et non tous, soient réellement sauvés, est expressément déclaré comme n’étant pas une question d’œuvres, non pas à cause de quoi que ce soit qui distingue favorablement une classe de l’autre, mais une question de pure grâce. Lorsqu’un pécheur est pardonné et rétabli dans la faveur de Dieu, cela est encore déclaré de grâce. Si elle est de grâce, elle n’est fondée sur rien dans le pécheur lui-même. Or, comme les Écritures non seulement enseignent que le plan du salut est donc gratuit dans sa création, son exécution et son application, mais qu’elles insistent aussi sur cette caractéristique du plan comme étant d’une importance vitale, et vont même jusqu’à enseigner que si nous ne consentons pas à être sauvés par la grâce, nous ne pouvons pas être sauvés du tout, il s’ensuit nécessairement que la doctrine de la justification subjective est contraire à tout l’esprit de la Bible. Cette doctrine, sous toutes ses formes, enseigne que ce qui nous assure d’être acceptés par Dieu est quelque chose en nous-mêmes, quelque chose qui constitue le caractère. S’il en est ainsi, alors le salut n’est pas de la grâce ; et si ce n’est pas de la grâce, elle est inaccessible aux pécheurs.
§ 7. Les conséquences de l’imputation de la justice.
On dit souvent que la justification consiste dans le pardon des péchés et dans l’imputation de la justice. Ce mode d’énoncé est couramment adopté par les théologiens luthériens. Cette exposition de la doctrine est fondée sur la distinction nette faite dans la « Forme de la Concorde » entre l’obéissance passive et l’obéissance active du Christ. C’est à la première que se rapporte la rémission de la peine qui nous est due pour le péché ; à ces derniers notre titre à la vie éternelle. Les Écritures, cependant, ne font pas cette distinction aussi importante. Notre justification dans son ensemble se réfère tantôt au sang de Christ, tantôt à son obéissance. C’est compréhensible parce que le couronnement de son obéissance, et ce sans quoi tout le reste n’aurait servi à rien, a été de donner sa vie pour nous. Il est peut-être plus correct de dire que la justice de Christ, y compris tout ce qu’il a fait et souffert à notre place, est imputée au croyant comme le fondement de sa justification, et que les conséquences de cette imputation sont, premièrement, la rémission des péchés, et deuxièmement, l’acceptation du croyant comme juste. Et s’il est juste, alors il a le droit d’être considéré et traité comme tel.
Par la rémission du péché, les romanistes entendent l’élimination de la pollution du péché. De sorte que leur définition de la justification comme consistant dans la rémission du péché et l’infusion de la justice, n’est qu’une déclaration des aspects négatifs et positifs de la sanctification, c’est-à-dire se dépouiller du vieil homme et revêtir l’homme nouveau. L’effet de la rémission est constamment déclaré être que rien de la nature du péché ne reste dans l’âme. Le Concile de Trente dit : « Justificatio... non est sola peccatorum remissio, sed et sanctificatio, et renovatio interioris hominis per voluntariam susceptionem gratiæ et donorum..... Quanquam nemo possit esse justus, nisi cui mérita passionis Domini nostri Jesu Christi communicantur : id tamen in hac impii justificatione fit, dum ejusdem sanctissimæ passionis merito per Spiritum Sanctum caritas Dei diffunditur in cordibns eorum, qui justificantur, atque ipsis inhæret. « Quibus verbis justificationis impii descriptio insinuatur, ut sit translatio ab eo statu, in quo homo nascitur filius primi Adæ, in statum gratiæ et adoptionis filiorum Dei, per secundum Adam Jesum Christum, salvatorem nostrum : quæ quidem translatio post evangelium promulgatum sine lavacro regenerationis, ant ejns voto fieri non potest. » 1 Dans cette définition, on n’entend pas par « status gratiæ » un état de faveur, mais un état de grâce subjective ou de sainteté ; parce qu’en d’autres endroits, et le plus souvent, on dit que la justification consiste dans l’infusion de la grâce. Par conséquent, dans cette définition, le pardon des péchés au sens propre des mots n’est pas inclus. Bellarmin 2 dit cette traduction dans un état d’adoption en tant que fils de Dieu, « non potest .... fieri, nisi homo per remissionem peccati desinat esse impius ; et per infusionem justitiæ incipiat esse pins. Sed sicut aër cum illustratur a sole per idem lumen, quod recipit, desinit esse tenebrosus et incipit esse lucidus : sic etiam homo per eandem justitiam sibi a sole justitiæ donatam atque infusam desinit esse injustus, delente videlicet lumine gratiæ tenebras peccatorum. » La rémission des péchés est donc définie comme l’élimination des péchés. Bellarmin soutient à l’appui de ce point de vue que la culpabilité est supprimée par la sainteté, que la culpabilité est une relation ; la relation entre le péché et la justice. Quand la chose elle-même est enlevée, la relation elle-même cesse naturellement. 3 C’est pourquoi la rémission des péchés, même dans le sens du pardon, s’effectue par l’infusion de la justice, comme les ténèbres sont bannies par l’introduction de la lumière. C’est ainsi, comme nous l’avons fait remarquer plus haut, que la culpabilité est soit ignorée, soit réduite au minimum par la théorie romaine de la justification. Il n’y a vraiment pas de satisfaction de la justice dans cette affaire. Les mérites de Christ servent à assurer à l’homme le don du Saint-Esprit, par la puissance duquel l’âme est sanctifiée, telle qu’elle s’exerce dans le sacrement du baptême, et par l’introduction de la sainteté, tout ce qui est de la nature du péché est banni, et tout motif d’infliction de punition est supprimé. Un plan si contraire à l’Écriture, et si incompatible avec la conscience naturelle, ne peut pas être pratiquement adopté par la masse du peuple. La conviction est trop intime que le désert du châtiment n’est pas supprimé par la réforme, ni même par la régénération du pécheur, pour permettre à la conscience de se contenter d’un plan de salut qui ne prévoit pas l’expiation de la culpabilité du péché par ce qui satisfait réellement la justice de Dieu.
1 Sess. vi. cap. 7, 4 ; Streitwolf , Libri Symbolici, Göttingen, 1846, p. 24, 25, 22.
2 De Justificatione, τι. ii. ; Disputationes, édit. Paris, 1608, t. IV, p. 780, e, 781, a.
3 De amissione gratiæ et statu peccati, t. VII, ibid., p. 287, a, b.
C’est pourquoi, dans la Bible comme dans la vie courante, le pardon n’est pas une simple conséquence de la sanctification. C’est l’exemption de l’infliction de la peine méritée par la loi. Que cette exemption soit une simple question de caprice, ou de partialité indigne pour le délinquant, ou pour des considérations d’opportunité, ou sous l’impulsion de la compassion, ou pour satisfaire adéquatement aux exigences de la justice, cela ne fait aucune différence en ce qui concerne la nature du pardon. Il s’agit dans tous les cas de la remise d’une peine jugée méritée. C’est donc en ce sens que la justification est déclarée comme incluant le pardon des péchés, fondé sur l’imputation au pécheur croyant de la justice parfaite de Christ. C’est ce qui donne la paix au croyant. Il voit qu’il est délivré de « la colère et de la malédiction de Dieu » qui lui sont dues, non par un exercice arbitraire de l’autorité exécutive, mais parce que Dieu, en tant que juge juste, peut, en vertu de la propitiation de Christ, être juste et pourtant justifier les impies.
Les péchés qui sont pardonnés en justification comprennent tous les péchés, passés, présents et futurs. Il semble en effet que ce soit un solécisme que les péchés doivent être pardonnés avant d’être commis. Le pardon implique la remise de peine. Mais comment peut-on remettre une pénalité avant qu’elle ne soit encourue ? Ce n’est là qu’une difficulté apparente provenant de l’insuffisance du langage humain. La justice de Christ est un don perpétuel. C’est une robe qui cache, ou comme l’exprime la Bible, qui cache aux yeux de la justice les péchés du croyant. Ce sont des péchés ; ils méritent la colère et la malédiction de Dieu, mais la nécessité d’infliger cette malédiction n’existe plus. Le croyant ressent la nécessité constante de la confession et de la prière pour le pardon, mais le motif du pardon est toujours présent pour qu’il l’offre et le supplie. De sorte qu’il serait peut-être plus correct de dire qu’en justification le croyant reçoit la promesse que Dieu ne le traitera pas selon ses transgressions, plutôt que de dire que les péchés sont pardonnés avant d’être commis.
Ce sujet est ainsi présenté par l’Apôtre : les croyants « ne sont pas sous la loi, mais sous la grâce ». (Rom. vi. 14.) Ils ne sont pas soumis à un système juridique administré selon les principes de la justice rétributive, un système qui exige une obéissance parfaite comme condition d’acceptation de Dieu, et qui dit : « Maudit soit celui qui ne persévère pas dans toutes les choses qui sont écrites dans le livre de la loi pour les faire. » Ils sont sous la grâce, c’est-à-dire sous un système dans lequel les croyants ne sont pas traités selon les principes de la justice, mais selon les principes de la miséricorde imméritée, dans lequel Dieu ne leur impute pas « leurs offenses ». (2 Corinthiens v. 19.) Il n’y a donc pas de condamnation pour eux. Ils ne sont pas condamnés pour leurs péchés, non pas parce qu’ils ne sont pas des péchés et ne méritent pas d’être condamnés, mais parce que Christ a déjà expié leur faute et intercède continuellement pour eux.
La seconde conséquence attribuée à l’imputation de la justice de Christ est un titre à la vie éternelle. Chez les auteurs plus anciens, cela est souvent exprimé par les mots « adoption et héritage ». Ayant été faits enfants de Dieu par la foi en Jésus-Christ (Gal., III, 26), ils sont héritiers de Dieu et cohéritiers avec Jésus-Christ d’un héritage céleste. (Rom. viii. 17.) La simple expiation de la culpabilité ne confère aucun droit à la vie éternelle. La condition de l’alliance sous laquelle l’homme a été placé était l’obéissance parfaite. Cela, d’après tout ce qui apparaît dans l’Écriture, la perfection de Dieu l’exige. Comme il ne pardonne jamais les péchés, à moins que les exigences de la justice ne soient satisfait, de sorte qu’il n’accorde jamais la vie éternelle à moins qu’une obéissance parfaite ne soit rendue. Le ciel est toujours représenté comme un bien acheté. Dans l’alliance entre le Père et le Fils, le salut de son peuple a été promis comme récompense de son humiliation, de son obéissance et de sa mort. Après avoir accompli les conditions stipulées, il a droit à la récompense promise. Et cette revendication s’applique au bénéfice de son peuple. Mais en plus de cela, comme l’œuvre de Christ consistait à faire tout ce que la loi de Dieu, ou l’alliance des œuvres, exige pour le salut des hommes, et que cette justice est offerte gratuitement à tous ceux qui croient, tout tel croyant a un droit aussi valable à la vie éternelle qu’il l’aurait eu, Avait-il fait personnellement tout ce que la loi exige. Ainsi est large et ferme le fondement que Dieu a posé pour les espérances de son peuple. C’est le rocher des âges ; Jéhovah, notre justice.
§ 8. Relation de la foi à la justification.
Tous ceux qui professent être chrétiens admettent la doctrine de la justification par la foi. Il y a cependant des points de vue différents sur la relation entre la foi et la justification, comme nous l’avons déjà vu Laissé entendre.
1. Les pélagiens et les rationalistes enseignent que la foi en l’être et en la perfection de Dieu, ou dans les grands principes de la vérité morale et religieuse, est la source de cette excellence morale en raison de laquelle nous sommes acceptés de Dieu. Ce n’est peut-être qu’une autre façon d’exprimer la même idée, de dire que Dieu, dans le cas d’Abraham et, par conséquent, des autres hommes, accepte l’état d’esprit pieux impliqué dans l’exercice de la foi ou de la confiance en Dieu, au lieu d’une justice parfaite.
2. Les romanistes font de la foi un simple assentiment. Elle ne justifie pas en tant que vertu, ou en tant qu’appréhension de la justice offerte par Christ. Ce n’est ni la cause formelle ni la cause instrumentale de la justification, c’est seulement la cause prédisposante ou occasionnelle. Un homme acquiesce à la vérité du christianisme et à la vérité plus spéciale que l’Église est une institution divine pour sauver les hommes. Il vient donc à l’Église et reçoit le sacrement du baptême, par lequel, ex opere operato, une habitude de grâce, ou vie spirituelle, est infusée dans l’âme, qui est la cause formelle de la justification ; c’est-à-dire qu’elle rend l’âme intrinsèquement juste ou sainte. En ce sens, on peut dire que le pécheur est justifié par la foi. C’est la première justification. Une fois que l’homme est ainsi sanctifié ou régénéré, alors les exercices de la foi ont un mérite réel, et entrent dans le terrain de sa seconde justification, par laquelle il devient droit à la vie éternelle. Mais ici, la foi se situe au même niveau que les autres grâces chrétiennes. Ce n’est pas le seul, ni le plus important motif de justification. Elle est en cela inférieure à l’amour, d’où la foi tire toute sa vertu de grâce chrétienne. C’est alors « tides formata », c’est-à-dire la foi dont l’amour est l’essence, le principe qui lui donne son caractère.
D’après le schéma romain (1.) Dieu est la cause efficiente de la justification, car c’est par sa puissance ou sa grâce surnaturelle que l’âme est rendue juste. (2) Christ est la cause méritoire, car c’est pour lui que Dieu accorde cette grâce salvifique, ou l’influence de l’Esprit sur les enfants des hommes. (3) La justice inhérente est la cause formelle, puisque par là l’âme est rendue réellement juste ou sainte. (4) La foi est la cause occasionnelle et prédisposante, car elle conduit le pécheur à rechercher la justification (régénération) et dispose Dieu à accorder la bénédiction. Sous cet aspect, elle n’a que le mérite de la congruence, non celui de la condignité. (5) Le baptême est la cause instrumentale essentielle, car ce n’est que par le baptême que la justice inhérente est infusée ou que la justification est effectuée. Voilà pour la première justification. Après cette justification, qui rend le pécheur saint, alors, (6.) Les bonnes œuvres, tous les fruits et tous les exercices de la vie nouvelle, ont un mérite réel et constituent le fondement du droit du chrétien à la vie éternelle.
Le langage du Concile de Trente à ce sujet est le suivant : comme suit : « Hujus justificationis causæ sunt, finalis quidem, gloria Dei et Christi, ac vita æterna : efficiens vero, misericors Deus, qui gratuite abluit et sanctificat, signans et ungens Spiritu promissionis sancto, .... meritoria autem dilectissimus unigenitus suns, Dominus noster, Jesus Christus, qui, cum essemus inimici, propter nimiam caritatem, qua dilexit nos, sua sanctissima passione in ligno crucis nobis justificationem [c’est-à-dire régénération] meruit et pro nobis Deo Patri satisfecit : instrumentalis item, sacramentum baptism !, quod est sacramentum fidei, sine qua null ! unquam contigit justificatio : demain unica formalis causa est justifia Dei, non qua ipse justus est, sed qua nos justes facit : qua videlicet ab eo donati, renovamur spiritu mentis nostræ, et non modo reputamur, sed vere justi nominamur, et sumus, justitiam in nobis recipientes, unusquisque suam secundum mensuram, quam Spiritus Sanctus partitur singulis prout vult, et secundum propriam cujusque dispositionem et cooperationem. » On dit encore : « Quæ enim justifia nostra dicitur, quia per earn nobis inhærentem justificamur ; ilia eadem Dei est, quia a Deo nobis infunditur per Christi meritum.» 1 Tout cela se rapporte à la première justification, ou régénération, dans laquelle l’âme passe de la mort spirituelle à la vie spirituelle. De la seconde justification, qui donne un titre à la vie éternelle, Bellarmin dit :2 « Habet communis catholicormn omnium sententia, opera bona justorum vere, ac proprie esse merita, et mérita non cujuscunque præmii, sed ipsius vitæ æternæ. » Le trente-deuxième canon du Concile tridentin de cette sixième session anathématise quiconque enseigne une doctrine différente. « Si quis dixerit, hominis justificari bona opera ita esse dona Dei, ut non sint etiam bona ipsius justificari mérita ; aut ipsum justificatum bonis opçribus, quæ ab eo per Dei gratiam et Jesu Christi meritum, eujus vivum membrum est, fiunt, non vere mereri augmentum gratiæ, vitam æternam, et ipsius vitæ æternæ, si tamen in gratia deeesserit, consecutionem, atque etiam gloriæ augmenturn ; anathème, assieds-toi. Il résulte de tout cela que, d’après la doctrine de l’Église de Rome, la foi n’a aucun rapport spécial ou direct avec la justification, et que la « justification par la foi » dans cette Église signifie quelque chose d’entièrement différent de ce qui est par ces paroles dans la bouche des chrétiens évangéliques.
1 Sess. vi. cap. 7, 16 ; Streitwolf, Libri Symbolic'., Göttingen, 1846, vol. I. pp. 24, 25, 32·
2 De Justification?, v. 1; Disputationes, Paris, 1608, p. 949, a.
3. Selon les remontrants ou arminiens, la foi est le fondement de la justification. Sous l’Évangile, Dieu accepte notre obéissance imparfaite, y compris la foi, et en découlant, au lieu de l’obéissance parfaite exigée par la loi donnée à l’origine à Adam. Il y a un passage de la Bible, ou plutôt une forme d’expression, qui se rencontre en plusieurs endroits, qui semble favoriser cette conception du sujet. Dans Romains iv. 3, il est dit : « Abraham crut en Dieu, et cela lui fut compté pour justice ; » et encore au verset 11. 22 de ce chapitre, et dans Galates iii. 6. Si l’on interprète cette phrase selon l’analogie d’une telle passages comme Romains ii. 26 : « Son incirconcision ne sera-t-elle pas comptée pour la circoncision ? » Cela signifie que la foi est prise ou acceptée pour justice. La Bible, cependant, est la parole de Dieu et donc cohérente par elle-même. Par conséquent, si un passage admet une interprétation incompatible avec l’enseignement de la Bible en d’autres endroits, et une autre interprétation conforme à cet enseignement, nous sommes tenus d’accepter cette dernière. Cette règle, si simple et évidente qu’elle soit, est fréquemment violée, non seulement par ceux qui nient l’inspiration des Écritures, mais même par des hommes qui professent reconnaître leur autorité infaillible. Ils semblent considérer comme une preuve d’indépendance le fait de faire signifier à chaque passage simplement ce qu’indiquent sa structure grammaticale et sa connexion logique, sans tenir compte le moins du monde de l’analogie de l’Écriture. C’est déraisonnable. Dans Genèse xv. on nous dit qu’Abraham se lamenta devant l’Éternel de ce qu’il n’avait pas d’enfants, et que celui qui naîtrait dans sa maison serait son héritier. Et Dieu lui dit : « Ce ne sera pas là ton héritier ; mais celui qui sortira de tes entrailles sera ton héritier. Et il l’amena dehors, et dit : Regarde maintenant vers le ciel, et dis aux étoiles, si tu peux les compter. Et il lui dit : Ainsi sera-t-il de ta postérité. Et il croyait au SEIGNEUR ; et il le lui a compté pour justice. Si l’on prend ce passage en lui-même, on en déduit que l’objet de la foi d’Abraham était la promesse d’une nombreuse postérité. En supposant que cela soit vrai, ce qui n’est certainement pas le cas, quel droit a-t-on de supposer que la foi d’Abraham lui est imputée pour la justice, signifie autre chose que lorsqu’il est dit que le zèle de Phinées a été imputé à la justice (Ps. cvi. 31) ; ou dans Deutéronome xxiv. 13, il est dit que rendre le gage d’un pauvre « sera justice pour toi devant l’Éternel, ton Dieu ». Personne ne suppose qu’une manifestation de zèle, ou un acte de bienveillance, soit pris pour une obéissance complète à la loi. Tout ça l’expression « imputer pour la justice » signifie en elle-même, selon l’usage de l’Ancien Testament, est, estimer, comme juste, approuver. Le zèle de Phinées était juste. Rendre la promesse d’un pauvre homme était juste. C’étaient des actes que Dieu approuvait. Et c’est ainsi qu’Il a approuvé la foi d’Abraham. Il a gagné la faveur de Dieu en croyant. Or, bien que cela soit vrai, beaucoup plus, comme l’enseigne l’apôtre, est vrai. Il enseigne, premièrement, que la grande promesse faite à Abraham, et la foi en laquelle n’était pas que sa descendance naturelle fût aussi nombreuse que les étoiles du ciel, mais que toutes les nations de la terre fussent bénies dans sa postérité ; deuxièmement, que la postérité visée n’était pas une multitude, mais une seule personne, et que cette seule personne était Christ (Gal. III, 16) ; et, troisièmement, que la bénédiction que la postérité d’Abraham devait La rédemption était assurée pour le monde. « Christ nous a rachetés de la malédiction de la loi, étant devenu malédiction pour nous : ... que la bénédiction d’Abraham (« . e., la promesse faite à Abraham) pourrait venir sur nous. La promesse faite à Abraham était donc la rédemption par Christ. C’est pourquoi ceux qui sont à Christ, enseigne l’apôtre, sont la postérité d’Abraham et les héritiers de sa promesse. Ce qu’Abraham croyait donc, c’était que la postérité de la femme, le Silo, le Rédempteur promis du monde, devait naître de lui. Il croyait en Christ, comme son Sauveur, comme sa justice et son libérateur, et c’est pourquoi il a été accepté comme juste, non pas à cause du mérite de sa foi, et non pas sur le fondement de la foi, ou en prenant la foi au lieu de la justice, mais parce qu’il a reçu et s’est reposé sur Christ seul pour son salut.
À moins que ce ne soit là le sens de l’apôtre, il est difficile de voir comment il y a une cohérence ou une force dans ses arguments. Son but est de prouver que les hommes sont justifiés, non par les œuvres, mais gratuitement ; non pas pour ce qu’ils sont ou font, mais pour ce qui est fait pour eux. Ils sont sauvés par une rançon ; par un sacrifice. Mais il est absurde de dire que la confiance en une rançon rachète, ou qu’elle tient lieu de rançon ; ou que la foi en un sacrifice, et non le sacrifice lui-même, est le fondement de l’acceptation. Pour prouver que telle est la méthode de justification des Écritures, Paul fait appel au cas d’Abraham. Il n’a pas été justifié pour ses œuvres, mais par la foi en un Rédempteur. Il s’attendait à être justifié comme impie. (Rom. iv. 5.) C’est, nous dit-il, ce que nous devons faire. Nous n’avons pas de justice propre. Nous devons prendre Christ pour notre sagesse, notre justice, notre sanctification et notre rédemption. Dans le chapitre précédent, l’apôtre avait dit que nous sommes justifiés par la foi dans le sang de Christ, comme propitiation pour le péché ; et qu’il le prouve par le fait qu’Abraham était justifié à cause de son état d’esprit confiant et confiant, qui l’amenait à croire que, bien qu’il fût âgé de cent ans, il serait le père d’une nombreuse postérité, ce serait une contradiction.
D’ailleurs, il faut se rappeler, non seulement que les Écritures ne disent jamais que nous sommes justifiés « à cause » de la foi (διά ττιστιν), mais toujours « par » ou « par » la foi (δια ou εκ ττιιττεως, ou ττίστει ) ; mais aussi que ce n’est pas par la foi en tant que telle ; non par la foi en Dieu, ni par les Écritures ; et non par la foi en une promesse divine spécifique comme celle faite à Abraham d’une nombreuse postérité, ou de la possession du pays de Canaan ; mais seulement par la foi en une promesse particulière, à savoir celle du salut par le Christ. Ce n’est donc pas à cause de l’état d’esprit, dont la foi est la preuve, ni des bonnes œuvres qui en sont les fruits, mais seulement par la foi comme acte de confiance dans le Christ, que nous sommes justifiés. Cela suppose nécessairement que c’est Lui, et non notre foi, qui est le fondement de notre justification. C’est lui, et non notre foi, qui est le fondement de notre confiance. Comment un chrétien peut-il souhaiter qu’il en soit autrement ? Quelle comparaison y a-t-il entre la justice absolument parfaite et la justice infiniment méritoire de Christ, et notre propre obéissance évangélique imparfaite comme fondement de confiance et de paix !
Cette doctrine est d’ailleurs déshonorante pour l’Évangile. Elle suppose que l’Évangile est moins saint que la loi. La loi exigeait une obéissance parfaite ; l’Évangile se contente d’une obéissance imparfaite. Et combien notre meilleure obéissance est imparfaite et insuffisante, la conscience de chaque croyant le certifie. S’il ne nous satisfait pas, comment peut-il satisfaire Dieu ?
La grande objection, cependant, à cette doctrine des remontrants quant à la relation entre la foi et la justification, est qu’elle est en contradiction directe avec les enseignements clairs et omniprésents de l’Apocalypse de Dieu. La Bible enseigne que nous ne sommes pas justifiés par les œuvres. Cette doctrine affirme que nous sommes justifiés par les œuvres. La Bible enseigne que nous sommes justifiés par le sang de Christ ; que c’est pour son obéissance que la sentence de justification est prononcée contre les hommes. Cette doctrine affirme que Dieu nous déclare justes à cause de notre propre justice. La Bible, du début à la fin, enseigne que tout le fondement de notre salut ou de notre justification est objectif, ce que Christ, notre Rédempteur, notre rançon, notre sacrifice, notre sûreté, a fait pour nous. Cette doctrine nous enseigne à regarder à l’intérieur, à ce que nous sommes et à ce que nous faisons, comme fondement de notre acceptation avec Dieu. On peut dire sans risque de se tromper que cela est tout à fait insatisfaisant pour la conscience éveillée. Le pécheur ne peut compter sur rien en lui-même. Il regarde instinctivement vers le Christ, vers son œuvre accomplie pour nous comme le fondement de la confiance et de la paix. C’est en dernier ressort l’espoir de tous les croyants, quelle que soit leur théorie de la justification. Qu’ils soient papistes, remontrants ou augustins, ils jettent tous leurs derniers yeux sur le Christ. « De même qu’Alosès éleva le serpent dans le désert, de même le Fils de l’homme doit être élevé ; afin que quiconque croit en lui ne périsse point, mais qu’il ait la vie éternelle.
4. La doctrine commune des protestants à ce sujet est que la foi n’est que la cause instrumentale de la justification. C’est l’acte de recevoir et de se reposer sur Christ, et n’a pas d’autre rapport à la fin que tout autre acte par lequel un bien offert est accepté. C’est clairement la doctrine de l’Écriture, (1). Parce qu’on nous dit constamment que nous sommes justifiés par ou par la foi. (2) Parce que la foi qui justifie est décrite comme une attente, comme une réception, comme une venue, comme une fuite pour se réfugier, comme une prise et comme un appel. (3.) Parce que le fondement auquel notre justification est référée, et celui sur lequel la confiance du pécheur est placée, est déclaré être le sang, la mort, la justice, l’obéissance de Christ. (4) Parce que le fait que le Christ est une rançon, un sacrifice, et qu’en tant que tel opère notre salut, suppose nécessairement que la foi qui nous intéresse dans le mérite de son œuvre est un simple acte de confiance. (5) Parce que tout autre point de vue sur le cas est incompatible avec la nature gratuite de la justification, avec l’honneur de Christ, et avec la consolation et la confiance du croyant.
§ 9. Objections à la doctrine protestante de la justification.
On dit qu’il conduit à la licence.
1. La première objection, la plus évidente et la plus insistante, contre la doctrine de la justification gratuite par l’imputation de la justice de Christ, a déjà été examinée incidemment. Cette objection est que la doctrine conduit à la licence ; que si les bonnes œuvres ne sont pas nécessaires à la justification, elles ne sont pas nécessaires du tout ; que si Dieu accepte le chef des pécheurs aussi facilement que le plus moral des hommes, à la simple condition de la foi en Christ, quel profit y a-t-il à la circoncision ? dans le judaïsme ? d’être dans l’Église ? d’être bon sous quelque forme que ce soit ? Pourquoi ne pas vivre dans le péché afin que la grâce abonde ? Cette objection ayant été faite contre l’Apôtre, elle n’a pas besoin d’autre réponse que celle qu’il lui a donnée lui-même. Cette réponse se trouve dans les sixième et septième chapitres de son épître aux Romains, et est essentiellement la suivante :
Premièrement, l’objection comporte une contradiction. Parler du salut dans le péché est une aussi grande absurdité que de parler de la vie dans la mort. Le salut est la délivrance du péché. Comment donc les hommes peuvent-ils être délivrés du péché afin qu’ils puissent y vivre ? Ou, comme Paul l’exprime : « Comment vivrons-nous, nous qui sommes morts au péché, plus longtemps ? »
Deuxièmement, l’acte de foi même qui assure notre justification, assure aussi notre sanctification. Elle ne peut pas sécuriser l’un sans sécuriser aussi l’autre. Ce n’est pas seulement l’intention et le désir du croyant, mais c’est l’ordonnance de Dieu ; une caractéristique nécessaire du plan du salut, et assurée par sa nature. Nous prenons Christ comme notre Rédempteur du péché, de sa puissance aussi bien que de sa culpabilité. Et l’imputation de sa justice par la foi assure le séjour du Saint-Esprit aussi certainement, et pour les mêmes raisons (les stipulations de l’alliance), qu’elle assure le pardon de nos péchés. Et par conséquent, si nous participons à sa mort, nous participons à sa vie. Si nous mourons avec Lui, nous ressuscitons avec Lui. Si nous sommes justifiés, nous sommes sanctifiés. Celui donc qui vit dans le péché se proclame incroyant. Il n’a ni part ni lot dans la rédemption de Celui qui est venu sauver son peuple de ses péchés.
Troisièmement, notre condition, dit l’Apôtre, est analogue à celle d’un esclave, appartenant d’abord à un maître, puis à un autre. Tant qu’il appartenait à un homme, il n’était pas sous l’autorité d’un autre. Mais s’il est affranchi de l’un et fait l’esclave de l’autre, alors il tombe sous une influence qui contraint l’obéissance à ce dernier. Nous étions donc les esclaves du péché, mais maintenant, libérés de ce dur maître, nous sommes devenus les serviteurs de la justice. Il est donc tout aussi impossible pour un croyant de vivre dans le péché que pour l’esclave d’un homme d’être en même temps l’esclave d’un autre. Nous sommes en effet libres ; mais pas libre de pécher. Nous ne sommes libérés que de l’esclavage du diable et introduits dans la liberté pure, élevée et glorieuse des fils de Dieu.
Quatrièmement, l’objection telle qu’elle a été faite contre l’apôtre et telle qu’elle n’a cessé d’être répétée depuis, est poussée dans l’intérêt de la morale et du bon sens. La raison elle-même, dit-on, enseigne qu’un homme doit être bon avant d’être rétabli dans la faveur de Dieu ; Et si nous enseignons que le nombre et l’horreur des péchés d’un homme ne sont pas un obstacle à sa justification, et que ses bonnes œuvres ne sont pas une raison pour qu’il soit justifié plutôt que le chef des pécheurs, nous renversons les fondements mêmes de la moralité. C’est la sagesse des hommes. La sagesse de Dieu, telle qu’elle est révélée dans les Écritures, est très différente. Selon la Bible, la faveur de Dieu est la vie de l’âme. La lumière de son visage est aux créatures raisonnables ce que la lumière du soleil est à la terre, la source de tout ce qui est beau et bon. Par conséquent, tant qu’une âme est sous sa malédiction, il n’y a pas de relations vivifiantes ou vivifiantes entre elle et Dieu. Dans cet état, elle ne peut que « porter du fruit jusqu’à la mort », comme l’exprime l’Apôtre. Cependant, dès qu’il exerce la foi, il reçoit l’imputation de la justice de Christ, la justice de Dieu est par là satisfaite, et l’Esprit vient et s’installe dans le croyant comme la source de toute vie sainte. Il n’y aura donc pas de sainteté tant qu’il n’y aura pas de réconciliation avec Dieu, et il n’y aura de réconciliation avec Dieu que par la justice qui nous est imputée et reçue par la foi seule. Viennent ensuite le séjour de l’Esprit, la sanctification progressive et tous les fruits d’une vie sainte.
On peut dire que ce régime comporte une incohérence. Il ne peut y avoir de sainteté tant qu’il n’y a pas de réconciliation, et pas de réconciliation (en ce qui concerne les adultes) tant qu’il n’y a pas de foi. Mais la foi est un fruit de l’Esprit, et un acte de l’âme renouvelée. Ensuite, il y a et il doit y avoir, après tout, une action sainte avant qu’il y ait réconciliation. Il suffirait de dire, en réponse à cette objection, que l’ordre logique et la succession chronologique sont deux choses différentes ; ou qu’il ne faut pas confondre l’ordre de la nature et l’ordre du temps. Beaucoup de choses sont contemporaines ou co-instantanées qui se trouvent néanmoins dans une certaine relation logique, et même causale, les unes avec les autres. Christ a ordonné à l’homme au bras desséché d’étendre la main. Il obéit immédiatement, mais pas avant d’avoir reçu la force. Il appela Lazare pour qu’il sorte du tombeau ; Et il s’avança. Mais cela suppose une restauration de la vie. Ainsi Dieu ordonne au pécheur de croire en Christ ; et il le reçoit alors comme son Sauveur ; bien que cela suppose une puissance ou une grâce surnaturelle.
Mais Notre-Seigneur donne une autre réponse à cette objection. Il dit, comme il l’a rapporté dans Jean XVII. 9 : « Je ne prie pas pour le monde, mais pour ceux que tu m’as donnés ; car ils sont à toi. L’intercession du Christ assure à ceux qui lui sont donnés par le Père le renouvellement du Saint-Esprit. Le premier acte du cœur renouvelé, c’est la foi ; comme le premier acte d’un œil restauré est de voir. Que cela satisfasse ou non l’entendement, il reste clair comme la doctrine de la Bible que les bonnes œuvres sont les fruits et les conséquences de la réconciliation avec Dieu, par la foi en notre Seigneur Jésus-Christ.
Incompatible avec la grâce de l’Évangile.
2. On objecte que la doctrine protestante détruit la gratuité de la justification. Si la justice est satisfaite ; Si toutes les exigences de la loi sont satisfaites, il ne peut y avoir de grâce, dit-on, dans le salut du pécheur. Si un homme a une dette et que quelqu’un la paie pour lui, le créancier ne fait preuve d’aucune grâce en l’acquittant. Cette objection est familière, et la réponse l’est aussi. L’œuvre de Christ n’est pas de la nature d’une transaction commerciale. Elle n’est pas analogue à une satisfaction pécuniaire, sauf sur un point. Il assure la délivrance de ceux pour qui il est offert et par qui il est accepté. En cas de culpabilité, la demande de justice s’adresse à la personne de l’auteur de l’infraction. mentir, et lui seul est tenu de répondre à la barre de la justice. Nul ne peut prendre sa place, sans le consentement du représentant de la justice et du substitut, ainsi que du pécheur lui-même. Chez les hommes, la substitution dans le cas du crime et de sa peine est rarement, sinon jamais, admise, parce que personne n’a droit à sa propre vie ou à sa liberté ; il ne peut y renoncer à son gré ; et parce qu’aucun magistrat humain n’a le droit de soulager le délinquant ou d’infliger la peine légale à un autre. Mais le Christ avait le pouvoir, c’est-à-dire le droit (εξουσία') de donner sa vie et le pouvoir de la reprendre. Et Dieu, en tant que juge absolu et souverain, le Seigneur de la conscience et le propriétaire de toutes ses créatures, était en pleine liberté d’accepter un substitut aux pécheurs. Cela est prouvé au-delà de toute contradiction par ce que Dieu a réellement fait. Sous l’ancienne dispensation, tout sacrifice prescrit par la loi était un substitut pour celui en faveur duquel il était offert. Dans les termes les plus clairs, il a été prédit que le Messie serait le substitut de son peuple ; que le châtiment de leurs péchés devait être mis sur lui, et qu’il devait faire de son âme une offrande pour le péché. Il a été salué alors qu’il entrait dans son ministère comme l’Agneau de Dieu qui devait porter les péchés du monde. Il est mort juste pour les injustes. Il nous a rachetés de la malédiction de la loi en devenant une malédiction pour nous. C’est ce que l’on entend par être un substitut. Nier cela, c’est nier l’idée centrale de la doctrine biblique de la rédemption. L’expliquer, c’est absorber comme avec une éponge le sang vital de l’Évangile.
C’est la gloire, la puissance et la préciosité de la doctrine protestante que de faire du salut des pécheurs une affaire de grâce du commencement à la fin. De la part du Père éternel, c’est par grâce , c’est-à-dire par amour immérité, mystérieux et incommensurable, qu’il a fourni un substitut aux pécheurs, et qu’il n’a pas épargné son propre Fils, mais qu’il l’a donné gratuitement pour nous tous. C’était une question de grâce , c’est-à-dire d’amour pour les pécheurs, pour les impies, pour ses ennemis, que le Fils éternel de Dieu se soit fait homme, qu’il ait assumé le fardeau de nos péchés, qu’il ait accompli toute justice, qu’il ait obéi et qu’il ait souffert jusqu’à la mort, afin que nous ne périssions pas, mais que nous ayons la vie éternelle. C’est par la grâce que l’Esprit applique aux hommes la rédemption acquise par le Christ ; qu’il renouvelle le cœur ; qu’il vainc l’opposition des pécheurs, les rendant volontaires au jour de sa puissance ; qu’Il supporte avec toute leur ingratitude, leur désobéissance et leur résistance, et qu’Il ne les abandonne jamais jusqu’à ce que son œuvre soit consommée dans la gloire. En tout cela, le pécheur n’est pas traité selon son caractère et sa conduite. Il n’a droit à personne dans ce long catalogue de miséricordes. Pour lui, tout est une question de grâce imméritée. La grâce méritée, en effet, est un solécisme. Et c’est ainsi que le salut mérité est dans le cas des pécheurs.
La grâce ne cesse pas d’être grâce parce qu’elle n’est pas exercée en violation de l’ordre, de la bienséance et de la justice. Ce ne sont pas les faibles l’affection d’un parent affectueux. C’est l’amour d’un Dieu saint qui, pour révéler cet amour et manifester l’extrême gloire de cet attribut lorsqu’il est exercé envers les indignes, a fait ce qu’il fallait pour rendre son exercice conforme aux autres perfections de la nature divine. Il était indispensable que Dieu fût juste en justifiant les impies, mais il ne cesse pas pour autant d’être miséricordieux, puisque c’est lui qui a pourvu à la rançon par laquelle les objets de son amour sont rachetés de la malédiction de la loi et de la puissance du péché.
Dieu ne peut pas déclarer que l’injuste est juste.
3. Une autre objection permanente à la doctrine protestante a été si souvent rencontrée, que seule sa répétition constante justifie une répétition de la réponse. On dit qu’il est absurde qu’un homme soit juste avec la justice d’un autre ; que le fait que Dieu déclare injuste juste est une contradiction. Il s’agit d’un simple jeu de mots. Il s’agit cependant d’un jeu très sérieux ; car c’est caricaturer la vérité. Il est en effet certain que la qualité subjective et inhérente d’une personne ou d’une chose ne peut pas devenir par imputation la caractéristique inhérente d’une autre personne ou d’une autre chose. La cire ne peut pas durcir par l’imputation de la dureté d’une pierre ; et une brute ne peut pas non plus devenir rationnelle par l’imputation de l’intelligence d’un homme ; ni Les méchants deviennent bons par l’imputation de la bonté des autres hommes. Mais qu’est-ce que cela a à voir avec le fait qu’un homme assume la responsabilité d’un autre homme ? Si, parmi les hommes, le failli peut devenir solvable par le fait qu’un riche assume ses responsabilités, pourquoi les coupables ne deviennent-ils pas justes au tribunal de Dieu en assumant leurs responsabilités par le Fils de Dieu ? S’il a été fait péché pour nous, pourquoi ne pouvons-nous pas être faits justice de Dieu en lui ? L’objection suppose que le mot « juste » ou « juste » exprime à cet égard le caractère moral ; tandis que dans la Bible, lorsqu’il est utilisé en relation avec ce sujet, il est toujours utilisé dans un sens judiciaire, c’est-à-dire qu’il exprime la relation de la personne dont il est question avec la justice. Δίκαιος est l’antithèse de ύ-τόδ κος. L’homme à l’égard duquel la justice n’est pas satisfaite est ύη-όδικος, « coupable ». Celui à l’égard duquel la justice est satisfaite est δίκαιος, « juste ». Déclarer juste, ce n’est donc pas se déclarer saint ; et imputer la justice, ce n’est pas imputer la bonté ; mais simplement de considérer et de prononcer ceux qui reçoivent le don de la justice de Christ, exempts de condamné et droit à la vie éternelle à cause de lui. Certains théologiens philosophes semblent penser qu’il y a un antagonisme réel entre l’amour et la justice dans la nature divine, ou que ces attributs sont incompatibles ou inharmonieux. Il n’en est pas ainsi dans l’homme ; pourquoi donc en serait-il ainsi en Dieu ? La forme la plus élevée de l’excellence morale comprend ces attributs comme des éléments essentiels de sa perfection. Et les Écritures les représentent comme mystérieusement mêlées au salut de l’homme. L’Évangile est une révélation aux principautés et aux puissances célestes du ττολυττούαλος σοφία του Θεοί, parce qu’il y montre qu’il peut être juste tout en justifiant, aimant, sanctifiant et glorifiant le chef des pécheurs. Pour lequel tous les pécheurs devraient Lui rendre des actions de grâces et des louanges éternelles.
La Justice de Christ est due pour Lui-même.
4. Il était naturel que Socinus, qui regardait le Christ comme un simple homme, s’opposât à la doctrine de l’imputation de son justice pour le croyant, que Christ était dans la même obligation d’obéir à la loi et de prendre sa part de souffrance humaine que les autres hommes, et que, par conséquent, sa justice étant due pour lui-même, ne pouvait être imputée à d’autres. Cette objection est soutenue par certains qui admettent la divinité du Christ. Ce faisant, cependant, ils adoptent virtuellement la vision nestorienne, ou dualiste, de la personne du Christ. Ils raisonnent en supposant qu’il était une personne humaine, et qu’il se tenait, en vertu de son hypothèse de notre nature, dans le même rapport à la loi que les autres hommes. Il est cependant admis que le Fils, qui s’est incarné, a été de toute éternité la seconde personne de la Divinité. Si, par conséquent, l’humanité, telle qu’il l’a supposée, était une personne, alors nous avons deux personnes, — deux Christs, — l’un humain, l’autre divin. Mais si Christ n’est qu’une seule personne, et si cette personne est le Fils éternel de Dieu, le même en substance, et égal en puissance et en gloire au Père, alors tout le fondement de l’objection a disparu. Christ n’a eu d’autre rapport à la loi, si ce n’est dans la mesure où il l’a volontairement assumé, que celui que Dieu lui-même soutient. Mais Dieu n’est pas sous la loi. Il est lui-même la loi primordiale, immuable et infiniment parfaite de toutes les créatures raisonnables. La soumission du Christ à la loi était donc aussi volontaire que sa soumission à la mort de la croix. De même qu’il n’est pas mort pour lui-même, il n’a pas non plus obéi pour lui-même. Dans les deux formes de son obéissance, il a agi pour nous, en tant que notre représentant et notre substitut, afin que, par sa justice, beaucoup puissent être rendus justes.
Quant à l’autre forme de cette objection, elle a le même fondement et admet la même réponse. On dit que l’obéissance et les souffrances du Christ, étant l’obéissance et les souffrances d’un simple homme, ou tout au plus de l’élément humain dans la constitution de sa personne, ne pouvaient avoir qu’une valeur humaine, et par conséquent seulement une valeur finie, et par conséquent ne pouvaient être une satisfaction adéquate pour les péchés du monde entier. Notre Seigneur dit à ses disciples : « Vous avez plus de valeur que beaucoup de moineaux. » Si donc, aux yeux de Dieu, l’homme a beaucoup plus de valeur que les créatures irrationnelles, pourquoi paraîtrait-on incroyable que le sang du Fils éternel de Dieu purifie de tout péché ? Ce qu’un homme fait de ses mains, l’homme le fait ; et ce que le Christ, par sa nature humaine, a fait, dans l’exécution de son œuvre de médiation, le Fils de Dieu l’a fait. C’est pourquoi les hommes qui parlaient sous l’impulsion du Saint-Esprit n’hésitaient pas à dire que le Seigneur de gloire avait été crucifié (1 Corinthiens, II, 8), et que Dieu avait racheté l’Église « par son propre sang ». (Actes xx.28)1 Si donc l’obéissance rendue et les souffrances endurées étaient celles d’une personne divine, nous ne pouvons que fermer la bouche et nous prosterner devant Dieu dans un émerveillement d’adoration, avec la pleine assurance que le mérite de cette obéissance et de ces souffrances doit être abondamment suffisant pour la justification de tout pécheur sur la terre. dans le passé, le présent ou l’avenir.
1 Le texte de ce passage est en effet contesté. Le texte commun a fleoi, « l’Église de Dieu », qui est conservé par Mill, Bengel, Knapp, Hahn et d’autres dans leurs éditions du Nouveau Testament. De nombreux mss. ont κύριοί καιθ^οί ; et d’autres, simplement κυριοΰ. Le fait que l’expression « l’Église de Dieu » apparaît onze fois dans le Nouveau Testament, alors que « l’Église du Seigneur » n’apparaît jamais, est invoqué comme une raison en faveur de cette dernière lecture, comme c’est le cas supposait que les transcripteurs seraient enclins à adopter une expression familière, plutôt qu’une expression sans exemple. Il y a peut-être une certaine force là-dedans. D’autre part, la présomption est que les écrivains sacrés adhèrent à leur propre « nsus loquendi ». Les paroles d’Actes xx. 28 sont les paroles de Paul, et comme il parle, au moins dans dix autres cas, de l’Église de Dieu et qu’il n’utilise pas une seule fois l’expression « Église du Seigneur », il est au plus haut degré improbable qu’il utilise cette expression ici. En outre, il est évident que les transcripteurs, les critiques et les hérétiques auraient une forte disposition à se débarrasser d’une expression telle que « le sang de Dieu ». Les critiques modernes n’hésitent pas à citer, comme l’une des raisons pour lesquelles ils rejettent le texte commun, que l’expression est « trop forte ». Le passage, cependant, bien que sacré, n’est pas essentiel. L’usage imprègne le Nouveau Testament de prédiquer de la personne de Christ ce qui est vrai de l’un ou l’autre élément, humain ou divin, de sa personnalité mystérieusement constituée. Dans Hébreux i. 3׳, il est dit que la personne qui soutient l’univers par la parole de sa puissance, a purifié nos péchés par lui-même, c’est-à-dire par le sacrifice de lui-même. Et en ii. 14, la personne que l’écrivain sacré avait présentée comme supérieure aux anges, comme Dieu, comme créateur du ciel et de la terre, comme éternelle et immuable, est dite être devenue participante de la chair et du sang, afin de détruire par la mort celui qui avait le pouvoir de la mort. Et dans Philippiens ii. 6, 9, celui qui était dans la forme de Dieu et qui pensait que ce n’était pas un vol d’être égal à Dieu, devint obéissant jusqu’à la mort, jusqu’à la mort de la croix. Néanmoins bien qu’Actes xx. 28 n’est pas essentiel pour prouver une doctrine, ceux qui croient qu’elle est telle qu’elle est lue dans le texte commun, comme faisant partie de la parole de Dieu, sont tenus de s’y tenir.
Les croyants continuent d’être coupables et passibles de châtiment.
5. On objecte quelquefois à la doctrine protestante à ce sujet, que les croyants ne se reconnaissent pas seulement comme justes exposés à la condamnation pour leurs manquements et leurs transgressions actuels, mais que les Écritures les représentent ainsi, et parlent constamment de Dieu comme punissant son peuple pour ses péchés. Comment concilier cela avec la doctrine qu’ils ne sont pas sous le coup d’une condamnation ? qu’à leur égard, la justice a été pleinement satisfaite, et que personne ne peut justement mettre quoi que ce soit à la charge des élus de Dieu.
Il faut l’admettre, ou plutôt il est pleinement reconnu, que tout croyant se sent indigne de la moindre des miséricordes de Dieu. Il sait que si Dieu devait le traiter selon son caractère et sa conduite, il serait inévitablement condamné. Ce sentiment de malheur ou de démérite est indélébile. C’est un jugement juste que le pécheur prononce et qu’il ne peut que porter sur lui-même. Mais le fondement de sa justification n’est pas en lui-même. Le croyant reconnaît qu’en lui-même il ne mérite rien d’autre que l’indignation et la colère, non seulement pour ce qu’il a été, mais pour ce qu’il est maintenant. C’est ce qu’il ressent quand il se regarde. Néanmoins, il sait qu’il n’y a pas de condamnation pour ceux qui sont en Jésus-Christ ; que le Christ a assumé la responsabilité de répondre de lui à la barre de Dieu ; qu’il plaide constamment sa propre justice parfaite, comme une raison pour laquelle La peine méritée ne doit pas être infligée. Si le châtiment n’était pas mérité, le pardon ne serait pas gratuit ; et si elle n’était pas ressentie comme méritée, la délivrance ne pouvait pas être reçue comme une faveur. Le sentiment continu de désert, de la part du croyant, n’est en aucun cas incompatible avec la doctrine biblique selon laquelle les demandes de justice à son égard ont été satisfaites par son substitut et son avocat. Il y a une grande différence, comme on l’a souvent remarqué, entre le démérite et la culpabilité. Ce dernier est l’assujettissement à la peine de la loi. Le premier est un désert personnel indésirable. Un criminel qui a subi la peine légale de son crime n’est plus justement exposé à la punition pour cette infraction. Cependant, il ne pense pas mieux de lui-même qu’avant. Il sait qu’il ne peut plus être soumis à un châtiment ; mais son sens de démérite n’en est pas diminué. Et il en est de même pour le croyant ; il sait qu’à cause de ce que le Christ a fait pour lui, il ne peut pas être condamné à juste titre, mais il sent et admet qu’en lui-même il est aussi digne de l’enfer qu’il l’était dès le commencement. Le cœur du croyant résout beaucoup de difficultés que l’entendement spéculatif a du mal à démêler. Et cela n’a pas besoin de l’inquiéter outre mesure, si celui-ci n’est pas satisfait de la solution, à condition qu’il soit sûr d’être sous la conduite de l’Esprit par la parole.
Cette théorie ne concerne que l’extérieur.
6. Dans de nombreux cas, les théologiens modernes objectent à la doctrine protestante de la justification, qu’elle est extérieure ; ne concerne que les relations juridiques ; méconnaît la vraie nature de l’union mystique ; et représente Christ et sa justice comme purement objectifs, au lieu de considérer Christ comme se donnant Lui-même, sa vie pour devenir la vie du croyant, et avec sa vie transmettre ses mérites et sa puissance. Nous ne nous occupons pas ici de la théorie sur laquelle cette objection est fondée, mais simplement de l’objection elle-même. Ce qui est invoqué comme objection à la doctrine est vrai. Il s’agit de ce qui est extérieur et objectif ; ce qui est fait pour le pécheur plutôt que ce qui est fait en lui. Mais alors il faut considérer, premièrement, que c’est ce dont le pécheur a besoin. Il exige non seulement que sa nature soit renouvelée et qu’un nouveau principe de vie spirituelle ou divine lui soit communiqué ; mais aussi que sa culpabilité fût ôtée, que ses péchés fussent expiés et que la justice fût satisfaite, comme condition préliminaire pour qu’il jouisse de cette nouvelle vie et qu’il soit rétabli dans la faveur de Dieu. Et deuxièmement, que telle est la représentation constante de l’Écriture, notre seul guide digne de confiance en matière de doctrine religieuse. La Bible met tout aussi en évidence ce que Christ fait pour nous, que ce qu’Il fait en nous. Il en dit autant sur son travail objectif, expiatoire, que sur la communication d’une vie spirituelle supérieure aux croyants. Ce n’est qu’en ignorant cette œuvre objective du Christ, ou en fusionnant la justification dans la rénovation intérieure, que cette objection a de la force ou même de la vraisemblance. Les protestants ne déprécient pas la valeur et la nécessité de la vie nouvelle dérivée du Christ, parce que, dans l’obéissance aux Écritures, ils insistent si vigoureusement sur la satisfaction qu’il a rendue par sa parfaite justice à la justice de Dieu. Sans ce dernier, le premier est impossible.
§ 10. Écarts par rapport à la doctrine protestante.
Du vivant des réformateurs, une controverse très sérieuse commença dans l’Église luthérienne sur la nature de la justification. Cela provenait des vues d’Andreas Osiander, un homme d’une érudition distinguée et d’une tournure d’esprit spéculative ; éminent d’abord comme prédicateur, puis comme professeur à l’université de Königsberg. Son œuvre principale s’intitule " De Unieo Mediatore Jesu Christo et Justificatione Fidei. Confcssio Andrea· Osiandri. Sa divergence d’opinion avec les autres réformateurs est clairement indiquée dans les mots suivants, dans lesquels il dénonce les erreurs qu’il entend combattre : « Omueshorribilitcr errant. Primo, quia verbum justificare tantum pro justum reputare et pronunciare intelligunt, atque interpretantur, et non pro eo, quod est, reipsa et in veritate justum efficere. Deincle etiam in hoc, quod nullam differentiam tenent inter redemptionem et justificationem, quum tain en magna differentia sit, sicut vel inde intelligi sit, quod homines furem a suspendio redimere possunt, bomun et justum efficere non possunt. Porro etiam in hoc, quod nihil certe statuere possunt, quid tandem justifia Christi sit, quam per fidem in nobis esse, nobisque imputari oporteat. Ac postremo errant omnium rudissime etiam in hoc, quod divinam naturam Christi a justificatione séparant, et Christum dividunt atque solvunt, in quod hand dubie execrandi Satanæ opus est. » 1
1 Conf. Fidei, p. 42.
Osiander a enseigné, (1.) Que le Christ nous a rachetés par la satisfaction qu’il a rendue à la justice divine. (2.) Mais il a nié que cela ait fait partie de notre justification. (3.) Il soutenait que justifier ne signifie pas déclarer juste, ou rentier juste dans un sens judiciaire ou médico-légal, mais rendre intrinsèquement ou subjectivement juste et sainte. (4) Que la justice de Christ par laquelle le croyant est justifié, et qu’il reçoit par la foi, et qui lui est imputée dans le jugement de Dieu, n’est pas, comme l’enseignaient les protestants, l’œuvre de Christ, consistant dans ce qu’il a fait et souffert en tant que substitut des pécheurs, et ce n’est pas, comme l’enseignent les romanistes, l’œuvre du Saint-Esprit consistant dans l’infusion d’une nature sainte ou de nouvelles habitudes de grâce, mais c’est la « justice essentielle de Dieu », « l’essence divine », « Dieu lui-même ». (5.) Que, par conséquent, le fondement prochain et réel de notre acceptation auprès de Dieu, et de notre réception au ciel, est ce que nous sommes, ou ce que nous devenons, en vertu de cela l’intérieur de Dieu dans l’âme.
Les spéculations d’Osiander sur la nature de Dieu et sa relation avec l’homme auraient pu l’amener en toute circonstance à adopter les vues particulières exposées ci-dessus, mais la cause immédiate était sans aucun doute la réaction de l’importance trop exclusive donnée à cette époque à l’œuvre objective du Christ. Il n’y a pas lieu de s’en étonner, et peut-être n’était-il pas à blâmer. Les romanistes, avec lesquels les protestants avaient à lutter, ne niaient pas la nécessité d’un changement intérieur dans la nature de l’homme déchu. Mais ils ont fait de cela presque toute l’œuvre rédemptrice de Christ. Ce qu’il a fait car l’expiation du péché et la satisfaction des exigences de la justice n’étaient que pour ouvrir la voie à la grâce rénovatrice et sanctifiante de Dieu aux pécheurs. Les hommes devaient eux-mêmes mériter la vie éternelle. Il était donc inévitable que les réformateurs insistassent énergiquement sur ce que Christ a fait pour nous et qu’ils protestassent contre la confusion entre la justification et la sanctification. L’esprit d’Osiander le fit se révolter à ce sujet, et le porta complètement du côté des Romains, en ce qui concerne la nature de la justification. Il a dit que la doctrine protestante de la justification est « plus froide que la glace ». C’est comme si un homme payait la rançon d’un esclave turc et le laissait en esclavage, lui et ses enfants. Plus violente encore est sa dénonciation de la doctrine selon laquelle la justice du Christ, à laquelle nous participons par la foi, consiste dans son obéissance et ses souffrances. Quel bien peuvent-ils nous faire ? Le Christ a obéi et a souffert il y a des siècles ; nous ne pouvons pas nous approprier ce qu’Il a fait alors et le faire nôtre. Le fait de nous l’imputer ne change rien à l’affaire. Cela ne nous rend pas meilleurs. Des raisons spéculatives aussi bien que bibliques, cependant, empêchèrent Osiander d’accepter la solution romaine de la difficulté. Ce qu’il est dit que nous recevons, c’est « la justice de Christ », « la justice de Dieu », mais la grâce sanctifiante n’est jamais appelée la justice de Dieu. Si, par conséquent, cette justice par laquelle le croyant est constitué juste, n’est ni l’obéissance de Christ, ni la grâce infuse, que peut-elle être sinon la justice essentielle de Dieu, l’essence divine elle-même ? Calvin, qui, dans ses Institutes, combat avec ardeur la théorie d’Osiander, dit qu’il a inventé « monstrum neseio quod essentialis justitiæ ». Dilucide exprimit, se non ea justifia eontentum, quæ nobis obedientia et saerificio mortis Christi parta est, fingere nos substantialiter in Deo justos esse tarn essentia quam qualitate infusa..... Substantialem mixtionem ingerit, qua Deus se in nos transfundens, quasi partem sui faciat. Nam virtute Spiritus saneti fieri, ut eoalescamus cum Christo, nobisque sit caput et nos ejus membra, fere pro nihilo ducit, nisi ejus essentia nobis misceatur. » 1
1 Institutio, in. xi. 5, édit. Berlin, 1834, partie II. p. 8.
Mais quelle théorie de la nature de Dieu et de ses rapports avec l’homme Osiander soutenait-il, qui admettait cette doctrine de l’infusion de l’essence divine dans l’âme ? Ses vues sur ce point n’ont pas été clairement exposées, mais l’idée première qui sous-tend sa spéculation est la vieille doctrine de l’unicité de Dieu et de l’homme. L’homme est Dieu dans au moins une forme de son existence. Il soutenait que le Christ est l’image, le représentant, l’idéal réalisé de la Divinité, non pas en tant que Logos ou Fils, mais en tant qu’Homme-Dieu, le Théanthropos. Comme c’est de sa nature ou de la nature de Dieu que cette idée doit être réalisée, cette manifestation de Dieu dans sa véritable idée doit se produire, et c’est pourquoi l’incarnation aurait eu lieu si l’homme n’avait jamais péché. La chute d’Adam n’a fait que modifier les circonstances de l’incarnation, en déterminant qu’elle devait impliquer la souffrance et la mort. Mais l’incarnation elle-même, l’apparition de Dieu à la mode en tant qu’homme, est née d’une loi de la nature divine. Adam n’a pas été créé à l’image de Dieu en tant que tel, mais à l’image du Christ ; en quelque sorte, un Godman. L’affinité de cette théorie avec les spéculations panthéistes modernes est évidente. Baur a donc sans doute raison lorsqu’il dit, à la fin de sa notice apologétique sur la doctrine d’Osiander, que son idée de la relation entre le divin et l’humain « est celle qui a finalement trouvé son expression scientifique adéquate chez Schleiermacher et Hegel, que le Christ en tant que Rédempteur est la création parfaite de la nature humaine ; ou que la nature divine est la vérité de l’humanité, et que la nature humaine est la réalité, ou la forme d’existence (die Wirklichkeit) de la nature divine.» 1
1 Baur, La doctrine chrétienne de la réconciliation, 11. i. 1, Tübingen, 1833, p. 330, note.
Stancarus, contemporain et adversaire d’Osiander, est allé jusqu’à affirmer que la justice du Christ était l’œuvre exclusive de sa nature humaine. Cette doctrine a été cependant répudié par les romanistes aussi bien que par les protestants. Si c’est la nature humaine du Christ en tant que telle (et non la personne divine) qui a obéi, alors la nature humaine en Christ était une subsistance distincte, et ainsi l’unité de sa personne est détruite. D’ailleurs, si ce n’est pas une personne divine dans sa nature humaine qui a obéi et souffert, alors nous n’avons qu’un Sauveur humain, et une justice qui n’a pas plus de valeur qu’humaine. Nous savons par l’Écriture que c’est le Seigneur de gloire qui a été crucifié, le Fils de Dieu qui. naître d’une femme, a été fait sous la loi.
La première déviation notable de la doctrine protestante de la justification chez les réformés fut de la part de Piscator, dont la négation de l’imputation de l’obéissance active du Christ au croyant excita pendant quelques années beaucoup de discussions, mais elle disparut sans laisser de trace distincte dans la théologie de la Réforme. Baur, en effet, lui attribue plus d’importance, car il la considère comme le premier pas dans la chute de toute la doctrine de la satisfaction du Christ, dont il se réjouit. Piscator était originaire de Strasbourg, et membre de l’Église luthérienne, au service de laquelle il consacra ses premiers travaux ministériels et professionnels. Les autorités ecclésiastiques ayant appris que, dans son exposé de l’épître aux Philippiens, il niait l’ubiquité de la nature humaine du Christ et enseignait la doctrine de la prédestination, il fut privé de sa position dans l’Église luthérienne et passa aux réformés. Il fut bientôt nommé l’un des professeurs de la nouvelle institution d’Hébron fondée par le duc de Nassau. Il demeura en relation avec cette institution de 1584 jusqu’à sa mort en 1625, dans la soixante-dix-neuvième année de son âge. C’était un écrivain prolifique. En plus d’une nouvelle traduction de la Bible, il écrivit de nombreux commentaires sur les livres de l’Ancien et du Nouveau Testament, et mena de nombreuses controverses avec les luthériens et les romanistes, avant de se brouiller avec les théologiens de sa propre église. 1 Il a pris la raison que l'« imputatio justitiæ » et la « remissio peccatorum » sont identiques, la première ne signifiant rien de plus que celui-ci; et par conséquent que l’œuvre du Christ consiste simplement dans l’expiation du péché. Son obéissance active à la loi divine ne constitue pas une partie de la justice par laquelle le croyant est justifié devant Dieu. Il admet que le Christ a rendu une double obéissance, l’une à la loi de Dieu comme règle de devoir ; l’autre au commandement spécial qui lui a été donné en tant que médiateur. Il est venu pour accomplir une certaine œuvre ; de faire la volonté du Père, qui était de satisfaire le péché. C’est ce qui nous intéresse ; mais son obéissance à la loi morale était pour lui-même, et était la condition nécessaire de sa satisfaction. Il n’aurait pas pu faire l’expiation pour les autres s’il n’avait pas été lui-même saint. « Tribuitur morti,» dit-il,2 « quod ei tribuendum, nimirum, quod sit plenissima satisfactio pro pcccatis nostris ; sic etiam vitæ obedientiæ tribuitur, quod scriptura ei tribuendum perhibet, nimirum, quod sit causa, sine qua non potuerat Christus idoueus esse mediator inter Deum et hominem.» Bien que Piscator ait fait quelques efforts pour prouver exégétiquement que le pardon et la justification, la rémission des péchés et l’imputation de la justice, sont identiques, ses arguments contre la doctrine reçue, selon laquelle l’obéissance de Christ fait partie de notre justice justificatrice, ne sont pas bibliques. La question qui se posait à son esprit n’était pas simplement : Qu’enseignent les Écritures ? mais qu’est-ce qui est vrai, logique et symétrique ? Il voyait des objections à l’imputation de l’obéissance active du Christ, qui lui semblaient fatales, et sur la base de ces objections, il rejetait la doctrine. Ainsi, par exemple, il soutient que l’obéissance du Christ à la loi était due à lui-même en tant qu’homme, et qu’elle n’était donc pas imputable aux autres. Il argumente ainsi :1 « Qui Christum dicunt ubique ut hominem, Christum dicunt non hominem, dum enim dico ubique, dico Deum, qui solus , est in cœlo et in terra. Similiter cum dico subjectum legi, dico hominem. Qui ergo Christum subjectum legi negant, negant ipsum esse hominem. » Tout homme, en tant que tel, en tant qu’homme, est individuellement tenu d’obéir à la loi morale. Le Christ était un homme ; c’est pourquoi il était tenu d’obéir à la loi pour lui-même. Il n’a pas perçu, ou n’a pas voulu admettre, que le mot « homme » est pris dans des sens différents dans les différents membres de ce syllogisme, et par conséquent, la conclusion est viciée. Dans la première clause, « homme » signifie une personne humaine ; Dans le deuxième paragraphe, il s’agit de la nature humaine. Christ n’était pas une personne humaine, bien qu’il ait assumé la nature humaine. C’était un homme dans le sens où nous sommes poussière et cendres. Mais parce que nous sommes poussière, il ne s’ensuit pas que tout ce qui peut être prédit de la poussière, puisse être prédiqué de nous ; Par exemple, que nous n’avons pas de vie, pas de raison, pas d’immortalité. De même, bien que le Fils éternel de Dieu ait pris sur lui un vrai corps et une âme raisonnable, cependant, comme il était une personne divine, il ne s’ensuit pas que tout ce qui est vrai des personnes humaines doive être vrai de lui. Piscator soutient également que la loi lie soit à la punition, soit à l’obéissance, mais pas aux deux à la fois. Par conséquent, si l’obéissance de Christ nous est imputée, il n’était pas nécessaire qu’il meure pour nous. D’un autre côté, s’il est mort pour nous, il n’était pas nécessaire qu’il obéisse pour nous. Le principe que l’on suppose ici peut être vrai en ce qui concerne l’homme non déchu. Mais là où le péché a été commis, il faut l’expiation aussi bien que l’obéissance, et l’obéissance aussi bien que l’expiation, si l’on veut conférer la récompense d’une obéissance parfaite. Encore une fois, dit-il, si Christ a accompli la loi pour nous, nous ne sommes pas tenus de l’observer. C’est la vieille objection des Juifs ; Si nous sommes justifiés par la grâce, nous pouvons vivre dans le péché. Mais Christ n’a accompli la loi pour nous que comme une alliance d’œuvres. En ce sens, dit l’Apôtre, nous ne sommes pas sous la loi, mais il ne s’ensuit pas que nous soyons exempts de toute obligation morale qui découle de notre relation avec Dieu, en tant que créatures raisonnables. Il est peut-être vrai, comme le pense Baur, lui-même un sceptique complet dans le sens anglais et américain de ce mot, que cette innovation de Piscator a préparé la voie au rejet de toute la doctrine scripturaire de la satisfaction. Ce qu’il y a de certain, c’est que les luthériens et les réformés s’unirent à peine d’une voix dissidente pour condamner la doctrine de Piscator. Elle a été répudiée judiciairement par le Synode national de France à plusieurs reprises ; d’abord en 1603, de nouveau à La Rochelle en 1607, puis en 1612 et 1613. Les Églises suisses, dans la « Formule Consensus Helvetica », qui reçut l’autorité symbolique en Suisse, se prononcèrent clairement en faveur de l’ancienne doctrine. Cette question fut bientôt perdue de vue par suite de la montée de l’arminianisme d’une importance historique beaucoup plus grande.
1 Theses Theolog., t. III, locus 39 : « De causa meritoria justificationis hominis coram Deo, sive de ea re, quæ a Deo ad justitiam imputatur. »
2 Lisez. XXVI. à la p. 331.
1 Loc. xxvi. p. 334.
Jacobus Arminius, homme d’érudition, de talents, de réalisations attrayantes et d’un caractère exemplaire, naquit en Hollande en 1560 et mourut professeur à l’université de Leyde en 1609, après avoir occupé la chaire de théologie depuis 1603. Ses écarts par rapport aux doctrines réformées dans lesquelles il avait été éduqué étaient beaucoup moins graves que ceux de ses successeurs, bien qu’ils les impliquaient, semble-t-il, par une nécessité logique. Sa grande difficulté était avec la doctrine de la prédestination ou de la souveraineté de Dieu dans l’élection. Il ne pouvait cependant pas se débarrasser de cette doctrine sans nier l’incapacité totale de l’homme à faire ce qui est spirituellement bon. Il a donc enseigné que, bien que l’humanité soit tombée en Adam et qu’elle soit née dans un état de péché et de condamnation, et qu’elle soit par elle-même entièrement incapable de se détourner du péché vers la sainteté, elle est néanmoins capable de coopérer avec la grâce du Saint-Esprit donnée à tous les hommes, en particulier à tous ceux qui entendent l’Évangile, dans une mesure suffisante pour leur permettre de se repentir et de croire, et de Persévérez dans une vie sainte jusqu’à la fin. Mais qu’un homme se repente et croie ainsi, ou, ayant cru, persévère dans une vie sainte, cela dépend de lui-même et non de Dieu. Le but de l’élection n’est donc pas un but de sauver, et à cette fin de donner la foi et la repentance à un nombre défini d’individus, mais un but de sauver ceux qui se repentent, croient et persévèrent dans la foi jusqu’à la fin. L’œuvre de Christ a donc une référence égale pour tous les hommes. Il a donné pleine satisfaction à Dieu pour les péchés de tous et de tous les hommes, de sorte que Dieu peut maintenant offrir le salut à tous les hommes de manière cohérente aux conditions énoncées dans l’Évangile.
Il s’agit d’un schéma cohérent avec lui-même. Une partie implique, ou nécessite l’admission des autres. La déclaration ci-dessus comprend toutes les doctrines présentées par les disciples d’Arminius, après sa mort, aux autorités sous la forme d’une remontrance, comme justification de leurs vues. C’est pourquoi les arminiens étaient appelés remontrants. Le document que nous venons de mentionner contient les cinq points sur lesquels ses auteurs et leurs associés différaient de la foi réformée. La première a trait à la prédestination, qui est expliqué comme le but " illos in Christo, propter Christum et per Christum servare, qui Spiritus Sancti gratia, in eundeni ejus filinn ! credunt, et in ea, fideique obedientia, per eandem gratiam in finem persévérant : contra vero eos, qui non convertentur et infidèles, in peccato et iræ subjectos relinquere, et coude mnare, secundum illud Evang. Joann, iii. 36."
La seconde se rapporte à l’œuvre du Christ, à propos de laquelle il est dit : « Proiude Jesum Christum mundi servatorem pro omnibus et singulis mortuum esse, atqne ita quidem, ut omnibus per mortem Christi reeonciliationem et peccatorum remissionem impetravit : ea tamen conditione, ut nemo ilia remissione peccatorum re ipsa fruatur, præter hominem fidelem, et hoc quoque secundum Evang. Joann, iii. 16, et 1 Joann, ii. 2."
La troisième, à propos de la capacité du pécheur, déclare : « Hominem vero salutarem fidem a se ipso non habere, nec vi liberi sui arbitrii, quandoquidem in statu defectionis et peccati nihil boni, quandoquidem vere bonum est, quale quid est fides salutaris, ex se possit cogitarc, vel facere : sed necessarian ! esse eum a Deo in Christo per Spiritual Sanctum regigni et renovari mente, affectibus, sen vohmtate et omnibus facultatibus, ut aliquid boni possit intelligere, cogitarc, velle et perficere. Ev. Joann, xv. Aucun augustin, qu’il soit luthérien ou calviniste, ne peut en dire plus, ni désirer être dit davantage par d’autres.
Le quatrième article, concernant la grâce, en montre cependant le point de départ : « Hanc Dei gratiam esse initium, progressai !! ac perfectionem omnis boni, atqne id eo quidem usque ut ipse homo regenitus absque hac præcedentia, sea adventitia excitante, conseqnente et coopérante gratia, neque boni quid cogitare, velle, ant facere possit, neque etiam alii malæ tentatione resistere ; adeo quidem ut omnia bona opera, quæ excogitare possumus, Dei gratiæ in Christo tribuenda sint ; quod vero modum operationis illius gratiæ, ilia non irresistibilis ; de niultis cnim dicitur eos Spiritui Sancto resistere, Act. vii. 51 et alibi multis locis. » Il ne fallait pas s’attendre, dans un bref exposé des principes conçu pour la justification de ceux qui tiennent pour eux, en tant que membres d’une église réformée ou calviniste, que les termes douteux doivent être expliqués. Il est cependant incontestable et, croit-on, n’est pas contesté, que l’irrésistible est ici employé dans le sens de certainement efficace. Le Saint-Esprit opère dans le cœur de tous les hommes. Quelques-uns sont ainsi renouvelés et amenés à la foi et au repentir ; d’autres ne le sont pas. Cette différence, selon les remontrants, ne doit pas être rapportée à la nature de l’influence exercée, mais au fait que quelques-uns cèdent à cette grâce et coopèrent avec elle ; tandis que d’autres la rejettent et lui résistent.
Le cinquième article se réfère à la persévérance des saints, et est indéfini. Il admet que l’Esprit fournit une grâce abondamment suffisante pour permettre au croyant de persévérer dans la sainteté : « Sed an illi ipsi negligentia sua initium sui esse in Christo deserere non possint, et præsentem mundum iterum ampleeti, a sancta doctrina ipsis semel tradita deficere, conscientiæ naufragiunr facere, a gratia excidere ; penitus ex sacra Scriptura esset expenduni, antequam illud cum plena animi tranquillitate et πληροφορία docere possent. » Bien sûr, aucun homme qui croyait à la doctrine ne pouvait écrire ainsi, et ce mode d’expression douteux fut bientôt mis de côté, et « tomber en disgrâce », dans le sens commun de l’expression, fut admis comme une doctrine arminienne.
On remarquera que la doctrine de la justification n’est pas comprise dans les cinq points de la remontrance telle qu’elle a été présentée aux autorités de Hollande, et telle qu’elle a servi de base aux décisions du synode de Dort. L’aberration des arminiens, cependant, par rapport à la foi des Églises réformées, s’étendait à toutes les doctrines liées au plan du salut. Arminius lui-même, du moins, avait des vues bibliques beaucoup plus élevées et plus nombreuses sur le péché originel, l’incapacité et la nécessité de la grâce surnaturelle, que celles qui sont devenues depuis si répandues même parmi les églises réformées ou calvinistes elles-mêmes. En ce qui concerne la méthode du salut, en particulier en ce qui concerne la nature de l’œuvre du Christ et son application au croyant, ils s’en tinrent d’abord étroitement au langage des confessions réformées. Aussi n’hésitaient-ils pas à dire que le Christ satisfaisait pleinement les péchés des hommes ; qu’il était une rançon, un sacrifice, une propitiation ; qu’il a fait l’expiation pour le péché ; que sa justice ou son obéissance est le fondement de notre acceptation auprès de Dieu ; que la foi qui sauve n’est pas un simple assentiment à la vérité, ou une pieuse confiance en Dieu, mais spécifiquement la foi en Christ comme Sauveur des hommes ; et cette justification est un acte de Dieu déclarant le pécheur juste, ou dans lequel Il pardonne le péché et accepte le pécheur comme juste. Tout cela est satisfaisant pour l’oreille. Le langage, cependant, admet des interprétations différentes ; et il devint bientôt évident et avoué que les remontrants avaient l’intention de quelque chose de très différent de ce que l’Église réformée entendait exprimer par les mêmes termes.
1. Ils disaient que l’œuvre du Christ était une satisfaction pour la justice divine. Mais ils n’entendaient pas par satisfaction, non plus une « solutio », une valeur réelle rendue pour ce qui était dû ; ni même une « acceptio », prenant une chose pour une autre comme équivalent ; mais une « acceptilatio », une acceptation gracieuse comme une satisfaction de ce qui, dans sa nature même, n’était pas équivalent ; comme si Dieu acceptait la vie d’une brute pour celle d’un homme ; ou la foi pour une obéissance parfaite. Les remontrants n’entendaient pas non plus par justice l’attribut qui exige la juste distribution des récompenses et des châtiments, et qui rend nécessaire l’exécution de la peine de la loi en cas de transgression.
Sur ce dernier point (la nature de la justice), le langage de Grotius et de la grande masse des théologiens remontrants ou arminiens est parfaitement explicite. Grotius dit : « Pœnas infertre, aut a pœnis aliquem liberare, quern punire possis, quod jnstificare vocat Scriptlira, non est nisi rectoris, qua talis primo et per se : ut, puta, in familia patris ; dans republica régis, in universo Dei..... Unde sequitnr, omnino hie Deum considerandum, ut rectorem. » 1 De plus,2 « Ratio [cur 'rectori relaxare legem talem non liceat, nisi causa aliqua accedat, si non necessaria, certe sufficiens »].... Est, quod actus ferendi aut relaxandi legem non sit actus absolut ! dominii, sed actus imperii, qui tendere debeat ad boni ordinis conservationem. » 3 « Poena enim omnis propositum habet bonum commune. » « Prudentia quoque hoc nomine rectorem ad pœnam incitât. Angetur præterea causa puniendi, ubi lex aliqua publicata est, quæ pœnam minatnr. Nam tunc omissio pœnæ ferme aliquid detrahit de legis authoritate apud subditos. » 4
1 De Satisfactione Christi, cap. 2 ; IForl », edit. Londres, 1679, vol. iii. p. 306, b (19 à 24).
2 Ibid., cap. 5 ; p. 317, b (35-41).
3 bouchons. 2; p. 308, b (62, 63).
4 Idem. cap. 5 ; p. 316, b (9-13.)
Ici, tout est purement gouvernemental. Ce n’est pas la justice, dans le sens propre et ordinaire du mot, qui est satisfaite, mais l’Avisée de Dieu et sa considération bienveillante pour les intérêts de son gouvernement moral. Cela change tout. Si la justice de Dieu n’est pas satisfaite, la culpabilité n’est pas enlevée et le péché n’est pas expié. Et c’est pourquoi la conscience n’est pas apaisée ; L’autorité et l’honneur réels de la loi ne peuvent pas non plus être maintenus.
Quant à l’autre point, la nature de la satisfaction rendue ; Ce n’était pas un équivalent réel qui, par sa valeur intrinsèque, répondait aux obligations du pécheur, mais c’était quelque chose de gracieusement accepté comme tel. Bien que Grotius rejette l’utilisation du mot « accepter ! latio », et s’efforce de montrer qu’elle n’exprime pas son sens, néanmoins, bien qu’il répudie le mot, il en conserve l’idée. Il dit 1 : « Ea est pretii natura, ut sui valore aut æstimatione alteram moveat ad concedendam rem, aut jus aliquod, puta impunitatem. » Cela revient au principe de Duns Scot qu’une chose est utile (vaut ce qu’il plaît à Dieu de lui prendre. Bien que Grotius n’applique pas le principe jusqu’au bout à laquelle les scolastiques l’ont porté, et disent que Dieu aurait pu accepter la mort d’un homme comme une satisfaction pour les péchés du monde, ou le sang des taureaux ou des boucs comme une expiation réelle, néanmoins, il enseigne que Dieu a gracieusement accepté « aliquid pro aliquo », la mort de Christ pour la mort pour le monde entier, non pas parce qu’il s’agit d’un équivalent réel en lui-même, mais parce qu’en tant que dirigeant, ayant le droit de remettre le péché sans aucune satisfaction, il a vu que les intérêts de son gouvernement pouvaient ainsi être promus. Cette idée est encore plus clairement exprimée par Limborch :2 " In eo errant quam maxime, quod velint redemtionis pretium per omnia equivalens esse debere miseriæ illi, e qua redemtio fit : redemtionis pretium enim const !tui solet pro libera æstimatione illius, qui captivum detinet, non autem solvi pro captivi merito..... Ita pretium, quod Christus persolvit, juxta Dei Patris æstimationem persolutum est. »
1 De Satisfaction ?, cap. 8 ; JFor&s, édit. Londres, 1079, vol. iii. p. 328, b (12 à 14).
2 Theologia Christiana, in. xxi. 8, édit. Amsterdam, 1715, p. 262, a.
Selon Grotius, le Christ est mort en exemple, « exemplum pœnæ ». Toute l’efficacité de son travail résidait dans son impression morale sur l’univers. Ce n’était pas une expiation ou une satisfaction pour les péchés passés, mais un moyen de dissuader de commettre le péché à l’avenir. C’est là, comme le remarquent Baur3 et Strauss4, le point sur lequel coïncident la théorie de Grotius et celle de Socinus. L’un et l’autre rapportent l’efficacité de l’œuvre du Christ à l’impression morale qu’elle produit sur l’esprit des créatures intelligentes. Ils rapportent cette influence morale, en effet, à des causes différentes, mais l’impression morale c’est toute l’efficacité qu’il a. Bien que le mot satisfaction soit retenu par Grotius, l’idée qui lui est attachée par l’Église est rejetée. Les principaux théologiens remontrants ou arminiens, comme Episcopius, Curcellæus et Limborch, diffèrent de Grotius dans leur manière de présenter ce sujet. Au lieu de considérer l’œuvre de Christ comme un exemple de punition, destiné à dissuader la commission du péché, ils adhèrent au mode scripturaire de le considérer comme une rançon et un sacrifice. La différence, cependant, est plus dans la forme que dans la réalité. Ils admettent que le Christ nous rachète en se donnant lui-même en rançon pour beaucoup. Mais une rançon, comme dit Curcellæus, n’est pas un équivalent ; c’est tout ce que le détenteur du captif juge bon d’accepter. Il est admis aussi que le Christ s’est donné lui-même en sacrifice pour notre salut ; Mais on dit qu’un sacrifice n’est pas une satisfaction à la justice, mais simplement la condition à laquelle le pardon est accordé. Sous l’Ancien Testament, Dieu pardonnait le péché à l’occasion du sacrifice d’animaux irrationnels ; sous le Nouveau Testament, à l’occasion du sacrifice du Christ. « Sacrificia, » dit Limborch,1 «non sunt solutiones debitoruin, neque plenariæ pro peccatis satisfactiones ; sed illis peractis conceditur gratuita peccati remissio. » « Redemtionis pretium constitui solet pro libera æstimatione illius, qui captivum detinet. » Nous savons, cependant, par l’Écriture, qu’un sacrifice n’était pas simplement un antécédent arbitrairement désigné du pardon gratuit ; Il ne s’agissait pas simplement d’une reconnaissance de culpabilité. Nous savons aussi que le sang des taureaux et des boucs sous l’Ancien Testament ne pouvait pas ôter le péché ; elle ne servait qu’à la purification de la chair, ou à la rémission des peines cérémonielles. La seule efficacité des sacrifices de l’Ancien Testament, en ce qui concerne le péché commis contre Dieu, était sacramentelle ; c’est-à-dire qu’ils signifiaient, scellaient et appliquaient les bienfaits de la seule expiation réelle et efficace pour le péché, à ceux qui croyaient. De même que la victime portait symboliquement le châtiment dû à l’offenseur, de même le Fils éternel de Dieu a réellement porté nos péchés, est devenu réellement une malédiction pour nous, et a ainsi donné à Dieu une satisfaction vraie et parfaite pour nos offenses.
3 Die chrislliche Lehre von der Versohnung, 11. i. 4, Tübingen, 1838, p. 429.
4 Dogmatik, Tiibingen et Stuttgart, 1841, t. II, p. 315.
1 Theoloyia Chrisfiana, ni. xxi. 6, 8, ut supr.i, pp. 231, a, 232, a.
2. De même que les remontrants niaient que l’œuvre de Christ fût une satisfaction réelle pour le péché, ils niaient nécessairement toute justification réelle du pécheur. Chez eux, la justification n’est rien d’autre que le pardon. C’est ce qu’affirme Grotius dans le passage cité ci-dessus ; et même le révérend Richard Watson, dont l’excellent système de théologie, ou « Instituts théologiques », qui jouit à juste titre d’une grande réputation parmi les méthodistes wesleyens, non seulement définit sans cesse la justification comme le pardon, mais argumente la question de manière élaborée. « Le premier point, dit-il, que nous trouvons établi par le langage du Nouveau Testament, c’est que la justification, le pardon et la rémission des péchés, la non-imputation du péché et l’imputation de la justice, sont des termes et des expressions de la même importance. » 2 Il établit ensuite cette position.
2 n. xxiii ; édit. New York, 1832, p. 426.
Si donc le pardon et la justification sont des choses distinctes, l’une est l’acte exécutif d’un cavalier, l’autre un acte judiciaire ; l’un mettant de côté les exigences de la justice, l’autre une déclaration que la justice est satisfaite ; alors ceux qui réduisent la justification au simple pardon, nient la doctrine de la justification telle qu’elle est comprise et professé par les Églises luthérienne et réformée. Il n’est évidemment pas prévu que ces théologiens remontrants ou arminiens n’aient pas ce qu’ils appellent la justification ; et l’on ne nie pas qu’ils expriment quelquefois, du moins, leur doctrine dans le langage même des Symboles des Églises protestantes. Ainsi les remontrants 1 disent : « Justificatio est actio Dei, quam Deus pure in sua ipsins mente efficit, quia nihil aliud est, quam volitio aut decretum, quo peccata remittere, et justitiam imputare aliquando vult iis, qui credunt, id est, quo vult pœuas, peccatis eorum promeritas, iis non infligere, eosque tanquam justos tractare et premio afficere. » Néanmoins, ils disent qu’ils n’entendent par là que le pardon. Les protestants, quand ils disent que la justification inclut le pardon et l’imputation de la justice, entendent deux choses distinctes par le pardon et l’imputation de la justice. Les remontrants les ont régalés comme identiques, et, par conséquent, peuvent utiliser le langage même des protestants, tout en rejetant leur doctrine. Comme chacun sent et sait que lorsqu’un criminel est gracié par l’exécutif, et qu’on lui permet de reprendre ses droits de propriété et son droit de vote, il n’est pas pour cela justifié ; tout esprit sincère doit donc admettre qu’il y a une immense différence entre la doctrine de la justification des remontrants ou des arminiens et celle qui est considérée comme le principe cardinal de la Réforme par les luthériens et les réformés.
1 Apologia pro Confession(, Remonstrantium, cap. 11, 12 ; Episcopii Opera, édit. Rotter-dam, 1065, vol. ii. p. 166, a, de la deuxième série.
3. Cette différence devient encore plus apparente lorsque nous considérez ce que les remontrants font comme motif de justification. De même qu’ils nient que Christ ait donné une satisfaction réelle à la justice divine (par opposition à la bienveillance), de même ils nient que la justice de Christ soit imputée au croyant comme le fondement de sa justification. Sur ce point, Limborch2 dit : « Hæc autem, quæ nobis imputatur, non est Christi justifia ; nusquam enim Scriptura docet, Christi justitiam nobis imputari ; sed tantum fidem nobis imputari in justitiam, et quidem propter Christum. Et Curcellæus3 dit : Nullibi docet Scriptura justitiam Christi nobis imputari. Et id absurdum est. Nemo enim in se injustus aliéna justifia potest esse formaliter justus, non magis, quam aliéna albedine Æthiops esse albus. »
2 Theologia Christiana, vi. iv. 18, ut supra, p. 703, a.
3 Relig. Christ. Inst. 7, 9, 6.
Comme la justice de Christ n’est pas imputée au croyant, le fondement de sa justification, ce qui est accepté comme la justice, c’est la foi et ses fruits, ou la foi et l’obéissance évangélique. À ce sujet, Limborch dit 1 qu’en vertu de la nouvelle alliance, Dieu exige « obedientiam fidei, hoc est, non rigidam et omnibus æqualem, prout exigebat lex ; sed tan tarn, quantum fides, id est, certa de divinis promissionibus persuasio, in unoquoque efficere potest ; in qua etiam Deus multas imperfectiones et lapsus condonat, modo animo sincero præceptorum ipsius observation ! incumbamus, et continuo in eadem proficere studeamus. »
1 Theologia Christian( !, vi. iv. 37, ut supra, p. 706, a.
Et encore2 : « Deus non judicat hominum justitiam esse perfectam, imo earn judicat esse imperfectam ; sed justitiam, quam imperfectam judicat, gratiose accipit ac si perfecta esset. » C’est pourquoi,3 il définit ainsi la justification : « Est gratiosa æstimatio, sen potins acceptatio justitiæ nostræ imperfecta ! (quæ, si Deus rigide nobiscum agere vellet, in judicio Dei nequaquam consistere posset) pro perfecta, propter Jesum Christum. »
2 Idem. VI. iv. 41 ; p. 706, b, 707, a.
3 Idem. vi. iv. 18 ; p. 703, a.
Le même point de vue est présenté lorsqu’il parle du faitli dans sa relation avec la justification. On dit que la foi est imputée à la justice ; mais Limborch dit4 : « Sciendum, quando dicimus, nos fide justificari, nos non excludere opera, quæ fides exigit et tanquam fœcunda mater producit ; Sed ea includere.» De plus,5 «Fides est conditio in nobis et a nobis requisita, ut justificationem consequamur. Est itaque talis actus, qui, licet in se spectatus perfectus nequaquam sit, sed in multis deficiens, tamen a Deo gratiosa et liberrima voluntate pro pleno et perfecto acceptât !!· et propter quern Deus homini gratiose remissionem peccatorura et vitæ æternæ præmium conferre vult. »
4 Idem. vi. iv. 32 ; p. 705, b.
5 Ibid., vi, iv, p . 31 ; p. 705, a.
Fletcher 6 dit : « En ce qui concerne la loi sans Christ de l’obéissance paradisiaque, nous rejetons entièrement la perfection sans péché. » « Nous ne serons pas jugés par cette loi ; mais par une loi adaptée à notre état et à nos circonstances présentes, une loi plus douce, appelée la loi du Christ. « Notre Père céleste n’attend jamais de nous, dans notre état d’affaiblissement, l’obéissance d’Adam immortel au paradis. »
6 Dernier contrôle de l’antinomisme, sect. i ; ΙΓ07·Ζ־.< !, N. Y. 1833, vol. ii. p. 493 et 494
Le Dr. Peck7 dit : « La norme de caractère établie dans l’Évangile doit être telle qu’elle est praticable par l’homme, déchu comme il l’est. Arriver à cette norme, c’est ce que nous appelons la perfection chrétienne.
7 Christian Perfection, New York, 1843, p. 294.
Sous l’alliance des œuvres faite avec Adam, l’obéissance parfaite était la condition de l’acceptation de Dieu et de la vie éternelle ; sous l’Évangile, pour l’amour de Christ, l’obéissance imparfaite ou évangélique est le fondement de la justification, c’est-à-dire c’est ce (propter quam) à cause duquel Dieu nous accorde gracieusement la rémission des péchés et la récompense de la vie éternelle.
Nous avons alors les trois grands systèmes. Premièrement, celle des romanistes, qui enseigne qu’en raison de l’œuvre de Christ, Dieu accorde, par le baptême chrétien, une infusion de la grâce divine, par laquelle tout péché est purgé de la vente, tout motif d’infliction de la peine est enlevé et le pécheur rendu intrinsèquement juste ou saint. C’est la première justification. Alors, en vertu du nouveau principe de vie spirituelle ainsi communiqué, les baptisés ou les régénérés sont rendus capables d’accomplir de bonnes œuvres, qui sont vraiment méritoires et pour lesquelles ils sont admis au ciel.
Deuxièmement, la théorie arminienne, selon laquelle, à cause de ce que Christ a fait, il plaît à Dieu d’accorder une grâce suffisante à tous les hommes, et d’accepter l’obéissance imparfaite que le croyant est ainsi En lieu et place de l’obéissance parfaite exigée par l’alliance conclue avec Adam, et à cause de cette obéissance imparfaite, la vie éternelle est gracieusement accordée.
Troisièmement, la doctrine protestante selon laquelle le Christ, en tant que représentant et substitut des pécheurs ou de son peuple, prend leur place sous la loi, et en leur nom et en leur faveur, accomplit toute justice, rendant ainsi une justice réelle, parfaite et infiniment satisfaction méritoire à la loi et à la justice de Dieu, dont la justice est imputée, ou mise à la charge du croyant, qui est alors et pour cette raison librement pardonné et déclaré juste aux yeux de Dieu, et ayant droit non seulement à la rémission des péchés, mais aussi à la vie éternelle. Étant uni à Christ par la foi, le croyant devient participant de sa vie, de sorte que ce n’est pas lui qui vit, mais Christ qui vit en lui, et la vie que le croyant vit maintenant dans la chair est par la foi du Fils de Dieu, qui l’a aimé et s’est livré lui-même pour lui.
Comparaison des différentes doctrines.
La première remarque qui s’impose à la comparaison de ces divers schémas, c’est que la relation entre le croyant et le Christ est beaucoup plus étroite, particulière et constante dans le schéma protestant que dans tout autre. Il dépend de Lui à chaque heure ; pour l’imputation de sa justice ; pour les approvisionnements de l’Esprit de vie ; et pour ses soins, ses conseils et son intercession. Il doit se tourner continuellement vers Lui ; et exercer continuellement la foi en Lui comme un Sauveur toujours persévérant pour vivre. Selon les autres schémas, le Christ a simplement rendu possible le salut de tous les hommes. Son travail s’est terminé là. Selon les romanistes, il a rendu possible que Dieu donne la grâce sanctifiante dans le baptême ; selon les remontrants, il lui a permis de donner à tous les hommes une grâce suffisante pour se sanctifier et se sauver. Nous savons bien qu’il s’agit là d’une théorie ; que le vrai peuple de Dieu, qu’il soit romaniste ou remontrant, ne regarde pas ainsi le Christ comme un Sauveur de loin. Ils ont sans doute les mêmes exercices envers Lui que leurs coreligionnaires ; Néanmoins, telle est la théorie. La théorie place un grand abîme entre l’âme et le Christ.
Deuxièmement, il n’admet guère de doute que le point de vue protestant soit conforme à la manière biblique de présenter le plan du salut. Dans la Bible, Christ est déclaré être le chef de son peuple, son représentant ; ils étaient en Lui en ce sens qu’ils mouraient en Lui ; ils sont ressuscités avec Lui et s’assoient avec Lui dans les lieux célestes. Ils étaient en lui comme la race était en Adam, et comme les sarments sont dans la vigne. Ils reçoivent individuellement l’aspersion de ce sang qui purifie de tout péché. Ils sont constitués justes par son obéissance. De même qu’il a été fait péché pour eux, de même ils sont devenus justice de Dieu en lui. Il n’est pas seulement un exemple de châtiment comme Grotius le représente, un simple dispositif gouvernemental, mais un sacrifice substitué pour nous, sur la tête duquel chaque croyant doit poser sa main et à qui il doit transférer le fardeau de ses péchés.
Troisièmement, ce qui est effectivement inclus dans ce qui précède, mais qui est si important et décisif qu’il faut le mentionner distinctement et à plusieurs reprises ; tous les schémas, autres que le protestant, renvoient le motif immédiat de notre acceptation de Dieu à notre propre caractère subjectif. C’est à cause de notre propre bonté que nous sommes considérés et traités comme justes. Alors que la conscience l’exige, les Écritures le révèlent, et le croyant cherche instinctivement quelque chose de mieux que cela. Sa propre bonté est mauvaise. Elle ne peut satisfaire sa propre vision obscure ; comment donc peut-elle apparaître aux yeux de Dieu ? Il importe peu que le romaniste exalte ses « habitudes intérieures de grâce », ou que l’arminienne sublime à la perfection son obéissance évangélique ; ni l’un ni l’autre ne peut satisfaire ni la conscience ni Dieu.
Quatrièmement, la doctrine protestante est la seule sur laquelle l’âme puisse vivre. Cela a déjà été souligné en parlant de l’œuvre de Christ. Il est juste d’en appeler de la théologie à l’hymnologie ; de la tête au cœur ; de ce que l’homme pense à ce que Dieu fait ressentir aux hommes. Il suffit de dire sur ce point que les chrétiens luthériens et réformés ne peuvent trouver nulle part, en dehors de la Bible, une expression plus claire, plus précise, plus satisfaisante pour l’âme de leurs vues doctrinales sur ce sujet, que celle que l’on trouve dans beaucoup d’hymnes des églises latines et arminiennes. À titre d’exemple, on peut citer les strophes suivantes des " Hymnes et chants spirituels " de John Wesley :
« Joignez-vous, la terre et le ciel pour bénir
L’Eternel, notre Justice.
Le mystère de la rédemption,
C’est là l’étrange dessein du Sauveur :
L’offense de l’homme était considérée comme la sienne.
La nôtre sa justice divine.
« En Lui nous brillons tous entiers ;
Sa mort, sa vie, c’est la mienne ;
Je suis pleinement justifié,
Libre du péché, et plus que libre,
Innocent, puisqu’il est mort pour moi ;
Juste, puisqu’il a vécu pour moi.
§ 11. Vues modernes sur la justification.
Ceux-ci ne peuvent pas être donnés en détail. Certaines catégories d’opinions ne peuvent être mentionnées que de la manière la plus brève. Les rationalistes étaient divisés en deux classes ; d’abord, ceux qui regardaient les Écritures comme une révélation surnaturelle de la religion naturelle, ou des vérités de la raison ; et deuxièmement, ceux qui ont nié l’origine surnaturelle des Écritures tout entières, ne leur attribuant pas une autorité supérieure à celle qui appartient aux écrits des hommes bons et sages.
La première classe en vint à être à peu près d’accord avec la seconde sur ce que la Bible enseigne réellement, ou, du moins, sur ce que nous devons considérer et recevoir comme vrai. Ceux qui admettaient l’origine divine des Écritures se débarrassaient de ses doctrines distinctives par l’adoption d’une basse théorie de l’inspiration et par l’application de principes arbitraires d’interprétation. L’inspiration l’était. dans le premier cas, confinés aux enseignements religieux de la Bible, puis aux idées ou aux vérités, mais non à la forme sous laquelle ils étaient présentés, ni aux arguments par lesquels ils étaient soutenus. Le fait que Christ sauve les hommes d’une certaine manière a été mais non pas en sacrifice, ni en rançon, ni en se substituant aux pécheurs. Les miracles du Christ ont été reconnus comme des faits historiques, mais ils ont été expliqués comme de simples événements naturels déformés par l’imagination des spectateurs et des historiens. Certains ont admis que le Christ et les apôtres avaient enseigné les doctrines de l’Église, mais cela, disait-on, n’avait été fait qu’en guise d’accommodement aux préjugés, aux superstitions ou aux modes de pensée des hommes de cette génération. La première étape de ce processus a été la négation de toute distinction entre les fonctions prophétiques, sacerdotales et royales du Christ. De cette façon, une éponge humide a été passée sur toutes les doctrines de la rédemption, et leurs contours oblitérés. Ce processus contre nature ne pouvait pas être prolongé longtemps, et, par conséquent, la majorité des rationalistes rejetèrent bientôt toute considération pour l’autorité normale de la Bible, et avouèrent leur foi en rien qui ne se recommandât à la leur comprendre comme vrai, et pour cette seule raison.
Quant à la doctrine de la justification, toute la tendance des efforts au cours de cette période était, comme Baur le dit1 avec raison, de faire de la réconciliation de l’homme avec Dieu l’œuvre de l’homme lui-même. « Un homme avait le droit de se considérer comme réconcilié avec Dieu dès qu’il décidait de se repentir et de se réformer. » Dieu était considéré comme un père. Un père n’est mécontent d’un fils que tant qu’il est désobéissant. La seule fin de tout châtiment qu’il peut infliger est la réforme de son enfant. Si cela est accompli, toute nécessité et toute convenance de punition cessent. Wegscheider, un représentant de cette classe de théologiens, dit 2 : « Quicunque e vita turpi, qua pœnas sibi contraxit, ad virtutem emerserit, is eadem proportione, qua jam in virtutis studio progressus fuerit, in gratiam cum Deo reversus, ab eodem præmiis dignus judicabitur.
1 Die Cliristliche■ LeJire von der Versohnung, in. i. Tiibingen, 1830, p. 565.
2 Institntiones Theologiœ, in. ii. § 140, 5e édit. Halle, 1826, p. 438.
Les théories philosophiques sur ce sujet étaient aussi différentes que les systèmes sur lesquels elles étaient fondées. Certains de ces systèmes étaient théistes, d’autres panthéistes et d’autres monistes, c’est-à-dire fondés sur l’unicité de Dieu et de l’homme, sans nier la personnalité distincte de l’un ou de l’autre.
L’influence de la philosophie de Kant sur la théologie, du moins pour un temps, a été très grande et, à certains égards, salutaire. De même qu’il exalçait la puissance de la raison pure, en lui faisant donner la loi à l’étranger, en subordonnant, comme disent ses disciples, l’objectif au subjectif, de même, dans le domaine de la religion et de la morale, il exaltait la puissance et l’autorité de la raison pratique. Tout était subordonné à l’excellence morale. Le bonheur n’était pas la fin. Ce n’était qu’un moyen de promouvoir et de récompenser ce qui est moralement bon. L’atteinte de la plus haute excellence morale exige une harmonie parfaite entre le bonheur et la bonté, c’est-à-dire que les créatures raisonnables soient heureuses en proportion exacte de leur bonté, et malheureuses en proportion de leur méchanceté. Le châtiment du péché est donc inévitable. Elle est déterminée par l’ordre moral immuable de l’univers, qui ne peut pas plus être changé ou mis de côté que n’importe quelle loi physique dont dépend l’existence ou l’ordre du monde extérieur.
De ces principes, certains théologiens kantiens ont déduit que le pardon des péchés est impossible. La misère est aussi inséparable du péché que la douleur l’est de la lacération du corps. Cependant, si la seule punition du péché est ses conséquences naturelles, alors l’élimination du péché a pour effet la suppression de la punition. C’est ce qui détermine l’opinion que beaucoup de disciples de Kant ont sur la nature de la rédemption. C’est purement subjectif. Les hommes sont délivrés du péché et donc de son châtiment.
Pour d’autres, cependant, ce point de vue n’était pas satisfaisant (1). Parce que la punition du péché n’est pas purement ou exclusivement naturelle. Il n’en est pas ainsi même en ce monde, comme le prouvent le déluge, la destruction des villes de la plaine et mille autres exemples. C’est encore moins vrai en ce qui concerne le monde futur. La conscience n’est pas le seul ver qui ne meurt jamais, ni le remords le seul feu qui ne s’éteint jamais. (2) Parce que cette théorie renverse l’ordre naturel des événements. Elle fait précéder la réforme le pardon, tandis que le pardon doit précéder le pardon. Sur ce point, Bretschneider 1 cite même Ewald 2 disant : « Il est aussi peu psychologique que non chrétien de présenter ainsi la réforme chrétienne, qu’un homme doit devenir meilleur avant d’être pardonné. C’est précisément par l’amour de Dieu anticipant notre réforme, par laquelle l’homme moralement mort est vivifié, que les éléments de toute religion, la gratitude, la confiance et l’amour sont appelés à s’exercer. C’est certainement la doctrine de Paul. (3.) La théorie en question ne tient pas compte de la culpabilité, de la responsabilité envers la justice pour les péchés déjà engagé. (4) Les fins du châtiment (selon les kantiens) sont, premièrement, la satisfaction de l’excellence morale de Dieu, qui, par la nécessité de sa perfection morale, doit punir le péché ; deuxièmement, l’amélioration du délinquant ; et troisièmement, le maintien de l’ordre moral de l’univers. Les deux premières de ces fins, dit Bretschneider, peuvent être résolues par la réforme du pécheur. Quand un homme cesse de pécher, il cesse d’être opposé à Dieu, et Dieu cesse de s’opposer à lui. Mais la troisième fin du châtiment, c’est-à-dire la conservation de l’ordre moral de l’univers, n’est pas résolue par la réforme du pécheur. Il n’est pas la seule personne à être considérée. Les intérêts de la moralité en souffriraient, s’il était rendu heureux malgré sa transgression passée. La question est donc de savoir s’il y a un moyen de soutenir l’autorité de la loi morale, et cependant le pécheur est pardonné et rendu bienheureux. La réponse de l’Église à cette question, les disciples de Kant la rejettent comme contraire à la raison ; mais la raison, dit Bretschneider n’a rien à objecter à la doctrine énoncée en général selon laquelle Dieu peut constamment pardonner les péchés pour l’amour de Christ. Il résume, sous les rubriques suivantes, ce que la raison peut accepter à l’égard de tout ce sujet. (1) Que la nature divine du Christ rendait ses souffrances plus importantes pour le monde spirituel et plus disponibles pour l’homme qu’elles ne l’auraient été autrement. (2) Nous ne pouvons pas dire à juste titre qu’il a souffert le châtiment de la loi, ou le châtiment de nos péchés, mais qu’il a enduré ses souffrances imméritées pour le bien du monde. (3) Qu’il n’a pas satisfait le péché, mais qu’il a affermi l’ordre moral de l’univers. (4.) Bien qu’il n’ait pas donné satisfaction, il a procuré ou arbitré notre pardon. Il n’est pas notre parrain, mais notre « médiateur salutis ». (5) L’expression « le mérite du Christ » ne signifie pas un bien qui nous est imputé, ni aucun titre qui nous appartient, mais simplement la prétention du Christ que ses souffrances seront utiles au bien des hommes. (6) Le mot « réconciliation » est anthropopathique. Il n’exprime aucun changement en Dieu ; mais soit objectivement la possibilité du pardon, soit subjectivement l’espoir du pardon. (7) « Imputer le mérite du Christ » ne signifie pas que Dieu considère l’obéissance du Christ comme notre obéissance, ou ses souffrances comme notre châtiment, mais simplement que, par amour, Dieu a résolu de rendre ses souffrances disponibles pour le bien des hommes. (8) Que la mort du Christ a été faite par procuration, en tant qu’en conséquence le péché peut être pardonné dans le nouveau. (9) La justification est l’application aux individus de la déclaration générale de Dieu qu’Il sauvera tous ceux qui s’efforcent de réformer. C’est la forme la plus élevée sous laquelle les théologiens considérés comme rationalistes sont disposés à recevoir les doctrines de l’expiation et de la justification.
1 Dogmatik, § 159, 3׳d édit. Leipzig, 1828, vol. n. p. . . 320, note.
2 Die Religionsleltren der Bibel, 11. v. zu nro. 27 ; Stuttgart et Tiibingen, 1812, vol. II. , p. 149.
Les vues des théologiens spéculatifs sur ces points ont déjà été présentées dans les chapitres sur la personne du Christ et sur son œuvre, aussi complètement qu’il convient dans un ouvrage comme celui-ci.
Quelle que soit la différence de cette classe de théologiens quant à leurs principes philosophiques, ou quant à l’étendue de l’étendue de ces principes dans leur explication de la doctrine chrétienne, ils sont d’accord, premièrement, à rejeter le point de vue de l’Église sur le plan du salut ; ils nient que le Christ ait obéi à la loi et qu’il en ait supporté le châtiment par procuration, ou comme substitut des pécheurs ; Ils nient que son la justice est imputée au croyant comme le fondement de sa justification ; ils nient que la foi salvatrice consiste à recevoir et à se reposer sur la justice de Christ comme quelque chose d’objectif ; ils nient que la justification soit un acte médico-légal ou judiciaire dans lequel Dieu déclare le pécheur juste, non pas sur la base de son état subjectif ou de son caractère, mais sur la base de ce que Christ a fait pour lui. Tout cela, ils le déclarent mécanique, extérieur, magique, irréel et insatisfaisant. D’autre part, ils s’accordent à représenter la justification comme un acte par lequel le pécheur est rendu intrinsèquement ou subjectivement juste ; et par conséquent que son acceptation auprès de Dieu, et son titre à la vie éternelle, sont fondés sur ce qu’il est ; ils sont d’accord pour considérer la foi comme cet état d’esprit qui rend le pécheur réceptif à l’infusion de tout ce qui le rend ainsi subjectivement juste aux yeux de Dieu. C’est là le point principal sur lequel leurs représentations diffèrent. Ceux qui ne considèrent l’homme que comme une forme de la manifestation de Dieu, disent que le fait qu’un homme soit justifié par un homme et non par un autre, signifie que Dieu est plus pleinement développé dans l’un que dans l’autre ; ou que l’un réalise plus véritablement l’idée de l’homme que l’autre ; et cela, après tout, consiste à arriver à la conscience de son unité avec Dieu, que les autres n’ont pas atteinte. «L’idée la plus universelle et la plus essentielle de la rédemption et de la réconciliation est que l’homme ne fasse qu’un avec Dieu. L’hypothèse objective nécessaire, sur laquelle seul l’individu peut être un avec Dieu, ou racheté et réconcilié, est la vérité, que l’homme en tant que tel est un avec Dieu (dass der Mensch an sich mit Gott Eins 1er).» 1 Ceci, selon un point de vue, est un processus éternel ; Dieu se fait toujours homme, et l’homme retourne toujours en Dieu. D’après Schleiermacher, comme nous l’avons déjà dit à plusieurs reprises, cette manifestation de Dieu dans l’homme a été entravée et n’a jamais pu devenir parfaite par un processus de développement naturel ; et, par conséquent, par un nouvel acte créateur a été produit le Christ, en qui l’idée de l’homme était pleinement ou en qui l’unicité de Dieu et de l’homme a été clairement manifestée, et de Lui a commencé un nouveau processus de développement aussi parfaitement naturel que le processus avant son avènement, et la rédemption de l’homme consiste dans la communication de l’impeccabilité et de la béatitude de Christ à l’individu. C’est ce qu’on exprime communément en disant que la vie de Christ, — et non le Saint-Esprit tel qu’il vient de Lui ; non pas sa nature divine ; pas son humanité ; mais sa vie divine et humaine est communiquée à l’Église et à tous ses membres. En d’autres termes, comme Christ est Dieu sous forme humaine, chaque croyant l’est aussi. L’incarnation s’en va dans l’Église. Dans le langage des mystiques plus anciens, ce qui est communiqué est « la justice essentielle de Dieu », ou « l’essence de Dieu », la vie de Dieu, ou Dieu Lui-même.
1 Baur, Die Chris’liche Lehre von der Vers’ohnung, Tiibingen, 1838, p. G28.
Selon ce point de vue, l’œuvre objective de Christ, ce qu’Il a fait et souffert ne nous est d’aucune utilité ; Ce n’est pas ce qui nous rend justes, ou par lequel nous sommes rachetés. La rédemption et la réconciliation sont un processus purement subjectif ; quelque chose qui se passe dans l’âme même du pécheur, et non quelque chose qui a été fait pour lui. Peu importe qu’il y ait eu ou non un Christ historique ; ou, du moins, si les faits rapportés de Lui sont vrais ou faux ; si les Évangiles sont historiques ou mythiques.
Selon un autre point de vue, l’œuvre du Christ n’était en aucun cas une satisfaction pour la justice divine ; ni son obéissance ni ses souffrances n’étaient destinées à être données à son peuple avec son mérite, comme fondement de sa justification. La Parole s’est faite chair. Il a assumé notre humanité déchue dans l’union personnelle avec Lui-même. Cela nécessitait le conflit et la souffrance comme seul moyen pour la vie nouvelle de triompher de la loi du péché et de la mort qui appartenait à notre humanité déchue. C’était l’expiation du Christ, le triomphe de la santé sur la maladie. Ce fut la victoire du Christ sur le péché et l’enfer. C’est ainsi qu’il devient l’auteur du salut des hommes. L’humanité en Christ a souffert et est morte, et est ressuscitée. Que l’humanité est notre nature. C’est ce qui nous constitue ce que nous sommes., Par l’union de l’Église, qui est le corps du Christ animé par sa nature théanthropique ou sa vie, nous devenons un avec Lui. Ce qui est communiqué à ns, ce n’est pas son mérite, ni son Esprit, mais son essence, sa substance, sa vie. Il n’y a pas de dualisme entre l’âme et le corps. Ils ne font qu’un. L’âme s’extériorise dans le corps, ils ne font qu’un. Il n’y a donc pas de dualisme en Christ ; non pas une substance divine et humaine ; non pas une vie divine et humaine ; mais une vie qui est simplement et purement humaine et pourtant divine ; car Dieu et l’homme ne font qu’un ; Et l’humanité n’atteint son achèvement que lorsqu’elle est ainsi identifiée au divin. Cette vie divino-humaine passe du Christ à l’Église ; Et cela se produit dans la voie de l’histoire, de la croissance et du développement. En participant ainsi à la vie de Christ, nous participons à sa justice, à sa sainteté et à sa gloire. Ainsi, la rédemption est purement subjective. Elle est opérée en nous, bien que la source soit hors de nous. Comme nous participons au péché et à la condamnation d’Adam, parce que nous participons à sa nature ; ainsi nous participons à la justice et à la sainteté du Christ parce que nous participons à sa vie divine-humaine, ou à l’humanité telle qu’elle a été guérie et exaltée en Lui.1
1 Voir Mystical Presence, par John W. Nevin, D. D. ; MorM’s Philosophy of Religion, et Princeton Review, avril 1848.
Il y a une classe importante d’écrivains théologiques modernes, dont le Dr J. H. A. Ebrard d’Erlangen peut être considéré comme un représentant, qui se considèrent fidèles aux doctrines de la Réforme, tout en les développant sous de nouvelles formes. De même qu’Ebrard représente cette classe d’écrivains parmi les réformés, Delitzsch fait de même pour les théologiens luthériens. Ces auteurs sont abondamment orthodoxes dans leur exposé de la nature de l’œuvre du Christ. C’est particulièrement vrai de Delitzsch dans son admirable traité sur « La satisfaction par procuration du Christ ». 2 Comme ces auteurs identifient la régénération et la justification, leurs vues peuvent être brièvement exposées dans le chapitre sur la régénération.
2 Ueber den festen Schriftgruncl der Kirchenlehre von der stelhertretenden Genug· thuung, imprimé comme un second appendice à son commentaire détaillé de l’épître aux Hébreux.
Christ, il est admis, a fait l’expiation du péché et a satisfait à la justice de Dieu comme notre substitut par son obéissance et ses souffrances par procuration. Cette justice, cependant, devient nôtre non pas parce qu’elle est reçue par la foi et qu’elle nous est imputée par le juste jugement de Dieu, mais par la régénération, par laquelle nous devenons participants de la vie, de la substance ou de l’essence, quelle que soit la dénomination qu’on lui donne, de Christ. Ebrard dit à ce sujet : « La régénération est le fondement objectif substantiel à la fois de l’acte transitoire de justification et de l’œuvre progressive de sanctification ; tandis que la conversion (la repentance et la foi) est la condition subjective de l’une et de l’autre. Et la justification, en tant qu’acte du Père, est un acte judiciaire médico-légal ; en tant qu’acte du Christ, il est identique à la régénération, c’est-à-dire à l’implantation réelle du Christ en nous et de nous en Christ. Les deux propositions sont donc également vraies, dit-il, à savoir : « Christ nous justifie ; et la foi nous justifie. En expliquant cela, il dit : « Δίκαιος devant Dieu est celui qui ne mérite pas le châtiment ; qui est exempt de culpabilité aux yeux de l’éternel laiv de Dieu, soit parce qu’il est absolument sans péché, soit saint, n’ayant jamais contracté la culpabilité, comme dans le cas du Christ ; ou parce que sa culpabilité a été expiée, et que son manque de justice exigée par la loi est couvert. Δικαουν signifie soit reconnaître comme δίκαιος celui qui est δίκαιος ; ou de faire de δίκαιος celui qui n’est pas δίκαιος. Ce dernier est son sens lorsqu’il est utilisé en référence aux pécheurs. Dans leur cas, « L’acte de δικαίωσις consiste, (1.) Dans le don de l’expiation (Sühne) faite par le Christ sans la coopération du pécheur ; et (2.) Dans le don de la justice absolue du Christ, en ce sens que Dieu ne considère pas le pécheur tel qu’il est par nature et par son développement personnel, mais tel qu’il est tel qu’il est implanté dans le Christ. Il y a donc une distinction claire à faire entre l’appropriation de la justice et l’obtention de la justice. « Christ s’est procuré et a mérité la justice par sa vie et ses souffrances historiques ; elle est appliquée par la naissance du Christ en nous. « Les Écritures, dit-il, ne parlent pas de la justice de Christ qui nous est imputée. Ils enseignent qu’elle vient sur nous (Rom. v. 18) et qu’elle devient nôtre. Mais elle est nôtre, parce que la personne du Christ devient nôtre dans le sens le plus strict possible (allerrealsten, le sens le plus littéral) des termes. Ce qu’Ebrard défend, c’est (die substantielle Lebenseinheit mit der Person Christi), l’unité substantielle de la vie avec le Christ ; 1 ou, comme il l’exprime souvent ailleurs, « la communication mystérieuse et mystique de la substance du Christ à la substance centrale de l’homme ». 2 Le Dr Alexander Schweizer, de Zürich,3 bien qu’il diffère beaucoup d’Ebrard sur d’autres points, est d’accord avec lui sur ce point. L’élément essentiel de l’œuvre du Christ, dit-il, « est la fondation et le maintien d’une communauté animée ou imprégnée par sa vie théanthropique (gottmenschlichen Lebenspotenz). Le Dr Nevin4 dit : « Notre nature tend à une union vraie et réelle avec la nature de Dieu, comme le complément nécessaire et la consommation de sa propre vie. L’idée qu’il incarne ne peut jamais être pleinement actualisée, sous aucune autre forme. L’incarnation est le véritable achèvement de l’humanité. Le Christ est le véritable homme idéal. « L’incarnation n’était pas une simple théophanie ; pas d’étonnement passager ; aucune illusion n’a été montrée à les sens..... La Parole s’est faite chair ; pas un seul homme, comme un parmi tant d’autres ; mais ' chair ' ou l’humanité dans sa conception universelle. Sinon, comment pourrait-il être le principe d’une vie générale, l’origine d’un nouvel ordre d’existence pour le monde humain en tant que tel ? Sinon, comment la valeur de son travail de médiation pourrait-elle nous être rendue d’une manière réelle, par une véritable imputation, et non par une simple fiction juridique ?» 1 « Le christianisme est une vie, non seulement telle qu’elle s’est révélée d’abord dans le Christ, mais aussi telle qu’elle s’est poursuivie dans l’Église. Elle s’écoule du Christ vers son peuple, toujours sous cette forme. Ils ne se contentent pas de porter son nom et de reconnaître sa doctrine. Ils sont tellement unis à Lui qu’ils ont part à la substance même de sa vie.» 2 Il avait déjà dit,3 que « par l’union hypostatique des deux natures dans la personne de Jésus-Christ, notre humanité, telle qu’elle est tombée en Adam, a été exaltée de nouveau à une vie divine nouvelle et impérissable ». « Le but de l’incarnation était d’accoupler la nature humaine en union réelle avec le Logos, en tant que source permanente de vie. » Et encore 4, « la vie nouvelle, dont le Christ est la source et le principe organique, est à tous égards une vraie vie humaine ; . . . . non pas une humanité nouvelle, entièrement séparée de celle d’Adam ; mais l’humanité d’Adam elle-même, seulement élevée à un caractère plus élevé, et remplie d’un sens et d’une puissance nouveaux, par son union avec la nature divine..... La vie du Christ, telle qu’elle est maintenant décrite, ne repose pas dans sa personne séparée, mais passe à son peuple ; constituant ainsi l’Église, qui est son corps, la plénitude de Celui qui remplit tout en tous. Le Christ communique substantiellement sa propre vie à l’âme sur laquelle il agit, la faisant grandir dans sa nature même. C’est l’union mystique ; la base de tout notre salut ; c’est le seul moyen par lequel il nous est possible de nous intéresser à la grâce de Christ sous un autre point de vue.» 5 Avec sa substance, sa vie, sa nature divine et humaine ainsi communiquée à l’âme viennent son mérite, sa sainteté, sa puissance, sa gloire. Ce sont des prédicats de la nature qui devient nôtre, constituant notre vie personnelle et notre caractère. Même la résurrection doit être accomplie, non par la puissance de Christ opérant « ab extra », comme lorsqu’il ressuscita Lazare d’entre les morts, mais par « un nouvel élément divin », introduit dans notre nature par l’incarnation.» 6
1 Christllche Dogmatik, n. i. 2, § 443 ; Königsberg, 1852, vol. ii. p. 311, 312 et 314.
2 Idem. , p. 310.
3 Glaubenslehre, Zürich, 1847, t. II, p. 385.
4 Présence mystique, Philadelphie, 184G, pp. 200, 201.
1 Présence mystique, Philadelphie, 1846, p. 210, 211.
2 Idem. , p. 218.
3 Ibid., p. 165.
4 Idem. , p. 167.
5 Idem. , p. 168.
6 Idem. , p. 226.
À l’opposé de ces vues, on peut dire très brièvement, en guise de récapitulation de ce qui a été dit plus en détail dans les chapitres mentionnés ci-dessus :
1. Qu’il s’agit d’une philosophie. Le schéma a toute sa base dans une théorie philosophique quant à la nature de l’homme et à sa relation avec Dieu. C’est indéniable, et c’est difficilement nié. Le Dr Nevin déclare que trois « · principes scientifiques », dont l’ignorance a conduit les réformateurs à une mauvaise compréhension et à une représentation imparfaite du christianisme, et dont la reconnaissance et leur application à la théologie, permettent au théologien moderne d’exposer la nature et le plan du salut sous un jour beaucoup plus satisfaisant. Ces principes sont les suivants : (1..) La véritable portée de la loi organique. Les réformateurs n’ont pas fait de distinction claire, dit-il, « entre l’idée de la loi organique qui constitue l’identité propre d’un corps humain, et le volume matériel qu’il se trouve embrasser, tel qu’il est exposé aux sens ». Il peut donc y avoir une communication réelle du Christ et même de son corps à son peuple sans une communication de sa chair. 2° L’unité absolue impliquée dans la personnalité. Dans le cas du Christ, le corps, l’âme et la divinité sont unis en « une seule vie indivisible », de sorte que là où se trouve l’un, tous sont. Communiquer le Christ à l’âme, c’est donc communiquer cette vie indivisible, y compris en elle en tant que principe organique organisateur, corps, âme et divinité. 3° La distinction entre la vie individuelle et la vie générique. « Dans toutes les sphères du fifre, dit-on, l’individu et le général se trouvent étroitement unis dans le même sujet. » Le gland, à un certain point de vue, n’est qu’une seule existence ; Mais elle inclut la force d’une vie capable d’aller bien au-delà d’elle-même. La vie d’une forêt de chênes n’est que l’expansion du fifre du gland originel, « et toute l’existence générale ainsi produite est liée ensemble, intérieurement et organiquement, par une unité aussi vraie et aussi étroite que celle qui tient dans l’une quelconque des existences individuelles qu’elle embrasse, considérées séparément. C’est ainsi qu’Adam, à un certain point de vue, était un homme ; dans un autre, il était l’homme. Tout un monde de personnalités distinctes était impliqué dans sa vie, comme un principe générique ou une racine. « Unbarrage vit dans sa postérité aussi véritablement qu’il a jamais vécu dans sa propre personne. » De la même manière, bien que sous une forme supérieure, la vie du Christ doit être considérée sous le même double aspect. D’un côté, le Sauveur était un homme ; mais dans un autre, il était l’homme, « le Fils de l’homme, en la personne duquel se révélait la véritable idée de l’humanité, sous sa forme ultime et la plus complète. Sans aucune perte ou changement de caractère dans le premier point de vue, sa vie se prolonge continuellement dans ce dernier point de vue dans les personnes de son peuple. Il est cinq en lui-même, et pourtant il est cinq en eux vraiment et vraiment en même temps. De même que nous participons à toute la nature, âme et corps d’Adam, le peuple du Christ participe à toute sa nature, corps, âme et divinité. C’est une vie indivisible ; et qu’une vie théanthropique est communiquée aux croyants et les rend chrétiens. En cela, il s’agit d’une incluaient toute leur participation à la justice, au mérite et à la gloire de leur Rédempteur.1
1 Voir Présence mystique, section première de l’Énoncé scientifique.
Derrière et au-dessous de ces trois principes scientifiques, il y en a un autre sans lequel les trois dont nous venons de parler ne valent rien ; c’est-à-dire l’unité de Dieu et de l’homme. Mau dans sa plus haute forme ; l’homme idéal ou parfait ; Celui en qui l’idée de l’humanité se réalise pleinement, c’est Dieu. Qu’est-ce que cela signifie, si l’on admet que la « loi organique » constitue l’identité, comme dans le cas de l’homme ; ou que la personnalité comprend l’idée d’une vie indivisible ; qu’il n’y a pas dans l’homme une vie du corps et une autre de l’âme, que ce ne sont que des manifestations différentes d’une seule et même vie ; que l’âme ne peut pas plus être sans le corps que le corps sans l’âme ; et qu’il n’y a pas dans le Christ une vie de la divinité et une autre de son humanité ? Supposons que nous nions ce que l’Église de tous les temps a affirmé, qu’il y a deux « ׳epyetat dans le Christ, qu’est-ce que cela signifie ? Ou à quoi bon admettre la doctrine réaliste d’une vie générique ; si cette vie (une et indivisible) n’est qu’humaine, adamique ? Comment peut-il nous racheter ? Ce n’est qu’en supposant que l’humain et le divin ne font qu’un, que cette unité, pleinement réalisée dans le Christ, constitue « l’unique vie indivisible » qui passe jusqu’à nous ; qu’il a un pouvoir rédempteur ; et qu’elle exalte l’homme de sa dégradation et le ramène à l’unité consciente et réelle avec Dieu.
Cette théorie, telle qu’elle a été présentée par Schleiermacher, son auteur à l’époque moderne, était indéniablement panthéiste ; comme l’ont soutenu beaucoup de ses disciples, elle est, dans leur appréhension, théiste. Sous l’une ou l’autre forme, l’idée maîtresse de l’identité de Dieu et de l’homme est conservée. 2 Christ est l’homme idéal. En Lui l’idée de l’humanité se réalise pleinement ; et c’est pourquoi Il est Dieu. La manifestation de Dieu sous la forme de l’homme appartient à la nature divine. L’incarnation est entièrement indépendante de la chute de l’homme ; ou, en admettant que l’échec de la race à atteindre son véritable idéal en premier lieu ait été l’occasion d’une intervention nouvelle, spéciale et surnaturelle, cependant le but de cette intervention était de réaliser l’idée originelle de l’humanité en tant que Dieu fait chair.
2 Voir ceci clairement présenté dans l’article du Dr Ullinann sur « Le caractère distinctif du christianisme », dans le Studien und Kriliken de janvier 1845, traduit par le Dr Nevin et préfixé comme un essai préliminaire à son travail sur la présence mystique.
Le mot d’ordre de tout ce système est, dans le langage du Dr Ullmann, « La vie du Christ, c’est le christianisme » ; c’est-à-dire l’unique vie indivisible du Christ, la vie de Dieu sous la forme de l’humanité. Et cette vie, telle qu’elle est communiquée aux hommes, les amène à cette union de vie réelle et substantielle avec Dieu. « Qu’est-ce qui, demande le Dr Ullmann, est dans la personnalité du Christ par laquelle il est constitué un Sauveur parfait dans la voie de l’expiation et de la rédemption ? Nous répondons en général, sa propre nature substantielle, à la fois humaine et divine ; sa vie remplie de tous les attributs de Dieu, et représentant en même temps la plus haute conception de la nature et de l’homme ; complète et autosuffisante dans sa propre plénitude, et cependant, par cette plénitude elle-même, le principe libre d’un nouveau processus de vie correspondant, dans la voie de l’auto-communication, pour le monde humain. Mais ce fifre lui-même a de nouveau son cœur central, auquel en particulier, nous devons rechercher l’être particulier du Christ. Ici, on peut dire que toute la théologie du temps présent, dans toutes ses différentes tendances, n’a qu’une seule voix. Ce qui constitue l’être spécial du Christ, qui fait de lui ce qu’il est et qui lui donne ainsi sa plus haute signification pour le monde, c’est l’unité absolue du divin et de l’humain dans sa nature. Divinité et l’humanité en Lui se réunissent pleinement et ne font qu’un. C’est le dernier fondement du christianisme. C’est là surtout qu’il faut rechercher son caractère distinctif. Il poursuit en montrant que sur ce point tout le monde est d’accord. Dieu et l’homme ne font qu’un. La différence est entre le point de vue panthéiste et le point de vue chrétien qui reconnaît un Dieu personnel et une révélation positive. « Pour toute l’appréhension du christianisme, nous pouvons dire, non seulement cela, mais que tout dépend de la question de savoir laquelle de ces vues doit être adoptée ; Ce fait central doit être considéré comme une « unité générale du divin et de l’humain » se réalisant dans la conscience de la race en tant que telle, ou être conçu comme une « union concrète de Dieu et de l’homme », qui s’actualise à partir d’un point déterminé et seulement dans certaines conditions morales.» 1 C’est-à-dire, si Dieu s’incarne dans la race ou dans l’Église. Selon ce dernier point de vue, la vie du Christ, sa vie humaine, « remplie de tous les attributs de Dieu », passe à son peuple, par un processus de développement naturel . Comme nous sommes des hommes déchus en participant à la nature ou à la vie générique d’Adam, nous sommes des hommes-Dieu, et par conséquent rachetés en participant à la nature humaine divine ou à la vie générique de Christ.
1 Voir Nevin’s Mystical Presence, p. 27, 28, 29.
Que l’unicité de Dieu et de l’homme soit le principe ultime sur lequel repose cette ϊτερον ευαγγελίου, c’est évident non seulement par le caractère général de la philosophie dont elle est dérivée, mais aussi par le fait que tout est fait pour dépendre de la vie du Christ devenant la vie de son peuple, et non par le fait qu’il contrôle leur vie par son Esprit qui habite en eux. mais par une union substantielle et une identification de leur vie avec la sienne, d’eux avec Lui. Nous pouvons comprendre de manière mesurable ce que l’on entend par vie, par vie organique, par un principe de vie ou une force qui se développe, communique et se transmet sous une forme donnée. Nous savons ce que l’on veut dire quand on dit que la vie du gland est développée en chêne et communiquée à d’autres glands, et donc à d’autres chênes dans une succession infinie et une multiplication sans bornes. Mais ici, l’idée essentielle est l’unité et la similitude de la vie transmise. Vous ne pouvez pas combiner la « loi organique », ou la vie, de la pomme avec celle du gland, de sorte que la vie transmise soit « une vie de gland et de pomme ». Encore moins peut-on combiner le principe de vie organique d’un animal avec celui du gland, de manière à produire un « gland-bovin » ou « une vie gland-équin ». Encore moins peut-on combiner la vie intellectuelle de l’homme avec celle du chêne, de manière à avoir une « vie de chêne humain ». Par conséquent, si la vie de Dieu et la vie de l’homme sont combinées de manière à constituer une seule vie et celle-ci une vie divine-humaine, alors Dieu et l’homme doivent être un ; c’est-à-dire qu’une seule substance, une seule vie se manifestent différemment. Ceux qui poussent la doctrine moderne de la corrélation des forces à l’extrême de rendre la pensée et la gravité identiques, peuvent accepter ces conclusions. Avec eux, l’univers et tout ce qu’il contient, tous ses phénomènes physiques, mentaux, esthétiques, moraux et religieux, doivent être rapportés à une seule et même force diversement modifiée. La même force modifiée par le cerveau produit tous les phénomènes de l’esprit ; tels que modifiés par les tissus animaux, tous les phénomènes de la vie animale ; et comme modifiés par les organismes végétaux tous les phénomènes de la vie végétale, — théorie qui a été anéantie comme par un coup de foudre du ciel par la seule question : Où est le cerveau qui a élaboré l’esprit, qui a façonné l’univers ?
On peut en effet dire, et c’est ce que disent les théologiens modernes, que Dieu s’est fait homme, et donc que l’homme peut devenir Dieu. Dieu et l’homme, disent-ils, étaient tellement unis qu’ils sont devenus une seule nature ou vie dans la personne de Christ. Mais cela est contraire à l’Écriture et à la foi de l’Église universelle. Il n’y a pas d’Église historique sur la terre, et il n’y en a jamais eu, dont le credo n’enseigne que dans la personne du Christ deux natures ou substances distinctes sont unies ; qu’il est né, non seulement « per », mais « ex matre sua Maria », de sa substance ; qu’il est comme l’homme consubstantiel aux hommes, comme Dieu consubstantiel au Père ; ou, comme l’exprime l’Apôtre , κατά σαρκά Il est le fils de David, κατά 7rvivpa le Fils de Dieu. L’humanité et la divinité en Lui ne sont pas plus identifiées ou réduites à une seule vie, que l’âme et le corps dans l’homme ne sont identifiés ou réduits à une seule vie.
Toute cette théorie moderne de l’Évangile repose donc en définitive sur l’idée de l’identité de Dieu et de l’homme ; que l’homme est un « modus existendi » de Dieu.
La grande objection à ce schéma est qu’il s’agit d’une philosophie. C’est un produit de l’esprit humain. C’est la sagesse du monde. C’est la philosophie récente de l’école spéculative de l’Allemagne, revêtue de formes et de phrases bibliques. La raison pour laquelle les réformateurs n’ont pas présenté le plan du salut sous cette forme, est qu’ils ont été ignorant de la philosophie moderne. C’est parce que Hegel pensait que l’Évangile admettait d’être coulé dans le moule de sa philosophie qu’il a déclaré que le christianisme était la religion absolue. Par conséquent, tout ce que la Bible dit de la « sagesse des sages », de la « sagesse des hommes », de la « sagesse du monde », de la « philosophie comme d’une vaine tromperie », s’applique et était destiné à s’appliquer à ce schéma et à tous ceux de même nature. « L’Évangile est prêché aux pauvres. » L’Évangile est conçu pour les bébés et les nourrissons. Que celui qui court le lise et le comprenne. Ce système, pas un homme sur dix mille ne peut le comprendre.
Ces théories ne sont pas scripturaires.
2. La deuxième grande objection à ce schéma est qu’il n’est pas scripturaire. La Bible nous dit que le Christ nous sauve en tant que prêtre. Cela, un enfant peut le comprendre. Il sait qu’un prêtre se substitue à ceux pour qui il agit ; qu’il s’approche de Dieu en leur faveur ; qu’il fait l’expiation du péché ; qu’il fait ce qui satisfait aux exigences de la justice de Dieu contre le pécheur, afin qu’il puisse être juste et pourtant justifier l’impie. Il sait qu’un prêtre sauve, non par ce qu’il fait en ns, non pas en nous donnant sa vie, mais par ce qu’il fait pour nous ; par un travail objectif, et non par un travail subjectif. Ce qu’il y a d’une œuvre intérieure, et qui est très nécessaire et absolument nécessaire, n’est pas l’œuvre d’un prêtre, sous cet aspect sous lequel l’œuvre de Christ est si bien présentée dans les Écritures. Encore une fois, Christ nous sauve en sacrifice ; mais un sacrifice est un substitut ; elle porte les péchés de l’offenseur ; meurt à sa place, et par sa mort par procuration, délivre celui qui l’offrit de la peine qu’il avait encourue. Un sacrifice n’est pas le symbole d’un conflit intérieur entre le bien et le mal ; son dessein immédiat n’est pas d’opérer un changement subjectif chez le pécheur ; Il ne produit ni ne communique un nouveau principe de vie, et encore moins sa propre vie générique à celui qui l’offre, par laquelle s’opère sa rédemption réelle.
De la même manière, la Bible enseigne que Christ s’est donné lui-même en rançon pour beaucoup. Mais une rançon est un prix à payer. Ceux qu’elle livre sont achetés. Ils sont livrés à l’achat. Une rançon répond aux demandes d’un tiers et les satisfait. C’est là son idée essentielle, et elle ne peut être omise sans rejeter la vérité même que les Écritures, dans l’usage de ce terme, ont l’intention d’enseigner. Là encore, il s’agit d’un travail objectif. C’est quelque chose que la personne rachetée ne fait pas, ni n’expérimente intérieurement ; mais qui est fait pour lui et sans lui et non en lui.
De plus, toute l’idée de la rédemption, la vérité primordiale enseignée en présentant Christ comme Rédempteur, est qu’il délivre son peuple non par la puissance, non par l’instruction, non par l’influence morale, non par un changement subjectif opéré en eux, et non par une nouvelle forme de vie qui leur est communiquée, mais par l’achat. C’est la signification et le sens du mot. Les mots άττολυτρωσις, λυτρονν , άγοράζίΐι׳, Ιξαγοράζειν, ne sont jamais employés dans l’Écriture en référence à l’œuvre de Christ dans un autre sens que celui de la délivrance par l’achat ou le paiement d’une rançon ; et substituer tout autre mode de délivrance, c’est mettre les pensées de l’homme à la place de la vérité de Dieu ; c’est substituer l’humain au divin ; l’insignifiant pour le inestimable.
De plus, le Christ est constamment représenté comme un rocher, un refuge, une cachette. Le devoir exigé des pécheurs, c’est la confiance ; s’en remettre à Lui et à Son œuvre, comme à quelque chose d’extérieur sur lequel placer leur espérance en Dieu.
Ces théories amènent les hommes à se confier à eux-mêmes.
3. Ceci introduit la troisième grande objection à ce schéma. Cela rend la rédemption subjective. C’est ce que nous sommes ; ce que nous devenons ; c’est le Christ en nous ; le cœur nouveau, la nature nouvelle, la vie nouvelle, la vie divine et humaine du Christ, ou quel que soit le nom qu’on lui donne, qui est à la fois le fondement de notre justification et la source de la sanctification. C’est tout à fait incompatible avec la Bible et avec l’expérience du peuple de Dieu à toutes les époques et sous toutes les dispensations. En aucun cas, les croyants ne sont représentés comme faisant confiance à ce qui est en eux, mais à ce qui est hors d’eux. La doctrine protestante, comme nous l’avons vu, pourvoit pleinement à une œuvre intérieure de délivrance de la puissance du péché, ainsi qu’à la rédemption de la malédiction de la loi ; pour la sanctification aussi bien que pour la justification. Mais c’est le cas Il ne confond pas les deux, et il ne se réfère ni à l’un ni à l’autre, ni aux deux, au nouveau principe de vie, à la nouvelle semence ou au nouveau levain implanté ou inséré qui fonctionne comme « une loi organique » et par un processus régulier de développement, aussi naturel que l’action de toute autre loi. Toute l’œuvre de l’Esprit est ignorée dans cette nouvelle théorie de la rédemption. Ce qui, dans la Bible, est référé à l’Esprit de Dieu est, par les théologiens de cette classe, référé à la nature « divine-humaine » du Christ. C’est cette dernière, et non la première, qui est la source immédiate et efficiente de la sainteté du cœur et de la vie. « Le Christ, dit le Dr Nevin, habite en nous, par son Esprit ; mais seulement en tant que son Esprit constitue la forme et la puissance même de sa propre présence en tant que Parole incarnée et éternel.» 1 C’est-à-dire que l’Esprit est la puissance* de la Parole incarnée, c’est-à-dire de la vie divine et humaine du Christ. « La vie, ajoute-t-il, ainsi opérée dans nos âmes par son agent, n’est pas une production à partir de rien, mais la vie même de Jésus lui-même se prolonge organiquement de cette manière dans nos personnes. » C’est de la vie médiatrice du Christ qu’il s’agit du salut chrétien, sous la forme que nous envisageons maintenant. C’est en cela que se comprend toute la nouvelle création révélée par l’Évangile ; la justice de Christ, et tous les bienfaits qu’il a procurés à son peuple. Mais la vie médiatrice, par la communication de laquelle seule cette grâce est faite pour passer aux hommes, est une et indivise ; Et cette vie, comme il continue à le montrer, comprend son corps, son âme et sa divinité. Dans le même sens,2 il est dit : « Que toute la vie spirituelle du chrétien, y compris la résurrection de son corps, soit ainsi organiquement liée au fifre médiateur du Seigneur Jésus, cela pourrait sembler être enseigné trop clairement dans le Nouveau Testament pour admettre aucune question ; Et pourtant, nous trouvons beaucoup de gens lents à admettre le mystère, malgré tout. Une opinion très commune semble être que tout le salut de l’Évangile est accompli d’une manière plus ou moins extérieure et mécanique, par une puissance et une puissance surnaturelles, plutôt que par l’Esprit du Seigneur comme une révélation d’une nouvelle vie historique dans la personne du croyant lui-même. Nous avons donc une imputation extérieure de justice pour commencer ; un processus de sanctification poursuivi à l’aide d’un mécanisme spirituel approprié mis en œuvre sur l’âme, y compris, peut-être, comme base, la notion d’une création brusque « de novo », par le fiat du Saint-Esprit ; et enfin, pour couronner le tout, une refabrication soudaine et non préparée du corps, pour être ajoutée à la vie de l’esprit déjà créée. Dans son état de gloire, il n’y a pas d’autre moyen d’y parvenir. Les doctrines de la justification par l’imputation de la justice de Christ ; de la régénération et de la sanctification de l’âme par la puissance surnaturelle de l’Esprit, et de la résurrection du corps par la puissance de Dieu au dernier jour, sont rejetées et méprisées ; et la doctrine qui leur est substituée, c’est que la vie divino-humaine du Christ, en tant que nouvelle loi organique, se développe dans l’Église, de même que la vie du gland se développe dans le chêne et dans la forêt, par un processus naturel et historique, de sorte que les membres de l’Église, en vertu de leur participation à cette vie, sont justifiés et sanctifiés, et leurs corps (puisque la vie du Christ est une vie humaine qui s’actualise extérieurement dans un corps aussi bien qu’intérieurement dans une âme), finalement ressuscités d’entre les morts, sont façonnés d’après le corps glorieux du Christ. La résurrection du corps est un processus aussi naturel que le développement d’une graine en fleur, ou d’un ver en papillon. Voici l’illustration du Dr Nevin lui-même : « La naissance du papillon, tel qu’il monte dans les airs sur des ailes de lumière, est aussi relativement soudaine ; mais ce n’est là que la révélation d’une vie qui s’était formée peu à peu pour cette efflorescence auparavant, sous le couvert de la vile et disgracieuse larve. « La nouvelle création, dit-il, est en effet surnaturelle ; mais, en tant que telle, elle est strictement conforme à l’ordre général et à la constitution de la vie. C’est une nouvelle création en Jésus-Christ, et non par Lui par la voie d’une simple puissance extérieure. Les sujets de celle-ci ne sont sauvés qu’en étant introduits dans la sphère de sa vie, comme un processus régulier, historique, divino-humain, dans l’Église. La nouvelle nature implantée en eux lors de leur régénération n’est pas un ordre supérieur d’existence conçu pour eux en ce moment à partir de rien par le décret de Dieu, mais vraiment et strictement une continuation de la vie de Christ dans leurs personnes.» 1
1 Présence mystique, p. 197, 198.
2 Idem. p. 228, note.
1 Présence mystique, p. 228, 229.
C’est la conception moderne du christianisme introduite par Schleiermacher, modifiée plus ou moins par ses disciples, et qui est passée en Angleterre et dans ce pays. L’humanité, telle qu’elle a été révélée en Adam sous la forme d’un fifre générique, était trop faible. Son développement a échoué et n’aurait jamais réussi à atteindre l’idéal.
C’est pourquoi Dieu s’est interposé et a interrompu le processus de développement naturel par la production d’un nouvel homme idéal contenant en lui-même une vie générique, une semence, un principe, une loi organique, qui se développe dans l’Église par un processus historique, de même que la vie d’Adam s’est développée dans sa postérité. Nous sommes donc justifiés, non par ce que Christ a fait, mais par sa vie en nous, qui est aussi véritablement et proprement notre vie, que la vie que nous avons tirée d’Adam est notre propre vie. Nous devons nous tenir devant Dieu pour être justifiés ou condamnés, acceptés ou rejetés, sur la base de ce que nous sommes. Nous n’avons rien d’autre à offrir que notre propre caractère subjectif et inhérent tel qu’il est. L’homme qui ose faire cela est à plaindre. Il est certainement préférable d’être d’accord avec Paul, qui a renoncé à sa propre justice, à sa propre bonté, à tout ce qui lui appartient, à tout ce qui est subjectif, et qui n’a fait confiance qu’avec confiance à la justice de Christ reçue par la foi.
CHAPITRE XVIII.
SANCTIFICATION.
Dans le Catéchisme de Westminster, la sanctification est décrite comme « l’œuvre de la grâce gratuite de Dieu, par laquelle nous sommes renouvelés dans tout l’homme à l’image de Dieu, et nous sommes de plus en plus rendus capables de mourir au péché et Ève à la justice ».
D’accord avec cette définition, la justification diffère de la sanctification, (1). En ce sens que le premier est un acte transitoire, le second est une œuvre progressive. (2.) La justification est un acte médico-légal, Dieu agissant en tant que juge, déclarant la justice satisfaite dans la mesure où le croyant Le pécheur est concerné, tandis que la sanctification est un effet dû à l’efficacité divine. (3.) La justification change, ou déclare être changée, la relation du pécheur avec la justice de Dieu ; La sanctification implique un changement de caractère. (4) Le premier est donc objectif, le second subjectif. (5) La première est fondée sur ce que le Christ a fait pour nous ; ce dernier est l’effet de ce qu’Il fait en nous. (6) La justification est complète et la même dans tous, tandis que la sanctification est progressive et plus complète chez certains que chez d’autres.
Sanctification is declared to be a work of God’s free grace. Two things are included in this. First, that the power or influence by which it is carried on is supernatural. Secondly, that granting this influence to any sinner, to one sinner rather than another, and to one more than to another, is a matter of favour. No one has personally, or in himself, on the ground of anything he has done, the right to claim this divine influence as a just recompense, or as a matter of justice.
En représentant, selon l’Écriture, la sanctification comme une œuvre surnaturelle ou comme une œuvre de grâce, l’Église entend nier la doctrine pélagienne ou rationaliste qui la confond avec une simple réforme morale. Il n’est pas rare que des hommes qui ont été immoraux dans leur vie changent tout le cours de leur vie. Ils deviennent extérieurement corrects dans leur comportement, tempérés, purs, honnêtes et bienveillants. Il s’agit d’un changement important et digne d’éloges. C’est à un haut degré bénéfique pour le sujet et pour tous ceux avec qui il est en relation. Elle peut être produite par différentes causes, par la force de la conscience, par le respect de l’autorité de Dieu et par la crainte de sa désapprobation, ou par le respect de la bonne opinion des hommes, ou par la seule force d’un regard éclairé sur son propre intérêt. Mais quelle que soit la cause immédiate d’une telle réforme, elle est très loin de la sanctification. Les deux choses diffèrent par leur nature autant qu’un cœur pur et des vêtements propres. Une telle réforme extérieure peut laisser inchangé le caractère intérieur d’un homme aux yeux de Dieu. Il peut rester dépourvu d’amour pour Dieu, de foi en Christ et de tous les saints exercices ou affections.
Il ne faut pas non plus confondre la sanctification avec les effets de la culture morale ou de la discipline. Il est très possible, comme l’expérience le prouve, par une éducation morale soigneuse, en préservant les jeunes de toutes les influences contaminantes, et en les plaçant sous l’influence formatrice de bons principes et de bons associés, de les préserver d’une grande partie du mal du monde, et de les rendre semblables au jeune homme de l’Évangile que Jésus aimait. Cette formation ne doit pas être sous-estimée. C’est enjoint dans la Parole de Dieu. Elle ne peut cependant pas changer la nature. Il ne peut pas donner la vie. Une statue irréprochable, façonnée dans le marbre pur dans toute sa beauté, est bien au-dessous d’un homme vivant.
Le mot surnaturel, comme nous l’avons déjà dit, est employé dans deux sens. Premièrement, pour ce qui est au-dessus de la nature, et par nature on entend tout ce qui vient de Dieu. On dit donc qu’il y a un effet surnaturel, dans la production duquel la nature n’exerce aucune efficacité. Mais deuxièmement, le mot est souvent utilisé pour marquer la distinction entre l’efficacité providentielle de Dieu agissant selon des lois fixes, et l’action volontaire du Saint-Esprit. La Bible fait une grande distinction entre la providence de Dieu et les opérations de sa grâce. La différence entre les deux est, à certains égards, analogue à celle qui existe entre l’efficacité d’une loi, ou d’une force agissant uniformément, et l’action d’une personne. L’un est ordonné, l’autre s’exerce de temps en temps, l’Esprit distribuant ses dons à chacun individuellement comme il le veut. Par l’intermédiaire providentiel de Dieu, les effets produits ne transcendent jamais la puissance des causes secondes telles qu’elles sont soutenues et guidées par Lui ; tandis que les effets produits par l’Esprit transcendent la puissance des causes secondes. L’effet n’est dû ni à la puissance de la vérité, ni à celle du sujet rationnel en qui l’effet est produit. Elle est due à la puissance de Dieu au-delà de la puissance des causes secondes concernées. Les effets de la grâce, ou fruits de l’Esprit, sont au-dessus de la sphère du naturel ; ils appartiennent au surnaturel. Le simple pouvoir de la vérité, de l’argumentation, du motif, de la persuasion ou de l’éloquence ne peut produire la repentance, la foi ou la sainteté du cœur et de la vie. Ces effets ne peuvent pas non plus être produits par la puissance de l’Avili, ni par toutes les ressources de l’homme, si longues ou si habiles qu’elles soient dans leur application. Ce sont les dons de Dieu, les fruits de l’Esprit. Paul peut planter et Apollos arroser, mais c’est Dieu qui donne l’augmentation.
Dans ce dernier sens du mot surnaturel, la coopération des causes secondes n’est pas exclue. Quand le Christ ouvrit les yeux de l’aveugle, aucune cause seconde ne s’interposa entre son vouloir et l’effet. Mais les hommes travaillent à leur propre salut, tandis que c’est Dieu qui opère en eux à vouloir et à faire selon son bon plaisir. Dans le travail de régénération, l’âme est passive. Il ne peut pas coopérer à la communication de la vie spirituelle. Mais dans la conversion, la repentance, la foi et la croissance dans la grâce, toutes ses puissances sont appelées à s’exercer. Cependant, les effets La sanctification ne cesse pas d’être surnaturelle, ou une œuvre de grâce, parce que l’âme est active et coopère dans le processus.
Preuve de son caractère surnaturel.
Que la sanctification soit une œuvre surnaturelle dans le sens indiqué ci-dessus, c’est prouvé,
1. Du fait qu’il est constamment référé à Dieu comme son auteur. Il est fait référence à Dieu absolument, ou au Père, comme dans 1 Thessaloniciens v. 23 : « Or le Dieu de paix vous veuille sanctifier entièrement, et faire que votre esprit entier, et l'âme et le corps soient conservés sans reproche en la venue de notre Seigneur Jésus-Christ! » Hébreux xiii. 20, 21 : « Or, le Dieu de paix, qui a ramené d'entre les morts le grand Pasteur des brebis, par le sang de l'alliance éternelle, savoir, notre Seigneur Jésus-Christ, vous rende accomplis en toute bonne œuvre, pour faire sa volonté, en faisant en vous ce qui lui est agréable par Jésus-Christ; auquel soit gloire aux siècles des siècles! Amen!». Il est aussi fait référence au Fils, comme dans Tite II. 14, il « qui s'est donné soi-même pour nous, afin de nous racheter de toute iniquité, et de nous purifier, pour lui être un peuple qui lui appartienne en propre, et qui soit zélé pour les bonnes œuvres.» Éphésiens v. 25, Il « Et vous, maris, aimez vos femmes, comme Christ a aimé l'Eglise, et s'est donné lui-même pour elle; afin qu'il la sanctifiât, après l’avoir nettoyée dans le baptême d'eau, et par sa parole : afin qu'il se la rendît une Eglise glorieuse, n'ayant ni tache, ni ride, ni autre chose semblable; mais afin qu'elle fût sainte et irrépréhensible.» La sanctification se réfère principalement à l’Esprit Saint, comme son œuvre particulière dans l’économie de la rédemption. Il est appelé l’Esprit de toute grâce ; l’Esprit de joie, de paix, d’amour, de foi et d’adoption. Toutes les grâces chrétiennes sont présentées comme des fruits de l’Esprit. On dit que nous sommes nés de l’Esprit, et que c’est par Lui que nous sommes éclairés, instruits, conduits et purifiés. On nous a dit d’être dans l’Esprit, de vivre, de marcher et de nous réjouir dans l’Esprit. L’Esprit habite dans le peuple de Dieu et est la source immuable de tous les actes de cette vie spirituelle qu’il implante dans l’âme. La Bible enseigne que le Fils et l’Esprit sont dans la Sainte Trinité subordonnés au Père, quant à leur mode de subsistance et d’opération, bien qu’ils soient identiques en substance, et égaux en puissance et en gloire. De là vient que la même œuvre est souvent attribuée au Père, au Fils et à l’Esprit ; et comme le Père et le Fils opèrent par l’Esprit, les effets dus à l’action de Dieu sont rapportés spécialement au Saint-Esprit.
Cette référence de la sanctification à Dieu prouve qu’il en est ainsi une œuvre surnaturelle, parce que l’insuffisance des causes secondes pour produire l’effet est déclarée être le fondement de cette référence. C’est parce que les hommes ne peuvent pas se purifier ou se guérir eux-mêmes, qu’ils sont déclarés purifiés et guéris par Dieu. C’est parce que les rites, les cérémonies, les sacrements, la vérité et la persuasion morale ne peuvent ramener l’âme à Dieu, qu’on dit qu’elle est transformée, par le renouvellement de l’esprit, par la puissance de l’Esprit, à l’image de Dieu. Nous sommes donc déclarés être l’œuvre de Dieu, créés pour de bonnes œuvres. Et ce n’est pas nous qui vivons, c’est Christ qui vit en nous.
Tous les Saints Exercices se référaient à l’Esprit comme à leur Auteur.
2. Cette référence de la sanctification à Dieu comme à son auteur, prouve d’autant plus nettement le caractère surnaturel de l’œuvre, que la référence n’est pas simplement générale, comme lorsque le vent et la pluie, et la production de la vie végétale et animale, sont rapportés à son agent providentiel universel. La référence est spéciale. C’est un effet que les Écritures reconnaissent comme n’entrant pas dans la sphère des causes secondes, et qu’elles attribuent donc à Dieu. Ils reconnaissent le libre arbitre de l’homme ; ils le reconnaissent et le traitent comme un être moral et rationnel ; ils admettent l’adaptation de la vérité pour convaincre l’entendement, et des motifs présentés pour déterminer la volonté et contrôler les affections, et néanmoins ils enseignent que ces causes et influences secondaires sont absolument inefficaces pour la conversion et la sanctification de l’âme, sans la démonstration de l’Esprit. C’est pourquoi les écrivains sacrés prient constamment pour que cette influence divine, extrinsecus accidens, accompagne les moyens de la grâce et les rende efficaces, aussi bien pour la sanctification que pour la régénération et la conversion. Toutes ces prières, toutes les actions de grâces accordées, toutes les reconnaissances des vertus chrétiennes comme fruits de l’Esprit et dons de Dieu, sont autant de reconnaissances de la grande vérité que la restauration de l’homme à l’image de Dieu n’est pas une œuvre de la nature, qu’elle ait eu naissance ou qu’elle ait été poursuivie par l’efficacité de causes secondes. mais elle est vraiment et proprement surnaturelle, parce qu’elle est due à la puissance immédiate de l’Esprit qui produit des effets pour lesquels les causes secondes sont insuffisantes.
On nous enseigne à prier pour la repentance, la foi et d’autres grâces.
3. C’est pourquoi nous trouvons l’Apôtre et les écrivains sacrés en général, se référant non seulement à la régénération, à la communication de la vie spirituelle à ceux qui sont spirituellement morts, mais à la continuation de cette vie dans son activité et sa croissance, non seulement à la puissance de Dieu, mais à sa toute-puissance. Paul prie dans Éphésiens i. 19, afin que ses lecteurs sachent « et quelle est l'excellente grandeur de sa puissance envers nous qui croyons selon l'efficace de la puissance de sa force; laquelle il a déployée avec efficace en Christ, quand il l'a ressuscité des morts, et qu'il l’a fait asseoir à sa droite dans les lieux célestes,». La même puissance toute-puissante qui s’est manifestée dans la résurrection du Christ, s’exerce dans la résurrection spirituelle du croyant. Et comme la puissance qui a ressuscité Christ d’entre les morts s’est exercée dans son ascension et sa glorification ; de même, selon l’Apôtre, le même pouvoir qui s’exerce dans la résurrection spirituelle du croyant, s’exerce dans l’accomplissement de sa sanctification, qui est intérieure et la vraie glorification. C’est pourquoi, dans la même épître (III, 7), il attribue toute la grâce par laquelle il a été préparé à l’apostolat, « duquel j'ai été fait le ministre, selon le don de la grâce de Dieu, qui m'a été donnée suivant l'efficace de sa puissance. ». Et plus loin (verset 20), pour encourager le peuple de Dieu à prier pour obtenir des bénédictions spirituelles, il lui rappelle sa toute-puissance par laquelle il a pu « Or, à celui qui par la puissance qui agit en nous avec efficace, peut faire infiniment plus que tout ce que nous demandons et pensons;» . C’est donc une puissance toute-puissante, et non l’impuissance des influences secondes, qui agit dans le croyant et poursuit l’œuvre de son salut.
Ceux qui sont en Christ sont donc de nouvelles créatures. Ils sont créés de nouveau en Jésus-Christ. Il ne s’agit pas d’une exclusivement à leur régénération, mais au processus par lequel le pécheur est transformé à l’image du Christ.
Argument de l’Union du croyant avec le Christ.
4. Tout ce que les Écritures enseignent sur l’union entre le croyant et le Christ, et sur le séjour du Saint-Esprit, prouve le caractère surnaturel de notre sanctification. Les hommes ne se sanctifient pas ; Leur sainteté et leur croissance dans la grâce ne sont pas dues à leur propre fidélité, ou à la fermeté de leurs intentions, ou à la vigilance et à la diligence, bien que tout cela soit requis, mais à l’influence divine par laquelle ils sont rendus ainsi fidèles, vigilants et diligents, et qui produit en eux les fruits de la justice. Sans moi, dit notre Seigneur, vous ne pouvez rien faire. De même que le sarment ne peut porter de fruit de lui-même, s’il ne demeure pas dans la vigne, vous ne le pouvez pas davantage, si vous ne demeurez en moi. La main n’est pas plus dépendante de la tête pour la continuation de sa vitalité, que le croyant ne l’est de Christ pour la continuation du fifre spirituel dans l’âme.
Argument tiré des doctrines connexes.
5. C’est pourtant l’une de ces doctrines qui imprègnent toute l’Écriture. Il découle nécessairement de ce que la Bible enseigne de l’état naturel de l’homme depuis la chute ; Elle est assumée, affirmée et impliquée dans tout ce qui est révélé du plan du salut. Par leur apostasie, les hommes perdirent l’image de Dieu ; Ils naissent dans un état d’aliénation et de condamnation. Ils sont par nature dépourvus de vie spirituelle. De cet état, il est aussi impossible qu’ils se délivrent eux-mêmes, que ceux qui sont dans la tombe rendent la vie à leurs corps dévastés, et qu’une fois restaurés, ils la continuent et la vivifient par leur propre puissance. Tout notre salut vient de Christ. Ceux qui sont dans la tombe entendent sa voix. Ils sont élevés par sa puissance. Et quand ils vivent, c’est Lui qui vit en eux. C’est la doctrine que Notre-Seigneur lui-même enseigne si clairement et si fréquemment, et sur laquelle ses apôtres insistent si énergiquement. Saint Paul, dans les sixième et septième chapitres de son épître aux Romains, où il traite de ce sujet « in extenso », a pour objet principal de prouver que, de même que nous ne sommes pas justifiés pour notre propre justice, nous ne sommes pas non plus sanctifiés par notre propre puissance, ou par la seule puissance objective de la vérité. La loi, la révélation de la volonté de Dieu, y compris tout ce qu’Il a fait connaître à l’homme, soit comme une règle d’obéissance, soit comme manifestant ses propres attributs et desseins, était également inadéquate pour assurer la justification et la sanctification. Comme il a exigé une obéissance parfaite et a déclaré maudits ceux qui ne continuent pas en toutes choses écrites dans le livre de la loi à les faire, il ne peut que condamner. Il ne peut jamais prononcer le pécheur juste. Et comme il s’agissait d’une simple présentation extérieure de la vérité, elle ne pouvait pas plus changer le cœur que la lumière ne pouvait rendre la vue aux aveugles. Il termine ses discussions sur le sujet par l’exclamation : « Ah! misérable que je suis! qui me délivrera du corps de cette mort? Je rends grâces à Dieu par Jésus-Christ notre Seigneur. Je sers donc moi-même de l'entendement à la loi de Dieu, mais de la chair à la loi du péché.» Sa délivrance devait être effectuée par Dieu par l’intermédiaire de Jésus-Christ. Nous apprenons dans le huitième chapitre qu’il était pleinement confiant de cette délivrance, et nous apprenons aussi sur quelle base cette délivrance s’est faite. confiance reposée. Ce n’est pas qu’il ait reçu dans la régénération la force de se sanctifier, ou que par la force de sa propre volonté, ou par l’usage diligent de moyens naturels ou désignés, la fin devait être accomplie sans autre aide de Dieu. Au contraire, sa confiance était fondée, (1.) Sur le fait qu’il avait été délivré de la loi, de sa malédiction et de son exigence inexorable d’une obéissance parfaite. (2) Sur le fait qu’il avait reçu l’Esprit comme la source d’une vie nouvelle, divine et impérissable. (3.) Cette vie n’était pas un simple état d’esprit, mais la vie de Dieu, ou l’Esprit de Dieu demeurant dans le cœur ; ce qui assurait en soi non seulement la continuation de l’esprit spirituel, mais même la résurrection d’entre les morts. « Or, si» dit-il, «l'Esprit de celui qui a ressuscité Jésus des morts habite en vous, celui qui a ressuscité Christ des morts vivifiera aussi (ζωοποιήσει, rendra vivant par la vie du Christ) vos corps mortels, à cause de son Esprit qui habite en vous. » (1.) Conduits par l’Esprit de Dieu comme principe directeur de leur vie intérieure et extérieure, les croyants sont les fils de Dieu. L’Esprit de Dieu qui est en eux étant l’Esprit du Fils, est en eux l’Esprit de filiation, c’est-à-dire qu’elle produit en eux les sentiments des fils envers Dieu, et les assure de leur droit à tous les privilèges de ses enfants. (5) La sanctification et le salut final des croyants sont assurés par le décret immuable de Dieu. "Car ceux qu'il a préconnus, il les a aussi prédestinés à être conformes à l'image de son Fils, afin qu'il soit le premier-né entre plusieurs frères. Et ceux qu'il a prédestinés, il les a aussi appelés; et ceux qu'il a appelés, il les a aussi justifiés; et ceux qu'il a justifiés, il les a aussi glorifiés." Ce dernier comprend : sanctification; la gloire intérieure de l’âme ; l’image divine telle qu’elle est retracée par l’Esprit de Dieu, qui pour et dans le croyant est l’Esprit de gloire. (1 Pi. iv. 14. ) Le séjour de l’Esprit rend le croyant glorieux. (6) L’amour infini et immuable qui a poussé Dieu à donner son propre Fils pour notre salut, rend certain que toutes les autres tuiles seront données nécessaires pour les garder dans l’amour et la communion de Dieu. Le salut est donc, du commencement à la fin, de la grâce ; non seulement comme étant gratuite à l’exclusion de tout mérite de la part de ceux qui sont sauvés, mais aussi comme étant exercée par l’opération continue de la grâce, ou la puissance surnaturelle de l’Esprit. Christ est notre tout. Il vient de Dieu fait pour nous la sagesse, la justice, la sanctification et la rédemption.
En admettant que la sanctification soit une œuvre surnaturelle, la question demeure : en quoi consiste-t-elle ? Quelle est la nature de l’effet produit ? La vérité qui est à la base de toutes les représentations bibliques de ce sujet, c’est que la régénération, l’accélération, dont les croyants sont les sujets, bien qu’elle implique l’implantation ou la communication d’un nouveau principe ou d’une nouvelle forme de vie, n’a pas d’effet immédiat et entier délivrance de l’âme de tout péché. Un homme ressuscité d’entre les morts peut être et rester longtemps dans un état très faible, malade et souffrant. Ainsi l’âme, par nature, morte dans le péché, peut être vivifiés avec Christ, et ne pas être rendus parfaits par là. Le principe de vie peut être très faible, il peut y avoir dans l’âme beaucoup de choses qui ne sont pas en accord avec sa nature, et le conflit entre l’ancienne et la nouvelle vie peut être prolongé et douloureux. C’est peut-être le cas non seulement dans toute l’expérience ordinaire du peuple de Dieu. C’est là que se trouve l’une des différences caractéristiques et profondes entre les systèmes de doctrine et de religion romains et protestants. Selon le système romain, il ne reste rien de la nature du péché dans l’âme après la régénération, comme cela s’effectue dans le baptême. C’est de là que la théologie de l’Église de Rome déduit sa doctrine du mérite des bonnes œuvres ; de perfection ; des œuvres de surérogation ; et, indirectement, celles de l’absolution et des indulgences. Mais selon les Écritures, l’expérience universelle des chrétiens et les preuves indéniables de l’histoire, la régénération n’enlève pas tout péché. La Bible est remplie du récit des conflits intérieurs des plus éminents serviteurs de Dieu, avec leurs chutes, leurs rétrogrades, leurs repentirs et leurs lamentations sur leurs faiblesses continues. Et non seulement cela, mais la nature du conflit entre le bien et le mal dans le cœur du renouvelé est entièrement décrite, les principes en conflit sont distingués et désignés, et la nécessité, les difficultés et les périls de la lutte, ainsi que la méthode pour la soutenir correctement, sont exposés à plusieurs reprises et en détail. Dans le septième chapitre de l’épître aux Romains, nous avons un récit détaillé de ce conflit décrite par l’Apôtre comme tirée de sa propre expérience. Et la même chose se produit dans Galates v. 16, 17. « Je vous dis donc : Marchez selon l'Esprit; et vous n'accomplirez point les convoitises de la chair. Car la chair convoite contre l'esprit, et l'esprit contre la chair; et ces choses sont opposées l'une à l'autre; tellement que vous ne faites point les choses que vous voudriez.» Encore une fois, dans Éphésiens vi. 10 -18, « Au reste, mes frères, fortifiez-vous en Notre-Seigneur, et en la puissance de sa force. Soyez revêtus de toutes les armes de Dieu, afin que vous puissiez résister aux embûches du diable. Car nous n'avons point à combattre contre le sang et la chair; mais contre les principautés, contre les puissances, contre les seigneurs du monde, gouverneurs des ténèbres de ce siècle, contre les malices spirituelles qui sont dans les airs. C'est pourquoi prenez toutes les armes de Dieu, afin que vous puissiez résister au mauvais jour, et après avoir tout surmonté, demeurer fermes. Soyez donc fermes, ayant vos reins ceints de la vérité, et étant revêtus de la cuirasse de la justice; et ayant les pieds chaussés de la préparation de l'Evangile de paix; prenant sur tout le bouclier de la foi, par lequel vous puissiez éteindre tous les dards enflammés du malin. Prenez aussi le casque du salut, et l'épée de l'Esprit, qui est la parole de Dieu : priant en votre esprit par toutes sortes de prières et de supplications, en tout temps; veillant à cela avec une entière persévérance, et priant pour tous les saints; ».
L’expérience des chrétiens de tous les temps et de toutes les parties de l’Église concorde avec les enseignements des Écritures. Leurs écrits sont remplis du récit de leurs luttes contre les restes du péché dans leurs propres cœurs ; avec des confessions ; avec des prières pour l’aide divine ; et avec des désirs ardents après la victoire finale sur tout mal, qui ne peut être expérimenté qu’au ciel. Les grandes lumières de l’Église latine, les Augustins, les Bernard et les Fénélon, étaient des croyants humbles, pénitents, luttant jusqu’à la fin, et ne se considéraient pas comme ayant déjà atteint, ou comme étant déjà parfaits. Et ce que la Bible et l’expérience chrétienne prouvent être vrai, l’histoire le met hors de contestation. Ou bien la régénération n’existe pas dans le monde, ou bien la régénération n’enlève pas tout péché à ceux qui en sont les sujets.
Se dépouiller de l’Ancien et revêtir l’Homme Nouveau.
Telle étant le fondement des représentations scripturaires concernant la sanctification, sa nature est ainsi déterminée. Comme tous les hommes, depuis la chute, sont en état de péché, non seulement pécheurs parce qu’ils se sont rendus coupables d’actes spécifiques de transgression, mais aussi parce qu’ils sont dépravés, leur nature est pervertie et corrompue, la régénération est l’infusion d’un nouveau principe de vie dans cette nature corrompue. Il s’agit d’un levain introduit pour diffuser progressivement son influence dans toute la masse. La sanctification consiste donc en deux choses : premièrement, d’ôter de plus en plus les principes du mal qui infectent encore notre nature, et d’en détruire la puissance ; et deuxièmement, la croissance du principe de vie spirituelle jusqu’à ce qu’il contrôle les pensées, les sentiments et les actes, et qu’il rende l’âme conforme à l’image du Christ.
Paul détaille sa propre expérience dans Romains vii. 7 à 25.
Les passages classiques du Nouveau Testament sur la nature de cette œuvre sont les suivants : — Romains VII. 7-25. Ce n’est pas ici le lieu d’entrer dans la discussion sur la question de savoir si l’apôtre dans ce passage détaille ou non sa propre expérience. C’est l’interprétation que lui en donnent les Augustins de tous les temps. Qu’il suffise de dire ici que le « onus probandi » repose sur ceux qui adoptent le point de vue opposé au passage. Il faut une preuve très forte que l’apôtre ne parle pas de lui-même et ne donne pas sa propre expérience de chrétien, lorsque...
1. Son but, dans toute la discussion des sixième et septième chapitres, est de prouver que la loi, de même qu’elle ne peut pas justifier, ne peut pas non plus sanctifier ; de même qu’elle ne peut pas délivrer de la faute, elle ne peut pas non plus nous libérer de la puissance du péché. Ce n’est pas la faute de la loi, car elle est spirituelle, sainte, juste et bonne. Elle se recommande à la raison et à la conscience comme étant exactement ce qu’elle doit être ; n’exigeant ni plus ni moins que ce qu’il est léger, et ne menaçant d’aucune peine que l’Avant de se conformer à ses exigences ne mérite justement. Quel est l’effet de la présentation objective de la norme idéale de perfection morale à laquelle nous sommes tenus d’être conformés sous peine de mort ? L’Apôtre nous dit que les effets sont, (a) un grand accroissement de la connaissance. Il n’avait pas connu la luxure ; si la loi n’avait pas dit : Tu ne convoiteras point. (b.) Un sentiment de pollution morale, et par conséquent de honte et de dégoût de soi, (c) Un sentiment de culpabilité, ou de juste exposition à la peine de la loi dont toute notre vie est une transgression continue. (d.) Un sentiment d’impuissance totale. La norme, bien que sainte, juste et bonne, est trop élevée. Nous savons que nous ne pourrons jamais nous y conformer par nous-mêmes ; Nous ne pouvons pas non plus satisfaire les transgressions passées. (e.) Le résultat de tout cela est le désespoir. La loi tue. Elle détruit non seulement toute complaisance envers soi-même, mais aussi tout espoir de pouvoir jamais réaliser notre propre salut. (f.) Et c’est ainsi qu’elle conduit le pécheur à chercher le salut hors de lui-même ; c’est-à-dire pour la délivrance de la puissance, ainsi que de la culpabilité du péché. La loi est un maître d’école pour nous conduire à Christ. Pourquoi l’Apôtre n’a-t-il pas pu dire tout cela de lui-même ? Il n’y a rien ici d’incompatible avec le caractère ou l’expérience d’un vrai croyant. Il est aussi vrai pour le chrétien qu’il n’est pas sanctifié par la persuasion morale, par la présentation objective de la vérité, que pour le pécheur non renouvelé, qu’il n’est pas régénéré par de telles influences extérieures. Il est donc parfaitement pertinent pour l’objectif de l’apôtre qu’il détaille sa propre expérience que la sanctification ne peut être effectuée par la loi.
2. Mais en second lieu, il utilise la première personne du singulier tout au long. Il dit : « Je n’avais pas connu le péché », « Je suis mort », « J’ai trouvé que le commandement qui avait été ordonné à la vie était pour la mort », « Je consens à la loi qu’elle est bonne », « Je prends plaisir à la loi de Dieu selon l’homme intérieur, mais je vois une autre loi dans mes membres », etc., etc. Nous sommes obligés de comprendre que l’apôtre parle de lui-même dans l’usage d’un tel langage, à moins qu’il n’y ait quelque chose dans le contexte, ou dans la nature de ce qui est dit, qui rende impossible la référence à lui. Il a été démontré, mais que le contexte favorise, s’il n’exige pas absolument la référence de ce qui est dit à l’Apôtre lui-même. Et qu’il n’y ait rien dans l’expérience détaillée ici qui soit incompatible avec l’expérience des vrais enfants de Dieu, c’est évident par le fait que la même humilité, le même sentiment de culpabilité, la même conscience du péché intérieur, la même conviction d’impuissance, exprimée ici, se retrouvent dans toutes les parties pénitentielles de l’Écriture. Job, David, Ésaïe et Néhémie font les mêmes confessions et les mêmes lamentations que l’apôtre fait ici. Il en va de même pour les croyants depuis la venue du Christ. Il y a aucun d’entre eux, pas même le plus saint, n’est contraint de parler de lui-même comme Paul parle ici, à moins qu’il ne choisisse de donner au langage de l’Apôtre un sens qu’il n’a jamais eu l’intention d’exprimer.
3. Bien que le passage ne contienne rien d’incompatible avec l’expérience des vrais croyants, il est incompatible avec l’expérience des hommes non renouvelés. Ce ne sont pas les sujets du conflit intérieur décrit ici. Il y a en eux en effet souvent une lutte longue et douloureuse entre la raison et la conscience d’un côté, et la passion mauvaise de l’autre. Mais il n’y a pas, dans les non-renouvelés, ce renoncement absolu à soi-même, cette recherche de secours à Dieu seul en Christ seul, et cette joie dans la loi de Dieu, dont parle ici l’apôtre.
Ce qu’enseigne Romains VII, 7-25 .
En supposant donc que nous ayons dans ce chapitre le récit de l’expérience d’un vrai chrétien et même d’un chrétien avancé, nous apprenons qu’il y a en chaque chrétien un mélange de bien et de mal ; que la corruption originelle de la nature n’est pas entièrement éliminée par la régénération ; que, bien que le croyant soit devenu une nouvelle créature, qu’il soit transporté du royaume des ténèbres dans le royaume du Fils bien-aimé de Dieu, il n’est que partiellement sanctifié ; que son égoïsme, son orgueil, son mécontentement, sa mondanité, s’attachent encore à lui et le tourmentent ; qu’ils l’empêchent effectivement de « faire ce qu’il veut », qu’ils l’empêchent de vivre sans péché, qu’ils empêchent ses rapports avec Dieu d’être aussi intimes et ininterrompus qu’il pourrait le désirer et qu’il le désire. Il s’aperçoit non seulement qu’il est souvent, même tous les jours, vaincu au point de pécher en pensée, en parole et en acte, mais aussi que sa foi, son amour, son zèle et sa dévotion ne sont jamais de nature à satisfaire sa propre conscience ; encore moins peuvent-ils satisfaire Dieu. Il est donc quotidiennement appelé à se confesser, à se repentir et à prier pour le pardon. L’Apôtre désigne ces principes contradictoires qu’il a trouvés en lui-même, l’unique, le péché intérieur ; « le péché qui habite en moi ; » ou la « loi dans mes membres » ; « la loi du péché », « l’esprit », « la loi de mon esprit », « l’homme intérieur ». Son moi intérieur, l’Ego, était tantôt contrôlé par l’un, tantôt par l’autre.
Nous apprenons, en outre, que l’on résiste à la domination du mauvais principe, que la soumission à celui-ci est considérée comme une servitude odieuse, que le bon principe est dans l’ensemble victorieux, et que, par le Christ, il sera finalement complètement triomphant. La sanctification consiste donc, selon cette représentation, dans le triomphe graduel de la nouvelle nature implantée dans la régénération sur le mal qui subsiste encore après le renouvellement du cœur. En d’autres termes, comme il est exprimé ailleurs, c’est mourir au péché et vivre pour la justice. (1 Pet. ii. 24.)
Un autre passage de la même importance est Galates v. 16-26 : « Je vous dis donc : Marchez selon l'Esprit; et vous n'accomplirez point les convoitises de la chair. Car la chair convoite contre l'esprit, et l'esprit contre la chair; et ces choses sont opposées l'une à l'autre; tellement que vous ne faites point les choses que vous voudriez. Or, si vous êtes conduits par l'Esprit, vous n'êtes point sous la loi. Car les œuvres de la chair sont évidentes, lesquelles sont l'adultère, la fornication, la souillure, l'impudicité, l'idolâtrie, l'empoisonnement, les inimitiés, les querelles, les jalousies, les colères, les disputes, les divisions, les sectes, les envies, les meurtres, les ivrogneries, les gourmandises, et les choses semblables à celles-là; au sujet desquelles je vous prédis, comme je vous l'ai déjà dit, que ceux qui commettent de telles choses, n'hériteront point le royaume de Dieu. Mais le fruit de l'Esprit est la charité, la joie, la paix, un esprit patient, la bonté, la bénéficence, la fidélité, la douceur, la tempérance. La loi ne condamne point de telles choses. Or, ceux qui sont de Christ, ont crucifié la chair avec ses affections et ses convoitises. Si nous vivons par l'Esprit, conduisons-nous aussi par l'Esprit. Ne désirons point la vaine gloire, en nous provoquant l'un l'autre, et en nous portant envie l'un à l'autre. » etc., etc. Les Écritures enseignent que l’Esprit de Dieu habite dans son peuple, non seulement collectivement comme l’Église, mais individuellement dans chaque croyant, de sorte que de chaque chrétien, on peut dire, il est un temple du Saint-Esprit. On dit que Dieu habite partout où il manifeste sa présence de façon permanente, que ce soit comme autrefois dans le temple, ou dans le cœur de son peuple, dans l’Église ou au ciel. Et comme l’Esprit habite dans les croyants, Il manifeste là Sa puissance vivifiante et dominante, et Il est en eux le principe, ou la source, ou l’influence dominante qui détermine leur vie intérieure et extérieure.
Par la chair, dans les parties doctrinales de l’Écriture, il n’y a jamais, à moins que le mot ne soit limité par le contexte, signifiait simplement notre nature sensuelle, mais notre nature déchue , c’est-à-dire notre nature telle qu’elle est en elle-même, en dehors de l’Esprit de Dieu. Comme le dit Notre-Seigneur (Jean, III, 6) : « Ce qui est né de la chair, est chair; et ce qui est né de l'Esprit, est esprit.» Tels sont donc les principes qui « sont contraires l’un à l’autre ». Aucun homme ne peut agir indépendamment de l’un et de l’autre. Il doit obéir à l’un ou à l’autre. Il peut tantôt obéir à l’un, tantôt à l’autre ; mais l’un ou l’autre doit prévaloir. L’Apôtre dit des croyants qu’ils ont crucifié la chair avec ses affections et ses convoitises. Ils ont renoncé à l’autorité du mauvais principe ; ils ne s’y soumettent pas volontairement, ni dans un but déterminé, ni d’habitude. Ils luttent contre elle, et non seulement ils s’y emploient, mais ils crucifie-le, même s’il peut mourir d’une mort longue et douloureuse.
Dans Éphésiens iv. 22-24, il nous est dit de « savoir, que vous dépouilliez le vieil homme, quant à la conversation précédente, lequel se corrompt par les convoitises qui séduisent; et que vous soyez renouvelés dans l'esprit de votre entendement; et que vous soyez revêtus du nouvel homme, créé selon Dieu, en justice et en vraie sainteté.» Par le vieil homme doit être compris l’ancien moi avec tous les maux appartenant à son état naturel. Cela devait être mis de côté comme un vêtement usé et souillé, et un nouveau moi pur, l’homme nouveau, devait prendre sa place. Ce changement, bien qu’exprimé dans une figure empruntée à un changement de vêtement, était un profond changement intérieur produit par un processus de création, par lequel l’âme est façonnée à l’image de Dieu dans la justice et la sainteté. C’est un renouvellement de l’Esprit, c’est-à-dire de la vie intérieure de l’esprit, ou comme Meyer et Ellicott, les meilleurs commentateurs modernes, interprètent tous deux l’expression : « Par l’Esprit » (le Saint-Esprit) demeurant dans l’esprit. Il s’agit d’une transformation à laquelle les croyants sont exhortés à coopérer ; pour lequel ils doivent travailler, et qui est donc un travail de longue haleine. La sanctification, par conséquent, selon cette représentation, consiste à éliminer les maux qui nous appartiennent dans notre condition naturelle, et à être rendus de plus en plus conformes à l’image de Dieu par l’influence gracieuse de l’Esprit de Dieu qui habite en nous.
Cependant, ce n’est pas seulement dans des passages tels que ceux cités ci-dessus que la nature de la sanctification est exposée. La Bible est pleine d’exhortations et de commandements adressés au peuple de Dieu, à ceux qui sont reconnus et supposés régénérés, exigeant d’une part qu’ils résistent à leurs mauvaises passions et à leurs penchants, qu’ils mettent de côté toute méchanceté, toute colère, tout orgueil et toute jalousie ; et de l’autre, cultiver toutes les grâces de l’Esprit, la foi, l’amour, l’espérance, la longanimité, la douceur, l’humilité d’esprit et la bonté fraternelle. En même temps, il leur est rappelé que c’est Dieu qui opère en eux à la fois à vouloir et à faire, et que, par conséquent, ils doivent constamment rechercher son aide et dépendre de son assistance.
Il résulte de cette conception du sujet que la sanctification n’est pas seulement, comme nous l’avons déjà prouvé, une œuvre surnaturelle, mais aussi qu’elle ne consiste pas exclusivement en une série d’actes d’un genre nouveau. C’est le fait de rendre l’arbre bon, afin que le fruit soit bon. Il s’agit d’un changement essentiel de caractère. Comme la régénération n’est pas un acte du sujet de l’œuvre, mais dans le langage de la Bible une nouvelle naissance, une nouvelle création, une vivification ou la communication d’une vie nouvelle, et dans le langage de l’ancienne Église latine, l’infusion de nouvelles habitudes de grâce ; Ainsi, la sanctification, dans sa nature essentielle, n’est pas des actes saints, mais un tel changement dans l’état de l’âme, que les actes pécheurs deviennent plus rares, et les actes saints de plus en plus habituels et dominateurs. Ce point de vue seul est compatible avec les représentations scripturaires et avec le récit donné dans la Bible de la manière dont ce changement radical de caractère est opéré et consommé.
§ 3. La méthode de sanctification.
Il a déjà été démontré que, bien que la sanctification n’exclue pas toute coopération de la part de ses sujets, mais qu’elle exige au contraire un effort inlassable et acharné, elle n’en est pas moins l’œuvre de Dieu. Elle n’est pas menée comme un simple processus de culture morale par des moyens moraux ; elle est aussi véritablement surnaturelle dans sa méthode que dans sa nature. Ce que la Bible enseigne en réponse à la question : Comment une âme spirituellement morte par nature, vivifiée par la puissante puissance de Dieu, est graduellement transformée à l’image de Christ, est essentiellement la suivante :
L’Âme est amenée à exercer la Foi.
1. Elle est amenée à exercer la foi au Seigneur Jésus-Christ, à le recevoir comme son Sauveur, en s’engageant envers lui pour être délivrée par son mérite et sa grâce de la culpabilité et de la puissance du péché. C’est le premier pas, et il assure tout le reste, non pas à cause de sa vertu ou de son efficacité inhérente, mais parce que, selon l’alliance de grâce, ou plan de salut, que Dieu a révélée et qu’Il s’est engagé à accomplir, Il devient lié par sa promesse d’accomplir le salut complet du péché de tous ceux qui croient.
L’effet de l’union avec le Christ.
2. Par cet acte de foi, l’âme s’unit au Christ. Nous sommes en Lui par la foi. Les conséquences de cette union sont, (a) la participation à ses mérites. Sa justice parfaite, conforme aux stipulations de l’alliance de la rédemption, est imputée au croyant. Il est donc justifié. Il est introduit dans un état de faveur ou de grâce, et se réjouit dans l’espérance de la gloire de Dieu. (Rom. v. 1-3.) C’est, comme l’enseigne la Bible, la condition préliminaire essentielle de la sanctification. Alors que sous la loi, nous sommes sous la malédiction. Tandis que nous sommes sous la malédiction, nous sommes les ennemis de Dieu et nous produisons du fruit jusqu’à la mort. Ce n’est que lorsque nous sommes délivrés de la loi par le corps ou la mort de Christ, et unis à Lui, que nous portons du fruit pour Dieu. (Rom. vi. 8 ; vii. 4-6) C’est pourquoi, dit l’Apôtre, le péché ne régnera pas sur nous, parce que nous ne sommes pas sous la loi. (Rom. vi. 14.) La délivrance de la loi est la condition nécessaire de la délivrance du péché. Toutes les relations du croyant sont ainsi changées. Il est enlevé du royaume des ténèbres et introduit dans la liberté glorieuse des fils de Dieu. Au lieu d’être un paria, un esclave sous la condamnation, il devient un enfant de Dieu, assuré de son amour, de sa tendresse et de sa sollicitude. Il peut venir à Lui avec confiance. Il est soumis à toutes les influences qui, dans leur plein effet, constituent le ciel. Il devient donc une nouvelle créature. Il est passé de la mort à la vie ; des ténèbres à la lumière, de l’enfer (le royaume de Satan) au ciel. Il est assis avec Christ dans les lieux célestes. (Éph. ii. 6.) (b.) Une autre conséquence de l’union avec Christ réalisée par la foi, c’est le séjour de l’Esprit. Christ nous a rachetés de la malédiction de la loi en devenant malédiction pour nous, afin que nous puissions recevoir la promesse du Saint-Esprit. (Gal. iii. 13, 14.) Il n’était pas conforme aux perfections ou aux desseins de Dieu qu’il fût donné à l’Esprit d’habiter avec ses influences salvatrices dans les enfants apostats des hommes, jusqu’à ce que Christ ait fait une pleine satisfaction pour les péchés du monde. Mais comme il n’y a pas de distinction de temps pour Dieu, Christ a été mis à mort dès la fondation du monde, et sa mort a été pleinement utile au salut de ceux qui ont vécu auparavant, comme à celui de ceux qui ont vécu depuis sa venue dans la chair. (Rom. iii. 25, 26 ; Héb. ix. 15.) L’Esprit a été donné au peuple de Dieu dès le commencement. Or, comme Notre-Seigneur dit (Jean, X, chap. 10) qu’il est venu dans le monde non seulement pour que les hommes aient la vie, mais pour qu’ils l’aient en abondance, l’effusion ou la communication abondante de l’Esprit est toujours représentée comme la grande caractéristique de l’avènement du Messie. (Joël, ii. 28, 29 ; Actes ii. 16-21 ; Jean vii. 38, 39.) C’est pourquoi, dans son dernier discours à ses disciples, Notre-Seigneur leur dit qu’il était opportun pour eux qu’il s’en allât, car « si je ne m’en vais pas, le Consolateur ( le Παράκλητο ?, le secours) ne viendra pas à vous ; mais si je m’en vais, je vous l’enverrai. (Jean xvi. 7.) Il devait remplacer le Christ quant à sa présence visible, poursuivre son œuvre, rassembler son peuple, le transformer à l’image du Christ et lui communiquer tous les bienfaits de sa rédemption. Là où est l’Esprit, là est le Christ ; de sorte que, l’Esprit étant avec nous, Christ est avec nous ; et si l’Esprit habite en nous, Christ habite en nous. (Rom. viii. 9-11.) Par conséquent, en prenant part au Saint-Esprit, les croyants participent de la vie du Christ. L’Esprit Lui a été donné sans mesure, et de Lui coule sur tous Ses membres. Cette participation du croyant à la vie du Christ, afin que chaque croyant puisse dire avec l’Apôtre : « Je vis ; mais ce n’est pas moi, c’est Christ qui vit en moi » (Gal. 20), est mis en évidence dans la Parole de Dieu. (Rom. vi. 5 ; vii. 4 ; Jean xiv. 19 ; Col. iii. 3, 4.) Les deux grandes illustrations de cette vérité sont la vigne et le corps humain. Le premier est longuement présenté dans Jean xv. 1-8 ; ce dernier dans 1 Corinthiens xii. 11-27 ; Romains xii. 5 ; Éphésiens i. 22, 23 ; iv. 15 et 16 ; v. 30 ; Colossiens i. 18 ; ii. 19 ; et souvent ailleurs. Comme la vie de la vigne se répand dans tous les sarments, les soutenant et les rendant féconds ; et de même que la vie de la tête se répand à travers tous les membres du corps, ce qui en fait un et communique la vie à tous, de même la vie du Christ se répand à travers tous les membres de son corps mystique, faisant d’eux un seul corps en Lui ; ayant une vie commune avec leur tête commune. Cette idée surgit spécialement dans Éphésiens iv. 15, 16, où il est dit que c’est à partir du Christ que tout le corps convenablement uni, par l’influence spirituelle accordée à chaque partie selon sa mesure, fait croître l’amour. Il est vrai que cela s’applique à l’Église dans son ensemble. Mais ce qui est dit du corps mystique du Christ dans son ensemble est vrai de tous ses membres séparément. Il est le prophète, le prêtre et le roi de l’Église ; mais il est aussi le prophète, le sacrificateur et le roi de tout croyant. Notre relation avec Lui est individuelle et personnelle. L’Église dans son ensemble est le temple de Dieu ; mais c’est aussi le cas de chaque croyant. (1 Corinthiens iii. 16 ; vi. 19.) L’Église est l’épouse du Christ, mais chaque croyant est l’objet de cet amour tendre et particulier qui s’exprime dans l’utilisation de cette métaphore. Le dernier verset de l’hymne de Paul Gerhardt, « Ein Laramlein geht und trâgt die Schuld », tout vrai chrétien peut l’adopter comme expression de ses propres espérances :
« Wann endlich ich soil treten ein
In deines Reiches Freud.fr,
So soli diess Blut mein Purpur seyn, Ich will mich darein kleiden ;
Es soil seyn meines Hauptes Kron'
In welcher ich will vor den Thron
Des hochsten Vaters gehen,
Und dir, dem er mich anvertraut,
Als eine wohlgeschmiickte Brant,
An deiner Seiten stehen.
L’œuvre intérieure de l’Esprit.
3. Le séjour de l’Esprit Saint, ainsi assuré par l’union avec le Christ, devient la source d’une nouvelle vie spirituelle, dont la puissance augmente constamment jusqu’à ce que tout ce qui ne lui est pas agréable soit expulsé et que l’âme soit parfaitement transformée à l’image du Christ. C’est l’office de l’Esprit d’éclairer l’esprit ; ou, comme Paul l’exprime, « pour éclairer les yeux de l’entendement » (Éph. i. 18), afin que nous connaissions les choses qui nous ont été données gratuitement par Dieu (1 Cor. ii. 12) ; c’est-à-dire les choses que Dieu a révélées, ou, comme on les appelle au v. 14, « les choses de l’Esprit de Dieu ». Ces choses, que l’homme naturel ne peut connaître, l’Esprit permet au croyant de les discerner, c’est-à-dire de les appréhender dans leur vérité et leur excellence, et d’en faire ainsi l’expérience de la puissance. L’Esprit, nous enseigne-t-on, ouvre surtout les yeux pour voir la gloire de Christ, pour voir qu’Il est Dieu manifesté dans la chair ; de discerner non seulement ses perfections divines, mais son amour pour nous, et son aptitude à tous égards comme notre Sauveur, afin que ceux qui ne l’ont pas vu, mais qui croient en lui, se réjouissent en lui avec une joie ineffable et pleine de gloire. Cette appréhension du Christ est transformatrice ; l’âme est ainsi changée à son image, de gloire en gloire par l’Esprit du Seigneur. C’est cette révélation intérieure du Christ par laquelle, alors qu’il se rendait à Damas, Paul fut instantanément converti d’un blasphémateur en un adorateur et un serviteur du Seigneur Jésus qui se sacrifiait.
Cependant, il n’y a pas qu’un seul objet que l’œil ouvert du croyant est capable de discerner. L’Esprit lui permet de voir la gloire de Dieu telle qu’elle se révèle dans ses œuvres et dans sa parole ; la sainteté et la spiritualité de la loi ; l’excès de péché ; sa propre culpabilité, sa pollution et son impuissance ; la longueur et la largeur, la hauteur et la profondeur de l’économie de la rédemption ; et la réalité, la gloire et l’importance infinie des choses invisibles et éternelles. L’âme est ainsi élevée au-dessus du monde. Il vit dans une sphère supérieure. Il devient de plus en plus céleste dans son caractère et ses désirs. Toutes les grandes doctrines de la Bible concernant Dieu, Christ et les choses spirituelles et éternelles sont révélées par cet enseignement intérieur de l’Esprit, de telle sorte qu’elles sont non seulement correctement discernées, mais qu’elles exercent, dans une certaine mesure, leur influence sur le cœur et sur la vie. C’est ainsi que la prière du Christ (Jean, XVII, chap. 17) : « Sanctifie-les par ta vérité », est exaucée dans l’expérience de son peuple.
Dieu appelle les Grâces de son Peuple à l’Exercice.
4. L’œuvre de sanctification est accomplie par le fait que Dieu donne constamment l’occasion d’exercer toutes les grâces de l’Esprit. La soumission, la confiance, l’abnégation, la patience et la douceur, ainsi que la foi, l’espérance et l’amour, sont appelés ou mis à l’épreuve, plus ou moins efficacement chaque jour que le croyant passe sur la terre. Et par cet exercice constant, il grandit dans la grâce et dans la connaissance de notre Seigneur et Sauveur Jésus-Christ. Mais c’est principalement en appelant son peuple à travailler et à souffrir pour l’avancement du royaume du Rédempteur et pour le bien de ses semblables, que cette discipline salutaire s’accomplit. Les meilleurs chrétiens sont en général ceux qui, non seulement par l’activité inquiète d’une disposition naturelle, mais par amour pour Christ et zèle pour sa gloire, travaillent le plus et souffrent le plus à son service.
L’Église et les sacrements comme moyens de grâce.
5. L’un des grands objectifs de l’établissement de l’Église sur la terre, en tant que communion des saints, est l’édification du peuple de Dieu. La vie intellectuelle et sociale de l’homme ne se développe pas dans l’isolement et la solitude. Ce n’est que dans le contact et la collision avec ses semblables que ses pouvoirs sont appelés à s’exercer et que ses vertus sociales sont cultivées. C’est ainsi aussi par la vie ecclésiastique des croyants, par la communion dans le culte et le service de Dieu, et par leurs bons offices mutuels et leur communion fraternelle, que se développe la vie spirituelle de l’âme. C’est pourquoi l’Apôtre dit : « Considérons-nous les uns les autres, pour nous exciter à l’amour et aux bonnes œuvres, sans renoncer à nous assembler, comme le font les uns ; mais en s’exhortant les uns les autres ; et d’autant plus que vous voyez le jour approcher. (Héb. x. 24 et 25.)
6. L’Esprit rend les ordonnances de Dieu, la parole, les sacrements et la prière, moyens efficaces de promouvoir la sanctification de son peuple et d’assurer son salut ultime. Ceux-ci, cependant, doivent être examinés plus en détail dans la suite.
7. À cet égard, nous ne devons ni négliger ni sous-estimer l’exercice constant de la fonction royale du Christ. Non seulement il règne sur son peuple, mais il le soumet à lui-même, le gouverne et le défend, et retient et conquiert tous ses ennemis et les leurs. Ces ennemis sont à la fois intérieurs et extérieurs, à la fois visibles et invisibles ; Ils sont le monde, la chair et le diable. La force du croyant dans la lutte contre ces ennemis n’est pas la sienne. Il n’est fort que dans le Seigneur et dans la puissance de sa puissance. (Éph. vi. 10.) Les armes, offensives et défensives, sont fournies par Lui, et la disposition et l’habileté à s’en servir sont ses dons qu’il faut rechercher en priant sans cesse. C’est une aide toujours présente. Chaque fois que le chrétien sent sa faiblesse dans la résistance à la tentation ou dans l’accomplissement de son devoir, il se tourne vers le Christ et lui demande de l’aide. Et tous ceux qui cherchent trouvent. Lorsque nous échouons, c’est soit par confiance en nous-mêmes, soit parce que nous négligeons d’invoquer notre Roi toujours présent et tout-puissant, qui est toujours prêt à protéger et à délivrer ceux qui mettent leur confiance en Lui. Mais il y a des dangers que nous n’appréhendons pas, des ennemis que nous ne voyons pas, et pour lesquels nous deviendrions une proie facile, si ce n’était la vigilance de Celui qui est venu dans le monde pour détruire les œuvres du diable et écraser Satan sous nos pieds. Le chrétien court sa course « en regardant à Jésus » ; la vie qu’il mène, il la vit par la foi au Fils de Dieu ; c’est par l’adoration constante du Christ ; par l’exercice constant de l’amour envers Lui ; par des efforts constants pour faire sa volonté ; et c’est en se tournant constamment vers Lui pour obtenir la grâce, la protection et l’aide, qu’il vainc le péché et qu’il atteint finalement le prix de l’appel céleste de Dieu.
§ 4. Les fruits de la sanctification, ou œuvres de Dieu.
Les fruits de la sanctification sont les bonnes œuvres. Notre-Seigneur dit : « Un bon arbre ne produit pas de fruits corrompus ; et un arbre corrompu ne produit pas de bons fruits, car chaque arbre se reconnaît à son propre fruit, car les hommes ne cueillent pas de figues d’épines, et les raisins ne cueillent pas de ronces. (Luc, VI, 43, 44.) Par bonnes œuvres, on entend non seulement les exercices intérieurs de la vie religieuse, mais aussi les actes extérieurs, tels qu’ils peuvent être vus et appréciés par les autres.
Il y a trois sens dans lesquels les œuvres peuvent être appelées bonnes :
1. Quand, quant à leur matière, ils sont ce que la loi prescrit. En ce sens, même les païens accomplissent de bonnes œuvres ; comme le dit l’Apôtre, Romains ii. 14 : « Les païens... faites par nature ce qui est contenu dans la loi. C’est-à-dire qu’ils accomplissent des actes de justice et de miséricorde. Aucun homme sur la terre n’est assez méchant pour ne jamais, dans ce sens du terme, être l’auteur de quelques bonnes œuvres. C’est ce que les théologiens appellent la bonté civile, dont la sphère est les rapports sociaux des hommes.
2. En second lieu, on entend par bonnes œuvres des œuvres qui, tant par leur matière que par le dessein et les motifs de l’agent, sont ce que la loi exige. En d’autres termes, une œuvre est bonne, quand il n’y a rien que la loi condamne ni dans l’agent, ni dans l’acte. En ce sens, même les œuvres du peuple très saint de Dieu ne sont pas bonnes. Aucun homme n’est jamais, depuis la chute, dans cette vie, dans un état intérieur tel qu’il puisse se tenir devant Dieu et être accepté sur la base de ce qu’il est ou de ce qu’il fait. Toutes nos vertus sont comme des haillons souillés. (Es. Ixiv. 6.) Paul a trouvé jusqu’à la fin une loi du péché dans ses membres. Il gémissait sous un corps de mort. Dans l’une de ses dernières épîtres, il dit qu’il n’avait pas atteint ou n’était pas déjà parfait, et que tous les chrétiens sont tenus de prier quotidiennement pour le pardon des péchés. Ce que les Écritures enseignent de l’imperfection des meilleures œuvres du croyant est confirmé par le témoignage irrépressible de la conscience. Peu importe ce que les lèvres peuvent dire, la conscience de chaque homme lui dit qu’il est toujours pécheur, qu’il n’est jamais exempt de souillure morale aux yeux d’un Dieu infiniment saint. À ce sujet, la Forme de la concorde1 dit : « Lex Dei credentibus bona opera ad eum modum præscribit, ut simul, tanquam in speculo, nobis commonstret, ea omnia in nobis in hac vita adhuc imperfecta et impura esse ; » et 2 « Credentes in hac vita non perfecte, completive vel consummative (ut veteres locuti sunt) renovantur. Et quamvis ipsorum peccata Christi obedientia absolutissima contecta sint, ut credentibus non ad damnationem imputentur, et per Spiritum Sanctum veteris Adami mortificatio et renovatio in spiritu mentis eorum inchoata sit : tamen vetus Adam in ipsa Natura, omnibusque illius interioribus et exterioribus viribus adhuc semper inhæret. » Calvin 1 dit : « Seligat ex tota sua vita sanctus Dei servus, quod in ejus cursu maxime eximium se putabit edidisse, bene revolvat singulas partes : deprehendet procul dubio alicubi quod carnis putredinem sapiat, quando numquam ea est nostra alacritas ad bene agendum quæ esse debet, sed in cursu retardando multa debilitas. Quanquam non obscuras esse maculas videmus, quibus respersa sint opera sanctorum, fac tamen minutissimos esse nævos duntaxat : sed an oculos Dei nihil offendent, coram quibus ne stellæ quidem puræ sunt ? Habemus, nec unum a sanctis exire opus, quod, si in se censeatur, non mereatur justam opprobrii mercedem. »
1 vi. 21 ; Hase, Libri Symbolic !, 3e édit. Leipzig, 1846, p. 723.
2 vi. 7 ; Ibid., p. 719.
1 /nstitutio, in. xiv. 9 ; édit. Berlin, 1834, partie. à la p. 37.
Doctrine romaine sur les bonnes œuvres.
Contre la doctrine selon laquelle les meilleures œuvres du croyant sont imparfaites, les romanistes sont particulièrement dénonciateurs. Et pour cause. Elle renverse tout leur système, qui est fondé sur le mérite supposé des bonnes œuvres. Si les meilleures œuvres des saints méritent la condamnation, elles ne peuvent mériter de récompense. Leur argument à ce sujet est que, si la doctrine protestante qui déclare imparfaites les meilleures œuvres du croyant est vraie ; alors l’accomplissement de la loi est impossible ; mais s’il en est ainsi, alors la loi n’est pas obligatoire ; car Dieu ne commande pas les impossibilités. À cela, il peut être 1° que l’objection est incompatible avec la doctrine des romanistes eux-mêmes. Ils enseignent que l’homme, dans son état naturel depuis la chute, est incapable de faire quoi que ce soit de bon aux yeux de Dieu, jusqu’à ce qu’il reçoive la grâce de Dieu communiquée dans le baptême. Selon le principe sur lequel l’objection est fondée, la loi ne lie pas les non-baptisés. Et deuxièmement, l’objection suppose le principe fondamental du pélagianisme, à savoir que la capacité limite l’obligation ; un principe qui, dans le domaine de la morale, est contraire à l’Écriture, à la conscience et au jugement commun de l’humanité. On ne peut pas exiger de nous que nous fassions ce qui est impossible à cause de la limitation de notre la nature en tant que créatures, comme pour créer un monde, ou ressusciter les morts ; mais aimer Dieu parfaitement n’excède pas la puissance de l’homme tel qu’il est sorti des mains de son créateur. Ce n’est pas absolument, mais seulement relativement impossible, c’est-à-dire par rapport à la chose commandée, non pas pour nous, en tant qu’hommes, mais en tant que pécheurs. Quoiqu’il soit essentiel à la doctrine romaine du mérite, des indulgences, des œuvres de surérogation et du purgatoire, que le renouvelé soit capable de satisfaire parfaitement aux exigences de la loi, les romanistes eux-mêmes sont néanmoins forcés d’admettre le contraire. C’est ainsi que Bellarmin dit :1 « Defectus charitatis, quod videlicet non faciamus opera nostra tanto fervore dilectionis, quanto faciemus in patria, defectus quidem est, sed culpa et peccatum non est..... Unde etiam charitas Nostra, quamvis comparata ad charitatem beatorum sit imperfecta, tamen absolute perfecta dici potest. » C’est-à-dire que, bien que notre amour soit en fait imparfait, il peut être appelé parfait. Mais l’appeler parfait, n’altère pas sa nature. Dans le même sens, un autre des principaux théologiens de l’Église romaine, Andradius, dit : « Peccata venalia per se tarn esse minuta et le via, ut non ad versen tnr perfection ! caritatis, nec impedire possint perfectam et absolutam legis obedientiam : utpote quæ non sint ira Dei et condemnatione, sed venia digna, etiamsi Deus cum illis in judicium intret. » 2 C’est-à-dire que les péchés ne sont pas des péchés, parce que les hommes choisissent de les considérer comme insignifiants.
1 De Justificatione, iv. xvii ; Disputationes, édit. Paris, 1608, t. IV, p. 933, b.
2 Voir Chemnitz Examm, De Bonis Operibus, in. édit. Francfort, 1574, t. I, p. 209, a.
Mais si aucune œuvre de l’homme depuis la chute dans cette vie n’est parfaitement bonne, il s’ensuit non seulement qu’il faille renoncer à la doctrine du mérite, mais encore plus évidemment que toutes les œuvres de surérogation sont impossibles. Les romanistes enseignent que le renouvelé peut non seulement satisfaire complètement à toutes les exigences de la loi de Dieu, qui exige que nous l’aimions de tout notre cœur, de tout notre esprit et de toute notre force, et que nous aimions notre prochain comme nous-mêmes ; mais qu’ils peuvent faire plus que ce que la loi exige, et acquérir ainsi plus de mérite qu’ils n’en ont besoin pour leur propre salut, qui peut être mis à la disposition de ceux qui en manquent.
Il est impossible qu’un homme puisse soutenir une telle doctrine, à moins qu’il ne dégrade d’abord la loi de Dieu en restreignant ses exigences à des limites très étroites. Les romanistes représentent notre relation à Dieu comme analogue à la relation d’un citoyen à l’État. Les lois civiles sont limitées à une sphère étroite. Elles ne concernent que nos obligations sociales et politiques. Il est facile à un homme d’être un bon citoyen ; pour remplir parfaitement tout ce que la loi du pays exige. Un tel homme, par amour pour son pays, peut faire beaucoup plus que ce que la loi peut exiger. Il ne peut pas seulement payer hommage à qui le tribut est dû, coutume à qui la coutume, et honneur à qui l’honneur ; Mais il peut aussi consacrer son temps, ses talents, toute sa fortune au service de son pays. Ainsi aussi, selon les romanistes, les hommes peuvent non seulement faire tout ce que la loi de Dieu exige des hommes en tant qu’hommes, mais ils peuvent aussi, par amour, dépasser de beaucoup ses exigences. Ce Möhler représente une grande supériorité de l’éthique romaine sur le système protestant. Celle-ci, selon lui, limite les obligations de l’homme à ses obligations légales, à ce que la justice peut exiger de lui sous peine de châtiment. Tandis que le premier s’élève à la sphère supérieure de l’amour, et représente le croyant rendant cordialement et librement à Dieu ce qui, en toute justice, ne pouvait être exigé de lui. « C’est la nature de l’amour, qui se tient beaucoup, même incommensurablement au-dessus des exigences de la loi, de ne jamais se satisfaire de sa manifestation et de devenir de plus en plus sensible, de sorte que les croyants, qui sont animés de cet amour, apparaissent souvent aux hommes qui se tiennent à un niveau inférieur comme des fanatiques ou des fous. » 1 Mais que se passe-t-il si la loi elle-même est l’amour ? Et si la loi exigeait tout ce que l’amour peut rendre ? Et si l’amour que la loi exige de toute créature raisonnable exige le dévouement de toute l’âme, avec toutes ses forces, à Dieu comme un sacrifice vivant ? Ce n’est qu’en faisant du péché qu’il n’est pas péché ; en enseignant aux hommes qu’ils sont parfaits quand même leur propre cœur les condamne ; ce n’est qu’en abaissant les exigences de la loi qui, étant fondée sur la nature de Dieu, exige nécessairement une parfaite conformité à l’image divine, qu’un homme dans cette vie peut prétendre être parfait, ou être assez fou pour s’imaginer qu’il peut aller au-delà des exigences de la loi et accomplir des œuvres de surérogation.
1 Mohler, Stjmbolik, 6e édit. Mayence, 1843, p. 216.
La distinction que les romanistes font entre les préceptes et les conseils repose sur la même vue basse de la loi divine. Par préceptes, on entend les commandements spécifiques de la loi qui lient tous les hommes, dont l’observance assure une récompense, et la non-observance une punition. Attendu que les conseils ne sont pas des commandements ; elles n’engagent pas la conscience d’un homme, mais sont des recommandations de choses particulièrement agréables à Dieu, auxquelles elles se conforment mérite une récompense beaucoup plus élevée que la simple observance des préceptes. Il y a beaucoup de ces conseils dans la Bible, dont les plus importants sont le célibat, l’obéissance monastique et la pauvreté. 2 Aucun homme n’est tenu de rester célibataire, mais s’il décide volontairement de le faire pour la gloire de Dieu, c’est une grande vertu. Nul n’est tenu de renoncer à l’acquisition de la propriété, mais s’il embrasse volontairement une vie de pauvreté absolue, c’est un grand mérite. Notre Seigneur, cependant, exige tout. Il dit : « Celui qui aime son père ou sa mère plus que moi n’est pas digne de moi, et celui qui aime son fils ou sa fille plus que moi n’est pas digne de moi. » « Celui qui trouvera sa vie la perdra, et celui qui perdra sa vie à cause de moi, la retrouvera. » (Matt. x. 37 et 39.) « Si quelqu’un vient à moi, et ne hait pas son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères, ses sœurs, et sa propre vie, il ne peut pas être mon disciple. » (Luc, xiv. 26.) La loi du Christ exige une dévotion entière envers Lui. Si son service exige qu’un homme reste célibataire, il est tenu de vivre une vie de célibat ; s’il faut qu’il renonce à tous ses biens, qu’il prenne sa croix et qu’il suive le Christ, il est tenu de le faire ; s’il doit donner sa vie pour l’amour de Christ, il est tenu de la donner. Il n’y a pas de plus grand amour que celui-ci, qu’un homme donne son fifre pour ses amis. Rien ne peut aller au-delà. Il ne peut y avoir aucun sacrifice et aucun service qu’un homme puisse faire ou rendre, que le devoir, ou la loi de Christ, accomplisse n’exigez pas quand un tel sacrifice ou un tel service devient nécessaire comme preuve ou fruit de l’amour pour Christ. Il n’y a donc pas de place pour cette distinction entre les conseils et les préceptes, entre ce que la loi exige et ce que l’amour veut rendre. Et c’est pourquoi la doctrine des œuvres de surérogation est complètement anti-chrétienne.
2 Bellarmin , De Membris Ecclesue Militantis, lib. it . de Jfonachis, cap. 7, 8 ; Disputa-tiones, édit. Paris, 1608, t. II, p. 363-365.
Le sens dans lequel les Fruits de l’Esprit chez les Croyants sont appelés Bon.
3. Quoiqu’aucune œuvre du vrai peuple de Dieu, tant qu’il demeure dans ce monde, ne soit absolument parfaite, cependant les exercices intérieurs et les actes extérieurs qui sont les fruits de l’Esprit sont proprement appelés bons, et c’est ainsi qu’ils sont appelés dans l’Écriture. Actes ix. 36, on a dit de Dorcas qu’elle « était pleine de bonnes œuvres ». Éphésiens ii. 10, il est dit que les croyants ont été « créés en Jésus-Christ pour de bonnes œuvres ». 2 Timothée iii. 17, enseigne que l’homme de Dieu doit être « parfaitement préparé à toutes les bonnes œuvres ». Tite ii. 14, Christ s’est livré lui-même pour nous afin de « se purifier un peuple particulier, zélé pour les bonnes œuvres ». Il n’y a pas de contradiction à prononcer le même travail bon et mauvais, parce que ces termes sont relatifs, et que les rapports visés peuvent être différents. Nourrir les pauvres, vu par rapport à la nature de l’acte, est une bonne œuvre. Considérée par rapport au motif qui la motive, elle peut être bonne ou mauvaise. S’il est fait pour être vu des hommes, c’est offensant aux yeux de Dieu. S’il est fait par bienveillance naturelle, c’est un acte de moralité ordinaire. S’il est fait à un disciple au nom d’un disciple, c’est un acte de vertu chrétienne. Les œuvres des enfants de Dieu, bien que souillées par le péché, sont donc vraiment et proprement bonnes, parce que, (1). Ils sont, quant à leur nature ou à la chose faite, commandés par Dieu. (2) Parce que, quant au motif, ils sont les fruits, non seulement d’un sentiment moral juste, mais d’un sentiment religieux, c’est-à-dire de l’amour pour Dieu ; et (3.) Parce qu’elles sont accomplies dans le but de se conformer à sa volonté, d’honorer le Christ et de promouvoir les intérêts de son royaume.
Il résulte du principe fondamental du protestantisme, que les Écritures sont la seule règle de foi et de pratique, qu’aucune œuvre ne peut être considérée comme bonne ou obligatoire pour la conscience si les Écritures ne l’enjoignent pas. Bien sûr, cela ne veut pas dire que la Bible commande en détail tout ce que le peuple de Dieu est tenu de faire, mais elle prescrit les principes par lesquels sa conduite doit être réglée, et spécifie le genre d’actes que ces principes exigent ou interdisent. Il suffit que les Écritures exigent des enfants qu’ils obéissent à leurs parents, que les citoyens obéissent au magistrat et que les croyants écoutent l’Église, sans ordonner tous les actes que ces injonctions rendent obligatoires. En donnant ces commandements généraux, la Bible donne toutes les limitations nécessaires, de sorte que ni les parents, ni les magistrats, ni l’Église ne peuvent prétendre à aucune l’autorité qui ne leur est pas accordée par Dieu, et qui n’impose rien à la conscience qu’il ne commande pas. De même que certaines Églises ont prescrit une multitude de doctrines comme articles de foi, qui ne sont pas enseignées dans l’Écriture, de même elles ont prescrit une multitude d’actes que la Bible n’exige ni directement, ni par déduction juste ou nécessaire. Ils ont ainsi imposé à ceux qui reconnaissent leur autorité comme infaillible dans l’enseignement, un joug de servitude que personne n’est capable de porter. À l’exemple des anciens pharisiens, ils enseignent pour doctrines les commandements des hommes, et revendiquent l’autorité divine pour les institutions humaines. De cette servitude, c’était l’un des grands desseins de la Réforme de libérer le peuple de Dieu. Cette délivrance s’est opérée en proclamant le principe que rien n’est péché que ce que la Bible interdit, et que rien n’est moralement obligatoire que ce que la Bible enjoint.
Mais telle est la disposition, d’une part, à usurper l’autorité, et, d’autre part, à lui céder, que ce n’est que par l’affirmation et la justification constantes de ce principe que la liberté par laquelle le Christ nous a rendus libres peut être conservée.
§ 5. Nécessité des bonnes œuvres.
Sur ce sujet, il n’y a jamais eu de réelle divergence d’opinion parmi les protestants, bien qu’il y ait eu dans l’Église luthérienne primitive un certain malentendu. Premier. Il a été universellement admis que les bonnes œuvres ne sont pas nécessaires à notre justification ; qu’elles sont des conséquences et indirectement les fruits de la justification, et que, par conséquent, elles ne peuvent en être le fondement. Deuxièmement, il a également été convenu que la foi, par laquelle le pécheur est justifié, n’est pas en tant qu’œuvre, la raison pour laquelle Dieu déclare le pécheur juste. C’est l’acte par lequel le pécheur reçoit et se repose sur la justice de Christ, dont l’imputation le rend juste aux yeux de Dieu. Troisièmement, la foi ne justifie pas parce qu’elle inclut, ou qu’elle est la racine ou le principe des bonnes œuvres ; non pas comme « Fides Obsequiosa ». Quatrièmement, il a été convenu que seule une foi vivante, c’est-à-dire une foi qui agit par l’amour et purifie le cœur, qui unit l’âme au Christ et assure notre réconciliation avec Dieu. Cinquièmement, il était universellement admis qu’une vie immorale est incompatible avec l’état de grâce ; que ceux qui persévèrent volontairement dans la pratique du péché n’hériteront pas le royaume de Dieu. Les protestants, tout en rejetant la doctrine romaine de la justification subjective, insistaient vigoureusement sur le fait qu’aucun homme n’est délivré de la culpabilité du péché s’il n’est délivré de sa puissance régnante ; que la sanctification est inséparable de la justification, et que l’une est tout aussi essentielle que l’autre.
La controverse à ce sujet était due principalement à un malentendu, mais aussi dans une certaine mesure à une réelle divergence d’opinion quant à l’office de la loi sous l’Évangile. Mélancthon enseignait que la repentance était l’effet de la loi et antérieure à la foi, et utilisait des formes d’expression qui étaient censées impliquer que les bonnes œuvres, ou la sanctification, bien que n’étant pas le fondement de la justification, étaient néanmoins une « causa sine qua non » de notre acceptation avec Dieu. Luther objecta à cela, car la vraie sanctification est la conséquence, et en aucun cas la condition de la justification du pécheur. Nous ne sommes pas justifiés parce que nous sommes saints ; mais étant justifiés, nous sommes rendus saints. Agricola (né à Eisleben en 1492, mort en 1566), élève de Luther et très influent en tant que prédicateur, s’opposa à Mélancthon. Il soutenait non seulement que la repentance n’était pas due à l’opération de la loi, et qu’elle était le fruit de la foi, mais aussi que la loi ne devait pas être enseignée sous la . l’Évangile, et que les bonnes œuvres ne sont pas nécessaires au salut. Le croyant est entièrement libre de la loi ; n’est pas sous la loi, mais sous la grâce, et étant accepté pour ce que Christ a fait, ce que fait le mensonge est de peu d’importance. Luther dénonçait cette perversion de l’Évangile, qui négligeait entièrement la distinction entre la loi en tant qu’alliance d’œuvres exigeant une obéissance parfaite comme condition de la justification, et la loi en tant que révélation de la volonté immuable de Dieu quant à ce que les créatures raisonnables doivent être et faire dans le caractère et la conduite. Il a insisté sur le fait que la foi était la réception du Christ, non seulement pour le pardon des péchés, mais aussi comme un sauveur de sa puissance ; que son objet n’était pas seulement la mort, mais aussi l’obéissance de Christ.1
1 Voir Domer, Gescltichte der protestantischen Théologie, Munich, 1867, p. 336-344.
La controverse se renouvela peu de temps après sous une autre forme, à la suite de la position prise par George Major, également élève de Luther et de Mélancthon, et pendant quelques années professeur de théologie et prédicateur à Wittenberg. On l’accusait de s’opposer à la proposition « nous sommes sauvés par la foi seule » et d’enseigner que les bonnes œuvres étaient également nécessaires au salut. Cela a été compris comme équivalant à dire que les bonnes œuvres sont nécessaires à la justification. Major, en effet, niait la justesse de cette accusation. Il a dit qu’il n’enseignait pas que les bonnes œuvres étaient nécessaires comme étant méritoires, mais simplement comme les fruits nécessaires de la foi et faisant partie de notre obéissance à Christ ; Néanmoins, il soutenait que personne ne pouvait être sauvé sans de bonnes œuvres. Comment alors sauver les nourrissons ? Et comment cette nécessité inconditionnelle des bonnes œuvres peut-elle être cohérente avec la doctrine de Paul selon laquelle nous sommes justifiés par la foi sans les œuvres ? Celui que Dieu justifie, Il le glorifie. La justification assure le salut ; Et par conséquent, si la foi seule, ou la foi sans les œuvres, assure la justification, elle assure le salut. Il est très évident qu’il s’agissait d’une dispute de mots. Major admettait que le pécheur était en état de salut au moment où il croyait, mais soutenait que si sa foi ne produisait pas de bonnes œuvres, ce n’était pas une foi salvatrice. Dans son sermon « Sur la conversion de Paul », il dit : « Comme tu es maintenant justifié par la foi seule, et que tu es devenu enfant de Dieu, et puisque Christ et le Saint-Esprit habitent dans ton cœur par cette foi, de même les bonnes œuvres sont nécessaires pour ne pas obtenir le salut (que tu as déjà comme une question de grâce, sans œuvres, par la foi seule au Seigneur Jésus-Christ), mais pour retenir votre salut, afin qu’il ne soit pas perdu, et aussi parce que si tu ne produis pas de bonnes œuvres, c’est une preuve que ta foi est fausse et morte, un simple simulacre ou opinion. Arnsdorf, le principal représentant des extrémistes dans cette controverse, exposa sa doctrine dans les propositions suivantes : (1) Etsi hæc oratio : bona opera sunt necessaria ad salutem in doctrina legis abstractive et de idea tolerari potest, tamen multæ sunt graves causæ, propter quas vitanda, et fugienda est non minus, quam hæc oratio : Christas est creatura. (2.) In foro justificationis hæc propositio nullo modo ferenda est. (3.) In foro novæ obedientiæ post reconciliationem nequaquam bona opera ad salutem, sed propter alias causas necessaria sunt. (4.) Sola fides justificat in principio, medio, et fine. (5.) Bona opera non sunt necessaria ad retinendam salutem. (G.) Synonyma sunt et æquipollentia, sen termini convertibiles, justificatio et salvatio, nec ulla ratione distrahi aut possunt aut debent. Explodatur ergo ex ecclesia cothurnus papisticus propter scandala multipliera, dissensiones innu-merabiles et alias causas, de quibus Apostoli Act. xv. loquuntur.
La « Forme de la Concorde », dans laquelle cette controverse et d’autres dans l’Église luthérienne ont finalement été réglées, a pris le vrai terrain sur ce sujet, à mi-chemin entre les deux points de vue extrêmes. Il rejette la proposition sans réserve selon laquelle les bonnes œuvres sont nécessaires au salut, car les hommes qui n’ont pas l’occasion de témoigner de leur foi par leurs œuvres peuvent être sauvés. D’autre part, il condamne absolument la déclaration injustifiable que les bonnes œuvres nuisent au salut ; qu’il déclare pernicieux et plein de scandale. Il enseigne que « Fides vera nunquam sola est, quin Caritatem et spem semper secum habeat. » 1
1 Epitome, in. xi. ; Hase, Libri Symbolici, 3e édit. 1846, p. 586.
La même doctrine a été clairement enseignée dans les Symboles luthériens dès le début, de sorte que l’accusation faite par les romanistes, que les protestants ont séparé la morale de la refigion, était sans fondement, ni dans leur doctrine, ni dans leur pratique. Dans l’Apologie de la Confession d’Augsbourg, il est dit : « Quia fides affert Spirituni Sanctum, et parit novam vitam in cordibus, necesse est, quod pariat spirituales motus in cordibus. Et qui sint illi motus, ostendit propheta, cum ait : ' Dabo legem meam in corda eorum.' Postquam igitur fide justificati et renati sumus, incipimus Deum timere, diligere, petere, et expectare ab eo auxilium..... Incipimus et diligere proximo », quia corda habent spirituales et sanctos motus. Hæc non possunt fieri, nisi postquam fide justificati sumus et renati accipimus Spiritum Sanctum..... Profitemur igitur, quod necesse est, inchoari in nobis et subinde magis magisque fieri legem. Et complectimur simul utrumque, videlicet spirituales motus et externa bona opera. Falso igitur calumniantur nos adversarii, quod nostri non doceant bona opera, cum ea non solum requirant, sed etiam ostendant, quomodo fieri possint. »1
1 in. iv., v., xv. ; Hase, p. 83, 85.
L’antinomisme n’a jamais eu de prise dans les églises de la Réforme. Il n’y a pas de rapport logique entre la négligence des devoirs moraux et le système qui enseigne que le Christ est un Sauveur aussi bien par la puissance que par la peine du péché ; que la foi est l’acte par lequel l’âme reçoit et se repose sur Lui pour la sanctification aussi bien que pour la justification ; et qu’il en est ainsi la nature de l’union avec Christ par la foi et le séjour de l’Esprit, que personne n’est ou ne peut participer au bénéfice de sa mort, qui ne soit aussi participant de la puissance de sa vie ; qui s’en tient à l’autorité divine de l’Écriture qui déclare que sans la sainteté aucun homme ne verra le Seigneur (Héb. xii. 14) ; et qui, dans le langage du grand défenseur du salut par la grâce, avertit tous ceux qui se disent chrétiens : « Ne vous y trompez pas : ni les fornicateurs, ni les idolâtres, ni les adultères, ni les efféminés, ni ceux qui abusent d’eux-mêmes avec les hommes, ni les voleurs, ni les cupides, ni les ivrognes, ni les insulteurs, ni les extorqueurs n’hériteront le royaume de Dieu. (1 Corinthiens VI, 9, 10.) Ce n’est pas le système qui considère le péché comme un mal si grand qu’il exige le sang du Fils de Dieu pour son expiation, et la loi comme si immuable qu’elle exige la justice parfaite de Christ pour la justification du pécheur, ce qui conduit à des vues lâches de l’obligation morale ; Ceux-ci sont atteints par le système qui enseigne que les exigences de la loi ont été abaissées, qu’elles peuvent être plus que satisfaites par l’obéissance imparfaite des hommes déchus, et que le péché peut être pardonné par l’intervention des prêtres. C’est ce qu’enseignent la logique et l’histoire.
§ 6. Relation entre les bonnes œuvres et la récompense.
Sur ce sujet, les romanistes font une distinction entre les travaux faits avant et ceux faits après la régénération. Les œuvres qui sont bonnes en ce qui concerne la matière, lorsqu’elles sont accomplies par la seule conscience naturelle, n’ont d’autre mérite que celui de la congruence. Ils sont nécessairement imparfaits et ne constituent aucun droit à la justice de Dieu. Mais les œuvres accomplies sous le contrôle de principes gracieux infusés dans le baptême sont parfaites ; Ils ont donc un mérite réel, c’est-à-dire le mérite de la condignité. Ils donnent une demande de récompense, non seulement sur la base de la promesse divine, mais aussi de la justice divine. Pour celui qui travaille, la récompense n’est pas comptée comme une grâce, mais comme une dette. (Rom. iv. 4.) À ce sujet, le concile de Trente1 dit : « Si quis dixerit, hominis justificati bona opera ita esse dona Dei, ut non sint etiam bona ipsius justificati mérita ; aut ipsum justificatum bonis operibus, quæ ab eo per Dei gratiam, et Jesu Christi meritum cujus vivum membrum est, hunt, non vere merer ! augmentum gratiæ, vitam æternam, et ipsius vitæ æternæ, si tamen in gratia deeesserit, conseeutionem, atque etiam gloriæ augmentum ; anathème, assieds-toi. Bellarmin 2 dit : « Habet communis catholieorum omnium sententia, opera bona justorum vere, ae proprie esse mérita, et mérita non cujuscunque premii, sed ipsius vitæ æternæ. »
1 Sess. vi. canon 32 ; Streitwolf, Libri Symbolici, Göttingen, 1846, t. I, p. 37.
2 De Justificatione, v. i. ; Disputationes, édit. Paris, 1608, t. IV, p. 949, a.
Les conditions de ces œuvres méritoires, selon Bellarmin, sont : 1° Qu’elles soient bonnes dans leur nature. (2.) Fait dans l’obéissance à Dieu. (3.) Par un homme dans cette vie. (4.) Qu’ils soient volontaires. (5.) Que l’agent soit dans un état de justification et de faveur auprès de Dieu. (6.) Qu’ils soient poussés par l’amour. (7.) Qu’une promesse divine leur soit attachée.
Réfutation de cette doctrine romaine.
1. Toute cette doctrine du mérite est fondée sur l’hypothèse que la justification, terme qu’elle emploie pour désigner la régénération, enlève de l’âme tout ce qui est de la nature du péché ; que les œuvres accomplies par l’être renouvelé et exempt de péché sont parfaites ; qu’un homme renouvelé peut non seulement satisfaire à toutes les exigences de la loi, mais aussi faire plus que ce que la loi exige. Comme ces suppositions sont contraires à l’Écriture et à l’expérience de tous les chrétiens, la doctrine fondée sur elles doit être fausse.
2. La doctrine est incompatible, non seulement avec les déclarations expresses de la parole de Dieu, mais aussi avec toute la nature et le dessein de l’Évangile. Le dessein immédiat ou immédiat du plan du salut, comme les Écritures l’enseignent abondamment, est la manifestation de la grâce de Dieu, et par conséquent il doit être gratuit dans toutes ses parties et dans toutes ses dispositions, à l’exclusion complète de tout mérite. Si le salut n’est pas de grâce, ce n’est pas une révélation de grâce, et si de grâce, ce n’est pas d’œuvres.
3. La doctrine répugne tellement aux enseignements intérieurs de l’Esprit, aussi bien qu’aux enseignements de sa parole, qu’elle ne peut être pratiquement crue, même par ceux qui la professent. Les enfants de Dieu, en dépit de leurs théories et de leurs croyances, ne se confient pas pour leur salut, ni dans leur salut. en tout ou en partie, à ce qu’ils sont ou à ce qu’ils font ; mais simplement et exclusivement à ce que le Christ est et a fait pour eux. Pour s’en convaincre, on peut faire appel à l’expérience écrite ou enregistrée de toutes les grandes lumières de l’Église latine. Si tout chrétien est intimement convaincu qu’il est impie aux yeux de Dieu ; que tous ses meilleurs actes sont souillés ; et qu’en aucune chose et à aucun moment il ne s’élève à la norme de la perfection ; Il est impossible qu’il puisse croire qu’il mérite la vie éternelle sur la base de ses propres œuvres.
4. De même que la doctrine du mérite est opposée à la nature et au dessein de l’Évangile, et aux déclarations expresses de l’Écriture que nous ne sommes pas justifiés ou sauvés par les œuvres, mais gratuitement pour l’amour de Christ, de même elle est dérogatoire à l’honneur de Christ comme notre Sauveur. Il s’est donné lui-même en rançon ; il s’offrit lui-même en sacrifice ; c’est par son obéissance que nous sommes constitués justes ; Ce n’est donc qu’en supposant que sa rançon, son sacrifice et son obéissance sont insuffisants que le mérite de nos œuvres peut être nécessaire ou admis. Les romanistes essaient d’éluder la force de cette objection en disant que nous devons au Christ la grâce ou la vie spirituelle par laquelle nous accomplissons de bonnes œuvres. S’il n’était pas mort pour nos péchés, Dieu n’aurait pas, par le baptême, lavé notre culpabilité et notre souillure et ne nous aurait pas donné ces « habitudes de grâce » par lesquelles nous sommes rendus capables de mériter la vie éternelle. Cela n’arrange pas les choses ; car le salut demeure une dette en tant que question de justice sur la base de nos bonnes œuvres. C’est ce qui est si contraire à l’Écriture, à la conviction intime de tout chrétien et à la gloire du Christ, à qui tout l’honneur de notre salut est dû.
Doctrine des anciens théologiens protestants.
Les anciens théologiens, afin de réfuter plus efficacement la doctrine du mérite, ont supposé qu’une œuvre, pour être méritoire, doit être (1). « Indebitum », c’est-à-dire non dû. Quelque chose que nous ne sommes pas tenus de faire. (2.) Les nôtres. (3.) Absolument Parfait. (4.) Égale ou proportionnelle à la récompense. (5) Et, par conséquent, que la récompense doit être due sur le terrain de la justice, et non pas seulement sur la promesse ou l’accord. Dans ces conditions, tout mérite de la part des créatures est impossible. Cependant, il est clairement reconnu dans l’Écriture qu’un ouvrier est digne de son salaire. Pour celui qui travaille, dit l’Apôtre, la récompense n’est pas comptée comme une grâce, mais comme une dette. C’est quelque chose qui est dû à la justice. Ce principe est aussi universellement reconnu parmi les hommes. Même dans la théorie de l’esclavage, où l’ouvrier lui-même, son temps, ses forces et tout ce qu’il possède, sont supposés appartenir à son maître, le serviteur a droit à une juste récompense qu’il serait injuste de lui refuser. Et dans tous les domaines de la vie, il est reconnu comme une simple question de justice, que l’homme qui accomplit un travail stipulé, gagne son salaire. Le paiement n’est pas une question de faveur ; elle n’est pas due simplement parce qu’elle a été promise ; mais parce qu’elle a été méritée. C’est une dette. Ainsi, dans le cas d’Adam, s’il était resté parfait, il n’y aurait eu aucune raison pour qu’il meure ou perde la faveur de Dieu ; dont la faveur est la vie.
Le passage de Luc, XVII, chap. 10, est invoqué comme prouvant qu’une créature ne peut en aucun cas accomplir un acte méritoire, c’est-à-dire un acte qui réclame une récompense à la justice. Notre Seigneur y dit : « Quand vous aurez fait tout ce qui vous a été commandé, dites : « Nous sommes des serviteurs inutiles : nous avons fait ce que nous devions faire. » Cela n’enseigne pas que l’ouvrier n’est pas digne de son salaire. Ce passage fait partie d’une parabole dans laquelle notre Seigneur dit qu’un maître ne remercie pas son serviteur d’avoir simplement fait son devoir. Il n’appelle pas à la gratitude. Mais il ne s’ensuit pas qu’il soit juste de retenir le salaire du serviteur, ou de lui refuser de manger et de boire. Dieu est juste, et étant juste, il récompense chaque homme selon ses œuvres, tant que les hommes sont sous la loi. Si ce n’est pas sous la loi, ils sont traités, non pas en vertu des principes de la loi, mais de la grâce.
Mais quoique les protestants nient le mérite des bonnes œuvres, et enseignent que le salut est entièrement gratuit, que la rémission des péchés, l’adoption dans la famille de Dieu et le don du Saint-Esprit sont accordés au croyant, ainsi que l’admission au ciel, uniquement sur la base des mérites du Seigneur Jésus-Christ ; ils enseignent néanmoins que Dieu récompense son peuple pour ses œuvres. Ayant gracieusement promis, pour l’amour du Christ, de fermer les yeux sur l’imperfection de leurs meilleurs services, ils ont l’assurance fondée sur cette promesse que celui qui donne à un disciple ne serait-ce qu’une coupe d’eau froide au nom d’un disciple, ne perdra en aucune façon sa récompense. Les Écritures enseignent aussi que le bonheur ou la bénédiction des croyants dans une vie future sera plus ou moins grand en proportion de leur dévouement au service de Christ dans cette vie. Ceux qui aiment peu, font peu ; et ceux qui font peu, jouissent moins. Ce qu’un homme sème, il le moissonnera aussi. Comme les récompenses du ciel sont données sur la base des mérites de Christ, et comme il a le droit de faire ce qu’il veut des siens, il n’y aurait pas d’injustice si le larron sauvé sur la croix était aussi élevé que l’apôtre Paul. Mais la dérive générale de l’Écriture est en faveur de la doctrine selon laquelle un homme récoltera ce qu’il a semé ; que Dieu récompensera chacun selon ses œuvres, mais non à cause de ses œuvres.
§ 7. Perfectionnisme.
La doctrine des luthériens et des réformés, les deux grandes branches de l’Église protestante, est que la sanctification n’est jamais parfaite dans cette vie ; que le péché n’est en aucun cas entièrement dompté ; de sorte que le croyant le plus avancé a besoin, tant qu’il demeure dans la chair, de prier quotidiennement pour le pardon des péchés.
La question n’est pas de savoir quel est le devoir des croyants. Tous admettent que nous sommes tenus d’être parfaits comme notre Père céleste est parfait. Il ne s’agit pas non plus du commandement de Dieu ; car le premier commandement, originel et universellement obligatoire, c’est d’aimer Dieu de tout notre cœur et notre prochain comme nous-mêmes. La question ne concerne pas non plus les dispositions de l’Évangile. Il est admis que l’Évangile fournit tout ce qui est nécessaire pour la sanctification et le salut complets des croyants. De quoi pouvons-nous avoir besoin de plus que ce que nous avons en Christ, son Esprit, sa parole et ses ordonnances ? Il ne s’agit pas non plus des promesses de Dieu ; car tous se réjouissent de l’espérance, fondée sur la promesse divine, que nous serons finalement délivrés de tout péché. Dieu a pourvu en Christ au salut complet de son peuple : c’est-à-dire à sa délivrance complète de la peine de la loi, de la puissance du péché, de toute douleur, de toute douleur et de toute mort ; et non seulement pour une simple délivrance négative, mais pour être transformés à l’image du Christ, remplis de son Esprit et glorifiés par la beauté du Seigneur. Il est cependant trop évident que, à moins que la sanctification ne soit une exception, aucune de ces promesses, en dehors de celle qui concerne la justification, n’est parfaitement accomplie dans cette vie. La justification n’admet pas de degrés. Soit un homme est sous le coup d’une condamnation, soit il ne l’est pas. Et par conséquent, d’après la nature du cas, la justification est instantanée et complète, dès que le pécheur croit. Mais la question est de savoir si, lorsque Dieu promet de rendre son peuple parfaitement saint, heureux, et parfaitement glorieux, Il promet ainsi de les rendre parfaits en sainteté dans cette vie ? Si les promesses de bonheur et de gloire ne sont pas parfaitement accomplies dans cette vie, pourquoi la promesse de sanctification devrait-elle être ainsi accomplie ? Il s’agit toutefois d’une simple question de fait. Tous admettent que Dieu peut rendre son peuple parfait avant et après la mort. La seule question est : A-t-il promis, en ce qui concerne la sanctification seule, qu’elle sera parfaite de ce côté-ci de la tombe ? et, Voyons-nous des cas dans lesquels la promesse a été effectivement accomplie ? La réponse donnée à ces questions par l’Église universelle est négative. Tant que le croyant sera dans ce monde, il devra prier pour obtenir le pardon.
Les motifs de cette doctrine sont les suivants :
1. La spiritualité de la loi divine et l’immuabilité de ses exigences. Il condamne comme un péché tout manque de conformité à la norme de perfection absolue telle qu’elle est exposée dans la Bible. Tout ce qui n’est pas d’aimer Dieu constamment de tout son cœur, de toute son âme, de tout son esprit et de toute sa force, et son prochain comme soi-même, est un péché.
2. La déclaration expresse de l’Écriture selon laquelle Tous les hommes sont pécheurs. Cela ne signifie pas simplement que tous les hommes ont péché, que tous sont coupables, mais que tous ont le péché qui s’attache à eux. « Si, dit l’Apôtre, nous disons que nous n’avons pas de péché, nous nous trompons nous-mêmes, et la vérité n’est pas en nous. » (1 Jean i. 8.) Comme l’homme sage l’avait dit avant lui : « Il n’y a pas d’homme juste sur la terre qui fasse le bien et ne pèche pas. » (Eccles, vii. 20.) Et dans 1 Rois viii. 46, il est dit : « Il n’y a pas d’homme qui ne pèche pas. Et l’apôtre Jacques, iii. 2, dit : « En beaucoup de choses, nous offensons tout le monde. » C’est une perversion manifeste du sens grammatical simple des mots que de faire αμαρτίαν ουκ ίχομεν pour se référer au passé. Le verbe est au présent. La vérité n’est pas en nous, dit l’Apôtre, si nous disons que nous n’avons pas de péché, c’est-à-dire que nous ne sommes pas maintenant souillés par le péché. Dans ce contexte, il présente le Christ comme la « Parole de Vie », comme ayant la vie en Lui-même, et comme étant la source de la vie pour nous. Ayant la communion avec Lui, nous avons la communion avec Dieu. Mais Dieu est lumière, c’est-à-dire qu’il est pur, saint et bienheureux ; si donc nous marchons dans les ténèbres, c’est-à-dire dans l’ignorance et le péché, nous ne pouvons pas être en communion avec lui. Mais si nous marchons dans la lumière, comme il est dans la lumière, le sang de Jésus-Christ nous purifie de tout péché. Si nous disons que nous n’avons pas de péché et que nous n’avons pas besoin maintenant et en tout temps de la puissance purificatrice du sang de Christ, nous nous trompons nous-mêmes, et la vérité n’est pas en nous.
Argument tiré des Représentations générales de l’Écriture.
Les déclarations de l’Écriture, qui sont si abondantes, qu’il n’y a pas de juste, pas un seul ; que tous ont péché et sont privés de la gloire de Dieu ; qu’aucune chair vivante n’est juste aux yeux de Dieu ; et que chacun doit mettre la main sur sa bouche, et sa bouche dans la poussière à la vue du Dieu infiniment saint, qui accuse ses anges de folie, se rapportent à tous les hommes sans exception ; aux Juifs et aux Gentils ; au renouvelé et au non renouvelé ; aux enfants en Christ et aux chrétiens mûrs. Tous sentent, et tous sont tenus de reconnaître qu’ils sont pécheurs chaque fois qu’ils se présentent devant Dieu ; tous savent qu’ils ont constamment besoin de l’intervention du Christ et de l’application de son sang pour s’assurer la communion avec le Saint. Comme le décrit l’Écriture, la vie intérieure du peuple de Dieu, jusqu’à la fin de sa course dans ce monde, est une répétition de la conversion. C’est vrai un retournement continuel vers Dieu ; un renouvellement constant de la confession, du repentir et de la foi ; mourir pour le péché, et vivre pour la justice. Cela est vrai de tous les saints, patriarches, prophètes et apôtres dont la Bible nous rend compte de l’expérience intérieure.
Passages qui décrivent le conflit entre la chair et l’esprit.
3. Cette vérité est enseignée plus clairement dans les passages qui décrivent le conflit entre la chair et l’Esprit chez le croyant. Il a déjà été fait référence à ce point. Que le septième chapitre de l’épître de Paul aux Romains est un récit de sa propre vie intérieure au moment où il écrivait cette épître, a déjà, à ce que l’on croit, été suffisamment prouvée ; et telle a été la croyance du grand corps des chrétiens évangéliques dans tous les âges du Chureh. Si c’est là l’interprétation correcte de ce passage, alors cela prouve que Paul, au moins, n’était pas exempt de péché ; qu’il avait à lutter contre une loi dans ses membres, en guerre contre la loi de son esprit ; qu’il gémissait constamment sous le poids du péché intérieur. À une époque encore plus tardive de sa vie, alors qu’il était sur le point d’être offert, il dit aux Philippiens, iii. 12-14 : « Ce n’est pas comme si j’étais déjà parvenu, et que je fusse déjà parfait, mais je suis après, afin d’appréhender ce pour quoi aussi je suis appréhendé de Jésus-Christ. Frères, je ne m’estime pas l’avoir appréhendé : mais celui-ci, je le fais, oubliant les choses qui sont en arrière et tendant la main vers celles qui sont devant, je cours vers le but pour le prix de l’appel céleste de Dieu en Jésus-Christ. C’est une déclaration sans équivoque de la part de l’Apôtre que, même à cette période tardive de sa vie, il n’était pas encore parfait ; il n’avait pas atteint le but de la parfaite conformité à Christ, mais il allait de l’avant, comme un homme dans une course, avec toute la ferveur nécessaire pour atteindre le terme de son appel. Répondre à cela, comme l’ont fait quelques éminents défenseurs du perfectionnisme, en disant que Paul n’est pas parfait, n’est pas une preuve que d’autres hommes ne le soient pas ; n’est pas très satisfaisante.
Le passage parallèle dans Galates, v. 16-26, s’adresse aux chrétiens en général. Il reconnaît le fait qu’ils sont imparfaitement sanctifiés ; qu’en eux le principe renouvelé, l’Esprit comme source de vie spirituelle, est en conflit avec la chair, les restes de leur nature corrompue. Elle les exhorte à mortifier la chair (non pas le corps, mais leur nature corrompue) et à s’efforcer de marcher constamment sous l’influence dominante de l’Esprit. La différence caractéristique entre ce qui n’a pas été renouvelé et ce qui n’a pas été renouvelé n’est pas que les premiers sont entièrement pécheurs, et que les seconds sont parfaitement saints ; mais que les premiers sont entièrement sous le contrôle de leur nature déchue, tandis que les seconds ont l’Esprit de Dieu qui habite en eux, ce qui les conduit à crucifier la chair et à s’efforcer d’obtenir une conformité complète à l’image de Dieu. Il n’y avait rien dans le caractère des chrétiens de Galatie qui rendît cette exhortation applicable à eux seuls. Ce que les Écritures enseignent sur la foi, la repentance et la justification, est destiné à tous les chrétiens ; Et donc ce qui est enseigné de la sanctification convient au cas de tous les croyants. En effet, si un homme se croit parfait et s’inquiète d’avoir déjà atteint ce que ses coreligionnaires ne font qu’aspirer, une grande partie de la Bible doit pour lui perdre sa valeur. Quel usage peut-il faire des Psaumes, véhicule par lequel le peuple de Dieu a répandu son cœur pendant des millénaires ? Comment un tel homme peut-il sympathiser avec Esdras, Néhémie ou n’importe lequel des prophètes ? Comme le langage d’Ésaïe doit lui être étrange : « Malheur à moi ! car je suis perdu ; car je suis un homme aux lèvres impures, et j’habite au milieu d’un peuple aux lèvres impures, car mes yeux ont vu le roi, l’Éternel des armées.
4. Non seulement les saints hommes de Dieu, tout au long des Écritures, en venant en sa présence, viennent avec la confession du péché et de l’imperfection, priant pour la miséricorde, non seulement pour ce qu’ils étaient, mais aussi pour ce qu’ils sont, mais notre Seigneur a enseigné à tous ses disciples, chaque fois qu’ils s’adressent à leur Père céleste, de dire : « Pardonne-nous nos offenses. » Cette injonction a toujours été une pierre d’achoppement sur le chemin des défenseurs de la perfection depuis Pélage jusqu’à nos jours. Augustin a insisté dans son argumentation contre la doctrine de son grand adversaire selon laquelle les hommes pouvaient être entièrement exempt de péché dans la vie présente. La réponse donnée à l’argument de cette source a été sensiblement la même que celle donnée par Pélage. Il est présenté sous sa meilleure forme par le révérend Richard Watson. 1 Cet auteur dit : « (1.) Qu’il serait absurde de supposer qu’une personne soit placée dans la nécessité d’une « intrusion », afin qu’une prière générale destinée à des hommes dans une condition mixte puisse conserver son adéquation à chaque cas particulier. (2.) Que l’intrusion de toute espèce et de tout degré est Cette prière n’est pas censée être continuée, afin qu’elle puisse être employée toujours dans le même sens, ou autrement elle pourrait être invoquée contre la renonciation à toute offense ou transgression quelle qu’elle soit. 3° Que cette demande est toujours pertinente pour le cas de ceux qui sont entièrement sanctifiés et évangéliquement parfaits, puisque ni la perfection du premier homme ni celle des anges ne sont en cause ; c’est-à-dire une perfection mesurée par la loi parfaite, qui, dans ses obligations, considère toutes les créatures comme n’ayant subi aucun dommage par défaillance morale, et n’admet, par conséquent, aucune excuse pour les infirmités et les erreurs de jugement ; ni d’un degré d’obéissance inférieur à celui que les êtres créés naturellement parfaits, étaient capables de rendre. Cependant, il peut y avoir une sanctification complète d’un être rendu naturellement faible et imparfait, et donc sujet à l’erreur et à l’infirmité, ainsi qu’à la défection quant au degré de cette obéissance et de ce service absolus que la loi de Dieu, qui n’a jamais plié à la faiblesse humaine, exige de tous. Ces défauts, ces erreurs, ces infirmités peuvent être tout à fait compatibles avec la sanctification complète de l’âme et la maturité morale d’un être encore naturellement infirmes et imparfaits.
1 Instituts théologiques, 11. xxix. ; édit. New York, 1832, p. 545.
La première et la deuxième de ces réponses ne touchent pas le sujet. Personne ne prétend que les hommes sont placés dans la nécessité de pécher, afin qu’ils puissent répéter le Notre Père. Ce serait en effet absurde. L’argument est le suivant. Si un homme prie pour être pardonné, le mensonge confesse qu’il est un pécheur, et s’il est pécheur, il n’est pas exempt de péché ni parfait. Et par conséquent, l’utilisation du Notre Père par tous les chrétiens est une reconnaissance qu’aucun chrétien dans cette vie n’est parfait. La troisième réponse, qui est celle sur laquelle on s’appuie principalement et qui est constamment répétée, comporte une contradiction. Elle suppose que ce qui n’est pas péché a besoin d’être pardonné. M. Watson dit que la pétition « Pardonne-nous nos offenses » peut être utilisée à bon escient par ceux qui sont exempts de péché. Cela revient à dire que le péché n’est pas le péché. L’argument qui soutient cette position comporte également une contradiction. Nos « infirmités » sont des péchés si elles sont jugées par « la loi parfaite » ; mais pas s’il est jugé par « la loi évangélique ». Comme nous ne devons pas être jugés par les premiers, mais par les seconds, le manque de conformité à la loi n’est pas un péché. La seule incapacité sous laquelle les hommes, depuis la chute, travaillent, provient de leur état de pécheur, et n’est donc pas une excuse pour ne pas se conformer à cette loi qui, dit-on et dit avec raison, est « jamais pliée à la faiblesse humaine ».
Argument tiré de l’expérience des chrétiens.
5. On peut faire appel à ce sujet au témoignage de l’Église universelle. Il n’y a pas de formes de culte, pas de formules de dévotion privée, à aucune époque ou dans aucune partie de l’Église, qui ne contiennent la confession des péchés et la prière pour le pardon. Toute l’Église chrétienne, avec tous ses membres, se prosterne devant Dieu en disant : « Aie pitié de nous, misérables pécheurs. » Si, çà et là, l’un et l’autre parmi cette multitude prosternée refusent de s’incliner et de se joindre à cette confession, ils sont à blâmer et à plaindre. Ils sont cependant introuvables. La conscience est trop forte pour la théorie, et par conséquent,
6. Nous pouvons faire appel à la conscience de chaque croyant. Il sait qu’il est un pécheur. Il n’est jamais dans un état qui satisfasse sa propre conviction quant à ce qu’il devrait être. Il peut appeler ses déficiences des infirmités, des faiblesses et des erreurs, et peut refuser de les appeler des péchés. Mais cela ne change rien à l’affaire. Quel que soit le nom qu’on leur donne, il est admis qu’ils ont besoin de la miséricorde pardonnante de Dieu.
§ 8. Théories du perfectionnisme.
Les deux principes radicaux du pélagianisme sont, premièrement, que la nature de l’homme n’est pas blessée par la chute, de sorte que les hommes sont exempts de péché jusqu’à ce que, par transgression volontaire, ils encourent la culpabilité. Deuxièmement, que nos facultés naturelles, puisque, aussi bien qu’avant la chute, sont pleinement compétentes pour rendre une obéissance complète à la loi.
De ces principes, Pélage déduisit (1) : Qu’un homme (même parmi les païens) pouvait vivre de la naissance à la mort exempt de tout péché, bien qu’il n’ait jamais affirmé qu’aucun homme ait jamais vécu ainsi. (2.) Qu’une fois convertis, les hommes pouvaient, et un grand nombre d’hommes le faisaient, vivre « sans péché ; obéissant parfaitement à la loi. (3.) Que cette obéissance a été rendue dans l’exercice de leurs capacités, assistés par la grâce de Dieu.
Par grâce, Pélage dit que nous devons comprendre, (1). La bonté de Dieu en constituant notre nature de telle sorte que nous puissions obéir complètement à la loi en vertu de notre libre arbitre. (2) La révélation, les préceptes et l’exemple du Christ. (3) Le pardon des péchés commis avant la conversion. (4) Les influences morales de la vérité et des circonstances dans lesquelles nous sommes placés. L’effet de la grâce, ainsi comprise, est simplement de rendre l’obéissance plus facile.
Au concile de Carthage, en 418, les Pélagiens furent condamnés, entre autres choses, pour avoir enseigné (1). Que l’effet de la grâce était simplement de rendre l’obéissance plus facile. (2) Que la déclaration de l’apôtre Jean : « Si nous disons que nous n’avons pas de péché, nous nous trompons nous-mêmes, et la vérité n’est pas en nous », est, pour certains, une simple expression d’humilité. (3) Que la demande du Notre Père : « Pardonne-nous nos offenses », ne convient pas aux saints. Ils ne l’utilisent que pour exprimer le désir et la nécessité des autres.
D’après la théorie pélagienne, donc, (1.) Le péché dont le croyant peut être parfaitement exempt est la transgression volontaire de la loi connue. Rien d’autre n’est de la nature du péché. (2) La loi à laquelle il est possible de se conformer parfaitement dans cette vie, et dans beaucoup de cas actuelle, est la loi morale dans toute sa rigueur. (3) Cette obéissance peut être rendue sans aucune influence surnaturelle du Saint-Esprit.
Les romanistes enseignent, (1.) Que par l’infusion de la grâce dans la justification telle qu’elle s’effectue par ou dans le baptême, tout ce qui est de la nature du péché est enlevé de l’âme. (2) Que les bonnes œuvres accomplies en état de grâce sont exemptes de la souillure du péché et sont parfaites. « Si quis in quolibet bono opere justum saltern venaliter peccare dixerit .... anathème, assieds-toi.» 1 (3.) Afin que la loi soit, et qu’elle soit souvent, parfaitement obéie par les enfants de Dieu dans cette vie. (4) Que les hommes peuvent non seulement faire tout ce que la loi exige, mais même aller au-delà de ses exigences. (5) Néanmoins, comme il y a une loi plus élevée que celle par laquelle les hommes doivent être jugés, aucun homme n’est entièrement exempt de péchés véniels, c’est-à-dire de péchés qui ne condamnent pas l’âme, et c’est pourquoi tous les hommes en cette vie ont besoin de dire : « Pardonne-nous nos offenses. »
1 Concile de Trente, Sess. vi. Canon 25 ; Streitwolf, t. I, p. 36.
De cette déclaration, il résulte :
1. Que par péché, dont on dit que les croyants avancés sont exempts, on n’entend que ce qui mérite d’être condamné, et qui mérite en lui-même la perte de la grâce ou de la faveur divine. Il est admis que la concupiscence, ou les restes du péché originel, n’est pas enlevée par le baptême, mais elle n’est pas de la nature du péché, dans le sens que nous venons d’énoncer. Il n’y a pas non plus de péchés véniels, c’est-à-dire de péchés qui Ne perdez pas la grâce, proprement les péchés, s’ils sont jugés par la loi sous laquelle les croyants sont maintenant placés. Par conséquent, en ce qui concerne la partie négative de la perfection, ou l’affranchissement du péché, les romanistes n’entendent pas l’affranchissement des fautes morales, mais simplement l’affranchissement de ce qui entraîne la sentence de la loi. C’est la perfection telle qu’elle est jugée par un niveau de jugement inférieur.
2. La loi à laquelle nous sommes maintenant soumis, et dont les exigences sont satisfaites par l’obéissance des saints selon les romanistes, n’est pas la loi morale dans sa rigueur originelle, mais la somme de ce qui est dû à l’homme dans ses circonstances présentes ; En d’autres termes, les exigences de la loi sont adaptées à la condition des hommes dans cette vie. Cela est évident, parce qu’ils disent que les saints obéissent à la loi dans la mesure où elle est maintenant obligatoire, et parce qu’ils admettent que les saints commettent des péchés véniels, ce qui ne peut signifier que des péchés qui, selon une règle de jugement plus stricte, mériteraient condamnation.
3. Comme nous l’avons dit plus haut, ils font la distinction entre la loi et l’amour. Le premier est ce que tous les hommes, et surtout les chrétiens, sont tenus d’observer, mais l’amour est un principe supérieur qui pousse à faire plus que ce que la loi ou la justice exigent. Par conséquent, la partie positive de la perfection, ou de la conformité à la loi, n’implique pas le plus haut degré d’excellence morale dont notre nature soit susceptible, mais seulement celle qui répond aux exigences inférieures de la loi à laquelle nous sommes maintenant soumis. Dans un passage déjà cité, Bellarmin dit : « Defectus charitatis, quod videlicet non faciamus opera nostra tanto fervore dilectionis, quanto faciemus in patria, defectus quidem est, sed culpa, et peccatum non est. Unde etiam charitas nostra, quamvis comparata ad charitatem beatorum sit imperfecta, tamen absolute perfecta dici potest.» 1 De la même manière, Noehler dit :2 « À plusieurs reprises, on a essayé de soutenir l’ancienne doctrine orthodoxe en supposant que la loi morale impose des exigences idéales qui, comme tout autre idéal, doivent rester inaccessibles. Si cela est vrai, alors l’homme qui n’est pas à la hauteur de cet idéal est aussi peu responsable et aussi peu responsable méritant d’être puni, comme un poète épique qui ne devrait pas être à la hauteur de l’Iliade d’Homère.»
1 De Justificatione, iv. xvii. ; Disputntiones, édit. Paris, 1608, t. IV, p. 933, b.
2 Symbolik, 6e édit. Mayence, 1843, p. 216.
La théorie romaine est cohérente. Dans le baptême, tout péché est lavé. Par l’infusion de la grâce, la pleine capacité est donnée de faire tout ce qui est exigé de nous. Rien ne peut être exigé au-delà de ce que nous sommes capables d’accomplir, et, par conséquent, les exigences de la loi sont adaptées à notre état actuel. Par l’obéissance à cette loi modifiée, nous méritons une augmentation des réserves de grâce et de vie éternelle.
La perfection sur laquelle insistent les romanistes n’est donc que relative ; non pas une liberté complète du péché, mais seulement de péchés tels que la condamnation mierit ; non pas la sainteté qui est absolument parfaite, mais parfaite seulement par rapport à la loi sous laquelle nous sommes maintenant placés. Il est clair qu’il y a une différence radicale entre les romanistes et les protestants quant à la nature du péché et aux limites de l’obligation morale. S’ils adoptaient notre définition du péché, ils ne prétendraient à aucune perfection dans la vie présente.
La perfection que les arminiens enseignent est atteignable, et qui, dans beaucoup de cas, ils disent qu’elle est effectivement atteinte dans cette vie, est déclarée être une conformité complète à la loi ; y compris la libération du péché, et le bon exercice de toutes les bonnes affections et l’accomplissement de tous les devoirs.
Episcopius le définit comme étant l’observance des commandements de Dieu avec un accomplissement parfait ; ou d’aimer Dieu autant que nous devons l’aimer, selon les exigences de l’Évangile ; ou selon l’alliance de grâce. « Par perfection des degrés, on entend la plus haute perfection qui consiste dans le plus grand effort de la force humaine assistée par la grâce. » Cette perfection comprend deux choses : (1.) Une perfection proportionnée aux puissances de chaque individu ; (2) Le désir de faire des progrès continuels et d’augmenter de plus en plus ses forces.
Limborch le définit comme « l’observance des préceptes de l’Évangile de telle manière et à tel degré de perfection que Dieu exige de nous sous la dénonciation de la damnation éternelle ». Cette obéissance est « parfaite en ce qu’elle correspond aux stipulations contenues dans l’alliance divine ». « Il ne s’agit pas d’une obéissance sans péché ou absolument parfaite, mais d’une obéissance qui consiste dans un amour sincère et dans l’habitude de la piété, qui exclut toute habitude de péché, avec toutes les actions énormes et délibérées. » 1 Cette perfection a trois degrés (1). Celle des débutants. (2.) Celle des compétents. (3) Celle des vrais parfaits, qui ont dompté l’habitude du péché et prennent plaisir à la pratique de la vertu.
1 Theologia Christiana, v. Ixxix. 2, 8, 14 ; édit. Amsterdam, 1715, p. 658, a, G59, b, 661, a.
Wesley1 dit ; La perfection, c’est le Dieu d’aimer de tout son cœur, de tout son esprit, de toute son âme et de toute sa force. Cela implique qu’il ne reste dans l’âme aucun mauvais caractère, aucun contraire à l’amour ; et que toutes les pensées, les paroles et les actions sont gouvernées par l’amour. » Le Dr Peck 2 dit que c’est « un état de sainteté qui répond pleinement aux exigences de l’Évangile ».
1 Exposé clair de la perfection chrétienne, p. 48.
2 Christian Perfection, New York, 1843, p. 292.
Bien que ces définitions diffèrent à certains égards, elles s’accordent dans l’idée générale que la perfection consiste dans l’entière conformité à la loi à laquelle nous sommes maintenant soumis, et par laquelle nous devons être jugés.
La Loi à laquelle les croyants sont soumis.
Qu’est-ce, d’après la théorie arminienne, que cette loi ? La réponse à cette question est négative et positive. Négativement, le Dr Peck dit qu’il ne s’agit pas de la loi adamique, ou de la loi donnée à l’origine à Adam. Fletcher 3 dit : « En ce qui concerne la loi sans Christ de l’obéissance paradisiaque, nous rejetons totalement la perfection sans péché. » « Nous ne serons pas jugés par cette loi ; mais par une loi adaptée à notre état et à nos circonstances présentes, appelée la loi du Christ. « Notre Père céleste n’attend jamais de nous, dans notre état d’affaiblissement, l’obéissance d’Adam immortel au paradis. » Les affirmations positives sont : « C’est la loi de Christ. » « L’Évangile ». La norme de caractère établie dans l’Évangile doit être telle qu’elle est praticable par l’homme, déchu comme il l’est. Se conformer à cette norme, c’est ce que nous appelons la perfection chrétienne.» 4
3 Voir ci-dessus, p. 192.
4 Coup d’œil, La perfection chrétienne, p. 294.
Il en résulte que la loi d’après laquelle les hommes sont déclarés parfaits n’est pas la loi morale originelle, mais la loi atténuée adaptée à l’état affaibli de l’homme depuis la chute. Le péché dont le croyant peut être entièrement exempt n’est pas toute l’imperfection morale qui mérite en elle-même d’être punie, mais seulement les délinquances qui sont incompatibles avec la loi atténuée de l’Évangile.
Sur ce point, le langage de Limborch cité ci-dessus est explicite. Ce n’est pas « une perfection absolument sans péché » qui est affirmée. Et Fletcher dit : « Nous rejetons totalement la « perfection sans péché » selon la loi paradisiaque. Wesley dit : Par péché, on entend (1.) Transgression volontaire d’une loi connue. En ce sens, tous ceux qui sont nés de Dieu sont exempts de péché. (2.) Cela signifie tous les tempéraments impies, la volonté propre, l’orgueil, la colère, les pensées pécheresses. À partir de ces Les parfaits sont libres. (3.) Mais les erreurs et les infirmités ne sont pas des péchés. Ce sont, en effet, des déviations de la loi parfaite, et par conséquent elles ont besoin d’expiation. Pourtant, ce ne sont pas des péchés à proprement parler. Une personne remplie de l’amour de Dieu est toujours sujette à ces transgressions involontaires. De telles transgressions, vous pouvez les appeler des péchés, s’il vous plaît, je ne les appelle pas.» 1 La question, cependant, n’est pas de savoir ce que Wesley ou tout autre homme choisit d’appeler péché ; mais ce que la loi de Dieu condamne. Rien de ce que la loi ne condamne ne peut avoir besoin d’expiation. Par conséquent, si ces transgressions ont besoin d’expiation, ce sont des péchés aux yeux de Dieu. Notre refus de les reconnaître comme tels ne change pas leur nature et ne les déculpabilise pas.
1 Compte rendu clair, p. 62-C7.
Selon le système arminienne, en particulier celui soutenu par les wesleyens, cette perfection n’est pas due à la capacité native ou au libre arbitre de l’homme, mais à la grâce de Dieu, ou à l’influence surnaturelle de l’Esprit. La perfection est une affaire de grâce, (1.) Parce que c’est uniquement à cause de l’œuvre de Christ que Dieu abaisse les exigences de la loi et accepte comme parfaite l’obéissance qu’exige la loi plus douce de l’Évangile. (2) Parce que la capacité de rendre cette obéissance est due à l’influence gracieuse du Saint-Esprit. (3.) Parce que les croyants ont constamment besoin de l’intercession du Christ en tant que notre Souverain Sacrificateur, pour les protéger de condamnation pour des transgressions involontaires, qui, jugées par la loi, entraîneraient sa peine.
Cette théorie est ainsi appelée parce que ses principaux défenseurs sont les officiers de l’Université d’Oberlin dans l’Ohio. Le président Mahan2 dit que la perfection dans la sainteté implique l’accomplissement plein et parfait de tout notre devoir ; de toutes les obligations existantes à l’égard de Dieu et de tous les autres êtres. C’est aimer Dieu de tout son cœur, de toute son âme, de tout son esprit et de toute sa force. Cela implique l’absence totale d’égoïsme, la présence perpétuelle et l’influence pénétrante de l’amour pur et parfait.
2 La perfection chrétienne, p. 7.
Le professeur Finney dit : « Par sanctification complète, j’entends la consécration de tout l’être à Dieu. En d’autres termes, c’est l’état de dévouement à Dieu et à son service requis par la loi morale. La loi est parfaite. Il faut juste ce qui est juste ; tout cela est juste, et rien de plus. Il n’y a ni plus ni moins de perfection ou de sanctification complète que l’obéissance à la loi. L’obéissance à la loi de Dieu dans un enfant, un homme, un ange, et en Dieu lui-même, est la perfection en chacun d’eux. Et rien ne peut être parfait dans un être en dehors de cela ; et il ne peut y avoir rien au-dessus.» 1
1 Oberlin Evinyelist, t. II, p. 1.
La loi qui lie maintenant les hommes et à laquelle ils sont tenus de se conformer parfaitement, c’est la loi morale originelle donnée à Adam. Mais cette loi n’exige ni plus ni moins que ce que tout homme, dans son état intérieur et dans ses circonstances extérieures, est capable de rendre. La loi rencontre l’homme à chaque étape de sa vie progression ascendante ou descendante. Plus il a de grâce, de connaissance ou de force, plus la loi l’exige. D’autre part, moins il possède de connaissances, de culture, de susceptibilité morale ou de force, moins la loi exige de lui.
Le président Mahan dit : « La perfection n’implique pas que nous aimions Dieu comme les saints le font au ciel, mais simplement que nous l’aimions autant que possible avec nos pouvoirs actuels. »
Le professeur Finney dit : « La loi n’exige pas que nous aimions Dieu comme nous pourrions le faire, si nous avions toujours amélioré notre temps, ou si nous n’avions jamais péché. Elle ne suppose pas que nos pouvoirs soient dans un état parfait. Le service requis est réglé par notre capacité.
Le principe de cette obéissance parfaite est notre propre capacité naturelle. Un agent moral libre doit pouvoir être et faire tout ce que la loi peut légitimement exiger. L’aptitude morale, l’habileté naturelle, l’habileté gracieuse, sont des distinctions que le professeur Finney déclare parfaitement absurdes. « C’est, dit-il, une première vérité de la raison que l’obligation morale implique la possession de toute sorte de capacité qui est requise pour rendre possible l’acte requis. » 2
2 Sermons, vol. iv. N° 18.
La théorie de la perfection d’Oberlin est fondée sur les principes suivants :
1. La sainteté consiste dans la bienveillance désintéressée, c’est-à-dire dans la parfaite volonté que Dieu fasse tout ce qu’exige le plus grand bien de l’univers. Un homme a, ou n’a pas, cette volonté. S’il l’a fait, il a tout ce qu’on attend de lui. Il est parfait. S’il n’a pas cette volonté, il est en rébellion contre Dieu. C’est pourquoi il est dit : « La perfection, telle qu’elle est impliquée dans l’action de notre Des pouvoirs volontaires, en pleine harmonie avec nos convictions actuelles du devoir, est une condition irréversible de la vie éternelle.» 3
3 Oberlin Quarterly Review, mai 1846, p. 468.
2. Il n’y a de péché que dans la transgression volontaire de la loi connue.
3. Il n’y a pas de caractère moral dans quoi que ce soit de générique les volitions, ou les fins qui se terminent par une fin ultime. Il n’y a pas de caractère moral dans le sentiment, et encore moins dans les états d’esprit qui ne sont pas déterminés par la volonté. Quand le but d’un homme est de promouvoir le bonheur de l’univers, il est parfaitement saint ; quand il s’agit de quoi que ce soit d’autre, il est parfaitement pécheur.
4. Tout homme, en vertu de sa qualité d’agent libre, a la pleine capacité de remplir toutes ses obligations. Ce principe, bien que mentionné en dernier, est la racine de tout le système.
La relation entre ces théories de la perfection.
Les théories pélagienne et oberline s’accordent quant à leurs vues sur la nature du péché ; la capacité de l’homme ; et l’étendue de l’obligation de la loi.
Ils diffèrent quant à leurs points de vue sur la nature de la vertu ou la sainteté. Le système pélagien ne suppose pas que la bienveillance désintéressée, ou le but de promouvoir le plus grand bien de l’univers, soit la somme de toutes les vertus ; c’est-à-dire qu’elle ne met pas l’univers à la place de Dieu, comme ce à quoi notre allégeance est due. Ils diffèrent aussi en ce que, tandis que les théologiens d’Oberlin maintiennent la pleine capacité de l’homme, ils donnent plus d’importance à l’œuvre du Saint-Esprit ; et en cela, il est généralement admis que, bien que les hommes aient la capacité de faire tout leur devoir, ils ne l’exerceront pas correctement à moins d’être influencés par la grâce de Dieu.
Les théories romaine et arminienne sont d’accord (1). En ce que l’un et l’autre enseignent que la loi à laquelle nous sommes tenus d’être conformes n’est pas « l’excellence idéale », pas la loi adamique ; non pas la loi morale dans sa rigueur originelle ; mais une loi plus douce et adaptée à notre condition depuis l’automne. (2) Que par l’affranchissement du péché on n’entend pas l’affranchissement de ce que la loi condamne dans sa rigueur, et ce qui, par sa nature, a besoin d’expiation et de pardon, mais de tout ce que la loi plus douce, « la loi du Christ », condamne. (3.) Ils s’accordent à nier aux hommes, depuis la chute, la capacité d’observer parfaitement les commandements de Dieu, mais ils attribuent à la grâce de Dieu la capacité et la disposition d’obéir ; ou l’influence surnaturelle du Saint-Esprit.
Ils diffèrent quant à la manière dont cette grâce est communiquée, en ce que les romanistes disent que ce n’est que par les sacrements ; tandis que les Arminiens disent qu’une grâce suffisante est donnée à tous les hommes, ce qui, s’il est dûment amélioré, assure des mesures de grâce plus grandes qui permettront au croyant de devenir parfait. Ils diffèrent aussi quant à la nature des bonnes œuvres en ce que les romanistes englobent dans cette catégorie beaucoup de choses qui ne sont pas commandées dans les Écritures ; et comme ils enseignent la possibilité d’accomplir des œuvres de surérogation, ce que les arminiens nient. Les romanistes enseignent aussi que les bonnes œuvres méritent la vie éternelle, ce qui n’est pas le cas des arminiens évangéliques.
Ces théories, cependant, s’accordent toutes à enseigner que la loi de Dieu a été abaissée dans la mesure où ses exigences sont satisfaites par un degré d’obéissance inférieur à celui qui était exigé d’Adam, ou de l’homme dans son état normal ; et par conséquent en appelant perfection ce qui en fait n’est pas la perfection, ni aux yeux de Dieu ou d’une conscience éclairée. C’est une contradiction de dire qu’un homme est parfait dont les actes et les défauts ont besoin d’être expiés et de la miséricorde pardonnante de Dieu.
On peut supposer sans risque de se tromper qu’aucun homme vivant n’a jamais vu un semblable qu’il juge parfait, même dans la lumière imparfaite sous laquelle un homme se révèle à ses semblables. Et aucun homme sain d’esprit ne peut se considérer comme parfait, à moins qu’il n’abaisse le niveau du jugement pour l’adapter à son cas. Et c’est là que réside l’un des dangers particuliers de tout le système. Si la loi de Dieu peut être assouplie dans ses exigences pour s’adapter à l’état de ses sujets, alors il n’y a pas de limite à assigner à sa condescendance. Ainsi Le perfectionnisme est parfois tombé dans l’antinomisme, mais pas chez les méthodistes.
CHAPITRE XIX.
LA LOI.
§ 1. Principes préliminaires.
Les principales significations du mot loi sont : (1.) Un établissement bien établi dans l’ordre dans la séquence des événements. Une loi, en ce sens, n’est qu’un fait. Que le les planètes sont éloignées du soleil selon une proportion déterminée ; que les feuilles d’une plante sont disposées en spirale régulière autour de la tige ; et qu’une idée, par association, en suggère une autre, sont de simples faits. Pourtant, ils sont proprement appelés lois, dans le sens d’ordres établis de séquence ou de relation. De même, ce qu’on appelle les lois de la lumière, du son et de l’affinité chimique ne sont, pour la plupart, que de simples faits. (2.) Une force agissant uniformément qui détermine la séquence régulière des événements. En ce sens, les forces physiques que nous voyons à l’œuvre autour de nous sont appelées les lois de la nature. La gravitation, la lumière, la chaleur, l’électricité et le magnétisme sont de telles forces. Le fait qu’ils agissent uniformément leur donne le caractère de lois. C’est ainsi que l’Apôtre parle aussi d’une loi du péché dans ses membres, qui fait la guerre à la loi de l’esprit. (3) La loi est ce qui lie la conscience. Elle impose l’obligation de se conformer à ses exigences à toutes les créatures raisonnables. Cela est vrai de la loi morale dans son sens le plus large. Il en est de même des lois humaines dans la sphère de leur application légitime.
Dans tous ces sens du mot, la loi implique un législateur ; c’est-à-dire une intelligence agissant volontairement pour atteindre une fin. L’action irrégulière ou non réglée des forces physiques produit le chaos ; Leur action ordonnée produit le cosmos. Mais l’action ordonnée est une action préétablie, soutenue et dirigée pour l’accomplissement d’un but.
Cela est encore plus vrai en ce qui concerne les lois morales. La moindre analyse de nos sentiments suffit pour montrer que l’obligation morale est l’obligation de conformer notre caractère et notre conduite à la volonté d’un Être infiniment parfait, qui a l’autorité de rendre sa volonté impérative, et qui a le pouvoir et le droit de punir la désobéissance. Le sentiment de culpabilité se résout particulièrement en une conscience d’être soumis à un gouverneur moral. La loi morale est donc par sa nature la révélation de la volonté de Dieu en tant que cette volonté concerne la conduite de ses créatures. Elle n’a pas d’autre autorité et d’autre sanction que celle qu’elle tire de Lui.
Il en est de même à l’égard des lois des hommes. Ils n’ont pas de pouvoir ou d’autorité à moins qu’ils n’aient un fondement moral. Et s’ils ont une base morale, de sorte qu’ils lient la conscience, cette base doit être la volonté divine. L’autorité des dirigeants civils, les droits de propriété, de mariage et tous les autres droits civils ne reposent pas sur des abstractions, ni sur des principes généraux d’opportunité. Ils pourraient être ignorés sans culpabilité, s’ils n’étaient pas soutenus par l’autorité de Dieu. Toute obligation morale se résout donc en obligation de se conformer à la volonté de Dieu. Et tous les droits de l’homme sont fondés sur l’ordonnance de Dieu. De sorte que le théisme est la base de la jurisprudence aussi bien que de la morale. Cette doctrine est enseignée par Stahl, peut-être la plus grande autorité vivante en matière de philosophie du droit. « Toute science philosophique,» dit-il, «doit commencer par le premier principe de toutes choses, c’est-à-dire par l’Absolu. Il doit donc choisir entre le théisme et le panthéisme, entre la doctrine selon laquelle la cause ou le principe premier est le Dieu personnel, extramondain et révélateur de lui-même, et la doctrine selon laquelle le premier principe est une puissance impersonnelle immanente au monde.» 1 Ce n’est pas du panthéisme, mais du fétichisme que de faire de toutes choses Dieu. La vraie question est de savoir si l’Absolu a ou non une personnalité et une conscience de soi. Stahl avait déjà dit dans le même sens, que toute philosophie, et toute religion, et particulièrement la religion chrétienne, doit procéder sur une théorie de l’univers (une Weltanschauung). C’est la doctrine chrétienne de Dieu et de son rapport au monde, qu’il fonde la science juridique et politique (de Rechts- und Staatslehre) 2 C’est pourquoi il appelle son système « théologique » en tant qu’il fait de la nature et de la volonté de Dieu le fondement de tous les devoirs et la source de tous les droits.
1 dé. Philosophie, des Rechts, von Friedrich Julius Stahl ; Rechts- und Staatslehre, 1. i. 1, § 1 ; 4e édit. Heidelberg, 1870, vol. ii.part 1, p. 7.
2 Einleituny, § 5, ut supra, p. 4.
Il reconnaît cependant la distinction entre la morale et la religion. « La morale, dit-il, est la perfection (Vollendung) de l’homme en lui-même (en ce qui concerne la volonté) ; ou la révélation de l’être divin dans l’homme. L’homme est l’image de Dieu, et donc dans sa nature est semblable à Dieu, parfait ou complet en lui-même ; et la conformité à l’image divine est pour lui le but et le commandement. (Matt. v. 45.) La religion, d’autre part, est le lien entre l’homme et Dieu, ou ce qui lie les hommes à Dieu, de sorte que nous ne saurions et ne voulons qu’en Lui, nous nous référerons tout à Lui, la consécration entière, l’union personnelle avec Dieu. Ainsi, l’amour du prochain, le courage, la spiritualité (le contraire de la sensualité), peuvent être simplement des vertus morales ; tandis que la foi et l’amour de Dieu sont purement religieux. Le courage de la garde de Napoléon était une vertu morale (un état de volonté) ; le courage de Luther était religieux (un pouvoir dérivé de sa relation avec Dieu).» 1
1 Stahl, ut supra 1. ii. 1, § 24 ; Ibid., p. 71.
La religion et la morale, bien que donc différentes, ne sont pas indépendantes. Ce ne sont que des phases différentes de notre relation avec Dieu. Stahl contredit donc la doctrine de Grotius, qu’il y aurait un jus naturel s’il n’y avait pas de Dieu, ce qui équivaut à dire qu’il y aurait obligation à la bonté s’il n’y avait pas de bonté. L’excellence morale est de l’essence même de Dieu. Il est la bonté concrète ; la raison, l’excellence, la connaissance et le pouvoir infinis sous une forme personnelle ; de sorte qu’il ne peut y avoir d’obligation à la vertu qui n’implique pas l’obligation envers Dieu. Wolf a appliqué la doctrine de Grotius jusqu’à dire qu’un athée, s’il était cohérent, agirait exactement comme le chrétien agit. Ce principe de Grotius, dit Stahl, contenait le germe de la séparation d’avec la religion, qui se déploya chez Kant dans l’ignorance, et, chez ceux qui le suivirent, dans la négation de Dieu.2
2 Ibid., p. 73 et 74.
L’idée première de la bonté est la volonté essentielle et non créatrice de Dieu. La volonté divine dans son essence est l’amour infini, la miséricorde, la patience, la vérité, la fidélité, la rectitude, la spiritualité et tout ce qui est inclus dans la sainteté, ce qui constitue la nature la plus intime de Dieu. La sainteté de Dieu ne précède donc ni sa volonté (' sanctitas antecedens voluntatem ' des scolastiques), ni la suit, mais c’est sa volonté elle-même. Le bien n’est pas une loi pour la volonté divine (de sorte que Dieu le veut parce qu’il est bon) ; elle n’est pas non plus une création de sa volonté (de sorte qu’elle devient bonne parce qu’Il la veut) ; mais c’est la nature (das Urwollen) de Dieu d’éternité en éternité.» 3 Il est dit encore : « D’où il suit que la bonté morale est concrète, spécifique, ... absolue, originelle, aussi peu déterminée par des lois logiques que par un rapport à des fins extérieures.....
3 Idem. I. ii. 2, § 29 ; Ibid., p. 81 et 85.
Ce n’est pas la doctrine de l’éthique moderne. Selon selon le point de vue eudaimoniste adopté par les philosophes anglais, par Thomasius et d’autres, le bien est bon parce qu’il tend à produire le bonheur. Selon les rationalistes, le bien est la conformité aux lois de la pensée (Denkrichtigkeit..... C’était là la véritable doctrine de Wolf, qui fit consister la morale dans l’ordre (Regelmassigkeit) ; C’était encore plus nettement la doctrine de Kant, chez qui la loi morale est une conséquence des lois de la pensée. Il dit expressément que l’idée du bien moral doit être dérivée de la loi antérieure, c’est-à-dire de la loi de la raison.1
1 Stahl, ut supra, p. 87.
Ces deux principes doivent donc être tenus pour acquis ; Premièrement, que le bien moral est bon par sa nature même, et non à cause de ses tendances, ou à cause de sa conformité aux lois de la raison ; et, deuxièmement, que toute loi a son fondement dans la nature et la volonté de Dieu. Ces principes sont très complets. Ils sont d’une importance particulière dans l’exposé de la loi sous son aspect en tant que volonté révélée de Dieu destinée à réglementer le caractère et la conduite de l’homme.
Principes protestants limitant l’obéissance aux lois humaines.
Il y a un autre principe considéré comme fondamental par tous les protestants, c’est que la Bible contient toute la règle du devoir pour les hommes dans leur état actuel d’existence. Rien ne peut légitimement lier la conscience qui n’est pas commandé ou interdit par la Parole de Dieu. Ce principe est la sauvegarde de cette liberté par laquelle le Christ a rendu son peuple libre. Si l’on y renonce, nous sommes à la merci de l’Église extérieure, de l’État ou de l’opinion publique. C’est simplement le principe qu’il est juste d’obéir à Dieu plutôt qu’à l’homme. Notre obligation d’obéir aux lois humaines, sous quelque forme que ce soit, repose sur notre obligation d’obéir à Dieu ; et, par conséquent, chaque fois que les lois humaines sont en conflit avec la loi de Dieu, nous sommes tenus de leur désobéir. Lorsque les empereurs païens ordonnèrent aux chrétiens d’adorer des idoles, les martyrs refusèrent. Lorsque les papes et les conciles ordonnèrent aux protestants d’adorer la Vierge Marie et de reconnaître la suprématie de l’évêque de Rome, les martyrs protestants refusèrent. Lorsque les presbytériens d’Écosse ont été requis par leur dirigeants de l’Église et de l’État à se soumettre à l’autorité des évêques prélats, ils refusèrent. Lorsque les puritains d’Angleterre furent appelés à reconnaître la doctrine de « l’obéissance passive », ils refusèrent à nouveau. Et c’est à la position ainsi prise par ces martyrs et confesseurs que le monde est redevable de toutes les religions et de la liberté civile dont il jouit aujourd’hui.
La question de savoir si une loi de l’Église ou de l’État est en conflit avec la vérité ou la loi de Dieu, c’est une question que chaque homme doit décider pour lui-même. C’est à lui que repose la responsabilité et, par conséquent, en tant qu’individu, appartient le droit de jugement.
Bien que ces principes, lorsqu’ils sont énoncés dans la thèse, soient universellement reconnus parmi les protestants, ils sont néanmoins très souvent négligés. Cela n’est pas seulement vrai du passé, lorsque l’Église et l’État ont tous deux ouvertement revendiqué le droit de faire des lois pour lier la conscience. C’est vrai à l’heure actuelle. Les hommes insistent encore sur le droit de commettre ce péché que Dieu n’interdit pas ; et ce que Dieu n’a pas commandé. Ils prescrivent des règles de conduite et des conditions de communion de l’Église, qui n’ont aucune sanction dans la Parole de Dieu. C’est tout autant un devoir pour le peuple de Dieu de résister à de telles usurpations, que ce fut le cas pour les premiers chrétiens de résister à l’autorité des empereurs romains en matière de religion, ou pour les premiers protestants de refuser de reconnaître au pape le droit de déterminer pour eux ce qu’ils devaient croire. et ce qu’ils devaient faire. L’essence de l’infidélité consiste en ce qu’un homme place ses propres convictions sur les questions de vérité et de devoir au-dessus de la Bible. Cela peut être fait par des fanatiques dans la cause de la bienveillance, aussi bien que par des fanatiques dans toute autre cause. C’est de l’infidélité dans les deux cas. Et en tant que telle, elle devrait être dénoncée et combattue, à moins que nous ne soyons prêts à renoncer à notre l’allégeance à Dieu, et faire de nous les serviteurs des hommes.
La liberté chrétienne en matière d’indifférence.
Il est parfaitement compatible avec le principe énoncé ci-dessus, qu’un carrelage peut être bon ou mauvais selon les circonstances, et, par conséquent, il peut souvent être mal pour un homme de faire ce que la Bible ne condamne pas. Paul lui-même circoncit Timothée ; mais il dit aux Galates que s’ils se laissaient circoncire, Christ ne leur servirait à rien. Manger de la viande offerte en sacrifice aux idoles était une question d’indifférence. Pourtant, l’Apôtre a dit : « Si la viande offense mon frère, je ne mangerai pas de chair tant que le monde sera debout, de peur que je ne fasse offenser mon frère. »
Il y a deux principes importants impliqués dans ces faits bibliques. La première, c’est qu’une chose indifférente en elle-même peut devenir même fatalement mauvaise si elle est faite avec une mauvaise intention. La circoncision n’était rien, et l’incirconcision n’était rien. Peu importait qu’un homme fût circoncis ou non. Mais si quelqu’un se soumettait à la circoncision comme à une obéissance légale et comme à la condition nécessaire de sa justification devant Dieu, il rejetait par là même l’Évangile, ou, comme l’apôtre l’a dit, il tombait de la grâce. Il a renoncé à la méthode gratuite de la justification, et Christ est devenu sans effet pour lui. De la même manière, manger de la viande qui avait été offerte en sacrifice à une idole, était un sujet d’indifférence. « La viande, dit Paul, ne nous recommande pas à Dieu, car nous ne sommes pas meilleurs non plus, si nous en mangeons ; Et si nous ne mangeons pas, nous ne sommes pas pires. Cependant, si un homme mangeait une telle viande comme un acte de révérence envers l’idole, ou dans des circonstances qui impliquaient que c’était un acte d’adoration, il était coupable d’idolâtrie. C’est pourquoi l’apôtre a enseigné que la participation à des fêtes tenues dans l’enceinte du temple d’une idole était de l’idolâtrie.
L’autre principe est que, quelle que soit notre intention, nous péchons contre Christ lorsque nous faisons un tel usage de notre liberté, en matière d’indifférence, que les autres offensent. Dans le premier de ces cas, le péché n’a pas été d’être eireumcisé, mais de faire de la circoncision une condition de notre justification. Dans le second cas, l’idolâtrie ne consistait pas à manger de la viande offerte en sacrifice aux idoles, mais à la manger comme un acte d’adoration à l’idole. Et dans le troisième cas, le péché n’a pas été d’affirmer notre liberté en matière d’indifférence, mais d’amener les autres à offenser.
Les règles que les Écritures établissent clairement à ce sujet sont les suivantes : (1) Qu’aucun homme ou groupe d’hommes n’a le droit de déclarer péché ce que Dieu n’interdit pas. Il n’y avait pas de péché à être eireumcisé, ou à manger de la viande, ou à observer les jours sacrés des Hébreux. (2.) Que c’est une violation de la loi de l’amour, et par conséquent un péché contre Christ, de faire un tel usage de notre liberté que de causer aux autres au péché. « Prenez garde, dit l’Apôtre, que votre liberté ne devienne en aucun cas une pierre d’achoppement pour ceux qui sont faibles. » « Quand vous péchez ainsi contre les frères, et que vous blessez leur faible conscience, vous péchez contre Christ. » (1 Corinthiens VIII. 9,12.) « Il est bon (c’est-à-dire moralement obligatoire) de ne pas manger de viande, ni de boire du vin, ni rien qui puisse faire trébucher ton frère, ou l’offenser, ou l’affaiblir. » « Toutes choses sont pures, mais c’est un mal pour l’homme qui mange dans l’offense. » (Rom. xiv. 21, 20.) (3) Rien d’indifférent en soi ne peut être invoqué comme motif d’obligation permanente et universelle. Parce qu’il était mauvais en Galatie de se soumettre à la circoncision, il ne s’ensuit pas qu’il ait été mal dans Paul de circoncire Timothée. Parce qu’il était mauvais à Corinthe de manger de la viande, il ne s’ensuit pas que ce soit mal toujours et partout. Une obligation découlant des circonstances doit varier avec les circonstances. (4) Quand il est obligatoire de s’abstenir de l’usage des choses indifférentes, c’est une question de jugement privé. Aucun homme n’a le droit de décider de cette question à la place d’autres hommes. Aucun évêque, prêtre ou tribunal ecclésiastique n’a le droit d’en décider. Sinon, ce ne serait pas une question de liberté. Paul a constamment reconnu le droit (« £ουσια) des chrétiens de juger eux-mêmes dans de tels cas. Il ne le fait pas seulement implicitement, mais il l’affirme aussi expressément, et condamne ceux qui voudraient le remettre en question. « Que celui qui mange ne méprise pas celui qui ne mange pas ; et que celui qui mange ne juge pas celui qui mange, car Dieu l’a reçu. Qui es-tu, toi qui juges le serviteur d’autrui ? C’est à son maître qu’il tient ou qu’il tombe. » ־ « Un homme estime un jour au-dessus d’un autre : un autre estime tous les jours de la même manière. Que chacun soit pleinement persuadé dans son propre esprit. (Rom. xiv. 3, 4, 5.) C’est un dicton commun que chaque homme a un pape dans son sein. C’est-à-dire que la disposition à dominer l’héritage de Dieu est presque universelle. Les hommes veulent que leurs opinions sur les questions morales soient transformées en lois pour lier les consciences de leurs frères. Il s’agit tout autant d’une usurpation d’une prérogative divine lorsqu’elle est commise par un chrétien privé ou par un tribunal ecclésiastique, que lorsqu’elle est faite par l’évêque de Rome. Nous sommes tout aussi tenus d’y résister dans un cas que dans l’autre. (5) Il s’agit de ce qui a été dit que l’usage qu’un homme fait de sa liberté chrétienne ne peut jamais légitimement être considéré comme un motif de censure ecclésiastique ou un terme de communion chrétienne.
Usage scripturaire du mot loi.
Les Écritures comprennent uniformément par la loi une manifestation de la volonté de Dieu. Toutes les opérations de la nature sont ordonnées par les lois de sa nomination. Et sa volonté est représentée comme le fondement ultime de l’obligation morale. En hébreu, on l’appelle תרדה , instruction, parce que c’est, comme le dit l’Apôtre, « la forme de la connaissance et de la vérité ». C’est la norme du bien et du mal. En grec, on l’appelle rô^oç, coutume, et alors, comme la coutume ou l’usage règle la conduite des hommes, tout ce qui a cette autorité, ou qui contrôle en fait l’action, est appelé rô/χος. Dans le Nouveau Testament, il est constamment utilisé dans ce sens large. Elle s’applique quelquefois à une règle de conduite cependant révélée ; tantôt aux Écritures comme à la volonté de Dieu révélée surnaturellement, comme règle de foi et de pratique ; tantôt au Pentateuque ou Loi de Moïse ; et parfois spécifiquement à la loi morale. Il faut entendre ici la révélation de la volonté de Dieu qui a pour but de lier la conscience et de régler la conduite des hommes.
Cette loi est révélée dans la constitution de notre nature, et plus pleinement et plus clairement dans la Parole écrite de Dieu. Qu’il y ait une révélation obligatoire de la loi, indépendamment de toute révélation extérieure surnaturelle, est expressément enseigné dans la Bible. Paul dit des païens qu’ils sont une loi pour eux-mêmes. Ils ont la loi écrite dans leur cœur. Cela est prouvé, nous dit-il, parce qu’ils font, φΰσεί, par nature, c’est-à-dire en vertu de la constitution de leur nature, les choses de la loi. De même morales que prescrit la loi écrite, la conduite des païens montre qu’ils savent être obligatoires. C’est pourquoi leur conscience approuve ou désapprouve, selon qu’ils obéissent ou désobéissent à cette loi révélée intérieurement. Ce qui est ainsi enseigné dans L’Écriture est confirmée par la conscience et l’expérience. Tout homme est conscient d’une connaissance du bien et du mal, et d’un sens de l’obligation, qui sont indépendamment de toute révélation extérieure. Il se peut qu’il ne soit pas en mesure de déterminer d’où il vient Cette connaissance vient. Il sait, cependant, qu’elle a été en lui contemporaine de la l’aube de la raison, et s’est élargie et renforcée au fur et à mesure que sa raison se déroulait. Sa conscience lui dit que la règle est à l’intérieur, et qu’elle serait là cependant Il n’y avait pas de révélation positive ou externe du devoir. En d’autres termes, nous n’avons pas renvoient le sens de l’obligation morale à une loi révélée de l’extérieur, source, mais à la constitution de notre nature. Ce n’est l’expérience d’aucun classe d’hommes exclusivement, mais l’expérience commune de la race. Partout où il y a des hommes, il y a le sens de l’obligation morale et la connaissance du bien et du mal.
On objecte souvent à cette doctrine que les hommes diffèrent considérablement dans leurs jugements moraux. Ce que les hommes d’un âge ou d’un pays considèrent comme des vertus, les hommes d’autres âges ou d’autres pays le dénoncent comme des crimes. Mais cette diversité même prouve l’existence du sens moral. Les hommes ne pourraient pas différer dans leurs jugements sur la beauté, si l’élément esthétique n’appartenait pas à leur nature. Ils ne pouvaient pas non plus différer sur les questions de moralité à moins que le sens du bien et du mal ne soit inné et universel. La diversité en question n’est pas plus grande qu’en ce qui concerne les vérités rationnelles. Que les hommes diffèrent dans leurs jugements sur ce qui est vrai, ce n’est pas une preuve que la raison ne soit pas un élément naturel et essentiel de leur constitution. De même qu’il y a certaines vérités de la raison qui sont intuitives et perçues par tous les hommes, de même il y a des vérités morales si simples qu’elles sont universellement reconnues. De même qu’au-delà de ces limites étroites il y a diversité de connaissances, il doit y avoir diversité de jugement. Mais cela n’est pas incompatible avec la doctrine de l’Écriture selon laquelle même les païens les plus dégradés sont une loi pour eux-mêmes, et montrent l’œuvre de la loi écrite dans leur cœur. Comme la révélation que Dieu a faite de sa puissance éternelle et de sa divinité dans ses œuvres est vraie et digne de foi, et suffisante pour rendre inexcusable l’ignorance ou la négation de son existence, tandis qu’elle ne remplace pas la nécessité d’une révélation plus claire dans sa parole ; il y a donc une révélation imparfaite de la loi faite dans la constitution même de notre nature, par laquelle ceux qui n’ont pas d’autre révélation doivent être jugés, mais qui ne rend pas inutiles les enseignements plus clairs des Écritures.
Dans la Bible comme contenant une révélation de la volonté de Dieu, la première Ce qui retient l’attention, c’est la grande diversité des préceptes qu’elle contient. Cette différence concerne la nature des préceptes, et le terrain sur lequel ils reposent, ou la raison pour laquelle ils sont obligatoires.
1. Il y a des lois qui sont fondées sur la nature de Dieu. C’est à cette classe qu’appartient le commandement d’aimer Dieu suprêmement, d’être juste, miséricordieux et bon. L’amour doit être partout et toujours obligatoire. L’orgueil, l’envie et la méchanceté doivent être partout et toujours mauvais. De telles lois lient toutes les créatures raisonnables, les anges aussi bien que les hommes. Le critère de ces lois est qu’elles sont absolument immuables et indispensables. Tout changement en eux impliquerait, non seulement un changement dans les relations entre les hommes, mais dans la nature même de Dieu.
2. Une seconde classe de lois comprend celles qui sont fondées sur les relations permanentes des hommes dans leur état actuel d’existence. Telles sont les lois morales, par opposition aux simples lois, concernant la propriété, le mariage et les devoirs des parents et des enfants, ou des supérieurs et des inférieurs. De telles lois ne concernent les hommes que dans leur état d’être actuel. Ils sont cependant permanents tant que les relations qu’ils envisagent se poursuivent. Quelques-unes de ces lois lient les hommes en tant qu’hommes ; d’autres maris en tant que maris, les femmes en tant qu’épouses, et les parents et les enfants en tant que tels, et par conséquent ils lient tous les hommes qui entretiennent ces diverses relations. Elles sont fondées sur la nature des choses, comme on l’appelle ; c’est-à-dire sur la constitution que Dieu a jugé bon d’ordonner. Cette constitution aurait pu être différente, et alors ces lois n’auraient pas eu leur place. Il n’était pas nécessaire que le droit de propriété ait existé. Dieu aurait pu rendre toutes choses aussi communes que la lumière du soleil ou l’air. Les hommes auraient pu être comme des anges, ne se mariant ni ne donnant en mariage. Sous une telle constitution, il n’y aurait pas de place pour une multitude de lois qui sont maintenant d’une obligation universelle et nécessaire.
3. Une troisième classe de lois a son fondement dans certaines relations temporaires des hommes, ou conditions de la société, et est appliquée par l’autorité de Dieu. C’est à cette classe qu’appartiennent beaucoup de lois judiciaires ou civiles de l’ancienne théocratie ; lois régissant la répartition des biens, les devoirs des maris et les épouses, le châtiment des crimes, etc. Ces lois étaient l’application des principes généraux de justice et de droit aux circonstances particulières du peuple hébreu. De telles dispositions législatives ne lient que ceux qui se trouvent dans les circonstances envisagées et cessent d’être obligatoires lorsque ces circonstances changent. Il est toujours et partout juste que le crime soit puni, mais le genre ou le degré de punition peut varier avec l’état variable de la société. Il est toujours juste que les pauvres soient soutenus, mais une manière de s’acquitter de ce devoir peut être convenable à une époque et dans un pays, et une autre préférable à d’autres époques et en d’autres lieux. Par conséquent, toutes les lois de l’Ancien Testament, qui avaient leur fondement dans les circonstances particulières des Hébreux, ont cessé d’être obligatoires lorsque l’ancienne dispensation a disparu.
Il est souvent difficile de déterminer à laquelle des deux dernières classes appartiennent certaines lois de l’Ancien Testament ; et donc, de décider s’ils sont toujours obligatoires ou non. Des maux déplorables ont découlé d’erreurs sur ce point. Les théories de l’union de l’Église et de l’État, du droit du magistrat d’intervenir avec autorité en matière de religion, et du devoir de persécution, en ce qui concerne l’autorité de l’Écriture, reposent sur le transfert des lois fondées sur les relations temporaires des Hébreux aux relations modifiées des chrétiens. Parce que les rois hébreux étaient les gardiens des deux tables de la Loi, et qu’ils étaient tenus de supprimer l’idolâtrie et toute fausse religion, on en a déduit que tel est encore le devoir du magistrat chrétien. Parce que Samuel tailla Agag en pièces, il fut déduit qu’il était juste de traiter de la même manière les hérétiques. Personne ne peut lire l’histoire de l’Église sans être frappé des maux terribles qui ont découlé de cette erreur. D’un autre côté, il y a quelques-unes des lois judiciaires de l’Ancien Testament qui étaient réellement fondées sur les relations permanentes des hommes, et qui, par conséquent, étaient destiné à être d’obligation perpétuelle, ce que beaucoup ont répudié comme étant particulier à l’ancienne dispensation. Telles sont quelques-unes des lois relatives au mariage et à l’infliction de la peine capitale pour le crime de meurtre. Si l’on pose la question : Comment pouvons-nous déterminer si une loi judiciaire de l’Ancien Testament est encore en vigueur ? la réponse est d’abord, quand l’autorité continue d’une telle loi est reconnue dans le Nouveau Testament. Pour les chrétiens, c’est décisif. Et deuxièmement, si la raison ou le fondement d’une loi donnée est permanent, la loi elle-même est permanente.
4. La quatrième classe de lois est celle qu’on appelle positive, et qui tirent toute leur autorité du commandement explicite de Dieu. Tels sont les rites et les cérémonies extérieures, tels que la circoncision, les sacrifices, et la distinction entre les viandes pures et impures, et entre les mois, les jours et les années. Le critère de ces lois est qu’elles ne seraient pas contraignantes si elles n’étaient pas promulguées positivement ; et qu’ils ne lient que ceux à qui ils sont donnés, et seulement tant qu’ils restent en vigueur par la nomination de Dieu. De telles lois ont pu répondre à des fins importantes, et il y avait sans doute des raisons valables pour lesquelles elles ont été imposées ; Cependant, ils sont spécifiquement différents des commandements qui, par leur propre nature, sont moralement obligatoires. L’obligation d’obéir à de telles lois ne découle pas de leur adéquation à la fin pour laquelle elles ont été données, mais uniquement de l’ordre divin.
Jusqu’à quel point peut-on se passer des lois contenues dans la Bible ?
C’est une question très discutée entre protestants et romanistes. Les protestants soutenaient que l’Église n’avait pas le pouvoir revendiqué par les romanistes, de libérer les hommes de l’obligation du serment et de rendre légaux les mariages qui, sans la sanction de l’Église, seraient invalides. L’Église n’a ni l’autorité d’écarter aucune loi de Dieu, ni de décider circonstances dans lesquelles une loi divine cesse d’être obligatoire, de sorte qu’elle reste en vigueur jusqu’à ce que l’Église déclare les parties libérées de son obligation. Sur ce sujet, il est clair, (1.) Que seul Dieu peut libérer les hommes de l’obligation d’une loi divine qu’il leur a imposée. (2) Qu’en ce qui concerne les lois positives de l’Ancien Testament et les lois judiciaires qui étaient destinées exclusivement aux Hébreux vivant sous la théocratie, elles ont toutes été abolies par l’introduction de la nouvelle dispensation. Nous ne sommes plus obligés de circoncire, nos enfants, d’observer la Pâque, ou la fête des tabernacles, ou de monter trois fois dans l’année à Jérusalem, ou d’exiger œil pour œil, ou dent pour dent. (3) À l’égard des lois qui sont fondées sur les relations permanentes des hommes, telles que les lois de la propriété, du mariage et de l’obéissance aux parents, elles peuvent être écartées par l’autorité de Dieu. Il n’était pas mauvais que les Hébreux pillent les Égyptiens ou dépossèdent les Cananéens, parce que Celui dont la terre et sa plénitude ont permis ces actes. Il avait le droit de prendre les biens d’un peuple et de les donner à un autre. L’extermination des habitants idolâtres de la terre promise, sur l’ordre de Josué, était autant un acte de Dieu que si elle avait été effectuée par la peste ou la famine. Il s’agissait d’une exécution judiciaire par le Souverain Suprême. De la même manière, Bien que le mariage, tel qu’il a été institué par Dieu, ait été et soit une alliance indissoluble entre un homme et une femme, il a cependant jugé bon d’admettre, sous la loi mosaïque, dans certaines limites, la polygamie et le divorce. Tant que cette permission se poursuivait, ces choses étaient licites ; Lorsqu’il a été retiré, ils ont cessé d’être admissibles.
Quand une Loi Divine est remplacée par une autre.
La classification ci-dessus des lois divines, qui est celle qui est généralement adoptée, montre qu’elles diffèrent par leur dignité et leur importance relatives. C’est pourquoi, lorsqu’ils entrent en conflit, l’inférieur doit céder la place au supérieur. C’est ce que nous enseigne Dieu quand il dit : « J’aurai miséricorde et non pas sacrifice. » Et notre Seigneur dit aussi : « Le sabbat a été fait pour l’homme, et non l’homme pour le sabbat », et, par conséquent, le sabbat pouvait être violé lorsque les devoirs de miséricorde le rendaient nécessaire. Tout au long des Écritures, nous trouvons des lois positives subordonnées à celles de l’obligation morale. Christ a approuvé le docteur de la loi qui a dit qu’aimer Dieu de tout son cœur, et notre prochain comme nous-mêmes, « est plus que tous les holocaustes et tous les sacrifices ».
La perfection de la loi morale, telle qu’elle est révélée dans les Écritures, comprend les points déjà examinés, (1.) Que tout ce que la Bible déclare être faux, est faux ; que tout ce qu’il déclare être juste, est juste. (2.) Que rien n’est pécheur que la Bible ne condamne ; et rien n’est obligatoire pour la conscience qu’elle n’enjoint. (3) Que les Écritures sont une règle complète du devoir, non seulement dans le sens que nous venons d’énoncer, mais aussi dans le sens qu’il n’y a pas et ne peut y avoir de norme plus élevée d’excellence morale. Les romanistes, au contraire, enseignent qu’un homme peut faire plus que ce que la loi exige. Il y a certaines choses qui sont commandées, et par conséquent absolument obligatoires ; et d’autres qui sont recommandés, mais non prescrits, tels que la pauvreté volontaire, le célibat et l’obéissance monastique. Celles-ci sont considérées comme des vertus d’un degré supérieur à l’obéissance à des commandements explicites. Cette doctrine est fondée sur les vues erronées de l’Église de Rome sur la nature du péché et sur les fondements de l’obligation morale. S’il n’y a rien d’autre de péché que la transgression volontaire, c’est-à-dire la transgression délibérée de la loi connue, et si la loi est satisfaite par une action volontaire dans ce sens des termes, alors il est concevable qu’un homme puisse dans cette vie rendre une obéissance parfaite à la loi, et même aller au-delà de ses exigences. Ceci est aussi lié à la distinction que les romanistes font entre les péchés mortels et les péchés véniels. Les premiers sont ceux qui perdent la grâce baptismale et réduisent l’âme à son état originel de mort spirituelle et de condamnation. Ces derniers sont des péchés qui n’ont pas cet effet mortel, mais qui peuvent être pleinement expiés par la confession et la pénitence. Mais si la loi de Dieu est spirituelle, s’étendant aux pensées et aux sentiments, qu’ils soient impulsifs ou chéris ; et si elle exige tous les genres et tous les degrés d’excellence morale, ou une complète sympathie avec Dieu, et la conformité à son image, alors il n’y a pas de place pour ces distinctions, et pas de règle supérieure de conduite morale. La loi du Seigneur est donc parfaite dans tous les sens du terme.
La question de savoir si le décalogue est une règle parfaite du devoir doit, en un sens, recevoir une réponse affirmative. (1.) Parce qu’elle enjoint l’amour à Dieu et à l’homme, ce que, enseigne notre Sauveur, comprend toutes les autres fonctions. (2) Parce que notre Seigneur l’a présenté comme un code parfait, lorsqu’il a dit au jeune homme dans l’Évangile : « Fais ceci, et tu vivras. » (3.) Chaque ordre spécifique enregistré ailleurs peut être renvoyé à l’un de ses nombreux commandements. De sorte que l’obéissance parfaite au décalogue, dans son esprit, serait une obéissance parfaite à la loi. Néanmoins, il y a beaucoup de choses qui nous sont obligatoires, et sans une autre révélation de la volonté de Dieu que celle qui est contenue dans le Décalogue, nous n’aurions jamais dû savoir qu’elles étaient obligatoires. Le grand devoir des hommes sous l’Évangile, c’est la foi en Christ. C’est ce qu’enseigne notre Seigneur lorsqu’il dit : « C’est là l’œuvre de Dieu, que vous croyiez en celui qu’il a envoyé. » Celle-ci comprend ou produit tout ce qui est exigé de nous, soit en ce qui concerne la foi, soit la pratique. C’est pourquoi celui qui croira sera sauvé.
Les théologiens ont coutume d’établir de nombreuses règles pour l’interprétation correcte de la loi divine, telles que les préceptes négatifs doivent être compris comme incluant le positif et le positif négatif ; qu’en défendant un acte, on comprend tout ce qui y conduit naturellement ; qu’en condamnant un délit, toutes les autres du même genre sont interdites, et ainsi de suite. Toutes ces règles se résolvent en une seule. Le décalogue n’est pas à interprétées comme les lois des hommes, qui ne prennent connaissance que des actes extérieurs, mais comme la loi de Dieu, qui s’étend aux pensées et aux intentions du cœur. Dans tous les cas, on trouvera que les divers commandements contiennent un principe global de devoir, sous lequel une multitude de devoirs spécifiques subordonnés sont inclus.
§ 2. Division du contenu du Décalogue.
Comme la loi donnée sur le Sinaï et écrite sur deux tables de pierre, est appelée à plusieurs reprises dans les Écritures « Les Dix Paroles », ou, comme c’est le cas dans la version anglaise de l’Exode xxxiv.28, « Les Dix Commandements,» Il n’y a pas de doute que le contenu de cette loi doit être divisé en dix préceptes distincts. (Voir Deut. iv. 13, et x. 4.) Ce résumé des devoirs moraux est aussi appelé dans l’Écriture « l’Alliance », car il contient les principes fondamentaux du contrat solennel entre Dieu et son peuple élu. Plus souvent encore, on l’appelle « le témoignage », comme l’attestation de la volonté de Dieu concernant le caractère et la conduite de l’homme.
Le décalogue se présente sous deux formes légèrement différentes l’une de l’autre. La forme originale se trouve dans le vingtième chapitre de l’Exode ; l’autre dans Deutéronome v. 6-21. Les principales différences entre eux sont, premièrement, que le commandement concernant le Sabbat est dans l’Exode renforcé par une référence au repos de Dieu le septième jour, après l’œuvre de la création ; tandis que dans le Deutéronome, il est renforcé par une référence à Dieu délivrant son peuple d’Égypte. Deuxièmement, dans le commandement concernant la convoitise, dans l’Exode, il est dit : « Tu ne convoiteras pas la maison de ton prochain, tu ne convoiteras pas la femme de ton prochain », etc. Dans les deux propositions, le mot est חמד· Dans le Deutéronome, c’est : « Tu ne désireras pas (חמד) la femme de ton prochain ; tu ne convoiteras pas (ארה) la maison de ton prochain, » etc. Cette dernière différence a été amplifiée au point d’être une question d’importance.
Les Écritures elles-mêmes déterminent le nombre des commandements, mais pas dans tous les cas ce qu’ils sont. Ils ne sont pas numérotés comme premier, deuxième, troisième, etc. La conséquence est que différents inodes de division ont été adoptés. Les Juifs, dès leur plus jeune âge, adoptèrent l’arrangement qu’ils reconnaissent encore. Ils considèrent les paroles de l’Exode xx. 2, comme constituant le premier commandement : « Je suis l’Éternel, ton Dieu, qui t’ai fait sortir du pays d’Égypte, de la maison de servitude. » Le commandement est que le peuple reconnaisse Jéhovah comme son Dieu ; et le motif spécial de cette reconnaissance est qu’il les a délivrés de la tyrannie des Égyptiens. Ces mots, cependant, ne sont pas sous la forme d’un commandement. Elles constituent la préface ou l’introduction des injonctions solennelles qui suivent. En faisant de la préface l’un des commandements, il est devenu nécessaire de conserver le nombre dix, en unissant le premier et le second, comme on les arrange communément. Le commandement : « Tu n’auras pas d’autres dieux devant moi » et « Tu ne te feras aucune image taillée », étant considéré comme sensiblement le même ; ce dernier n’étant qu’une amplification du premier. Une idole était un faux dieu ; adorer des idoles, c’était donc avoir d’autres dieux que Jéhovah.
Augustin, et après lui les Églises latine et luthérienne, étaient d’accord avec les Juifs pour s’unir le premier et le deuxième commandement ; mais différait d’eux en divisant le dixième. Il y a cependant une différence quant au mode de division. Augustin suivit le texte tel qu’il est donné dans le Deutéronome, et fit les mots : « Tu ne convoiteras pas la femme de ton prochain ; » le neuvième, et les mots : « Tu ne convoiteras pas la maison de ton prochain », etc., le dixième commandement. Cette division a été rendue nécessaire par l’union du premier et du second, et justifiée par Augustin par le fait que le " cupido impuræ voluptatis " est une infraction distincte du " Cupido impuri Lucri « . L’Église romaine, cependant, adhère au texte tel qu’il est donné dans l’Exode, et fait de la clause : « Tu ne convoiteras pas la maison de ton prochain », le neuvième, et ce qui suit : « Tu ne convoiteras ni la femme de ton prochain, ni son serviteur, ni sa servante », etc., le dixième commandement.
Le troisième mode d’arrangement est celui adopté par Josèphe, Philon et Origène, et acceptée par l’Église grecque, et aussi par les Latins jusqu’à l’époque d’Augustin. À la Réforme, il a été adopté par les réformés, et a la sanction de presque tous les théologiens modernes. D’après cette disposition, le premier commandement interdit l’adoration de faux dieux ; la seconde, l’utilisation des idoles dans le culte divin. Le commandement : « Tu ne convoiteras point » est considéré comme un seul commandement.
Il est universellement admis qu’il y a deux tables du décalogue ; l’un contenant les préceptes concernant nos devoirs envers Dieu, et l’autre ceux qui concernent nos devoirs envers nos semblables. Philon référait cinq commandements à chaque table, car il considérait la révérence envers les parents, enjointe dans la cinquième, comme un devoir religieux plutôt que moral. Ceux qui unissent le premier et le second, et divisent le dixième, rapportent trois commandements à la première table et sept à la seconde. D’après le troisième l’arrangement mentionné ci-dessus, il y en a quatre dans le premier, et six dans le second. La seule objection qui s’y oppose est fondée sur le symbolisme des nombres. Trois et sept chez les Juifs sont sacrés et significatifs ; quatre et six ne le sont pas.
Arguments en faveur de l’arrangement adopté par les réformés.
Il y a deux questions à trancher. Premièrement, les commandements concernant l’idolâtrie doivent-ils être unis ou séparés ? En faveur de les considérer comme deux commandements distincts, on peut insister (1). Que tout au long du décalogue, un commandement nouveau est introduit par une injonction ou une interdiction positive : « Tu ne prendras pas en vain le nom du Seigneur ton Dieu ; » « Tu ne voleras point ; » « Tu ne tueras point », etc. C’est de cette manière que les nouvelles commandes sont introduites. Par conséquent, le fait que le commandement : « Tu n’auras pas d’autres dieux » se distingue par la répétition de l’injonction : « Tu ne te feras point d’image taillée », est une indication qu’ils étaient destinés à être des commandements différents. Le dixième commandement est en effet une exception à cette règle, mais le principe est valable dans tous les autres cas. (2) Les choses interdites sont par leur nature distinctes. Adorer de faux dieux est une chose ; L’utilisation d’images dans le culte divin en est une autre. C’est pourquoi ils ont demandé des interdictions distinctes. (3) Ces offenses ne sont pas seulement différentes dans leur propre nature, mais elles diffèrent aussi dans l’appréhension des Juifs. Les Juifs considéraient l’adoration de faux dieux et l’utilisation d’images dans l’adoration du vrai Dieu comme des choses très différentes. Ils ont été sévèrement punis pour les deux infractions. Des considérations extérieures et intérieures sont donc en faveur du maintien de la division qui a été si longtemps et si largement adoptée dans l’Église.
La deuxième question concerne la division du dixième commandement. Il est admis qu’il y a dix commandements.
Si donc les deux commandements : Tu n’auras pas d’autres dieux et Tu ne feras pas d’image taillée, sont distincts, il n’y a pas lieu de se demander s’il faut diviser le commandement contre la convoitise. Il n’y a d’ailleurs aucun prétexte pour une telle division, à moins que nous ne suivions l’ordre donné dans le Deutéronome, qui met les mots : « Tu ne désireras pas non plus la femme de ton prochain », avant les mots : « Tu ne convoiteras pas non plus la maison de ton prochain, son champ », etc., etc. De même que convoiter la femme d’un homme est une autre offense, ou du moins une forme différente d’une offense générale, de convoiter sa maison ou sa terre, si l’ordre donné dans le Deutéronome est considéré comme faisant autorité, il pourrait y avoir une raison pour la séparation. Mais si l’ordre donné dans l’Exode est respecté, une telle raison n’existe pas. Ce qui est défendu, c’est la cupidité, quel qu’en soit l’objet. Que l’ordre donné dans l’Exode fasse autorité, on peut argumenter, (1.) Parce que la loi, telle qu’elle y est donnée, n’était pas seulement la première chronologiquement, mais aussi qu’elle a été annoncée solennellement depuis le mont Sinaï. (2) La recension donnée dans le Deutéronome diffère de l’autre par beaucoup de détails sans importance. Si l’ordre dans lequel les objets de cupidité sont mentionnés est un sujet d’indifférence, alors la diversité est une question sans importance. Mais s’il s’agit d’une question d’importance, le contrôle de l’ordre et de l’interprétation des commandements, alors il est difficile de l’expliquer. Il y a donc tout lieu de la considérer comme l’une de ces diversités qui n’étaient pas censées être significatives. (3.) La distinction n’est reconnue nulle part ailleurs dans les Écritures. Au contraire, le commandement : « Tu ne convoiteras point » est donné ailleurs comme un seul commandement. Paul, dans Romains vii. 7, dit : « Je n’avais connu le péché que par la loi, car je n’avais pas connu la convoitise, si la loi n’avait dit : Tu ne convoiteras point. » Et dans Romains xiii. 9, en énumérant les lois qui interdisent de pécher contre notre prochain, Paul donne comme un seul commandement : « Tu ne convoiteras point. » (4) Notre Seigneur rapporte le péché de « convoiter la femme d’un homme » au septième commandement. S’il était inclus dans cette catégorie, il serait incongru et en désaccord avec le contexte d’en faire un commandement distinct en soi.
§ 3. Préface aux Dix Commandements.
« Je suis l’Éternel, ton Dieu, qui t’ai fait sortir du pays d’Égypte, de la maison de servitude. Tu n’auras pas d’autres dieux devant moi. Le théisme et le monothéisme, fondement de toute religion, sont enseignés en ces termes. La première clause est la préface ou l’introduction du décalogue. Il présente le motif de l’obligation et le motif spécial par lequel l’obéissance est forcé. C’est parce que les commandements qui suivent sont les paroles de Dieu qu’ils lient la conscience de tous ceux à qui ils s’adressent. C’est parce qu’elles sont les paroles du Dieu de l’alliance et Rédempteur de son peuple que nous sommes spécialement tenus de leur rendre obéissance.
L’histoire semble prouver que la question de savoir si l’Infini est une personne ne peut pas être résolue de manière satisfaisante par la raison sans assistance de l’homme. Le fait historique est que la grande majorité de ceux qui ont cherché la solution de cette question sur des principes philosophiques y ont répondu par la négative. Il est donc impossible d’estimer à sa juste valeur l’importance de la vérité impliquée dans l’emploi du pronom « je » dans ces mots. C’est une personne qui est ici présentée. De cette personne, on affirme, premièrement, qu’il est l’Éternel ; et deuxièmement, qu’Il est le Dieu de l’alliance de son peuple.
En premier lieu, en s’appelant lui-même Jéhovah, Dieu révèle qu’il est la personne connue de son peuple sous ce nom, et qu’il est dans sa nature tout ce que ce nom signifie. L’étymologie et la signification du nom Jéhovah semblent avoir été données par Dieu lui-même dans Exode III. 13, 14, où il est écrit : « Moïse dit à Dieu : Voici, quand je viendrai vers les enfants d’Israël, et que je leur dirai : Le Dieu de vos pères m’a envoyé vers vous ; et ils me diront : Quel est son nom ? que leur dirai-je, et Dieu dit à Moïse : JE SUIS CE QUE JE SUIS, et il dit : Ainsi tu diras aux enfants d’Israël : C’est moi qui m’ai envoyé vers vous.
Jéhovah, par conséquent, est le JE SUIS ; Une personne qui existe et qui est toujours la même. L’existence du soi, l’éternité et l’immuabilité sont incluses dans la signification du mot. Cela étant, le nom de Jéhovah est présenté comme le fondement de la confiance du peuple de Dieu ; comme dans Deutéronome xxxii. 40, et Ésaïe xl. 28 : « Ne le sais-tu pas ? N’as-tu pas entendu dire que le Dieu éternel, l’Éternel, le Créateur des extrémités de la terre, ne faiblit pas, et qu’il n’est pas fatigué ? il n’y a pas de recherche de son entendement. Ces attributs naturels, cependant, ne seraient pas un motif de confiance s’ils n’étaient pas associés à l’excellence morale. Celui qui, en tant que Jéhovah, est déclaré infini, éternel et immuable dans son être, n’en est pas moins infini, éternel et immuable dans sa connaissance, sa sagesse, sa sainteté, sa bonté et sa vérité. Telle est la Personne dont les commandements sont consignés dans le Décalogue.
En second lieu, ce n’est pas seulement la nature de l’Être qui parle, mais la relation dans laquelle il se tient avec son peuple qui est ici révélée. « Je suis Jéhovah, ton Dieu. » Le mot Dieu a un sens précis dont nous ne sommes pas libres de nous écarter. Nous ne pouvons substituer à l’idée que le mot dans l’Écriture et dans le langage ordinaire est destiné à exprimer, une notion philosophique arbitraire qui nous soit propre. Dieu est l’Être qui, parce qu’il est tout ce que le mot Jéhovah implique, est l’objet propre de l’adoration, c’est-à-dire de toutes les affections religieuses et de leur expression appropriée. Il est donc le seul objet approprié de l’amour suprême, de l’adoration, de la gratitude, de la confiance et de la soumission. Nous sommes tenus de lui faire confiance et d’obéir.
Jéhovah n’est pas seulement Dieu, mais il dit à son peuple, collectivement et individuellement : " Je suis ton Dieu. » C’est-à-dire, non seulement le Dieu que son peuple doit reconnaître et adorer, mais qui a conclu une alliance avec lui ; promettant d’être leur Dieu, d’être tout ce que Dieu peut être pour ses créatures et ses enfants, à condition qu’ils consentent à être son peuple. L’alliance spéciale que Dieu forma avec Abraham, et qui fut solennellement renouvelée au mont Sinaï, était qu’il donnerait aux enfants d’Abraham la terre de Palestine comme leur possession et les bénirait dans cet héritage, à condition qu’ils gardent les lois qui leur avaient été données par son serviteur Moïse. Et l’alliance qu’il a faite avec les enfants spirituels d’Abraham, c’est qu’il sera leur Dieu pour le temps et l’éternité, à condition qu’ils reconnaissent, reçoivent et fassent confiance à son Fils unique, la postérité promise d’Abraham, en qui toutes les nations de la terre doivent être bénies. Et comme, dans ce passage, la rédemption des Hébreux de leur esclavage en Égypte est mentionnée comme le gage de la fidélité de Dieu à sa promesse à Abraham, et le motif spécial de l’obligation des Hébreux de reconnaître l’Éternel comme leur Dieu ; de même la mission du Fils éternel pour la rédemption du monde est à la fois le gage de la fidélité de Dieu à la promesse faite à nos premiers parents après leur chute, et le fondement spécial de notre allégeance à notre alliance Dieu et Père.
Le premier commandement est : « Tu n’auras pas d’autres dieux devant moi. » Moi, c’est-à-dire la personne dont le nom, la nature et la relation avec son peuple sont donnés dans les mots précédents, et moi seul, je serai reconnu par vous comme Dieu.
Ce commandement comprend donc, premièrement, l’injonction de reconnaître Jéhovah comme le vrai Dieu. Comme cette reconnaissance doit être intelligente et sincère, elle comprend :
1. Connaissance. Nous devons savoir qui est Jéhovah, ou ce qu’il est. Cela implique une connaissance de ses attributs, de sa relation avec le monde en tant que créateur, conservateur et gouverneur, et surtout de sa relation avec ses créatures rationnelles et avec son propre peuple élu. Cela implique bien sûr une connaissance de notre relation avec Lui en tant que créatures dépendantes et responsables et en tant qu’objets de son amour rédempteur.
2. La foi. Nous devons croire que Dieu est, et qu’il est ce qu’il déclare être ; et que nous sommes ses créatures et ses enfants.
3. La confession. Il ne suffit pas que nous reconnaissions secrètement dans notre cœur Jéhovah comme le vrai Dieu ; nous devons ouvertement et en toutes circonstances et en dépit de toute opposition, qu’elle soit de la part des magistrats ou des philosophes, confesser notre foi en Lui comme le seul Dieu vivant et vrai. Cette confession doit être faite, non seulement par l’aveu des lèvres, comme lorsque nous répétons le Credo, mais par tous les actes appropriés de culte en public et en privé, par la louange, la prière et l’action de grâces.
4. Comme la loi est spirituelle, non seulement parce qu’elle porte l’empreinte de l’Esprit, et par conséquent qu’elle est sainte, juste et bonne, mais aussi parce qu’elle prend connaissance de la vie intérieure aussi bien que de la vie extérieure, des pensées et des sentiments aussi bien que des actes extérieurs, cette reconnaissance de l’Éternel comme notre Dieu comprend l’exercice envers Lui de toutes les affections religieuses ; d’amour, de peur, de révérence, de gratitude, de soumission et de dévotion. Et comme il ne s’agit pas d’un devoir occasionnel à accomplir à certains moments et en certains lieux, mais d’une obligation perpétuelle, un état d’esprit habituel est la chose requise. La reconnaissance de Jéhovah comme notre Dieu implique un sentiment constant de sa présence, de sa majesté, de sa bonté et de sa providence, ainsi que de notre dépendance, de notre responsabilité et de notre obligation. Nous devons avoir Dieu toujours devant les yeux ; de marcher et de vivre avec Lui, en ayant une référence constante à sa volonté dans la conduite de notre vie intérieure et extérieure ; reconnaissant continuellement sa main dans tout ce qui nous arrive, se soumettant à tous ses châtiments et reconnaissant de toutes ses miséricordes.
Le second aspect ou aspect négatif de l’ordre est la condamnation de l’échec à reconnaître l’Éternel comme le vrai Dieu, de ne pas croire en son existence et en ses attributs, en son gouvernement et en son autorité, de ne pas le confesser devant les hommes et de ne pas lui rendre la révérence intérieure et l’hommage extérieur qui lui sont dus. c’est-à-dire que le premier commandement interdit l’athéisme, qu’il soit théorique ou pratique. De plus, il interdit de reconnaître tout autre que Jéhovah comme Dieu. Cela inclut l’interdiction d’attribuer à un autre être des attributs divins ; rendre à toute créature l’hommage ou l’obéissance due à Dieu seul ; ou d’exercer à l’égard de toute autre personne ou objecter ces sentiments d’amour, de confiance et de soumission qui n’appartiennent de droit qu’à Dieu.
C’est donc une violation de ce commandement, soit de ne pas reconnaître Dieu comme Dieu dans sa pleine et sincère sincérité, soit de donner à une créature la place que nous devons à Dieu seul dans notre confiance et notre amour.
C’est le chef de tous les commandements.
Le devoir prescrit par ce commandement est le plus grand devoir de l’homme. Il est prouvé qu’il en est ainsi dans l’estimation de Dieu par la déclaration expresse du Christ. Lorsqu’on lui demanda : « Quel est le grand commandement de la loi ? », il répondit : « Tu aimeras le Seigneur, ton Dieu, de tout ton cœur, de toute ton âme et de toute ta pensée. C’est le premier et le plus grand commandement. (Matthieu, xxii. 37, 38.) Il en est ainsi aussi aux yeux de la raison. Que l’excellence infinie doit être révérée ; que Celui qui est l’auteur de notre être et le dispensateur de toutes nos miséricordes ; dont nous dépendons absolument ; envers qui nous sommes responsables ; qui est le possesseur légitime de nos âmes et de nos corps ; et dont la volonté est la plus haute règle du devoir, doit être dûment reconnue par ses créatures, de par la nature du cas, doit être le plus haut devoir de tous les êtres raisonnables. C’est d’ailleurs le premier et le plus grand des commandements, si on le mesure par l’influence que l’obéissance à son injonction a sur l’âme elle-même. Il place la créature dans sa relation propre avec son Créateur dont dépendent sa propre excellence et son bien-être. Il purifie, ennoblit et exalte l’âme. Elle met en exercice tous les attributs les plus élevés et les plus nobles de notre nature ; et assimile l’homme aux anges qui entourent le trône de Dieu dans le ciel. La prééminence de ce commandement est encore plus évidente par le fait que la religion, ou le devoir que nous devons à Dieu, est le fondement de la moralité. Sans le premier, le second ne peut exister. C’est clair, (1.) De la nature de l’affaire. La moralité est la conformité du caractère et de la conduite d’un agent à la loi morale. Mais la loi morale est la volonté révélée de Dieu. S’il n’y a pas de Dieu, il n’y a pas de loi morale ; et si un homme ne reconnaît pas ou ne reconnaît pas Dieu, il n’y a pas de loi supérieure à sa propre raison à laquelle il puisse se sentir obligé d’être Conforme. (2.) C’est un principe de notre nature que si un homme ne tient pas compte d’une obligation, il ne sera pas contrôlé par un inférieur. Ce principe a été reconnu par notre Seigneur quand il a dit : « Celui qui est fidèle dans ce qui est le plus petit, est fidèle aussi en beaucoup de choses ; et celui qui est le moins du monde injuste, l’est aussi en beaucoup. (Luc xvi. 10.) Cela implique l’inverse : Celui qui est infidèle dans beaucoup, est infidèle dans ce qui est le moins. (3) C’est le témoignage de l’expérience que là où la religion a perdu son emprise sur l’esprit du peuple, là la loi morale est foulée aux pieds. La classe criminelle et dangereuse dans chaque communauté se compose de ceux qui n’ont aucune crainte de Dieu devant leurs yeux. (4) C’est la conviction secrète de tout homme que son devoir envers Dieu est son devoir le plus élevé, comme le prouve le fait que l’accusation d’athéisme est une accusation devant laquelle l’âme humaine recule instinctivement. On sent que c’est une accusation de dégradation totale, ou de mort de tout ce qu’il y a de plus élevé et de plus noble dans la nature de l’homme. La preuve la plus décisive et la plus solennelle de cette vérité, cependant, se trouve dans le dessein révélé de Dieu d’abandonner ceux qui l’abandonnent, d’abandonner au contrôle illimité de leurs mauvaises passions, ceux qui rejettent leur allégeance envers lui. L’apôtre dit du monde païen que c’était « parce que, lorsqu’ils connaissaient Dieu, ils ne le glorifiaient pas comme Dieu, et n’étaient pas reconnaissants, ... Dieu les a livrés à de viles affections. (Rom. i. 21, 26.) Et encore au verset 28 : « Comme ils n’aimaient pas à retenir Dieu dans leur connaissance, Dieu les livra à un esprit réprouvé, pour faire les choses qui ne sont pas convenables ; être remplis de toute iniquité, de toute fornication, de toute méchanceté, de toute convoitise, de toute méchanceté ; plein d’envie, de meurtre, de débat, de tromperie, de malignité ; chuchoteurs, médisants, haïssant Dieu, méprisables, orgueilleux, vantards, inventeurs de choses mauvaises, désobéissants aux parents, sans compréhension, briseurs d’alliance, sans affection naturelle, implacables, impitoyables. Tels sont les effets naturels, actuels, inévitables et ordonnés judiciairement du refus des hommes de retenir Dieu dans leur connaissance.
Malgré tout cela, nous voyons des multitudes d’hommes dont on peut dire que Dieu n’est pas dans toutes leurs pensées. Ils ne pensent jamais à Lui. Ils ne reconnaissent pas sa providence. Ils ne se réfèrent pas à sa volonté comme à une règle de conduite. Ils ne se sentent pas responsables envers Lui de ce qu’ils pensent ou font. Ils ne l’adorent pas ; ni le remercier pour leurs miséricordes. Ils sont sans Dieu dans le monde. Pourtant, ils ont une bonne opinion d’eux-mêmes. Ils ne sont pas conscients de l’affreuse culpabilité qu’implique l’oubli de Dieu, le fait de ne pas s’acquitter habituellement du premier et du plus élevé devoir qui repose sur les créatures raisonnables. Le respect de soi-même ou le respect de l’opinion publique rend souvent de tels hommes décents dans leur vie. Mais ils sont réellement morts tant qu’ils vivent ; et ils n’ont aucune sécurité contre les puissances des ténèbres. Il est pénible aussi de voir que les hommes de science et les philosophes s’efforcent si souvent d’invalider les arguments en faveur de l’existence de Dieu, et d’avancer des opinions incompatibles avec le théisme ; argumentant, comme ils le font dans de nombreux cas, pour prouver soit qu’il n’y a aucune preuve de l’existence d’un pouvoir dans l’univers autre que celui de la force physique, soit qu’il n’y a pas de connaissance, la conscience, ou l’action volontaire, peut être prédiquée d’un Être infini. Cela se fait dans l’inconscient apparent qu’ils sapent les fondements de toute religion et de toute moralité ; ou qu’ils manifestent un état d’esprit que les Écritures prononcer digne de réprobation.
§ 5. L’invocation des saints et des anges.
Les saints et les anges, et en particulier la Vierge Marie, sont des objets de culte avoués dans l’Église romaine. Le mot « adoration », cependant, signifie proprement respecter ou honorer. Il est utilisé pour exprimer à la fois le sentiment intérieur et sa manifestation extérieure. Ce vieux sens de la Le mot est encore conservé dans les tribunaux où l’on s’adresse au juge en l’appelant « Votre Honneur » ou en l’appelant « vénérable ». Le mot hébreu הקיתתוה et le mot grec προσκυκε’ω, souvent traduits dans la version anglaise par le mot « adoration », signifient simplement se prosterner ou se prosterner. Ils sont utilisés que la personne à qui l’hommage est rendu soit un égal, un supérieur terrestre ou Dieu lui-même. Ce n’est donc pas à partir de l’emploi de l’un ou l’autre de ces mots que l’on peut déterminer la nature de l’hommage rendu. Les romanistes sont accoutumés distinguer entre le cultus civilis dû aux supérieurs terrestres ; δουλειά dû aux saints et aux anges : ύττερδουλε/α dû à la Vierge Marie ; et λατρεία dû à Dieu seul. Ceux-ci Les distinctions, cependant, ne sont pas d’une grande utilité. Ils n’offrent aucun critère permettant de distinguer entre δουλεία et ύπ-ερδουλεία et entre ύττερδουλεία et λατρεία. Le principe important est celui-ci : tout hommage, interne ou externe, qui implique l’attribution d’attributs divins à son objet, si cet objet est une créature, est idolâtre. Que l’hommage rendu par les romanistes aux saints et aux anges soit idolâtre est une question de fait plutôt que de théorie ; c’est-à-dire qu’elle doit être déterminée par l’hommage effectivement rendu, et non par ce qui est prescrit. Il est facile de dire que les saints ne doivent pas être honorés comme Dieu est honoré ; qu’il doit être considéré comme la source originelle et le dispensateur de tout bien, et qu’ils sont de simples intercesseurs, et comme canaux de communications divines ; mais cela n’y change rien si l’hommage qui leur est rendu suppose qu’ils possèdent les attributs de Dieu ; et s’ils sont pour le peuple l’objet d’une affection et d’une confiance religieuses.
Ce que l’Église de Rome enseigne à ce sujet, on peut l’apprendre des passages suivants, des décisions du Concile de Trente, du Catéchisme romain et des écrits des principaux théologiens de cette Église : 1 «Mandat sancta synodus omnibus episcopis .... ut.... fideles diligenter instruant, docentes eos, sanctos, una cum Christo régnantes, orationes suas pro hominibus Deo offcrre ; bonum, atque utile esse suppliciter cos invocare ; et ob bénéficia impetranda a Deo per filium ejus Jesus Christum, Dominum nostrum, qui solus noster redemptor et salvator est, ad eorum orationes, open ! auxiliumque confugere : illos vero, qui negant sanctos, æterna felicitate in cœlo fruentes, invocandos esse ; aut qui asserunt, vel illos pro hominibus non orare ; vel eorum, ut pro nobis etiam singulis orent, invocationem esse idolatriam ; vel pugnare cum verbo Dei ; l’honneur de l’adversaire ! unius mediatoris Dei et hominum Jesu Christi ; vel stultum esse in cœlo regnantibus voce, vel mente supplicare ; impie sentire. » « ־ Et quamvis in honorem et memoriam sanctorum nonnullas interduin missas ecclesia celebrare consueverit ; non tamen illis sacrificium offerri docet, sed Deo soli, qui illos coronavit ; unde nec sacerdos diccre solet, offero tibi sacrificium Petre, vel Paule ; sed Deo de illorum victoriis gratias agens, eorum patrocinia implorât, ut ipsi pro nobis intercedere dignentur in cœlis, quorum memoriam facimus in terris. » 2
1 Concilii Tridentini, sess. XXV.
2 Idem. Sess. xxn. Caput III.
Le Catéchisme romain 3 enseigne la même doctrine.
3 in. ii. qu. 4 [xix. 10]. Voir Streitwolf, Libri Symbolici, Göttingen, 184G, p. 979, 78, 3, 479.
« Invocandi sunt [angeli eorum] ; quod et perpetuo Deum intuentur et patrocinium salutis nostræ, sibi delatum, libentissime suseipiunt. Cette invocation, dit-il, n’est pas en conflit avec la loi « de uno Deo colendo ».
Thomas d’Aquin dit : « Quanquam solus Deus sit orandus, ut vel gratiam vel gloriam nobis donet ; Sanctos nihilominus viros orare expedit, ut illorum precibus et meritis, nostræ orationes sortiantur effectum.»4
4 Somme, 11. ii. quæst. 88, art. 4, édit. Cologne, 1G40, p. 153, a, de la troisième série.
Sur ce sujet, Bellarmin formule les propositions suivantes (1.) « Non licet a sanctis petere, ut nobis tanquam auctores divinorum beneficiorum, gloriam, vel gratiam aliaque ad beatitudinem media concédant. » Ceci, cependant, est pratiquement annulé lorsqu’il ajoute, « Est tamen notandum, cum dicimus, non debere peti à sanctis, nisi ut orent pro nobis, nos non agere de verbis, sed de sensu verborum ; nam quantum ad verba, licet dicere, S. Petre miserere mihi, salva me, aperi mihi aditum cœli : item, da mihi sanitatem corporis, da patientiam, da mihi fortitudinem. (2.) « Sancti non sunt immédiat ! interccssores nostri apud Deum, sed quidquid a Deo nobis impétrant, per Christum impétrant. » (3.) « Sancti orant pro nobis saltern in genere, secundum Scripturas. » (4.) « Sancti qui regnant cum Christo, pro nobis orant, non solum in genere, sed etiam in particular ! » 1 Quant à la question de savoir comment les saints du ciel peuvent savoir ce que les hommes sur la terre désirent d’eux, il dit qu’il y a quatre réponses. D’abord, certains disent que les anges, qui montent sans cesse au ciel et de là descendent jusqu’à nous, communiquent aux saints les prières du peuple. Deuxièmement, d’autres disent : « Sanctorum animas, sicut etiam angelos, mira quadam celeritate naturæ, quodammodo esse ubique ; et per se audire preces supplicant!!!!!. » Troisièmement, d’autres encore disent : « Sanctos videre in Deo omnia a principio suæ beatitudinis, quæ ad ipsos aliquo modo pertinent, et proinde etiam orationes nostras ad sc directas. » Quatrièmement, d’autres disent que Dieu leur révèle les prières du peuple. De même que Dieu a révélé l’avenir aux prophètes sur la terre et donne parfois aux hommes le pouvoir de lire dans les pensées des autres, afin qu’il puisse révéler aux saints du ciel les besoins et les prières de ceux qui les invoquent. Cette dernière solution de la difficulté que Bellarmin lui-même préfère. 2
1 De Eccleda Triumphant(, lib. 1., De Sanctorum Beatitudine, cap. xvii. xviii. ; Dispu-tationes, édit. Paris, 1G08, t. II, p. 718-721.
2 Ut supra, chap. xx. p. 735.
Les objections que les protestants ont coutume d’opposer à cette invocation des saints sont les suivantes :
1. Qu’il est, c’est le moins qu’on puisse dire, superstitieux. Cela exige la foi sans preuve. Elle suppose non seulement que les morts sont dans un état conscient d’existence dans un autre monde ; et que les croyants défunts appartiennent au même corps mystique vivant du Christ, dont leurs frères encore sur la terre sont membres, ce que les protestants, sur l’autorité de la parole de Dieu, admettent avec joie ; mais c’est suppose, sans aucune preuve de l’Écriture ou de l’expérience, que les esprits des morts sont accessibles à ceux qui sont encore en chair et en os ; qu’ils sont près de nous, capables d’entendre nos prières, de connaître nos pensées et de répondre à nos demandes. L’Église ou l’âme est lancée sur un océan de fantaisies et de folies, sans boussole, si elle se laisse croire sans preuve ; Alors il n’y a rien dans l’astrologie, l’alchimie ou la démonologie qui ne puisse être reçu comme vrai, pour déconcerter, pour pervertir ou pour tourmenter.
2. Tout cela n’est qu’une tromperie et une illusion. Si, en fait, les saints défunts ne sont pas autorisés et ne sont pas capables d’entendre et de répondre aux prières des suppliants sur la terre, alors le peuple est dans la condition de ceux qui se confient en des dieux qui ne peuvent pas sauver, qui ont des yeux qui ne voient pas et des oreilles qui ne peuvent pas entendre. Que les saints n’aient pas l’office que supposent la théorie et la pratique de l’invocation, c’est évident, parce que le fait, s’il est vrai, ne peut être connu que par révélation divine. Mais une telle révélation n’existe pas. C’est une croyance purement superstitieuse, sans le soutien de l’Écriture ou de la raison. Les méthodes conjecturales suggérées par Bellarmin pour expliquer comment les saints peuvent être conscients des besoins et des désirs des hommes, est une confession que rien n’est connu ou ne peut être connu sur le sujet ; et, par conséquent, que l’invocation des saints n’a aucun fondement scripturaire ou rationnel. S’il en est ainsi, combien le peuple est affreusement trompé ! Combien terribles conséquences de détourner leurs yeux et leurs cœurs de l’unique médiateur divin entre Dieu et l’homme, qui vit toujours pour intercéder en notre faveur, et que le Père entend toujours, et de les amener à diriger leurs prières vers des oreilles qui n’entendent jamais, et à placer leurs espoirs dans des armes qui ne sauvent jamais. Il se détourne de la fontaine d’eaux vives pour se tourner vers des citernes qui ne peuvent contenir d’eau.
3. L’invocation des saints, telle qu’elle est pratiquée dans l’Église de Rome, est idolâtre. Même si l’on admet que la théorie Comme l’exposent les théologiens est exempt de cette accusation, il n’en reste pas moins vrai que la pratique implique tous les éléments de l’idolâtrie. On demande aux saints des bénédictions que Dieu seul peut accorder ; et l’on suppose qu’ils appartiennent à ceux qui n’appartiennent qu’à Dieu. Toutes sortes de bénédictions, temporelles et spirituelles, sont recherchées de leurs mains, et recherchées directement auprès d’eux en tant que donateurs. C’est ce que Bellarmin admet en ce qui concerne les mots employés. Il dit qu’il est juste de dire : « Saint Pierre, sauve-moi ; ouvre-moi les portes du ciel ; donne-moi le repentir, le courage », etc. Dieu seul peut accorder ces bénédictions ; Il est dit aux gens de les chercher entre les mains des créatures. C’est de l’idolâtrie. Pratiquement, il va de soi que les saints sont partout présents, qu’ils peuvent entendre les prières qui leur sont adressées de toutes les parties de la terre en même temps ; qu’ils connaissent nos pensées et nos désirs inexprimés. C’est supposer qu’ils possèdent des attributs divins. En fait, les saints sont donc les dieux que le peuple adore, en qui il a confiance et qui sont les objets des affections religieuses.
Le polythéisme de l’Église de Rome est à bien des égards analogue à celui de la Rome païenne. Dans les deux cas, nous trouvons beaucoup de dieux et beaucoup de seigneurs. Dans les deux cas, soit des êtres imaginaires sont les objets d’adoration, soit des pouvoirs et des attributs imaginaires leur sont attribués. Dans l’un et l’autre cas, les hommages rendus, les bénédictions recherchées, les prérogatives attribuées aux objets de culte et les affections exercées à leur égard, impliquent l’hypothèse qu’ils sont vraiment divins. Dans les deux cas, le cœur du peuple, sa confiance et ses espoirs sont détournés le Créateur à la créature. Il y a bien cependant cette grande différence entre les deux cas. Les objets du culte païen étaient impies ; les objets de culte dans l’Église de Rome sont considérés comme des idéaux de sainteté. D’un certain point de vue, cela fait une immense différence. Mais l’idolâtrie est dans les deux cas la même. Car l’idolâtrie consiste à rendre aux créatures l’hommage dû à Dieu.
La mère de notre Seigneur est considérée par tous les chrétiens comme « bénie », comme « la plus favorisée des femmes ». Aucun membre de la famille déchue de l’homme n’a eu l’honneur d’être la mère du Sauveur du monde. Le respect qui lui était dû en tant que bien-aimée de Dieu, et en tant que personne dont le cœur était transpercé de tant de douleurs, a conduit à ce qu’elle soit considérée comme l’idéal de toute la grâce et de l’excellence féminines, et qu’elle devienne peu à peu l’objet des honneurs divins, à mesure que l’Église perdait de plus en plus de sa spiritualité.
La déification de la Vierge Marie dans l’Église de Rome a été un lent processus. La première étape a été l’affirmation de son virginité perpétuelle. Cela a été pris tôt et généralement concédé. La deuxième étape était l’affirmation que la naissance, ainsi que la conception de notre Seigneur, étaient surnaturelles. La troisième fut la décision solennelle et autoritaire du concile œcuménique d’Éphèse, en 481 apr. J.-C., selon laquelle la Vierge Marie était la « Mère de Dieu ». Sur cette décision, on peut remarquer (a) qu’elle a été rendue plutôt comme une justification de la divinité du Christ, que comme une exaltation de la gloire de la sainte Vierge. Il a son origine dans la controverse nestorienne. Nestorius a été accusé d’enseigner que le Logos n’habitait que l’homme Jésus, d’où l’on a déduit qu’il soutenait que la personne née de la Vierge était simplement humaine. C’est pour souligner l’affirmation que la « personne » ainsi née était vraiment divine que les orthodoxes ont insisté pour que la Vierge soit appelée la Mère de Dieu. (b.) Il y a un sens dans lequel la désignation est correcte et selon l’analogie de l’Écriture. La Vierge était la Mère du Christ ; Le Christ est Dieu manifesté dans la chair : elle était donc la Mère de Dieu. L’enfant Sauveur était une personne divine. Les chrétiens n’hésitent pas à dire que Dieu a racheté son Église par son propre sang. Selon l’usage de l’Écriture, la personne du Christ peut être désignée d’une nature, lorsque le prédicat appartient à l’autre. On peut l’appeler le Fils de l’homme quand nous parlons de son immensité qui le remplit ; et il peut être appelé Dieu quand nous parlons de sa naissance, (c.) Néanmoins, bien que la désignation soit en elle-même justifiable, dans l’état de sentiment qui répandait l’Église, la décision du Concile tendait à accroître la vénération superstitieuse pour la Vierge. Il était considéré par le peuple comme équivalant à une déclaration de divinité. Les membres du Conseil furent escortés hors de leur lieu de réunion par une foule portant des torches, précédées par des femmes portant des encensoirs remplis d’encens brûlant. En combattant la prétendue doctrine nestorienne des personnes en Christ, il y avait une forte tendance à l’opposé, à la doctrine d’Eutychès, qui soutenait qu’il n’y avait en notre Seigneur qu’une seule nature. Selon ce point de vue, la Vierge pourrait être considérée comme la Mère de Dieu dans le même sens que toute mère ordinaire est la mère de son enfant. Quoi qu’on en dise, le fait est que la décision du concile d’Éphèse marque une époque distincte dans le progrès de la déification de la Vierge.
La quatrième étape suivit bientôt dans la dédicace en son honneur d’un grand nombre d’églises, de sanctuaires et de fêtes, et dans l’introduction d’offices solennels destinés au culte public et privé dans lesquels elle était solennellement invoquée. Aucune limite n’était imposée aux titres honorifiques par lesquels on s’adressait à elle, ni aux prérogatives et aux pouvoirs qui lui étaient attribués. Elle a été déclarée deificata. On l’appelait la Reine du ciel, la Reine des reines ; on disait qu’elle était élevée au-dessus de toutes les principautés et de toutes les puissances ; qu’elle était assise à la droite du Christ, pour partager avec Lui le pouvoir universel et absolu confié à ses mains. Toutes les bénédictions du salut étaient recherchées par ses mains, ainsi que la protection contre tous les ennemis et la délivrance de tous les maux. Les prières, les hymnes et les doxologies étaient permises et prescrites qui lui sont adressés. Tout le Psautier a été transformé en un livre de louange et la confession à la Mère du Christ. Ce qui, dans la Bible, est dit à Dieu et de Dieu, est dans ce livre adressé à la Vierge. Dans le premier psaume, par exemple, il est dit : « Heureux l’homme qui ne marche pas dans le conseil des impies », etc. Dans le Psautier de la Vierge, il est écrit : « Heureux l’homme qui aime ton nom, ô Vierge Marie ; Ta grâce consolera son âme. Comme un arbre irrigué par des fontaines d’eau, il produira les fruits les plus abondants de la justice. Dans le deuxième psaume, la prière s’adresse à la Vierge : « Protège-nous par ton main droite, ô Mère de Dieu, » etc. Ps. ix, « Je te confesserai, ô Dame (Domina) ; Je proclamerai parmi le peuple ta louange et ta gloire. C’est à toi qu’appartiennent la gloire, l’action de grâces et la voix de la louange. » Ps. xv : « Garde-moi, ô Dame, car j’ai espéré en toi. » Ps. xvii, « Je t’aimerai, Reine du ciel et de la terre, et je glorifierai ton nom parmi les nations. » Ps. xviii : « Les cieux proclament ta gloire, ô Vierge Marie ; le parfum de tes parfums est répandu parmi toutes les nations. » Ps. xli, « Comme le cerf soupire après les ruisseaux d’eau, ainsi soupire mon âme pour ton amour, ô Sainte Vierge. » Et ainsi de suite jusqu’à la fin. La Vierge est toujours appelée le Psalmiste s’adressa à Dieu ; et les bénédictions qu’il recherchait de Dieu, le romaniste est enseigné à les rechercher auprès d’elle.1
1 Ce psautier est publié sous le titre Psalterium Virr/inis Maria), a Dei’oto Doctore Sancto Bonaventura compilatum. Il est longuement donné par Chemnitz dans son Examen Cun-cilii Trvlentini, édit. Francfort, 1574, partie iii. pp. 106 à 179. Les documents de Chemnitz n’en font pas référence à Uonavcntura ; mais il le donne comme un document sanctionné et utilisé dans l’Église de Rome.
De la même manière, les très saints offices de l’Église sont parodiés. Le Te Deum, par exemple, est transformé en adresse à la Vierge. « Nous te louons, Mère de Dieu ; Nous te reconnaissons vierge. Toute la terre t’adore, toi l’épouse du Père éternel. Tous les anges et archanges, tous les trônes et toutes les puissances, te servent fidèlement. Vers toi tous les anges crient à haute voix, d’une voix incessante : Sainte, Sainte, Sainte, Sainte, Marie, Mère de Dieu..... Toute la cour des cieux t’honore comme reine. La sainte Église du monde entier t’invoque et te loue, toi la mère de la majesté divine..... Tu es assis avec ton Fils à la droite du Père..... En toi, douce Marie, est notre espérance ; Défendez-nous pour toujours. Louange à toi ; l’empire te convient ; Que la vertu et la gloire soient pour toi aux siècles des siècles.» 2
2 Sec Un dictionnaire de l’Église. Par Walter Farquhar !look, D. I)., Vicaire de Leeds. Sixième édition. Philadelphie, 1854, article Mariolâtrie. Le Dr Hook cite le soi-disant ״ Psautier d’Uonavcntura ; « et fait référence à l’Opéra Saucti Bonaventure , tom. VI.part II. du n. 466 au n. 473. Fol. Mo׳runti :r, 1609.
Il n’est guère nécessaire de se référer aux litanies de la vierge Marie pour prouver davantage le culte idolâtre dont elle est l’objet. Ces litanies sont préparées dans la forme habituellement adoptée dans le culte de la Sainte Trinité ; contenant des invocations, des dépréciations, des intercessions et des supplications. Ils contiennent des prières telles que celles-ci : « Peccatores, te rogamus audi nos ; Ut sanctum Ecclesiam piissima conservare digneris, Ut justis gloriam, peccatoribus gratiam impetrare digneris, Ut navigantibus portum, infirmantibus sanitatem, tribulatis consolationem, captivis liberationem, impetrare digneris, Ut famulos et fam nias tuas tibi devote servientes, consolare digneris, Ut cunctum populum Christianum filii tui pretioso sanguine redemptum, conservare digneris, Ut cnnctis fidelibus def !metis, eternam requiem impetrare digneris, Ut nos exaudire digneris, Mater Dei, Filia Dei, Sponsa Dei, Mater carissima, Domina nostra, miserere, et dona nobis perpetuam pacem. On ne peut pas chercher plus que cela de la part de Dieu ou du Christ. La Vierge Marie est à ses adorateurs ce que le Christ est à nous. Elle est l’objet de toutes les affections religieuses ; le fondement de la confiance ; et la source d’où toutes les bénédictions du salut sont attendues et recherchées.
Cependant, il y a toujours eu un courant sous-jacent d’opposition à cette déification de la mère de notre Seigneur. Cela est devenu plus évident dans la controverse sur la question de son immaculée conception. Cette idée n’a jamais été abordée dans l’Église primitive. La première forme sous laquelle la doctrine est apparue, c’est que, du fait que Dieu dit de Jérémie : « Avant que tu ne sois sorti du sein maternel, je t’ai sanctifié » (Jér. i. 5), on a soutenu qu’on pouvait en dire autant de la Vierge Marie. Jérémie, en effet, a été sanctifié avant sa naissance, en ce sens qu’il a été consacré ou mis à part dans le dessein de Dieu à la fonction prophétique ; tandis que Marie, disait-on, était ainsi sanctifié dans le sens d’être sanctifié. Toutes les grandes lumières de l’Église latine, Augustin, Anselme, Bernard de Clairvaux et Thomas d’Aquin, soutenaient que si la vierge Marie n’était pas participante du péché et de l’apostasie de l’homme, elle ne pouvait pas participer à la rédemption. Comme Thomas d’Aquin, et après lui les dominicains, ont pris parti dans cette controverse, Duns Scot et les franciscains ont pris l’autre. Le sentiment public était en faveur de la doctrine franciscaine de l’Immaculée Conception. Même Jean Gerson, chancelier de l’Université de Paris, distingué non seulement par son érudition, mais aussi par son zèle à réformer les abus, se prononça publiquement en 1401 en faveur de ce point de vue. Il était cependant assez candide pour admettre que cela n’avait pas été jusque-là la doctrine de l’Église. Mais il soutenait que Dieu communiquait peu à peu la vérité à l’Église ; c’est pourquoi Moïse en savait plus qu’Abraham, les prophètes plus qu’Alose, les apôtres plus que les prophètes ; de la même manière, l’Église a reçu de l’Esprit de Dieu beaucoup de vérités inconnues des Apôtres. Cela implique bien sûr le rejet de la doctrine de la tradition. Cette doctrine, c’est qu’une révélation plénière de toute la doctrine chrétienne a été faite par le Christ aux apôtres et qu’ils l’ont communiquée à l’Église, en partie dans leurs écrits et en partie par des instructions orales. Pour prouver qu’une doctrine est d’autorité divine, il faut prouver qu’elle a été enseignée par les apôtres, et pour prouver qu’ils l’ont enseignée, il faut prouver qu’elle a toujours et partout été tenue par l’Église. Mais, selon Gerson, l’Église d’aujourd’hui peut tenir pour vrai ce que les apôtres n’ont jamais tenu, et même le contraire de ce qu’ils et l’Église ont tenu pour vrai. Il enseigne que l’Église avant son temps a enseigné que la Vierge Marie, comme tous les autres membres du genre humain, est née avec l’infection du péché originel ; mais que l’Église de son temps, sous l’inspiration de l’Esprit, croyait en son immaculée conception. Cela résout la tradition en sensus communis ecclcsiœ d’un donné ou plutôt lui substitue le sensus communis ecclcsiœ d’un donné Heure. Il a déjà été démontré1 que Moehler, dans son « Symbolik » , enseigne sensiblement la même doctrine.
1 Vol. i. p. 114
Cette question était indécise à l’époque de la réunion du concile de Trente, et causa beaucoup d’ennuis aux pères qui s’y trouvaient. Les dominicains et les franciscains, d’une influence à peu près égale dans le concile, insistèrent chacun pour que leurs vues particulières fussent sanctionnées. Les légats, dans leur perplexité, s’adressèrent à Rome pour obtenir des instructions, et reçurent l’ordre, par crainte d’un schisme, d’empêcher toute nouvelle controverse à ce sujet, et de formuler ainsi la décision de manière à satisfaire les deux parties. Cela ne pouvait se faire qu’en laissant la question indécise. C’est en substance la ligne de conduite qu’a adoptée le Conseil. Après avoir affirmé que toute l’humanité a péché en Adam et tire de lui une nature corrompue, il ajoute : « Declarat tamen hæc ipsa Sancta Synodus, non esse sum intentionis comprehendere in hoc decreto, ubi de peccato original ! agitur, beatam, et immaculatam Viriginem Mariam, Dei genetricem ; sed observandas esse constitutiones felicis recordationis Xysti papæ IV., sub pœnis in eis constitutionibus contentis, quas innovât.»2 Cette dernière clause se rapporte à la bulle de Sixte IV, publiée en 1483, menaçant les deux parties dans cette controverse des peines d’excommunication si l’une d’elles était déclarée coupable d’hérésie ou de péché mortel.
2 Ceci est tiré de Streitwolf , Libri Symbolici, Göttingen, 1846, p. 20. La note de bas de page dit : *Totum hanc periodiim, « Declarat-innovat, » omnes fere editiones ante Romanas omittunL »
La controverse continua donc, après le Concile de Trente, à peu près comme elle l’avait fait auparavant, jusqu’à ce que le Pape actuel, lui-même un fervent adorateur de la Vierge, annonçât son intention d’avoir l’immaculée conception de la Mère de notre Mère. Le Seigneur a déclaré. Il réalisa ce dessein et, le 8 décembre 1854, il se rendit en grande pompe à Saint-Pierre de Rome et prononça le décret selon lequel « la Vierge Marie, dès le premier moment de sa conception par la grâce spéciale du Dieu tout-puissant en vue des mérites du Christ, était préservée de toute tache du péché originel ». Elle était ainsi placée, comme une impeccabilité complète, sur un pied d’égalité avec son adorable Fils, Jésus-Christ, dont elle occupe la place dans la confiance et l’amour d’une si grande partie du monde catholique romain.
§ 6. Le Deuxième Commandement.
Les deux principes fondamentaux de la religion de la Bible sont les premiers, qu’il n’y a qu’un seul Dieu vivant et véritable, le créateur du ciel et de la terre, qui s’est révélé sous le nom de Jéhovah ; deuxièmement, que ce Dieu est un Esprit, et que, par conséquent, il ne peut être conçu ou représenté sous une forme visible. Le premier commandement défend donc d’adorer tout autre être que l’Éternel ; et la seconde, l’adoration de tout objet visible, quel qu’il soit. Cela comprend l’interdiction, non seulement de l’hommage intérieur, mais de tous les actes extérieurs qui sont l’expression naturelle ou conventionnelle d’une telle révérence intérieure.
Que le second commandement n’interdise pas les représentations picturales ou sculptées d’objets idéaux ou visibles, c’est évident parce que tout le commandement se rapporte au culte religieux, et parce que Moïse, sur l’ordre de Dieu lui-même, a fait beaucoup d’images et de représentations de ce genre. Les rideaux du tabernacle, et surtout le voile séparant les lieux saints et les lieux très saints, étaient ornés de figures brodées représentant Chérubins; les chérubins couvraient de leurs ailes l’Arche d’Alliance ; le chandelier d’or avait la forme d’un arbre « avec des branches, des bosses et des fleurs » ; l’ourlet de la robe du grand prêtre était orné de clochettes et de grenades alternées. Quand Salomon construisit le temple, « il sculpta tous les murs de la maison tout autour avec des figures sculptées de chérubins, de palmiers et de fleurs ouvertes, à l’intérieur et à l’extérieur ». (1 Rois vi. 29.) La « mer de fusion » s’élevait sur douze bœufs. De cette maison ainsi ornée, Dieu dit : « J’ai sanctifié cette maison que tu as bâtie, pour y mettre mon nom à jamais ; et mes yeux et mon cœur y seront éternellement. (1 Rois ix. 3.) Il ne peut donc y avoir aucun doute que le second commandement n’était destiné qu’à d’interdire de fabriquer ou d’utiliser la ressemblance de quoi que ce soit dans le ciel ou sur la terre comme objets d’adoration.1
1 Les Juifs ultérieurs interprétèrent ce commandement de manière plus stricte que Moïse ou Salomon. Josèphe, Ant. 8, 7, 5, a déclaré que faire des figures de bœufs pour soutenir la cuve d’airain était contraire à la loi. L’un des ministres les plus distingués de notre Église s’est opposé à l’American Sunday School Union, qui publiait des livres illustrés. Lorsqu’on lui a demandé ce qu’il pensait des cartes. Il répondit que dans la mesure où les cartes étaient conçues simplement pour montrer la position relative des lieux sur la surface de la terre, elles étaient permises ; mais s’ils avaient des ombres pour représenter les montagnes, ils étaient interdits par le second commandement.
Le culte des images est interdit.
Il est également cher que le deuxième commandement interdise l’utilisation d’images dans le culte divin. En d’autres termes, l’idolâtrie ne consiste pas seulement dans l’adoration de faux dieux, mais aussi dans l’adoration du vrai Dieu par des images. C’est clair, —
1. Du sens littéral des mots. Ce qu’il est défendu précisément, c’est de se prosterner devant eux, ou de les servir, c’est-à-dire de leur rendre un hommage extérieur. Or, c’est exactement ce que font tous ceux qui emploient les images comme objets ou aides du culte religieux.
2. Cela est encore plus évident, car il était solennellement enjoint aux Hébreux de ne faire aucune représentation visible du Dieu invisible, ou d’adopter quoi que ce soit d’extérieur comme symbole de l’invisible et de faire de ce symbole l’objet du culte ; c’est-à-dire qu’ils ne devaient pas se prosterner devant ces images ou ces symboles ni les servir. Le mot hébreu עבד rendu par « servir », échappe à toutes sortes d’hommages extérieurs, brûlant de l’encens, faisant des oblations et des baisers en signe de soumission. Les Hébreux étaient entourés d’idolâtres. Les nations, ayant oublié Dieu, ou ayant l’habitude de le reconnaître, s’étaient livrées à de faux dieux. C’était la force invisible de la nature, dont ils voyaient autour d’eux des manifestations constantes et souvent effrayantes, qui était le grand objet de leur révérence et de leur crainte. Mais la nature, la force, l’invisible, ne pouvaient pas plus les satisfaire que l’invisible Jéhovah. Ils symbolisaient non pas l’inconnu, mais le réel, d’abord d’une manière, puis d’une autre. La lumière et l’obscurité étaient les deux symboles les plus évidents du bien et du mal : la lumière, par conséquent, le soleil, la lune et les étoiles, l’armée du ciel, étaient parmi les premiers objets de vénération religieuse. Mais tout ce qui est extérieur et visible, vivant ou mort, pouvait être fait au peuple, par association ou nomination arbitraire, le représentant de la grande puissance inconnue par laquelle toutes choses étaient contrôlées. Tout naturellement, les hommes qui se distinguent par la force de leur caractère et par leurs exploits seraient considérés comme des manifestations de l’inconnu. C’est ainsi que l’adoration de la nature et l’adoration des héros, les deux grandes formes du paganisme, sont considérées comme étant radicalement identiques. C’est en vue de cet état du monde païen, toutes les nations étant adonnées au culte du visible comme symbole de l’invisible, que Moïse prononça l’adresse solennelle au peuple élu rapportée dans le quatrième chapitre du Deutéronome. « Prends seulement garde à toi-même, dit le prophète, et garde ton âme avec diligence, de peur que tu n’oublies les choses que tes yeux ont vues, et qu’elles ne s’éloignent de ton cœur tous les jours de ta vie ; mais enseigne-leur, tes fils et les fils de tes fils. Qu’est-ce qu’il leur a demandé de se souvenir avec tant d’insistance ? C’est que dans toute la merveilleuse manifestation de la présence divine et de la majesté sur le Sinaï, ils n’avaient vu « aucune similitude », mais seulement entendu une voix. Prenez donc bien garde à vous-mêmes ; (car vous n’avez pas vu de similitude le jour où l’Eternel vous a parlé en Horeb du milieu du feu), de peur que vous ne vous corrompiez vous-mêmes, et que vous ne fassiez de vous une image taillée, la ressemblance d’une figure quelconque, la ressemblance d’un homme ou d’une femme, la ressemblance d’une bête qui est sur la terre, la ressemblance d’un oiseau ailé qui vole dans les airs, la ressemblance de tout ce qui se trouve sur la terre, la ressemblance d’un poisson qui est dans les eaux sous la terre, et de peur que tu ne lèves les yeux vers le ciel, et que tu ne voies le soleil, et la lune, et les étoiles, et toute l’armée du ciel, tu devrais être amené à les adorer [littéralement, « à te prosterner devant eux »], et à les servir, ce que L’ÉTERNEL, ton Dieu, a partagé entre toutes les nations sous tout le ciel..... Prenez garde à vous-mêmes, de peur que vous n’oubliiez l’alliance de L’ETERNEL, ton Dieu, qu’il a faite avec toi, et que vous vous faîtes une image taillée, à l’image de tout ce que L’ETERNEL, ton Dieu, t’en a empêché. Pour le SEIGNEUR, ton Dieu est un feu dévorant, un Dieu jaloux. La chose ainsi interdite à plusieurs reprises et solennellement comme violation de l’alliance entre Dieu et le peuple, était de se prosterner devant ou d’utiliser quelque chose de visible, qu’il s’agisse d’un objet naturel comme le soleil ou la lune, ou d’une œuvre d’art et d’un appareil de l’homme, comme d’un objet ou d’un mode de culte divin. Et en ce sens, le commandement a été compris par le peuple à qui il a été donné, depuis l’époque de Moïse jusqu’à aujourd’hui. L’adoration du vrai Dieu par des images, aux yeux des Hébreux, a toujours été considérée comme un acte d’idolâtrie au même titre que l’adoration de faux dieux.
3. Un troisième argument à ce sujet est que l’adoration de l’Éternel par l’utilisation d’images est dénoncée et punie comme un acte d’apostasie de Dieu. Quand les Hébreux dans le désert dirent à Aaron : " Faites-nous des dieux qui marcheront devant nous « , ni eux ni Aaron n’avaient l’intention de renoncer à l’Éternel comme leur Dieu ; mais ils désiraient un symbole visible de Dieu, comme les païens en avaient de leurs dieux. C’est évident, parce qu’Aaron, lorsqu’il façonna le veau d’or et construisit un autel devant lui, fit une proclamation et dit : " Demain est une fête pour Jéhovah. » « Leur péché résidait donc, non pas dans le fait qu’ils adoptaient un autre dieu, mais dans le fait qu’ils prétendaient adorer un symbole visible de Celui qu’aucun symbole ne pouvait représenter. » 1
1 La Sainte Bible, avec un commentaire explicatif et critique. Par les évêques et autres membres du clergé de l’Église anglicane. New York : Charles Scribner & Co., 1871, vol. I. p. 405.
De la même manière, lorsque les dix tribus se séparèrent de Juda et furent érigées en un royaume séparé sous Jéroboam, l’adoration de Dieu par les idoles fut considérée comme une apostasie du vrai Dieu. Il est évident, d’après tout le récit, que Jéroboam n’avait pas l’intention d’introduire le culte d’un autre dieu que Jéhovah. C’est le lieu et le mode de culte qu’il cherche à changer. Il craignait que si le peuple continuait à monter à Jérusalem et à adorer dans le temple qui y avait été établi, il retournerait bientôt à son allégeance à la maison de David. Pour empêcher cela, il fit deux veaux d’or, comme l’avait fait Aaron, symboles du Dieu qui avait fait sortir son peuple d’Égypte, et il plaça l’un à Dan et l’autre à Béthel, et ordonna au peuple de recourir à ces lieux pour le culte. C’est ainsi que Jéhu, qui se vantait de son " zèle pour Jéhovah " et extermina les prêtres et les adorateurs de Baal, conserva le service des veaux d’or, parce que, comme l’exprime Winer, " c’était devenu la forme établie de l’adoration de Jéhovah iii Israël. « Er [Jehu] behielt den Kalberdienst in Dan und Bethel, alsin Israel einheimisch gewordenen Jehovah-dienst. » 2 Dans Lévitique xxvi. 1, il est dit : « Vous ne ferez point d’idoles ni d’images taillées, vous n’élèverez point d’image debout, et vous n’élèverez aucune statue de pierre dans votre pays, pour vous prosterner devant elle, car je suis l’Éternel, votre Dieu. » Et Moïse ordonna que, lorsque le peuple aurait pris possession de la terre promise, six tribus seraient rassemblées sur la montagne de Garizim pour bénir, et six sur la montagne d’Ébal pour maudire : « Et les Lévites parleront et diront à tous les hommes d’Israël d’une voix forte : Maudit soit l’homme qui fait une image taillée ou fondue, une abomination pour l’Éternel, l’ouvrage des mains de l’artisan, et il le met dans un lieu secret. Et tout le peuple répondra : Amen. (Dent, xxvii. 15.)
2 Biblisches Reahoorterbuch, von Dr. Georg Benedict Winer, 3e édit. Leipzig, 1847, art. « Jéhu. »
La chose spécifique ainsi fréquemment et solennellement défendue, c’est de se prosterner devant les images, ou de leur rendre un service religieux. En ce sens, ces commandements ont été compris par l’ancien peuple de Dieu à qui ils ont été donnés à l’origine, et par toute l’Église chrétienne jusqu’à l’afflux soudain de païens nominalement convertis dans l’Église après l’époque de Constantin, qui a apporté avec eux des idées païennes et a insisté sur les modes de culte païens.
Les faits simples et évidents en ce qui concerne la religion du monde des Gentils sont les suivants : (1) Que les dieux des nations étaient des êtres imaginaires ; c’est-à-dire qu’ils n’avaient d’existence que dans l’imagination de leurs adorateurs, ou qu’ils ne possédaient pas les attributs qu’on leur attribuait. C’est pourquoi ils sont appelés dans l’Écriture vanité, mensonges, non-entités. (2) De ces êtres imaginaires on choisissait des symboles ou on formait des images, auxquelles on rendait tous les hommages qu’on supposait dus aux dieux eux-mêmes. Cela n’a pas été fait en supposant que les symboles ou les images étaient vraiment des dieux. Les Grecs ne pensaient pas que Jupiter était un bloc de marbre. Les païens mentionnés dans la Bible ne croyaient pas non plus que le soleil était Baal. Néanmoins, on supposait qu’il existait un lien entre l’image et la divinité qu’elle était censée représenter. Chez certains, ce lien était simplement celui entre le signe et la chose signifiée ; chez d’autres, c’était plus mystique, ou ce que nous appellerions aujourd’hui sacramentel. Dans un cas comme dans l’autre, il était tel que l’hommage dû à la divinité était rendu à son image ; et toute indignité offerte à ces derniers a été ressentie comme offerte au premier.
Comme donc les dieux païens n’étaient pas des dieux, et comme l’hommage dû à Dieu était rendu aux idoles, les écrivains sacrés dénonçaient les païens comme les adorateurs de ceps et de pierres, et les condamna pour la folie de faire des dieux bois ou métal « gravé par l’art et l’appareil de l’homme ». Ils n’ont fait que peu ou pas de différence entre les l’adoration des images et l’adoration des faux dieux. Les deux choses étaient, à leur avis, identiques. C’est pourquoi, dans la Bible, l’adoration des images est dénoncée comme de l’idolâtrie, sans égard à la divinité, vraie ou fausse, à qui l’image était dédiée.
Les Raisons annexées au présent Commandement.
La relation entre l’âme et Dieu est beaucoup plus intime que celle entre l’âme et n’importe quelle créature. Notre vie, spirituelle et éternelle, dépend de notre relation avec notre Créateur. C’est pourquoi notre plus grand devoir est envers Lui. Le plus grand péché qu’un homme puisse commettre est de refuser de rendre à Dieu l’admiration et l’obéissance qui lui sont dues, ou de transférer à la créature l’allégeance et le service qui lui appartiennent. C’est pourquoi aucun péché n’est dénoncé aussi fréquemment ni aussi sévèrement dans les Écritures.
La relation la plus intime qui puisse subsister entre les hommes est celle du mariage. Aucun tort qui puisse être fait par un homme à un autre n’est plus grand que la violation de cette relation ; et aucun péché qu’une femme puisse commettre n’est plus odieux et plus dégradant que l’infidélité à ses vœux de mariage.
Cela étant, il est naturel que la relation entre Dieu et son peuple soit, telle qu’elle est, dans la Bible, si souvent illustrée par une référence à la relation matrimoniale. Un peuple qui refuse de reconnaître, ou un homme qui refuse de reconnaître l’Éternel comme son Dieu, qui transfère l’allégeance et l’obéissance dues à Dieu seul à tout autre objet, est comparé à une épouse infidèle. Et comme la jalousie est la plus forte des passions humaines, la relation de Dieu avec ceux qui l’abandonnent ainsi est illustrée par une référence aux sentiments d’un mari blessé et abandonné. C’est ainsi que les Écritures enseignent que le plus grand déplaisir de Dieu, et les manifestations les plus terribles de sa colère, sont les conséquences certaines du péché d’idolâtrie ; c’est-à-dire du péché d’avoir un autre Dieu que l’Éternel, ou de donner aux images, aux ceps et aux pierres, l’hommage extérieur dû à Celui qui est esprit, et qui doit être adoré en esprit et en vérité.
C’est pourquoi le Seigneur, dans ce commandement, se déclare « un Dieu jaloux, visitant les iniquités des pères sur les enfants jusqu’à la troisième et à la quatrième génération ; et il fait miséricorde à des milliers de ceux qui m’aiment et gardent mes commandements. Le mal Les conséquences de l’apostasie de Dieu ne sont pas limitées aux apostats originels. Ils se perpétuent de génération en génération. Ils semblent en effet, et, humainement parlant, en fait, sont sans remède. La dégradation et les misères indicibles de tout le monde païen sont la conséquence naturelle et inévitable de ce que leurs ancêtres ont transformé la vérité de Dieu en mensonge, et ont adoré et servi la créature plus que le Créateur. Ces conséquences naturelles, cependant, sont conçues, ordonnées et judiciaires. Ce ne sont pas de simples calamités. Ce sont des jugements, et ils ne doivent donc pas être contrecarrés ou éludés. Par conséquent, ceux qui enseignent l’athéisme, ou qui sapent la religion, ou qui corrompent et dégradent le culte de Dieu en y associant le culte des créatures ; ou qui enseignent que nous pouvons faire des images taillées, nous prosterner devant elles et les servir, font descendre sur eux-mêmes et sur les générations futures les calamités les plus terribles qui peuvent dégrader et affliger les enfants des hommes. Telle doit être la question, à moins qu’ils ne puissent non seulement contrecarrer l’action des causes naturelles, mais aussi contrecarrer le dessein de Jéhovah.
C’est un grand motif de gratitude, et adapté pour remplir le cœur du peuple fidèle de Dieu de joie et de confiance, de savoir qu’il bénira leurs enfants jusqu’à la millième génération.
La doctrine et l’usage de l’Église romaine en ce qui concerne les images.
Le salut, a dit notre Seigneur, vient des Juifs. Les fondateurs de l’Église chrétienne étaient juifs. La religion de l’Ancien Testament dans laquelle ils avaient été éduqués interdisait l’utilisation d’images dans le culte divin. Tous les païens adoraient les idoles. L’idolâtrie était donc une abomination pour les Juifs. Avec l’autorité de l’Ancien Testament contre l’utilisation des images et avec ce fort préjugé national contre leur utilisation, il est absolument incroyable qu’elles soient admises dans le culte plus spirituel de l’Église chrétienne. Ce n’est que trois siècles après l’introduction du christianisme que l’influence de l’élément païen introduit dans l’Église fut assez forte pour vaincre l’opposition naturelle à leur utilisation au service du sanctuaire. Trois partis se sont rapidement développés à ce sujet. Les premiers adhéraient aux enseignements de l’Ancien Testament et à l’usage des Églises apostoliques, et répudiaient l’usage religieux des images sous quelque forme que ce soit. La seconde autorisait l’utilisation d’images et d’images à des fins d’instruction, mais pas pour le culte. Les gens ordinaires ne savaient pas lire, et c’est pourquoi on a fait valoir que les représentations visibles de personnes et d’incidents bibliques étaient permises pour leur bénéfice. Le troisième soutenait leur usage non seulement comme moyen d’instruction, mais aussi comme lieu de culte.
Dès le début de l’année, En 305 apr. J.-C., le concile d’Elvire en Espagne condamna l’utilisation des images dans l’Église. 1 Dans le trente-sixième canon, le Concile dit 2 : « Placuit picturas in ecclesia esse non debere ; no quod colitur et adoratur in parietibus depingatur. » Augustin se plaignait de l’usage superstitieux des images ; Eusèbe de Césarée et Épiphane de Salamine protestèrent contre le fait qu’on en fît des objets de culte, et Grégoire le Grand n’en permit que comme moyen d’instruction.1
1 L’année 305 est généralement fixée comme date de ce concile, bien que l’heure précise de sa session soit contestée.
2 Binius, Concilia Generalia et Provincalia, Cologne, 1618, t. I. t. t. i. p. 195, av. J.-C.
1 Cf. Guericke , Kirchengeschichte, 11■ iii. 2, § 77, 6e édit. Leipzig, 1846, t. I, p. 350.
En 726, l’empereur Léon III publia une ordonnance interdisant l’utilisation d’images dans les églises comme païennes et hérétiques. Pour soutenir son action, on convoqua un concile, qui se réunit à Constantinople en 754, et qui donna une sanction ecclésiastique à cette condamnation. Cependant, en 787 apr. J.-C., l’impératrice Irène, sous l’influence romaine, convoqua un concile, que les romanistes de l’école italienne considèrent comme œcuménique, à Nice, par lequel le culte de l’image était pleinement sanctionné. Ce concile s’est réuni pour la première fois à Constantinople, mais l’opposition à l’utilisation des images y était si forte qu’il a été dissous et convoqué à Nice l’année suivante. Ici, la face des choses avait changé : les ennemis s’étaient convertis ; les opposants sont devenus des avocats ; même Grégoire de Néo-Césarée, qui avait été un partisan zélé de la politique de Léon III. et de son fils Constantin Copronyme, fut amené à dire : « Si omnes consentiunt, ego non dissentio. » Peu de gens pouvaient résister aux promesses et aux menaces de ceux qui détenaient le pouvoir, et à la force de l’argument en faveur de l’adoration des images tiré des nombreux miracles présentés en faveur de leur culte. Ce concile déclara donc hérétique le concile précédent, convoqué par Léon III, et ordonna le culte des images dans les églises ; non pas avec λατρεία, ou la révérence due à Dieu, mais avec άσττασ-ρ,ο ? και τιμητική προσκύνησις (avec salutations et révérence prosternations). Le concile a annoncé le principe sur lequel le culte des images, soit chez les païens, soit chez les chrétiens, a généralement été défendu, c’est-à-dire que le culte rendu à l’image se termine sur l’objet qu’elle représente. ' Η της εικόνας τιμή επι το πρωτότυπον (Λαβαίνει και ο προσκννων την εικόνα προσκυνά. εν αΰτη του ε-γγραφομενου την υποστασιν.
Les décisions de ce Concile, bien que sanctionnées par le Pape, offensèrent les Églises occidentales. L’empereur Charlemagne ne se contenta pas de faire écrire un livre (intitulé " Libri Carolini « ) pour réfuter les doctrines inculquées, mais convoqua également un concile à Francfort-sur-le-Main en 794, auquel participèrent des délégués de Grande-Bretagne, de France, d’Allemagne, d’Italie et même de deux pays d’Angleterre. légats de l’évêque de Rome, étaient présents ; où les décrets du soi-disant Conseil général de Nice ont été « rejetés », « méprisé » et « condamné ». Tout culte d’images et d’images était interdit, mais leur présence dans les églises pour l’instruction et l’ornementation était autorisée.
Les amis de l’adoration des images, cependant, gagnèrent rapidement l’ascendant, de sorte que Thomas d’Aquin, l’un des meilleurs et des plus grands théologiens romains du XIIIe siècle, soutenait la doctrine extrême sur ce sujet. Il enseignait que les images devaient être utilisées dans les églises à trois fins, d’abord pour l’instruction des masses qui ne savaient pas lire ; deuxièmement, pour que l’on se souvienne mieux du mystère de l’Incarnation et des exemples des saints ; et troisièmement, que les sentiments pieux peuvent être excités, car les hommes sont plus facilement émus par ce qu’ils voient que par ce qu’ils entendent. Il a enseigné qu’aucune révérence n’est due à l’image en elle-même et pour elle-même, mais que si elle représente le Christ, la révérence due au Christ est due à l’image. « Sic ergo dicendum est, quod imagini Christi in quantum est res quædam (puta lignum vel pictum) nulla reverentia exhibetur ; Quia reverentia nonnisi rationnel ! naturæ debetur. Relinquitur ergo quod exhibeatur ei reverentia solum, in quantum est imago : et sic sequitur, quod eadem reverentia exhibeatur imagini Christi et ipsi Christo. Cum ergo Christus adoretur adoratione latriæ, consequens est, quod ejus imago sit adoratione latriæ adoranda.» 1
1 Summa, in. quæst. xxv. art 3, édit. Cologne, 1640, p. 53 de la quatrième série.
Le Concile de Trente a agi en ce qui concerne le culte des images avec sa prudence habituelle. Il a décrété qu’aux images du Christ et des saints le « respect dû » devait être rendu, sans définir ce qu’est ce respect. Le concile décida : « Imagines porro Christi, Deiparæ Virginis, et aliorum sanctorum, in templis præsertim habendas, et retinendas ; eisque debitum honorera, et venerationem impertiendam ; non quod credatur inesse aliqua in eis divinitas, vel virtue, propter quam sint colendæ ; vel quod ab eis sit aliquid petendum ; vel quod fiducia in imaginibus sit Agenda ; veluti olim fiebat a gentibus, quæ in idolis spem suam collocabant ; sed quoniam honos, qui eis exhibetur refertur ad prototypa, quæ illæ representant : ita ut per imagines, quas osculamur, et coram quibus caput aperimus, et procumbimus, Christum adoremus ; et sanctos, quorum illæ similitudinem gérant, veneremur. »
Dans la même session, il fut décrété à propos des reliques : « Sanctorum quoque martyrum, et aliorum cum Christo viventium sancta corpora, quæ viva membra fuerunt Christi, et templum Spiritus Sancti, ab ipso ad æternam vitam suscitanda, et glorificanda, a fidelibns veneranda esse ; per quæ multa bénéficia a Deo hominibus præstantur : ita ut affirmantes, sanctorum reliquiis venerationem, atque honorera non deberi ; vel eas, aliaque sacra monumenta a fidelibus inutilité !־ honorari ; atque eorum opis impetrandæ causa sanctorum memoriae frustra frequentari ; omnino damnandos esse ; prout jampridem eos damnavit, et nunc etiam damnat ecclesia.» 1
1 Scss. xxv. ; Streitwolf , Libri Symbolici, Göttingen, 1846, t. I, p. 93, 94.
Sur le culte des reliques, le Catéchisme romain dit : « Cui fidem non faciant et honoris, qui sanctis debetur, et patrocinii, quod nostri suscipiunt, mirabiles effectæ res ad eorum sepulcra, et oculis, et manibus membrisque omnibus captis, in pristinum statum restitutis, mortuis ad vitam revocatis, ex corporibus hominum ejectis demoniis ? quæ non audisse, nt multi, non legisse, ut plurimi gravissimi viri, sed vidisse, testes locupletissimi sancti Ambrosius et Augustinus litteris prodiderunt. Quid multa ? si vestes, sudaria, si umbra sanctorum, priusquam e vita migrarent, depulit morbos, viresque restituit, quis tandem negare audeat, Deum per sacros cineres, ossa, ceterasque sanctorum reliquiae eadem mirabiliter efficere ? Declaravit id cadaver illud, quod forte illatum in sepulcrum Elisei, ejus tacto corpore, subito revixit. » 2
2 po. ii. 8 (15, xxx., xxxi.) ; Streitwolf, t. I, p. 482.
L’ensemble du Liber Secundus de la Dispute de Bellarmin " De Ecclesia Triumphante " dans le second volume de ses œuvres, est consacré à la discussion de la question du culte des reliques et des images des saints. En ce qui concerne le culte des images, il dit qu’il y a trois opinions parmi les romanistes eux-mêmes : « Prima, quod imago non sit ullo modo in se colenda, sed solum coram imagine colendum exemplar. » « Secunda opinio est, quod idem honor debeatur imagini nt exemplar !, et proinde Christi imago sit adoranda cultu latriæ, Beatæ Mariæ cultu hyperduliæ, sanctorum aliorum, cultu duliæ. » « Tertia opinio versatur in medio, estque eorum, qui dicunt, ipsas imagines in se, et proprie honorari debere, sed honore minor !, quam ipsum exemplar, et proinde nullam imaginem adorandam esse cultu latriæ. » 3 Son opinion personnelle est exprimée dans ce qui suit propositions : " Prima sententia, sive propositio. Imagines Christi, et sanctorum venerandæ sunt, non solum per accidens, vel improprie, sod etiam per se proprie, ita ut ipsæ terminent venerationem ut in se considerantur, et non solum ut vicem gérant exemplaris. « Secunda propositio. Quantum ad modum loquendi præsertim in concione ad populum, non est dicendum imagines ullas adorari debere latria, sed e contrario non debere sic adorari. « Tertia propositio. Si de re ipsa agatur, admitti potest, imagines posse coli improprie, vel per accidens, eodem genere cultus, quo exemplar ipsum colitur. » « Quarta propositio. Imago per se, et proprie non est adoranda eodem cultu, quo ipsum exemplar, et proinde nulla imago est adoranda cultu latriæ per se, et proprie. » « Quinta conclusio, Cultus, qui pei' se, proprie debetur imaginibus, est cultus quidam imperfectus, qui analogice et reductive pertinet ad speciem ejus cultus, qui debetur exemplar !. » 1
3 De Ecclesia Triumphante., lib. 11., De Imaginibus Sanctorum, cap. xx. ; Disputationes , Paris, 1G08, t. II, p. 801, 802.
1 Ut supra, cap. xxi.-xxv. pp. 802-809.
Bellarmin, dans sa défense du « cultus reliquiarum », commence par une tentative de réfutation des cinq arguments de Calvin contre un tel culte. Il présente ensuite le sien en sa faveur. 2 Ils sont tels que ceux-ci : Premièrement, à partir d’exemples bibliques : (a) Moïse emporta les os « sancti Joseph ! » avec lui lorsqu’il quitta l’Égypte ; (b.) Dieu a honoré les restes de Moïse en les ensevelissant de ses propres mains ; (c.) Un mort a été ramené à la vie par le contact avec les os d’Élisée (2 Rois xiii. 21) ; (d.) Ésaïe a prédit que le sépulcre du Messie serait glorieux. La Vulgate rend Isaïe xi. 10, « Et erit sepulcrum ejus gloriosum ; » que Bellarmin entend comme prédisant « ut sepulcrum Domini, ab omnibus honoraretur. » Et d’ajouter : « Ex quo refellitur Lutheri blasphemia, qui in libro de abolenda Missa dicit, Deo non majorem curam esse de sepulcro Domini, quam de bob us. » (e.) La femme dont il est question dans l’Évangile a été guérie en touchant le vêtement du Christ ; les malades, selon Actes v. 15, étaient placés dans les rues « afin qu’au moins l’ombre de Pierre qui passait par là pût éclipsent certains d’entre eux » ; encore, dans Actes xix. 11,12, il est dit : « Dieu a opéré des miracles spéciaux par les mains de Paul, de sorte que de son corps ont été apportés aux malades des mouchoirs ou des tabliers, et les maladies les ont quittés, et les mauvais esprits en sont sortis. » Si, dit Bellarmin, le Christ était maintenant sur la terre, et que nous baisions son vêtement, les protestants nous appelleraient idolâtres.
2 Ut supra, chap. iii, p. 746-753.
Son second argument est tiré des décisions des conciles ; le troisième du témoignage des pères ; le quatrième et le cinquième des miracles opérés par et dans les reliques des saints, dont il cite de nombreux exemples ; le sixième de la découverte miraculeuse des restes des saints : « Si enim Deo cultus reliquiarum non placeret, cur ipse servis suis corpora sanctorum, quæ latebant, ostenderet ? « le septième, de la translation des reliques d’un lieu à un autre. Il argumente aussi sur la coutume de déposer les restes des saints sous les autels, et de brûler de l’encens et des lampes devant leurs tombeaux.1
1 Dans la Décréta et Articuli fidei jurandi per Episcopes et alios Preelatos in susceptione muneris consecrationis, publicati Romœ in Consistorio ap. S. Marcum d. IV. Septbr. a. MDLX., arc flic articles suivants : « Virgo Dei genitrix, Angeli, et Sancti, religiose coli debent, et invocari, ut cornm mentis, et prccibus juvemur.
« Crux Christi, et imagines, ac quæcunque attigernnt, adoranda sunt, juxta Ecclcsiæ catholicæ doetrinam, et !idem.
« Dciparæ Virginis Mariæ, angclornm, et sanctorum sunt imagines adorandæ (id est in honore habendæ, comme il se lit dans la marge) turn corpora, et reliquiæ quævis. » Voir Streit-wolf, Libri Symbolici Ecclesiœ Catholicos, Göttingen, 18-4G, t. II, p. 328.
En dépit de ces déclarations autorisées, Bellarmin l’énumère parmi les « mcndicia » des centuriateurs et de Calvin qu’ils disent que les catholiques « Non solum sanctos Christi loco adorant, sed etiam corum ossa, vestes, calceos, et simulacra » et demande : « At quis unquam Catholicorum rcliquias invocavit ? Quis unqtiam auditns est in prccibus, aut litaniis dixisse : ' Sanctæ reliquiæ, orate pro me ?' Et quis casdem uu-quam divino honore affccit, vel Christi loco adoravit : nos enim rcliquias quidem hono-ramus, ct osculamur ut sacra pignora patronorum nostrorum : sed nec adorainus ut Dcum uec iuvocanuis ut sanctos, sed minore cnltu vencramur, quam sanctorum spiritus, nedma quam Dcum ipsum. » De Ecclesia Triomphante, lib. ii., De reliquiis Sanctorum, cap. ii. ; D’isputationes, édit. Paris, 1008, t. II, p. 745, e, 746, a.
1. De tout cela, il résulte que les romanistes adorent les images de la même manière que les païens d’autrefois, et que les païens de nos jours le font encore. Ils « se prosternent devant eux et les servent ». Ils leur rendent tous les hommages extérieurs qu’ils rendent aux personnes qu’ils sont censés représenter.
2. Les explications et la défense d’un tel culte sont les mêmes dans les deux cas. Les païens reconnaissaient le fait que les images d’or, d’argent, de bois ou de marbre étaient sans vie et insensibles en elles-mêmes ; Ils ont admis qu’ils ne pouvaient ni voir, ni entendre, ou économisez. Ils ne leur attribuaient aucune vertu inhérente ni aucun pouvoir surnaturel. Ils prétendaient que l’hommage qu’on leur rendait s’arrêtait sur les dieux qu’ils représentaient ; qu’ils n’adoraient qu’avant les images, ou tout au plus à travers elles. En ce qui concerne les Grecs et les Romains, ils étaient moins respectueux de la simple image, et revendiquaient beaucoup moins le surnaturel dans le cadre de leur utilisation.
3. Tant chez les païens que chez les romanistes, pour les gens sans instruction, les images elles-mêmes étaient des objets de culte. Il serait difficile de trouver chez un auteur païen une justification de l’adoration des images telle que celle avancée par les théologiens romains. Quel païen a jamais dit que le même hommage était dû à l’image de Jupiter qu’à Jupiter lui-même ? C’est ce que dit Thomas d’Aquin à propos des images du Christ et des saints. Ou quel païen a jamais dit, comme le dit Bellarmin, que si l’hommage à rendre à l’image n’est pas strictement et proprement le même que celui dû à son prototype, il n’en est pas moins improprement et analogiquement le même ; identique en nature, mais pas en degré ? Que peuvent savoir les gens du peuple de la différence entre la propriété et l’impropriété ? On leur dit d’adorer l’image, et ils l’adorent tout comme les païens adoraient les images de leurs dieux. Comme la Bible déclare et dénonce comme idolâtrie non seulement l’adoration de faux dieux, mais aussi l’adoration d’images, 'le fait de se prosterner devant eux et de les servir', il est clair que l’Église romaine est aussi entièrement adonnée à l’idolâtrie que l’était Athènes lorsqu’elle fut visitée par Paul.
4. Les effets moraux et religieux du culte des images sont tout à fait mauvais. Il suffit de prouver que c’est mauvais dans ses conséquences, que Dieu l’ait défendu et menacé de frapper de ses jugements sévères les adorateurs des idoles. Cela dégrade l’adoration de Dieu. Elle détourne l’esprit des gens de l’objet propre de la révérence et de la confiance, et conduit les masses incultes à mettre leur confiance dans les dieux qui ne peuvent pas sauver.
5. Quant au culte des reliques, il suffit de dire (a) qu’il n’a aucun appui de l’Écriture. L’exposé des arguments de Bellarmin, donné ci-dessus, suffit à montrer que la Bible ne fournit aucune excuse pour cette coutume superstitieuse. (b.) Ce qui passe pour des reliques, dans la grande majorité des cas, est faux. Il n’y a pas de fin aux tromperies pratiquées sur les gens à cet égard. Il y a, dit-on, assez de fragments de la croix exposés dans différents sanctuaires, pour construire un grand vaisseau ; et il y a d’innombrables clous qui sont vénérés comme les instruments du supplice de notre Seigneur. Des os non seulement d’hommes ordinaires, mais même des brutes, sont présentées au peuple comme des reliques des saints. 1 Dans l’une des cathédrales d’Espagne, il y a une magnifique plume d’autruche conservée dans un magnifique cercueil, qui, selon les prêtres, est tombée de l’aile de l’ange Gabriel. Les romanistes eux-mêmes sont obligés de recourir à la doctrine de l'« économie » ou de la fraude pieuse, pour justifier ces impositions palpables sur la crédulité du peuple. Parmi ces impositions, l’exemple le plus flagrant est celui du sang de Saint-Januarius, qui est liquéfié chaque année à Naples. (c.) Attribuer des pouvoirs miraculeux à ces prétendues reliques, comme le font les romanistes, est au dernier degré superstitieux et dégradant. Il est vrai qu’il y a un peu plus d’un siècle, la croyance en la nécromancie et la sorcellerie était presque universelle, même parmi les protestants. Mais il y a la plus grande différence possible entre les croyances superstitieuses qui prévalent pendant un certain temps parmi le peuple, et ces croyances qui sont adoptées par l’Église et promulguées dans des articles de foi pour lier la conscience du peuple dans tous les temps. L’Église de Rome est enchaînée par les décisions de ses papes et de ses conciles qui déclarent que les superstitions les plus grossières sont des questions de révélation divine sanctionnées et approuvées par Dieu. Elle a rendu impossible pour les hommes qui ont le droit d’être appelés rationnels de croire ce qu’elle enseigne. La grande leçon enseignée par l’histoire du culte des images et de la révérence des reliques, c’est l’importance d’adhérer à la parole de Dieu comme seule règle de notre foi et de notre pratique ; ne recevant rien d’autre que ce que la Bible enseigne, et n’admettant rien dans le culte divin que les Écritures ne sanctionnent ou n’enjoignent.
1 Luther, dans les articles de Smalcald, dit : « Reliquiae sanctorum refertae multis mendaciis, ineptis et fatuitatibus. Canum et equorum ossa ibi sæpe reperta sunt. » En allemand, il se lit ainsi : « Das Ileiligthmn (reliquiæ sanctorum), darinne so manche offentliche Liigen und Narrenwerk erfunden, von Hunds- und Rossknochen, das auch um solcher Biiberei willen, das der Teufel gelacht hat, langst sollte verdammt worden seyn, wenn gleich etwas Gates daran wiire, dazu auch ohne Gottes Wort, weder geboten noch gerathen, ganz un nithig und unniitz Ding ist. » Par. n. art. ii. Chapitre 22.
Dans l’église de Wittenberg est accroché un portrait original de Luther sous lequel est écrit : « Toutes ses paroles étaient des foudres. »
doctrine protestante sur le sujet.
Comme le culte des images est expressément interdit dans les Écritures, les protestants, aussi bien luthériens que réformés, ont condamné leur mise en œuvre de tout hommage religieux. Cependant, comme leur utilisation à des fins d’instruction ou d’ornement n’est pas expressément interdite, Luther soutint qu’un tel usage était permis et même souhaitable. Il était donc favorable à ce qu’ils soient conservés dans les Églises. Les réformés, cependant, à cause des grands abus qui avaient accompagné leur introduction, insistèrent pour qu’ils fussent exclus de tous les lieux de culte.
Les normes luthériennes ne s’étendent pas sur ce sujet. Dans l’Apologie de la Confession d’Augsbourg, il est dit : « Primuni quia cum alii mediatores præter Christum quæruntur, collocatin' fiducia in alios, obruitur tota notitia Christi, idque res ostendit. Videtur initio mentio sanctorum, qualis est in veteribus orationibns, tolerabili consilio recepta esse. Postea sccuta est invocatio, invocationem prodigiosi et plus quam ethnic ! abusus secuti sunt. Ab invocatione ad imagines ventum est, hæ quoque colebantur, et putabatur cis inesse quædam vis, sicut Magi vim inesse fingunt imaginibus signorum coelestium certo tempore sculptis. » 1
1 ix. 34 ; Hase, Libri Symbolici, 3e édit. Leipzig, 1840, p. 229.
Luther était tolérant à l’égard de l’utilisation d’images dans les églises. À ce sujet, il dit : " Si l’on évite l’adoration des images, nous pouvons les utiliser comme nous utilisons les paroles de l’Écriture, qui mettent les choses devant l’esprit et nous font nous en souvenir. » 1 « Qui est si aveugle, demande-t-il, qu’il ne voit pas que si les événements sacrés peuvent être décrits avec des mots sans péché et au profit des auditeurs, ils le peuvent avec la même convenance, pour le bénéfice de ceux qui les écoutent. des non-éduqués, soient représentés ou sculptés, non seulement à la maison et dans nos maisons, mais dans les églises.» 2 Dans un autre passage, il dit que lorsqu’on lit la passion du Christ, qu’on le veuille ou non, l’image d’un homme suspendu à une croix se forme dans son esprit, aussi sûrement que son visage se reflète lorsqu’il regarde dans l’eau. Il n’y a pas de péché à avoir une telle image dans l’esprit ; Pourquoi donc serait-ce un péché de l’avoir sous les yeux ? 3
1 Sur Michée i. 7 ; llroz׳fe, édit. Walch, vol. vi. p. 2747.
2 Idem. , p. 2740.
3 Wider die himmlùchen Prophet en, von den Bildern und Sacrament, G5 ; Ibid., vol. xx, p. 213.
Les Réformés sont allés plus loin que cela. Ils condamnaient non seulement le culte des images, mais aussi leur introduction dans les lieux de culte, parce qu’elles n’étaient pas nécessaires et qu’elles étaient si sujettes à des abus. La deuxième Confession helvétique dit : « Rejicimus non modo gentium idola, sed et Christianorum simulachra. Tametsi enim Christas hnmanam assumpserit naturam, non ideo tanien assumpsit, ut typura præferret statuariis atque pictoribus..... Et quando beat ! spiritus et divi cœlites, dum hie viverent, omnein cultum sui averterunt, Et statuas oppngnarunt, cui verisimile videatur divis cœlestibus et angelis suas placere imagines, ad quas genua flectunt homines, detegunt capita, aliisque prosequuntur honoribus ? « Dans un autre paragraphe du même chapitre il est dit : « Idcirco approbamus Lactantii veteris, scriptoris sententiam, dicentis, Non est dubium, quin religio nulla est, ubicunque simulachrum est. » 4
4 Confessio Helvetica Posterior, cap. iv. ; Niemeyer , Collectio Confessionum, Leipzig, 1840, p. 472.
Le Catéchisme de Heidelberg dit :5 « Est-il interdit de faire des images ou des statues ? Dieu ne peut et ne doit en aucune façon être représenté ; et bien qu’il soit permis de faire des représentations de créatures, Dieu défend cependant qu’elles soient adorées, ou qu’il soit adoré par elles. Mais les images ne peuvent-elles pas être tolérées dans les églises pour l’instruction des ignorants ? Loin de là ; car il ne nous convient pas d’être plus sages que Dieu, qui a voulu que son Église soit instruite, non par des images muettes, mais par la prédication de sa parole.
5 Quête. 97, 98; Niemeyer, p. 453 et 454.
Quiconque a jamais vu aucun des chefs-d’œuvre de l’art chrétien, qu’il s’agisse du crayon ou du ciseau, et qui a senti combien il est difficile de résister à l’impulsion de « se prosterner devant eux et de les servir », ne peut douter de la sagesse de leur exclusion des lieux de culte public.
§ 7. Le. Troisième commandement.
« Tu ne prendras pas en vain le nom de l’Eternel, ton Dieu ; car l’Éternel ne tiendra pas pour innocent celui qui prend son nom en vain.
Le sens littéral de ce commandement est douteux. Cela peut signifier : « Tu ne prononceras pas le nom de Dieu d’une manière vaine ou irrévérencieuse ; » ou : « Tu ne prononceras pas le nom de Dieu pour mentir », c’est-à-dire : « Tu ne jureras pas faussement ». La Septante rend ainsi le passage ; Ου ληψή τυ ονομα. κυρίου τοΰ θΐ,ον σου ε’ττι ματαιω . La Vulgate dit : « Non assumes nomen Domini Dei tui in vanum. Luther, comme d’habitude , librement ad sensum : « Du sollst den Namen des Herrn, deines Gottes, nicht missbrauchen. » Nos traducteurs ont adopté le même rendu.
L’ancienne version syriaque, le Targoum d’Onkelos, de Philon et de nombreux commentateurs et exégètes modernes comprennent le commandement comme dirigé contre les faux jurons : « Tu ne prononceras pas le nom de Dieu pour un mensonge. » C’est ainsi que l’aîné Michaelis, dans sa Bible hébraïque annotée, explique « ad vanum confirmandum : non frustra, nedum, falso ». Gesenius, dans son Lexique hébreu, rend le passage ainsi 1 : « Du sollst den Namen Jehova’s nicht zur Liige aussprechen ; Nicht falsch schworen. » Rosenmüller 2 le rend ainsi : « Nolli enunciare nomen Jova Dei tui ad falsum sc. comprobandum. » Knobel 3 se lit comme suit : « Nicht sollst du erheben den Namen Jehova’s zur Nichtigkeit ; » et ajoute : « L’interdiction est spécialement dirigée contre les faux serments. »
1 Edit. Leipzig, 1857, sub voce, עוא ».
2 Scholia in Vetus Testamentum in Compendium redacta, Leipzig, 1828, t. I, p. 404.
3 Kurzyejasstes exeyetische Handbuch zum Alten Testament : Exodus und Leviticus er· klârt von August Knobel, Leipzig, 1857, p. 205.
Cette interprétation est cohérente avec le sens des mots, comme שוא , rendu ici par « vanité », ou avec la préposition, « en vain », ailleurs signifie « mensonge ». (Voir Ps. xii. 3 (2) ; xli. 7 (6)' ; Ésaïe lix. 4 ; Hos. x. 4.) Élever ou prononcer le nom de Dieu pour un mensonge signifie naturellement invoquer Dieu pour confirmer un mensonge. La préposition ל a aussi sa force naturelle. Comparez Lévitique xix. 12 : « Vous ne jurerez pas faussement par mon nom [לשקר ' à un mensonge']. » La portée générale de l’ordre demeure la même, quelle que soit l’interprétation adoptée. Le commandement de ne pas abuser du nom de Dieu inclut les faux serments, qui sont la plus grande indignité qui puisse être offerte à Dieu. Et comme l’ordonne : « Tu ne tueras point », toute indulgence à l’égard des sentiments malveillants ; ainsi le commandement : « Tu ne te parjureras pas toi-même » inclut toutes les formes moindres d’irrévérence dans l’usage du nom de Dieu.
On soulève, comme objection à la seconde interprétation donnée ci-dessus, que le parjure est une offense contre notre prochain, et qu’il appartient par conséquent à la seconde table de la Loi ; et qu’il est en fait inclus dans le neuvième commandement : « Tu ne porteras pas de faux témoignage contre ton prochain. » Le faux témoignage et le faux serment sont toutefois des infractions différentes. Le premier et le second commandement interdisent d’adorer tout autre être que l’Éternel, et de l’adorer d’une manière qui n’est pas établie dans sa parole ; et le troisième, en supposant qu’il interdise les faux serments, est ici en place, car le faux serment est une négation pratique de l’être ou des perfections de Dieu.
Le mot « nom » est utilisé en référence à Dieu dans un sens très large. Il s’agit souvent d’une désignation personnelle ou individuelle ; comme quand Dieu dit : « Ceci est mon nom », c’est-à-dire Jéhovah. Souvent, le « nom de Dieu » est équivalent à Dieu lui-même. Invoquer le nom du Seigneur et invoquer Dieu sont des formes d’expression synonymes. Comme les noms sont destinés à distinguer une personne ou une chose d’une autre, tout ce qui distingue ou caractéristique peut être inclus dans le terme. Le nom de Dieu comprend donc tout ce par quoi il se fait connaître. Ce commandement interdit donc toute irrévérence vers Dieu ; non seulement l’acte le plus irrévérencieux de l’appeler à témoigner d’un mensonge, mais aussi tout usage irrévérencieux de son nom ; toute référence négligente et inutile à Lui, ou à ses attributs ; toute conduite inconvenante dans son culte ; et, en un mot, tout indice de l’absence de cette crainte, de cette révérence et de cette crainte dues à un Être infini dans toutes ses perfections, dont nous dépendons absolument, et à qui nous sommes responsables de notre caractère et de notre conduite.
Le troisième commandement, par conséquent, interdit spécialement non seulement le parjure, mais aussi tous les serments profanes ou inutiles, tous les appels imprudents à Dieu, et tout usage irrévérencieux de son nom. Toute la littérature, qu’elle soit profane ou chrétienne, montre combien est forte la tendance de la nature humaine à introduire le nom de Dieu, même dans les occasions les plus insignifiantes. Non seulement ces formules, telles que Adieu, Adieu ou Dieu soit avec vous, et Dieu nous en préserve, qui peuvent avoir une origine pieuse, sont constamment utilisées sans aucune reconnaissance de leur véritable signification, mais même les personnes qui professent craindre Dieu se permettent souvent d’utiliser son nom comme une simple expression de surprise. Dieu est partout présent. Il entend tout ce que nous disons. Il est digne de la plus haute révérence ; et il ne tiendra pas pour innocent celui qui, en toute occasion, use de son nom avec irrévérence.
Le commandement de ne pas invoquer Dieu pour confirmer un mensonge ne peut pas être considéré comme nous interdisant de l’invoquer pour confirmer la vérité. Et telle est la nature générale d’un serment. Les serments sont de deux sortes, assertoire, quand nous affirmons qu’une chose est vraie ; et promissoire, lorsque nous nous mettons dans l’obligation de faire ou de nous abstenir de faire certains actes. C’est à cette classe qu’appartiennent les serments officiels et les serments d’allégeance. Dans les deux cas, il y a un appel à Dieu comme témoin. Un serment est donc par nature un acte d’adoration. Cela implique, (1.) Une reconnaissance de l’existence de Dieu. (2) De ses attributs d’omniprésence, d’omniscience, de justice et de pouvoir. (3.) De son gouvernement moral sur le monde ; et (4.) De notre responsabilité envers Lui en tant que notre Souverain et Juge. C’est pourquoi « jurer par le nom de l’Éternel » et le reconnaître comme Dieu, c’est la même chose. Le premier concerne le second.
Cela étant, il est évident qu’un homme qui nie les vérités mentionnées ci-dessus ne peut pas prêter serment. Pour lui, les mots qu’il prononce n’ont pas de sens. S’il ne croit pas qu’il y a un Dieu ; ou supposons qu’il admette qu’il y a un être ou une force qui peut être appelé Dieu, s’il ne croit pas que cet Être sait ce que dit le juré, ou qu’il punira le faux jure, tout le service est une moquerie. C’est une grande injustice, tendant à desserrer tous les liens de la société, de permettre aux athées de témoigner devant les tribunaux.1
1 Lors d’un récent procès pour meurtre devant l’un des tribunaux de New York, un jeune médecin scientifique a été appelé à témoigner sur ce qui constitue la folie. Il affirmait clairement que la pensée était une fonction du cerveau ; que là où il n’y a pas de cerveau, il ne peut y avoir de pensée ; et qu’un cerveau désordonné nécessite une action mentale désordonnée. Bien sûr, Dieu n’ayant pas de cerveau ne peut pas être intelligent ; en d’autres termes, il ne peut y avoir de Dieu. Un tel homme peut être un bon chimiste ou un bon chirurgien, mais il n’est pas plus apte à être témoin dans une cour de justice qu’il n’est digne d’être prédicateur.
L’imprécation habituellement introduite dans la formule d’un serment n’est pas essentielle à sa nature. Il est bien impliqué dans l’appel à Dieu pour qu’il témoigne de la vérité de ce que nous disons, mais son affirmation directe n’est pas nécessaire. En fait, on ne le trouve dans aucun des serments rapportés dans la Bible. Certains s’opposent vigoureusement à son introduction, comme impliquant un renoncement à tout espoir de la miséricorde et de la grâce de Dieu, et comme l’équivalent d’une imprécation contre soi-même de perdition éternelle.
La légalité des serments peut être inférée :
1. De leur nature. Étant des actes d’adoration impliquant la reconnaissance de l’être et des attributs de Dieu, et de notre responsabilité envers Lui, ils sont par nature bons. Ils ne sont pas superstitieux, fondés sur des idées fausses de Dieu ou de sa relation avec le monde ; ils ne sont pas non plus irrévérencieux ; Ils ne sont pas non plus inutiles. Ils ont un pouvoir réel sur la conscience des hommes ; et ce pouvoir est d’autant plus grand que la foi du juré et de la société dans les vérités de la religion est d’autant plus intelligente et plus forte.
2. Dans les Écritures, les serments, dans les occasions appropriées, ne sont pas seulement permis, mais commandés. Tu craindras l’Eternel, ton Dieu, et tu jureras par son nom. (Dent. vi. 13.) « Celui qui se bénit lui-même sur la terre, se bénira dans le Dieu de vérité ; et celui qui jure sur la terre, jurera par le Dieu de vérité. (Es. Ixv. 16.) « S’ils apprennent diligemment les voies de mon peuple, ils jureront par mon nom que l’Éternel est vivant ; (comme ils ont appris à mon peuple à jurer par Baal ;) alors ils seront bâtis au milieu de mon les gens. (Jér. xii. 16 ; iv. 2.) Dieu Lui-même est représenté comme jurant. (Psaumes ex. 4 ; Hébreux vii. 21.) « Quand Dieu fit une promesse à Abraham, parce qu’il ne pouvait jurer par un plus grand, il jura par lui-même. » (Héb. vi. 13.) Notre bienheureux Seigneur aussi, lorsqu’il fut mis sous serment par le souverain sacrificateur, n’hésita pas à répondre. (Matt. XXVI. 63.) Les mots sont, Έ£ορκί£ω σ€ κατά του *ου ® τοΰ ζωντοζ, qui sont correctement rendus par notre version, « Je t’adjure (t’appelle à jurer) par le Dieu vivant. » Meyer dans son commentaire sur ce passage dit : « Une réponse affirmative à cette formule était un serment dans le plein sens du mot. » Et la réponse de notre Seigneur : « Tu dis », est la forme rabbinique habituelle de l’affirmation directe. 1 Le mot hébreu השביע est rendu dans la Septante par ορκίζω et *ξορκίζω, et dans la Vulgate par adjuro. Voir Genèse 1. 5, « Mon père m’a fait jurer , ωρκατί μ*.״ Num. v. 19, « Le prêtre l’ordonnera par un serment , ôpKLf.1 αυτήν.״ Il ressort de ce passage, ainsi que d’autres dans l’Ancien Testament, que les serments étaient en certaines occasions prescrites par Dieu lui-même. (Ex. xxii. 10.) Ils ne peuvent donc pas être illégaux.
1 Voir Horœ Hebraicœ et Talmudicæ de Schoettgen.
Voyant donc qu’un serment est un serment d’adoration ; qu’il est enjoint dans les occasions opportunes ; que Notre-Seigneur lui-même s’est soumis à son serment ; et que les Apôtres n’ont pas hésité à prendre Dieu à témoin de la vérité de ce qu’ils ont dit ; nous ne pouvons admettre que le Christ ait voulu déclarer tous les serments illégaux, lorsqu’il a dit, comme le rapporte Matthieu v. 34 : « Ne jurez pas du tout. » Ce serait supposer que l’Écriture peut être une Écriture, et que la conduite du Christ n’est pas conforme à ses prés. Néanmoins, ses paroles sont très explicites. Ils signifient en grec exactement ce que notre version leur fait signifier. Notre Seigneur a dit : « Ne jurez pas du tout. » Mais dans le sixième commandement, il est dit : « Tu ne tueras point. » Cela ne signifie pas pour autant que nous ne pouvons pas tuer des animaux pour nous nourrir ; car cela est permis et commandé. Il n’interdit pas l’homicide en état de légitime défense, car cela aussi est permis. Il n’interdit pas non plus la peine capitale ; car cela n’est pas seulement permis, mais même commandé. Le sens de ce commandement n’a jamais été mis en doute ou contesté, parce qu’il est suffisamment expliqué par le contexte et l’occasion, et par la lumière que lui jettent d’autres parties de l’Écriture. Ainsi donc, comme le commandement : Tu ne tueras point, n’interdit que le meurtre illicite ; de même le commandement : « Ne jure pas du tout », n’interdit que les jurons illicites.
Cette conclusion est confirmée par le contexte. Une grande partie du Sermon sur la montagne de notre Seigneur est consacrée à la correction des perversions de la loi, introduites par les scribes et les pharisiens. Ils ont fait le sixième commandement de n’interdire que le meurtre ; Notre-Seigneur a dit qu’elle interdisait toutes les passions malveillantes. Ils limitaient le septième commandement à l’acte extérieur ; Il l’étendit au désir intérieur. Ils ont rendu le précepte d’aimer notre prochain compatible avec la haine de nos ennemis ; Le Christ dit : « Aimez vos ennemis, bénissez ceux qui vous maudissent. » De la même manière, D’une manière générale, les scribes enseignaient que la loi permettait toutes sortes de jurons, et de jurer en toute occasion, pourvu qu’un homme ne se parjurât pas lui-même ; mais Notre-Seigneur a dit : Je vous le dis, dans vos communications, ne jurez pas du tout ; c’est ce qui ressort clairement du verset 37 : « Que votre communications (λόγος, parole, parler) être oui, oui ; Non, non, car tout ce qui est plus que ceux-ci vient du mal. C’est un juron inutile, familier et irrévérencieux que notre Seigneur condamne. Cela n’a rien à voir avec ces actes solennels d’avorté, permis et commandés dans la parole de Dieu. Les Juifs de cette époque étaient particulièrement adonnés aux jurons familiers, soutenant que la loi n’interdisait que les faux jurons, ou les jurons du nom de faux dieux ;1 C’est pourquoi notre Seigneur eut d’autant plus d’occasions de réprimander ce péché et de montrer le mal de ces adjurations.
1 Sec Meyer sur ce passage, qui se réfère à Philon, De Spec. Leg.; A. Lightfoot, Hora ; et Meuschen, W. T. ex Talm. illustr. Voir aussi le Realwarterbuch de Winer et l’Ausleyung tier Bergpredigt Christi de Tholuck, 3e édition, Hambourg, 1845.
Quand les serments sont-ils légaux ?
1. Comme un serment implique un acte d’adoration, il est clair qu’il ne doit pas être prêté en une occasion insignifiante ou d’une manière irrévérencieuse.
2. Le serment est licite lorsqu’il est prescrit et administré par des fonctionnaires dûment autorisés de l’État ou de l’Église ; ils sont les « ministres de Dieu », agissant en son nom et par son autorité. Il y en a beaucoup qui considèrent qu’il n’est pas convenable qu’un serment soit jamais prêté, sauf lorsqu’il est imposé par ceux qui détiennent l’autorité. L’Église d’Angleterre, dans le trente-neuvième article, dit : « Comme nous confessons que les jurons vains et téméraires sont interdits aux hommes chrétiens par notre Seigneur Jésus-Christ, et à Jacques son apôtre ; ainsi nous jugeons que la religion chrétienne n’interdit pas, mais qu’un homme peut jurer quand le magistrat l’exige, dans une cause de foi et de charité, qu’il soit fait selon l’enseignement du prophète, dans la justice, le jugement et la vérité. Le même terrain a été adopté par de nombreux philosophes moraux et théologiens.
Cependant, il ne semble pas y avoir de raison suffisante pour cette restriction, ni dans la nature ou le dessein d’un serment, ni dans les enseignements de l’Écriture. Le serment étant un appel à Dieu pour qu’il témoigne de la vérité de nos déclarations, ou de la sincérité de nos promesses, il n’y a aucune raison pour que cet appel ne soit pas fait chaque fois qu’il s’agit d’accomplir un but important. Il devrait y avoir une nécessité pour cela ; c’est-à-dire qu’aucun homme ne doit jurer légèrement ou profanement, mais seulement lorsque toutes les conditions qui justifient cet appel à Dieu sont réunies. D’après l’ancienne loi, ces conditions sont : « judicium in jurante, justifia in objecto, veracitas in mente ». C’est-à-dire que le juré doit être compétent. Il doit avoir un jugement juste sur la nature et l’obligation d’un serment, afin de comprendre ce qu’il va faire. C’est pourquoi un idiot, un enfant ou un incroyant ne peut pas être correctement mis sous serment. Par « justifia in objecto », on entend que l’objet au sujet de laquelle le serment est prêté, devrait être un objet approprié. S’il s’agit d’un serment promissoire, la chose que nous nous engageons à faire doit être possible et licite ; s’il s’agit d’un serment assertoire, l’objet doit avoir l’importance qui lui est due ; elle doit être portée à la connaissance du juré ; et il doit y avoir une raison suffisante pour que cet appel à Dieu soit fait. La « veraeitas in mente » comprend le but sincère de faire ce que nous promettons, ou de dire toute la vérité, et rien que la vérité, au mieux de notre connaissance dans la facilité avec laquelle nous témoignons. Cela exclut toute intention de tromper, toute réserve mentale et toute ambiguïté intentionnelle du langage. Toutes ces conditions peuvent être présentes en privé, ainsi que dans les serments judiciaires ou officiels.
D’autre part, comme le but d’un serment est de produire la conviction de la vérité, de convaincre les autres de notre sincérité et de notre fidélité, et de mettre fin à la controverse, il est évident que des circonstances peuvent survenir dans la vie privée, ou dans les rapports d’un homme avec ses semblables, où un serment peut être de la plus grande importance. Si nous risquons beaucoup sur la fidélité ou la véracité d’un homme, nous avons le droit de le lier par la solennité d’un serment ; ou s’il est d’une grande importance que d’autres se confient en notre véracité ou en notre fidélité, il peut être juste de leur donner l’assurance qu’un serment est convenable et destiné à fournir.
En ce qui concerne les exemples bibliques, le plus grand nombre des serments rapportés dans la Bible, et cela avec l’approbation implicite de Dieu, ont un caractère non judiciaire. Abraham jura devant Abimélec. (Gen. xxi. 23.) Abraham fit jurer à son serviteur. (Gen. xxiv. 3.) Isaac et Abimélec échangèrent leurs serments. (Genèse xxvi. 31.) Jacob fit jurer à Joseph de ne pas l’enterrer en Égypte (XLVII. 31.) Joseph exigea de ses frères un serment semblable. C’est ainsi que nous lisons que David a juré à Saül et à Jonathan, que Jonathan a fait à David, et que David a juré à Schimeï. De tels serments privés semblent parfois avoir été prescrits par la loi mosaïque. Dans Exode xxii. 19, dit-on, si quelqu’un livre un animal à son voisin pour qu’il le garde en lieu sûr, et qu’il meure sur ses mains, « alors il y aura un serment de l’Éternel entre eux deux, qu’il n’aura pas mis la main sur les biens de son prochain. » Dans le Nouveau Testament, nous trouvons l’Apôtre faisant souvent appel à Dieu pour qu’il témoigne de la vérité de ce qu’il a dit (Rom. i. 9 ; Phil. i. 8 ; 1 Thess. ii. 5 et 10) ; en le faisant aussi de la manière la plus formelle, comme dans 2 Corinthiens i. 23 : « J’appelle Dieu pour qu’il rende témoignage sur mon âme. »
La règle d’Augustin à ce sujet est bonne : « Quantum ad me pertinet, juro ; sed quantum mihi videtur, magna necessitate compulsus. » 1 La multiplicité des serments est un grand mal. Leur administration rapide et irrévérencieuse est profane.
1 Senno Clxxx. 10 [ix.] ; Bénédictins, 1837, t. V, p. 1250, a.
Sous l’Ancien Testament, dans les serments volontaires, la forme habituelle était : « Que le Seigneur me le fasse, et plus encore. » (Ruth i. 17 ; 2 Sam. iii. 9 et 35 ; 1 Rois ii. 23 ; 2 Rois vi. 31.) Ou simplement : « Comme le Seigneur est vivant. » (Ruth iii. 13 ; Juges viii. 19 ; 2 Sam. ii. 27 ; Jer. xxxviii. 16) ; ou comme c’est le cas dans Jérémie xlii. 5 : « Que le Seigneur soit un témoin fidèle et véridique. » Dans les procédures judiciaires, le serment consistait en un simple assentiment à l’adjuration, lequel assentiment était exprimé en hébreu par אמן, et en grec par συ « T-aç. La forme est une question d’indifférence ; toute forme de parole qui implique un appel à Dieu comme témoin est un serment. En jurant, la main droite était généralement élevée vers le ciel. Genèse xiv. 22 Abram dit au roi de Sodome : J’ai levé la main vers l’Eternel, le Dieu Très-Haut, le possesseur du ciel et de la terre. Par conséquent, « lever la main », c’était jurer. (Voir Deut. xxxii. 40 ; Ex. vi. 8 (en hébreu) ; Ézéchiel. xx. 5.) Le fait de lever la main était évidemment destiné à signifier que le juré en appelait au Dieu du ciel. Chez les chrétiens, il est d’usage de mettre la main sur la Bible, pour indiquer que le serment est prêté au nom du Dieu de la Bible, et que le jugement invoqué en cas de parjure est celui que la Bible dénonce contre les faux serments. Embrasser la Bible, une autre partie habituelle du cérémonial d’un serment, est une expression de la foi en la Bible en tant que parole de Dieu. Il n’y a rien d’inconvenant ou de superstitieux à cela. Au contraire, au lieu d’en appeler au Dieu de la nature, il est plus approprié que le chrétien fasse appel au Dieu de la Bible, qui, par Jésus-Christ, est notre Dieu et Père réconcilié.
Règles qui déterminent l’interprétation et la Obligation de prêter serment
Un serment doit être interprété selon le sens naturel des mots, ou le sens dans lequel ils sont compris par la partie à qui le serment est donné ou par qui il est imposé. C’est un dictat clair d’honnêteté. Si le juré comprend le serment dans un sens différent de celui qui lui est attaché par la partie à qui il est prêté, tout le service est une tromperie et une moquerie. Le commandant dont parle Paley, qui jura à la garnison d’une ville assiégée que s’ils se rendaient, une goutte de leur sang ne serait pas versée, et les enterra tous vivants, était coupable, non seulement de parjure, mais encore de moquerie ignoble et cruelle. L’animus imponentis, comme on l’admet universellement, doit donc déterminer l’interprétation d’un serment. C’est le fait que les jésuites aient inculqué la licéité de la réserve mentale qui, plus que toute autre chose, a fait d’eux une abomination aux yeux de toute la chrétienté. C’est ce qui a fourni la lanière la plus aiguë au fléau avec lequel Pascal les a chassés de l’Europe.
C’est une question sur laquelle les hommes qui veulent être honnêtes ne sont pas toujours assez prudents. Leur conscience est satisfaite si ce qu’ils disent peut être interprété de manière cohérente avec la vérité, bien que le sens évident ne soit pas vrai.1
1 Un homme a été accusé d’avoir écrit un certain article dans un journal. Il a déclaré qu’il ne l’avait pas écrit. C’était vrai. Mais c’est lui qui l’avait dicté.
Aucun serment n’est obligatoire qui oblige un homme à faire ce qui est illicite ou impossible. Le péché réside dans le fait de prêter un tel serment, pas en le brisant. La raison de cette règle est qu’aucun homme ne peut se résoudre à commettre un péché. Hérode n’était pas tenu de tenir son serment à la fille d’Hérodiade lorsqu’elle demanda la tête de Jean-Baptiste. Pas plus que les quarante hommes, qui s’étaient engagés par « un serment d’exécration » à tuer Paul. Mais le serment qu’il prête volontairement de faire ce qui est légal et en son pouvoir lie la conscience, (a.) Même lorsque l’accomplissement de ce serment porte atteinte aux intérêts temporels du juré. La Bible déclare bienheureux l’homme qui « jure à son propre tort et ne change pas ». (Ps. xv. 4.) b) Lorsque le serment est obtenu par la tromperie ou la violence. Dans ce dernier cas, le juré fait un choix de maux. Il jure de faire un sacrifice pour se sauver de ce qu’il redoute plus que la perte de ce qu’il promet d’abandonner. Il peut souvent s’agir de un cas difficile. Mais telle est la solennité d’un serment, et telle est l’importance de conserver sa sainteté inviolable, qu’il vaut mieux souffrir l’injustice que de voir un serment violé. Le cas où un serment est obtenu par la tromperie est plus difficile, car lorsqu’une telle tromperie est pratiquée, le juré n’avait pas l’intention d’assumer l’obligation que le serment impose. Il pourrait donc soutenir de façon plausible que s’il n’avait pas l’intention d’assumer une obligation, elle n’a pas été assumée. Mais, d’autre part, le principe impliqué dans la maxime commerciale , caveat emptor, s’applique aux serments. Un homme est tenu de se garder de la tromperie ; et s’il est trompé, il doit en assumer les conséquences. D’ailleurs, ceux à qui le serment est prêté s’en fient, agissent en conséquence, et, dans un certain sens du moins, acquièrent des droits en vertu de celui-ci. Les Écritures, cependant, dans ce cas comme dans tous les autres, sont notre guide le plus sûr. Lorsque les Israélites conquirent Canaan, les Gabaonites qui habitaient dans le pays, envoyèrent des délégués à Josué en prétendant qu’ils venaient d’un pays lointain, et « Josué fit la paix avec eux, et fit une ligue avec eux, pour les laisser vivre, et les princes de l’assemblée leur jurèrent ». Lorsque la supercherie a été découverte, le peuple a réclamé à cor et à cri son extermination. « Mais tous les princes dirent à toute l’assemblée : Nous leur avons juré par l’Eternel, le Dieu d’Israël : maintenant nous ne pouvons plus les toucher. » (Josué, IX, 15, 19.) Ce serment, comme il appert de 2 Samuel xxi, 1, a été sanctionné par Dieu et le peuple a été puni pour l’avoir violé.
Le principe sur lequel les autorités de l’Église romaine s’arrogent le droit de libérer les hommes de l’obligation de leurs serments, c’est que nul ne peut s’obliger à faire ce qui est pécheur. C’est la prérogative de l’Église de décider ce qui est pécheur. Si donc l’Église décide que le serment d’obéir à un souverain désobéissant au pape, de garder inviolable un sauf-conduit, ou de garder la foi avec les hérétiques ou les infidèles est un péché, l’obligation de tout serment de ce genre cesse dès que le jugement de l’Église est rendu.
En réponse à la question : « Cui competit potestas dispensandi super juramento ? », les théologiens romains répondent : « Principaliter competit summo Pontifici ; non tamcn nisi ex rationabili causa, quia dispensât in jure alieno : competit etiam jure ordinario Episcopis, non Parochis. Requirit autem hæc dispensatio potestatem jurisdictionis majoris.» 1 Les casuistes, sur ce point comme sur tous les autres sujets pratiques, entrent dans les détails les plus minutieux et les distinctions les plus subtiles. Dens, par exemple, dans la section citée ci-dessus, ne donne pas moins de dix conditions dans lesquelles l’obligation d’un serment cesse. A la question : « Quibus modis potest cessare obligatio juramenti promissorii ? », il répond : « 1. Irritation. 2. Dispensatione et relaxatione. 3. Commutation. 4. Materiæ mutatione vel subtractione. 5. Cessante fine total ! complet. G. Ratione conditionis non adimpletæ. 7. Cessante principal ! obligatione cessât juramentum pure aecessorinm. 8. Non acceptatione, et condonatione, sen remissione. 9. Si juramentum incipiat vergere in deteriorem exitum, vel in præjudicium boni communis, vel etiam alicujus particularis, v. g. quis juravit oceultare furtum alterius, sed inde alter liberius prolabitur ad alia fnrta : item cessât juramentum, qnando directe est majoris boni impeditivum. 10. Denique cessât obligatio juramenti, licet improprie, per adimpletionem sive totalem solutionem rei juratæ : et e contra dicitur eessare ab initio, quia juramentum fuit nullum, sive quia nullam ab initio obligationem produxit. » Le numéro neuf ouvre une porte très large ; La dernière clause semble surtout enseigner qu’un serment promissoire cesse de lier toutes les fois qu’il est opportun de le rompre.1
1 Theologia Moralis Dogmatica Reverendi et Eruditissimi Domini Petri Dens ; de Jura-mento, n. 177. édit. Dublin, 1832, vol. iv. p. 214 à 216.
1 Au cours d’une conversation avec un prêtre romain très intelligent qui avait été éduqué à Maynooth, on lui demanda : Quel était l’effet d’un cours de « théologie morale » conçu pour former des prêtres pour le confessionnal ? La réponse immédiate fut : Détruire complètement le sens moral.
L’ensemble du système romain est le chef-d’œuvre de la « sagesse du monde ». Étant donné que de nombreux serments promissoires ne sont pas obligatoires, il semblerait sage, au lieu de laisser la question de leur obligation continue à la décision du juré, qui est si susceptible d’être indûment partial, de renvoyer l’affaire à une autorité compétente. Cela tendrait à prévenir les faux jugements, à satisfaire la conscience du juré et l’esprit public. Et comme il s’agit d’une question de morale et de religion, il semble convenable que la décision soit renvoyée aux organes de l’Église. Rome prend toutes ces dispositions apparemment sages. Mais comme Dieu n’a élevé aucune autorité humaine sur la conscience individuelle, comme aucun homme ne peut déléguer sa responsabilité à un autre, mais que chaque homme doit répondre à Dieu pour lui-même, il est clair qu’un tel arrangement ne peut être conforme à la volonté divine. De plus, s’il était vrai que l’Église était divinement guidée de manière à être infaillible dans son jugement, ce pouvoir prodigieux sur la conscience des hommes pourrait lui être confié en toute sécurité ; mais comme, en fait, les représentants de l’Église sont des hommes qui ont les mêmes passions que les autres hommes, et qui ne sont pas plus infaillibles que leurs semblables, Le romanisme n’est rien d’autre qu’un moyen de mettre les prérogatives et le pouvoir de Dieu entre les mains des hommes pécheurs. L’histoire enseigne comment ce pouvoir usurpé a été utilisé.
Les vœux sont essentiellement différents des serments, en ce sens qu’ils n’impliquent aucun appel à Dieu en tant que témoin, ni aucune imprécation de son mécontentement. Un vœu est simplement une promesse faite à Dieu. Les conditions d’un vœu légitime sont, premièrement, quant à l’objet ou à la matière du vœu, (1.) Qu’il s’agisse de quelque chose de licite en soi. (2.) Qu’il soit agréable à Dieu. (3.) Qu’il soit en notre pouvoir. (4.) Que ce soit pour notre édification spirituelle. Deuxièmement, en ce qui concerne la personne qui fait le vœu, (1.) Qu’il soit compétent ; c’est-à-dire qu’il a suffisamment d’intelligence, et qu’il soit sui juris. Un enfant n’est pas capable de faire un vœu, pas plus qu’il n’est soumis à l’autorité, de sorte qu’il n’a pas la liberté d’agir sur la question qu’il a jurée. 2° Qu’il agisse avec la délibération et la solennité qui lui sont dues ; Car un vœu est un acte d’adoration. (3.) Qu’elle soit faite volontairement, et observée avec joie.
Tous ces principes sont reconnus dans la Bible. « Quand tu feras un vœu à l’Eternel, ton Dieu, tu ne te relâcheras pas pour l’accomplir, car l’Eternel, ton Dieu, l’exigera de toi ; et ce serait le péché en toi. Mais si tu t’abstiens de faire un vœu, il n’y aura pas de péché en toi. Ce qui est sorti de tes lèvres, tu le garderas et tu l’accompliras, c’est une offrande volontaire, selon que tu l’as juré à l’Éternel, ton Dieu, que tu as promis de ta bouche. (Deut. XXIII. 21 à 23.) Dans Nombres xxx. 3-5, il est décrété que si une femme dans la maison de son père fait un vœu, et que son père le désavoue, il ne sera pas maintenu, « et l’Éternel lui pardonnera, parce que son père l’a désavouée ». La même règle s’applique aux épouses et aux enfants, en vertu du principe évident que lorsque les droits d’autrui sont respectés. nous ne sommes pas libres de ne pas en tenir compte.
Toutes les conditions requises pour la légalité d’un vœu peuvent être comprises dans l’ancienne formule : « judicium in vovente, justitia in objecto, veritas in mente ». Il y a deux conditions sur lesquelles insistent les romanistes et auxquelles les protestants ne consentent pas. La première est qu’un vœu doit être « de meliore bono », c’est-à-dire pour un plus grand bien. Si un homme fait vœu de se consacrer au sacerdoce, de faire un pèlerinage, de fonder une église ou de devenir moine, la chose vouée n’est pas seulement bonne en elle-même, mais elle est meilleure que son contraire. L’autre condition, c’est que la chose vouée ne soit pas obligatoire en elle-même, de sorte que la sphère du devoir est élargie par le vœu. Ces conditions sont incluses dans celles fixées par Dens. 1 Il dit : « Quinque ex causis provenire, quod aliquid non sit apta materia voti ; 1°. quia est impossibile ; 2°. quia est necessarium ; 3°. quia est illicitum ; 4°. quia est indifferens vel inutile ; 5°. quia non est bonum melius. Les deux conditions que nous venons de spécifier concourent sans doute à beaucoup de vœux agréables à Dieu, mais ils ne sont pas essentiels. Un homme peut faire vœu de faire ce qu’il est tenu de faire, comme c’est le cas de tout homme qui se consacre à Dieu par le baptême. Il n’est pas non plus nécessaire que la chose jurée soit, par elle-même, un bien plus grand. Un homme peut s’attacher à une œuvre par gratitude envers Dieu, qui, par sa propre nature, est indifférente. C’était le cas de beaucoup de détails inclus dans les vœux du Nazaréen. Il n’y avait aucune vertu particulière à s’abstenir de vin, de vinaigre, de raisins humides ou secs, ou à laisser pousser « les mèches des cheveux de sa tête ». (Num. vi. 3-5.) La doctrine romaine sur ce sujet est liée à la distinction que les papistes font entre les préceptes et les conseils. Les premiers lient la conscience, les autres non. Il y a un mérite particulier, selon leur théorie, à faire plus que ce qui est commandé. Il n’est ordonné à aucun homme de se consacrer à une vie d’obéissance, de célibat et de pauvreté, mais s’il le fait, tant mieux ; c’est lui qui a le plus grand mérite.
1 Tractatus de Voto ; Theologia, édit. Dublin, 1832, vol. iv. N. 91, p. 111.
Comme d’habitude, les romanistes rattachent tant de règles subordonnées aux principes généraux établis, qu’ils sont expliqués ou rendus de peu d’utilité. Ainsi, la règle selon laquelle la matière d’un vœu doit être « bonum melius » est expliquée comme signifiant mieux en elle-même considérée, et non meilleure par rapport à la personne qui fait le vœu. Ainsi, il peut être très préjudiciable aux intérêts spirituels d’un homme d’être lié par des vœux monastiques ; Néanmoins, comme la vie monastique est en elle-même un « bonum melius », les vœux une fois prononcés sont obligatoires. Quant ensuite à la condition de possibilité ; S’il est possible quant au fond, mais impossible quant aux accidents, le vœu est contraignant. Ainsi, si un homme fait vœu de faire un pèlerinage à Jérusalem à genoux, bien qu’il soit impossible de s’y mettre à genoux, il est tenu d’y aller d’une manière ou d’une autre.
Sur ce sujet, il n’y a que peu ou pas de diversité d’opinions. Qu’ils soient licites, c’est ce qu’il semble...
1. De leur nature. Un vœu est simplement une promesse faite à Dieu. Il peut s’agir d’une expression de gratitude pour une faveur signalée déjà accordée, ou d’un gage de manifester cette gratitude pour une bénédiction désirée si Dieu juge bon de l’accorder. C’est ainsi que Jacob fit le vœu que si Dieu le ramenait en paix dans la maison de son père, il lui consacrerait le dixième de tout ce qu’il avait fait possédé. La Bible, et en particulier les Psaumes, abondent en exemples de tels vœux d’actions de grâces à Dieu. Calvin lui-même, malgré son sens profond des maux causés à l’Église par l’abus des vœux par les romanistes, dit : « Ejusmodi vota hodie quoquc nobis in usu esse possunt, quoties nos Dominas vel a clade aliqua, vel a morbo difficili, vel ab alio quovis discrimine eripuit. Neque enim a pii hominis officio tunc abhorret, votivam oblationem, velut sollenne recognitionis symbolum, Deo consecrare : ne ingratus crga ejus benignitatcm videatur. »1 Il reconnaît aussi la convenance des vœux d’abstinence des indulgences que nous avons trouvées nuisibles, et aussi des vœux dont le but est de nous rendre plus attentifs aux devoirs que nous pouvons être enclins à négliger. Dans tous ces vœux, il y a une reconnaissance pieuse de Dieu et de nos obligations envers Lui. Par conséquent, tout comme les serments, ce sont des actes d’adoration. Ils sont considérés comme tels dans les Symboles des Églises réformées. Ainsi, par exemple, la « Declaratio Thoruniensis » 1 comprend, sous les actes de culte, « jusjurandum legitimum, quo Deuni Cordium inspectorem, ut veritatis testem, et falsitatis vindicem appellamus. Denique votum sacrum, quo vel nos ipsos, vel res aut actiones nostras Deo, velut sacrificium quoddam spiritnale, consecramus et devovemus. »
1 Instilutio, iv. xiii- 4, édit. Berlin, 1834, § ii, p. 338.
1 De cultu dei, 5 ; Niemeyer, Collectif) Confessionum, Leipzig, 1840, p. G78.
2. Le fait que les Écritures contiennent tant d’exemples de vœux et tant d’injonctions à leur observance fidèle, est une preuve suffisante qu’à leur place, et dans les occasions appropriées, ils sont acceptables aux yeux de Dieu.
3. C’est ce qui ressort encore du fait que l’alliance du baptême a la nature d’un vœu. Dans cette ordonnance, nous promettons solennellement de prendre Dieu le Père pour notre Père, Jésus-Christ son Fils pour notre Sauveur, le Saint-Esprit pour sanctifier et sa parole pour être la règle de notre foi et de notre pratique. Il en est de même du sacrement de la Cène du Seigneur ; dans cette ordonnance, nous nous consacrons à Christ comme le rachat de son sang, et nous faisons le vœu de lui être fidèles jusqu’à la fin. Il en va de même pour l’alliance du mariage, parce que les promesses qui y sont faites ne sont pas seulement entre les parties, mais par les deux parties au contrat, à Dieu.
Mais tandis que la légalité des vœux doit être admise, ne doit-on pas les multiplier indûment, ni les faire en de légères occasions, ni leur permettre d’interférer avec notre liberté chrétienne ? Non seulement la violation de ces règles a produit les plus grands maux dans l’Église de Rome, mais les chrétiens protestants se sont aussi souvent réduits à un misérable état de servitude par la multiplication des vœux. Lorsque de tels cas se produisent, il est sain et juste pour le chrétien d’affirmer sa liberté. De même qu’un croyant ne peut légitimement être réduit en esclavage des hommes, de même il ne peut pas non plus légitimement se rendre esclave de lui-même. Qu’il se souvienne que Dieu préfère la miséricorde au sacrifice ; qu’aucun service ne nous est agréable qui nous soit nuisible ; qu’il n’exige pas que nous observions des promesses que nous n’aurions jamais dû faire, et que les vœux de bagatelles sont irrévérencieux, et ne doivent être ni faits ni considérés, mais doivent être repentis comme des péchés. Même Thomas d’Aquin dit : « Vota quæ sunt de rebus vanis et inntilibus, sunt magis deridenda, quam servanda. »1
1 Summa, n. ii. quæst. Ixxxviii. 2 ; éditer. Cologne, 1640, p. 164, b, de la troisième série.
À l’époque de la Réforme, les portes de tous les monastères des pays où les protestants avaient le pouvoir s’ouvrirent, et leurs pensionnaires furent déclarés libres aux yeux de Dieu et des hommes, des vœux par lesquels ils avaient été liés jusque-là. Les protestants ne soutenaient pas qu’il y avait quelque chose d’intrinsèquement mauvais dans le fait qu’un homme ou une compagnie d’hommes renonçaient aux occupations ordinaires de la vie et se consacraient à une vie religieuse. Ils ne s’opposaient pas non plus à ce que de tels hommes vivent ensemble et se conforment à une règle de discipline prescrite ; Ils ne niaient pas non plus que de telles institutions, sous des règlements appropriés, pussent être, et qu’elles aient été d’une grande et multiple utilité. Ils avaient été des lieux de sécurité pour ceux qui n’avaient aucun goût pour les conflits qui agitaient si longtemps toute la chrétienté. Dans de nombreux cas, ils étaient des lieux d’éducation et des lieux d’apprentissage. Leurs objections à leur égard étaient les suivantes :
1. Qu’ils avaient été détournés de leur dessein originel, et qu’ils étaient devenus les sources du mal et non du bien, dans toutes les parties de l’Église. Au lieu d’être libre pour chacun d’entrer et de sortir de ces institutions à discrétion, ceux qui avaient été initiés étaient liés à vie par les vœux qu’ils avaient et au lieu que les obligations assumées soient rationnelles et scripturaires, elles étaient déraisonnables et non scripturaires. Au lieu que les pensionnaires de ces institutions subviennent à leurs besoins par leur propre travail, on les laisse vivre dans l’oisiveté, soutenus par l’aumône ou par les revenus des couvents, qui sont devenus dans bien des cas énormes. Cette objection était dirigée contre le principe même sur lequel les institutions monastiques de l’Église romaine étaient fondées. Sur ce point, Calvin dit : « Proinde meminerint lectores, fuisse me de monachismo potins quam de monachis loquutum, et ea vitia notasse, non quæ in paucorum vita hærent, sed quæ ab ipso vivendi instituto separari nequeunt. » 2
2 Institutio, iv. xiii. 15 ; édit. Berlin, 1334, t. II. à la p. 345.
2. À cela, cependant, s’est ajouté l’argument tiré de l’expérience. Les institutions monastiques étaient devenues la source de maux indicibles l’Église. Étant dans une large mesure indépendants des autorités ecclésiastiques ordinaires, ils étaient la cause de conflits et d’agitation. Chaque ordre était un « imperium in imperio », et un ordre était dressé contre un autre, comme un baron féodal contre ses semblables. D’ailleurs, la corruption des mœurs au sein de la les couvents, tels qu’ils sont dépeints par les romanistes eux-mêmes, en ont fait un tel scandale et une telle offense qu’ils ont justifié leur suppression sommaire. La réponse d’Érasme à Frédéric le Sage laisse entendre beaucoup de choses : « Lutherus peccavit in duobus, nempe quod tetigit coronam pontificis et ventres monachorum. »1
1 Kirch enyeschichte de Guericke, vu. 1. ii. § 174, 6e édit. Leipzig, 1846, vol. iii. p. 63·
3. Les maux pratiques pouvaient être réformés, mais les protestants objectaient que tout le système de la monasse était fondé sur le faux principe du mérite des bonnes œuvres. Ce n’est qu’en supposant que les hommes pouvaient élaborer une justice qui leur était propre, qu’ils se soumettaient à l’abnégation et aux contraintes de la vie monastique. Si, cependant, comme le croient les protestants, il n’y a aucun mérite aux yeux de Dieu dans tout ce que les hommes déchus peuvent faire, et que la justice de Christ est le seul fondement de notre acceptation par Dieu, tout le terrain sur lequel ces institutions ont été défendues est sapé. Entrer dans un monastère, selon la théorie de l’Église romaine, c’était renoncer à la doctrine du salut par la grâce. En outre, on enseignait aussi que le célibat, l’obéissance et la pauvreté volontaire n’étant pas commandés, le vœu monastique d’observer ces règles de vie impliquait un mérite spécial. Il s’agissait d’une erreur tivofold. Premièrement, c’est une erreur de supposer qu’il peut y avoir un travail de surérogation. La loi de Dieu exigeant la perfection absolue du cœur et de la vie, il ne peut y avoir d’aller au-delà de ses exigences. Et, deuxièmement, c’est une erreur de supposer qu’il y a une vertu quelconque dans le célibat, l’obéissance monastique ou la pauvreté volontaire. Il ne s’agit pas de « meliora bona » au sens romain du terme. De ce point de vue aussi, les vœux monastiques sont antichrétiens.
4. Une quatrième raison invoquée par les protestants pour prononcer Les vœux monastiques étaient invalides, c’était qu’ils étaient illicites, non seulement pour la raison que nous venons d’indiquer, mais aussi parce qu’ils étaient contraires à la loi du Christ. Nul n’a le droit de renoncer à sa liberté ; de se réduire à un état de soumission absolue à un compagnon mortel. Pour son propre maître, il doit tenir debout ou tomber. Le vœu d’obéissance fait par chaque moine ou moniale était une violation de l’injonction apostolique : « Ne soyez pas les serviteurs des hommes. » La même remarque s’applique au vœu de célibat. Personne n’a le droit de faire ce vœu ; Parce que le célibat est bien ou mal selon les circonstances. Il peut s’agir d’un péché, et donc aucun vœu de ce genre ne peut lier la conscience.
5. La vie monastique, au lieu d’être soumise à la sainteté du cœur, était dans la grande majorité des cas préjudiciable aux moines eux-mêmes. Le langage effrayant de Jérôme est plein d’instruction : « 0 quoties ego ipso in eremo constitutus in ilia vasta solitudine, qua ! exusta solis ardoribus, horridum monachis præstat habitacuhim, putavi me Romanis interesse deliciis..... Ille igitur ego, qui ob Gehennæ metum tali me earcere ipse damnaveram, seorpiorum tantum soeius et fcrarum, sæpe choris intereram puellarum. Pallebant ora jejuniis, ct mens desideriis æstuabat in frigido corpore, et ante hominem sua jam in carne præmortuum, sola libidinum incendia bulliebant. 1 Le jour où ce qui est caché sera rendu manifeste, il n’y aura probablement pas de révélation aussi effrayante de l’auto-torture que celle faite en dévoilant la vie secrète des pensionnaires des institutions monastiques. Ils sont nécessairement en conflit avec les lois de la nature et avec la loi de Dieu.
1 Epistola xxii ; Ad Eustochîum, Paulœ Filiam, De Custodia Virfjinitatis, Opéra, cd. Migne, Paris, 1845, t. I, p. 398. Cette longue épître est adressée à une jeune dame romaine de r״nk et de richesse ; et est destiné à la confirmer dans sa résolution de ne pas se marier. Elle est fondée sur l’hypothèse que la virginité n’était pas seulement une grande vertu, mais aussi qu’une récompense spéciale, une gloire qui n’aurait pu être atteinte autrement, s’y rattachait. Il lui dit : « Cave, quæso, ne quando de te dicat Deus : ' Virgo Israel cecidit, et non est qui suscitet earn ' (Amos v. 2). Audcnter loquar : Cum omnia possit. Deus, suseitare virginem non potest post ruinam. Valet quidein liberare de poena, sed ncn vult coronare corruptam. » Ibid., p. 394. Il lui prescrit toutes sortes d’observances ascétiques, tout en confessant leurs l’inefficacité dans son propre cas.
Les protestants adoptèrent la règle annoncée par Calvin 2 : « Omnia non légitima nee rite eoncepta, ut apud Denin nihili sunt, sic nobis irrita esse debere. » Car, ajoute-t-il aussitôt, de même que, dans les contrats humains, il n’y a que ce qui continue à lier, ce que celui à qui la promesse est faite veut que nous observions, de même il faut supposer que nous ne sommes pas tenus de faire ce que Dieu ne veut pas que nous fassions, simplement parce que nous lui avons promis de le faire. Sur ces bases, les réformateurs, d’un commun accord, déclarèrent tous les vœux monastiques nuls et non avenus. C’est ainsi que l’Évangile devint une proclamation de liberté pour les captifs, et l’ouverture de la prison pour ceux qui étaient liés.
2 Institutio, iv. xiii. 20 ; édit. Berlin, 1834, t. II, p. 349.
§ 8. Le Quatrième Commandement.
Le dessein du quatrième commandement était : (1.) Commémorer l’œuvre de la création. Le peuple reçut l’ordre de se souvenir du jour du sabbat et de le sanctifier, parce qu’en six jours Dieu avait fait les cieux et la terre. (2) Préserver vivante la connaissance du seul Dieu vivant et vrai. Si le ciel et la terre, c’est-à-dire l’univers, ont été créés, ils ont dû avoir un créateur ; et ce créateur doit être extra-mondain, exister avant, hors et indépendamment du monde. Il doit être tout-puissant, infini en connaissance, en sagesse et en bonté ; car tous ces attributs sont nécessaires pour rendre compte des merveilles des cieux et de la terre. Par conséquent, tant que les hommes croient en la création, ils doivent croire en Dieu. C’est ce qui explique que l’on insiste tant sur l’observance correcte du sabbat. On attribue beaucoup plus d’importance à cette observance qu’à une institution purement cérémonielle. (3) Ce commandement avait pour but d’arrêter le courant de la vie extérieure du peuple et de tourner ses pensées vers l’invisible et le spirituel. Les hommes sont si enclins à être absorbés par les choses de ce monde qu’il était et est de la plus haute importance qu’il y ait un jour où il leur soit interdit de penser aux choses du monde et où ils soient forcés de penser aux choses invisibles et éternelles. (4) Il était destiné à donner du temps pour l’instruction du peuple, et pour le culte public et spécial de Dieu. (5) Par l’interdiction de tout travail servile, qu’il s’agisse d’un homme ou d’une bête, il était destiné à assurer un repos réparateur à ceux sur qui la malédiction primitive était tombée : « Tu mangeras du pain à la sueur de ton visage. » (6) En tant que jour de repos et mis à part pour les rapports avec Dieu, il a été conçu pour être un type de ce repos qui reste pour le peuple de Dieu, comme nous l’apprenons du Psaume xcv. 11, tel qu’il est exposé par l’Apôtre dans Hébreux iv. 1— 10. (7.) Comme l’observance du sabbat s’était éteinte parmi les nations, elle fut solennellement rejouée sous la dispensation mosaïque pour être un signe de l’alliance entre Dieu et les enfants d’Israël. Ils devaient être distingués comme le peuple observant le Sabbat parmi toutes les nations de la terre, et en tant que tels, ils devaient être les bénéficiaires des bénédictions spéciales de Dieu. Exode xxxi. 13 : « En vérité, vous observerez mes sabbats, car c’est un signe entre moi et vous pendant toute votre génération ; afin que vous sachiez que je suis l’Éternel qui vous sanctifie. Et dans les versets 16, 17 : « C’est pourquoi, les enfants d’Israël observeront le sabbat, pour observer le sabbat dans leurs générations, pour une alliance perpétuelle. C’est un signe entre moi et les enfants d’Israël pour toujours. Et dans Ézéchiel xx. 12, il est dit : « Et je leur ai donné mes sabbats, pour être un signe entre eux et moi, afin qu’ils sachent que je suis le Seigneur qui les sanctifie. »
Le Sabbat a été institué dès le commencement, et il est d’obligation perpétuelle.
1. C’est ce que l’on peut déduire de la nature et de la conception de l’établissement. C’est un principe généralement reconnu que les commandements de l’Ancien Testament qui s’adressaient aux Juifs en tant que Juifs et qui étaient fondés sur leurs circonstances et leurs relations particulières, ont disparu lorsque l’économie mosaïque a été abolie ; mais celles qui sont fondées sur la nature immuable de Dieu, ou sur les relations permanentes des hommes, sont d’une obligation permanente. Il y a beaucoup de commandements de ce genre qui lient les hommes en tant qu’hommes ; les pères en tant que pères ; enfants en tant qu’enfants ; et les voisins en tant que voisins. Il est parfaitement évident que le quatrième commandement appartient à cette dernière classe. Il est important que tous les hommes sachent que Dieu a créé le monde, et qu’il est donc un être personnel extramondain, infini dans toutes ses perfections. Tous les hommes ont besoin d’être arrêtés dans leur carrière mondaine et appelés à s’arrêter et à tourner leurs pensées vers Dieu. Il est d’une importance inestimable que les hommes aient le temps et l’occasion de s’instruire et de pratiquer le culte religieux. Il est nécessaire que tous les hommes et les animaux serviles aient le temps de se reposer et de reprendre des forces. Le repos nocturne quotidien n’est pas suffisant pour cela, comme nous l’assurent les physiologistes et comme l’expérience l’a démontré. Tel est évidemment le jugement de Dieu.
Il semble donc, d’après la nature de ce commandement comme moral, et non positif ou cérémoniel, qu’il est originel et universel dans son obligation. Personne ne suppose que les commandements : « Tu ne tueras point » et « Tu ne voleras point » ont été annoncés pour la première fois par Moïse, et ont cessé d’être obligatoires lorsque l’ancienne économie a disparu. Une loi morale est une loi qui lie à sa propre nature. Il exprime une obligation découlant soit de notre relations avec Dieu ou hors de nos relations permanentes avec nos semblables. Elle lie qu’elle soit formellement promulguée ou non. Il y a sans aucun doute des éléments positifs dans le quatrième commandement tel qu’il se présente dans la Bible. Il est positif qu’une septième, et non une sixième ou une huitième partie de notre temps, soit consacrée au service public de Dieu. Il est positif que le septième jour de la semaine, plutôt que tout autre jour de la semaine, soit ainsi mis à part. Mais il est moral qu’il y ait un jour de repos et de cessation des occupations mondaines. Il est d’une obligation morale que l’on se souvienne de Dieu et de ses grandes œuvres. C’est un devoir moral que le peuple se rassemble pour l’instruction religieuse et pour le culte commun de Dieu. Tout cela était obligatoire avant l’époque de Moïse, et aurait été obligatoire s’il n’avait jamais existé. Tout ce que le quatrième commandement a fait, c’est de donner une forme définitive à cette obligation naturelle et universelle.
2. L’obligation originelle et universelle de la loi du sabbat peut être déduite de ce qu’elle a trouvé une place dans le décalogue. Comme tous les autres commandements de cette révélation fondamentale des devoirs de l’homme envers Dieu et envers son prochain sont moraux et permanents dans leur obligation, il serait incongru et contre nature que le quatrième fût une exception solitaire. Cet argument n’est certainement pas répondu par la réponse qui lui est donnée par les partisans de la doctrine opposée. L’argument qu’ils disent n’est valable que si l’on suppose « que la loi mosaïque, en raison de son origine divine, est d’une autorité universelle et permanente ». 1 Ne peut-on pas dire aussi bien : Si l’ordre : Tu ne voleras point, est encore en vigueur, tout le code de la loi mosaïque doit être obligatoire ? Le quatrième commandement est lu dans toutes les églises chrétiennes, chaque fois que le décalogue est lu, et le peuple est enseigné à dire : « Seigneur, aie pitié de nous, et incline nos cœurs à observer cette loi. »
1 Palmer, dans l’Encyclopée de Herzog, art. « Sonntagsfeier. »
3. Un autre argument est tiré de la peine attachée à la violation de ce commandement. « Vous observerez donc le sabbat, car il est saint pour vous : quiconque le souillera sera certainement mis à mort. » (Ex. xxxi. 14.) La violation d’aucune loi purement cérémonielle ou positive n’était frappée de cette peine. Même la négligence de la circoncision, bien qu’elle impliquât le rejet à la fois de l’alliance abrahamique et de l’alliance mosaïque, et qu’elle entraînât nécessairement la perte de tous les avantages de la théocratie, n’était pas considérée comme un crime capital. La loi du sabbat, en étant ainsi distinguée, s’élevait bien au-dessus du niveau des simples lois positives. Un caractère lui a été donné, non seulement d’une importance primordiale, mais aussi d’une sainteté particulière.
4. Nous constatons donc que dans les prophètes aussi bien que dans le Pentateuque et dans les livres historiques de l’Ancien Testament, le sabbat n’est pas seulement mentionné comme « un délice », mais aussi son observance fidèle est prédite comme l’une des caractéristiques de la période messianique. C’est ainsi qu’Ésaïe dit : « Si tu détournes ton pied du sabbat, et que tu ne fasses pas ce qu’il te plaît en mon saint jour ; et appelez le Sabbat un Délice, le Saint du SEIGNEUR, honorable ; et tu l’honoreras sans faire tes propres voies, ni trouver ton propre plaisir, ni prononcer tes propres paroles : alors tu te réjouiras dans le Seigneur ; et je t’élèverai à monter sur les hauts lieux de la terre, et je te nourrirai de l’héritage de Jacob, ton père ; pour la bouche de L’ÉTERNEL l’a dit. (Es. Iviii. 13, 14.) Gesenius est très perplexe à ce sujet. Les prophètes ont prédit que, sous le Messie, la vraie religion s’étendrait jusqu’aux extrémités de la terre. Mais le culte public de Dieu était, par la loi juive, lié à Jérusalem. Cette loi n’a été ni conçue ni adaptée pour une religion universelle. Par conséquent, pour ceux qui croient que le sabbat était une institution mosaïque temporaire qui devait disparaître après l’abolition de l’ancienne économie, il est tout à fait incongru qu’un prophète représente l’observance fidèle du sabbat comme l’une des principales bénédictions et gloires du règne du Messie.
Ces considérations, en dehors des preuves historiques ou de l’affirmation directe des Écritures, sont suffisantes pour créer une présomption forte, sinon invincible, que le Sabbat a été institué dès le commencement, et qu’il a été conçu pour être une obligation universelle et permanente. Quelle que soit la loi qui avait un motif ou une raison temporaire pour sa promulgation, elle était temporaire dans son obligation. Là où la raison de la loi est permanente, la loi elle-même est permanente.
Le plus grand nombre des théologiens chrétiens qui nient tout cela, admettent encore que le sabbat est une institution très sage et très bienfaisante. Bien plus, beaucoup d’entre eux vont jusqu’à représenter sa violation, comme un jour de repos religieux, comme un péché. Ceci, cependant, est une consécration que la raison du commandement est permanente, et que si Dieu n’a pas exigé son observance, l’Église ou l’État est tenu de le faire.
Preuve directe de l’institution antéro-mosaïque du Sabbat.
La preuve présumée peut être suffisamment solide pour contraindre l’assentiment. Les partisans de l’institution primitive du sabbat, cependant, ne se limitent pas à ce genre de preuve. Il y a une preuve directe du fait qu’ils prétendent, —
1. Dans Genèse ii. 3, il est dit : « Dieu bénit le septième jour, et le sanctifia ; parce qu’en elle il s’était reposé de toute l’œuvre que Dieu avait créée et faite. Il est en effet facile de dire qu’il s’agit d’une prolepse ; que le passage attribue la raison pour laquelle, à l’époque de Moïse, Dieu a choisi le septième, plutôt que tout autre jour de la semaine, comme étant le sabbat. C’est effectivement possible, mais ce n’est pas probable. C’est une interprétation contre nature que personne n’adopterait, sauf pour servir un but. Le récit prétend être un récit de ce que Dieu a fait au moment de la création. Quand la terre fut préparée pour le recevoir, Dieu créa l’homme le sixième jour, et se reposa de l’œuvre de la création le septième, et mit à part ce jour comme un jour saint à être un mémorial perpétuel de la grande œuvre qu’il avait accomplie. 1 C’est le sens naturel du passage, dont seules les raisons les plus fortes nous autoriseraient à nous écarter. Cependant, toutes les raisons collatérales sont de son côté.
1 La force de cet argument ne dépend pas de la supposition que les jours de la création étaient des périodes de vingt-quatre heures. En admettant qu’il s’agisse de périodes géologiques, à la fin de la sixième période où l’homme est apparu, et qui a suivi une période de repos permanent, ce serait une raison suffisante pour que chaque septième jour soit choisi comme mémorial de la création, pour enseigner à Adam et à ses descendants que la terre ne doit pas son existence à un processus aveugle de développement. mais au fiat de Jéhovah.
À l’appui de cette interprétation, on pourrait citer l’autorité des interprètes les plus impartiaux et les plus compétents. Grotius ne croyait pas à la perpétuité du sabbat, mais il l’admet dans Genèse ii. 3, il est dit que le septième jour a été mis à part comme saint de la création. Il suppose, sur l’autorité, comme il le dit, de beaucoup d’Hébreux instruits, qu’il y avait deux préceptes concernant le sabbat. Celle donnée au début enjoignait que chaque septième jour soit rappelé comme un mémorial de la création. Et en ce sens, dit-il, le sabbat était sans doute observé par les patriarches, Hénoch, Noé, Abraham, etc. Le second précepte a été donné du mont Sinaï lorsque le sabbat a été érigé en mémorial de la délivrance des Israélites de l’esclavage égyptien. Cette dernière loi enjoignait de se reposer du travail le jour du sabbat. L’argument biblique qu’il avance à l’appui de cette théorie, c’est que, dans tous les récits des voyages des patriarches, nous ne lisons jamais qu’ils se reposaient le septième jour ; tandis qu’après la loi donnée du mont Sinaï, cette référence au repos du peuple le jour du sabbat est constante.2
2 De veritate Religionis Christianas, x. 10 ; Works, Londres, 1679, vol. III, p. 79.
Delitzsch dit : « Hengstenberg comprend la Genèse II. 3, comme s’il était écrit du point de vue de la loi mosaïque, comme s’il était dit : C’est pour cette raison que Dieu, dans la suite des temps, bénit le septième jour ; qui n’a guère besoin d’être réfutée. Dieu lui-même, le Créateur, célébrait un sabbat immédiatement après les six jours de travail, et parce que son σαββαησμό^ pouvait devenir le σαββαπσμός de son créatures, Il a fait à cette fin le septième jour, par sa bénédiction, une source perpétuelle de rafraîchissement, et a revêtu ce jour en le sanctifiant d’une gloire spéciale pour tous les temps à venir.» 3
3 Die Genesis Ausgelegt, von Franz Delitzsch, Leipzig, 1852, pp. 84, 85.
Baumgarten, dans son commentaire sur ce verset, dit que la séparation de ce jour de tous les autres a été faite afin que « le retour de ce jour béni et saint soit pour lui un mémorial et une participation au repos divin ». 1 Et Knobel, l’un des plus des commentateurs rationalistes, dit : « Que l’auteur de la Genèse fait la distinction du septième jour contemporaine de la création, bien que l’accomplissement du dessein ainsi l’époque de Moïse a été reportée. On ne sait rien d’une célébration du sabbat avant la mosaïque.» 2
1 Theoloyische Commentar zum Pentateuch, Kiel, 1843, t. I, p. 29.
2 Die Genesis Erklârt, von August Knobel, Leipzig, 1852.
2. Outre le fait que la raison du sabbat existait depuis le commencement, il existe des preuves historiques directes que la division hebdomadaire du temps prévalait avant le déluge. Noé dans Genèse viii. 10, 12, est dit deux fois qu’il s’est reposé sept jours. Et encore au temps de Jacob, comme il appert de la Genèse xxix. 27, 28, la division du temps en semaines a été reconnue comme un usage établi. Comme sept n’est pas une partie égale d’une année solaire ou d’un mois lunaire, le seul récit satisfaisant de ce fait se trouve dans l’institution du sabbat. Ce fait prouve d’ailleurs non seulement l’institution originelle, mais aussi l’observance continue du septième jour. Il devait y avoir quelque chose qui distinguait ce jour de la fin d’une période ou du début d’une autre. Il est tout à fait anormal d’expliquer cette division hebdomadaire par une référence au culte des sept planètes. Il n’y a aucune preuve que les planètes aient été des objets de culte à cette époque primitive du monde, ou longtemps après, en particulier parmi les races sémitiques. D’ailleurs, cette explication est incompatible avec le récit de la création. L’autorité divine du livre de la Genèse est ici considérée comme allant de soi. Ce qu’il affirme, les chrétiens sont tenus de le croire. Il est indéniablement enseigné dans ce livre que Dieu créa les cieux et la terre en six jours et se reposa le septième. Peu importe comment le mot « jours » peut être expliqué, nous avons dans l’histoire de la création cette division hebdomadaire du temps. Aucune cause antérieure de la prévalence de cette division ne peut être donnée, et aucune autre n’est nécessaire, ou ne peut raisonnablement être supposée.
Cette division du temps en semaines n’était pas confinée à la race hébraïque. C’était presque universel. Ce fait prouve qu’il doit avoir son origine dans la période la plus ancienne de l’histoire du monde.3
3 De cette prévalence générale dans le monde antique, d’une vénération particulière pour le septième jour et de la division du temps en semaines, Grotius donne des preuves abondantes dans son ouvrage , De Keritate Reliyionis Christianas, 1.1G ; Œuvres, t. III, p. 1G. À ce sujet, voir le Realworterbuch de Winer, mot « sabbat ». Winer se réfère, entre autres autorités qui discutent de cette question de l’antiquité du sabbat, à Selden, Jus Nat. et Gent. Spencer , Legg, rituel., Eichhorn, Urgesch. ; Hebenstreit, De Sabb. ante legg. Mos. exlstente ; Michaelis, Mos. Recht.
3. Que la loi du sabbat n’ait pas été donnée pour la première fois sur le mont Sinaï, on peut aussi le déduire du fait qu’elle était considérée comme une institution connue et familière, avant que cette loi ne soit promulguée. Ainsi, dans le seizième chapitre de l’Exode, le peuple a reçu l’ordre de rassembler le sixième jour de la semaine une manne suffisante pour le septième, car ce jour-là, il n’y en aurait pas. Et plus particulièrement dans le verset vingt-troisième, il est dit : « Demain sera le repos du saint sabbat pour le Seigneur : faites cuire ce que vous ferez cuire aujourd’hui, et faites bouillir ce que vous ferez ; et ce qui reste en suspens se dépose pour vous, pour être gardé jusqu’au matin. Et dans le verset vingt-six, nous lisons : « Vous le recueillerez six jours ; mais le septième jour, qui est le sabbat, il n’y en aura point. Il y avait donc un sabbat avant que la loi mosaïque ne soit donnée. Encore une fois, le langage utilisé dans le quatrième commandement, « Souviens-toi du jour du sabbat pour le sanctifier », implique naturellement que le sabbat n’était pas une nouvelle institution. C’était une loi donnée au commencement, qui était sans doute tombée en désuétude dans une large mesure, surtout pendant leur esclavage en Égypte, et dont le peuple devait désormais se souvenir et observer fidèlement.
L’objection à l’institution pré-mosaïque du sabbat, fondée sur le silence de la Genèse sur le sujet dans l’histoire des patriarches, est de peu de poids. Il faut rappeler que le livre de la Genèse, composé d’une soixantaine de pages in-octavo, nous donne l’histoire de près de deux mille ans. Tous les détails qui n’avaient pas d’incidence immédiate sur le dessein de l’auteur furent nécessairement omis. Si rien n’a été fait que ce qui y est enregistré, les antédiluviens et les patriarches vivaient presque entièrement sans observances religieuses.
Le sabbat n’est pas isolé. Il est bien connu que Moïse a adopté et incorporé dans son code étendu beaucoup d’anciens usages du peuple élu. C’était le cas des sacrifices et de la circoncision, ainsi que de tous les principes du décalogue. Le fait qu’une loi particulière se trouve donc dans l’économie mosaïque n’est pas une preuve suffisante qu’elle a eu son origine avec le législateur hébreu, ou qu’elle a cessé d’être obligatoire lorsque l’ancienne dispensation a été abrogée. Si la raison de la loi demeure, la loi elle-même demeure ; et s’il est donné à l’humanité avant la naissance de Moïse, il lie l’humanité. Sur ce point, même le Dr Paley dit : « Si l’ordre divin a été réellement donné lors de la création, il s’adressait sans aucun doute à toute l’espèce humaine, et continue, à moins qu’il ne soit abrogé par quelque révélation ultérieure, contraignant pour tous ceux qui en viennent à la connaissance. » 1 Que la loi du sabbat ait été ainsi donnée est, comme on l’a montré, l’opinion commune même de ceux qui nient son obligation perpétuelle, et par conséquent sa permanence ne peut raisonnablement être mise en doute par ceux qui admettent le principe que ce qui a été donné à l’humanité était destiné à l’humanité.
1 Principes de philosophie morale et politique, v. 7 ; édit. Boston, 1848, vol. II. à la p. 48.
4. C’est un argument fort en faveur de cette conclusion, que la loi du sabbat a été reprise et incorporée dans la nouvelle dispensation par les apôtres, les fondateurs infaillibles de l’Église chrétienne. Toutes les lois mosaïques, fondées sur les relations permanentes des hommes avec Dieu, ou avec leurs semblables, sont adoptées de la même manière dans le Code chrétien. Ils sont adoptés, cependant, seulement en ce qui concerne leurs éléments essentiels. Toute loi, qu’elle soit cérémonielle ou typique, ou conçue uniquement pour les Juifs, est rejetée. Les hommes sont toujours tenus d’adorer Dieu, mais cela ne doit pas se faire spécialement à Jérusalem, ou par des sacrifices, ou par le ministère des prêtres. Le mariage est aussi sacré aujourd’hui qu’il l’a toujours été, mais toutes les lois spéciales qui régissent ses devoirs et la peine pour sa violation sont abrogées. L’homicide est un crime aussi grand aujourd’hui que sous l’économie mosaïque, mais les anciennes lois sur le vengeur du sang et les villes de refuge ne sont plus en vigueur. Les droits de propriété restent intacts sous la dispensation de l’Évangile, mais les lois juives concernant sa distribution et sa protection ne sont plus contraignantes. Il en va de même en ce qui concerne le Sabbat. Nous sommes aussi tenus de sanctifier un jour sur sept pour le Seigneur, que l’étaient les patriarches ou les Israélites. Cette loi lie tous les hommes en tant qu’hommes, parce qu’elle est donnée à tous les hommes, et parce qu’elle est fondée sur la nature commune à tous les hommes, et sur la relation que tous les hommes ont avec Dieu. Les deux éléments essentiels de l’ordre sont que le sabbat doit être un jour de repos, c’est-à-dire de cessation des occupations et des amusements mondains ; et qu’elle soit consacrée au culte de Dieu et aux services de la religion. Tout le reste est circonstanciel et variable. Il n’est pas nécessaire qu’elle soit observée en se référant spécialement à la délivrance des Israélites hors d’Égypte ; et les détails sur les choses à faire ou à éviter, ou sur la peine de la transgression ne nous sont pas obligatoires. Nous ne sommes pas tenus d’offrir les sacrifices exigés des Juifs, ni de nous abstenir d’allumer un feu ce jour-là. De même, le jour de la semaine n’est pas essentiel. Le passage de la septième à la première était circonstanciel. S’il est effectué pour une raison suffisante et par l’autorité compétente, le changement est obligatoire. La raison de ce changement est patente. Si l’on commémore la délivrance des Hébreux de l’esclavage de l’Égypte, à combien plus forte raison la rédemption du monde par le Fils de Dieu. Si la création de l’univers matériel doit être gardée dans un souvenir perpétuel, à combien plus forte raison la nouvelle création par la résurrection de Jésus-Christ d’entre les morts. Si les hommes veulent que la connaissance de cet événement s’éteigne, qu’ils négligent de sanctifier le premier jour de la semaine ; s’ils désirent que cet événement soit connu et rappelé partout, qu’ils consacrent ce jour au culte du Sauveur ressuscité. C’est la méthode de Dieu pour garder dans un souvenir perpétuel la résurrection du Christ, dont dépend notre salut.
Ce changement du Sabbat du septième au premier jour de la semaine a été fait non seulement pour une raison suffisante, mais aussi par l’autorité compétente. C’est un simple fait historique que les chrétiens de l’âge apostolique ont cessé d’observer le septième, et ont observé le premier jour de la semaine comme le jour du culte religieux. Ainsi, depuis la création, dans une succession ininterrompue, le peuple de Dieu, obéissant au commandement originel, s’est consacré un jour sur sept à l’adoration du seul Dieu vivant et vrai. Il est difficile de concevoir un argument plus fort que celui-ci pour l’obligation perpétuelle du sabbat en tant qu’institution divine. Il ne vaut pas la peine de s’arrêter pour répondre à l’objection que le récit de cette observance ininterrompue du sabbat est incomplet. L’histoire ne retient pas tout. Nous trouvons la fontaine de ce fleuve de miséricorde dans le paradis ; nous en suivons le cours d’âge en âge ; Nous voyons son flot large et bienfaisant sous nos yeux. Si, çà et là, au cours de sa course à travers les millénaires, elle se perd dans un bourbier ou une caverne, sa réapparition prouve son identité et la divinité de son origine. Le sabbat est aux nations ce que le Nil est à l’Égypte, et vous pourriez aussi bien appeler l’un un appareil humain que l’autre. Il n’y a que l’autorité divine et la puissance divine qui puissent expliquer l’observance continue de cette institution sacrée depuis le commencement jusqu’à présent.
5. Il est juste d’argumenter l’origine divine du sabbat à partir de son importance suprême. Quant à son importance, tous les chrétiens sont d’accord. Ils peuvent différer sur le fondement de l’obligation de l’observer, et sur la rigueur avec laquelle le jour doit être observé, mais que les hommes soient tenus de l’observer, et que son observance soit d’une importance essentielle, il n’y a pas de divergence d’opinion entre les églises de la chrétienté. Mais si elle est si essentielle aux intérêts de la religion, est-elle concevable que Dieu ne l’ait pas ordonné ? Il a donné au monde l’Église, la Bible, le ministère, les sacrements ; Ce ne sont pas des dispositifs humains. Et peut-on supposer que le sabbat, sans lequel toutes ces institutions divines seraient d’une inefficacité mesurable, doive être laissé à la volonté ou à la sagesse des hommes ? Il ne faut pas le supposer. Que ces moyens divinement désignés pour l’illumination et la sanctification des hommes soient dans une large mesure sans effet, là où le sabbat est négligé ou profané, c’est une question d’expérience. Il est indéniable que la masse du peuple est redevable aux services du sanctuaire le jour du Seigneur, pour sa connaissance religieuse. Toute communauté ou classe d’hommes qui ignorent le sabbat et s’absentent du sanctuaire, en général, deviennent païens. Ils n’ont guère plus de vraie connaissance religieuse que les païens. Mais sans cette connaissance, la moralité est impossible. La religion n’est pas seulement le sang vital de la morale, de sorte que sans la première, la seconde ne peut être ; mais Dieu a révélé son dessein pour qu’il n’en soit rien. Si les hommes refusent de le retenir dans leur connaissance, il déclare qu’il les livrera à un esprit réprouvé. (Rom. i. 28.) Les hommes ne savent pas ce qu’ils font, lorsque, par leur enseignement ou leur exemple, ils encouragent la négligence ou la profanation du Jour du Seigneur. Nous avons chez les communistes français une illustration et un avertissement de ce qu’est une communauté sans sabbat, c’est-à-dire une communauté sans sabbat ., sans religion, doit finalement et inévitablement devenir. Les hommes irréligieux, bien sûr, se moquent de la religion et nient son importance, mais la Bible et l’expérience sont contre eux.
Les objections générales contre la doctrine selon laquelle la loi du sabbat est une obligation universelle et perpétuelle, ont déjà été examinées incidemment. Celles qui sont dérivées du Nouveau Testament sont principalement les suivantes :
1. Une objection est tirée de l’absence de toute commande expresse. Une telle commande n’était pas nécessaire. Le Nouveau Testament n’a pas de décalogue. Ce code, qui a été annoncé une fois et qui n’a jamais été abrogé, demeure en vigueur. Ses injonctions ne sont pas tant catégoriquement répétées, qu’elles sont supposées comme toujours obligatoires. Nous ne trouvons pas de paroles telles que : « Tu n’auras pas d’autres dieux devant moi. » ou « Tu ne te feras point d’image taillée. » Paul dit : « Je n’avais pas connu la convoitise, si la loi n’avait dit : Tu ne convoiteras point. » (Rom. vii. 7.) La loi qui dit : « Tu ne convoiteras point » se trouve dans le décalogue. Paul ne rejoue pas le commandement, il prend simplement pour acquis que le décalogue est maintenant comme toujours la loi de Dieu.
2. On insiste non seulement sur le fait qu’il n’y a pas de commandement positif à ce sujet, mais aussi sur le fait qu’il y a un silence total dans le Nouveau Testament concernant toute obligation de sanctifier un jour sur sept. Notre-Seigneur, dans son Sermon sur la montagne, dit-on, tout en corrigeant les fausses interprétations de la loi mosaïque données par les pharisiens, et en exposant ses préceptes dans leur vrai sens, ne dit rien du quatrième commandement. Il en va de même pour le concile de Jérusalem. Ce concile ne dit rien sur la nécessité pour les païens convertis d’observer un sabbat. Mais tout cela peut être dit d’autres préceptes dont personne ne conteste l’obligation. Ni notre Seigneur ni le concile ne disent quoi que ce soit au sujet de l’adoration des images taillées. D’ailleurs, Notre-Seigneur fait ailleurs, en ce qui concerne le quatrième commandement, précisément ce qu’il a fait dans le Sermon sur la montagne à l’égard des autres préceptes du Décalogue. Il a réprimandé les pharisiens pour leur fausse interprétation de ce commandement, sans la moindre indication que la loi elle-même ne devait pas rester en vigueur.
3. Il est fait appel à des passages tels que Colossiens ii. 16 : « Que personne donc ne vous juge sur la nourriture, ou sur la boisson, ou sur un jour saint, ou sur la nouvelle lune, ou sur les jours de sabbat ; » et Romains xiv. 5 : « Un homme estime un jour plus qu’un autre ; un autre estime tous les jours de la même manière. Que tout homme soit pleinement persuadé dans son propre esprit. Tout le monde sait, cependant, que les églises apostoliques étaient très troublées par les judaïsants, qui insista sur le fait que la loi mosaïque restait en vigueur, et que les chrétiens étaient tenus de se conformer à ses prescriptions en ce qui concerne la distinction entre les viandes pures et impures, et ses nombreux jours de fête, où tout travail devait être interrompu. C’étaient les faux docteurs et c’était la fausse doctrine contre laquelle tant d’épîtres de saint Paul étaient dirigées. C’est en référence évidente à ces hommes et à leurs doctrines que des passages tels que ceux cités ci-dessus ont été écrits. Ils n’ont aucune référence au Sabbat hebdomadaire, qui avait été observé depuis la création, et que les Apôtres eux-mêmes ont introduit et perpétué dans l’Église chrétienne.
4. Il est aussi souvent dit qu’un sabbat hebdomadaire n’est pas conforme à l’esprit de l’Évangile, qui exige la consécration de l’Évangile toute notre vie et de tout notre temps à Dieu. Chez le chrétien, dit-on, chaque jour est saint, et un jour n’est pas plus saint qu’un autre. Il n’est pas vrai, cependant, que le Nouveau Testament exige une plus grande consécration à Dieu que l’Ancien. L’Évangile a beaucoup d’avantages par rapport à la dispensation mosaïque, mais ce n’est pas l’un d’entre eux. Il était jadis même dès le commencement exigé de tous les hommes qu’ils aimassent Dieu de tout leur cœur, de tout leur esprit et de toute leur force ; et leur prochain comme eux-mêmes. Plus que cela, l’Évangile n’exige de personne. S’il est conforme à la spiritualité de l’Église que les croyants ne négligent pas de s’assembler ; et qu’ils auraient un ministère déclaré, des rites sacramentels, et le pouvoir d’excommunication, et tout cela par nomination divine ; alors il est difficile de voir pourquoi la consécration d’un jour sur sept au service de Dieu, serait incompatible avec son caractère spirituel. Tant que nous sommes dans le corps, la religion ne peut pas être exclusivement une affaire de cœur. Il doit avoir son institutions et ordonnances ; et toute tentative de s’en passer serait aussi déraisonnable et aussi futile que pour l’âme, dans l’état actuel de notre existence, d’essayer de se passer du corps.
5. Un autre point de vue est souvent invoqué à ce sujet. L’importance du Sabbat n’est pas nié. L’obligation de la sanctifier est admise. C’est vrai déclaré être un péché de s’engager dans des occupations ou des amusements mondains ce jour-là ; mais il est nié que cette obligation de consacrer le jour à Dieu repose sur n’importe quel commandement divin. Il est nié que la sanctification originelle de la septième jour à la création oblige tous les hommes à garder un jour sur sept saint pour le Seigneur. Il on soutient que le quatrième commandement, tant quant à son essence qu’à ses accidents, est abrogé ; et, par conséquent, qu’il n’y a pas de commandement exprès de Dieu maintenant en vigueur qui nous oblige à sanctifier le sabbat. Soit l’obligation est imposée par soi-même, soit elle est imposée par l’Église. L’Église exige de ses membres qu’ils observent le Jour du Seigneur, comme elle l’exige d’observer Noël ou le Vendredi Saint ; et les chrétiens, dit-on, sont liés d’obéir à l’Église, comme les citoyens sont tenus d’obéir à l’État. Mais les protestants nient que l’Église ait le pouvoir de faire des lois pour lier la conscience. C’est la raison pour laquelle prérogative de Dieu. Si l’Église peut le faire dans un cas, elle peut le faire dans un autre ; et Nous devrions devenir les serviteurs des hommes. C’est par ce principe simple, que les hommes sont tenus d’obéir à l’Église, que Rome a effectivement dépouillé tous ceux qui reconnaître son autorité de la liberté par laquelle le Christ a rendu son peuple libre.
La plupart des théologiens évangéliques modernes en Allemagne disent que l’obligation de observer le sabbat est auto-imposé. C’est-à-dire que tout homme, et surtout tout chrétien est tenu de faire tout ce qu’il peut pour promouvoir les intérêts de la religion et le bien de la société. La consécration du Jour du Seigneur à l’adoration Dieu est éminemment propice à ces fins ; c’est pourquoi les hommes sont tenus de la garder saint. Mais une obligation que l’on s’impose à soi-même se limite à soi-même. Un homme pense que c’est mieux de consacrer le dimanche à la religion ; un autre qu’il devrait être observé comme un jour de détente et amusement. La liberté d’un homme ne peut être jugée par celle d’un autre homme conscience. L’opportunisme ne peut jamais être le fondement d’une obligation. L’histoire de l’Église prouve qu’il n’y a pas de telles conceptions du devoir pour contraindre la conscience et gouverner la vie des hommes. Le Sabbat est non consacrée à la religion, où son autorité divine est niée. Les églises peuvent être plus ou moins fréquentées, mais la journée est principalement consacrée à l’amusement. Un théologien allemand 1 dit que la doctrine selon laquelle l’observance religieuse du sabbat repose sur une l’ordre divin exprimé, » prévaut dans toute la partie anglophone de la chrétienté », et que dans l’Église évangélique d’Allemagne, certains d’un vision trop légale du christianisme, ou d’une soumission servile à la lettre de l’Église. Bible, ou impressionné par le calme solennel d’un dimanche anglais avec sa profanation ailleurs, ont toujours été enclins aux mêmes vues. Bien que cet auteur, représentant d’une classe nombreuse, affirme sa la liberté d’observer un jour au-dessus d’un autre, ou tous les jours de la même manière, il admet que le l’observance religieuse du Jour du Seigneur n’est pas une question d’indifférence ; au contraire, il dit que « sa profanation (Verleztung) est un péché ». Cependant, pour qu’une chose soit pécheresse, dit-il, il n’est pas nécessaire qu’elle soit contraire à un commandement divin exprès. La conscience d’un chrétien, « guidée par la parole et éclairée par l’Esprit de Dieu », est sa règle de conduite. La conscience, ainsi guidée et éclairée, peut ordonner ou interdire beaucoup de choses pour lesquelles on ne peut trouver d’instructions explicites dans les Écritures. Personne ne nie tout cela ; Mais la conscience de l’homme est un guide pour lui-même, et non pour les autres. Si nous nous en tenons au principe fondamental de notre foi et de notre liberté protestantes, « que les Écritures sont la seule règle infaillible de la foi et de la pratique », nous devons être en mesure d’invoquer l’autorité divine expresse pour l’observance religieuse du Jour du Seigneur, ou permettre à chacun de l’observer ou non comme bon lui semble. Pour son propre maître, il se tient debout ou tombe ; C’est à Lui seul qu’il est responsable de l’usage que le mensonge fait de sa liberté chrétienne. Mais de même qu’aucun homme n’est libre de voler ou de ne pas voler comme il le voit, de même tous les chrétiens « anglophones » disent d’une seule voix qu’il n’est pas libre de sanctifier ou de profaner le sabbat, comme bon lui semble. Il est tenu par la loi primordiale et immuable donnée à la création, de sanctifier un jour sur sept pour le Seigneur.
1 Palmer dans la Real-Encyklopadie de Herzog.
S’il est vrai qu’il est propre à la race anglo-saxonne d’avoir ce point de vue sur l’obligation du sabbat chrétien, alors ils ont une raison spéciale d’être profondément reconnaissants envers Dieu. Dieu d’autrefois a dit aux Israélites : « Sanctifie mes sabbats ; et ils seront un signe entre moi et vous, afin que vous sachiez que je suis L’ETERNEL, votre Dieu. C’est-à-dire que ce sera un signe que vous êtes mon peuple. Tant que vous sanctifierez le sabbat, je vous bénirai ; Si vous la négligez et la profanez, vos bénédictions s’éloigneront de vous. (Jér. XVII. 20 à 27.) Si c’est donc la distinction des chrétiens anglo-saxons, qu’ils sont un peuple observant le sabbat, c’est une distinction qui doit être très prisée et soigneusement gardée ; Et dans ce pays en particulier, nous devons veiller à ce que l’afflux d’immigrants d’autres nationalités ne nous prive pas de cette grande distinction et de ses bénédictions.
C’est une objection populaire contre l’observance religieuse du jour du Seigneur, que les classes laborieuses en ont besoin comme d’un jour de récréation. Là-dessus, il est évident de remarquer (1.) Qu’il y a beaucoup de maux graves dans notre civilisation moderne, mais que ceux-ci ne doivent pas être guéris en piétinant les lois de Dieu. Si les hommes entassent les ouvriers dans des locaux étroits et les surtravaillent dans des usines chauffées six jours par semaine, ils ne peuvent pas expier ce péché en faisant du jour du Seigneur un jour d’amusement. (2) Loin du dimanche, tel qu’il est généralement passé par les travailleurs cours, étant un jour de rafraîchissement, c’est tout le contraire. Le lundi est ordinairement chez eux le plus mauvais jour de la semaine pour le travail ; c’est un jour nécessaire pour se remettre des effets d’un dimanche mal dépensé. (3) Si les classes laborieuses ont des lieux de résidence sains et ne sont pas surmenées, alors le meilleur remède est le repos complet des occupations ordinaires, et la direction de leurs pensées et de leurs sentiments dans les voies actuelles, par les fonctions purificatrices et élevées de la religion. C’est la méthode divinement désignée pour préserver le corps et l’âme des hommes dans un état sain, une méthode qu’aucun appareil humain n’est susceptible d’améliorer.
Comment le sabbat doit-il être sanctifié ?
On peut dire, en termes généraux, que c’est l’opinion de toute l’Église juive et chrétienne, que la sanctification exigée par Dieu ne consiste pas seulement dans la cessation des occupations mondaines, mais aussi dans la consécration du jour aux offices de la religion. Que ce soit là le point de vue correct, c’est prouvé, (1.) Non seulement par le consentement général du peuple de Dieu sous les deux dispensations, mais aussi par l’usage constant des mots « sanctifier », « sanctifier » ou « sanctifier » et « sanctifier ». L’usage uniforme de ces expressions, montre que le jour a été mis à part d’un usage commun à un usage sacré. (2) De l’ordre d’augmenter le nombre des sacrifices dans le service du temple, ce qui prouve que le jour devait être religieusement observé. 3° De la conception de l’institution, qui, dès le début, était religieuse ; la commémoration de l’œuvre de la création et, après l’avènement, de la résurrection du Christ. (4.) Dans le Lévitique XXIII, une liste est donnée des jours où il devait y avoir « une sainte convocation » du peuple ; c’est-à-dire que le peuple devait être convoqué pour le culte public, et que le sabbat était le premier donné. (5) L’ordre est constamment répété que le peuple doit être fidèlement instruit de la loi, qui devait lui être lue dans toutes les occasions appropriées. Donner l’occasion d’une telle instruction était évidemment l’un des principaux objectifs de ces « saintes convocations ». (Deut. vi. 6, 7, 17-19 ; Josh. i. 8.) Cette instruction du peuple devint le devoir spécial des Lévites (Deut. xxxiii. 10) ; et des prêtres. (Lév. x. 11, comp. Mai. ii. 7.) La lecture de la loi faisait sans doute partie intégrante de l’office de tous les jours où le peuple était solennellement convoqué pour le culte religieux. Ainsi dans Deutéronome xxxi. 11, 12, nous lisons : « Quand tout Israël sera venu comparaître devant l’Eternel, ton Dieu, dans le lieu qu’il choisira, tu liras cette loi devant tout Israël à leurs audiences. Rassemblez le peuple, hommes, femmes, enfants, et l’étranger qui est dans tes portes, afin qu’ils entendent, qu’ils apprennent, qu’ils craignent l’Éternel, ton Dieu, et qu’ils observent toutes les paroles de cette loi. Tel était le dessein de la convocation du peuple. Nous savons par le Nouveau Testament que les Écritures étaient lues chaque sabbat dans les synagogues ; et l' Les synagogues ont été parmi les premières institutions du peuple élu. 2 Rois iv. 23, prouve au moins qu’à cette époque il était d’usage pour le peuple de recourir le jour du sabbat à des hommes saints pour s’instruire. Dans le Psaume Ixxiv. 8, il est dit des païens : « Ils ont brûlé toutes les synagogues de Dieu dans le pays. » Le mot rendu ici par « synagogues » signifie « assemblées », mais brûler des « assemblées » ne peut signifier que des lieux d’assemblée ; car brûler des églises, dans notre mode d’expression, ne peut signifier que les édifices où les églises ou les congrégations ont l’habitude de s’assembler. Il est difficile de comprendre à quels autres lieux d’assemblée le Psalmiste pourrait se référer, si les synagogues n’existaient pas alors. Mais en admettant que les synagogues n’aient été communes parmi les Juifs qu’après l’exil, ce qui est une supposition très improbable, le fait que la lecture des Écritures le jour du sabbat était une partie établie du service de la synagogue, prouve en grande partie qu’il s’agissait d’un service sabbatique bien avant l’exil. 6° La place du quatrième commandement dans le décalogue ; l’accent mis sur elle dans l’Ancien Testament ; la manière dont il est parlé dans les prophètes ; et les Psaumes destinés à être utilisés ce jour-là, comme par exemple le quatre-vingt-douzième, montrent tous que le jour a été mis à part pour les devoirs religieux dès le commencement. (7) C’est ce que l’on peut aussi dire à partir de l’ensemble du caractère de l’ancienne dispensation. Toutes ses institutions étaient religieuses ; ils avaient tous pour but de garder vivante la connaissance du vrai Dieu et de préparer la voie à la venue du Christ. Il serait tout à fait contraire à l’esprit de l’économie mosaïque de supposer que son jour saint le plus important et le plus solennel était purement laïc dans sa conception.1
1 La doctrine selon laquelle le sabbat juif n’était qu’un jour de délassement du travail, fut avancée parmi les protestants vers la fin du XVIIe siècle, par Selden, dans son ouvrage De Legibus Hebrœorum. Cette opinion a été adoptée par Vitringa dans le premier livre de ses Observationes Sucrte. Elle est également préconisée par Biihr dans son Symb. des Mos. Cui-fits. La doctrine contraire a été adoptée par tous les réformateurs et par le grand corps des théologiens chrétiens, et elle est habilement soutenue par Hengstenberg dans son traité Ueber den Tag des Herrn, pp. 29-41. Ce sujet est discuté dans le numéro de janvier de la Prince-ton Review for 1831, pp. 86-134.
Il est admis que les préceptes du décalogue lient l’Église de tous les temps ; tandis que les détails spécifiques contenus dans les livres de Moïse, destinés à indiquer la manière dont le devoir qu’ils prescrivaient devait alors être accompli, ne sont plus en vigueur. Le cinquième commandement oblige encore les enfants à obéir à leurs parents ; mais la loi juive donnant aux pères le pouvoir de vie et de mort sur leurs enfants, n’est plus en vigueur. Le septième commandement interdit l’adultère, mais l’épreuve prescrite pour le procès d’une femme soupçonnée de ce crime appartient au passé. Le même principe s’applique à l’interprétation du quatrième commandement. Le commandement lui-même est toujours en vigueur ; les lois mosaïques concernant le mode de son observance ont disparu avec l’économie à laquelle elles appartenaient. Il est donc injuste de représenter les partisans du maintien de l’obligation du quatrième commandement, en tant que judaïsants. Ils ne sont pas plus judaïsants que ceux qui soutiennent que les autres préceptes du Décalogue sont toujours en vigueur.
Il y a deux règles par lesquelles nous devons être guidés pour déterminer comment le sabbat doit être observé, ou pour décider ce qui est licite et ce qui ne l’est pas en ce jour saint. Le premier est la conception du commandement. Ce qui est conforme à ce dessein est licite ; Ce qui est incompatible avec elle est illégal. La seconde règle se trouve dans les préceptes et dans l’exemple de Notre-Seigneur et de ses apôtres. Le dessein du commandement doit être appris des mots dans lesquels il est transmis et d’autres parties de la parole de Dieu. D’après ces sources, il est clair que la conception de l’institution, comme nous l’avons déjà remarqué, était essentiellement double. Premièrement, pour s’assurer le repos de tous les soucis et de toutes les occupations mondaines ; d’arrêter pour un temps le courant de la vie mondaine des hommes, non seulement de peur que leur esprit et leur corps ne soient surmenés, mais aussi afin que l’occasion soit donnée à d’autres intérêts plus élevés d’occuper leurs pensées. Et deuxièmement, que Dieu soit correctement adoré, que sa parole soit dûment étudiée et enseignée, et que l’âme soit soumise à l’influence des choses invisibles et éternelles. Tout homme qui fait du dessein du sabbat ainsi révélé dans l’Écriture sa règle de conduite ce jour-là, peut difficilement manquer à son observance. Ce jour doit être sanctifié pour le Seigneur. Dans l’usage des Écritures, sanctifier ou sanctifier revient à mettre à part pour le service de Dieu. C’est ainsi que le tabernacle, le temple et tous ses ustensiles furent sanctifiés. En ce sens, le sabbat est saint. Elle doit être consacrée aux devoirs de la religion, et ce qui est incompatible avec une telle dévotion est contraire au dessein de l’institution.
Il faut cependant se rappeler que l’objet spécifique du sabbat chrétien est la commémoration de la résurrection de Jésus-Christ d’entre les morts. Tous les exercices de la journée doivent donc se rapporter spécialement à Lui et à son œuvre rédemptrice. C’est le jour où il doit être adoré, remercié et loué ; où les hommes doivent être appelés à accepter les offres de la grâce et à se réjouir dans l’espérance de son salut. C’est donc un jour de joie. Il est tout à fait incongru d’en faire un jour de morosité ou de jeûne. Dans l’Église primitive, il était interdit aux hommes de prier à genoux ce jour-là. Ils devaient se tenir debout, exultant dans l’accomplissement de l’amour rédempteur de Dieu.
La seconde règle pour nous guider se trouve dans les préceptes et l’exemple de notre Seigneur. En premier lieu, Il pose le principe : « Le sabbat a été fait pour l’homme, et non l’homme pour le sabbat. » Il est à remarquer que le Christ dit : « Le sabbat a été fait pour l’homme », non pas pour les Juifs, non pas pour le peuple d’un âge ou d’une nation, mais pour l’homme ; pour l’homme en tant qu’homme, et donc pour tous les hommes. Les devoirs moraux, cependant, entrent souvent en conflit, et alors l’inférieur doit céder le pas au supérieur. La vie, la santé et le bien-être d’un homme sont des fins plus élevées dans un cas donné, que l’observance minutieuse d’un service extérieur. C’est la règle posée par le prophète (Osée VI, 6) : « J’ai désiré la miséricorde et non le sacrifice ; et la connaissance de Dieu plus que l’holocauste. Notre Seigneur cite deux fois ce passage en application de la loi du sabbat, et établit ainsi le principe général pour notre direction, qu’il est juste de faire le jour du sabbat toute miséricorde ou tout respect dû à la consolation ou le bien-être de nous-mêmes ou des autres exige d’être fait. C’est pourquoi le Christ dit expressément : « Il est permis de bien faire (καλώς ■n-oteu׳, c’est-à-dire, comme le montre le contexte, de conférer des bienfaits) les jours de sabbat. » (Matt. xii. 12. Voir aussi Mark iii. 4.)
De plus, il nous est dit par la même autorité, que « les sacrificateurs dans le temple profanent le sabbat et sont irréprochables ». (Matt. xii. 5.) Les services du temple étaient compliqués et laborieux, et pourtant ils étaient légaux le jour du sabbat. Une autre fois, il dit à ses accusateurs : « Si un homme se fait circoncire le jour du sabbat, que la loi d’Aloses ne soit pas violée ; êtes-vous en colère contre moi, parce que j’ai guéri un homme le jour du sabbat ? Ne jugez pas selon l’apparence, mais jugez un jugement juste. (Jean VII, 23, 24.) De là, nous apprenons que tout ce qui est nécessaire pour la célébration régulière du culte religieux, ou pour y assister, est licite le jour du sabbat.
De nouveau, dans Luc xiv. 1-14, nous lisons : « Et il arriva, comme il entrait dans la maison de l’un des principaux pharisiens, pour manger du pain le jour du sabbat, qu’ils le regardaient. Et voici, il y avait devant lui un homme qui avait l’hydropisie. Jésus, prenant la parole, parla aux docteurs de la loi et aux pharisiens, en disant : Est-il permis de guérir le jour du sabbat ? Et ils se sont tus. Et il l’a pris, l’a guéri, et l’a laissé aller..... Et il proposa une parabole à ceux qui étaient invités, lorsqu’il marqua comment ils choisissaient les salles principales ; en leur disant, etc., etc. Il s’agissait évidemment d’un grand divertissement auquel les invités étaient « invités ». Christ a donc jugé juste, dans la poursuite de son œuvre, d’assister à de tels divertissements le jour du sabbat.
La fréquence avec laquelle notre Seigneur a été accusé d’avoir enfreint le sabbat par les pharisiens, prouve que sa manière d’observer ce jour était très différente de la leur, et la manière dont il s’est justifié prouve qu’il considérait le sabbat comme une institution divine d’obligation perpétuelle. Il lui avait été facile de dire que la loi du sabbat n’était plus en vigueur ; qu’Lui, en tant que Seigneur du Sabbat, l’a effacé du décalogue. On peut dire en effet que toute la loi mosaïque a été en vigueur jusqu’à la résurrection du Christ, ou jusqu’au jour où elle a été de la Pentecôte, l’observance du sabbat était alors une obligation naturelle, et c’est pourquoi Christ la considérait ainsi. En réponse à cela, cependant, il est évident de remarquer que le Christ n’a pas hésité à abroger celles des lois de Moïse qui étaient en conflit avec l’esprit de l’Évangile. C’est ce qu’il a fait avec les lois relatives à la polygamie et au divorce. Sous l’ancienne dispensation, il était permis à un homme d’avoir plus d’une femme ; et aussi de répudier une femme en lui donnant un acte de divorce. Christ a déclaré que ces deux choses ne devraient pas être permises par l’Évangile. Le fait qu’il ait traité le sabbat comme il l’a fait avec les cinquième, sixième et septième préceptes du décalogue, que les pharisiens avaient mal interprétés, montre qu’il considérait le quatrième commandement comme appartenant à la même catégorie que les autres. Son exemple nous fournit un guide sûr quant à la manière dont le jour doit être observé.
Il est très courant, en particulier pour les citoyens nés à l’étranger, de s’opposer à toutes les lois adoptées par les gouvernements civils de ce pays pour empêcher la violation publique du Jour du Seigneur. On prétend que, comme il y a aux États-Unis une séparation complète de l’Église et de l’État, il est contraire au génie de nos institutions que l’observance de toute institution religieuse soit imposée par des lois civiles. On objecte en outre que, comme tous les citoyens ont des droits égaux quelles que soient leurs opinions religieuses, il y a atteinte à ces droits si une classe de la population est tenue de conformer sa conduite aux opinions religieuses d’une autre classe. Pourquoi les Juifs, les Mahométans ou les Infidèles devraient-ils être tenus de respecter le sabbat chrétien ? Pourquoi un homme qui n’a pas foi dans le sabbat en tant qu’institution divine devrait-il être empêché de faire ce jour-là ce qui est permis les autres jours ? Si l’État peut exiger du peuple qu’il respecte le dimanche comme un jour de repos, pourquoi ne peut-il pas exiger du peuple qu’il obéisse à l’un ou l’autre des autres préceptes de la Bible ?
Il est concédé, (1.) Que, dans chaque pays libre, chacun a des droits égaux à ceux de ses concitoyens, et qu’il se trouve sur le même terrain aux yeux de la loi. 2° Qu’aux États-Unis, aucune forme de religion ne peut être établie ; qu’aucune épreuve religieuse ne peut être imposée pour l’exercice du droit de vote électif ou pour l’exercice d’une charge ; et qu’aucune préférence ne peut être accordée aux membres d’une confession religieuse par rapport à ceux d’une autre. (_3.) Qu’aucun homme ne peut être forcé de contribuer au soutien d’une église ou d’une institution religieuse. 4° Que tout homme est libre de régler sa conduite et sa vie selon ses convictions ou sa conscience, pourvu qu’il ne viole pas la loi du pays.
D’un autre côté, elle n’est pas moins vraie,
1. Qu’une nation n’est pas un simple conglomérat d’individus. C’est un organisme organisé. Elle a nécessairement sa vie nationale, ses organes nationaux, ses principes d’action nationaux, son caractère national et sa responsabilité nationale.
2. Dans tout pays libre, le gouvernement doit, dans son organisation et son mode d’action, être l’expression de l’esprit et de la volonté du peuple.
3. Comme les hommes sont des créatures raisonnables, le gouvernement ne peut bannir tout sens et toute raison de leur action, parce qu’il peut y avoir des idiots parmi le peuple.
4. Comme les hommes sont des êtres moraux, il est impossible que le gouvernement agisse comme s’il n’y avait pas de distinction entre le bien et le mal. Il ne peut pas légaliser le vol et le meurtre. Quelque enrichissement qu’il puisse avoir par la rapine ou par l’extermination d’autres nations, il mériterait et recevrait la condamnation et l’exécration universelles, s’il réduisait ainsi à néant les liens de l’obligation morale. Cette nécessité d’obéissance à la loi morale de la part des gouvernements civils ne vient pas de ce qu’ils sont institués pour la protection de la vie, des droits et des biens du peuple. Pourquoi notre propre nation et d’autres nations chrétiennes ont-elles déclaré que la traite des esclaves était une piraterie passible de la peine de mort ? Non pas parce qu’il interfère avec les droits ou la liberté de ses citoyens, mais parce qu’il est mauvais. La cruauté envers les animaux est punie de sanctions civiles, non pas sur la base du principe du profit et de la perte, mais parce qu’il s’agit d’une violation de la loi morale. De même qu’il est impossible à l’homme individuel de méconnaître toutes les obligations morales, il n’est pas moins impossible de la part des gouvernements civils.
5. De plus, les hommes sont des êtres religieux. Ils ne peuvent pas plus ignorer cet élément de leur nature que leur raison ou leur conscience. Quoi qu’ils puissent dire ou faire semblant de penser, la loi qui les lie à l’allégeance à Dieu est tout aussi inexorable que la loi de la gravitation. Ils ne peuvent pas plus s’émanciper de l’un qu’ils ne peuvent s’émanciper de l’autre. La moralité concerne leur devoir envers leurs semblables ; la religion concerne leur devoir envers Dieu. Celle-ci lie la conscience autant que la première. Elle accompagne l’homme partout. Elle doit influer sur sa conduite en tant qu’individu, en tant que chef de famille, en tant qu’homme d’affaires, en tant que législateur et en tant que membre de l’exécutif. Il est absurde de dire que les gouvernements civils n’ont rien à voir avec la religion. Il n’en est pas de même d’une compagnie de pompiers, ni d’une manufacture, ni d’une maison de banque. La religion adoptée par les individus qui composent ces associations doit influencer leur action corporative, ainsi que leur conduite individuelle. Si un homme ne peut pas blasphémer, une maison d’édition ne peut pas imprimer et diffuser un livre blasphématoire. Un gouvernement civil ne peut pas plus ignorer la religion que la physiologie. Elle n’a pas été constituée pour enseigner ni l’un ni pour l’autre, mais elle doit, par une nécessité analogue, conformer son action aux lois de l’un et de l’autre. En effet, il serait beaucoup plus sûr pour un gouvernement d’adopter une loi violant les lois de la santé qu’une loi violant les convictions religieuses de ses citoyens. L’un serait imprudent, l’autre tyrannique. Les hommes supportent la folie, avec plus de patience qu’ils ne supportent l’injustice. C’est en vain que les tessons de la terre luttent contre leur Créateur. Ils doivent se soumettre aux lois de leur nature non seulement en tant qu’êtres sensibles, mais aussi en tant qu’êtres moraux et religieux. Et il est temps que les athées déclarés, qu’ils soient communistes, scientifiques, ou les philosophes, doivent savoir qu’ils sont autant et aussi justement l’objet de la pitié et du mépris que de l’indignation pour tous les hommes sensés. Par hommes sensés, on entend les hommes qui pensent, sentent et agissent selon les lois de leur nature. Ces lois sont ordonnés, administrés et appliqués par Dieu, et il n’y a pas d’échappatoire à leur obligation, ni aux peines attachées à leur violation.
6. Le peuple de ce pays étant des êtres raisonnables, moraux et religieux, le gouvernement doit être administré selon les principes de la raison, de la morale et de la religion. Par une même nécessité de droit, le peuple étant chrétien et protestant, le gouvernement doit être administré selon les principes du christianisme protestant. Cela ne veut pas dire par là que le gouvernement doive enseigner le christianisme, ou en faire la profession de citoyen une condition de citoyenneté, ou un test pour la fonction. Cela ne signifie pas non plus que le gouvernement est appelé à punir toute violation du principe ou du précepte chrétien. Elle n’est pas appelée à punir toute violation de la loi morale. Mais de même qu’elle ne peut pas violer la loi morale dans sa propre action, ni exiger du peuple qu’il la viole, elle ne peut pas non plus ignorer le christianisme dans son action officielle. Il ne peut pas exiger du peuple ou de l’un de ses propres officiers qu’ils fassent ce que le christianisme interdit, ni leur interdire de faire quoi que ce soit que le christianisme leur ordonne. Elle n’a pas plus le droit d’interdire que la Bible soit enseignée dans les écoles publiques, qu’elle n’a le droit d’ordonner que le Coran y soit enseigné. Si le christianisme exige qu’un jour sur sept soit un jour de repos de toutes les occupations mondaines, le gouvernement d’un peuple chrétien ne peut exiger d’aucune classe de la communauté ou de ses propres officiers qu’ils travaillent ce jour-là, sauf en cas de nécessité ou de miséricorde. Si, sous prétexte qu’il n’a rien à voir avec la religion, il ne tenait pas compte de ce jour-là et ordonnait que les douanes, les cours de justice et les salles législatives fussent ouvertes le jour du Seigneur, et que les affaires publiques fussent traitées comme les autres jours, ce serait un acte de tyrannie qui justifierait la rébellion. Cela reviendrait à décréter qu’aucun chrétien ne devrait occuper de poste sous le gouvernement, ni avoir aucune part dans l’élaboration ou l’administration des lois du pays. La nation serait complètement soumise à une poignée d’athées et d’infidèles importés.
Preuve qu’il s’agit d’une nation chrétienne et protestante.
La proposition selon laquelle les États-Unis d’Amérique sont une nation chrétienne et protestante n’est pas tant l’affirmation d’un principe que l’énoncé d’un fait. Ce fait n’est pas simplement que la grande majorité de la population est chrétienne et protestante, mais que la vie organique, les institutions, les lois et l’action officielle du gouvernement, qu’elle soit législative, judiciaire, judiciaire, ou exécutif, est, et de droit, devrait être, et doit en fait être, conformément aux principes du christianisme protestant.
1. C’est une nation chrétienne et protestante dans le sens énoncé en vertu d’une loi universelle et nécessaire. Si vous plantez un gland, vous obtenez un chêne. Si vous plantez un cèdre, vous obtenez un cèdre. Si un pays est colonisé par des païens ou des mahométans, il se développe en une communauté païenne ou mahométane. D’après la même loi, si un pays est pris en possession et colonisé par des chrétiens protestants, la nation qu’ils viennent à constituer doit être protestante et chrétienne. Ce pays a été colonisé par des protestants. Pendant les cent premières années de notre histoire, ils ont constitué presque le seul élément de notre population. Naturellement, ils étaient gouvernés par leur religion en tant qu’individus, dans leurs familles et dans toutes leurs associations pour les affaires, et pour le gouvernement municipal, étatique et national. C’était tout autant une question de nécessité que d’agir moralement dans toutes ces différentes relations.
2. C’est un fait historique que le christianisme protestant est la loi du pays, et ce depuis le commencement. Comme le grand La majorité des premiers colons du pays venaient de Grande-Bretagne, ils ont déclaré que la loi commune de l’Angleterre devrait être la loi ici. Mais le christianisme est la base de la loi commune de l’Angleterre, et par conséquent de la loi de ce pays ; Et c’est ce que nos tribunaux ont décidé à maintes reprises. Ce n’est pas seulement à cause de ces décisions. Les tribunaux ne peuvent pas infirmer les faits. Le christianisme protestant a été, est et doit être la loi du pays, Tout ce que le christianisme protestant interdit, la loi du pays (dans sa sphère, c’est-à-dire dans la sphère dans laquelle l’autorité civile peut agir de manière appropriée) l’interdit. Le christianisme interdit la polygamie et le divorce arbitraire, de même que le droit civil. Le romanisme interdit le divorce même pour cause d’adultère ; Le protestantisme l’admet sur ce terrain. Les lois de tous les États sont conformes, en cette matière, à la règle protestante. Le christianisme interdit tout travail inutile, ou la transaction des affaires mondaines, le jour du Seigneur ; Ce jour-là est donc un dies non, dans tout le pays. Aucun contrat n’est contraignant s’il est conclu ce jour-là. Aucune dette ne peut être recouvrée le jour du sabbat chrétien. Si un homme s’engage pour un service au mois ou à l’année, on ne peut pas exiger de lui qu’il travaille ce jour-là. Tous les bureaux publics sont fermés et toutes les activités officielles sont suspendues. Du Maine à la Géorgie, d’un océan à l’autre, un jour par semaine, par la loi de Dieu et par la loi du pays, les gens se reposent.
Cette influence dominante du christianisme est raisonnable et juste.
C’est conforme à l’analogie. Si un homme va en Chine, il s’attend à trouver le gouvernement administré selon la religion du pays. S’il se rend en Turquie, il s’attend à trouver le Coran suprême et régulant toute l’action publique. S’il se rend dans un pays protestant, il n’a pas le droit de se plaindre, s’il trouve la Bible en plein essor et exerçant son influence bienfaisante non seulement sur le peuple, mais aussi sur le gouvernement.
Le principe selon lequel la religion d’un peuple contrôle légitimement l’action du gouvernement a bien sûr ses limites. Si la religion elle-même est mauvaise et exige ce qui est moralement mauvais, alors, comme les hommes ne peuvent pas avoir le droit d’agir méchamment, il est clair qu’il serait mal pour le gouvernement de se conformer à ses exigences. Si une religion ordonne l’infanticide, ou le meurtre des vieillards ou des infirmes, ni le peuple ni le gouvernement ne doivent conformer leur conduite à ses lois. Mais là où la religion d’un peuple n’exige rien d’injuste, de cruel ou d’immoral, ceux qui viennent vivre là où elle prévaut sont tenus de se soumettre tranquillement à ce qu’il contrôle les lois et les institutions du pays.
Le principe défendu est reconnu dans tous les autres départements de fife. Si un certain nombre d’hommes chrétiens s’associent en tant que ou de banque, il leur serait compétent d’admettre des incroyants dans le christianisme dans leur association, et de leur laisser leur pleine part dans sa gestion et son contrôle. Mais il serait tout à fait déraisonnable pour de tels incroyants d’élever un cri de persécution religieuse ou d’atteinte à leurs droits et à leur liberté, parce que toutes les affaires de la compagnie étaient suspendues le jour du Seigneur. Ces nouveaux membres connaissaient le caractère et les principes de ceux avec qui ils cherchaient à s’associer. Ils savaient que les chrétiens feraient valoir leur droit d’agir en tant que chrétiens. Leur demander de renoncer à leur religion serait tout simplement absurde.
Lorsque les chrétiens protestants sont arrivés dans ce pays, ils ont possédé et soumis le pays. Ils adoraient Dieu et son Fils Jésus-Christ comme le Sauveur du monde, et reconnaissaient que les Écritures étaient la règle de leur foi et de leur pratique. Ils ont introduit leur religion dans leurs familles, leurs écoles et leurs collèges. Ils s’abstinrent de toutes les affaires ordinaires le jour du Seigneur, et le consacrèrent à la religion. Ils construisirent des églises, construisirent des écoles et enseignèrent à leurs enfants à lire la Bible, à la recevoir et à y obéir comme à la parole de Dieu. Ils se sont constitués en tant que chrétiens en organisations municipales et étatiques. Ils ont reconnu Dieu dans leurs assemblées législatives. Ils prescrivaient des serments à prêter en son nom. Ils fermèrent leurs tribunaux, leurs lieux d’affaires, leurs législatures et tous les lieux sous contrôle public, le jour du Seigneur. Ils ont déclaré que le christianisme faisait partie de la loi commune du pays. Au cours des temps, des milliers de personnes sont venues parmi les nous qui ne sommes ni protestants ni chrétiens. Certains sont papistes, d’autres juifs, d’autres infidèles et d’autres athées. Tous sont les bienvenus ; Tous sont admis à l’égalité des droits et des privilèges. Tous ont le droit d’acquérir des biens, de voter à toutes les élections, d’être éligibles à toutes les charges et d’être investis d’une influence égale dans toutes les affaires publiques. Tous sont autorisés à adorer comme ils l’entendent, ou à ne pas adorer du tout, s’ils le jugent bon. Aucun homme n’est molesté à cause de sa religion ou de son manque de religion. Aucun homme n’est tenu de professer une quelconque forme de foi ou d’adhérer à une association religieuse. On ne peut raisonnablement exiger plus que cela. Mais il faut aller plus loin. L’infidèle exige que le gouvernement soit dirigé sur le principe que le christianisme est faux. L’athée exige qu’elle soit menée sur l’hypothèse qu’il n’y a pas de Dieu, et le positiviste sur le principe que les hommes ne sont pas des agents libres. La réponse suffisante à tout cela est que cela ne peut pas être fait.
Les exigences des infidèles sont injustes.
Les exigences de ceux qui exigent que la religion, et en particulier le christianisme, soit ignorée dans nos lois nationales, étatiques et municipales, sont non seulement déraisonnables, mais elles sont au plus haut degré injustes et tyranniques. C’est une condition de service dans tout chemin de fer qui est exploité le dimanche, que l’employé ne soit pas chrétien. Si le christianisme ne doit pas contrôler l’action de nos gouvernements municipaux, étatiques et généraux, alors si des élections sont ordonnées pour être tenues le jour du Seigneur, les chrétiens ne peuvent pas voter. Si toutes les affaires du pays doivent se poursuivre, ce jour-là comme les autres jours, aucun chrétien ne peut occuper un poste. Nous devrions donc avoir non pas un acte test religieux, mais un acte test anti-religieux. Telle est l’idée que se fait le libre-penseur de la liberté. 1 Mais plus encore, si le christianisme ne doit pas contrôler les lois du pays, alors, comme la monogamie est une institution purement chrétienne, nous ne pouvons pas avoir de lois contre la polygamie, le divorce arbitraire ou « l’amour libre ». Tout cela doit être cédé au parti anti-chrétien ; et la cohérence exigera que nous cédions aux athées, le serment et le décalogue ; et tous les droits de citoyenneté doivent être limités aux blasphémateurs. Depuis la chute de Lucifer, aucun tyran de ce genre n’a été connu des hommes comme August Comte, l’athée. Si donc quelqu’un veut précéder la perdition, il n’a rien d’autre à faire que de devenir libre-penseur et de s’associer au cri : « Le gouvernement civil n’a rien à voir avec la religion ; et la religion n’a rien à voir avec le gouvernement civil.
1 Un libre-penseur est un homme dont l’entendement s’émancipe de sa conscience. Il est donc naturel qu’il veuille voir le gouvernement civil s’émanciper de la religion.
Nous sommes donc tenus d’insister sur le maintien et l’exécution fidèle des lois promulguées pour la protection du sabbat chrétien. Le christianisme n’enseigne pas que les hommes puissent être rendus religieux par la loi ; elle n’exige pas non plus que les hommes soient tenus par l’autorité civile de professer une forme particulière de doctrine religieuse, ou d’assister aux offices religieux ; mais il enjoint aux hommes de s’abstenir de toutes les occupations mondaines inutiles le jour du Seigneur. Ce sabbat civil, cette cessation des affaires mondaines, c’est ce que le gouvernement civil des pays chrétiens est appelé à faire respecter. (1) Parce que c’est le droit des chrétiens d’être autorisés à se reposer ce jour-là, ce qu’ils ne peuvent pas faire, sans perdre leur citoyenneté, à moins que toutes les affaires publiques ne soient arrêtées ce jour-là. (2.) Parce qu’un tel repos est le commandement de Dieu ; Et ce commandement lie la conscience autant que n’importe quel autre commandement du Décalogue. En ce qui concerne le point qui nous occupe, il importe peu que ce soit là le commandement de Dieu ou non ; tant que le peuple y croit, elle lie sa conscience ; et cette croyance de conscience, le gouvernement est tenu de la respecter, et doit agir en conséquence. (3) Parce que le sabbat civil est nécessaire à la conservation de nos institutions libres et du bon ordre de la société. La condition indispensable de l’ordre social, c’est ou le pouvoir despotique dans le magistrat, ou les bonnes mœurs dans le peuple. La morale sans religion est impossible ; la religion ne peut exister sans connaissance ; La connaissance ne peut être diffusée parmi le peuple, à moins qu’il n’y ait une classe d’enseignants, et du temps alloué à leur instruction. Christ a fait de tous ses ministres, des docteurs ; Il leur a ordonné d’enseigner toutes les nations ; Il a fixé un jour sur sept pour être réservé à cette instruction. C’est un fait historique que, depuis l’introduction du christianisme, les neuf dixièmes de la population ont tiré la plus grande partie de leurs connaissances religieuses des services du sanctuaire. Si donc le sabbat est aboli, la source de vie pour le peuple sera scellée.1
1 Le sabbat et les institutions libres. Une communication lue devant la Convention Nationale du Sabbat, Saratoga, le 13 août 1863, par le Révérend Mark Hopkins, D. D., Président du Williams College, Mass. Voir aussi un excellent article de la plume du révérend Joshua H. McUvaine, D. D., intitulé « Le droit d’une nation d’adorer Dieu », dans la Princeton Review d’octobre 1859 ; ainsi que l’article sur les « Lois du dimanche », dans le même numéro de ce journal.
Hengstenberg, après s’être référé à l’autorité de l’Église et à d’autres motifs, pour l’observance du Jour du Seigneur, termine sa discussion sur le sujet par ces mots : « Dieu merci, ce ne sont là que les œuvres ; la véritable forteresse est l’ordre qui a retenti du Sinaï, avec les autres commandements divins qui s’y rattachent, comme préparatoires, confirmatifs ou explicatifs. L’institution était beaucoup trop importante, et les tentations trop puissantes, pour qu’on puisse se passer de la base solide du commandement scripturaire. ... Il est clair comme le jour que l’obligation de l’Ancien Testament commande, au lieu d’être diminuée est augmentée. Cela découle bien sûr du fait que la rédemption par Christ est infiniment plus glorieuse que la délivrance des Israélites hors d’Égypte, qui, dans la préface des Dix Commandements, est mentionnée comme un motif spécial d’obéissance. Il n’y a pas d’ingratitude plus noire que de refuser d’obéir à Celui qui, pour nous, a livré son Fils unique.» 1 Il avait dit auparavant que le sabbat « repose sur les nécessités immuables de notre nature, en ce sens que les hommes deviennent inévitablement impies si les soucis et les travaux de leur vie terrestre ne sont pas réguliers interrompue.» 2
1 Ueber den Tag des llerrn, Berlin, 1852, p. 92-94.
2 Idem. à la p. 40.
§ 9. Le Cinquième Commandement.
Le principe général du devoir prescrit dans ce commandement, c’est que nous devons sentir et agir d’une manière convenable envers nos supérieurs. Peu importe en quoi consiste leur supériorité, qu’il s’agisse de leur âge, de leur fonction, de leur pouvoir, de leurs connaissances ou de leur excellence. Il y a certains sentiments, et une certaine ligne de conduite due à ceux qui sont au-dessus de nous, pour cette raison même, déterminés et modifiés dans chaque cas par le degré et la nature de cette supériorité. C’est aux supérieurs, à chacun selon la relation qu’il entretient avec nous, que sont dus la révérence, l’obéissance et la reconnaissance. Le fondement de cette obligation se trouve (1.) Dans la volonté de Dieu, qui a prescrit ce devoir à toutes les créatures raisonnables. (2.) Dans la nature de la relation elle-même. La supériorité suppose, sous une forme ou à un degré, de la part de l’inférieur, la dépendance et l’endettement, et appelle donc à la révérence, à la reconnaissance et à l’obéissance ; et, (3.) En opportunité, comme l’ordre moral du gouvernement divin et de la société humaine dépend de cette juste soumission à l’autorité.
Dans le cas de Dieu, comme sa supériorité est infinie, la soumission de ses créatures doit être absolue. C’est à Lui que nous devons l’adoration ou la plus profonde révérence, la plus fervente reconnaissance et l’obéissance implicite. Le cinquième commandement, cependant, concerne notre devoir envers nos semblables. D’abord dans l’ordre et dans l’importance est le devoir des enfants envers leurs parents, c’est pourquoi le devoir général est incorporé dans le commandement spécifique : « Honore ton père et ta mère. »
Lorsqu’un enfant naît dans le monde, il est entièrement impuissant et dépendant. De même qu’il tient son existence de ses parents, il périrait immédiatement sans leurs soins assidus et constants. Les parents ne sont pas seulement ses supérieurs en connaissance, en puissance et en tous les autres attributs de l’humanité ; mais ils sont aussi la source immédiate de tout bien pour l’enfant. Ils la protègent, la chérissent, la nourrissent, l’habillent, l’éduquent et la dotent. Tout le bien accordé est accordé de manière désintéressée. Le moi est constamment sacrifié. L’amour des parents pour leurs enfants est mystérieux et immuable, ainsi que l’abnégation. C’est une forme d’amour que seul un parent peut connaître. L’amour d’une mère est un mystère et une merveille. C’est l’analogue le plus parfait de l’amour de Dieu.
De même que la relation dans laquelle se trouvent les parents vis-à-vis de leurs enfants a cette analogie étroite avec la relation dans laquelle Dieu se trouve vis-à-vis de ses créatures raisonnables, et surtout de son propre peuple, de même les devoirs qui résultent de cette relation sont analogues. Ils sont exprimés par le même mot. La piété filiale est une expression aussi juste qu’elle est commune. Les parents se tiennent pour leurs enfants à charge, pour ainsi dire, à la place de Dieu. Ils sont les objets naturels de l’amour, de la révérence, de la gratitude, de la confiance et de la dévotion de l’enfant. Ce sont là les sentiments qui découlent naturellement de la relation ; et qui, dans tous les cas ordinaires, en découlent ; de sorte que Calvin est Il est justifié de dire que les enfants privés de ces sentiments sont « monstra sunt non homines ». Cette relation attachante et intime entre parents et enfants (qui ne peut exister là où la monogamie n’est pas la loi), liant tous dans l’union la plus étroite qui puisse exister entre les hommes, fait de la famille la pierre angulaire du bien-être de la société sur la terre, et le type de la béatitude du ciel. L’Église est la famille de Dieu. Il est le Père, ses membres sont frères.
Tandis que les devoirs relatifs des parents et des enfants doivent être partout et toujours essentiellement les mêmes, ils sont cependant plus ou moins modifiés par les diverses conditions de la société. Il y a dans la Bible des lois à ce sujet qui, étant destinées à l’état de choses existant avant la venue du Christ, ne nous lient plus. Il était inévitable dans l’état patriarcal de la société, et surtout dans son état nomade, que le père de famille fût à la fois père, magistrat et prêtre. Et il était naturel et juste que beaucoup des prérogatives parentales nécessaires dans un tel état de société soient conservées dans l’état temporaire et de transition organisé sous l’égide des institutions mosaïques. Nous trouvons donc que les lois de Moïse ont investi les parents de pouvoirs qui ne peuvent plus leur appartenir proprement ; et le maintien de l’autorité parentale par des textes pénaux qui ne sont plus nécessaires. C’est ainsi qu’il fut ordonné : « Celui qui maudit (ou rappelle, Septante ό κακολόγων, Vulgate 'qui maledixerit') son père ou sa mère sera certainement mis à mort. » (Exode. XXI. 17.) Au verset 15 du même chapitre, il est dit : « Celui qui frappera son père ou sa mère sera certainement mis à mort. » (Comparez Deut. xxvii. 10 ; Prov. xx. 20 ; Mat. xv. 4.) On peut remarquer ici, en passant, que le commentaire de Notre-Seigneur sur ce commandement donné dans Matthieu xv. Les articles 4-6 montrent que l’honneur de leurs parents exigé des enfants ne signifie pas simplement qu’ils chérissent les bons sentiments à leur égard, mais aussi qu’ils s’occupent d’eux lorsque cela est nécessaire. Le Christ dit aux pharisiens : « Dieu a commandé, en disant : Honore ton père et ta mère ; . . . . mais vous, vous dites : Quiconque dira à son père ou à sa mère : C’est un don (consacré à Dieu), par tout ce que tu pourras tirer de moi, et n’honore ni son père ni sa mère, celui-là sera libre. C’est-à-dire que les pharisiens enseignaient qu’un fils pouvait se soustraire à l’obligation d’honorer, c’est-à-dire de soutenir son père ou sa mère, en disant que ses biens étaient consacrés à Dieu.
La loi mosaïque a également promulgué que « si un homme a un fils obstiné et rebelle, qui n’obéira pas à la voix de son père, ni à la voix de sa mère, et qui, après l’avoir châtié, ne les écoutera pas ; alors son père et sa mère le saisiront, et l’amèneront aux anciens de sa ville, et aux portes de sa maison, et ils diront aux anciens de sa ville : Notre fils est entêté et rebelle ; il n’obéira pas à notre voix ; C’est un glouton et un ivrogne. Et tous les hommes de la ville le lapideront avec des pierres, afin qu’il meure. (Deut. XXI. 18-21.)
Sous l’ancienne économie, les pères avaient le droit de choisir des épouses pour leurs fils et de donner leurs filles en mariage. (Gen. xxiv. ; Ex. xxi. 9 ; Juges xiv. 2; Genèse xxix. 18; xxxiv. 12.) Les enfants étaient également susceptibles d’être vendus pour payer les dettes de leurs pères. (Lévitique. xxv. 39 à 41 ; 2 Rois iv. 2 fois Es. 1. 1 ; Matth., xviii. 25.) Ces textes législatifs sont caducs. Ils servent cependant à prouver combien est intime aux yeux de Dieu la relation entre parents et enfants. La bénédiction d’un père était convoitée comme la plus grande bénédiction ; et sa malédiction dépréciée comme un mal épouvantable. (Gen. xxvii. 4, 12, 34-38 ; xlix. 2 sq.)
Dans le Nouveau Testament, le devoir prescrit dans le cinquième commandement est fréquemment reconnu et appliqué. Om־ le Seigneur béni lui-même était soumis à ses parents. (Luc ii. 51.) L’Apôtre commande aux enfants d’obéir à leurs parents dans le Seigneur (Eph. VI. 1), et de leur obéir en toutes choses, car cela est agréable au Seigneur. (Col. iii. 20.) Cette obéissance doit être non seulement religieuse, mais spécifiquement chrétienne, comme le mot Seigneur dans Éphésiens 6. 1, se réfère au Christ. C’est évident parce qu’au ch. v. 21, l’Apôtre dit que ces devoirs spécifiques doivent être accomplis « dans la crainte de Christ » ; 1 parce que le Seigneur est toujours dans le Nouveau Testament pour être compris du Christ, à moins que le contexte ne l’interdise ; et parce que, surtout tout au long de ces chapitres, le Seigneur et le Christ sont intervertis, de sorte qu’il est évident que les deux mots se réfèrent à la même personne. Les enfants sont tenus d’obéir à leurs parents dans le Seigneur, c’est-à-dire comme un devoir religieux, dans le cadre de l’obéissance due au Seigneur. Ils doivent leur obéir « en toutes choses » ; Je. e., en tout ce qui relève de l’autorité parentale. Dieu n’a jamais confié un pouvoir illimité entre les mains des hommes. Les limites de l’autorité parentale sont déterminées en partie par la nature de la relation, en partie par les Écritures et en partie par l’état de la société ou la loi du pays. La nature de la relation suppose que les parents doivent être obéis en tant que parents, par gratitude et par amour ; et que leur volonté doit être consultée et respectée même lorsque leurs décisions ne sont pas définitives. Il ne faut pas leur obéir comme à des magistrats, comme s’ils étaient investis du pouvoir de faire ou d’administrer des lois civiles ; ni encore comme prophètes ou prêtres. Ils ne sont pas les maîtres de la conscience. Ils ne peuvent pas contrôler notre foi ou déterminer pour nous des questions de devoir de manière à nous exonérer de nos obligations personnelles. Étant un service d’amour, il n’admet pas de frontières strictement définies. Les enfants doivent se conformer aux désirs et être contrôlés par les jugements de leurs parents, dans tous les cas où cette soumission n’entre pas en conflit avec des obligations supérieures.
1 Le texte commun d’Éphésiens, v. 21, a ©en effet eoû, mais l’autorité des manuscrits est si nettement en faveur de Χριστού que cette lecture est presque universellement adoptée par les éditeurs et les commentateurs.
La règle biblique est simple et complète. Il n’entre pas dans les détails inutiles. Il prescrit la règle générale de l’obéissance. Les exceptions à cette règle doivent être telles qu’elles se justifient devant une conscience divinement éclairée, c’est-à-dire une conscience éclairée par la Parole et l’Esprit de Dieu. Le principe général donné dans la Bible dans tous ces cas est : « Il est juste d’obéir à Dieu plutôt qu’à l’homme. »
Ce commandement est assorti d’une promesse spéciale. Cette promesse a une forme théocratique telle qu’elle se présente dans le Décalogue : « Que tes jours soient longs sur le pays que L’ÉTERNEL, ton Dieu, te donne. » L’Apôtre, dans Éphésiens vi. 3, en omettant la dernière clause, la généralise, de sorte qu’elle ne s’applique pas à un pays ou à un peuple, mais à des enfants obéissants partout. La promesse annonce le dessein général de Dieu et un principe général de son gouvernement providentiel. « La main de l’homme diligent enrichit », telle est la règle générale, qui n’est pas invalidée si çà et là un homme diligent reste pauvre. Il est bon avec les enfants obéissants ; ils prospèrent dans le monde. Tel est le fait, et telle est la promesse divine. La famille étant la pierre angulaire de l’ordre social et de la prospérité, il s’ensuit que les familles dans lesquelles le plan et le dessein de Dieu sont le plus pleinement réalisés et réalisés.
De même que les enfants sont tenus d’honorer et d’obéir à leurs parents, les parents ont des devoirs non moins importants à l’égard de leurs enfants. Ces devoirs sont sommairement exprimés par l’apôtre dans Éphésiens vi. 4, d’abord sous une forme négative, puis sous une forme positive. « Vous, pères, ne provoquez pas vos enfants à la colère. C’est ce qu’ils ne doivent pas faire. Ils ne doivent pas exciter les mauvaises passions de leurs enfants par la colère, la sévérité, l’injustice, la partialité ou tout autre exercice indu de l’autorité. C’est un grand mal. C’est semer de l’ivraie au lieu du blé dans un sol fertile. La partie positive du devoir parental s’exprime par la direction globale : « Mais élevez-les dans l’éducation (παιδεία) et l’exhortation (1׳ου0εσία) du Seigneur ». Le premier de ces mots est complet, le second spécifique. L’un exprime l’ensemble du processus d’éducation ou de formation ; l’autre le devoir spécial d’avertissement et de correction. L'« éducation et l’exhortation » est d’être chrétien ; c’est-à-dire non seulement ce que Christ approuve et ordonne, mais ce qui est vraiment sien, c’est-à-dire ce qu’il exerce par sa parole et son Esprit par le parent comme son organe. « Christ est représenté comme exerçant cette éducation et cette exhortation, dans la mesure où il influence et contrôle le parent par son Esprit. » 1 Selon l’Apôtre, cet élément religieux ou chrétien est essentiel dans l’éducation des jeunes. L’homme a une nature religieuse aussi bien qu’intellectuelle. Négliger le premier serait aussi déraisonnable que de négliger le second et de faire de toute éducation une simple question d’entraînement physique. Nous devons agir en fonction des faits. C’est un fait que les hommes ont une nature morale et religieuse. C’est un fait que si leurs sentiments moraux et religieux sont éclairés et convenablement développés, ils deviennent droits, utiles et heureux ; D’autre part, si ces éléments de leur nature sont incultes ou pervertis, ils deviennent dégradés, misérables et méchants. C’est un fait que ce département de notre nature a autant besoin d’une culture juste que l’intellectuel ou le physique. C’est un fait que cette culture ne peut être réalisée que par la vérité inculquée dans l’esprit et imprimée dans la conscience. C’est un fait que cette vérité, comme le croient tous les chrétiens, est contenue dans les Saintes Écritures. C’est un fait, selon les Écritures, que le Fils éternel de Dieu est l’unique Sauveur des hommes, et que c’est par la foi en Lui et par l’obéissance à Lui, que les hommes sont délivrés de la domination du péché ; et c’est donc un fait qu’à moins que les enfants ne soient élevés dans l’éducation et l’exhortation du Seigneur, eux, et la société qu’ils constitueront ou contrôleront, iront à la destruction. Par conséquent, lorsqu’un État décide que l’instruction religieuse doit être bannie des écoles et des autres institutions littéraires, il se résout virtuellement à se détruire lui-même. On peut en effet dire qu’une telle résolution n’implique pas que l’enseignement des religions doive être négligé. Il déclare simplement que ce n’est pas une fonction de l’État, que c’est un devoir qui appartient à la famille et à l’Église. C’est plausible, mais c’est fallacieux.
1 Meyer, Commentaire in loco.
1. Toute l’éducation reçue par une grande partie de la population d’un pays est reçue dans ses écoles primaires. Si c’est irréligieux (dans le sens négatif, si dans ce cas il y a un tel sens), toute leur formation est irréligieuse.
2. Il faut se rappeler que le peuple chrétien d’un pays est l’Église de ce pays. Les chrétiens d’Antioche étaient l’Église d’Antioche, et les chrétiens de Rome étaient l’Église de Rome. De la même manière, les chrétiens aux États-Unis sont l’Église aux États-Unis. Comme donc les écoles appartiennent au peuple, comme elles sont ses organes pour l’éducation de ses enfants ; si les gens sont chrétiens, les écoles du droit doivent être chrétiennes. Toute loi qui déclare qu’il n’en sera pas ainsi est tyrannique. On peut dire que la loi n’interdit pas aux chrétiens d’avoir des écoles religieuses, elle dit seulement que ces écoles ne doivent pas être soutenues par l’argent public. Mais le peuple, c’est le public ; et si le peuple est chrétien, les chrétiens sont le public. Le sens d’une telle loi, par conséquent, est vraiment que les chrétiens ne doivent pas utiliser leur propre argent pour soutenir leurs propres écoles.
3. Si donc les hommes chrétiens constituent une nation, un État, un comté, une ville ou un village, ils ont le droit, auquel aucune puissance civile ne peut justement s’immiscer, d’avoir des écoles chrétiennes. Si quelqu’un qui n’est pas chrétien choisit de fréquenter de telles écoles, il ne devrait pas être obligé d’assister à l’instruction religieuse. Ils peuvent en tirer tous les avantages qu’ils recherchent, bien qu’ils omettent de s’occuper de ce qui est conçu pour les enfants de parents chrétiens.
4. Il est vrai que l’Église et l’Etat ne sont pas unis dans ce pays comme ils l’ont toujours été en Europe. Il est admis que cette séparation est sage. Mais il ne faut pas déduire de cette concession que l’État n’ait rien à voir avec la religion ; qu’il doit agir comme s’il n’y avait ni Christ ni Dieu. On a déjà remarqué qu’il est aussi impossible à l’État d’ignorer la loi morale. On peut admettre que l’Église et l’État sont, dans ce pays, aussi distincts que l’Église et une société de banque. Mais une société bancaire, si elle est composée de chrétiens, doit conduire ses affaires selon les principes chrétiens, dans la mesure où ces principes s’appliquent aux opérations bancaires. Ainsi une nation, ou un État, composé de chrétiens, doit être gouverné par le christianisme, dans la mesure où son esprit et ses préceptes s’appliquent aux questions de gouvernement civil. Si donc l’État suppose que l’éducation du peuple est une de ses fonctions, il est tenu, dans un pays chrétien, — un pays où les quatre-vingt-centièmes de la population sont chrétiens, — de diriger les écoles selon les principes chrétiens, autrement il foule aux pieds les droits les plus sacrés du peuple. Le peuple ne s’y soumettra jamais, jusqu’à ce qu’il perde tout intérêt pour sa religion. Personne ne doute que la Bible exige que l’éducation soit menée religieusement. « Ces paroles que je te prescris aujourd’hui seront dans ton cœur, et tu les enseigneras diligemment à tes enfants, et tu en parleras quand tu seras assis dans ta maison, et quand tu marcheras sur le chemin, et quand tu te coucheras, et quand tu te lèveras. » (Deut. vi. G, 7. et xi. 19.) « Il établit un témoignage en Jacob, et établit en Israël une loi qu’il commanda à nos pères, afin qu’ils les fassent connaître à leurs enfants ; afin que la génération à venir les connaisse, même les enfants qui naîtront, qui se lèveront et les annonceront à leurs enfants ; afin qu’ils mettent leur espérance en Dieu, et qu’ils n’oublient pas les œuvres de Dieu, mais qu’ils gardent ses commandements. (Psaume Ixxviii. 5, 6, 7.) « Éduquez un enfant dans la voie qu’il doit suivre, et quand il sera vieux, il ne s’en écartera pas. » (Prov. xxii. 6.) Les pères élèvent leurs enfants « dans l’éducation et l’exhortation du Seigneur ». (Éph. vi. 4.) Il ne s’agit pas de lois cérémonielles ou obsolètes. Ils lient la conscience des hommes tout autant que le commandement : « Tu ne voleras point. » Si les parents dirigent eux-mêmes l’éducation de leurs enfants, ce sont les principes sur lesquels elle doit être menée. S’ils confient ce travail à des enseignants, ils sont tenus, par la loi de Dieu, de veiller à ce que les enseignants tiennent compte de ces prescriptions divines ; S’ils confient le travail à l’État, ils ont l’obligation tout aussi sacrée de veiller à ce que l’État ne les viole pas. C’est une obligation à laquelle ils ne peuvent échapper.
5. Lors de la discussion des lois du dimanche, à la page précédente, on a fait valoir qu’il serait déraisonnable et injuste pour un homme qui adhérerait à une association d’hommes moraux, d’insister pour que les affaires de l’association soient conduites selon des principes immoraux ; s’il se joignait à une compagnie de manufacturiers chrétiens, il serait injuste de sa part d’exiger qu’ils violent les lois du christianisme. Donc, si un chrétien devait aller en Turquie, il serait absurde de sa part d’insister sur le fait que le Coran devrait être banni des écoles publiques. Il n’est pas moins absurde pour un homme d’exiger que les chrétiens de ce pays renoncent à leur religion. Le christianisme exige que l’éducation dans tous ses départements soit menée religieusement. Si un groupe d’hommes fondait une école ou une université d’où toute instruction religieuse serait bannie, la loi du pays le lui permettrait sans doute. Mais il ne faut pas que la loi défende que la religion du peuple soit enseignée dans des écoles soutenues par l’argent du peuple.
6. Le bannissement de l’influence religieuse de nos écoles est impossible. Si un homme n’est pas religieux, il est irréligieux ; S’il n’est pas croyant, il est incroyant. Cela est aussi vrai pour les organisations et les institutions que pour les individus. Byron a prononcé une vérité profonde lorsqu’il a mis dans la bouche de Satan les mots : « Celui qui ne se prosterne pas devant Dieu, s’est prosterné devant moi. » Si vous bannissez la lumière, vous êtes dans les ténèbres. Si vous bannissez le christianisme des écoles, vous les rendrez infidèles. Si un enfant est élevé dans l’ignorance de Dieu, il devient athée. S’il n’a jamais enseigné la loi morale, sa nature morale est aussi peu développée que celle d’un païen. Cette controverse est donc une controverse entre le christianisme et l’infidélité ; entre la lumière et l’obscurité ; entre le Christ et Bélial.1
1 On comprend si peu cette affaire, qu’un des journaux les plus respectables et les plus influents du pays, annonçait récemment qu’un des cantons de la Suisse avait interdit toute instruction religieuse dans les écoles, comme preuve que « le monde commençait à se lasser du sacerdotalisme ». Ainsi la religion se réduit au sacerdotalisme ou à la prêtrise.
Il est admis que cette question est encombrée de difficultés pratiques lorsque les habitants d’un pays diffèrent considérablement dans leurs convictions religieuses. Dans de tels cas, il vaudrait beaucoup mieux soumettre la question à la population de chaque district scolaire, plutôt que d’interdire toute instruction religieuse dans les écoles publiques par une loi générale. Ce serait, en fait, les rendre infidèles, par déférence pour une minorité numériquement insignifiante du peuple. On ne cesse de dire que l’État, s’il pourvoit à autre chose qu’à l’éducation laïque, sort de sa sphère ; que le gouvernement civil n’est pas plus organisé pour enseigner la religion qu’une compagnie de pompiers. Cette dernière assertion peut être admise dans la mesure où celle-ci est que la même règle s’applique aux deux cas. C’est-à-dire que tous les hommes individuels et toutes les associations d’hommes sont tenus d’agir selon les principes de la morale et de la religion, dans la mesure où ces principes sont applicables à l’œuvre qu’ils ont à accomplir. Les hommes ne peuvent pas légalement tricher dans le domaine bancaire, et ils ne peuvent pas non plus légitimement leurs affaires le jour du Seigneur. De même, si Dieu exige que l’éducation soit faite religieusement, l’État n’a pas plus le droit de bannir la religion de ses écoles qu’il n’a le droit de violer la loi morale. Tout se résume à ceci : les chrétiens sont tenus par le commandement exprès de Dieu, ainsi que par le souci du salut de leurs enfants et de l’intérêt supérieur de la société, de veiller à ce que leurs enfants soient élevés « dans l’éducation et l’exhortation du Seigneur » ; ce qu’ils sont tenus de faire ; par l’intermédiaire de l’État s’ils le peuvent ; sans elle, s’il le faut.
Obéissance due aux magistrats civils.
Si le cinquième commandement enjoint comme principe général le respect et l’obéissance à nos supérieurs, il comprend nos obligations envers les dirigeants civils ; il nous est commandé de « nous soumettre à toutes les ordonnances de l’homme pour l’amour du Seigneur : que ce soit au roi comme suprême ; ou aux gouverneurs, comme à ceux qu’il a envoyés pour le châtiment des méchants, et pour la louange de ceux qui font le bien. Car telle est la volonté de Dieu. (1 Pierre ii. Toute la théorie du gouvernement civil et le devoir des citoyens envers leurs chefs sont exposés en détail par l’Apôtre dans Romains xiii. 1-5. C’est là qu’il est enseigné, (1.) Que toute autorité vient de Dieu. 2° Que les magistrats civils sont ordonnés de Dieu. (3) Cette résistance à eux, c’est une résistance à Lui ; ce sont des ministres qui exercent son autorité parmi les hommes. (4) Que l’obéissance à eux doit être rendue comme une question de conscience, comme une partie de notre obéissance à Dieu.
D’où il résulte : 1° que le gouvernement civil est une ordonnance divine. Il ne s’agit pas simplement d’une institution humaine facultative ; quelque chose que les hommes sont libres d’avoir ou de ne pas avoir, comme ils l’entendent. Elle n’est fondée sur aucun pacte social ; c’est quelque chose que Dieu commande. La Bible, cependant, n’enseigne pas qu’il y ait une seule forme de gouvernement civil qui soit toujours et partout obligatoire. La forme du gouvernement est déterminée par la providence de Dieu et la volonté du peuple. Elle change au fur et à mesure que l’état de la société change. À plus forte raison est-elle impliquée dans la proposition que le gouvernement est une institution divine, que Dieu désigne les personnes qui doivent exercer les diverses fonctions du gouvernement ; ou le mode de leur nomination ; ou l’étendue de leurs pouvoirs.
Deuxièmement, il est compris dans la doctrine de l’Apôtre, que les magistrats tirent leur autorité de Dieu ; ils sont ses ministres ; ils Le représentent. Dans un certain sens, ils représentent le peuple, car ils peuvent être choisis par lui pour être les dépositaires de cette autorité divinement déléguée ; mais les puissances en place sont ordonnées par Dieu ; C’est sa volonté qu’ils soient, et qu’ils soient revêtus d’autorité.
Troisièmement, il s’ensuit que l’obéissance aux magistrats et aux lois du pays est un devoir religieux. Nous devons nous soumettre à « toutes les ordonnances de l’homme », pour l’amour du Seigneur, par égard pour Lui, comme l’exprime saint Pierre ; ou « pour l’amour de la conscience », comme la même idée est exprimée par saint Paul. Nous sommes tenus d’obéir aux magistrats, non seulement parce que nous avons promis de le faire ; ou parce que nous les avons nommés ; ou parce qu’ils sont sages ou bons ; mais parce que telle est la volonté de Dieu. De la même manière, les lois du pays doivent être observées, non pas parce que nous les approuvons, mais parce que Dieu a ordonné une telle obéissance. C’est une question d’une grande importance ; C’est le seul fondement stable du gouvernement civil et de l’ordre social. Il y a une grande différence entre l’obéissance aux hommes et l’obéissance à Dieu ; entre mentir aux hommes et mentir à Dieu ; et entre la résistance aux hommes et la résistance à Dieu. Ce principe traverse la Bible, qui enseigne que toute autorité vient de Dieu, et donc que toute obéissance à ceux qui détiennent l’autorité fait partie de notre obéissance à Dieu. Cela s’applique non seulement aux citoyens et aux dirigeants, mais aussi aux parents et aux enfants, aux maris et aux femmes, et même aux maîtres et aux esclaves. Dans toutes ces relations, nous ne devons pas agir comme les serviteurs des hommes, mais comme les serviteurs de Dieu. Cela donne à l’autorité par quiconque a exercé une sanction divine ; elle lui donne le pouvoir sur la conscience ; et elle élève même le service subalterne au rang d’élément de la liberté glorieuse des fils de Dieu. Aucun homme ne peut avoir un esprit servile qui sert Dieu en rendant obéissance aux hommes. Seul un peuple respectueux des lois peut être libre ou prospère ; et aucun peuple ne peut être durablement respectueux de la loi s’il ne croit pas vraiment que « les pouvoirs en place sont ordonnés par Dieu ». Quiconque, par conséquent, résiste à la puissance (ceux-là dans l’autorité), résiste à l’ordonnance de Dieu : et ceux qui résistent recevront pour eux-mêmes la damnation (κρίρ.α). C’est-à-dire que Dieu les punira.
Quatrièmement, un autre principe inclus dans la doctrine de l’apôtre est que l’obéissance est due à tout gouvernement de facto, quelle que soit son origine ou son caractère. Ses instructions furent écrites sous le règne de Néron, et lui enjoignirent de lui obéir. Les premiers chrétiens n’étaient pas appelés à examiner les lettres de créance de leurs dirigeants actuels, chaque fois que la garde prétorienne choisissait de déposer un empereur et d’en installer un autre. Le peuple d’Angleterre n’était pas libéré de ses obligations envers Guillaume et Alary une fois établi sur le trône, parce qu’il pouvait penser que Jacques II. avait droit à la Couronne. Nous devons obéir « aux pouvoirs en place ». Ils sont en autorité par la volonté de Dieu, qui est révélée par les faits, aussi clairement que par les paroles. C’est par Lui. que « les rois règnent et les princes décrètent la justice ». « Il en élève un, et en abat un autre. »
Cinquièmement, les Écritures enseignent clairement qu’aucune autorité humaine n’est censée être illimitée. Une telle limitation peut ne pas être exprimée, mais elle est toujours implicite. Le commandement « Tu ne tueras point » est illimité dans sa forme, mais les Écritures reconnaissent que, dans certains cas, l’homicide peut être non seulement justifiable, mais obligatoire. Les principes qui limitent l’autorité du gouvernement civil et de ses agents sont simples et évidents. La première est que les gouvernements et les magistrats n’ont d’autorité que dans leurs sphères légitimes. Comme le gouvernement civil est institué pour la protection de la vie et de la propriété, pour le maintien de l’ordre, pour le châtiment des malfaiteurs et pour la louange de ceux qui font le bien, il n’a à voir qu’avec la conduite ou les actes extérieurs des hommes. Il ne peut pas se préoccuper de leurs opinions, qu’elles soient scientifiques, philosophiques ou religieuses. Une loi du Parlement ou du Congrès, selon laquelle les Anglais ou les Américains seraient matérialistes ou idéalistes, serait une absurdité et une nullité. Le magistrat ne peut pas entrer dans nos familles et assumer l’autorité parentale, ou dans nos églises et enseigner en tant que ministre. Un juge de paix ne peut assumer les prérogatives d’un gouverneur d’un État ou d’un président des États-Unis. Hors de sa sphère légitime, un magistrat cesse d’être magistrat. Une seconde limite n’est pas moins évidente. Aucune autorité humaine ne peut obliger un homme à désobéir à Dieu. Si tout pouvoir vient de Dieu, il ne peut pas être légitime lorsqu’il est utilisé contre Dieu. C’est une évidence. Les apôtres, lorsqu’il leur fut interdit de prêcher l’Évangile, refusèrent d’obéir. Quand Daniel refusa de se prosterner devant l’image que Nebucadnetsar avait faite ; quand les premiers chrétiens refusaient d’adorer les idoles ; et quand les martyrs protestants refusèrent de professer les erreurs de l’Église romaine, ils se recommandèrent tous à Dieu et s’assurèrent la révérence de tous les hommes de bien. Sur ce point, il ne peut y avoir de contestation. Il est important que ce principe soit non seulement reconnu, mais aussi publiquement avoué. La sainteté de la loi et la stabilité des gouvernements humains dépendent de la sanction de Dieu. S’ils ne reposent pas sur Lui, ils ne se reposent sur rien. Ils n’ont sa sanction que lorsqu’ils agissent selon sa volonté ; c’est-à-dire conforme au dessein de leur nomination et en harmonie avec la loi morale.
Sixièmement, un autre principe général est que la question de savoir quand le gouvernement civil peut et doit être désobéi est une question que chaque homme doit décider pour lui-même. C’est une question de jugement privé. Chaque homme doit répondre par lui-même à Dieu, et par conséquent, chaque homme doit juger par lui-même, si un acte donné est un péché ou non. Daniel jugea par lui-même. Schadrac aussi, Méschec et Abed-Nego. Les apôtres aussi, et les martyrs aussi.
Une loi ou un commandement inconstitutionnel est nul ; Personne ne pèche en l’ignorant. Il désobéit, cependant, à ses risques et périls. Si son jugement est juste, il est libre. S’il est erroné, de l’avis du tribunal compétent, il doit subir la peine. Il y a une distinction évidente à faire entre la désobéissance et la résistance.
Un homme est tenu de désobéir à une loi ou à un commandement qui l’oblige à pécher, mais il ne s’ensuit pas qu’il soit libre de résister à son exécution. Les apôtres refusèrent d’obéir aux autorités juives ; mais ils se soumirent au châtiment qui leur était infligé. Ainsi, les martyrs chrétiens ont désobéi aux lois qui les obligeaient à adorer des idoles, mais ils n’ont opposé aucune résistance à l’exécution de la loi. Les Quakers désobéissent à la loi exigeant le service militaire, mais se soumettent discrètement à la peine. C’est évidemment juste. Le droit de résistance est dans la communauté. C’est le droit de révolution que Dieu sanctionne, et que les hommes de bien ont exercé dans les siècles passés pour le salut de la liberté civile et religieuse. Lorsqu’un gouvernement ne répond pas au but pour lequel Dieu l’a ordonné, le peuple a le droit de le changer. Un père, s’il abuse honteusement de son pouvoir, peut légitimement être privé de l’autorité sur ses enfants.1
1 Tous ces sujets sont exposés en détail dans les grands ouvrages de Jurisprudence et de Politique civile. Pour une discussion populaire à leur sujet, on peut se référer à Discussions sur les principes de l’Église. Par William Cunningham, D. D., directeur du New College, Édimbourg. Edimbourg : T. et T. Clark, 1863, en particulier les chapitres vi. et vii. Voir aussi l’article de la Princeton Review de janvier 1851 intitulé « Civil Government ».
L’Apôtre ordonne aux chrétiens : « Obéissez à ceux qui ont le pouvoir sur vous, et soumettez-vous, car ils veillent sur vos âmes. » « Souviens-toi de ceux qui ont le pouvoir sur toi, qui t’ont annoncé la parole de Dieu. » (Héb. xiii. 17, 7.) Notre-Seigneur a dit à ses disciples que si un frère offensant résistait à d’autres moyens pour l’amener à la repentance, son offense devait être racontée à l’Église ; et que s’il négligeait d’écouter l’Église, il devait être considéré comme un païen et un publicain. (Matth., xviii. 17.)
Les principes qui règlent notre obéissance à l’Église sont à peu près les mêmes que ceux qui concernent nos rapports avec l’État.
1. L’Église visible est une institution divine. En un sens, c’est même une société volontaire, en ce sens qu’aucun homme ne peut être contraint d’y adhérer. S’il y adhère, ce doit être de son plein gré. Néanmoins, c’est la volonté de Dieu que l’Église visible en tant que corps organisé existe ; et tout homme qui entend l’Évangile est tenu de s’inscrire parmi ses membres et de se soumettre à son autorité.
2. Tout pouvoir de l’Église vient de Dieu, et tous les officiers légitimes de l’Église sont ses ministres. Ils agissent en son nom et par son autorité. Leur résistance est donc une résistance à l’ordonnance de Dieu.
3. Toutes les prérogatives de l’Église et tous les pouvoirs de ses officiers sont consacrés dans la Parole de Dieu.
4. Les prérogatives de l’Église sont, premièrement, d’enseigner. Sa grande mission est d’instruire toutes les nations. Il s’agit d’enseigner ce que Dieu a révélé dans sa parole sur ce que les hommes doivent croire et ce qu’ils doivent faire. Au-delà des limites de la révélation contenue dans les Écritures, l’Église n’a pas plus d’autorité pour enseigner que n’importe quelle autre association entre les hommes. Deuxièmement, l’Église a le droit et le devoir d’ordonner et de célébrer le culte public, d’administrer les sacrements, de choisir et d’ordonner ses propres officiers, et de faire tout ce qui est nécessaire pour sa propre perpétuité et son extension. Troisièmement, c’est la prérogative de l’Église d’exercer une discipline sur ses propres membres, et de les recevoir ou de les rejeter selon le cas.
5. En ce qui concerne l’organisation extérieure de l’Église, tous les chrétiens conviennent qu’il y a certaines règles établies dans la Parole de Dieu qui sont d’une obligation universelle et perpétuelle. Toutes les Églises chrétiennes, cependant, ont agi en partant du principe qu’au-delà de ces règles prescrites, l’Église dispose d’un certain pouvoir discrétionnaire pour modifier son organisation et ses organes en fonction des diverses urgences.
6. L’Église visible étant organisée dans un but déterminé, sa puissance venant de Dieu, et ses prérogatives étant toutes énoncées dans les Écritures, il s’ensuit non seulement que ses pouvoirs sont limités dans les limites ainsi prescrites, mais aussi que la question de savoir si ses décisions et ses injonctions doivent être obéies doit être tranchée par tous ceux qui sont intéressés, sous sa propre responsabilité. Si la décision est dans les limites où Dieu a confiné l’action de l’Église, et conformément aux Écritures, elle doit être obéie. S’il transcende ces limites, ou s’il est contraire à la parole de Dieu, il doit être ignoré. Si donc l’Église, par l’intermédiaire de l’un de ses organes, se chargeait de décider des questions de science pure, d’économie politique ou de droit civil, de telles décisions ne serviraient à rien. Ou, s’il devait déclarer vrai ce que les Écritures déclarent être faux ; ou que pour être faux ce que les Écritures déclarent être vrai, un tel jugement ne lierait la conscience de personne. Et de la même manière, si l’Église déclare pécheresse une chose que la parole de Dieu enseigne comme étant juste ou indifférente ; ou que pour être juste et obligatoire ce que ce mot déclare être mauvais, alors encore son enseignement est vide de toute autorité. Tout cela est inclus dans le principe que nous devons obéir à Dieu plutôt qu’à l’homme ; et que quant au moment où l’obéissance à l’homme entre en conflit avec notre allégeance à Dieu, chaque homme, d’après la nature du cas, doit juger par lui-même. Personne ne peut estimer l’importance de ces principes simples. C’est en les méconnaissant que l’Église en est venue peu à peu à nier le droit de jugement privé ; de subordonner les Écritures à ses décisions ; et de se mettre à la place de Dieu. C’est ainsi qu’elle a imposé à la foi des hommes des doctrines contraires aux Écritures ; a rendu obligatoires des multitudes de choses que Dieu n’a jamais prescrites ; et déclara que les plus grands péchés, tels que la trahison, la persécution et le massacre, étaient des devoirs chrétiens.
Tandis donc que le devoir d’obéissance à nos supérieurs et de soumission à la loi, tel qu’il est prescrit par le cinquième commandement, est la source de tout ordre dans la famille, dans l’Église et dans l’État ; la limitation de ce devoir par notre obligation supérieure envers Dieu, est le fondement de toute liberté civile et religieuse.
§ 10. Le Sixième Commandement.
Ce commandement, tel qu’il a été exposé par notre Seigneur (Matt. v. 21, 22), interdit la méchanceté dans tous ses degrés et dans toutes ses manifestations. La Bible reconnaît la distinction entre la colère et la méchanceté. La première est permise, en temps opportun ; l’autre est dans sa nature, et donc toujours, mauvaise. L’une est une émotion naturelle ou constitutionnelle qui découle de l’expérience ou de la perception d’un tort, et qui comprend non seulement la désapprobation, mais aussi l’indignation, et le désir de réparer ou de punir d’une manière ou d’une autre le tort infligé. L’autre comprend la haine et le désir d’infliger le mal pour satisfaire cette passion mauvaise. On dit que Notre-Seigneur s’est mis en colère ; mais en Lui il n’y avait ni méchanceté ni ressentiment. Il était l’Agneau de Dieu ; quand il a été insulté, il n’a plus insulté ; quand il souffrait, il ne menaçait pas ; Il a prié pour ses ennemis même sur la croix.
Dans les divers commandements du Décalogue, la manifestation la plus élevée d’un mal est choisie pour l’interdiction, avec l’intention d’inclure toutes les formes mineures du même mal. Dans l’interdiction du meurtre, tous les degrés et toutes les manifestations de sentiment malveillant sont interdits. La Bible accorde une valeur particulière à la vie de l’homme, d’abord parce qu’il a été créé à l’image de Dieu. Il n’est pas seulement semblable à Dieu dans les éléments essentiels de sa nature, mais il est aussi le représentant de Dieu sur la terre. Une indignité ou une blessure qui lui est infligée est un acte d’irrévérence envers Dieu. Et deuxièmement, tous les hommes sont frères. Ils sont d’un seul sang ; enfants d’un père commun. Pour ces raisons, nous sommes tenus d’aimer et de respecter tous les hommes en tant qu’hommes ; et de faire tout ce qui est en notre pouvoir non seulement pour protéger leur vie, mais aussi pour promouvoir leur bien-être. Le meurtre est donc le plus grand crime qu’un homme puisse commettre contre un autre.
Comme le sixième commandement interdit l’homicide volontaire, il est clair que l’infliction de la peine capitale n’est pas incluse dans l’interdiction. Ce châtiment n’est pas infligé pour satisfaire la vengeance, mais pour satisfaire la justice et pour la préservation de la société. Comme il s’agit là de fins légitimes et des plus importantes, il s’ensuit que la peine capitale du meurtre est également légitime. Une telle peine, dans le cas d’un meurtre, est non seulement légale, mais aussi obligatoire.
1. Parce qu’il est expressément dit dans la Bible : « Quiconque verse le sang de l’homme, c’est par l’homme que son sang sera versé, car il s’est fait homme à l’image de Dieu. » (Gen. ix. 6.) Il est clair qu’il s’agit d’une obligation perpétuelle, parce qu’elle a été donnée à Noé, le deuxième chef de la race humaine. Il n’était donc pas destiné à une époque ou à une nation particulière. C’est l’annonce d’un principe général de justice ; une révélation de la volonté de Dieu. De plus, la raison assignée à la loi est une raison permanente. L’homme a été créé à l’image de Dieu ; et c’est pourquoi quiconque verse son sang, c’est par l’homme que son sang sera versé. Cette raison a autant de force à un moment ou à un endroit qu’à tout autre. Le commentaire de Rosenmüller sur cette clause est : « Cum homo ad Dei imaginem sit factus, æquum est, ut, qui Dei imaginem violavit et destruxit, occidatur, cum Dei imagini injuriam faciens, ipsum Deum, illius auctorem, petierit. » 1 Il s’agit là d’une considération très solennelle et d’une grande application. Elle s’applique non seulement au meurtre et à d’autres les blessures infligées à la personne des hommes, mais aussi à tout ce qui tend à les dégrader ou à les souiller. L’apôtre l’applique même aux mauvaises paroles, ou à la suggestion de pensées corrompues. Si c’est un outrage de souiller la statue ou le portrait d’un grand et bon homme, ou d’un père ou d’une mère, combien plus grand est l’outrage lorsque nous souillons l’image impérissable de Dieu imprimée sur l’âme immortelle de l’homme. Nous trouvons l’injonction que le meurtrier doit sûrement être mis à mort, répété encore et encore dans la loi mosaïque. (Ex. xxi. 12, 14 ; Lév. xxiv. 17 ; Num. xxxv. 21 ; Bosseler. xix. 11, 13.)
1 Scholia in Fetus Testamentum, Leipzig, 1795.
Il y a des reconnaissait, dans le Nouveau Testament, l’obligation continue de la loi divine que le meurtre soit puni de mort. Dans Romains xiii. 4, l’Apôtre dit que le magistrat « ne porte pas l’épée en vain ». L’épée était portée comme symbole du pouvoir de la peine capitale. Même chez les écrivains profanes, dit Meyer^ « porter l’épée » par un magistrat était l’emblème du pouvoir sur la vie et sur la mort. Le même Apôtre a dit (Actes, XXV, 11) : « Si je suis coupable, ou si j’ai commis quelque chose qui mérite la mort, je refuse de ne pas mourir ; » ce qui implique clairement que, dans son jugement, il y a eu des délits, pour lesquels la peine appropriée est la mort.
2. Outre ces arguments tirés de l’Écriture, il y en a d’autres tirés de la justice naturelle. C’est un précepte de notre nature morale que le crime soit puni ; qu’il y ait une juste proportion entre l’infraction et la peine ; et que la mort, la peine la plus élevée, était le châtiment approprié pour le plus grand de tous les crimes. Que tel soit le jugement instinctif des hommes, c’est ce que prouve la difficulté qu’il y a souvent à empêcher le peuple de se venger sommairement dans les cas de meurtres atroces. Ce sentiment est si fort qu’une espèce de justice sauvage ne manquera pas d’intervenir pour remplacer la négligence judiciaire. Une telle justice, parce qu’elle est anarchique et impulsive, est trop souvent erronée et erronée, et, dans un état stable de la société, elle est toujours criminelle. Comme il est dans la nature des hommes que si l’on abolit la peine de mort régulière et légitime comme peine judiciaire, elle sera infligée par le vengeur du sang, ou par des assemblées tumultueuses du peuple, la société a à choisir entre assurer à l’homicide un procès équitable par les autorités constituées, et l’abandonner à l’aveugle esprit de vengeance.
3. L’expérience enseigne que là où la vie humaine est sous-évaluée, elle est précaire ; que là où le meurtrier s’échappe impunément ou n’est pas suffisamment puni, les homicides se multiplient effroyablement. La question pratique est donc la suivante : Qui doit mourir ? L’innocent ou l’assassin ?
Homicide en état de légitime défense.
Que l’homicide en état de légitime défense ne soit pas interdit par le sixième commandement, c’est clair, (1). Parce qu’un tel homicide est n’est pas malveillante et, par conséquent, n’entre pas dans le champ d’application de l’interdiction. (2) Parce que l’instinct de conservation est un instinct de notre nature, et par conséquent une révélation de la volonté de Dieu. (3) Parce que c’est un précepte de la raison et de la justice naturelle que si de deux personnes l’une doit mourir, ce doit être l’agresseur et non la personne lésée. (4.) Parce que le jugement universel des hommes, et la Parole de Dieu, déclarent innocent l’homme qui tue un autre pour défendre sa propre vie ou celle de son prochain.
On admet que la guerre est un des maux les plus affreux qu’on puisse infliger à un peuple ; qu’elle implique la destruction de biens et de vies humaines ; qu’elle démoralise à la fois les vainqueurs et les vaincus ; qu’elle visite des milliers de non-combattants avec toutes les misères de la pauvreté, du veuvage et de l’orphelinat ; et qu’elle tend à arrêter le progrès de la société dans tout ce qui est bon et désirable. Dieu domine les guerres dans de nombreux cas, comme Il le fait pour la tornade et le tremblement de terre, pour l’accomplissement de ses desseins bienveillants, mais cela ne prouve pas que la guerre en elle-même n’est pas un grand mal. Il fait la colère de l'homme pour Le louer. Il est admis que les guerres entreprises pour satisfaire l’ambition, la cupidité ou le ressentiment des dirigeants ou du peuple sont antichrétiennes et mauvaises. Il est également admis que la grande majorité des guerres qui ont dévasté le monde ont été injustifiables aux yeux de Dieu et des hommes. Néanmoins il ne s’ensuit pas que la guerre doive être condamnée dans tous les cas.
1. Cela est prouvé parce que le droit de légitime défense appartient aussi bien aux nations qu’aux individus. Les nations sont tenues de protéger la vie et les biens de leurs citoyens. S’ils sont attaqués par la force, la force peut être légitimement utilisée pour les protéger. Les nations ont aussi le droit de défendre leur propre existence. Si cela est mis en danger par la conduite d’autres nations, ils ont le droit naturel de se protéger. Un La guerre peut être défensive et pourtant, dans un sens, agressive. En d’autres termes, la légitime défense peut dicter et rendre nécessaire la première agression. Un homme n’est pas obligé d’attendre qu’un meurtrier frappe réellement son coup. Il suffit qu’il voie des manifestations indéniables d’un dessein hostile. Ainsi, une nation n’est pas tenue de Attendez que ses territoires soient effectivement envahis et que ses citoyens soient assassinés, avant de faire appel aux armes. Il suffit qu’il y ait des preuves claires de la part d’une autre nation de l’intention de commencer les hostilités. Bien qu’il soit facile de poser Si l’on considère que la guerre n’est justifiable qu’en tant que moyen de légitime défense, l’application pratique de ce principe est semée d’embûches. La moindre agression contre les biens nationaux, ou la moindre porter atteinte aux droits nationaux, peut être considérée comme le premier pas vers l’extinction nationale, et justifie donc les mesures de réparation les plus extrêmes. Une nation peut penser qu’un certain agrandissement de territoire est nécessaire à sa sécurité, et, par conséquent, qu’elle a le droit d’entrer en guerre pour s’en assurer. Ainsi, un homme peut dire qu’une partie de la ferme de son voisin est nécessaire à la pleine jouissance de ses propres biens, et par conséquent qu’il a le droit de se les approprier. Il ne faut pas oublier que les nations sont aussi liées par la loi morale que les hommes individuels ; et par conséquent que ce qu’un homme ne peut pas faire pour protéger ses propres droits, et sous prétexte de légitime défense, une nation ne peut pas le faire. Une nation est donc tenue de faire preuve d’une grande indulgence et d’adopter tous les autres moyens disponibles pour redresser les torts, avant de se plonger elle-même et les autres dans toutes les misères démoralisantes de la guerre.
2. La licéité de la guerre défensive ne repose cependant pas sur exclusivement sur ces principes généraux de justice ; elle est clairement reconnue dans l’Écriture. Dans de nombreux cas, sous l’Ancien Testament, de telles guerres ont été commandées. Dieu a doté les hommes avec des qualifications spéciales en tant que guerriers. Il répondit, lorsqu’il fut consulté par l’urim et le thummim, ou par les prophètes, sur la convenance des entreprises militaires (Juges, xx. 27 et suiv., 1 Sam. xiv. 37, xxiii. 2, 4 ; 1 Rois xxii. 6 et suiv.) ; et il intervenait souvent miraculeusement en faveur de son peuple lorsqu’il était engagé dans une bataille. Beaucoup de Psaumes de David, dictés par l’Esprit, sont soit des prières pour l’assistance divine dans la guerre ou l’action de grâces pour la victoire. Il est donc très clair que le Dieu que les patriarches et les prophètes n’a pas condamné la guerre, quand le choix entre la guerre et l’anéantissement. Il est très clair que si les Israélites n’avaient pas été autorisés à se défendre contre leurs voisins païens, ils auraient été bientôt extirpés, et leur religion aurait péri avec eux.
Comme les principes essentiels de la morale ne changent pas, Ce qui a été permis ou commandé sous une dispensation ne peut pas être illicite sous une autre, à moins qu’une nouvelle révélation ne l’interdise. Le Nouveau Testament, cependant, ne contient aucune révélation de ce genre. Il n’est pas dit, comme dans le cas du divorce, que la guerre aux Hébreux à cause de la dureté de leur cœur, mais que, sous l’Évangile, une nouvelle la loi devait prévaloir. Ce silence même du Nouveau Testament laisse la règle du devoir de l’Ancien Testament sur ce sujet toujours en vigueur. Par conséquent, bien qu’il n’y ait pas de déclaration expresse à ce sujet, car aucune n’était nécessaire, Nous trouvons la légalité de la guerre tranquillement assumée. Quand les soldats demandèrent à Jean-Baptiste ce qu’ils devaient faire pour se préparer au royaume de Dieu, il ne leur dit pas qu’ils devaient abandonner la profession des armes. Le centurion, dont notre Seigneur louait si hautement la foi (Matt. VIII. 5-13), n’a pas été blâmé pour avoir été un soldat. Ainsi aussi le centurion, homme pieux, Dieu, dans une vision, ordonna d’envoyer chercher Pierre, et sur qui, ainsi que ses associés, selon le récit du dixième chapitre des Actes, le Saint-Esprit vint avec des dons miraculeux, fut autorisé à rester dans l’armée d’un empereur païen, même s’il lui fut permis de rester dans l’armée d’un empereur païen. Si les magistrats, comme nous l’apprenons du treizième chapitre de l’épître aux Romains, sont armés d’un droit ou d’un pouvoir de vie et de mort sur leurs propres citoyens, ils ont certainement le droit de déclarer la guerre en cas de légitime défense.
Dans les premiers âges de l’Église, il y avait une grande répugnance à s’engager dans le service militaire, et les pères de l’Église à Les temps ont justifié cette réticence en remettant en question la légalité de toutes les guerres. Mais les véritables sources de cette opposition des chrétiens à entrer dans l’armée, c’est qu’ils se donnaient ainsi eux-mêmes jusqu’au service d’une puissance qui persécutait leur religion ; et que les usages idolâtres étaient inséparablement liés à fonctions militaires. Lorsque l’empire romain devint chrétien, et que la croix fut substituée à l’aigle sur les étendards de l’armée, cette opposition s’éteignit, jusqu’à ce qu’enfin nous entendions parler de prélats combattants, et d’ordres militaires de moines.
Aucune Église chrétienne historique n’a prononcé tous les d’être illégale. La Confession d’Augsbourg 1 dit expressément qu’il est convenable que les chrétiens agissent en tant que magistrats, et entre autres choses « jure bellare, militare », etc. Et les presbytériens en particulier ont montré qu’il n’est pas contre leur conscience de lutter jusqu’à la mort pour leurs droits et leurs libertés.
1 I. xvi. 2 ; Hase , Libri Symbolici, 3e édit., p. 14.
Il est concevable que les hommes qui ne croient pas en Dieu ou en un état futur d’existence, devraient penser qu’il est permis de se réfugier dans l’anéantissement des misères de cette vie. Mais c’est le cas inexplicable, sauf dans l’hypothèse d’une folie temporaire ou permanente, qu’un homme se précipite sans y être appelé dans les châtiments de l’éternité. Le suicide est donc le plus fréquent chez les qui ont perdu toute foi en la religion. 2 C’est un crime très compliqué ; Notre vie n’est pas la nôtre posséder; Nous n’avons pas plus le droit de détruire notre vie que nous n’avons le droit de détruire la vie d’un prochain. Le suicide est donc un meurtre de soi. C’est la désertion du poste que Dieu nous a assigné ; c’est un refus délibéré de se soumettre à sa volonté ; c’est un crime qui n’admet aucun repentir, et par conséquent implique la perte de l’âme.
2 On estime qu’un décès sur 175 à Londres est un suicide, à Xew York, un sur 172, à Vienne, un à l’ICO, et à Paris, un sur 72.
Le duel est une autre violation du sixième commandement. Ses défenseurs la défendent sur le même principe que celui sur lequel la guerre internationale est défendue. Comme les nations indépendantes n’ont pas de tribunal commun auquel elles puissent recourir pour réparer les préjudices, elles sont fondées, en vertu du principe de la légitime défense, à recourir aux armes pour la protection de leurs droits. De la même manière, dit-on, il y a des infractions pour lesquelles la loi du pays n’offre aucune réparation et, par conséquent, l’individu doit être autorisé à demander réparation pour lui-même. Mais (1.) Il n’y a pas de mal pour lequel la loi n’offre pas ou ne devrait pas offrir réparation. (2.) La réparation demandée dans le duel est injustifiable. Personne n’a le droit de tuer un homme pour un affront ou une insulte. Ôter la vie à un homme pour une parole hâtive, ou même pour une blessure grave, est un meurtre aux yeux de Dieu, qui a ordonné la peine de mort comme punition seulement pour les crimes les plus atroces. (3.) Le remède est absurde ; car le plus souvent, c’est la partie lésée qui perd la vie. (4) Le duel est la cause des plus grandes souffrances pour les parties innocentes, qu’aucun homme n’a le droit d’infliger pour satisfaire son orgueil ou son ressentiment. (5) Le survivant d’un duel fatal s’ensuit, à moins que son cœur et sa conscience ne soient marqués, une vie de misère.
§ 11. Le Septième Commandement.
Ce commandement, comme nous l’apprenons de l’exposé de notre Seigneur, donné dans son sermon sur la montagne, interdit toute impureté dans la pensée, la parole et le comportement. Comme l’organisation sociale de la société est fondée sur la distinction des sexes, et que le bien-être de l’État, la pureté et la prospérité de l’Église reposent sur la sainteté des relations familiales, il est de la dernière importance que les rapports normaux ou divinement constitués des sexes soient conservés dans leur intégrité.
Parmi les questions importantes à considérer sous le titre de ce commandement, la première est celle-ci : La Bible enseigne-t-elle qu’il y a une vertu spéciale dans une vie de célibat ? Il s’agit en fait d’une question de savoir s’il y a eu une erreur dans le création de l’homme.
1. Le fait même que Dieu a créé l’homme, homme et femme, Déclarer qu’il n’était bon ni pour l’un ni pour l’autre d’être seuls, et de se marier dans le paradis, devrait être décisif à ce sujet. La doctrine qui dégrade le mariage en le rendant moins saint, a son fondement dans le manichéisme ou le gnosticisme. Elle suppose que le mal est essentiellement lié à la matière ; que le péché a son siège et sa source dans le corps ; que la sainteté n’est accessible que par l’ascèse et la négligence du corps ; que parce que la « vita angelica » est une forme de vie supérieure à celle des hommes ici-bas, le mariage est donc une dégradation. La doctrine de l’Église romaine à ce sujet est donc profondément anti-chrétienne. Elle repose sur des principes tirés de la philosophie des païens. Elle présuppose que Dieu n’est pas l’auteur de la matière ; et qu’Il n’a pas fait l’homme pur, quand Il l’a investi d’un corps.
2. Tout au long des Écritures de l’Ancien Testament, le mariage est représenté comme la norme l’état de l’homme. Le commandement donné à nos premiers parents avant la chute était : « Soyez féconds, multipliez-vous, et remplissez la terre. Sans le mariage, le dessein de Dieu à l’égard de notre monde ne pourrait être réalisé ; il est donc contradictoire avec les Écritures de supposer que le mariage est moins saint ou moins agréable à Dieu que le célibat. Ne pas être marié, c’était considéré sous l’ancienne dispensation comme une calamité et une honte. (Juges, xi, 37 ; Ps. Ixxviii, 63 ; Is. iv. 1 ; xiii. 12.) La plus haute destinée terrestre d’une femme, selon les Écritures de l’Ancien Testament, qui sont la parole de Dieu, n’était pas d’être une religieuse, mais d’être la maîtresse d’une famille et une mère d’enfants. (Gen. xxx. 1 ; Ps. cxiii. 9 ; cxxvii. 3 ; cxxviii. 3, 4 ; Prov. xviii. 22 ; xxxi. 10, 28.)
3. La même haute estime du mariage caractérise les enseignements du Nouveau Testament. Le mariage est déclaré « honorable en tous ». (Héb. xiii. 4.) Paul dit : « Que chaque homme ait sa propre femme, et que chaque femme ait son propre mari. » (1 Corinthiens vii. 2.) Dans 1 Timothée v. 14, il dit : « Je veux que les jeunes femmes se marient. » Dans 1 Timothée iv. 3, « l’interdiction de se marier » est incluse parmi les doctrines des démons. De même que la vérité vient du Saint-Esprit, de même les fausses doctrines, selon la manière de penser de l’Apôtre, viennent de Satan et de ses agents, les démons ; Ce sont « les esprits séducteurs » dont il est question dans le même verset. 1 Notre Seigneur plus d’une fois (Matt. xix. 5 ; Marc x. 7) cite et applique la loi originale donnée dans Genèse ii. 24, que l’homme quittera son père et sa mère, et s’attachera à sa femme, et qu’ils seront une seule chair. Le même passage est cité par l’apôtre comme contenant une grande vérité symbolique. (Éph. v. 31.) Il est ainsi enseigné que la relation matrimoniale est la plus intime et la plus sacrée qui puisse exister sur la terre, à laquelle toutes les autres relations humaines doivent être sacrifiées. On trouve donc . que, dès le commencement, à de rares exceptions près, les patriarches, les prophètes, les apôtres, les confesseurs et les martyrs ont été des hommes mariés. Si le mariage n’était pas une dégradation pour eux, il ne peut certainement pas l’être pour les moines et les prêtres.
1 Calvin, dans son commentaire sur ce verset, dit : « Non multo post Apostoli mortem exorti sunt Eneratitæ (qui nomen sibi a continentia indiderunt) Taciani : Catharie ; Montanus cum sua sccta, et tandem Manichæi, qui ab esu carnium et conjugio abhorrèrent, et tanquam res profanas damnarent..... Excipiunt [Pnpistæ] se Encratitis et Manichæis esse dissimiles, quia non simpliciter nsum conjugii et carnium interdicunt, sed certis tantum diebus cognnt ad carnis abstinentiam, solos autem monachos ct saccrdotcs cum monialibus ad votum ccclibatus cognnt. Verum hæc .... Nimis frivola est exeusatio. Nam sanctimoniam nihilominus dans son locant de rébus ; deinde falsum et adulterinum Dei cultuni instituunt : postremo conscientias alligant neeessitati, a qua debebant esse liberæ. » Edit. Berlin, 1831.
La preuve la plus forte de la sainteté de la relation matrimoniale aux yeux de Dieu, se trouve dans le fait que tant dans l’Ancien que dans le Nouveau Testament, on en fait le symbole de la relation entre Dieu et son peuple. « Ton Créateur est ton époux », je suis les paroles de Dieu, et je contiens un monde de vérité, de grâce, et d’amour. L’éloignement du peuple de Dieu, est illustré par une référence à une femme qui abandonne son mari ; tandis que la patience, la tendresse et l’amour de Dieu sont comparés à ceux d’un mari fidèle à sa femme. « Comme l’époux se réjouit de l’épouse I, ainsi ton Dieu se réjouira à ton sujet. » (Est. Chapitre IXII. 5.) Dans le Nouveau Testament, cette référence à la relation matrimoniale, pour illustrer l’union entre le Christ et l’Église, est fréquente et instructive. L’Église est appelée « l’Epouse, la femme de l’Agneau ». I (Apoc. 9.) Et la consommation de l’œuvre du salut est présentée comme les noces, ou le souper des noces de l’Agneau. (Apoc., xix, 7, 9.) Dans Éphésiens v. 22-33, l’union entre maris et femmes, et les devoirs qui en résultent, sont énoncés comme suit : analogue à l’union entre le Christ et son Église, que, dans certains cas, elle est difficile de déterminer à quelle union le langage de l’Apôtre doit s’appliquer. Il est étonnant, compte tenu de tous ces faits, que le mariage ait largement et obstinément considéré comme quelque chose de dégradant, et le célibat ou la virginité perpétuelle comme une vertu spéciale et particulière. Il n’y a pas de preuve plus frappante de l’influence d’une fausse philosophie dans la perversion de l’esprit même des hommes de bien dans toute l’histoire de l’Église. Même les réformistes n’échappèrent pas complètement à son influence. Ils parlent souvent du mariage comme du moindre des deux maux : non pas comme d’un bien en lui-même ; et non comme l’état normal et approprié dans lequel les hommes et les femmes devraient vivre, comme prévu par Dieu dans la constitution même de leur nature, et comme les mieux adaptés à la l’exercice et le développement de toutes les vertus sociales et chrétiennes. Ainsi Calvin dit : « Unde constat et aliam quamlibet, extra conjugium, societatem coram ipso [Deo] maledictam esse ; et illam ipsam conjugale !! in necessitatis remedium esse ordinatam, ne in effrenem libidinem proruamus..... Jam quum per naturæ conditionem et accensa post lapsum libidine, mulieris consortiuma bis obnoxii simus, nisi quos singular ! gratia Deus inde exemit ; videant singuli quid sibi datum sit. Virginitas, fateor, virtue est non contemnenda : sed quoniam aliis negata est, aliis nonnisi ad tempus concessa, qui ab incontinentia vexantur, et superiores in certamine esse nequeunt ad matrimonii subsidium se conférant, ut ita in sum vocationis gradu castitatem colant. » 1 C’est-à-dire que la virginité est une vertu. Le célibat est un état supérieur au mariage. Ces qui ne peut pas vivre dans cet état, devrait descendre à la plate-forme inférieure des vie. Avec de telles souillures de philosophie manichéenne, la pure vérité de la Bible était contaminée, même telle qu’elle était soutenue par les plus illustres réformateurs.
1 Institutio, II. VIII. 41, 42 ; édit. Berlin, 1834, t. I, p. 204, 265.
4. L’enseignement de l’Écriture sur la sainteté du mariage est confirmé par l’expérience du monde. Ce n’est que dans l’état matrimonial que quelques-uns des principes les plus purs, les plus désintéressés et les plus élevés de notre nature sont appelés à s’exercer. Tout ce qui concerne la piété filiale, l’affection parentale et surtout maternelle, dépend du mariage pour son existence même. Pourtant, de l’influence purificatrice et répressive de ces affections dépend dans une large mesure le bien-être de la société humaine. C’est au sein de la famille qu’il y a un appel constant à des actes de bonté, d’abnégation, d’indulgence et d’amour. La famille est donc la sphère la mieux adaptée au développement de toutes les vertus sociales ; et l’on peut dire sans risque de se tromper qu’il y a beaucoup plus d’excellence morale et de vraie religion dans les foyers chrétiens, que dans les maisons désolées des prêtres, ou dans les sombres cellules des moines et des moniales. Un homme avec ses enfants ou ses petits-enfants sur ses genoux est un objet de plus grande vénération que n’importe quel anachorète émacié dans sa grotte.
5. Notre-Seigneur enseigne qu’un arbre se reconnaît à ses fruits. Il n’y a pas eu de source plus prolifique de mal pour l’Église que la notion non scripturaire de la vertu spéciale de la virginité et le célibat forcé du clergé et des vœux monastiques, auquel cette notion a donné lieu. C’est l’enseignement de l’histoire. Sur ce point, le témoignage des romanistes aussi bien que des protestants est décisif et accablant. On peut admettre que le clergé catholique de ce pays et de quelques autres pays est aussi décent dans sa vie que le clergé des autres confessions, sans invalider le témoignage de l’histoire sur les maux des vœux de célibat.
Les protestants, tout en affirmant la sainteté du mariage et en niant la vertu supérieure d’une vie de célibat, ne nient pas qu’il y ait des temps et des circonstances dans lesquels le célibat est une vertu, c’est-à-dire qu’un homme peut accomplir un acte vertueux en prenant la résolution de ne jamais se marier. L’Église a souvent un travail à faire, pour lequel les hommes seuls sont les agents appropriés. En d’autres termes, les soins d’une famille mettraient un homme inapte à l’exécution de la tâche qui lui est assignée. Cependant, cela ne suppose pas que le célibat soit en soi une vertu. Il peut arriver aussi qu’un homme riche soit appelé à entreprendre un travail qui l’obligerait à se décharger du soin de ses biens et à se soumettre à une vie de pauvreté. Il en va de même pour l’État. En fait, le service militaire, pour la grande majorité des soldats d’une armée, est un état de célibat forcé tant que le service continue. Et même en ce qui concerne les officiers, la liberté de se marier est très restreinte dans les armées permanentes de l’Europe. Il y a des moments où le mariage n’est pas opportun. Notre Seigneur, en annonçant la destruction de Jérusalem, a dit : « Malheur à ceux qui sont enceintes, et à ceux qui allaitent en ces jours-là. » C’est le rôle de la sagesse que d’échapper à de tels malheurs. Quand les chrétiens n’avaient pas de sécurité pour la vie ou le foyer ; Lorsqu’ils risquaient d’être arrachés à leur famille, ou de se voir enlever tous les moyens de subvenir à leurs besoins, il valait mieux qu’ils ne se mariassent pas. C’est en référence à de tels temps et circonstances que les paroles de Christ, dans le dix-neuvième chapitre de Matthieu, ont été prononcées, et que le conseil de l’apôtre, dans le septième chapitre de la première épître aux Corinthiens, a été donné. Les pharisiens demandèrent à notre Seigneur si un homme pouvait répudier sa femme à son gré. Il les a renvoyés à l’institution originelle du mariage, comme montrant qu’il s’agissait d’un lien indissoluble. Ses disciples dirent : Dans ce cas, il vaut mieux que l’homme ne se marie pas. Notre Seigneur répondit : Qu’il vaille mieux qu’un homme se marie ou non, ce n’est pas à chacun de décider pour lui-même. « Que l’état de non-mariage soit meilleur, c’est un dicton qui ne s’applique pas à tout le monde, et même seulement à ceux à qui il est divinement destiné. » 1 C’est-à-dire ceux à qui la grâce requise est donnée : « Omnes hujus diet ! Capacés esse negans, significat clectionem non esse positam in manu nostra, acsi de re nobis subjecta esset consultatio. Si quis utile sibi esse putat uxore carere, atque ita nullo examine habita, cœlibatus legem sibi edicit, longe fallitur. Deus enim, qui pronuntiavit bonum esse, ut viro adjutrix sit mulier, contempt ! sui ordinis pœnam exiget : quia uimium sibi arrogant mortales, dum se a cœlcsti vocatione eximere tentant. Porro non esse omnibus liberum, eligere utrum libuerit, inde probat Christus, quia spéciale sit continent ! ® donum : nam quum dicit, non omnes esse capaces, sed quibus datum est, clare demonstrat non omnibus esse datum. » 1 Ceux à qui il est donné de mener une vie de célibataire, comme notre Seigneur l’enseigne (Matt. XIX. 10), ne sont pas seulement ceux qui, par leur constitution naturelle, sont inaptes à l’état de mariage, mais ceux que Dieu appelle à un service spécial dans son Église et qu’il rend aptes à cette œuvre.
1 Commentaire, critique et explicatif, sur l’Ancien et le Nouveau Testament. Matthieu xix. 11. Par le révérend Robert Jamieson, St. Paul’s, Glasgow, Écosse ; le révérend A. R. Fausset, A. M., St. Cuthbert, York, Angleterre ; et le révérend David Brown, D. D., Aberdeen, Écosse. Hartford, Connecticut, 1871.
1 Calvin sur Matthieu, xix, 10, 11, à la télévision. T. Commentaire. Berlin, 1838, t. II, p. 159. Bien que Calvin parle parfois du mariage de manière désobligeante, à d’autres moments, en particulier lorsqu’il écrit contre les papistes, il en défend le caractère sacré. Ainsi, à propos du passage cité ci-dessus, il dit : « Si coiijugium instituit Deus in coinmuncm human ! generis salute!!, licet quædam minus grata secum trahat, non ideoprotinus spernendum est. Discamus ergo, si quid in Dei beneficiis nobis non arridet, non tarn lauti esse ac morosi, quin reverenter illis utainur. Præsertim nobis in sancto conjugio eavenda est hæc pravitas : nam quia multi » inolestiis implicitum est, semper conatus est Satan odio et infainia gravare, ut homines ab eo subduceret. Et Hieronymus nimis luculentum malin ! perversiqnc ingenii specimen in co edidit, quod non tantum calumniis exagitat sacrum ilium et divinum vitæ ordinem, sed quascunque potest ex profanis auetoribus λοιδορίαν accumulât, quæ ejus honestatein de-forment. » — Ibid., p. 158.
La doctrine que Paul enseigne sur ce sujet coïncide parfaitement avec les enseignements de notre Seigneur. Il reconnaît le mariage comme une institution divine ; comme bon en soi ; comme l’état normal et propre dans lequel les hommes et les femmes doivent vivre ; mais comme elle est nécessairement accompagnée de beaucoup de soucis et de distractions, il était expédient, dans les temps de détresse, de rester célibataire. C’est le sens des enseignements de Paul dans 1 Corinthiens vii. Aucun des écrivains sacrés, que ce soit dans l’Ancien ou dans le Nouveau Testament, n’exalte et ne glorifie autant le mariage que cet apôtre dans son épître aux Éphésiens. Il n’est donc pas l’homme, guidé comme il l’a été dans tous ses enseignements par l’Esprit de Dieu, pour le déprécier ou le sous-estimer, comme le moindre de deux maux. C’est un bien positif : l’union de deux personnes humaines pour compléter et compléter l’une et l’autre d’une manière nécessaire à la perfection ou au plein développement de l’une et de l’autre. La femme est à son mari ce que l’Église est au Christ. Rien de plus élevé que cela ne peut peut-être être dit.
Personne ne peut lire les épîtres de Paul, en particulier celles aux Éphésiens et aux Colossiens, sans voir des indications claires de la prévalence, même dans les églises apostoliques, des principes de cette philosophie qui soutenait que la matière était contaminante ; et qui inculquait l’ascétisme comme le moyen le plus efficace de purification de l’âme. Cette doctrine avait déjà été adoptée et mise en pratique par les Esséniens parmi les Juifs. Plus à l’est, sous une forme quelque peu différente, elle avait prévalu pendant des siècles avant l’ère chrétienne, et se maintient encore sur le terrain. Selon la philosophie brahmanique, l’individualité de l’homme dépend du corps. L’émancipation complète du corps assure donc la fusion du fini dans l’infini. La goutte se perd dans l’océan, et c’est la destinée la plus élevée et ultime de l’homme. Il n’y a donc pas lieu de s’étonner que les premiers Pères aient été plus ou moins sous l’influence de ces principes, ou que l’ascétisme ait gagné si rapidement et maintenu si longtemps son ascendant dans l’Église. La dépréciation de l’institution divine du mariage, et l’élévation de la virginité à la première place parmi les vertus chrétiennes, fut la conséquence naturelle et nécessaire de cet esprit. Ignace appelait les vierges volontaires « les joyaux du Christ ». Justin Martyr souhaitait que le célibat l’emporte dans la « plus grande mesure possible ». Tatien considérait le mariage comme incompatible avec le culte spirituel. Origène « s’est handicapé dans sa jeunesse » et considérait le mariage comme une pollution. Hieracas a fait de « la virginité une condition du salut ». Tertullien dénonçait le second mariage comme criminel et représentait le célibat comme l’idéal de la vie chrétienne, non seulement pour le clergé, mais aussi pour les laïcs. Le second mariage fut de bonne heure interdit en ce qui concernait le clergé, et bientôt vint dans leur cas l’interdiction totale du mariage. Les Constitutions apostoliques interdisaient aux prêtres de contracter mariage après la consécration. Le concile d’Ancyre, en 314 apr. J.-C., autorisa les diacres à se marier, à condition qu’ils stipulent le privilège avant l’ordination. Le concile d’Elvire, en 305 apr. J.-C., interdit la continuation de la relation matrimoniale (selon l’interprétation commune de ses canons) avec les évêques, les prêtres et les diacres sous peine de déposition. 1 Jérôme était fanatique dans sa dénonciation du mariage ; et Augustin lui-même fut emporté par l’esprit du siècle. En réponse à l’objection que si les hommes agissaient selon ses principes, le monde serait dépeuplé, il répondit :
1 Voir Schaff, History of The Christian Church, New York, 1867, vol. I. §§ 91, 96.
Tant mieux, car dans ce cas, le Christ viendrait le plus tôt. 1 Siricius, évêque de Rome en 385, décida que le mariage était incompatible avec la fonction cléricale ; et fut suivi dans cette opinion par ses successeurs. Cependant, il y eut une grande opposition expérimenté dans l’application du célibat, et cela exigeait toute l’énergie de Grégoire VII. de faire appliquer les décisions des conseils. En fin de compte, cependant, la règle, en ce qui concerne le clergé, a été acceptée et a reçu la sanction autorisée du Concile de Trente. « Ce concile décida :2 « Si quis dixerit, statum conjugalem anteponenduni esse statui virginitatis, vel cœlibatus, et non esse melius, et beatius manere in virginitate aut cœlibatu, quam jungi matrimonio : anathema sit. » C’est sur cette vertu supérieure supposée du célibat qu’il a été ordonné dans le canon précédent : « Si quis dixerit, clericos in sacris ordinibus constitutes, vel regulares, castitatem solemniter professos, posse matrimonium contrahere, contractumque validum esse, non obstante lege ecclesiastica, vel voto : et oppositum nil aliud esse, quam damnare matrimonium ; posseque omnes contrahere matrimonium, qui non sentient se castitatis, etiam si earn voterint, habere donum ; anathème assis ; cum Deus id recte petentibus non deneget, nec patiatur nos supra id, quod possumus, tentari. »
1 Augustin, Da Bono Conjugali, 10 ; Œuvres, édit. Bénédictins, Paris, 1837, t. VI, p. 551, ch.
2 Sess. xxiv., canon 10 ; Streitwolf, Libri Symbolici, Göttingen, 1846, p. 91.
Bien que la doctrine selon laquelle la virginité, comme l’exprime le Catéchisme romain, « summopere commendatur », comme étant meilleure, plus parfaite et plus sainte qu’un état de mariage, soit considérée comme le fondement ostensible du célibat forcé du clergé, il est évident que des raisons hiérarchiques ont joué un rôle important dans le fait que l’Église romaine insiste si vigoureusement pour que son clergé ne soit pas marié. Ce Grégoire VII. avoue quand il dit : 3 « Non liberari potest ecclesia a servitute laicorum, nisi liberentur clerici ab uxoribus. » Et Mélancthon se sentit autorisé à dire à propos du célibat du clergé dans l’Église de Rome : « Una est vera et sola causa tuendi cœlibatus, ut opes commodius ad-ministrentur et splendor ordinis retineatur. » 4
3 Epist. lib. iii. p. 7.
4 Voir l’Encyclopédisme réel de Herzog , art. « Colibat. »
Comme la Réforme était un retour aux Écritures comme seule règle infaillible de foi et de pratique ; et comme dans les Écritures le mariage est exalté comme un état saint, et aucune prééminence dans l’excellence n’est attribuée au célibat ou à la virginité ; et comme les réformateurs niaient l’autorité de l’Église de faire des lois pour lier la conscience ou pour restreindre la liberté avec laquelle le Christ avait rendu son peuple libre, les protestants se prononçaient d’une seule voix contre l’obligation des vœux monastiques et du célibat du clergé.
L’Église grecque s’est pétrifiée très tôt. Elle a pris la forme qu’elle a encore aujourd’hui, avant que la doctrine de la sainteté spéciale du célibat eût pris de l’ascendant. Elle se conforme donc aux décisions du concile de Chalcédoine, en 451 apr. J.-C., et de Trullo, en 692, qui autorisaient le mariage avec les prêtres et les diacres. Les Grecs qui sont en communion avec l’Église de Rome jouissent de la même liberté. Benoît XIV. déclara à leur sujet : « Etsi expetendum quam maxime esset, ut Græci, qui sunt in sacris ordinibus constituti, castitatem non secus ac latin ! servarent. Nihilominus, ut eorum clerici, subdiaconi, diaconi et presbyter ! uxores in eorum ministerio retineant, dummodo ante sacros ordines, virgines, non viduas, neque corruptas duxerint, Romana non prohibet Ecclesia. Eos autem, qui viduam vel corruptam duxerint, vel ad secunda vota, prima uxore mortua, convolarint, ad subdiaconatum, diaconatum et presbyteratum Promover ! omnino prohibemus.» 1 Dans l’Église russe, les prêtres doivent être des hommes mariés ; mais les seconds mariages sont pour eux interdits. Les évêques sont choisis parmi les moines et doivent être célibataires.
1 Encyclopédie réelle de Herzog , art. « Colibat. » Les controverses dans l’Église sur ce sujet sont détaillées par les principaux historiens ecclésiastiques modernes, tels que Neander, Giese-1er et Schaff. Les mérites de la question sont discutés dans de nombreux traités séparés, ainsi que dans des livres tels que Burnet’s Exposition of the. Trente-neuf articles, Ductor Dubitantium de Jeremy Tay-lor (in. iv. Works, Londres, 1828, vol. xiii. pp. 549-61G), Elliott’s Delineation of Romanism, Thiersch’s Vorlesungen uber Katholicismus und Protestantismus, 2e édit. Erlangen, 1848.
Le mariage, une institution divine.
Le mariage est une institution divine. (1) Parce qu’elle est fondée sur la nature de l’homme tel qu’il est constitué par Dieu. Il fit de l’homme un homme et une femme, et ordonna le mariage comme la condition indispensable de la continuation de la race. (2) Le mariage a été institué avant l’existence de la société civile, et ne peut donc pas, dans sa nature essentielle, être une institution civile. De même qu’Adam et Ève n’étaient mariés ni en vertu d’une loi civile, ni par l’intervention d’un magistrat civil, de même tout homme et toute femme réunis sur une île déserte pouvaient légalement se prendre l’un l’autre comme mari et femme. C’est avilir l’institution que d’en faire un simple contrat civil. (3) Dieu a commandé aux hommes de se marier, quand il leur a ordonné d’augmenter, de multiplier et de remplir la terre. (4.) Dieu, dans sa parole, a prescrit les devoirs qui appartiennent à la relation matrimoniale ; Il a fait connaître son testament quant aux parties qui peuvent légalement être unies par le mariage ; Il a déterminé la continuation de la relation ; et les causes qui justifient seules sa dissolution. Ces questions ne sont pas soumises à la volonté des parties, ni à l’autorité de l’État. (5) Le vœu de fidélité mutuelle fait par le mari et la femme n’est pas fait exclusivement par l’un envers l’autre, mais par chacun envers Dieu. Quand un homme se rattache à une Église chrétienne : il fait alliance avec ses frères dans le Seigneur ; des obligations réciproques sont assumées ; mais néanmoins l’alliance est faite avec Dieu. Il se joint à l’Église dans l’obéissance à la volonté de Dieu ; il promet de régler sa foi et sa pratique par la parole divine ; et le vœu de fidélité est fait à Dieu. C’est la même chose dans le mariage. Il s’agit d’un pacte volontaire et mutuel entre le mari et la femme. Ils se promettent d’être fidèles l’un à l’autre ; mais néanmoins ils obéissent à Dieu, et Lui promettent qu’ils vivront ensemble comme mari et femme, selon sa parole. Toute violation du pacte est donc une violation d’un vœu fait à Dieu.
Le mariage n’est pas un sacrement dans le sens où le baptême et la Cène du Seigneur sont des sacrements, ni dans le sens de l’Église romaine ; mais il n’en est pas moins une institution sacrée. Sa solennité est un office de la religion. Il faut donc l’entreprendre avec la solennité voulue et dans la crainte de Dieu ; et doit être célébrée, c’est-à-dire que la cérémonie doit être accomplie par un ministre du Christ. Lui seul est autorisé à veiller à ce que la loi de Dieu soit observée ; et lui seul peut recevoir et enregistrer les vœux de mariage tels qu’ils ont été faits à Dieu. Le magistrat civil ne peut en être témoin que comme d’un contrat civil, et c’est par conséquent méconnaître son caractère religieux et sa sanction que de le faire célébrer par un officier civil. Comme l’essence du contrat de mariage est le pacte mutuel des parties devant Dieu et en présence de témoins, il n’est pas absolument nécessaire qu’il soit célébré par un ministre du culte ou même par un magistrat civil. Elle peut être légalement solennisée, comme chez les Quakers, sans l’intervention de l’un ou de l’autre. Néanmoins, comme il est de la plus haute importance de garder à l’esprit le caractère religieux de l’institution, il incombe aux chrétiens, en ce qui les concerne eux-mêmes, d’insister pour qu’elle soit célébrée comme un service religieux.
Le mariage en tant qu’institution civile.
Comme le fait qu’un homme soit un serviteur de Dieu et qu’il soit tenu de faire de sa parole la règle de sa foi et de sa pratique, n’est pas incompatible avec le fait qu’il soit un serviteur de l’État, et qu’il soit tenu d’obéir à ses lois ; il n’est donc pas incompatible avec le fait que le mariage est une ordonnance de Dieu, qu’il doit être, sous un autre aspect, une institution civile. Elle est tellement impliquée dans les rapports sociaux et civils des hommes qu’elle tombe nécessairement sous la connaissance de l’État. Il s’agit donc d’une institution civile. (1) Dans la mesure où elle est et doit être reconnue et appliquée par l’État. (2) Il impose des obligations civiles que l’État a le droit de faire respecter. Le mari est tenu de subvenir aux besoins de sa femme, par exemple, et il est contraint par le droit civil à l’accomplissement de ce devoir. (3) Le mariage comporte aussi, de part et d’autre, des droits de propriété ; et les droits des enfants nés dans le mariage sur les biens de leurs parents. Toutes ces questions relatives à la propriété relèvent légitimement du droit civil. Dans de nombreux pays, non seulement la propriété, mais aussi le rang, le titre et les prérogatives politiques sont impliqués dans la question du mariage. (4.) Il appartient donc à l’État, en tant que gardien de ces droits, de déterminer quels mariages sont licites et lesquels sont illicites ; la manière dont le contrat doit être célébré et authentifié ; et quelles en seront les conséquences juridiques. Les chrétiens sont tenus d’obéir à toutes ces lois, dans la mesure où l’obéissance à celles-ci est compatible avec une bonne conscience.
Le pouvoir légitime de l’État dans toutes ces questions est limité par la volonté révélée de Dieu. Elle ne peut rien faire d’un empêchement au mariage que les Écritures ne déclarent pas être un obstacle à cette union. Elle ne peut rien faire pour dissoudre le contrat de mariage alors que la Bible ne fait pas un motif valable de divorce. Et l’État ne peut attacher rien d’autre que des peines civiles et des peines à la violation de ses lois concernant le mariage. Cela veut seulement dire qu’un gouvernement chrétien est tenu de respecter les convictions de conscience du peuple. C’est une violation des principes de la liberté civile et religieuse que pour l’État de faire passer sa volonté avant la volonté de Dieu. Si évident que paraisse ce principe, il n’en est pas moins constamment négligé dans presque toutes les nations chrétiennes, qu’elles soient catholiques ou protestantes. En Angleterre, par exemple, la loi stipule encore qu’aucun membre de la famille royale ne peut se marier sans le consentement du souverain régnant. Si cela ne signifiait rien de plus que le fait qu’un membre de la famille royale, se mariant ainsi, devait perdre pour lui-même et ses enfants tout droit de succession à la couronne, cela pourrait être bien. Mais le vrai sens est qu’un tel mariage est nul et non avenu ; que les parties qui sont par ailleurs légalement mariées et que Dieu a unies en tant qu’homme et femme, ne sont pas mari et femme. Il s’agit d’amener la loi de l’homme et la loi de Dieu en collision directe, et de faire en sorte que l’humain l’emporte sur le divin. En Prusse, un officier subalterne de l’armée ne peut se marier sans le consentement de son commandant. S’il se mariait sans ce consentement, il serait peut-être juste de lui faire renoncer à sa commission ; Mais dire que sa femme n’est pas une femme, c’est non seulement faux, mais c’est une injustice et une cruauté monstrueuses. En Angleterre, jusqu’à ces dernières années, aucun mariage n’était valide s’il n’était célébré à l’église, dans les heures canoniques, et par un homme dans les ordres sacerdotaux. Cette loi a été spécialement conçue pour protéger les héritières des ruses des chasseurs de fortune. Il serait peut-être juste de décider qu’aucun mariage qui n’est pas ainsi célébré ne doit conférer aucun droit de propriété ; Mais dire que les mariés cinq minutes après midi, ne sont pas mariés du tout, alors que si la cérémonie avait été faite dix minutes plus tôt, ils seraient vraiment mari et femme, choque la conscience et le bon sens des hommes. Ainsi, dans ce pays, avant l’abolition de l’esclavage, selon les lois de nos États du Sud, aucun esclave ne pouvait se marier. Un jeune homme blanc a épousé une jeune femme, dont personne dans la communauté ne supposait qu’elle avait une goutte de sang africain dans les veines. Il fut cependant prouvé qu’elle était esclave. Son mari l’acheta, l’affranchit, la répudia, épousa une autre femme et fut reçue dans la communion d’une église presbytérienne. La loi de Dieu était donc considérée comme une simple nullité.1
1 Mais c’était conforme au droit canonique, qui faisait de l’erreur sur la condition de l’une des parties, en tant qu’esclave ou libre, un motif d’annulation du contrat de mariage. Stahl, De Afatrimonio Rescindendo. Berlin, 1841. Canon Leg. cap. 2, 4, x., de conjugio servoruin, 4, 9. Voir GCschen dans l’Encyclopédie de Herzog , art. « Euh. » C’est toujours la doctrine de l’Église romaine. Voir Dens, Tractatus de Afatrimonio ; Theologia, édit. Dublin, 1832, vol. vit., n. 72, p. 199. Voir aussi Commentaries on the Law of Afarriage and Divorce, par Joel Prentiss Bishop. 4e édition, Boston, 1864, vol. I. chap. x. §§ 154-163.
Parce que le mariage est, sous certains de ses aspects, une institution civile, qui doit être réglée dans certaines limites par la loi civile, les hommes l’ont traité comme s’il s’agissait d’un simple engagement commercial. Ils ignorent son caractère d’institution divine, réglementée et contrôlés par les lois divines. Les législatures civiles doivent se rappeler qu’elles ne peuvent pas plus annuler les lois de Dieu que les lois de la nature. S’ils déclarent que ceux qui ne sont pas mariés sont mariés par la loi divine ; ou s’ils séparent ceux que Dieu a réunis, leurs lois sont des nullités absolues à la barre de la conscience et aux yeux de Dieu.
Le mariage est un pacte entre un homme et une femme pour vivre ensemble, comme un homme et une femme, jusqu’à ce qu’ils soient séparés par la mort. D’après cette définition, d’une part, la relation matrimoniale ne peut subsister qu’entre un homme et une femme ; deuxièmement, l’union est permanente , c’est-à-dire qu’elle ne peut être dissoute que par la mort de l’une des parties ou des deux, sauf pour les raisons spécifiées dans la parole de Dieu ; et troisièmement, la mort de l’une des parties dissout l’union, de sorte qu’il est permis au survivant de se remarier.
En ce qui concerne le premier de ces points, c’est-à-dire que la doctrine biblique du mariage s’oppose à la polygamie et la condamne, il faut remarquer :
1. Telle a été la doctrine de l’Église chrétienne dans tous les temps et dans toutes les parties du monde. Il n’y a jamais eu d’église se disant chrétienne qui ait toléré une pluralité d’épouses parmi ses membres. Il ne pourrait guère y avoir de preuve plus forte que ce fait que telle est la loi de Christ. Il est moralement certain que toute l’Église ne peut pas s’être trompée, sur un sujet comme celui-ci, sur l’esprit et la volonté de son divin Chef et Maître.
2. Le mariage, tel qu’il a été constitué et ordonné par Dieu à l’origine, était entre un homme et une femme. Et le langage d’Adam, lorsqu’il reçut Ève des mains de son Créateur, prouve que telle était la nature essentielle de la relation : « Et Adam dit : Ceci est maintenant l’os de mes os, et la chair de ma chair..... C’est pourquoi l’homme quittera son père et sa mère, et s’attachera à sa femme, et ils deviendront une seule chair. (Genèse, II, 23, 24.) Ou, comme notre Seigneur cite et explique le passage : « Ils seront deux d’une seule chair, ainsi ils ne seront plus deux, mais une seule chair. » (Marc x. 8.) « Les deux », et pas plus de deux, ne font plus qu’un. Ce n’était pas seulement le langage d’Adam non déchu dans le Paradis, mais le langage de Dieu prononcé par les lèvres d’Adam, comme il appert non seulement des circonstances de l’affaire, mais aussi de l’attribution par notre Seigneur de l’autorité divine, comme il le fait évidemment dans le passage que nous venons de citer. Ainsi, la loi du mariage, telle qu’elle a été instituée à l’origine par Dieu, exigeait que l’union soit entre un homme et une femme. Cette loi ne pouvait être modifiée que par l’autorité par laquelle elle avait été promulguée à l’origine. Delitzsch remarque à propos de ce passage :1 « Dans ces paroles, non seulement l’union spirituelle la plus profonde, mais une union comprenant toute la nature de l’homme, une communion personnelle qui comprend tout, est représentée comme l’essence du mariage ; et la monogamie est présentée comme sa forme naturelle et divinement désignée.
1 Die Genesis, Leipzig, 1852, p. 114.
3. Bien que cette loi originelle ait été partiellement ignorée par la suite, elle n’a jamais été abrogée. La polygamie et le divorce étaient dans une certaine mesure tolérés sous la loi mosaïque, mais à toutes les époques chez les Hébreux, la monogamie était la règle, et la polygamie l’exception, comme elle l’était chez les autres nations civilisées de l’antiquité. La polygamie apparaît pour la première fois chez les descendants de Caïn. (Gen. iv. 19.) Noé et ses fils n’eurent qu’une seule femme.
Abraham n’avait qu’une seule femme, jusqu’à ce que l’impatience de Sara pour les enfants le conduise à prendre Agar comme concubine. La même règle du mariage a été observée par les prophètes en tant que classe. La polygamie était confinée en grande partie aux rois et aux princes. Il y avait aussi une distinction honorable entre la femme et la concubine. La première conserva sa prééminence en tant que chef de famille. De nombreux passages de l’Ancien Testament prouvent que la monogamie était considérée comme la loi du mariage, dont la pluralité des épouses était une dérogation. Tout au long des Proverbes, par exemple, c’est la bénédiction d’une bonne épouse, et non celle d’Avives, qui est continuellement mise en avant. (Prov. xii. 4 ; xix. 14 ; xxxi. 10 if.) Les livres apocryphes contiennent des preuves évidentes qu’après l’exil, la monogamie était presque universelle parmi les Juifs ; et on peut le déduire de passages tels que Luc, i, 5 ; Actes v. 1, et beaucoup d’autres, qu’il en était de même à l’époque de l’avènement de Christ.
En ce qui concerne la tolérance de la polygamie sous la loi mosaïque, il faut se rappeler que le septième commandement appartient à la même catégorie que le sixième et le huitième. Ces lois ne sont pas fondées sur la nature essentielle de Dieu, et ne sont donc pas immuables. Elles sont fondées sur les relations permanentes des hommes dans leur état actuel d’existence. Il s’ensuit de là : (1.) Qu’elles ne lient les hommes que dans leur état présent. Les lois de la propriété et du mariage ne peuvent s’appliquer, autant que nous le sachions, au monde futur, où les hommes seront comme des anges, ne se mariant ni ne donnant en mariage. (2) Ces lois, étant fondées sur les relations permanentes et naturelles des hommes, ne peuvent être écartées par l’autorité humaine, parce que ces relations ne sont pas soumises à la volonté ou à l’ordonnance des hommes. (3) Dieu peut cependant s’en dispenser. Il a ordonné aux Israélites de dépouiller les Égyptiens et de déposséder les Cananéens, mais cela ne prouve pas qu’une nation puisse, de sa propre initiative, s’emparer de l’héritage d’un autre peuple. Par conséquent, si Dieu, à un moment donné et à un peuple, a accordé la permission de pratiquer la polygamie, alors tant que cette permission a duré et pour ceux à qui elle a été donnée, la polygamie était légale, et à tout autre moment et pour toutes les autres personnes, elle était illégale. Ce principe est clairement reconnu dans ce que notre Sauveur enseigne au sujet du divorce. Il était permis aux Juifs, en vertu de la loi mosaïque, de répudier leurs femmes ; Dès que cette loi a été abolie, le droit de divorce a cessé.
4. La monogamie, cependant, ne repose pas exclusivement sur l’institution originelle du mariage, ni sur la dérive générale de l’enseignement de l’Ancien Testament, mais principalement sur la volonté clairement révélée du Christ. Sa volonté est la loi suprême pour tous les chrétiens, et légitimement pour tous les hommes. Lorsque les pharisiens vinrent à lui et lui demandèrent si un homme pouvait légitimement répudier sa femme, il répondit que le mariage, tel qu’il a été institué par Dieu, était une union indissoluble entre un homme et une femme ; et, par conséquent, que ceux que Dieu avait unis, personne ne pouvait les séparer. C’est la doctrine clairement enseignée dans Matthieu xix. 4—9 ; Marc x. 4-9 ; Luc xvi. 18 ; Matthieu v. 32. Dans ces passages, notre Seigneur déclare expressément que si un homme se marie du vivant de sa première femme, il commet un adultère. L’exception que le Christ lui-même fait à cette règle sera considérée sous le nom de divorce.
L’apôtre enseigne la même doctrine dans Romains VII. 2, 3 : « La femme qui a un mari est liée par la loi à son mari, tant qu’il vit ; mais si le mari est mort, elle est délivrée de la loi de son mari. Ainsi donc, si pendant que son mari est en vie, elle est mariée à un autre homme, elle sera appelée adultère : mais si son mari est mort, elle est affranchie de cette loi ; de sorte qu’elle n’est pas adultère, même si elle est mariée à un autre homme. La doctrine de ce passage est que le mariage est un pacte entre un homme et une femme, qui ne peut être dissous que par la mort de l’une des parties. Ainsi, dans 1 Corinthiens vii. Réponse à l’objection N°2 : « Que chaque homme ait sa propre femme, et que chaque femme ait son propre mari », il est tenu pour acquis que, dans l’Église chrétienne, une pluralité de femmes est aussi exclue qu’une pluralité de maris. Cette hypothèse traverse tout le Nouveau Testament. Non seulement nous ne lisons jamais qu’un chrétien ait deux femmes ou plus ; mais chaque fois qu’il est question du devoir de la relation conjugale, c’est toujours du mari envers sa femme, et de la femme envers son mari. Par conséquent, au jugement de toute l’Église chrétienne, le mariage est une alliance entre un homme et une femme pour vivre ensemble comme mari et femme, jusqu’à ce qu’ils soient séparés par la mort.
5. Cette loi de l’Écriture est confirmée par la loi providentielle qui assure l’égalité numérique des sexes. Si la polygamie avait été conforme au dessein divin, nous aurions naturellement constaté qu’il naîtrait plus de femmes que d’hommes. Mais c’est l’inverse qui se produit. Il y a plus d’hommes que de femmes qui naissent dans le monde. L’excès, cependant, n’est suffisant que pour pourvoir au plus grand péril de la vie auquel les hommes sont exposés. La loi de la providence est l’égalité numérique des sexes ; et c’est une indication claire de la volonté de Dieu que chaque homme ait sa propre femme, et chaque femme son propre mari. Telle étant la volonté de Dieu, telle qu’elle se révèle à la fois dans sa parole et dans sa providence, tout ce qui tend à la contrecarrer doit être mauvais dans sa nature et ses conséquences. La doctrine qui dépréciait le mariage et faisait du célibat une vertu, inondait l’Église de corruption. Et tout ce qui, dans notre civilisation moderne et dans nos modes de vie, rend le mariage difficile, et par conséquent peu fréquent, doit être déprécié et, si possible, supprimé. Que chaque homme ait sa propre femme et chaque femme son propre mari, c’est le préventif divinement désigné du « mal social » avec toutes ses horreurs indicibles. 1 Tous les autres préventifs sont humains et sans valeur. Plutôt que de continuer dans l’état actuel des choses, il vaudrait mieux revenir à l’ancien usage patriarcal, et laisser les parents donner leurs fils et leurs filles en mariage dès qu’ils ont atteint l’âge requis, aux meilleures conditions possibles.
1 Le fait que les hommes et les femmes qui commettent le meurtre d’enfants en bas âge, qui roulent dans la richesse, suffisent à réveiller n’importe quelle communauté de sa fausse sécurité.
6. Comme toutes les lois obligatoires de Dieu sont fondées sur la nature de ses créatures, il s’ensuit que s’il a ordonné que le mariage soit l’union d’un homme et d’une femme, il doit y avoir une raison à cela dans la constitution même de l’homme et dans la nature de la relation matrimoniale. Cette relation doit être telle qu’elle ne puisse subsister entre un et plusieurs ; entre un homme et plus d’une femme. Cela est évident, d’abord, par la nature de l’amour qu’il implique ; et d’autre part, de la nature de l’union qu’elle constitue. Premièrement, l’amour conjugal est particulier et exclusif. Il ne peut avoir qu’un seul objet. De même que l’amour d’une mère pour un enfant est particulier et ne peut avoir d’autre objet que son propre enfant, de même l’amour d’un mari n’a pas d’autre objet que sa femme, et l’amour d’une femme n’a pas d’autre objet que son mari. C’est un amour non seulement de la complaisance et du plaisir, mais aussi de la possession, de la propriété et de la propriété légitime. C’est la raison pour laquelle la jalousie chez l’homme ou la femme est la plus féroce de toutes les passions humaines. Il s’agit d’un sentiment de blessure ; de la violation des droits les plus sacrés ; plus sacré même que les droits de propriété ou de vie. L’amour conjugal ne peut donc exister qu’entre un homme et une femme. La monogamie a son fondement dans la constitution même de notre nature. La polygamie n’est pas naturelle et détruit nécessairement la relation normale ou divinement constituée entre le mari et la femme.
Deuxièmement, sous un autre aspect, l’union impliquée dans le mariage ne peut exister qu’entre un homme et une femme. Il ne s’agit pas seulement d’une union de sentiments et d’intérêts. C’est une union qui produit, en quelque sorte, de l’identité. Les deux ne font plus qu’un. Telle est la déclaration de notre Seigneur. Le mari et la femme ne font qu’un, dans un sens qui justifie l’apôtre de dire comme il le fait, dans Éphésiens v. 30, que la femme est l’os de son mari et la chair de sa chair. Elle est son corps. Elle est lui-même (v. 28). Telle est cette union que « Qui nxorem répudiât, quasi dimidiam sui partem a seipso avelht. Hoe autem minime patitur nature, ut corpus suum quisque discerpat. » Ce que tout cela signifie, il peut être difficile pour nous de le comprendre. C’est certain, — (1.) Qu’il ne se réfère à rien de matériel, ni à aucune identification de substance. Quand Adam a dit d’Ève : « Ceci est l’os de mes os et la chair de ma chair », il faisait sans doute allusion au fait qu’elle avait été formée de son corps. Mais comme ces mots sont employés par l’Apôtre pour exprimer la relation de toutes les femmes avec leurs maris, ils doivent être compris autrement que par identité de substance. (2) L’unité de l’homme et de la femme, dont parlent les Écritures, ne peut être comprise dans aucun sens incompatible avec leur subsistance ou leur personnalité distincte. Ils peuvent être très différents dans leur caractère et leur destinée. L’un peut être sauvé, l’autre perdu. (3.) Il est évident, cependant, que le sens du langage fort de l’Écriture sur ce sujet n’est pas épuisé, en représentant l’union matrimoniale comme étant simplement une union d’affection ; ou en disant que le mari est le complément de la femme et la femme du mari ; c’est-à-dire que la relation matrimoniale est nécessaire à la plénitude de notre nature et à son plein développement dans l’état actuel de l’existence ; qu’il y a des capacités, des sentiments et des vertus qui ne sont pas autrement ou ailleurs appelés à s’exercer. Tout cela est peut-être vrai, mais ce n’est pas toute la vérité. (4) Il y a, dans un certain sens, une communauté de vie entre le mari et la femme. Nous ont coutume de dire, et de dire vrai, que la vie des parents se communique à leurs enfants. Chaque nation et chaque famille historique a une forme de vie qui la distingue. Comme donc la vie d’un père et la vie de son fils sont la même chose, en ce sens que le sang (c’est-à-dire la vie) du parent coule dans les veines de ses enfants ; Ainsi, dans un sens analogue, la vie du mari et de la femme est une. Ils ont une vie commune, et cette vie commune ou commune est transmise à leur progéniture. C’est la doctrine de l’Église primitive. Les Constitutions apostoliques disent :1 ή ywy κο׳״ωι׳ό9 ίση βίου, ενουμέν-η cls εν σώμα εκ δι’ο τταηά θεοΰ.
1Lib. vi. cap. xiv. ; Millepertuis de Clément de Lomé, édit. Migne, Paris, 1S57, t. I, p. 945, ch.
L’analogie que l’apôtre trace dans Éphésiens v. 22-33, entre la relation conjugale et l’union entre Christ et son Église, fait ressortir la doctrine scripturaire du mariage plus clairement que peut-être tout autre passage de la Bible. On ne s’attend pas à ce qu’il y ait une analogie. à tous égards, et aucune illustration empruntée aux relations terrestres ne peut faire ressortir toute la plénitude des choses de Dieu. La relation entre un mari et sa femme n’est donc qu’une adumbration de la relation du Christ avec son Église. Il y a encore une analogie entre les deux, (1.) Comme l’enseigne l’Apôtre, l’amour du Christ pour son Église est particulier et exclusif. C’est tel qu’il ne l’a pour aucune autre classe ou corps de créatures rationnelles dans l’univers. L’amour du mari pour sa femme est donc particulier et exclusif. C’est tel qu’il n’a pour objet aucun autre ; un amour auquel personne ne peut participer. (2) L’amour du Christ pour son Église est l’abnégation. Il s’est donné lui-même pour cela. Il a acheté l’Église par son sang. Ainsi le mari doit, et quand c’est vrai, il le fait, se sacrifier en toutes choses pour sa femme. (3) Le Christ et son Église ne font qu’un ; en ce sens que l’Église est son corps. Ainsi le mari et la femme ne font qu’un, en ce sens que l’homme, en aimant sa femme, s’aime lui-même. (4) La vie du Christ est communiquée à l’Église. Comme la vie de la tête est communiquée aux membres du corps humain ; et la vie de la vigne aux sarments, de sorte qu’il y a, dans un sens mystérieux, une communauté de vie entre le Christ et son Église. De la même manière, D’une manière non moins vraiment mystérieuse, il y a une communauté de vie entre mari et femme.
De tout cela, il s’ensuit que, de même qu’il serait tout à fait incongru et impossible que le Christ ait deux corps, deux épouses, deux Églises, de même il n’est pas moins incongru et impossible qu’un homme ait deux femmes. C’est-à-dire que la relation conjugale, telle qu’elle est exposée dans l’Écriture, ne peut subsister qu’entre un homme et une femme.
1. Si telle est la véritable doctrine du mariage, il s’ensuit, comme nous venons de le dire, que la polygamie détruit sa nature même. Elle est fondée sur une conception erronée de la nature de la femme ; la met dans une position fausse et dégradante ; la détrône et la dépouille ; et il produit d’innombrables maux.
2. Il s’ensuit que la relation matrimoniale est permanente et indissoluble. Un membre peut être violemment séparé du corps, et perdre tout lien vital avec lui ; et le mari et la femme peuvent être ainsi séparés violemment, et leurs relations conjugales annulées ; Mais dans les deux cas, la connexion normale est permanente.
3. Il s’ensuit que l’État ne peut ni constituer ni dissoudre le lien matrimonial. Elle ne peut pas plus libérer un mari ou une femme « a vinculo matrimonii » qu’elle ne peut libérer un père « a vinculo » paternitatis. Il peut protéger un enfant de l’injustice ou de la cruauté de son père, ou même, pour un motif valable, le soustraire à tout contrôle parental, et il peut légiférer sur ses biens, mais le lien naturel entre les parents et les enfants est hors de son contrôle. Ainsi l’État peut légiférer sur le mariage, et en déterminer les accidents et les conséquences juridiques ; il peut décider qui, aux yeux de la loi, doit être considéré comme mari et femme, et quand, ou dans quelles circonstances, les droits et privilèges légaux ou civils découlant de la relation cesseront d’être appliqués ; et il peut protéger la personne et les droits de la femme, et, si nécessaire, l’soustraire à l’emprise de son mari, mais le lien conjugal ne peut pas être dissous. Tous les jugements de divorce « a vinculo matrimonii », prononcés par les autorités civiles ou ecclésiastiques, en ce qui concerne la conscience, sont parfaitement inopérants, à moins qu’antérieurement à ce jugement et par la loi de Dieu, la relation conjugale n’ait cessé d’exister.
4. Il résulte de la doctrine biblique du mariage que toutes les lois qui tendent à faire de ces deux personnes que Dieu se prononce comme étant un ; Des lois, par exemple, qui donnent à la femme le droit de faire des affaires, de contracter des dettes, d’intenter des poursuites et d’être poursuivie en son propre nom. C’est tenter de corriger une classe de maux au prix d’en encourir d’autres cent fois plus grands. La Parole de Dieu est aussi le seul guide sûr de l’action législative comme de la conduite individuelle.
5. Il est à peine besoin de remarquer qu’il résulte de la nature du mariage qu’après le meurtre, l’adultère est le plus grand de tous les crimes sociaux. Sous l’ancienne dispensation, elle était passible de la peine de mort. Et même aujourd’hui, c’est pratiquement Impossible de condamner de meurtre un mari qui tue l’homme qui a commis l’adultère avec sa femme. Cela vient du fait que les lois humaines sont en conflit avec les lois de la nature et de Dieu. La loi de Dieu considère le mariage comme l’identification d’un homme et de sa femme ; Les lois de l’État le considèrent trop souvent comme un simple contrat civil, et n’accordent à un mari lésé aucune réparation, mais une action en dommages-intérêts pour la perte pécuniaire qu’il a subie en étant privé des services de sa femme. La peine pour adultère, qui doit être proportionnée à la gravité du crime, doit être sévère et dégradante.
6. Les devoirs relatifs du mari et l’épouse découlant de leur relation, peut être exprimée en quelques mots complets. Le mari doit aimer, protéger et chérir sa femme comme lui-même, c’est-à-dire comme étant pour lui un autre moi. Les devoirs de l’épouse sont énoncés dans la formule chrétienne séculaire : « Aimez, honorez et obéissez ».
La question a été soulevée : Un polygame, lorsqu’il est converti au christianisme, devrait-il être tenu de répudier toutes ses femmes, sauf un, comme condition de son admission dans l’Église chrétienne ? La réponse à cette question a été recherchée à partir de trois sources : Premièrement, la doctrine biblique du mariage ; deuxièmement, l’exemple des Apôtres lorsqu’ils traitent de ces facilités ; et troisièmement, de l’examen des effets qui résulteraient de faire de la monogamie une condition indispensable de l’admission dans l’Église.
En ce qui concerne le premier point, tous les chrétiens admettent que c’est la loi de Dieu, la loi du Christ, et par conséquent la loi de l’Église chrétienne, que la polygamie est un péché, étant une violation de la loi originelle et obligatoire du mariage. Comme tout homme qui entre dans l’Église professe être chrétien, et que tout chrétien est tenu d’obéir à la loi du Christ, il semble évident qu’aucun homme ne doit être reçu dans la communion de l’Église s’il ne se conforme pas à la loi du Christ concernant le mariage. La seule question est de savoir si le Christ a fait une exception spéciale en faveur de ceux qui, dans les temps de leur ignorance, ont contracté les obligations du mariage avec plus d’une femme. Il est bien sûr possible qu’une telle exception ait été faite. Ce serait analogue à la suspension temporaire de la loi originelle sur le mariage en faveur de des Juifs au cœur dur. Une telle exception a-t-elle donc été faite ? C’est le deuxième point à considérer. Il s’agit d’une question de fait.
Ceux qui supposent qu’une telle exception a été faite sont tenus d’en produire la preuve la plus claire. Cela est nécessaire non seulement pour satisfaire la conscience des parties concernées, mais aussi pour justifier une dérogation à une loi de Dieu clairement révélée. Ce serait une affaire très grave que d’établir dans un pays païen, une église qui ne soit pas conforme en cette matière à la loi habituelle de la chrétienté. Des missionnaires sont envoyés pour enseigner non seulement les doctrines chrétiennes, mais aussi la morale chrétienne. Et les églises qu’ils ont fondées professent être des témoins de Christ quant à ce qu’Il veut que les hommes croient, et quant à ce qu’Il veut qu’ils fassent. Ils ne devraient pas être autorisés à porter de faux témoignages. Il est certain qu’il n’y a pas d’expression claire et définitive de la volonté du Christ, rapportée dans le Nouveau Testament, que le cas envisagé devrait être une exception à la loi scripturaire du mariage. Il n’y a aucun exemple enregistré dans le Nouveau Testament de l’admission d’un polygame dans l’Église chrétienne. Elle a, en effet, été déduite de 1 Timothée iii. 2, où l’Apôtre dit qu’un évêque doit être « le mari d’une seule femme », afin qu’un membre privé de l’Église puisse avoir plus d’une femme. Mais c’est en soi une inférence très précaire ; et étant incompatible avec l’interdiction expresse du Christ, elle est tout à fait inadmissible. Le sens de ce passage a été très contesté. Ce que l’Apôtre exige, c’est qu’un évêque soit à tous égards un homme exemplaire : il ne s’adonne pas au vin, il n’est pas un gréveur, il n’est pas avide de lucre sale ; le mari d’une seule femme, c’est-à-dire qu’il n’est pas polygame. Cela n’implique pas plus que d’autres hommes peuvent être polygames, que son affirmation qu’un évêque ne doit pas être avide d’un gain sale et non un bagarreur, implique que d’autres hommes peuvent être cupides ou querelleurs. Selon une autre interprétation largement acceptée du passage de 1 Timothée iii. 2, et le passage correspondant de Tite, I, 6, l’injonction de l’apôtre est qu’un homme qui a été marié plus d’une fois, ne doit pas être nommé évêque ou prêtre. Si c’est là le vrai sens de l’Apôtre, son langage fournit encore moins de fondement à l’argument qu’il en tire en faveur de la licéité de la polygamie dans les membres de l’Église. Si même le second mariage était interdit aux prêtres, a fortiori la polygamie doit être considérée comme incompatible avec la loi du Christ.
Cette interprétation a été très généralement adoptée dans l’Église primitive, au Moyen Âge, et par les romanistes, et est soutenu par de nombreux commentateurs récents. L’évêque Ellicott se prononce en faveur de cette interprétation. Ses motifs sont les suivants : — (1.) L’opinion des premiers écrivains et de quelques conciles. (2) Le respect spécial que les païens portaient à une femme qui était « uni vira ». (3) La convenance, dans le cas de επίσκοποι et διάκονοι, d’une plus grande tempérance. (4) Et la manifestation d’une plus grande sainteté (^σίμνότης) d’un seul mariage, qu’il pense être indiquée même dans l’Écriture (Luc, II, 36, 37). Les objections qu’on lui fait sont les suivantes :
D’abord, qu’elle repose sur une vision non biblique du mariage. Selon la Bible, le mariage est un état meilleur, plus élevé et plus saint, parce que l’état normal, que le célibat. Ce n’est que dans l’intérêt de la doctrine de la sainteté particulière du célibat que cette interprétation a été adoptée par les pères.
En second lieu, elle repose sur le pas moins présomption non biblique de la sainteté supérieure du clergé. Aucun degré de pureté morale n’est exigé d’eux que des autres hommes, pour la simple raison que tout homme est tenu d’être parfaitement saint de cœur et de vie. L’interprétation en question s’imposa de plus en plus à l’Église à mesure que la doctrine de « la grâce de l’ordre » et du sacerdoce du clergé prenait de l’ascendant. Lorsque la Réforme est venue balayer ces deux doctrines, elle a supprimé les deux principaux supports de l’interprétation en question. Il ne faut pas admettre qu’il puisse y avoir quelque chose d’impie dans les secondes noces, qu’un Dieu infiniment saint déclare licite (Rom., VII, 3), ni qu’on puisse admettre que le clergé soit plus saint que les autres croyants, puisque le seul sacerdoce de l’Église sur la terre est le sacerdoce commun à tous les croyants.
En troisième lieu, l’interprétation qui fait interdire à l’Apôtre les secondes noces avec les évêques et les diacres, est contraire au sens naturel des mots. Le passage parallèle de Tite i. 5, 6, se lit ainsi : « Afin que tu puisses ... ordonne des anciens dans chaque ville, comme je t’avais établi : si quelqu’un est irréprochable, le mari d’une seule femme, etc. ; « eiriç εστιν . . . μιάζ γυιαιχος , άνηρ, « si quelqu’un est à l’heure actuelle le mari d’une seule femme ». C’est l’état actuel et le caractère de l’homme qui doivent être pris en considération. Il se peut qu’il ait déjà été célibataire, ou même polygame, mais une fois ordonné, il ne doit, s’il est marié, être le mari que d’une seule femme. « Qui sit : non ante!!, Qui fuerit », dit Calvin dans son commentaire sur 1 Timothée iii. 2. Et sur Tite I. G, il dit : « Qui dcfuncta uxore alteram jam cœlebs inducit, nihiloniiniis unius uxoris maritus censeri debet. Non enim eligendun ! docet qui fuerit maritus unius uxoris, sed qui sit. » Quelle que soit l’interprétation de 1 Timothée iii. 2, soit que nous comprenions que l’apôtre défende qu’un polygame, ou qu’un homme marié deux fois, soit admis au ministère, dans aucun des deux cas le passage ne donne l’autorité de recevoir un polygame dans la communion de l’Église. Considérant donc que la monogamie est la loi indubitable du Christ ; considérant que nous n’avons aucune preuve qu’il ait fait une exception en faveur des païens convertis ; et considérant la grande importance que les églises, fondées dans les pays païens, rendent un véritable témoignage des doctrines et des préceptes du christianisme, il semble clair qu’aucun homme ayant plus d’une femme ne devrait être admis dans la communion chrétienne.
Le troisième aspect de cette question concerne les effets de l’application de la loi chrétienne du mariage dans les pays païens. On insiste sur le fait que cela entraînerait une grande cruauté et une grande injustice. Qu’un homme se débarrasse des femmes qu’il avait engagées pour les protéger et les chérir, qu’il les abandonne non seulement elles, mais aussi leurs enfants, dit-on, cela ne peut être concilié avec aucun principe juste. A cela, on peut répondre : — (1.) Que dans beaucoup de pays païens, ce n’est pas le mari qui soutient les femmes, mais les femmes qui soutiennent le mari. Ils sont ses esclaves et le soutiennent par leur travail. Il n’y aurait pas de grandes difficultés à les libérer. (2) Mais quand il n’en est pas ainsi, il ne s’ensuit pas que, parce qu’un homme cesse de considérer plusieurs femmes comme ses femmes, il doive cesser de pourvoir à leurs besoins et au bien-être de ses enfants. Quoi qu’il en soit, en tant que chrétien, il est tenu de le faire.
Il est également suggéré, comme une difficulté dans cette affaire, qu’il est difficile de déterminer laquelle de ses nombreuses épouses un polygame converti devrait conserver. Quelques-uns disent que c’est celui qui s’est marié le premier ; d’autres disent qu’il devrait être autorisé à faire ses propre sélection. Si le mariage chez les païens était ce qu’il est dans les pays chrétiens, il n’y aurait pas de place pour le doute à ce sujet. Dans ce cas, le premier contrat serait le seul contraignant, et tous les autres seraient nuls et non avenus. Mais dans le sens chrétien du terme, il n’y a pas eu de mariage dans tous les cas. Il n’y a pas eu de promesse ni de vœu de fidélité mutuelle. La relation d’un polygame païen avec les femmes de son harem est plus analogue au concubinage qu’au mariage chrétien. La relation d’un polygame païen avec ses nombreuses épouses est si différente de la relation conjugale telle qu’elle est envisagée dans l’Écriture, qu’il est au moins douteux que l’obligation du mari soit exclusivement, ou avant tout, à la femme choisie en premier. C’est là un point de casuistique sur lequel ceux qui s’attendent à travailler dans les pays païens devraient porter leur attention. L’Église romaine se prononce en faveur de la première épouse. Le Catéchisme romain1 dit : « Atque ob earn rem fieri intelligimus, ut, si infidelis quispiam, gentis suæ more et consuetudine, plures uxores duxisset, cum ad veram religionem conversas fuerit, jubeat eum Ecclesia ceteras omnes relinquere, ac priorem tantum justæ et légitima) uxoris loco habere. »
1ii. viii. 17 (19,xxvi.) ; Streitwolf, Libri Symbolici, Göttingen, 1840, t. I, p. 458.
Les questions qui appellent à ce titre, au moins un bref examen, sont les suivantes : (1) Qu’est-ce que le divorce et quels sont ses effets légitimes ? 2.) Quels sont les motifs bibliques du divorce ? (3.) Quelles sont la doctrine et la pratique romaines à ce sujet ? (4.) Quelles sont la doctrine et la pratique des Églises et des pays protestants ? 5. Quel est le devoir de l’Église et de ses officiers dans les cas où les lois de l’État à ce sujet sont en conflit avec la loi de Dieu ? Les ouvrages sur le droit civil et le droit canonique, lorsqu’ils traitent du divorce, prennent une portée beaucoup plus large que celle-ci, mais les points indiqués ci-dessus semblent inclure ceux qui intéressent et ont le plus d’importance pour le théologien.
Divorce; sa nature et ses effets.
Le divorce n’est pas une simple séparation, qu’elle soit temporaire ou définitive, « a mensa et thoro ». Il ne s’agit pas d’une séparation qui laisse les parties dans la relation de mari et de femme et les dispense simplement de l’obligation de leurs devoirs relatifs. Le divorce annule le « vinculum matrimonii », de sorte que les parties ne sont plus mari et femme. Ils se tiennent désormais l’un à l’autre dans le même rapport qu’ils étaient avant le mariage. Que ce soit là la véritable idée du divorce, c’est évident par le fait que, sous l’ancienne dispensation, si un homme répudiait sa femme, elle était libre de se remarier. (Deut. XXIV. 1 et 2.) Cela suppose, bien sûr, que la relation matrimoniale avec son ex-mari était effectivement dissous. Notre Seigneur enseigne la même doctrine. Les passages des Évangiles, se référant à ce sujet, sont Matthieu v. 31, 32 ; xix. 3 à 9 ; Marc x. 2-12 ; et Luc xvi. 18. Le sens simple de ces passages semble être que le mariage est un pacte permanent, qui ne peut être dissous par la volonté de l’une ou l’autre des parties. Si donc un homme répudie arbitrairement sa femme et en épouse une autre, il commet un adultère. S’il la répudie pour de justes motifs et en épouse une autre, il ne commet aucune offense. Notre Seigneur fait dépendre la culpabilité de se marier après la séparation du motif de la séparation. Disant que si un homme répudie sa femme pour une autre cause que la fornication, et en épouse une autre, il commet l’adultère ; dit que « l’infraction est n’est pas commis si le motif de divorce spécifié existe. » Et cela veut dire que le divorce, lorsqu’il est justifiable, dissout le lien matrimonial.
Bien que cela semble si clairement être la doctrine des Écritures, la doctrine opposée a prévalu de bonne heure dans l’Église et a rapidement pris l’ascendant. Augustin lui-même a enseigné dans son ouvrage «De Conjugiis Adultérmis,»1 et ailleurs, qu’aucune des parties après le divorce ne pouvait contracter un nouveau mariage. Dans ses « Rétractations », cependant, il exprime des doutes sur le sujet. Il passa cependant dans le droit canonique, et reçut la sanction autorisée du concile de Trente, qui dit :2 « Si quis dixerit, ecclesiam errare, cum docuit et docet, juxta evangelieam et apostolicam doetrinam, propter adultère alterius conjugum matrimonii vinculum non posse dissolvi ; et utrumque, vel etiam innocentent, qui eausam adulterio non dedit, non posse, altero conjuge vivente, aliud matrimonium contrahere ; mœcharique eum, qui, dimissa adultéra, aliam duxerit, et earn, quæ, dimisso adultero, alii nupserit ; anathème, assieds-toi. C’est la conséquence nécessaire de la doctrine selon laquelle la relation matrimoniale ne peut être dissoute que par la mort. L’indisposition de l’Église médiévale et romaine à admettre les remariages après le divorce doit sans doute être attribuée en partie à la basse idée de l’état matrimonial qui prévaut dans l’Église latine. Elle avait cependant son fondement dans l’interprétation donnée à certains passages de l’Écriture. Dans Marc x. 11, 12, et dans Luc xvi. 18, Notre-Seigneur dit sans aucune réserve : « Quiconque répudie sa femme, et épouse un autre, commet l’adultère ; et quiconque épouse celle qui est éloignée de son mari commet un adultère. Cela a été considéré comme la loi sur le sujet, sans égard à ce qui est dit dans Matthieu v. 31, 32 et xix. 3-9. Cependant, comme il n’y a aucun doute sur l’authenticité des passages de Matthieu, on ne peut les négliger. Une expression de la volonté du Christ est aussi autorisée et aussi satisfaisante que mille répétitions pourraient le faire. L’exception énoncée dans Matthieu doit donc être maintenue. La raison de l’omission dans Marc et Luc peut s’expliquer de différentes manières. Certains disent que l’exception était nécessairement comprise de par sa nature même, qu’elle soit mentionnée ou non. Ou bien qu’elle ait été énoncée deux fois, il n’était pas nécessaire de la répéter. Ou, ce qui est peut-être le plus probable, comme Notre-Seigneur parlait aux pharisiens, qui soutenaient qu’un homme pouvait répudier sa femme quand il lui plaisait, il suffisait de dire que les divorces auxquels ils étaient accoutumés ne dissolvaient pas les liens du mariage, et que les parties restaient autant mari et femme qu’elles l’étaient auparavant. Sous l’Ancien Testament, le divorce pour cause d’adultère était hors de question, car l’adultère était puni de mort. C’est pourquoi ce n’est que lorsque le Christ a établi la loi de son propre royaume, en vertu de laquelle la peine de mort pour adultère devait être abolie, qu’il a été nécessaire de faire référence à ce crime.
1 Œuvres, édit. Bénédictines, Paris, 1837, t. VI, p. G58.
2 Sess. xxiv. Canon 7 ; Streitwolf, Libii Symbolic,, Göttingen, 1846, t. I, p. 90, 91.
On s’est vivement opposé à la doctrine selon laquelle l’adultère dissout le lien du mariage, que les deux parties, le coupable aussi bien que l’innocent, deviennent libres, et que l’un ou l’autre peut contracter un nouveau mariage. S’il en est ainsi, on dit que tout ce qu’un homme qui veut se débarrasser de sa femme a à faire, c’est de commettre ce délit. Il sera alors libre d’épouser qui il veut. À cela, il suffirait de répondre que l’objection porte plutôt contre la sagesse de la loi, que contre le fait qu’elle est la loi ; ou, en d’autres termes, l’objection est contre le sens clair des paroles de Christ. Mais il ne faut pas oublier que l’adultère est un crime aux yeux de l’homme aussi bien qu’aux yeux de Dieu, et qu’en tant que tel il doit être puni. Sous l’ancienne dispensation, elle était punie de mort ; En vertu de la nouvelle, elle peut être punie d’emprisonnement ou de l’interdiction de tout mariage futur. Le Christ laisse à ses disciples le châtiment de ce crime, comme des autres crimes, dans leur capacité civile. Tout ce qu’il fait, c’est d’enseigner quels sont ses effets, « in foro conscientiæ », quant au lien matrimonial.
Comme nous l’avons déjà dit, le mariage est un pacte indissoluble entre un homme et une femme. Il ne peut être dissous par aucun acte volontaire de répudiation de la part des parties contractantes ; ni par aucun acte de l’Église ou de l’État. « Ceux que Dieu a unis, personne ne peut les séparer. » Le pacte peut cependant être dissous, mais pas par un acte légitime de l’homme. Elle est dissoute par la mort. Elle se dissout par l’adultère ; et, comme l’enseignent les protestants, par désertion volontaire. En d’autres termes, il y a certaines choses qui, de par leur nature, entraînent une dissolution du lien matrimonial. Toute l’autorité légitime que l’État a sur les lieux, c’est de prendre connaissance du fait que le mariage est dissous ; de l’annoncer officiellement, et de prendre des dispositions appropriées pour l’altération des rapports entre les parties.
Sous le titre précédent, il a déjà été démontré que, selon l’enseignement clair de notre Sauveur, le lien matrimonial est annulé par le crime d’adultère. La raison en est que les parties ne sont plus une, dans le sens mystérieux dans lequel la Bible déclare qu’un homme et sa femme ne font qu’un. 1 L’apôtre enseigne à ce sujet la même doctrine que celle que le Christ avait enseignée. Le septième chapitre de sa première épître aux Corinthiens est consacré au sujet du mariage, à propos duquel plusieurs questions lui avaient été proposées.
1 Que le mot πορνεία, tel qu’il est employé dans Matthieu v. 32, et xix. 9, signifie adultère, il ne peut y avoir de doute raisonnable. Πορνεία est un terme général englobant toute cohabitation sexuelle illicite, comme le dit Théodoret sur Romains i. 29 (édit. Halle, 1771), καλεΐ πορνείαν τ’ην ον κατά ■γάμον yi-ϊ0׳/Λ€1׳ηι׳ σννονσίαν \ tandis que μοιχεία est la même infraction lorsqu’elle est commise par une personne mariée. Pour l’emploi précis du mot πορνεία, voir 1 Corinthiens v. 1. Tholnck discute longuement de la signification de ce mot tel qu’il est utilisé par Matthieu dans son Bergpredigt, 3e édition, Hambourg, 1845, pp. 225-230.
Il pose d’abord le principe général, fondé sur la Parole de Dieu et sur la nature de l’homme, qu’il vaut mieux que chaque homme ait sa propre femme et chaque femme son propre mari ; Mais en raison de la « détresse présente (ou imminente) », il conseille à ses lecteurs de ne pas se marier. Il écrit aux Corinthiens comme un homme écrirait à une armée sur le point d’entrer dans un conflit des plus inégaux dans un pays ennemi, et pour une longue période. Il leur dit : « Ce n’est pas le moment pour vous de penser au mariage. Vous avez le droit de vous marier. Et en général, il est préférable que tous les hommes se marient. Mais dans votre situation, le mariage ne peut conduire qu’à l’embarras et à l’augmentation de la souffrance. Cette limitation de son conseil de ne pas se marier, aux hommes dans la situation de ceux à qui le conseil est donné, n’est pas seulement énoncée en tant de mots au verset 26, mais c’est la seule façon dont Paul peut être réconcilié avec lui-même ou avec l’enseignement général de la Bible. On a déjà remarqué qu’aucun des écrivains sacrés ne parle du mariage en termes plus élevés que cet apôtre. Il la représente comme une union spirituelle des plus ennoblissantes, qui élève l’homme hors de lui-même et le fait vivre pour un autre ; une union si élevée et si raffinée qu’elle en fait un symbole approprié de l’union entre le Christ et son Église. Le mariage, selon cet Apôtre, fait pour l’homme dans la sphère de la nature, ce que l’union avec le Christ fait pour lui dans la sphère de la grâce.
Après avoir ainsi donné comme avis qu’il valait mieux, dans les circonstances actuelles, que les chrétiens ne se mariassent pas, il se mit à donner des instructions à ceux qui étaient déjà mariés. Parmi ceux-ci, il y avait deux classes : d’abord, ceux où le mari et la femme étaient chrétiens ; et deuxièmement, celles où l’une des parties était croyante et l’autre incroyante, c’est-à-dire juive ou païenne. À l’égard de la première, il dit que, comme le mariage est indissoluble selon la loi du Christ, aucune des parties n’avait le droit de répudier l’autre. Mais si, en violation de la loi du Christ, une femme avait abandonné son mari, elle était tenue de rester célibataire ou de se réconcilier avec son mari. L’apôtre reconnaît donc implicitement le principe qu’il peut y avoir des causes qui justifient qu’une femme quitte son mari, qui ne justifient pas la dissolution du lien matrimonial.
En ce qui concerne les cas où l’une des parties était chrétienne et l’autre incroyante, il enseigne, premièrement, que de tels mariages sont licites et que, par conséquent, ils ne doivent pas être dissous. Mais, deuxièmement, que si le partenaire non croyant s’en va , c’est-à-dire répudie le mariage, le partenaire croyant n’est pas lié ; c’est-à-dire qu’il n’est plus lié par le pacte matrimonial. Cela semble être le sens clair. Si le partenaire incroyant est disposé à poursuivre la relation conjugale, la partie croyante est liée ; c’est-à-dire d’être fidèle au pacte de mariage. Si l’incroyant n’est pas disposé à rester, le croyant dans ce cas n’est pas lié ; c’est-à-dire liés par le pacte de mariage. En d’autres termes, le mariage est ainsi dissous. Ce passage est parallèle à Romains VII. 2. L’Apôtre y dit : La femme « est liée par la loi à son mari, tant qu’il vit ; mais si le mari est mort, elle est affranchie de la loi de son mari. C’est pourquoi il dit ici : « Une femme est liée à son mari s’il veut rester avec elle ; mais s’il l’abandonne, elle est libre de lui. C’est-à-dire que l’abandon volontaire annule le lien matrimonial. Cette désertion, cependant, doit être délibérée et définitive. C’est implicite dans l’ensemble du contexte. Le cas envisagé est celui où le mari non croyant refuse plus longtemps de considérer sa partenaire croyante comme sa femme.
Cette interprétation du passage est donnée non seulement par les anciens interprètes protestants, mais aussi par les principaux commentateurs modernes, tels que De Wette, Meyer, Alford et Wordsworth, et dans les Confessions des Églises luthériennes et réformées. Même les romanistes sont du même avis. Ils soutiennent, en effet, que chez les chrétiens le mariage est absolument indissoluble, sauf par la mort de l’une des parties. Mais si l’un des partenaires est un mécréant, alors ils soutiennent que la désertion annule le contrat de mariage. Sur ce point, Corneille à Lapide, de Louvain et de Rome, dit : « Nota, Apostolum permittere hoc casu non tantum thori divortium sed etiam matrimonii ; ita nt possit conjux fidelis aliud matrimonium inire. » Lapide se réfère à Augustin, Thomas d’Aquin et Ambroise à l’appui de cette opinion. 1 Le droit canonique, sous le titre de Divortiis, enseigne la même doctrine. Le commentaire de Words-worth sur ce passage est le suivant : « Bien qu’un chrétien ne puisse pas répudier sa femme, étant un incroyant, cependant, si la femme abandonne son mari (χωρίζεται), il peut contracter un second mariage. »
1 Commentaire. 1 Corinthiens VII, 15 ; édit. Venise, 1717.
Les romanistes fondent en effet leur sanction au remariage dans le cas supposé, sur le motif qu’il y a une différence essentielle entre le mariage où l’une des parties ou les deux sont païennes, et le mariage où les deux parties sont chrétiennes. Mais cela ne fait aucune différence. Paul venait de dire que de tels mariages inégaux étaient légaux et valides. Aucune des parties ne pouvait légitimement répudier ou abandonner l’autre. Le motif de divorce indiqué n’est pas la différence de religion, mais l’abandon.
Il y a un terrain d’entente adopté par beaucoup, anciens et modernes, dans l’interprétation de ce passage. Ils admettent que la désertion justifie le divorce, mais non le remariage de la partie désertée. À cela, on peut objecter :
1. Que cela est incompatible avec la nature du divorce. Nous avons déjà vu que le divorce chez les Juifs, tel qu’il est expliqué par le Christ, et tel qu’il est compris dans l’Église apostolique, était une séparation de l’homme et de la femme qui dissolvait le lien du mariage. Cette idée a été exprimée dans l’utilisation des mots άττολύε׳״, άφιίναι, χώριζαν, et ce sont les mots utilisés ici.
2. Cette interprétation est incompatible avec le contexte et le dessein de l’apôtre. Parmi les questions soumises à sa décision, il y avait celle-ci : « Est-il permis à un chrétien de rester dans une relation conjugale avec un incroyant ? » Paul répond : « Oui ; De tels mariages sont légaux et valides. Donc Si l’incroyant est disposé à poursuivre la relation conjugale, le croyant reste lié ; mais si l’incroyant refuse de continuer le mariage, il n’est plus lié par celui-ci. Dire que le croyant n’est plus tenu d’abandonner sa religion, ce qui semble être l’idée de Néandre, ou qu’il n’est pas tenu de s’imposer à un partenaire récalcitrant, ne serait pas pertinent. Aucun chrétien ne pouvait se croire obligé d’abandonner sa religion, et personne ne pouvait penser qu’il fût possible que la vie conjugale pût être sans le consentement des parties. La question, en ce sens, ne valait pas la peine d’être posée ou répondue.
3. La désertion, de par la nature de l’infraction, est une dissolution du lien matrimonial. Pourquoi la mort dissout-elle un mariage ? C’est parce qu’il s’agit d’une séparation définitive. Il en va de même pour la désertion. L’incompatibilité de tempérament, la cruauté, la maladie, le crime, la folie, etc., que les lois humaines rendent souvent des motifs de divorce, ne sont pas incompatibles avec la relation matrimoniale. Une femme peut avoir un mari désagréable, cruel ou méchant, mais un homme dans sa tombe, ou quelqu’un qui refuse de la reconnaître comme sa femme, ne peut pas être son mari.
On dit, en effet, que cette doctrine fait dépendre le mariage de l’option des parties. L’un peut abandonner l’autre ; et puis le mariage est dissous. La même objection a été faite à la doctrine de notre Seigneur selon laquelle l’adultère détruit le lien du mariage. On disait que s’il en était ainsi, l’une ou l’autre des parties pourrait dissoudre le mariage en commettant ce crime. Comme les objections sont les mêmes, la réponse est la même. Comme l’adultère est un crime, la désertion l’est aussi ; Et les deux devraient être punis. La question n’est pas de savoir ce que ces crimes méritent, mais quels sont leurs effets légitimes, selon les Écritures, sur la relation conjugale.
Que la désertion soit un motif légitime de divorce, c’était donc, comme nous l’avons déjà dit, la doctrine des réformateurs, de Luther, de Calvin et de Zwingle, et presque sans exception de toutes les églises protestantes.1
1 Voir l’article détaillé sur « Elie » dans l’Encyklopiidie de Herzog , et le récent Essai sur le divorce du président Woolsey , New York, !839, chap. iv. Le président Woolsey ne comprend pas, pour lui-même, 1 Corinthiens vii. 15, pour enseigner que l’abandon justifie le divorce.
Le mariage est ainsi défini dans le Catéchisme romain : « Matrimoninm est viri, et mulieris maritalis conjunctio inter légitimas personas, individuam vitæ consuetudinem retinens ». La clause « inter légitimas personas » s’explique en disant : « Qui a nuptiarum conjunctione legibus omnino exclus ! Sunt, II Matrimonium inire non possunt ; neqiie, si ineant, ratum est, exempli enim gratia : qui intra quartum gradum propinquitate conjunct ! Sunt, puerque ante decimum quartum annum, aut puella ante duodecimal!, quæ ætas legibus constituta est, ad matrimonii justa fœdera ineunda apt ! esse non possunt. » La clause : « Individuam vitæ consuetudinem retinens », il est dit : « indissolubilis vinculi naturam declarat quo vir, et uxor colligantur. » 2
2 Catéchisme, ex Decreto Concilii Tridentini, ad Parochos, Pii V. Pont. J fax. Jussu editus, 11. VIII. quæst. 3 ; Streitwolf, t. I, p. 448.
Le mariage doit être envisagé sous deux aspects. C’est une institution fondée dans la nature, et donc elle existe partout où les hommes existent. C’est une institution légitime parmi les païens aussi bien que parmi les chrétiens. Mais comme c’est une ordonnance de Dieu, elle a un caractère beaucoup plus élevé parmi ceux qui connaissent le vrai Dieu et le considèrent, beaucoup plus élevé que chez ceux qui adorent les faux dieux. C’est pourquoi le mariage, sous l’ancienne dispensation, avait un caractère beaucoup plus élevé que chez les païens. Néanmoins, chez les chrétiens, le mariage est quelque chose de beaucoup plus sacré qu’il ne l’était sous l’économie mosaïque. Le Christ l’avait élevé à la dignité d’un sacrement.1
1 Catéchisme romain, 11. VIII. ouæst. 14, 16 ; Streitwolf, t. I, p. 454-457.
Le mot sacrement a un sens vague et varié. Parfois, il s’agit de ce qui est sacré ou consacré ; quelquefois ce qui a, ou est destiné à avoir un sens sacré ; c’est-à-dire un signe extérieur d’une vérité ou d’une grâce religieuse ; tantôt un rite extérieur divinement désigné institué pour être un moyen de grâce ; et tantôt un signe extérieur divinement désigné qui contient et transmet la grâce qu’il signifie. C’est dans ce dernier sens que le mot est employé par les romanistes ; Et c’est en ce sens qu’ils enseignent que le mariage est un sacrement. La principale autorité scripturaire pour cette doctrine, ils la trouvent dans Éphésiens v. 32, où, selon qu’ils comprennent le passage, les mots το μυστήριον τούτο péya ίστίν, rendus dans la Vulgate, « Sacramentum hoc magnum est », sont prononcés à propos du mariage. Selon cette version et cette interprétation, l’apôtre affirme en effet directement que le mariage est un mystère. Mais (1.) Les mots ne se réfèrent pas au mariage, mais à l’union mystique entre le Christ et son peuple, comme il ressort de l’explication de l’Apôtre lui-même dans la clause suivante : « Je parle du Christ et de l’Église. » Les deux sujets, l’union du mari et de la femme et l’union entre le Christ et son peuple, avaient été tellement combinés et entrelacés dans les versets précédents, qu’il aurait été difficile de déterminer à quoi se référaient les mots : « C’est un grand mystère », si l’apôtre lui-même ne nous l’avait pas dit. Mais (2.) Même si l’apôtre dit que l’union matrimoniale est un grand mystère, ce qui est clairement le cas dans un sens, cela ne prouverait pas qu’il s’agit d’un sacrement. Le mot « mystère », tel qu’il est utilisé dans la Bible, signifie quelque chose de caché ou d’inconnu ; quelque chose qui ne peut être connu que par la révélation divine. C’est pourquoi l’Évangile lui-même est dit à plusieurs reprises comme un mystère (Eph. iii. 3 à 9) ; la conversion future des Juifs est, dit-on, un mystère (Rom. xi. 2 :5) ; l’incarnation est dite être le grand mystère de la piété (1 Tim. iii. 16) ; et tout ce qui est obscur ou énigmatique s’appelle un mystère (Apoc., XVII, 5) ; Ainsi, le mystère des sept chandeliers est leur signification secrète. Si donc Paul dit que le mariage est un grand mystère en ce sens que personne ne peut comprendre pleinement ce que l’on veut dire quand Dieu dit que mari et femme ne font qu’un, ou même en ce sens que le mariage a une signification sacrée, qu’il est le symbole d’une grande vérité religieuse, c’est ce que tous les protestants admettent et ce qui est clairement enseigné dans l’Écriture. Paul lui-même venait de présenter le mariage comme le grand analogue de l’union mystique du Christ et de l’Église. (3) Admettre encore que le mariage soit proprement appelé sacramentum, cela ne prouverait rien à l’intention. Ce mot latin n’eut le sens que lui attachaient les romanistes que longtemps après l’âge apostolique. Il n’a pas ce sens, même dans la Vulgate. Dans 1 Timothée iii. 16, la manifestation de Dieu dans la chair est déclarée être le « grand mystère de la piété », que la Vulgate traduit par « magnum pietatis sacramentum », mais les romanistes ne soutiennent pas que l’incarnation soit un sacrement au sens ecclésiastique de ce terme. L’Église latine, cependant, en étant venue graduellement à attacher à ce mot l’idée d’un rite ou d’une cérémonie divinement désignée, qui signifie, contient et transmet la grâce, et trouvant, comme ces mots étaient compris, que le mariage était déclaré dans Éphésiens v. 32 comme un « sacramentum », elle en vint à enseigner que c’était un sacrement dans le même sens que le baptême et la Cène du Seigneur.
Les romanistes enseignent donc que le mariage est un sacrement non seulement parce qu’il est le signe ou le symbole de l’union du Christ et de son Église. Le Catéchisme romain dit,1 (1). Que personne ne doute « quod scilicet viri, et mulieris conjunctio, cujus Deus auctor est, sanctissimi illius vinculi, quo Christus dominas cum Ecclesia conjungitur, sacramentum, id est, sacrum signum sit ». Si c’était tout, aucun protestant ne pourrait s’y opposer. (2). Mais les romanistes enseignent que le mariage est un sacrement parce qu’il ne signifie pas seulement la grâce, mais qu’il la confère. La cérémonie, y compris le consentement des parties, la bénédiction et l’intention du prêtre, rend les mariés saints. Elle les sanctifie. « Ex opere operato », il transforme le simple amour humain naturel en cette sainte affection spirituelle qui fait de leur union un emblème approprié de l’union du Christ et de l’Église. Sur ce point, le concile de Trente dit :2 « Gratiam, vero, quæ naturalem ilium amorem perficeret, et indissolubilem unitatem confirmaret, conjugesque sanctificaret, ipse Christus, venerabilium sacramentorum institutor, atque perfector, sua nobis passione promeruit. » Ce serait une grande bénédiction s’il en était ainsi. Mais les faits prouvent que l’efficacité sacramentelle du mariage ne sanctifie pas davantage les maris et les maris. de manière à rendre leur amour mutuel semblable au saint amour du Christ pour son Église, que le baptême confère (à ceux qui ne s’opposent pas à un obstacle) tous les bienfaits, subjectifs et objectifs, de la rédemption du Christ. Si la théorie sacramentaire était vraie, tous les chrétiens seraient parfaits et la chrétienté serait paradisiaque.
1 11. VIII. Quæst. 15 ; Streitwolf, t. I, p. 455, 456.
2 Sess. xxiv. ; Ibid., t. I, p. 89.
Le mariage entre chrétiens, selon les romanistes, est indissoluble. Ni l’adultère ni l’abandon ne justifient le divorce. Seule la mort peut rompre le lien. Il ne faut pas en déduire cependant que le mariage soit une institution plus sacrée chez les romanistes que chez les protestants. Tout écart par rapport aux règles bibliques est sûr de faire le mal. La négation de l’adultère détruit le lien matrimonial, conduit naturellement, et en fait, a conduit, non seulement à rendre ce crime plus fréquent, mais aussi à remédier à l’injustice de forcer un mari ou une femme à maintenir la relation conjugale avec un partenaire coupable. L’un de ces procédés est la multiplication des causes de séparation « a mensa et thoro » ; et une autre encore plus contraire aux Écritures, c’est la multiplication des raisons qui rendent le mariage nul et non avenu « ab initio ». Pas moins de seize causes qui rendent les mariages nuls sont énumérées par les théologiens romains.1
1 Ces seize causes sont exprimées dans les lignes suivantes :
« Error, conditio, votum, cognatio, crimen,
Cultus disparitas, vi«, ordo, ligatnen, honestas,
Aniens, aftinis, si clandestinus et impos,
Si mulier sit rapta, loco nec reddita tuto ;
Si impubes, ni forte potentia suppleat annos :
Hæc socianda vêtant connubia, facta retractant. »
— Dens, Theologia Moralis et Dogmatica, De Matrimonio, n. 70, édit. Dublin, 1832, t. VII, p. 194.
Les causes Ce qui justifie la séparation sans divorce, ce sont les vœux, l’adultère, l’apostasie et les crimes. Sous le dernier chef, ils comprennent la cruauté et la prodigalité. Si les parties n’avaient pas été baptisées, le divorce " a vinculo " était autorisé lorsque l’un des partenaires devenait romaniste et que l’autre refusait de le faire, ainsi que pour tout crime grave. Le toute l’affaire est entre les mains de l’Église, qui revendique le droit de faire et de défaire les empêchements au mariage à son gré. « Si quis dixerit Ecclesiam non potuisse constituere impedimenta, matrimonium dirimentia, vel in iis constituendis errasse ; anathème, assieds-toi.» 2 À une certaine époque, l’Église de Rome a fait de la consanguinité au septième degré un empêchement au mariage ; À l’heure actuelle, il interdit le mariage jusqu’au quatrième degré inclus. « La vieille théorie catholique du mariage, dit le président Woolsey, était pratiquement un échec dans tous ses aspects, dans son désapprobation ascétique du mariage, dans sa demande au clergé d’une abstinence qui n’était pas exigée des laïcs chrétiens, dans l’enseignement que seule la mort pouvait libérer le couple marié de ses obligations. Lorsqu’il cherchait la vertu impraticable, et qu’il interdisait à quelques-uns ce que Dieu avait permis à tous, il ouvrait une fontaine de vice à la moindre incitation à la vertu.» 1
2 Concile de Trente, Sess. xxiv. canon 4 ; Strcitwolf, t. I, p. 90.
1 Essai sur le divorce, par Theodore D. Woolsey, D. D., LL. D., New York, 1869, p. 127.
Lois des pays protestants concernant le divorce.
Il a déjà été démontré que les protestants, se servant des Écritures pour guider, enseignaient que la dissolution du lien du mariage n’était permise que pour les deux délits d’adultère et d’abandon volontaire. En ce qui concerne les églises et leurs confessions, c’est encore la doctrine de presque toutes les confessions protestantes. Cependant, lorsque le mariage en vint à être considéré comme essentiellement un contrat civil, il tomba progressivement sous la juridiction de l’État, et des lois furent votées différemment selon les pays, les législateurs étant influencés par de simples vues de justice ou d’opportunité. La législation de toutes les nations de l’Europe a été fortement influencée par l’ancien droit romain ; et, par conséquent, lorsque le mariage a été soustrait à la juridiction exclusive de l’Église, les lois qui le concernent ont été plus ou moins reprises de cet ancien code. Les lois romaines concernant le divorce étaient très laxistes. Le consentement mutuel était, même après que les empereurs romains soient devenus chrétiens, considéré comme une raison suffisante pour dissoudre le lien du mariage. Lorsque l’Église prit l’ascendant sur l’État, et que le pape devint le législateur virtuel de la chrétienté, le divorce pour quelque raison que ce soit fut interdit ; et quand et où le pape fut détrôné à son tour, il y eut une tendance générale à revenir au relâchement de la législation romaine.
L’Angleterre faisait exception à cette règle. Elle a rejeté moins d’usages papistes que n’importe quelle autre nation protestante. Pendant longtemps après la Réforme, aucune loi spéciale concernant le divorce n’a été adoptée. Les tribunaux ecclésiastiques pouvaient décréter la séparation « a mensa et thoro », mais un divorce complet « a vinculo » ne pouvait être obtenu que par une loi spéciale du Parlement. Sous le règne du souverain actuel, toutes ces questions furent retirées des tribunaux ecclésiastiques et renvoyées à un tribunal civil. Ce tribunal est autorisé à accorder la séparation de corps « a mensa et thoro » pour cause d’adultère, ou de cruauté, ou de désertion sans motif valable pendant deux ans et plus ; et la dissolution du mariage en raison de l’adultère simple de la part de la femme, ou de l’adultère aggravé de la part du mari. Un tel divorce donne aux deux parties la liberté de contracter un nouveau mariage. « Dans l’ensemble, avec de graves défauts,» dit le président Woolsey, « il nous semble que c’est une excellente loi. Il fait honneur au pays chrétien où il est en vigueur, et c’est certainement un grand progrès sur l’ancien mode de réglementation du divorce en Angleterre.» 1 C’est peut-être une bonne loi en comparaison de l’anarchie qui l’a précédée, et en comparaison de la législation laxiste des autres nations protestantes, mais elle n’est pas bonne dans la mesure où elle l’est non conformes aux Écritures. Le Nouveau Testament ne fait pas la distinction qui est faite dans cette loi, entre l’adultère de la part de la femme et la même offense de la part du mari. Et il n’est pas bon de ne pas permettre que l’abandon volontaire soit un motif légitime de divorce, si, comme le croient presque universellement les protestants, la Bible enseigne le contraire.
1 Essai sur le divorce, p. 178.
En France, les lois de l’Église romaine ont été en vigueur jusqu’à la Révolution. Cet événement jeta tout dans la confusion, et le caractère sacré du mariage fut en grande partie méprisé. Sous l’empire de Napoléon 1er, le code civil autorisait le divorce : 1° pour l’adultère simple de la femme ; 2° pour adultère aggravé de la part du mari ; 3° pour les outrages et la cruauté ; 4° pour la condamnation de l’un ou l’autre partie à un châtiment infâme ; et (5.) pour le consentement mutuel persistant. La restauration des Bourbons mit fin à ces lois et conduisit à l’interdiction totale du divorce.
Chez les protestants d’Allemagne, les vues des réformateurs, en tant que prétexte général, contrôlèrent l’action des divers États sur ce sujet jusque vers le milieu du XVIIIe siècle, époque à laquelle les lois sur le mariage furent considérablement assouplies. Göschen attribue ce changement en grande partie à l’influence de Thomasius († 1728), qui ne considérait le mariage que comme une institution civile destinée aux fins de l’État, et qui, par conséquent, pouvait être mise de côté chaque fois qu’elle ne répondait pas à la fin désirée. 1 La loi actuelle de la Prusse, bien qu’elle soit une amélioration par rapport à la législation précédente, est bien inférieure à la législation la norme biblique. Outre l’adultère et l’abandon volontaire, elle fait de nombreux autres délits des motifs de divorce, par exemple, les complots mettant en danger la vie ou la santé de l’autre partie ; blessures graves ; dangereuse incompatibilité d’humeur ; Crimes entraînant une peine infâme ; l’ivrognerie et l’extravagance habituelles ; et le consentement mutuel délibéré, s’il n’y a pas d’enfants issus du mariage à dissoudre.
(1) Voir son article détaillé sur « Ehe » dans Herzog’s Real-Encyklopâdie, Stuttgart et Hambourg, 1855, t. III, p. 703.
Les lois des différents États de l’Union en matière de divorce varient de de l’extrême rigueur à l’extrême du laxisme. En Caroline du Sud, il n’y a pas de le divorce n’a jamais été prononcé. L’effet du refus de considérer l’adultère comme un La dissolution du lien matrimonial est, comme le prouve l’expérience des pays catholiques, amener le peuple à considérer ce crime comme un délit pardonnable. Il s’agissait d’un acte criminel. À New-York, l’adultère est le seul motif de divorce ; mais la séparation de corps est accordée en cas de cruauté, d’abandon et de refus de la part du mari de pourvoir à l’entretien de la femme. Dans plusieurs autres États, outre l’adultère et la désertion, beaucoup d’autres motifs suffisent pour justifier le divorce ; Parmi ces motifs, les principaux sont les suivants : l’emprisonnement, la négligence de pourvoir à l’entretien de la femme, l’ivrognerie habituelle et la cruauté. Dans certains États, toute la question est laissée à la discrétion des tribunaux. Dans les lois du Maine, il est dit que le divorce « a vinculo » peut être accordé par n’importe quel juge de la Cour suprême, « lorsque, dans l’exercice d’un pouvoir discrétionnaire sain, il le juge raisonnable et approprié, propice à l’harmonie domestique et compatible avec la paix et la moralité de la société ». La loi de l’Indiana stipule que le divorce peut être accordé pour toute cause que le tribunal juge appropriée. 2 Dans le Rhode-Island, à l’énumération des causes particulières, on ajoute : « et pour toute autre mauvaise conduite et méchanceté grossière de la part de l’une ou l’autre des parties, répugnant et violant l’alliance du mariage ». Dans le Connecticut, la loi adoptée en 1849 autorise le divorce pour « toute inconduite qui détruit définitivement le bonheur du requérant et va à l’encontre de l’objectif de la relation conjugale ». 1
2 Bishop, Marriage and Divorce, livre vn. chap. xl. §§ 827 [542], 830 [544], 4e édit. Boston, 18G4, vol. i.
1 Voir Woolsey, Essay on Divorce, New York, 1869, p. 205.
Devoir de l’Église et de ses officiers.
Il y a certains principes qui se rapportent à ce sujet et qui seront généralement concédé, (1.) Tout corps législatif est tenu de conformer ses textes législatifs à la la loi morale. Cela peut être considéré comme une proposition évidente. (2.) Chaque La législature chrétienne est tenue de conformer son action aux lois de la Christianisme. Par législature chrétienne, on entend une législature qui fait des lois pour un chrétiens. Il n’est pas nécessaire qu’il les représente en tant que chrétiens, pour être leurs agents dans l’enseignement, la propagation ou l’application des principes de la religion chrétienne. Il suffit pour qu’elle soit une législature chrétienne que la grande masse de ses commettants qui sont tenus d’obéir à ses lois soient chrétiens. Personne n’hésite à dire que l’Italie, l’Espagne et la France sont des pays catholiques ; ou que l’Angleterre, la Suède et la Prusse sont protestantes. Comme tous les pouvoirs des législatures proviennent du peuple, il est irrationnel de supposer que le peuple délègue à ses représentants le pouvoir de violer sa religion. Aucune législature d’un État chrétien ne peut donc avoir le droit de faire des lois incompatibles avec la religion chrétienne. Ce principe, si raisonnable et évidente, est concédée dans l’abstrait. Aucun État de l’Union n’oserait légaliser l’adultère ou la bigamie. Avant la Réforme, toutes les questions relatives au mariage étaient de la compétence de l’Église ; après cet événement, ils furent, dans les pays protestants, renvoyés aux autorités de l’État. « Il n’est jamais venu à l’esprit des réformateurs, dit Stahl, d’affirmer que le mariage était une institution purement civile, qui devait être déterminée par des lois civiles et non religieuses, ou que le témoignage de l’Église quant aux lois divines du mariage n’était pas une règle contraignante pour la législation de l’État. » 2 Et en termes encore plus généraux, il déclare que « ce que l’Église en tant que telle [le corps des chrétiens] atteste comme une loi divine immuable, le jus divinum, et qu’elle maintient dans sa sphère, c’est la règle et la limite infranchissables de la législation d’un État chrétien ». 3
2 Die Philosophie des Rechts, Hechts- und Staatslehre, I. iii. •3. 1. § 69, 4e édition. Heidelberg, 1870, vol. II. Partie 1, p. 441.
3 Ibid., § 68, p. 435.
3. Aucun acte d’aucune législature humaine contraire à la loi morale ne peut lier un homme, et aucun acte contraire à la loi du Christ ne peut lier un chrétien. Si, par conséquent, un tribunal humain annule un mariage pour une raison autre que celles qui sont assignées dans la Bible, le mariage n’est pas dissoute pour autant. Au jugement des chrétiens, elle reste en vigueur ; et ils sont tenus de le considérer ainsi. Et d’autre part, si l’État déclare valide un mariage, que la Bible déclare invalide, aux yeux des chrétiens, il est invalide. Il n’y a pas d’aide pour cela. Les chrétiens ne peuvent pas renoncer à leurs convictions ; ils ne peuvent pas non plus renoncer à leur allégeance au Christ. Cet état de conflit entre les lois et la conscience du peuple est la conséquence nécessaire, si un corps qui fait des lois pour un Le peuple chrétien ne tient pas compte d’une autorité qu’il reconnaît comme divine.
4. Les lois de beaucoup d’États de cette Union, en matière de divorce, sont contraires aux Écritures et immorales. Si c’est le cas, ils sont le second aux yeux de tous ceux qui croient en l’autorité divine de la Bible. Si les Écritures sont la seule règle infaillible de la foi et de la pratique, elles contiennent la seule norme du bien et du mal. La loi morale n’est pas quelque chose que l’on s’impose à soi-même. Ce n’est pas ce qu’un homme ou un groupe d’hommes peut penser juste ou opportun. C’est la volonté révélée de Dieu quant à la conduite humaine ; et tout ce qui est contraire à cette volonté est moralement mauvais. S’il en est ainsi, alors il ne fait aucun doute que les lois sur le divorce de beaucoup de nos États sont immorales. Ils contreviennent à la loi de Dieu. Ils annulent les mariages pour d’autres raisons que celles permises par les Écritures, et même, dans certains cas, à la discrétion des tribunaux. Ils déclarent que les personnes ne sont pas mari et femme, alors que, selon la loi de Dieu, elles sont homme et femme. Ils déclarent que ceux qui sont légalement mariés, dont le Christ déclare l’union adultère. C’est-à-dire qu’ils légalisent l’adultère. C’est une conclusion qui ne peut être évitée, si ce n’est en niant l’autorité de la Bible, ou qu’elle légifère sur le sujet du mariage. Si le mariage n’était qu’un pacte civil, à l’égard duquel les Écritures ne donnaient aucune instruction spéciale, il pourrait être réglé par l’État selon ses vues de sagesse ou d’opportunité. Mais s’il s’agit d’une ordonnance de Dieu ; s’il a révélé sa volonté quant à qui peut et qui ne peut pas se marier entre eux, et qui, une fois marié, peut ou ne peut pas être libéré du lien du mariage, alors l’État n’a pas plus le droit de modifier ces lois qu’il n’a le droit de modifier le décalogue, et de légaliser l’idolâtrie ou le blasphème. Il est inutile de s’étendre sur cette question. Il est erroné de considérer les lois anti-chrétiennes comme des questions de peu d’importance.
L’action de l’État dans cette affaire n’est pas seulement négative. Il ne se contente pas d’ignorer ou de refuser de punir la violation de la loi biblique du divorce, mais il intervient par son action positive et déclare que certaines parties ne sont pas mari et femme, entre lesquelles, selon la loi de Dieu, le lien du mariage subsiste encore. Il condamne la bigamie, mais il sanctionne ce que la Bible qualifie de bigamie. La loi de l’État et la loi de Dieu, à cet égard, sont tellement opposées l’une à l’autre, que celui qui obéit à l’une viole l’autre.
5. Comme l’Église et ses dirigeants ont les plus hautes obligations d’obéir à la loi du Christ, il s’ensuit que lorsque l’action de l’État est en conflit avec cette loi, cette action doit être ignorée. Si une personne est divorcée pour des motifs autres que ceux des Écritures et qu’elle se remarie, elle ne peut pas être reçue de façon constante dans la communion de l’Église. Si un ministre est appelé à célébrer le mariage d’une personne divorcée à mauvais titre, il ne peut pas, conformément à son allégeance au Christ, accomplir le service. Ce conflit entre la loi civile et la loi divine est un grand mal, et a souvent donné lieu à de grandes difficultés, surtout en Prusse.
Comme toutes les confessions chrétiennes, romanistes et protestantes, sont d’accord sur ce sujet, il est étonnant que ces lois répréhensibles sur le divorce soient autorisées à figurer dans les livres de lois de tant de nos États. Ce fait prouve ou que l’attention publique n’a pas été suffisamment attirée sur le sujet, ou que la conscience publique est lamentablement aveuglée ou brûlée. Le remède est avec l’Église, qui est le témoin de Dieu sur la terre, tenue de témoigner de sa vérité et de faire respecter sa loi. Si les chrétiens, à titre individuel et dans les tribunaux de leur Église, s’unissaient dans leurs efforts pour éveiller et guider le sentiment public sur ce sujet, il n’y a guère de doute que ces lois répréhensibles seraient abrogées.
Ce n’est pas un sujet à aborder dans ces pages ; Il n’est peut-être pas hors de propos de faire quelques remarques à ce sujet.
1. Il est évidemment utopique de s’attendre à ce que toutes les violations du septième commandement puissent être évitées, pas plus que les lois contre le vol ou le mensonge ne doivent jamais être ignorées.
2. L’histoire du monde montre que l’instinct qui conduit au mal en question ne peut jamais être maintenu dans des limites convenables, excepté par principe moral, ou par mariage.
3. C’est donc vers ces deux moyens de correction que doivent se diriger principalement les efforts des amis de la vertu. Il ne peut y avoir de culture morale efficace sans formation religieuse. Si nous voulons réformer nos semblables, nous devons les amener et les garder du début à la fin de leur vie sous l’influence de la vérité et des ordonnances de Dieu ; accomplir cette œuvre est le devoir assigné à l’Église. En plus de cette culture morale générale, il faut un effort particulier pour produire un sentiment public approprié à l’égard de ce mal spécial. Tant que le septième commandement peut être violé sans aucune perte sérieuse de l’estime de soi ou de la confiance du public, l’une des barrières les plus solides contre le vice est brisée. Si la perte de caractère suivait certainement la violation du septième commandement, comme elle suit le vol ou le parjure, le mal serait dans une bonne mesure atténué. C’est déjà le cas pour certaines classes. Il en est ainsi à l’égard des femmes ; Et il en est ainsi dans le cas du clergé. Si un ministre de l’Évangile est coupable de ce délit, il est aussi certainement et efficacement ruiné qu’il le serait par la perpétration de tout autre crime autre que le meurtre. Mais c’est la même loi morale qui lie tous les hommes. Le vol dans le cas d’un homme est, dans son caractère essentiel, exactement ce qu’il est dans le cas de tout autre homme.
4. Le préventif divin du mal social est établi dans 1 Corinthiens VII, 2 : « Que chaque homme ait sa propre femme, et que chaque femme ait son propre mari. » Qu’il n’y a pas Il y a de sérieuses difficultés, dans l’état actuel de la société, dans la voie des mariages fréquents et précoces, ne peuvent être niées. Le principal d’entre eux est sans aucun doute le style de vie coûteux généralement adopté. Les jeunes gens trouvent qu’il est impossible de vivre avec les commodités et le luxe auxquels ils ont été accoutumés dans les maisons de leurs pères, et c’est pourquoi le mariage est négligé ou ajourné. En ce qui concerne les classes les plus pauvres, on pourrait prévoir des dotations pour les jeunes filles de bonne moralité, afin de leur permettre de commencer leur vie conjugale dans l’aisance. Des dispositions peuvent également être prises de diverses manières pour réduire les dépenses liées à la vie familiale. Le but à atteindre est de faciliter le mariage. Ceux qui sont assez heureux pour trouver dans une maxime de l’Écriture la raison ultime et le motif le plus élevé, peuvent voir le but à atteindre, bien que, comme dans le cas présent, ils soient obligés de laisser les moyens de l’accomplir à des experts en sciences sociales.
Que certains mariages soient interdits, c’est le jugement presque universel de l’humanité. Chez les anciens Perses et Égyptiens, en effet, les parents les plus proches étaient autorisés à se marier entre eux, et dans la période corrompue de l’Empire romain, le relâchement égal régnait plus ou moins. Ces faits isolés n’invalident pas l’argument du jugement général de l’humanité. Ce que tous les hommes pensent être faux, doit être faux. Cette unanimité ne peut s’expliquer qu’en supposant que le jugement dans lequel les hommes s’accordent ainsi est fondé sur la constitution de leur nature, et que cette constitution est l’œuvre de Dieu. Il y a donc des cas où la « vox populi » est la « vox Dei ».
Le motif ou la raison de ces interdictions.
La raison pour laquelle l’humanité condamne si généralement les mariages mixtes de parents proches ne peut pas être physique. La physiologie n’est pas enseignée par l’instinct. C’est donc non seulement indigne, mais c’est une supposition tout à fait insatisfaisante, que de tels mariages soient interdits parce qu’ils tendent à la détérioration de la race. Le fait supposé peut être vrai ou ne pas être vrai ; mais si elle est admise, elle est tout à fait insuffisante pour rendre compte du jugement condamnatoire en question.
Les deux raisons les plus naturelles et les plus évidentes pour lesquelles les mariages mixtes de parents proches sont interdits, c’est que l’affection naturelle que les parents ont l’un pour l’autre est incompatible avec l’amour conjugal. Ils ne peuvent pas coexister. Ce dernier est une violation et une destruction du premier. Il suffit d’énoncer cette raison. Il n’a pas besoin d’illustration. Ces affections naturelles ne sont pas seulement saines, mais dans les degrés supérieurs de la relation, elles sont même sacrées. Le deuxième motif de ces interdictions est la pureté domestique. Lorsque des personnes sont si proches les unes des autres qu’elles justifient qu’elles vivent ensemble comme une seule famille, elles devraient être sacrées l’une pour l’autre. S’il n’en était pas ainsi, le mal ne manquerait pas de se produire, lorsque les jeunes gens grandissent dans la familiarité de la vie domestique. Le moindre examen des détails de la loi, telle qu’elle est exposée dans le dix-huitième chapitre du Lévitique, montre que ce principe est à la base de beaucoup de ses spécifications.
J. D. Michaelis, dans son ouvrage sur la loi de Moïse, en fait la seule raison des interdictions lévitiques. Il va jusqu’à nier que la « proximité de la parenté » soit en soi un obstacle au mariage. Ses opinions ont eu une grande influence, non seulement sur l’opinion publique, mais même sur la législation en Allemagne. Cette influence, cependant, s’est éteinte lorsqu’un sentiment moral et religieux plus profond a pris le dessus.1
1 Commentaires sur les lois de Moïse. Par Sir John David Michaelis, professeur de philosophie à l’université de Göttingen. Traduit par Alexander Smith, D. D., Londres 1814, vol. II. 104 à 108, p. 54 à 76.
Augustin a avancé une théorie sur ce sujet, qui a encore ses fervents défenseurs. Il soutenait que le but de toutes ces lois prohibitives était d’élargir le cercle des affections sociales. Les frères et sœurs sont liés par l’amour mutuel. Doivent-ils Le cercle n’est pas élargi. S’ils choisissent des maris et des femmes parmi des étrangers, un plus grand nombre de personnes sont inclus dans les liens de l’amour mutuel. « Habita est ratio rectissima charitatis, ut homines quibus esset utilis atque honesta concordia, diversarum necessitudinum vinculis necterentur ; nec unus in uno multas haberet, sed singulæ spargerentur in singulos ; ac sic ad socialem vitam diligentius colligandam plurimæ plurimos obtinerent. » C’est ainsi qu’il arrivera : « Ut unus homo haberet alteram sororem, alteram uxorem, alteram consobrinam, alterum patrem, alterum avunculum, alterum socerum, alteram matrem, alteram amitam, alteram socrum : atque ita se non in paucitate coarctatum, sed latins atque numerosius propinquitatibus crebris vinculum sociale diffunderet. » 1
1 De Civitate Dei, xv. xvi. 1 ; Bénédictins, 1838, t. VII, p. 633, 634.
Un écrivain de l’Evangelische Kirchen-Zeitung de Hengstenberg adopte et justifie minutieusement cette théorie. Il s’efforce de montrer qu’elle répond à tous les critères par lesquels toute théorie sur le sujet devrait être testée. Ces mariages sont appelés abominations, et il demande : N’est-il pas honteux que l’ordonnance bienveillante de Dieu pour étendre le cercle des affections sociales soit contrecarrée ? On les appelle « confusion », parce qu’elles unissent ceux à qui Dieu ordonne de rester séparés. Il explique aussi le bien-fondé des mariages mixtes entre frères et sœurs dans la famille d’Adam ; car, au commencement, le cercle d’affection n’admettait pas de s’élargir. Il répond même au cas de la loi du Lévirat qui obligeait un homme à épouser la veuve sans enfant de son frère. La loi qui interdit le mariage des parents ne s’applique que là où la relation est étroite. Il doit donc y avoir des cas juste au-delà de la ligne au-delà de laquelle La relation n’est pas un obstacle au mariage. Et en ce qui concerne ceux qui se trouvent juste à l’intérieur de la ligne, il doit y avoir des considérations qui l’emportent parfois sur les objections à un mariage donné. Que Dieu ait dispensé de la loi interdisant le mariage d’un homme avec la veuve de son frère, alors que le frère mourait sans enfants, cet écrivain allemand le considère comme impossible. « Le mal, dit-il, peut être toléré, mais non commandé. » Il ajoute que cela provoque un sourire (man muss es naiv nennen) que Gerhard trouve une analogie entre le cas en question et l’autorisation donnée aux Israélites pour dépouiller les Égyptiens. 1 Il est probable que le vénérable Gerhard sourirait aux critiques de l’auteur. En premier lieu, Dieu ne peut pas plus permettre le mal qu’il ne peut le commander. Un acte autrement mauvais, cesse de l’être lorsqu’Il le permet (c’est-à-dire le sanctionne) ou l’ordonne. S’il ordonne qu’un homme soit mis à mort, ce n’est plus un meurtre que de le mettre à mort. Il y a deux principes de moralité généralement acceptés et clairement scripturaires ; l’une d’entre elles, c’est que toutes ces lois morales qui sont fondées, non sur la nature immuable de Dieu, mais sur les relations des hommes dans l’état actuel de l’existence, peuvent être écartées par le législateur divin chaque fois qu’elles lui paraissent bonnes ; tout comme Dieu, sous l’ancienne dispensation, a mis de côté la loi originelle de la monogamie du mariage. La polygamie n’était pas un péché tant que Dieu le permettait. Le même principe est impliqué dans les paroles du Christ, Dieu aime la miséricorde et non le sacrifice. Lorsque deux lois entrent en conflit, le plus faible cède la place au plus fort. Il n’est pas bien de travailler le jour du sabbat, mais toute quantité de travail ce jour-là devient un devoir, si nécessaire pour sauver la vie. Dans le cas de la loi du lévirat, l’interdiction d’épouser la veuve d’un frère cédait la place à ce qui, dans l’économie mosaïque, était considéré comme une obligation supérieure, c’est-à-dire de perpétuer la famille. Mourir sans enfant était considéré comme l’une des plus grandes calamités.
1 Eoangelische Kirchen-Zeitung, juin 1840, p. 369-416 ; voir p. 378.
La question de la raison d’être de ces lois est toutefois d’une importance mineure. Il se peut que nous ne soyons pas en mesure de voir exactement dans tous les cas pourquoi certaines choses sont interdites. Le fait qu’ils soient interdits devrait satisfaire la raison et la conscience. Les deux questions importantes à examiner à ce sujet sont, premièrement, la loi lévitique concernant les mariages prohibés est-elle toujours en vigueur ? et, deuxièmement, comment cette loi doit-elle être interprétée, et quels mariages interdit-elle ?
La loi lévitique du mariage est-elle toujours en vigueur ?
1. C’est un argument a priori fort en faveur d’une réponse affirmative à cette question, qu’elle a toujours été considérée comme obligatoire par toute l’Église chrétienne.
2. La raison invoquée pour l’interdiction contenue dans cette loi n’a pas de rapport spécial avec les Juifs. Elle ne se trouve pas dans leurs circonstances particulières, ni dans le dessein de Dieu en les choisissant pour être les dépositaires de sa vérité afin de préparer le monde à la venue du Messie. La raison invoquée « est la proximité de la parenté ». Cette raison a autant de force à la fois qu’à la fois l’autre, pour toutes les nations comme pour n’importe quelle nation. Il n’y avait rien de particulier dans la relation dans laquelle se trouvaient les parents et les enfants hébreux, les frères et sœurs hébreux, les oncles et nièces hébreux, qui était le fondement de ces interdictions. Ce fondement était la proximité de la relation elle-même telle qu’elle existe à tous les âges et à toutes les époques. Il y a donc, aux yeux de Dieu, une raison permanente pour laquelle les parents proches ne doivent pas se marier entre eux.
3. Si la loi lévitique n’est pas encore en vigueur, nous n’avons pas de loi divine à ce sujet. Alors il n’y a pas de péché tel que l’inceste. Ce n’est une offense qu’à la loi civile, et un péché contre Dieu seulement dans la mesure où c’est un péché de violer la loi de l’État. Mais cela est contraire au jugement universel des hommes, du moins des hommes chrétiens. Pour les parents et les enfants, les frères et sœurs, se marier entre eux est universellement considéré comme un péché contre Dieu, indépendamment de toute interdiction humaine. Mais s’il s’agit d’un péché contre Dieu, il doit être interdit dans sa Parole, ou nous devons abandonner le principe fondamental du protestantisme, que les Écritures sont la seule règle infaillible de notre foi et de notre pratique. Comme de tels mariages ne sont interdits nulle part dans la Bible, sauf dans la loi lévitique, si cette loi ne les interdit pas, la Bible ne les interdit pas.
4. Les jugements de Dieu sont dénoncés contre les nations païennes pour avoir permis les mariages que la loi lévitique Interdit. Dans Lévitique xviii. 3, il est dit : « Après les actions du pays d’Égypte, où vous habitiez, vous ne ferez pas ; et après les actions du pays de Canaan, où je vous amènerai, vous ne ferez rien ; et vous ne marcherez pas dans leurs ordonnances. Il s’agit de l’introduction à la loi des mariages interdits, contenant la spécification des « ordonnances » des Égyptiens et des Cananéens, qu’il était interdit au peuple de Dieu de suivre. Et au verset vingt-septième du même chapitre, à la fin de ces spécifications, il est dit : « Toutes ces abominations ont été commises par les hommes du pays, qui étaient devant vous, et le pays est souillé. » Encore une fois, dans le ch. xx. 23, toujours à propos de ces mariages, il est dit : « Vous ne marcherez pas selon les mœurs des nations que j’ai chassées devant vous, car elles ont commis toutes ces choses, et c’est pourquoi je les ai abhorrées. » C’est une preuve évidente que ces lois étaient contraignantes, non seulement pour les Juifs, mais pour tous les peuples et en tout temps.
5. L’obligation continue de la loi lévitique à ce sujet est également reconnue dans le Nouveau Testament. Cette reconnaissance est impliquée dans la référence constante à la loi de Moïse comme loi de Dieu. Si, dans l’une de ses parties ou spécifications, il n’est plus obligatoire, cela doit être prouvé. Il contient beaucoup de choses que nous apprenons du Nouveau Testament a été conçu simplement pour garder les Hébreux un peuple distinct ; beaucoup de ce qui était typique ; beaucoup de choses qui n’étaient qu’une ombre des choses à venir, et qui ont disparu lorsque la substance a été révélée. Il contenait cependant beaucoup de choses morales et d’obligations permanentes. Si Dieu donne une loi aux hommes, ceux qui nient son obligation perpétuelle sont tenus de la prouver. La présomption est qu’il reste en vigueur jusqu’à preuve du contraire. Il doit être difficile de prouver que les lois fondées sur les rapports sociaux permanents des hommes aient été voulues temporaire.
En plus de cette considération générale, nous trouvons des reconnaissances spécifiques de l’obligation continue de la loi lévitique dans le Nouveau Testament. Jean-Baptiste, tel qu’il est rapporté dans Marc vi. 18 et Matthieu xiv. 4, dit à Hérode qu’il ne lui était pas permis d’avoir la femme de son frère Philippe. Peu importe, quant à l’argumentation, que Philippe fût vivant ou non. L’infraction reprochée n’était pas d’avoir pris la femme d’un autre homme, mais d’avoir pris la femme de son frère. On peut objecter à cet argument que la loi de Moïse était encore en vigueur pour attirer le ministère de Jean-Baptiste. C’est ce que réfute Gerhard, qui argumente à partir de Matthieu xi. 13 : « Tous les prophètes et la loi ont prophétisé jusqu’à Jean », que le ministère du Baptiste appartient à la nouvelle dispensation. 1 On peut en douter. Néanmoins, Jean exprimait le sentiment moral de son époque ; et le récit du fait mentionné par les évangélistes dont les évangiles ont été écrits après que l’Église chrétienne fut complètement organisée, est donné sous une forme qui implique une sanction du jugement que le Baptiste avait exprimé contre le mariage d’Hérode avec la femme de son frère. Il faut aussi se rappeler que la famille hérodienne était Iduméenne, et par conséquent, qu’une loi purement juive n’aurait pas de l’autorité sur eux.
1 Loci Theoloffici, xxvi. v. ii. 2.1. 1. § 129, édit. Tiibingen, 1776, vol. xv. , p. 285. Gerhard soumet toute la question des mariages interdits à une longue discussion.
De plus, l’apôtre Paul, dans 1 Corinthiens v. 1, parle du fait qu’un homme épouse sa belle-mère comme d’une offense inouïe. Qu’il s’agisse d’un cas de mariage et non d’adultère est évident car l’expression γυναίκα ίχ^ιν n’est jamais utilisée dans le Nouveau Testament, à l’exception du mariage. Il s’agit donc d’une reconnaissance claire de l’obligation continue de la loi interdisant le mariage entre parents proches, qu’il s’agisse d’une relation de consanguinité ou d’affinité.
6. La Bible applique partout les lois qui ont leur fondement dans la constitution naturelle des hommes. Que cette loi lévitique soit une authentification divine d’une loi de la nature, c’est peut-être Cela se déduit du fait qu’à de rares exceptions près, les mariages mixtes de parents proches sont interdits chez toutes les nations. Paul dit que le mariage d’un homme avec sa belle-mère était inconnu parmi les païens ; c’est-à-dire qu’elle était interdite et abhorrée. Cicéron s’exclame : « Nubit genero socrus ..... O mulieris ineredibile et præter hanc unam in omni vita inauditum ! » 1 Bèze dit : Il ne faut pas oublier que les lois civiles des Romains s’accordent entièrement sur ce sujet avec la loi divine. Ils semblaient s’en être inspirés. 2
1 Pro A. Cluentio, v. vi. (14, 15); Leipzig, 1850, p. 374, b.
2 Bèze, De Repudiis et Divortiis, Tractationes Theologicœ, édit. Eustathe Vignon, 1582. Vol. II. à la p. 52.
Aucune Église chrétienne ne doute de l’obligation continue de l’une ou l’autre des lois du Pentateuque, dont on peut dire que la raison assignée à leur promulgation est les relations permanentes des hommes ; que les païens sont condamnés pour leur violation ; et que le Nouveau Testament s’y réfère comme étant toujours en vigueur : et que les nations païennes, sous la conduite de la conscience naturelle, ont promulguées.
Comment la Loi Lévitique doit-elle être interprétée ?
En admettant que la loi lévitique du mariage soit toujours en vigueur, la question suivante est : Comment doit-elle être interprétée ? Faut-il l’entendre comme spécifiant les degrés de parenté, soit de consanguinité, soit d’affinité, à l’intérieur desquels les mariages mixtes sont interdits ? Ou bien faut-il la considérer comme une énumération de cas particuliers, de sorte qu’aucune facilité non expressément mentionnée ne doit être incluse dans l’interdiction ?
La première de ces règles d’interprétation est celle généralement adoptée ; pour les raisons suivantes :
1. Le langage de la loi elle-même. Il commence par une interdiction générale du mariage entre ceux qui sont proches parents. La proximité de la parenté est le motif de l’interdiction. Les spécifications qui suivent ont pour but de montrer quel degré de proximité d’un parent constitue une interdiction. Cette raison s’applique à de nombreux facilités qui ne sont pas particulièrement mentionnés dans Lévitique xviii. ou ailleurs. La loi semble s’appliquer à tous les cas où l’on trouve l’existence de la raison divinement assignée pour sa promulgation.
2. Le dessein de la loi, comme nous l’avons vu, est double : 1° de garder sacrées les relations qui font naître naturellement des sentiments et des affections qui sont incompatibles avec la relation conjugale ; et deuxièmement, la préservation de la pureté domestique. Comme les affections naturelles sont dues en partie à la constitution même de notre nature, et en partie à la familiarité et à la constance des rapports et à l’échange des bons offices, il est naturel que, dans l’énumération des cas prohibés, on ait eu égard, dans le choix, à ceux dans lesquels cette familiarité des rapports sexuels, à l’époque où la loi a été promulguée. l’a effectivement emporté. En Orient, la famille est organisée selon des principes différents de ceux sur lesquels elle est organisée en Occident. Chez les premières nations orientales surtout, les mâles d’une famille avec leurs femmes restaient ensemble ; tandis que les filles, ayant été données en mariage, s’en allèrent et s’amalgamèrent avec les familles de leurs Maris. C’est pourquoi il arriverait que les parents du côté paternel seraient des associés intimes, tandis que ceux du même degré du côté maternel pourraient être de parfaits étrangers. Par conséquent, une loi, construite sur le principe de l’interdiction du mariage entre des parties si apparentées qu’elles sont déjà dans les liens de l’affection naturelle et qui ont été domestiquées dans le même cercle de famille, traiterait principalement des spécifications des relations du côté paternel. Il ne s’ensuivrait pas, cependant, de ce fait, que des parents de même degré puissent se marier librement, simplement parce qu’ils n’ont pas été spécifiés dans le dénombrement. La loi, dans son principe, s’applique à tous les cas, énumérés ou non, dans lesquels la proximité de la parenté est la source de l’affection naturelle, et dans lesquels elle conduit et justifie l’association intime.
3. Une autre considération en faveur du principe d’interprétation habituellement adopté, c’est que la règle contraire introduirait les plus grandes incohérences dans le droit. La loi interdit le mariage entre proches parents ; et, d’après cette règle, il continue alternativement à permettre et à interdire les mariages où la relation est exactement la même. Ainsi, un homme ne peut pas épouser la fille de son fils ; mais une femme peut épouser le fils de sa fille ; Un homme ne peut pas épouser la veuve du frère de son père, mais il peut épouser la veuve du frère de sa mère ; une femme ne peut pas épouser deux frères, mais un homme peut épouser des sœurs. Ces incohérences pourraient être intelligibles si la loi était une loi temporaire et locale, destinée à un état transitoire de la société ; mais ils n’ont absolument pas de comptes à rendre si la loi est une obligation permanente et universelle. Une règle d’interprétation qui apporte de l’uniformité et de la cohérence dans ces actes de l’Écriture, doit certainement être préférée à une règle ce qui les rend confus et incohérents.
Les cas spécifiquement mentionnés sont : 1. Mère. 2. Belle-mère. 3. Petite-fille. 4. Sœur et demi-sœur, « nées dans le pays ou nées à l’étranger », c’est-à-dire légitimes ou illégitimes. 5. Tante du côté paternel. 6. Tante maternelle. 7. La femme du frère d’un père. 8. Belle-fille. 9. La femme du frère. 10. Une femme et sa fille. 11. La petite-fille d’une femme. 12. Deux sœurs en même temps.
La signification de Lévitique xviii, 18, a été très contestée. La question est de savoir si les mots אמה אל־אחתדז , « une femme à sa sœur », doivent être compris dans leur sens idiomatique, « l’une à l’autre », de sorte que la loi interdit la bigamie, le fait de prendre une femme à une autre pendant sa vie ; ou s’ils doivent être pris littéralement, de sorte que cette loi défend à un homme d’épouser la sœur de sa femme tant que celle-ci est en vie. Il est certain que le Les mots en question ont, en plusieurs endroits, le sens idiomatique qu’on leur attribue. Dans Exode xxvi. 3, « Cinq rideaux seront attachés l’un à l’autre », littéralement, « une femme à sa sœur ; » ainsi au verset 5, les boucles s’accrochent, « une femme et sa sœur ; » verset 6, les taches d’or unissent les rideaux, « a femme et sa soeur. Aussi dans le verset 17. C’est ainsi qu’il est dit dans Ézéchiel i. 9 : « Leurs ailes étaient jointes l’une à l’autre, » une femme à sa sœur ; » et de nouveau en eh. iii. 13. Le Les mots admettent donc la traduction donnée dans la marge de la version anglaise. Mais on objecte à cette interprétation dans cette facilité : (1.) Que le Les mots en question ne signifient jamais « l’un à l’autre », sauf lorsqu’ils sont précédés d’un nom pluriel ; ce qui n’est pas le cas dans Lévitique xviii. 18. (2.) Si l’on adopte cette explication, le passage contient une interdiction explicite de la polygamie, ce que la loi de Moïse permettait. (3.) Il n’est pas naturel de prendre les mots « épouse » et « sœur » dans un sens différent de celui de qu’ils sont utilisés tout au long du chapitre. (4.) Les anciennes versions s’accordent avec la traduction donnée dans le texte de la Bible anglaise. La Septante a γυναίκα επ' άδελψ^ αΰτ ?} ς ; la Vulgate, « sororem uxoris tuæ ».
C’est dans cette interprétation que les commentateurs modernes sont presque sans exception. C’est ainsi que Maurer rend le passage : « Uxorem ad (c’est-à-dire præter ) sororem ejus ne ducito », c’est-à-dire Nolli præter tuam conjugem aliam insuper uxorem ducere, quæ illius soror est. » 1 Le commentaire de Baumgarten est le suivant : « Du fait que l’interdiction du mariage de la sœur d’une femme est expressément subordonnée à la vie de la première, nous devons déduire avec les rabbins qu’après la mort de la femme, ce mariage est permis. Il est vrai que le degré d’affinité est ici le même que dans le verset 16, mais là la relation est du côté masculin, ici du côté féminin ; cela fait une différence, parce que sous l’Ancien Testament, la femme n’avait pas atteint le même degré de personnalité et d’indépendance que l’homme. » 2 Rosemniiller dit : « Uxorem ad sororem ejus ne ducas, duas sorores ne ducas in matrimonium, scil. בחיץדז in vita ejus, c’est-à-dire uxore tua vivente. Non igitur prohibet Moïse matrimonium cum sorore uxoris mortuæ. » 3 Knobel dit : « Enfin, un homme ne doit pas se marier... la sœur de sa femme, tant que celle-ci vivra... Se marier l’un après l’autre, après la mort de l’autre, n’est pas interdit. » 4 Keil comprend le v. 18 de la même manière. Il défend, selon lui, à un homme d’avoir deux sœurs, en même temps, que ses épouses. « Après la mort de la première femme, ajoute-t-il, le mariage avec sa sœur fut autorisé. » 5
1 Commentarius Grammaticus Criticus in Velus Testamentum, Leipzig, 1835, t. I, p. 51.
2 Theologischer Commentar zum Pentateuch, Kiel, 1844, vol. i.part 2, p. 204.
3 Scholia in Vetus Testamentum in Compendium redacta, Leipzig, 1828, t. I, p. 539.
4 Kurzgefasstes exegetisches Handbuch zum Alten Testament. Exodus und Leviticus erklârt, von August Knobel, Leipzig, 1857. p. 505 et 50G.
5 Biblischer Commentar über das Alte Testament, Heraüsgegeben von Carl Fried !·. Keil und Frank Delitzsch ; Die Bûcher Moses, von C. F. Keil, Leipzig, 1862, vol. II, p. 117.
L’inférence que ces auteurs tirent du fait que, dans ce passage, le mariage de la sœur d’une femme est interdit pendant la La vie de la femme, que le mariage de la sœur, après la mort de la femme, est permis, est très précaire. Tout ce que le passage enseigne, c’est que si un homme choisit d’en avoir deux les épouses, en même temps, ce que la loi permettait, elles ne devaient pas être sœurs ; et la raison invoquée est qu’il amènerait les sœurs dans une fausse relation l’une avec l’autre. Reste la question de l’opportunité d’épouser la sœur d’une épouse décédée là où elle est était. Ce verset n’a aucun rapport direct avec ce sujet.
Les cas qui ne sont pas expressément mentionnés dans le Lévitique xviii, bien qu’ils impliquent le même degré de parenté que ceux inclus dans l’énumération, sont : 1. La fille d’un homme. C’est une preuve évidente que l’énumération Avas n’a pas eu pour but d’être exhaustive. 2. La fille d’un frère. 3. La fille d’une sœur. 4. La veuve d’un oncle maternel. 5. La veuve du fils d’un frère. 6. La veuve du fils d’une sœur. 7. La sœur d’une épouse décédée.
Comme la proximité de parenté est le motif de l’interdiction, et que ces cas sont compris dans les « degrés » spécifiés, l’Église les a considérés comme appartenant à la classe des mariages interdits. Il faut cependant considérer que le mot « interdit », tel qu’il est utilisé ici, est très complet. Certains des mariages prévus par la loi civile sont interdits dans des sens très différents. Certains sont déclarés abominables, et ceux qui les contractent sont punis de mort. D’autres sont déclarés inconvenants, ou mauvais, et punis par l’exclusion des privilèges de la théocratie. D’autres encore encourent la peine de mourir sans enfants ; signifiant probablement que les enfants issus de tels mariages ne devaient pas être inscrits dans les registres de famille que les Juifs avaient tant de soin de conserver.
De même que cette distinction est reconnue dans la loi elle-même, elle est fondée sur la nature de l’affaire. De même que la proximité de la parenté varie de la relation la plus intime à la plus éloignée, de même ces mariages varient dans leur inconvenance du degré le plus élevé au degré le plus bas. Certaines d’entre elles peuvent, dans certains cas, être erronées, non pas en elles-mêmes, mais simplement par obligation de respecter une loi salutaire. C’est-à-dire qu’il peut y avoir des cas auxquels la loi, mais pas la raison de la loi, s’applique. Par exemple; Un homme peut aller à des milliers de kilomètres de chez lui et se marier : sa femme se trouverait dans une relation très différente avec les frères de son mari que si elle avait vécu dans la maison saine avec eux. La loi défendant à une femme d’épouser le frère de son mari défunt, s’appliquerait à elle ; mais la raison de cette loi ne l’affecterait que très peu ; Néanmoins, même dans son cas, la loi doit être respectée.
Il y a une autre remarque évidente qui mérite d’être faite. Une forte répugnance est souvent ressentie et exprimée contre la loi lévitique, non seulement parce qu’elle est considérée comme plaçant tous les mariages spécifiés sur le même plan, les représentant tous comme également offensants aux yeux de Dieu, mais aussi parce qu’elle suppose que tous les mariages interdits sont, s’ils sont contractés, invalides. C’est une vision erronée du sujet. C’est incompatible avec la loi elle-même, et contraire à l’analogie de l’Écriture. La loi reconnaît une grande disparité dans l’inconvenance de ces mariages. Quelques-unes, comme nous venons de le remarquer, sont tout à fait abominables et insupportables. D’autres sont spécifiées parce qu’elles sont inopportunes ou dangereuses, parce qu’elles sont contraires à un principe éthique ou prudentiel.
C’est dans ce cas comme dans beaucoup d’autres. La loi mosaïque écarté et découragé les mariages mixtes entre le peuple élu et ses voisins païens. En ce qui concerne les Cananéens, de tels mariages mixtes étaient absolument interdits ; Avec d’autres nations païennes, bien qu’elles aient été dédaignées, elles étaient tolérées. Joseph épousa une Égyptienne ; Moïse, un Madianite ; Salomon épousa la fille de Pharaon. De tels mariages, dans l’état de sédentarisation de la nation juive, étaient peut-être mauvais, mais ils étaient valides. Même maintenant, sous la dispensation chrétienne, il est interdit aux croyants d’être sous un joug inégal avec les incroyants. Il ne s’ensuit pas de là que tout mariage entre un croyant et un incroyant est invalide. Ces remarques ne sont pas déplacées. La vérité souffre d’être mal comprise. Si l’on fait enseigner la Bible ce qui est contraire au bon sens, ou aux jugements intuitifs des hommes, elle souffre d’une grande injustice. Aucun homme ne peut se forcer à croire que le fait qu’un homme épouse la sœur d’une femme décédée est le même genre d’offense que le mariage d’un père avec sa propre fille. La Bible n’enseigne pas une telle doctrine ; Et c’est un « Lander pour le représenter.
Les lois de Dieu sont sacrées. Elles sont fondées, non seulement sur sa sagesse infinie, mais aussi sur la nature de ses créatures, et, par conséquent, doivent être observées avec soin. Il peut, dans certains cas, y avoir une divergence d’opinion honnête sur ce qu’est la loi ou la volonté de Dieu, mais lorsqu’elle est établie, il est de notre sagesse et de notre devoir d’en faire la règle de notre conduite. C’est tellement évident que l’énoncé de cette affirmation peut sembler tout à fait superflu. Cependant, il est si fréquent que des hommes qui se disent chrétiens fassent de leurs propres sentiments, opinions et vues d’opportunité, la règle d’action pour eux-mêmes et pour les autres, que ce n’est nullement une œuvre de surérogation, pour réitérer en toute occasion le truisme qu’il n’y a pas de sagesse comme la sagesse de Dieu, et que les hommes ne sont jamais sages que lorsqu’ils suivent la sagesse de Dieu telle qu’elle est révélée dans sa Parole, même lorsqu’ils doivent le faire aveuglément.
Il y a certains principes qui sous-tendent les lois de la Bible sur le mariage, que tous les hommes, à titre privé et lorsqu’ils agissent en tant que législateurs, feraient bien de respecter.
1. La première, c’est que le mariage n’est pas une simple union extérieure, ce n’est pas simplement un pacte mutuel, ce n’est pas simplement un contrat civil. C’est une union réelle, physique, vitale et spirituelle, en vertu de laquelle l’homme et la femme deviennent, non seulement au sens figuré, mais réellement, bien que dans un sens mystérieux, une seule chair. Ce n’est pas seulement le Christ lui-même qui a expressément déclaré que c’est la nature du mariage, mais c’est la doctrine qui sous-tend toute la loi lévitique sur ce sujet. La proximité de la parenté s’exprime constamment en disant que l’un est « chair de la chair » de l’autre, שאח בשר־ו, « Carnem camis suæ s. corporis sui esse cognatam propinqnam, quæ est ut caro ejusdem corporis ». 1 D’après les Écritures, le mari et la femme sont donc les parents les plus proches l’un de l’autre. D’après l’esprit et la plupart des lois de notre époque, ils ne sont pas du tout des relations. Ce sont simplement des partenaires. Si l’un des membres d’une entreprise commerciale décède, ses biens ne vont pas à son associé, mais à sa propre famille ; Ainsi, si une femme meurt sans enfants, ses biens ne vont pas à son mari, mais à ses cousins au troisième ou au quatrième degré. Aux yeux de la loi, ils sont plus proches d’elle que de son mari. Ce n’est pas la lumière dans laquelle Dieu regarde le mariage.
1 Rosenmüller, Scholia in Vetus Testamentum in Compendium redacta, Leipzig, 1838, t. I, p. 536, 537.
2. Le second principe qui sous-tend ces lois matrimoniales, c’est que l’affinité est un lien de parenté aussi réel que la consanguinité. Au moins la moitié des mariages spécifiés dans le Lévitique sont interdites pour cause d’affinité. La même forme d’expression est utilisée pour désigner les deux types de relation. Ceux qui sont liés les uns aux autres par affinité sont dits « chair de la chair », l’un de l’autre, tout comme les parents du sang ; parce que toutes les spécifications contenues dans le dix-huitième chapitre du Lévitique sont comprises dans l’interdiction générale contenue dans le sixième verset : « Aucun de vous ne s’approchera d’un proche parent de lui ; » sous ce chef sont comprises les belles-mères ; belles-mères ; belles-filles ; belles-sœurs (comme lorsqu’il est interdit à un homme d’épouser la veuve de son frère) ; la femme de l’oncle, etc. Ceux-ci Les relations sont tracées dans la ligne de l’affinité, tout comme elles le sont dans celle de la consanguinité. Par conséquent, la déclaration contenue dans la Confession de Westminster :2 « L’homme ne peut épouser aucun membre de la famille de sa femme plus proche par le sang qu’il ne peut l’être par le sien, ni la femme de la famille de son mari plus proche par le sang que par le sien », est un énoncé simple et complet de la loi telle qu’elle est énoncée dans le Lévitique. En disant que l’affinité est un lien de parenté aussi réel que la consanguinité, cela ne veut pas dire qu’elle est aussi forte. Une fille est une parente plus proche qu’une belle-fille, ou belle-fille ; une mère plutôt qu’une belle-mère ; une sœur plutôt qu’une belle-sœur. Ceci, comme nous l’avons vu, est reconnu dans la loi elle-même.
2 Chapitre xxiv. 4.
La Bible n’affirme rien d’incompatible avec les faits ou la nature. En faisant de l’affinité un lien de parenté réel, on entend qu’elle n’est pas simplement nominale, conventionnelle ou arbitraire. Elle a son fondement dans la nature et dans les faits.
M. Bishop, dans son ouvrage sur le mariage et le divorce, dit : « Un point de vue vraiment éclairé écartera sans aucun doute complètement l’affinité comme un obstacle, tandis qu’il étendra quelque peu les degrés de consanguinité à l’intérieur desquels les mariages seront interdits. » 1 Il enseigne aussi 2 que « la relation par affinité » cesse » avec la dissolution que la mort apporte au mariage. .... Si, quand la femme d’un homme meurt, elle est toujours sa femme, alors, bien sûr, sa sœur est toujours sa sœur..... Si, au contraire, la femme n’est plus l’épouse après sa mort, sa sœur n’est plus la sœur du mari. Et bien que les hommes qui n’ont d’autre idée de la religion que de la considérer comme un faisceau de formes absurdes et détestées, puissent ne pas être en mesure de voir comment la fin de la relation par la mort de la femme a quelque conséquence dans ce cas, cependant les hommes qui discernent différemment et plus sagement, le feront ne découvrent rien d’inconvenant à agir pratiquement sur la base d’un fait dont tout le monde sait qu’il existe.
1 Commentaires sur la loi du mariage et du divorce, par Joel Prentiss Bishop, Boston. 1864, vol. I. § 320.
2 Idem. § 314, note 2.
Il est très évident que M. Bishop ne s’est jamais demandé ce que signifie, en l’espèce, le mot « relation ». S’il avait eu une idée claire du sens du mot, il n’aurait jamais pu écrire les phrases ci-dessus. Par relation, on entend ici la relation dans laquelle les parties se trouvent l’une par rapport à l’autre ; et cela, dans le cas supposé, est une question de sentiment, d’affection et d’intimité. Cette relation n’est pas dissoute par la mort de la personne par qui elle est née. La sœur d’une femme continue à nourrir pour son beau-frère veuf la même affection fraternelle après la mort de sa sœur. Elle peut vivre avec lui, guider sa maison et s’occuper de ses enfants, sans la moindre violation de son amour-propre, et sans craindre d’encourir le manque de respect des autres.
De plus, si la parenté par affinité est dissoute par la mort, alors un fils peut, à la mort de son père, épouser sa belle-mère, ce que Paul dit (1 Cor., v. 1) n’était pas toléré parmi les païens. Nous n’en sommes pas encore là. D’après le principe de M. Bishop, un homme peut épouser sa belle-mère, sa belle-fille et, à la mort de la mère, sa belle-fille. Tout cela, la Bible l’interdit ; et quelle que soit la religion dans certaines de ses manifestations, la Bible, assurément, n’est pas « un faisceau de formes absurdes et détestées ». C’est la sagesse de Dieu, en présence de laquelle la sagesse de l’homme est folie.
3. La grande vérité contenue dans ces lois, c’est que c’est la volonté de Dieu, le précepte de sa sagesse infinie et bienveillante, que les affections qui appartiennent à la relation dans laquelle les parents (que ce soit par consanguinité ou par affinité) se tiennent l’une à l’autre, ne soient pas troublées, perverties ou corrompues par cette sorte d’amour essentiellement différente qui est appropriée et sainte dans la relation conjugale ; et qu’une auréole protectrice devrait être répandue autour du cercle familial.
§ 12. Le Huitième Commandement.
Ce commandement interdit toute violation des droits de propriété. Le droit de propriété sur un objet est le droit à son la possession et l’usage exclusifs.
Le fondement du droit de propriété est la volonté de Dieu. On entend par là (1.) Que Dieu a constitué l’homme de telle sorte qu’il désire et ait besoin de ce droit de possession et d’usage exclusif de certaines choses. (2) Ayant fait de l’homme un être social, il a rendu le droit de propriété essentiel au développement sain de la société humaine. (3) Il a implanté dans la nature de l’homme un sens de la justice qui condamne comme moralement mauvais tout ce qui est incompatible avec le droit en question. (4) Il a déclaré dans sa Parole que toute violation de ce droit est un péché.
Cette doctrine du droit divin de propriété est la seule sécurité pour l’individu ou pour la société. S’il repose sur une autre base, il est incertain et instable. Ce n’est qu’en sanctifiant la propriété, gardée par l’épée de feu de la justice divine, qu’elle peut être à l’abri des dangers auxquels elle est partout et toujours exposée.
De nombreuses théories ont été avancées à ce sujet. Ces théories ont eu un double objet : celui d’expliquer la nature et le fondement du droit ; l’autre pour expliquer comment le droit a été acquis à l’origine. Ces objets sont distincts et ne doivent pas être confondus.
1. La théorie philosophique moderne selon laquelle la loi du plus fort a raison, selon laquelle le plus fort est toujours le meilleur, comprend en effet ces deux objets. Si l’être est le seul bien, et s’il est vrai que plus il y a d’être et plus de bien, alors celui qui a le plus d’être, celui en qui l’infini se révèle le plus pleinement, a le droit d’avoir et de détenir ce qu’il lui plaît de posséder.
2. Si le souci de notre bien-être individuel est le seul motif d’obligation morale, alors l’homme a droit à tout ce qui le rendra heureux. Il peut, et il commettrait certainement une grande erreur, s’il supposait que prendre ce qui ne lui appartient pas favoriserait son bonheur ; mais il n’est retenu d’une telle injustice que par un sentiment de prudence. Il a le droit d’avoir tout ce qui le rendrait heureux, et pour cette raison.
3. Si le bien général, le plus grand bonheur du plus grand nombre, ou l’opportunité, comme le dit Paley, sont la règle et le fondement du devoir, alors ce sera toujours une question d’opinion, une question sur laquelle les hommes seront toujours en désaccord, ce qui est et ce qui n’est pas opportun. On pourrait penser qu’une communauté de biens favoriserait le plus grand bien, et alors il aurait le droit, au moins en sa propre conscience, d’agir selon ce principe. D’autres pourraient penser que l’agrarisme, c’est-à-dire la distribution périodique de toutes les terres du pays en portions égales entre le peuple, favoriserait le bien général, et que ce serait alors pour eux la règle de l’action. Il n’y aurait pas de fin aux artifices pour promouvoir le plus grand bien, si les droits des hommes ne reposaient sur aucun autre fondement que celui de l’opportunité.
Quelques-uns des écrivains juridiques et philosophiques les plus distingués de notre époque enseignent que « la propriété est fondée sur l’utilité ». Pour certains, cependant, l’utilité n’est pas le fondement, mais plutôt le test des droits et des devoirs de l’homme. Le fait qu’une institution ou une ligne de conduite soit propice au bien public n’est pas tant la raison pour laquelle elle est juste, qu’une preuve qu’elle est juste et conforme à la volonté de Dieu. Dieu conçoit le bonheur de toutes ses créatures sensibles. Certaines actions humaines mettent en avant ce but bienveillant, ou leurs tendances sont bénéfiques et utiles. D’autres actions humaines sont contraires à ce but, ou leurs tendances sont malfaisantes ou pernicieuses. Le premier, en tant que promoteur de son dessein, Dieu l’a enjoint. Ce dernier, par opposition à son dessein, Dieu l’a interdit. Il nous a donné la faculté d’observer ; de se souvenir ; et de raisonnement ; et en appliquant dûment ces facultés, nous pouvons recueillir les tendances de nos actions. Connaissant les tendances de nos actions, et connaissant son dessein bienveillant, nous connaissons ses commandements tacites.»1 Il est sans doute vrai que c’est un argument juste et concluant qu’une chose est bonne ou mauvaise en elle-même et conforme ou opposée à la volonté de Dieu, que sa tendance est nécessairement et toujours à produire, d’une part, le bien, ou, d’autre part, le mal. Mais c’est une façon détournée d’obtenir la vérité. Qu’une institution ou un plan d’action soit utile ou non, cela doit être une question d’opinion. Et s’il s’agit d’une question d’opinion, les hommes ne seront pas d’accord à ce sujet ; et l’opinion d’un homme, ou même de la majorité des hommes, n’aura aucune autorité sur les autres. Dieu a révélé sa volonté dans sa Parole et dans la constitution de notre nature. Paul dit que même les païens « font par nature les choses contenues dans la loi », que la loi est « écrite dans leur cœur ». (Rom., II, 14, 15.) La propreté est sacrée, non pas parce qu’à notre avis c’est une institution utile, et par conséquent inférentiellement approuvée par Dieu, mais parce qu’il a dit dans la Bible, et qu’il dit dans la conscience de tout homme : « Tu ne voleras point. » La théorie de M. Austin ne l’empêche pas d’enseigner que « la propriété jus in rem dépend des principes d’utilité. » 1
1 Lectures on Jurisprudence, or the Philosophy of Positive Law, par le regretté John Austin.3d. 3e édition, révisée et éditée par Robert Campbell, Londres, 1869, vol. I. p. 109.
1 Jurisprudence, t. I, p. 132, 382 ; vol. II, p. 1161.
4. Paley dit aussi que « le véritable fondement de notre droit [à la propriété] est la loi du pays ». Il admet cependant que la loi peut autoriser les injustices les plus flagrantes. Il fait donc une distinction entre les mots et l’intention de la loi ; et ajoute : « Avec la loi, nous le reconnaissons, réside la disposition des biens ; Par conséquent, tant que nous nous en tiendrons au dessein et à l’intention d’une loi, cette loi nous justifiera, aussi bien in foro conscientiæ qu’in foro humano, quelle que soit l’équité ou l’opportunité de la loi elle-même.» 2 La loi du pays a, à la vérité, beaucoup à voir avec les questions de propriété, mais le droit lui-même ne repose pas sur cette loi, et est, aux yeux de Dieu, indépendant d’elle. Ce droit existe avant toute loi de l’État. La loi ne peut ignorer ce droit. Elle ne peut légitimement priver un homme de ses biens, si ce n’est pour punir un crime, ou pour cause de nécessité impérieuse, et, dans ce dernier cas, avec une juste indemnité. La propriété, cependant, n’est pas la créature de la loi. Aucune loi injuste ne donne un titre de propriété, valable aux yeux de Dieu ; c’est-à-dire un titre qui devrait satisfaire un homme consciencieux en entrant en possession et en usage. Même lorsque la loi n’est pas injuste, elle peut fonctionner, non pas légalement, mais moralement injuste. Un testament, par exemple, peut exprimer clairement les volontés et l’intention d’un testateur, mais en cas d’erreur matérielle ou technique, il doit être mis de côté et les biens vont à une personne à qui ils n’étaient pas destinés. Cette personne aurait un titre légal, mais pas moralement valide sur la propriété. On entend quelquefois des gens de bien dire : « Nous prendrons tout ce que la loi nous donne ; » en disant cela, ils n’appréhendent pas tout le sens de leurs paroles ; cela revient à dire qu’en matière de propriété, ils feront de la loi du pays, et non de la loi de Dieu, la règle de leur conduite.
2 The Principles of Moral and Political Philosophy, livre iii.part i. ch. iv. ;édit. Boston, 1848, vol. i. pp. 87-89.
5. C’est une doctrine très commune que le droit de propriété est fondé sur le consentement commun, ou sur le pacte social. Les hommes s’accordent à dire que chacun peut s’approprier une portion de ce qui est à l’origine commun à tous. Mais ce consentement ne reconnaît qu’un droit ; il ne le crée pas. Si un homme prend un verre d’eau d’un ruisseau commun à tous, c’est de droit à lui ; et il n’a pas besoin d’en appeler à un pacte ou à un consentement pour justifier qu’il se l’approprie à lui-même. La question de savoir comment un homme acquiert un droit de propriété, et la nature de ce droit lui-même, comme nous l’avons déjà remarqué, sont des questions différentes, bien qu’intimement liées.
6. Les deux sont inclus dans la théorie commune sur le sujet. Si un homme met en culture une portion de terre non appropriée, elle lui appartient pour le moment, en partant du principe qu’un homme se possède lui-même, et par conséquent le fruit de son travail. La possession et l’usage exclusifs de la terre en question sont nécessaires pour assurer à l’homme ces fruits ; Il a donc droit à la terre tant qu’il l’utilise. S’il l’abandonne, son droit cesse. D’autre part, si son usage est continué, de manière à entraîner une occupation, son droit de possession devient permanent. C’est sur ce principe que les hommes agissent dans les districts miniers des terres inoccupées. Chaque homme, le premier venu, revendique pour lui-même une concession ; C’est ce qu’il fait, ou qu’il a le droit de garder pour lui. S’il l’abandonne et va ailleurs, elle cesse d’être à lui. S’il l’occupe en permanence, elle lui appartient en permanence. Le droit de propriété repose ainsi sur l’occupation et l’usage ; en d’autres termes, sur le travail. Mais même cela, selon Blackstone, n’est pas un droit naturel. « Toute propriété, dit-il, doit cesser à la mort, en considérant les hommes comme des individus absolus, et sans rapport avec la société civile : car alors, d’après les principes ci-dessus l’occupant immédiat suivant acquerrait un droit sur tout ce que possédait le défunt. Mais comme, sous des gouvernements civilisés qui sont calculés pour la paix de l’humanité, une telle constitution produirait des troubles sans fin, loi universelle de presque toutes les nations (ce qui est une sorte de de droit dérivé de la nature) a soit donné au mourant le pouvoir de continuer ses biens, en disposant de ses biens par testament ; ou, dans le cas où il néglige d’en disposer, ou n’est pas autorisé à en disposer du tout, la loi municipale du pays intervient alors et déclare qui sera le successeur, le représentant ou l’héritier du défunt ; c’est-à-dire, qui seul aura le droit d’entrer dans cette possession vacante, afin d’éviter cette confusion que le fait qu’elle redevienne commune. Sur la même page, parlant du droit d’héritage, il dit : « Nous sommes enclins à concevoir à première vue qu’il a la nature de son côté ; mais nous confondons souvent avec la nature ce que nous trouvons établi par une longue et invétérée coutume. C’est un établissement sage et efficace, mais clairement politique ; car le droit permanent de propriété, dévolu à l’ancêtre lui-même, n’était pas un droit naturel, mais simplement un droit civil.» 1 Il avait déjà dit : 2 « La nécessité engendra la propriété ; et, pour assurer cette propriété, on eut recours à la société civile, qui amena avec elle une longue suite de concomitants inséparables ; les États, le gouvernement, les lois, les punitions et l’exercice public des devoirs religieux. Cela semble inverser l’ordre naturel des choses. Le mépris de la loi morale entraînerait un mal sans fin, et il est absolument nécessaire que ses commandements soient observés et appliqués ; mais l’obligation de la loi ne repose pas sur cette nécessité ; elle est tout à fait antérieure et indépendante de celle-ci. Ainsi le droit de propriété est antérieur et indépendant de la nécessité qu’il soit tenu pour sacré, afin d’assurer le bien-être de l’humanité. Le fait est que le droit de propriété est analogue au droit à la vie, à la liberté ou à la poursuite du bonheur. Elle ne vient pas des hommes ; elle n’est pas donnée par l’homme ; et elle ne peut pas être ignorée, ou arbitrairement interférée par l’homme. Elle repose sur la volonté de Dieu telle qu’elle se révèle dans la constitution de notre nature et dans notre relation avec les personnes et les choses qui nous entourent.
1 Commentaries on the Laws of England, n. i. par Sir William Blackstone, Knt. 16e édit. Londres, 1825, vol. II, p. 10.
2 Idem. à la p. 7.
7. Stahl, l’éminent juriste allemand, donne en substance le récit suivant de la question. L’homme a été formé à partir de la terre ; mais un esprit divin fut insufflé en lui. Il est donc, d’une part, dépendant du monde matériel ; de l’autre, exalté au-dessus d’elle. Il est placé ici en tant que seigneur et propriétaire. Les choses du monde extérieur lui sont données pour la satisfaction de ses besoins physiques et de ses nécessités spirituelles. Il a donc le pouvoir et le droit sur les choses extérieures, et elles doivent être sous son contrôle permanent et sûr. C’est le fondement du droit de propriété. La propriété est le moyen de développement de l’individualité de l’homme. La manière dont elle est acquise et employée révèle ce qu’est l’homme ; sa nourriture, ses vêtements et son habitation ; ses dépenses pour les plaisirs sensuels, pour les objets de goût, d’art et de science, et pour l’hospitalité, la bienveillance et le bien de la société ; et la consécration de ses acquisitions aux intérêts d’une vie supérieure, — ceux-ci dans leur totalité, puisqu’ils reposent sur le droit de propriété, font le portrait d’un homme. La propriété, cependant, est spécialement conçue pour permettre à un homme de s’acquitter de ses devoirs moraux. Chaque homme a des devoirs qui lui sont propres à remplir ; des devoirs qui n’appartiennent qu’à lui, non aux autres, non à la société ; les devoirs qui découlent de sa vocation et de sa position personnelles, en particulier celles qui appartiennent à sa propre famille. Il faut donc qu’il ait ce qui lui appartient exclusivement posséder. La propriété, par conséquent, n’est pas destinée à la simple satisfaction personnelle ou au soutien ; ce n’est pas non plus une simple maîtrise sans objet des choses extérieures ; C’est le moyen nécessaire pour permettre à l’homme d’accomplir ce qui lui a été assigné par Dieu. destin. C’est là que réside le droit divin de propriété ! 1
1 Die Philosophie des Rechts, Rechts- und Staatslehre, 1. iii. 2, 1, § 22, 4e édit. Heidelberg, 1870, vol. ii.part 1, p. 350 f. Le paragraphe du texte n’est pas une traduction, mais une condensation.
Le droit de propriété n’est donc pas fondé sur la loi du pays, ni sur aucun contrat explicite ou implicite entre les hommes, mais sur la loi de nature. Il est vrai que les lois naturelles, par opposition aux lois positives, ont été expliquées différemment. « Comme la science de l’éthique, dit lord Mackenzie, embrasse toute la gamme des devoirs moraux, son champ d’action est évidemment beaucoup plus vaste que celui de la jurisprudence, qui ne traite que des devoirs qui peuvent être imposés par le droit extérieur. » 2 Cependant, les devoirs qui peuvent être ainsi imposés sont de deux sortes ; celles qui découlent de la loi naturelle et celles qui découlent de la loi commune ou statutaire. « Par la loi de la nature, dit le chancelier Kent,3 « j’entends ces règles de conduite justes et justes que le Créateur a prescrites à l’homme en tant qu’être dépendant et social. qui doivent être déterminés par la déduction de la droite raison, bien qu’ils puissent être plus précisément connus et plus explicitement déclarés par la révélation divine. Cicéron enseigne que Dieu est l’auteur de la loi naturelle, et que ses devoirs sont d’une obligation immuable. Il dit : « Nec erit alia lex Romæ, alia Athenis, alia nunc, alia posthac ; sed et omnes gentes et omni tempore una lex et sempiterna et immutabilis continebit, unusque erit communis quasi magister et imperator omnium deus. » 4
2 Studies in Roman Law, with Comparative Views of the Laws of France, England, and Scotland, par lord Mackenzie, l’un des juges de la Cour de session d’Écosse, 2e édit. Édimbourg et Londres, 18G5, p. 45.
3 Chancelier Kent, cité par Lord Mackenzie.
4 De Reftublica, HI. xxii. 33. 16, édit. Leipzig, 1850, p. 1193, a.
Lord Mackenzie donne à la doctrine de Cicéron la sanction de son propre jugement : « Où, dit-il, la loi de la nature qu’elle commande ou qu’elle défend absolument, elle est immuable et d’obligation universelle, de sorte que, bien qu’elle puisse être confirmée, elle ne peut être contrôlée par les lois humaines sans une violation manifeste de la volonté divine.» 1
1 Les boues en droit romain, etc., p. 49.
En ces jours, alors que tant de gens sont disposés à jeter et considérer le mariage et la propriété comme de simples créatures de la loi, qui peuvent être réglées ou ignorées au gré ou à la volonté du peuple, il est bon de leur rappeler qu’il y a une loi supérieure à toute loi de l’homme, appliquée par l’autorité de Dieu, qu’aucun homme ni aucune communauté ne peut violer impunément.
Bien que le droit de propriété implique le droit de contrôle absolu, de sorte qu’un homme peut faire ce qu’il veut de ce qui lui appartient, il ne s’ensuit pas que ce droit soit illimité, ou que le droit civil n’ait aucun contrôle légitime sur l’usage ou la distribution de sa propriété. Un homme n’a pas le droit d’utiliser son savoir ou sa force au préjudice de ses semblables ; il ne peut pas non plus user de sa propriété de manière à en faire une nuisance publique ; il ne peut pas non plus le consacrer à un objet immoral ou nuisible ; il ne peut pas non plus en disposer par testament de manière à militer contre l’ordre public. Bien sûr, comme les différentes nations sont organisées selon des principes différents, les lois qui régissent l’utilisation et la distribution de la propriété doivent également différer. Chez les Hébreux, le pays de Canaan était à l’origine distribué équitablement entre les différentes familles. Le chef de famille n’avait pas le contrôle illimité de ce qui lui était ainsi donné. Il ne pouvait pas finalement l’aliéner. Ses fils, et non ses filles, à moins qu’il n’y ait pas de fils, étaient ses héritiers. L’aîné avait une double portion. (Deut. XXI. 15 et suiv.) Ces limitations du droit de propriété ont été ordonnées par Dieu, afin que les fins de la théocratie puissent être accomplies. Dieu jugea bon de rendre impossible qu’une grande partie du pays fût occupée par une ou quelques familles. En Angleterre, la politique publique a supposé qu’il était important de maintenir un ordre de noblesse puissant. Pour atteindre ce but, les lois de primogéniture et d’entrainement sont en vigueur depuis longtemps, de sorte que la plus grande partie des terres de la Grande-Bretagne est entre les mains d’un nombre relativement restreint de familles. Cette répartition inégale des biens n’a cessé de croître rapidement, de sorte que Hugh Miller, lorsqu’il était rédacteur en chef de l’Edinburgh Witness, a dit que l’Angleterre était maintenant comme une pyramide en équilibre sur son sommet. En France, le droit d’un testateur de disposer de ses biens est très limité. « Si quelqu’un meurt sans postérité ni ascendants, il peut léguer tous ses biens à des étrangers ; mais si un homme a à sa mort un enfant légitime, il ne peut disposer ainsi que de la moitié de ses biens ; s’il laisse deux enfants, le troisième ; et s’il laisse trois enfants ou plus, le quatrième. En Ecosse, « si un homme meurt sans femme ni descendance, tous ses biens sont à sa disposition ; s’il laisse une femme et descend, ses biens ou biens personnels sont divisés en trois parts égales, dont l’une revient à sa femme comme jus relictæ, l’autre à ses enfants comme legitim (c’est-à-dire légitima portw), et le troisième est à sa disposition ; S’il ne laisse pas de femme, il peut en disposer d’une moitié, et l’autre moitié va à ses enfants, et ainsi de suite, s’il ne laisse pas d’enfants, la femme a droit à une moitié, et il peut léguer l’autre.» 1 Ces faits ne sont mentionnés que comme des illustrations de la manière dont la loi, tant divine qu’humaine, peut limiter l’exercice du droit de propriété alors que le caractère sacré de ce droit, comme supérieur à toute loi humaine, est pleinement reconnu.
1 Lord Mackenzie , ut supra, p. 270.
La communauté de biens n’implique pas nécessairement la négation du droit de propriété privée. Quand Ananias, ayant vendu un bien, retint une partie du prix, Pierre lui dit : « Tant qu’il resterait, n’était-il pas à toi ? Et après qu’il a été vendu, n’était-il pas en ton pouvoir ? (Actes, v. 4.) Un nombre illimité d’hommes peuvent convenir de vivre en commun, en mettant tous leurs biens et tous les fruits de leur travail dans un fonds commun, dont chaque membre est pourvu selon ses besoins. Cette expérience a été tentée à petite échelle et pour une courte période par les premiers chrétiens de Jérusalem. « La multitude de ceux qui croyaient n’avaient qu’un seul cœur et qu’une seule âme : aucun de ceux qui ne disait rien de ce qu’il possédait était à lui ; mais ils avaient tout en commun..... Il n’y en avait pas non plus qui manquât d’entre eux, car tous ceux qui possédaient des terres ou des maisons, les vendaient, et apportaient le prix des choses qui étaient vendues, et les déposaient aux pieds des apôtres, et on les distribuait à chacun selon ses besoins. (Actes iv. 32-35.) Quelques-uns En effet, ces passages n’impliquent aucune communauté réelle de biens. Avoir « toutes les choses communes » est compris comme signifiant, « Personne ne considérait ses biens comme lui appartenant absolument, mais comme un dépôt pour le bénéfice d’autrui aussi. » Cette interprétation semble incohérente avec l’ensemble du récit. Ceux qui avaient des biens les vendaient. Ils ont renoncé à tout contrôle sur ce qui leur appartenait autrefois. Le prix était remis aux apôtres et distribué par eux ou sous leur direction.
D’après le récit tel qu’il est donné dans les Actes, on peut remarquer :
1. Que la conduite de ces premiers chrétiens était purement spontanée. Les apôtres ne leur ont pas ordonné de vendre leurs biens et d’avoir toutes choses en commun. Il n’y a pas la moindre indication que les apôtres aient donné un quelconque encouragement à ce mouvement. Ils semblent simplement l’avoir permis. Ils permettaient au peuple d’agir sous l’impulsion de ses propres sentiments, chacun faisant ce qu’il voulait des siens.
2. On ne peut guère considérer comme anormal que les premiers chrétiens aient été conduits à cette expérience. Pour nous, les merveilles de la rédemption sont « la vieille, vieille histoire », inexprimablement précieuse certes, mais elle a perdu le pouvoir de la nouveauté. Chez ceux pour qui c’était nouveau, cela pouvait bien produire une perplexité extatique, qui égarait leur jugement. Il y a deux grandes vérités impliquées dans l’Évangile, dont la perception claire peut expliquer la détermination de ces premiers convertis à avoir toutes choses en commun. La première est que tous les croyants sont un seul corps en Jésus-Christ ; tous unis à Lui par le séjour de l’Esprit Saint ; tous également participants de sa justice ; tous les objets de son amour ; et tous destinés au même héritage de gloire. L’autre grande vérité est contenue dans les paroles du Christ : « Toutes les fois que vous l’avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait. » Il n’est donc pas étonnant que les hommes dont l’esprit était rempli de ces vérités aient été inconscients des simples considérations prudentielles.
3. Cette expérience, malgré tout ce qu’il paraît, fut limitée aux chrétiens de Jérusalem, et fut bientôt abandonnée. On n’en entend jamais parler ailleurs ni après. Elle n’a donc aucune force préceptive.
4. Les conditions du succès de ce plan, sur une grande échelle, ne peuvent être trouvées sur la terre. Elle suppose quelque chose de proche de la perfection dans tout ce qui est compris dans la boussole de son opération. Elle suppose que les hommes travailleront avec autant d’assiduité sans l’impulsion du désir d’améliorer leur condition et d’assurer le bien-être de leur famille qu’avec elle. Elle suppose un désintéressement absolu de la part des membres les plus riches, les plus forts ou les plus capables de la communauté. Ils doivent être prêts à renoncer à tous les avantages personnels de leurs dons supérieurs. Cela suppose une intégrité parfaite de la part des distributeurs du fonds commun, et un esprit de modération et de contentement de la part de chaque membre de la communauté, pour se contenter de ce que d’autres, et non lui, peuvent penser être sa part équitable. Nous devrons attendre jusqu’au millénium avant que ces conditions puissent être remplies. La tentative d’introduire une communauté générale de biens dans l’état actuel du monde, au lieu d’élever les pauvres, réduirait toute la masse de la société à un niveau commun de barbarie et de pauvreté. La seule base sûre de la société est dans ces principes immuables de droit et de devoir que Dieu a révélés dans sa Parole et écrits dans le cœur des hommes. Et ces vérités, même si elles sont reconnues comme des questions d’opinion, perdent leur autorité et leur pouvoir si elles cessent d’être considérées comme des révélations de l’esprit et de la volonté de Dieu, auxquelles la raison humaine et la conduite humaine doivent se conformer.
Le ciel n’est pas plus élevé que « les parties inférieures de la terre », que les principes et les buts des premiers chrétiens n’étaient élevés au-dessus de ceux des défenseurs modernes de la communauté des biens. Cette idée n’est pas d’origine moderne. Il apparaît sous différentes formes à toutes les époques du monde. Elle entrait dans le plan de la République de Platon, car, à ses yeux, la propriété privée était la source principale de tous les maux sociaux. Il a été inclus dans le monachisme du Moyen Âge. Le renoncement au monde incluait le renoncement à toute propriété. La pauvreté volontaire était l’un des vœux de toutes les institutions monastiques. Il a été adopté par beaucoup de sectes mystiques et fanatiques qui sont apparues avant la Réforme, comme les Beghards et les « Frères du Libre Esprit », qui enseignaient que le monde devait être restauré à son état paradisiaque, et que toutes les distinctions créées par la loi, qu’il s’agisse d’organisation sociale, de propriété ou de mariage, devaient être supprimées. À l’époque de la Réforme, les partisans de Münzer adoptèrent les mêmes principes, et leurs efforts pour les mettre en pratique aboutirent aux misères de la « guerre paysanne ». Tous ces mouvements étaient liés à doctrines religieuses fanatiques. Les chefs de ces sectes prétendaient être inspirés et se présentaient comme les organes et les messagers de Dieu.
Le communisme moderne, au contraire, en ce qui concerne son caractère général, est matérialiste et athée, et sous certaines de ses formes, panthéiste. 1 Cela est cohérent avec l’aveu que certains de ses avocats, comme Saint-Simon, Fourier et d’autres, étaient des hommes sincères et bienveillants. Quelques-uns d’entre eux, en effet, disaient qu’ils ne désiraient que mettre en pratique le principe de l’amour fraternel si souvent inculqué par le Christ. Communisme et socialisme ne sont pas des termes à proprement parler convertibles, bien qu’ils soient souvent utilisés pour désigner le même système. L’une se rapporte plus particulièrement au principe de la communauté de biens ; le second au mode d’organisation sociale. Avec Fourier, le premier était subordonné au second. Il ne niait pas entièrement le droit de propriété, mais insistait sur le fait que la société était mal organisée. Au lieu de vivre dans des familles séparées, chacune luttant pour le soutien et l’avancement, les hommes devraient être rassemblés dans de grandes associations ayant des biens communs, et tous travaillant pour un fonds commun. Ce fonds devait être distribué en fonction du capital apporté par chaque membre, et en fonction du temps et de l’habileté employés dans le service commun. Proudhon, immortalisé par le livre où l’on répond à la question « Qu’est-ce que la propriété ? » en disant : « La propriété, c’est le vol », fait de la règle de la répartition du fonds commun le temps consacré au travail. Louis Blanc écarte de considération le capital, le travail et l’habileté, et fait des besoins de l’individu la seule règle de la distribution. Il est commun à tous ces régimes que le droit de propriété de la terre ou de ses productions est nié. Les deux derniers nient à l’homme toute propriété de son habileté ou de ses talents ; et le dernier, même dans son travail, afin que le membre le plus oisif et le moins efficace de la société reçoive, selon elle, autant que le plus industrieux et le plus utile.
1 Enfantin, disciple de saint Simon, commença un de ses discours publics, prononcé à Paris en 1831, par ces mots : « Dieu est tout ce qui est ; Tout est en lui, tout est par lui, Nul de nous n’est hors de lui, » et Henri Heine se disait hégélien. D’autre part, l’un des livres de saint Simon s’intitule Le nouveau christianisme.Voir Kir-chen-Geschichte de Guerike, vn. D. § 220, 6e édit. Leipzig, 1846, vol. iii. p. 679, notes de bas de page. Nous sommes tentés de citer une seule phrase caractéristique de Guerike, ut supra, pp. 678-682
« Die originellste und selbstiindigste religiiis-politische Secte der neuesten Zeit aber, von einem Manne gegründet, dem erst durch verungliickten, Selbstmord 'der gottliche Mensch sich kund that ' (dem franzosischen Grafen Claude Henri St. Simon, geb. zn Paris 1760, gest. J’ai 19 ans. Mai 1825), und sodann durch die Juli-Revolution 1830 erst in rechten Schwung gebracht, welche, als die Quintessenz des tief verderbten antichristischen Zeitgeistes, als die einzig ganz conséquente unter alien widergottlichen Richtungen der Zeit, Welt und Gott, Staat und Kirche, Fleisch und Geist, Diesseits und Jenseits, Bose und Gut, (auch Weib und Mann) sowohl wissenschaftlisch als praktisch unirte und identificirte, unbeschriinkte vollstandig organisirte Herrschaft des widergottlichen Fleisches, ungebundenes system-atisches Leben nur fiirdiesseitige (die einzige) Welt, unbedingte Geltung eines consequenten politisch-religiosen Matérialismes in gliihender Beredtsamkeit predigte, und auf den Thron des heiligen Gottes den 'reizenden' Fiirsten dieser Welt setzte, wollte nicht etwa eine christliche Parthei oder Secte, sondern die nene Welt-religion sein ; und diese seligen ' Menschen der Znkunft,' so verschollen auch mit all ihrer abenteuerlich gliinzenden Aeusserlichkeit sie wieder fiir den Moment sind, — aber in einem ' Jiingen-Deutschland,' (zuerst 1834 und besonders 1835) sowie iin vollkommen organisirten englischen Socialiste !! -und in den contincntalischen Communisten-Vereinen, und nun nach modischerem Schnitt, verjüngt auch bereits wider erstanden, und in allerlei nenen Formen stets neu erstehend, — bahnten so einer fiirchterlichen Weltepoche den griisslich anmuthigen Weg. » À moins que le lecteur ne soit un peu habitué à se frayer un chemin dans les dédales du Dr Guérike phrases, il peut éprouver des difficultés à se faufiler dans le labyrinthe ci-dessus. C’est vrai Cependant, intéressant, comme caractéristique de l’homme et de son livre. L’un de ses compatriotes a appelé son histoire un Strafpredigt.
La négation du droit de propriété est, dans une large mesure, le rejet de la religion et du mariage. Le mariage, après la religion et la propriété, a été déclaré comme le plus grand moyen de misère sociale. Les enfants ne devaient pas appartenir à leurs parents, mais à l’État ; L’inclination et la jouissance devaient être le motif, la fin et la règle de la vie.1
1 Voir l’Encyclopédie réelle de Herzog , art. « Communismus und Socialismus. » Stahl’s Philosophie des Rechts, Rechts- und Staatslehre, 1. iii. 2. 2. §§ 31 à 34 ; 4ème édition. Heidel, berg, 1870, vol. ii. Partie 1. p. 367 à 376. Cyclopaedia of Biblical, Theological, and Ecclesl-astical Literature, préparée par le révérend John McClintock, D. D., et James Strong, S. T. D., New York, 1869, art. « Communisme ». Les Cyclopædias mentionnées ci-dessus donnent de nombreuses références à la littérature sur ce sujet.
La France a été le berceau et le siège principal du communisme dans sa forme moderne. Les principes du système ont fait de grands progrès dans d’autres pays, et ont fait fermenter à un degré effrayant l’esprit des classes laborieuses tant en Europe qu’en Amérique. Organisation et combinaison entre les millions épars que l’on dit faire partie de cette société lui ont donné une importance qui s’est imposée à l’attention de presque tous les États chrétiens. Quels sont les principes et les buts de ce formidable organisme, il n’est pas facile de le dire d’une manière satisfaisante. Il n’y a pas eu d’énonciation officielle de principes reconnus par toutes les sociétés affiliées. Ils diffèrent, dans certaines limites, sans doute, entre eux. Certains trouvent leurs représentants dignes des communistes de Paris tels qu’ils se sont révélés au cours de l’année en cours (1871). D’autres reculeraient devant les excès qui ont fait du nom des communistes un objet d’exécration et d’horreur dans toutes les parties du monde civilisé. Cependant, on en sait assez sur les desseins de la société en question, pour qu’il soit certain que son succès entraînerait le renversement de tous les gouvernements existants ; en mettant tout le pouvoir entre les mains, non du peuple, mais d’une classe particulière, les ouvriers , le prolétariat (les hommes sans terre) ; dans la dissolution de la société telle qu’elle est actuellement organisée ; l’abolition de la propriété privée ; l’extinction de la famille ; l’abrogation de toutes les lois sur le mariage ; et la proscription de la religion, et surtout du christianisme, comme un mal public. Tels sont les objectifs avoués de quelques-uns des chefs du mouvement, et telles sont les conséquences logiques des principes défendus par les plus réticents d’entre eux.
C’est un fait historique que le communisme a son origine sous sa forme moderne dans l’athéisme matérialiste ; dans la négation de Dieu, qui a le droit de donner des lois aux hommes, et le pouvoir et le dessein de faire respecter ces lois par les rétributions de la justice ; dans la croyance que la vie présente est toute la période de l’existence allouée aux hommes ; et que les jouissances de cette vie sont, par conséquent, tout ce que les hommes ont à désirer ou à attendre. Ces principes avaient été inculqués depuis longtemps par des hommes tels que Rousseau, Voltaire, d’Holbach, Diderot et d’autres. Cependant, pour produire une conflagration, il faut qu’il y ait non seulement du feu, mais aussi des matériaux combustibles. Ces principes matérialistes n’auraient été que de simples spéculations, s’il n’y avait pas eu une telle masse de souffrances et de dégradation parmi le peuple. Ce sont des esprits accablés par la conscience de la misère et le sentiment de l’injustice qui ont été enflammés par les nouvelles doctrines, et qui ont éclaté dans un feu qui a embrasé pour un temps toute l’Europe. Nous ne devons attribuer tout le mal ni aux infidèles, ni au peuple. S’il n’y avait pas eu les siècles précédents de cruauté et d’oppression, la France n’aurait pas fourni une page aussi sanglante à l’histoire de l’Europe moderne.
L’Internationale du 27 mars 1870 exprimait succinctement l’objet de la Société internationale : « Les droits des ouvriers, c’est notre principe ; l’organisation des ouvriers, c’est notre moyen d’action ; révolution sociale, c’est notre fin. Ce sont les « ouvriers », les artisans, et non la masse du peuple, instruite ou non ; mais une seule classe dont les intérêts doivent être pris en considération. Ce n’est pas une révolution politique, le changement d’une forme de gouvernement pour une autre, qui est le but visé ; mais une révolution sociale, un renversement complet de l’ordre existant de la société.
Comme cette institution se profile avec un aspect si prodigieux dans toutes les directions, la question est de savoir comment elle doit être satisfaite et comment son influence doit être contrecarrée. Les épidémies ouvertes peuvent être réprimées par la force, mais le mal ne peut être guéri par aucun de ces moyens. L’artillerie est inefficace contre les opinions. Si le communisme, tel qu’il est organisé dans cette société, doit son origine aux causes que nous venons de citer, la méthode rationnelle consiste à corriger ou à supprimer ces causes. Si le communisme est le produit de l’athéisme matérialiste, son remède se trouve dans le théisme ; en amenant les gens à connaître et à croire qu’il y a un Dieu dont ils dépendent et devant qui ils sont responsables ; en leur enseignant que ce n’est pas la seule vie, que l’âme est immortelle, et que les hommes seront récompensés ou punis dans le monde à venir selon leur caractère et leur conduite dans la vie présente ; que, par conséquent, le bien-être n’est pas ici la fin la plus élevée de l’existence ; afin que les pauvres d’ici soient désormais beaucoup plus heureux que leurs voisins riches ; et qu’il vaut mieux être Lazare que Dives. Il faudra leur faire croire qu’il y a une providence divine sur les affaires du monde ; que les événements ne sont pas déterminés par l’opération aveugle des causes physiques ; mais que Dieu règne ; qu’il distribue à chacun individuellement comme il lui plaît ; « que le Seigneur fait pauvre et enrichit ; » que ce ne sont pas les riches et les nobles, mais les pauvres et les humbles, qui sont ses favoris particuliers ; et que le droit de propriété, le droit de mariage, les droits des parents et des magistrats, tout cela est ordonné par Dieu, et ne peut être violé sans encourir son mécontentement et l’infliction certaine d’un châtiment divin. Imprégner l’esprit de la masse du peuple, surtout dans les grandes villes, sera un travail lent et difficile ; mais c’est absolument nécessaire. Si le matérialisme et l’athéisme sont pratiquement embrassés par la masse d’une communauté, elle périra inévitablement. Les religieux La formation du peuple n’est cependant qu’une partie de la tâche que la société doit accomplir pour assurer sa propre existence et sa prospérité. Il faut que la grande masse du peuple soit mise à l’aise, ou du moins qu’elle ait les moyens de le devenir ; et ils doivent être traités avec justice. La misère et le sentiment de l’injustice sont les deux grands éléments perturbateurs dans l’esprit des gens. Ce sont les feux endormis qui sont toujours prêts à éclater en une conflagration destructrice.
Violations du Huitième Commandement.
On peut douter que la société soit plus menacée par les principes destructeurs du communisme que par les fraudes secrètes ou tolérées qui, dans une si large mesure, pénètrent presque tous les domaines de la vie sociale. Si ce commandement interdit toute appropriation injuste ou injuste de la propriété d’autrui pour notre propre usage ou avantage, si toute appropriation de ce genre est un vol aux yeux de Dieu, alors le vol est le plus courant de toutes les transgressions extérieures du Décalogue. Il ne s’agit pas seulement d’un vol vulgaire tel que la loi peut le détecter et le punir, mais :
1. Tous les faux semblants en matière d’affaires ; représentant un article proposé à l’achat ou à l’échange comme étant différent et meilleur qu’il ne l’est. Cela inclut une multitude de péchés. Les articles produits au pays sont vendus comme des productions étrangères, et le prix demandé et donné est déterminé par cette représentation frauduleuse. Les châles de Paris se vendent comme indiens ; les vins fabriqués dans ce pays sont vendus comme les productions de France, du Portugal ou de Madère. On dit qu’on boit plus de vin de Champagne en Russie qu’on n’en fabrique en France. On consomme dans ce pays, sous le nom de La Havane, plus de cigares que Cuba n’en produit. Une grande partie du papier fabriqué aux États-Unis porte le cachet de Londres ou de Bristol. Ce type de fraude n’a guère de limite. Cela ne semble troubler la conscience d’aucun homme. Pire que cela, c’est de vendre des choses comme saines et authentiques, qui sont en fait fausses et souvent sans valeur. La fraude en matière de commerce est si répandue qu’elle est devenue une maxime juridique : « Que l’acheteur prenne soin de lui-même. » Il doit s’attendre à être trompé, et il est donc tenu d’être toujours sur ses gardes. Il n’est pas rare d’entendre des hommes dire à un ecclésiastique : « Si j’avais affaire à un homme d’affaires, j’essaierais évidemment de le tromper ; car je sais qu’il essaierait de me tromper. Mais comme vous n’êtes pas un homme d’affaires, je fais une exception dans votre cas, et je traiterai honnêtement.
Sous ce chef de faux semblants vient la falsification des aliments, des médicaments et des étoffes pour les vêtements. L’ampleur de cette portée est effrayante. Il n’y a pas longtemps que le parlement anglais a nommé une commission chargée d’examiner les falsifications des denrées alimentaires vendues par les épiciers de Londres. Le résultat de l’examen a été que seulement six spécimens sur cent collectés étaient purs, c’est-à-dire qu’ils étaient ce qu’ils étaient représentés ou déclarés être. Il n’y a aucune raison de supposer que Londres soit particulier ou prééminent dans ce genre de fraude. Le même grief est fait à propos de l’adultération des drogues. Ce mal était si grand que certains gouvernements ont pris en main la préparation des médicaments pour leurs marines et leurs armées. S’il faut en croire les papiers publics, la plus grande partie des vins et autres liqueurs, spiritueux et maltés, vendus au public, sont non seulement frelatés, mais mélangés à des drogues empoisonnées. Les vêtements fournis aux soldats en service actif, exposés à toutes les rigueurs et à tous les changements de temps, étaient et sont souvent faits de matériaux sans valeur. Il n’y aurait pas de fin à l’énumération des fraudes de ce genre. Un important journal anglais a dit récemment que la plus grande partie des revenus du gouvernement britannique était employée à s’efforcer de prévenir et de détecter les fraudes contre le public.
2. Une autre grande catégorie de violations du huitième commandement comprend les tentatives de profiter indûment de l’ignorance ou des nécessités de nos semblables. Il est de la nature du vol qu’un homme vende un objet en sachant qu’il a moins de valeur que celui à qui il l’offre en vente. Si quelqu’un sait que le crédit d’une banque est altéré, ou que les affaires d’un chemin de fer, ou de toute autre société, sont embarrassées, et qu’il profite de cette connaissance pour vendre les actions ou les billets de ces sociétés à ceux qui ignorent le sujet, en exigeant pour eux plus que leur valeur réelle, il est coupable de vol, si le commandement : « Tu ne voleras point », interdit toute acquisition injuste du bien de notre prochain. De la même manière, toutes les tentatives injustes d’augmenter ou de diminuer la valeur des articles de commerce sont des violations de la loi de Dieu. Les rapports non fondés sont souvent diffusés à dessein pour avoir cet effet d’amélioration ou de déprime sur les valeurs, de sorte que l’on puisse profiter des imprudents ou mal informés. C’est un délit du même genre que d’engraisser des marchandises pour en augmenter le prix. « Celui qui retient le blé, le peuple le maudira, mais la bénédiction sera sur la tête de celui qui le vendra. » (Prov. xi. 26.) C’est encore une violation de la loi que de profiter des nécessités de nos semblables et d’exiger un prix exorbitant pour ce dont ils peuvent avoir besoin. Lors de l’épouvantable incendie qui s’est produit récemment à Chicago, mille dollars ont été exigés pour l’usage d’un cheval et d’une charrette pendant une seule heure. On peut dire qu’il n’y a pas d’étalon fixe de valeur ; qu’une chose peut valoir ce qu’elle coûte à l’homme qui la possède ; ou ce qu’elle vaut pour l’homme qui la demande ; ou ce qu’il apportera sur le marché libre. Si une heure d’utilisation du cheval et de la charrette valait plus pour l’homme de Chicago que mille dollars, on peut dire qu’il n’était pas injuste d’exiger cette somme. S’il en est ainsi, si un homme qui meurt de soif est prêt à donner tout son bien pour un verre d’eau, il serait juste d’exiger ce prix ; ou si un homme en danger de noyade offrait mille dollars pour une corde, nous pourrions refuser de la lui jeter pour une récompense moindre. Une telle conduite que tout homme estime digne d’exécration. Le fait est que les choses ont une valeur intrinsèque, aussi déterminée soit-elle, qui ne peut être augmentée parce que nos semblables souffrants en ont peut-être un besoin pressant.
3. Ce commandement défend également de priver les hommes de leurs biens, en raison d’un simple vice technique ou d’un vice juridique de leur titre. Ce défaut peut être l’effet d’une ignorance inévitable ; ou la perte par naufrage, incendie, vol, ou autre prétendu accident, de la preuve de leur droit, la loi peut en pareil cas être inexorable : il peut être de tout droit qu’il en soit ainsi, mais néanmoins l’homme qui se prévaut d’un tel défaut pour s’emparer de la propriété de son prochain, viole le commandement qui dit : « Tu ne voleras point ; » c’est-à-dire que tu ne prendras pas ce qui, aux yeux de Dieu, ne t’appartient pas. Les jeux de hasard entrent dans la même catégorie où l’on profite des imprudents ou des malhabiles pour les priver de leurs biens sans compensation. C’est vrai Cependant, il est impossible d’énumérer ou de classer les différentes méthodes de fraude. Le code de moralité de beaucoup d’hommes d’affaires et de professionnels est très en deçà de la loi morale telle qu’elle est révélée dans la Bible. Cela est particulièrement vrai en ce qui concerne le huitième commandement du décalogue. Beaucoup de ceux qui se sont bien tenus dans la société, et même dans l’Église, seront étonnés au dernier jour de trouver le mot « Voleurs » écrit après leur nom dans le grand livre du jugement.
§ 13. Le Neuvième Commandement.
Ce commandement interdit toute violation des obligations de véracité. La plus grave de ces infractions est le faux témoignage contre notre prochain. Mais cela inclut tous les infraction de même caractère général ; car l’ordre Tu ne tueras point, interdit toute indulgence ou manifestation de malice.
Le commandement de garder la vérité inviolée appartient à une classe différente de ceux qui se rapportent au sabbat, au mariage ou à la propriété. Celles-ci sont fondées sur les relations permanentes des hommes dans l’état actuel de l’existence. Ils ne sont pas par nature immuables. Dieu peut à tout moment les suspendre ou les modifier. Mais la vérité est en tout temps sacrée, parce qu’elle est l’un des attributs essentiels de Dieu, de sorte que tout ce qui milite contre la vérité ou qui lui est hostile est en opposition avec la nature même de Dieu. La Vérité est, pour ainsi dire, le substrat même de la Déité. C’est en ce sens le fondement de toutes les perfections morales de Dieu, que sans lui elles ne peuvent être conçues comme existantes. À moins que Dieu ne soit réellement ce qu’il déclare être ; à moins qu’Il ne veuille dire ce que Il déclare qu’il veut dire ; à moins qu’Il ne fasse ce qu’Il promet, toute l’idée de Dieu est perdue. De même qu’il n’y a pas d’autre Dieu que le vrai Dieu, de même sans vérité il n’y a et ne peut pas y avoir de Dieu. De même que cet attribut est, pour ainsi dire, le fondement du divin, de même il est le fondement de l’ordre physique et moral de l’univers. Qu’est-ce que l’immutabilité des lois de la nature, sinon une révélation de la vérité de Dieu ? Ce sont des manifestations de ses desseins. Ce sont des promesses sur lesquelles s’appuient ses créatures, et par lesquelles elles doivent régler leur conduite. Si ces lois étaient capricieuses, si les mêmes effets ne découlaient pas uniformément des mêmes causes, l’existence même des êtres vivants serait impossible. La nourriture d’un jour peut être un poison le lendemain. Si un homme ne récolte pas ce qu’il a semé, il n’y a pas de sécurité pour quoi que ce soit. La vérité de Dieu est donc écrite sur les cieux. C’est la proclamation quotidienne faite par le soleil, la lune et les étoiles dans leur procession solennelle à travers l’espace, et elle est reprise par la terre et tout ce qu’elle contient.
La vérité de Dieu est aussi le fondement de toute connaissance. Comment savons-nous que nos sens ne nous trompent pas ; que la conscience n’est pas mensongère ? que les lois de la croyance qui, par la constitution de notre nature à laquelle nous sommes forcés d’obéir, ne sont-ils pas de faux guides ? À moins que Dieu ne soit vrai là-bas il ne peut y avoir aucune certitude en quoi que ce soit ; encore moins peut-il y avoir de sécurité ; Nous ne pouvons avoir aucune confiance dans l’avenir : aucune assurance que le mal ne triomphera pas finalement du bien, de l’obscurité de la lumière, de la confusion et de la misère de l’ordre et du bonheur. Il y a donc quelque chose de terriblement sacré dans les obligations de la vérité. Un homme qui viole la vérité pèche contre le fondement même de son être moral. Comme un faux dieu est pas de Dieu, donc un faux homme n’est pas un homme : il ne peut jamais être ce que l’homme a été conçu pour être ; il ne peut jamais répondre à la fin de son être. Il ne peut y avoir en lui rien de stable, de digne de confiance ou de bon.
Il y a deux classes de péchés que le neuvième commandement interdit. La première, c’est toute forme de détraction ; tout ce qui nuit injustement ou inutilement à la réputation de notre prochain ; et la seconde, toutes les violations des lois de la vérité. Ce dernier, en effet, inclut le premier. Porter un faux témoignage, cependant, étant la chose interdite définitive, devrait être considérée séparément.
La forme la plus grave de cette infraction est le faux témoignage devant une cour de justice. Cela inclut la culpabilité de la malice, le mensonge et la moquerie de Dieu ; et sa commission rend à juste titre un homme infâme, et le place en dehors de la société. Comme elle porte atteinte à la sécurité de la moralité, de la propriété et même de la vie, c’est une infraction qui ne peut être passée impunément. Le faux jureur est donc un criminel aux yeux de la loi civile, et sujet à la honte et à la punition publiques.
La calomnie est une infraction de même nature. Il diffère du péché de porter un faux témoignage, seulement en ce qu’il n’est pas commis dans un procès judiciaire, et en ce qu’il n’est pas accompagné des mêmes effets. Le calomniateur, cependant, porte un faux témoignage contre son voisinage. Il le fait dans les oreilles de la publication, et non dans celles d’un jury. L’infraction comprend les éléments de malveillance et de mensonge contre lesquels cet ordre est spécialement visé. La circulation de faux rapports, « porteurs de contes », comme on l’appelle dans les Écritures, est révélatrice du même état d’esprit et tombe sous le coup de la même condamnation. De même que la loi de Dieu connaît les pensées et les intentions du cœur, en condamnant un acte extérieur, elle condamne la disposition qui tend à le produire. En condamnant tous ceux qui disent du mal de notre prochain, les Écritures condamnent un tempérament méfiant, une disposition à imputer de mauvais motifs et une réticence à croire que les hommes sont sincères et honnêtes dans l’aveu de leurs principes et de leurs buts. C’est le contraire de cette charité qui « ne pense pas au mal », « croit tout, espère tout ». Il est encore plus contraire à l’esprit de cette loi, que nous chérissions ou exprimions notre satisfaction dans la honte des autres, même s’ils sont nos concurrents ou nos ennemis. Il nous est ordonné de « nous réjouir avec ceux qui se réjouissent et de pleurer avec ceux qui pleurent ». (Rom. xii. 15.)
Les usages de la vie, ou les principes des hommes de profession, permettent beaucoup de choses qui sont clairement incompatibles avec les exigences du neuvième commandement. Lord Brougham aurait dit à la Chambre des lords qu’un avocat ne connaît personne d’autre que son client. Il est tenu per fas et nefas, si possible, de l’innocenter. S’il est nécessaire à l’accomplissement de ce but, il est libre d’accuser et de diffamer les innocents, et même (comme le dit le rapport) de ruiner son pays. 1 Il n’est pas rare, surtout dans les procès pour meurtre, que les avocats de l’accusé accusent des innocents d’imputer le crime à des innocents et qu’ils déploient tous leurs efforts ingéniosité pour convaincre le jury de leur culpabilité. C’est une injustice cruelle et méchante, une violation flagrante du commandement qui dit : « Tu ne porteras pas de faux témoignage contre ton prochain. »
1 Lord Brougham, d’après les papiers publics, exprima ces sentiments pour justifier la conduite du célèbre avocat irlandais Phillips, qui, lors du procès de Courvoisier pour le meurtre de lord Russell, s’efforça de faire porter la culpabilité au maître d’hôtel et à la femme de chambre, qu’il savait innocents, puisque son client lui avait avoué qu’il avait commis le crime.
1. La définition la plus simple et la plus complète du mensonge est enunciatio falsi. Cette énonciation n’a pas besoin d’être verbale. Un signe ou un geste peut être aussi significatif qu’un mot. Si, pour reprendre l’exemple de Paley, on demande à un homme laquelle des deux routes est la bonne pour se rendre à un endroit donné, et qu’il indique intentionnellement la mauvaise, il est aussi coupable de mensonge que s’il avait donné les mauvaises directions en paroles. C’est vrai ; Néanmoins, il y a un pouvoir propre aux mots. Une pensée, un sentiment ou une conviction sont non seulement plus clairement révélés dans la conscience lorsqu’ils sont revêtus de mots, mais ils sont ainsi renforcés. C’est ce que tout homme ressent lorsqu’il dit : « Je crois » ou : « Je sais que mon Rédempteur est vivant. »
2. La définition ci-dessus du mensonge, bien qu’elle repose sur une haute autorité, est trop complète. Ce n’est pas toute ennonciatio falsi qui est un mensonge. Cette énonciation peut être faite par ignorance ou par erreur, et donc être parfaitement innocente. Cela peut même être délibéré et intentionnel. C’est ce que nous voyons dans le cas des fables et des paraboles, et dans les œuvres de fiction. Personne ne considère l’Iliade ou le Paradis perdu comme un répertoire de mensonges. Il n’est pas nécessaire de supposer que les paraboles de notre Seigneur sont de véritables histoires. Ils n’ont pas été conçus pour donner un récit d’événements réels. L’intention de tromper est donc un élément de l’idée de mensonge. Mais même cela n’est pas toujours coupable. Quand Pharaon ordonna aux sages-femmes hébraïques de tuer les enfants mâles de leurs compatriotes, elles lui désobéirent. Et lorsqu’on leur demanda compte de leur désobéissance, ils dirent : « Les femmes hébraïques ne sont pas comme les femmes égyptiennes ; car elles sont vives, et elles sont mises au monde avant que les sages-femmes n’entrent auprès d’elles. C’est pourquoi Dieu a bien agi envers les sages-femmes, et le peuple s’est multiplié, et est devenu très puissant. (Ex. i. 19, 20.) Dans 1 Samuel xvi. 1, 2, nous lisons que Dieu dit à Samuel : « Je t’enverrai vers Isaï, de Bethléem, car je m’ai donné un roi au milieu de ses fils. Et Samuel dit : Comment puis-je y aller ? si Saül l’entend, il me tuera. Et l’Eternel dit : Prends une génisse avec toi, et dis : Je suis venue sacrifier à l’Eternel. » Ici, dit-on, il s’agit d’un cas de tromperie intentionnelle réellement commandée. Saül devait être trompé sur l’objet du voyage de Samuel à Bethléem. Plus marquée encore est la conduite d’Élisée telle qu’elle est rapportée dans 2 Rois VI. 14-20. Le roi de Syrie envoya des soldats pour s’emparer du prophète à Dothan. Et quand ils furent descendus vers lui, Élisée pria l’Éternel, et dit : Frappe ce peuple, je te prie d’être aveugle. Et il les frappa d’aveuglement, selon la parole d’Élisée. Et Élisée leur dit : Ce n’est pas là le chemin, et ce n’est pas là la ville : suivez-moi, et je vous conduirai à l’homme que vous cherchez. Mais il les conduisit à Samarie. Et il arriva, lorsqu’ils furent arrivés en Samarie, qu’Élisée dit : Eternel, ouvre les yeux de ces hommes, afin qu’ils voient. L’Éternel leur ouvrit les yeux, et ils virent ; et voici, ils étaient au milieu de la Samarie ; c’est-à-dire entre les mains de leurs ennemis. Le prophète, cependant, ne permit pas qu’on leur fasse du mal ; mais il ordonna qu’on les nourrisse et qu’on les rende à leur maître. Les exemples de ce genre de tromperie sont nombreux dans l’Ancien Testament. Certains d’entre eux ne sont que des faits enregistrés, sans que rien n’indique comment ils étaient considérés aux yeux de Dieu ; mais d’autres, comme dans les cas cités ci-dessus, ont reçu, soit directement, soit implicitement, la sanction divine. C’est de notre bienheureux Seigneur lui-même qu’il est dit dans Luc, XXIV. 28 : « Il fit comme si (προσΐποιύτο, il en faisait un spectacle) il serait allé plus loin. » Il agit de manière à faire comprendre aux deux disciples qu’il avait l’intention de continuer son voyage. (Comp. Marc vi. 48.) De nombreux les théologiens n’admettent pas que le fait rapporté dans Luc xxiv. 28, impliquait une tromperie intentionnelle ; Parce que la « simulatio non fuerit in verbis veritati contradicentibus, sed in gestibus veritati consentientibus. Christus .... Agebat, ut qui iturus esset longius, et révéra iturus fuerat, nisi rogatus fuisset a discipulis, alia fortasse ratione se iis manifesturus..... Alii dieunt, simulationem fuisse tentatoriam, æque ac illam, quæ in Abrahami historia a scriptore sacro commemoratin Gen. xxii. 2. In eandem sentential !! descendunt Beausobre et L’Enfant, qui in notis gallicis ad Luc. xxiv. 28, ita scribunt : C’est un feinte innocente et pleine d’amour, par laquelle Jésus-Christ veut éprouver la foi de ses disciples. Ainsi en usent les médicaments à l’égard des malades, et les pères à l’égard de leurs enfans. » 1
1 Gerhard, Loci Theolvgici, xiii. 177 ; édit. Tübingen, 17GG, t. V, p. 3 4G, note de Cotta.
C’est le sentiment général parmi les moralistes que les stratagèmes de la guerre sont permis ; qu’il est permis non seulement de cacher à un ennemi les mouvements qu’il a l’intention de faire, mais aussi de l’induire en erreur sur vos intentions. Une grande partie de l’habileté d’un commandant militaire se manifeste dans la détection des intentions de son adversaire. et en dissimulant les siens. Peu d’hommes seraient assez scrupuleux pour refuser de garder une lumière dans une chambre, quand un vol a été appréhendé, dans le but de donner l’impression que les membres de la famille étaient sur le qui-vive.
Pour ces motifs, il est généralement admis qu’en matière pénale Il doit y avoir non seulement l’énonciation ou la signification de ce qui est faux, et l’intention de tromper, mais aussi la violation d’une obligation. S’il peut y avoir une combinaison de Dans des circonstances où un homme n’est pas tenu de dire la vérité, ceux à qui la déclaration ou la signification est faite n’ont pas le droit d’attendre de lui qu’il le fasse. Un général n’est pas obligé de révéler à son adversaire les mouvements qu’il se propose ; et son adversaire n’a pas le droit de supposer que son intention apparente est son but réel.
Élisée n’était pas obligé d’aider les Syriens à s’emparer de sa personne et à lui ôter la vie ; et ils n’avaient pas le droit de supposer qu’il les aiderait ainsi. Et, par conséquent, il n’a pas fait de mal en les induisant en erreur. Il y aura toujours des cas où la règle du devoir sera mise en doute. On dit souvent que la règle énoncée ci-dessus s’applique lorsqu’un voleur exige votre sac à main. On dit qu’il est juste de nier que vous avez quelque chose de valeur en vous. Vous n’êtes pas tenu de l’aider à commettre un crime ; et il n’a pas le droit de supposer que vous faciliterez l’accomplissement de son but. Ce n’est pas si clair. L’obligation de dire la vérité est très solennelle ; Et quand il reste à un homme le choix de mentir ou de perdre son argent, il vaut mieux qu’il laisse aller son argent. D’un autre côté, si une mère voit un meurtrier à la poursuite de son enfant, elle a parfaitement le droit de l’induire en erreur par tous les moyens en son pouvoir ; parce que l’obligation générale de dire la vérité se confond ou se perd, pour le moment, dans l’obligation supérieure. Ce principe n’est pas invalidé par son abus possible ou réel. On en a beaucoup abusé. Les jésuites enseignaient que l’obligation de promouvoir le bien de l’Église absorbait ou remplaçait toutes les autres obligations. Et, par conséquent, dans leur système, non seulement le mensonge et la réserve mentale, mais le parjure, le vol et l’assassinat devenaient licites s’ils étaient commis dans le dessein de promouvoir les intérêts de l’Église. Nonobstant ce risque d’abus, le principe selon lequel une obligation supérieure libère d’une obligation inférieure est ferme. C’est un précepte même de la conscience naturelle. Il est évidemment juste d’infliger de la douleur pour sauver des vies. Il est juste de soumettre les voyageurs à la quarantaine, même si cela peut gravement interférer avec leurs souhaits ou leurs intérêts, pour sauver une ville de la peste. Le principe lui-même est clairement inculqué par notre Seigneur lorsqu’il a dit : « J’aurai miséricorde et non pas de sacrifice », et lorsqu’il a enseigné qu’il était juste de violer le sabbat afin de sauver la vie d’un bœuf, ou même d’empêcher sa souffrance. Les jésuites se sont trompés en supposant que la promotion des intérêts de l’Église (dans leur sens particulier du mot Église) était un devoir plus élevé que l’obéissance à la loi morale. Ils se sont trompés aussi en supposant que les intérêts de l’Église pouvaient être favorisés par la perpétration d’un crime ; et leur principe était en violation directe de la règle de l’Écriture selon laquelle il est mal de faire le mal pour que le bien puisse arriver.
La question qui se pose maintenant n’est pas de savoir s’il est jamais juste de faire le mal, ce qui est un solécisme, la question n’est pas non plus de savoir s’il est jamais juste de mentir, mais plutôt ce qui constitue un mensonge. Il ne s’agit pas simplement d’une « enunciatio falsi », ni, comme l’appellent communément les moralistes de l’Église de Rome, d’une « locutio contra mentem loqucntis » ; 1 Mais il doit y avoir une intention de tromper quand on attend de nous et que nous sommes tenus de dire la vérité. C’est-à-dire qu’il y a des circonstances dans lesquelles un homme n’est pas tenu de dire la vérité, et donc il y a des cas dans lesquels dire ou laisser entendre ce qui n’est pas vrai n’est pas un mensonge. Les moralistes romains qui viennent de faire allusion répondent à la question : Est-il jamais permis de mentir ? dans la négative. Dens, par exemple, va jusqu’à dire : « Non licet mentiri (c’est-à-dire dire ce qui n’est pas vrai, comme il définit le mot « mendacium ») ad avertendum mortem aut interitum Reipublicæ, vel quæcunque alia mala : in hujusmodi perplexitatibus debent homines confugere ad auxiliura Dei, angeli custodis », etc.2 C’est une règle saine, pourvu que l’obligation de dire la vérité existe. Il vaut de loin mieux qu’un homme meure ou permette qu’un meurtre soit commis, que de pécher contre Dieu. Rien ne pouvait tenter les martyrs chrétiens de sauver leur propre vie ou celle de leurs frères en reniant le Christ, ou en professant croire à de faux dieux ; Dans ces cas, l’obligation de dire la vérité était pleinement en vigueur. Mais dans le cas d’un général commandant en temps de guerre, l’obligation n’existe pas d’informer son adversaire de ses véritables intentions. Dans son cas, la tromperie intentionnelle n’est pas moralement un mensonge. Bien que les théologiens romanistes établissent la règle qu’un mendacium n’est jamais licite, et bien qu’ils définissent le mendacium comme nous l’avons dit plus haut, ils enseignent cependant que si l’on demande à un confesseur s’il connaît un fait qui lui est confié dans le confessionnal, il est libre de répondre : Non, ce qui signifie qu’il ne le connaît pas scientia communicabili. C’est-à-dire qu’il est autorisé, selon leur propre définition du mot, à dire un mensonge pur et simple. Il a peut-être raison de répondre à la question de savoir s’il connaît un fait qui lui a été communiqué en sa qualité de confesseur, en disant : « Je ne suis pas libre de répondre ; » mais il est difficile de voir comment il pourrait être justifié par un mensonge direct.3
1 Cette définition est donnée par Dens, Theologia, De Aiendacio, Ν'. 242, édit. Dublin, 1832, vol. iv. à la p. 306.
2 Idem. N. 243, p. 308.
3 « Confessarius interrogatus a tyranno an Titius confessas sit hoinicidtuin, respondere potest et debet : ' nescio ; ' quia confessarius id nescit scientia coininnnicabili. Imo, etiamsi instaret tyrannus, et diceret, * An hoc nescis scientia sacramental ! ? ' Respondere adliuc posset : 'nescio.' Ratio est, quin tyrannus bene scit se de hoc jus interrogandi non habere, nec confessarius nt homo suit se scire, sed uti vicarius Dei et scientia incommunicabili. » John Peter Gury, Compendium Theologius AToralis, nouvelle édition. Tornaci, vol. I. p. 201.
Afin d’inclure le troisième élément entrant dans la nature du mensonge criminel, Paley définit un mensonge comme une violation d’une promesse. Toute violation d’une promesse n’est pas un mensonge, car elle ne peut pas inclure les autres éléments d’un mensonge ; Mais tout mensonge est une violation d’une promesse. Il découle de la nature même de la société humaine, et de la relation dans laquelle les hommes se trouvent nécessairement les uns avec les autres, que tout homme est censé dire la vérité, et qu’il est tenu par la promesse tacite, mais obligatoire, de ne pas tromper son prochain par des paroles ou des actes. Si, en tout état de cause, il s’est rendu coupable de tromperie intentionnelle, il doit être en mesure de démontrer que, dans ce cas particulier, l’obligation n’existe pas ; c’est-à-dire que la partie trompée n’a pas le droit de s’attendre à la vérité, et qu’aucune promesse virtuelle n’est violée en la trompant. C’est certainement le cas dans les manœuvres militaires, et dans d’autres cas rares.
Cependant, cela n’est pas toujours admis. Augustin, par exemple, fait de toute tromperie intentionnelle, quel qu’en soit l’objet ou les circonstances, un péché. « Hie mentitur, dit-il, qui aliud habet in animo, et aliud verbis vel quibuslibet significationibus enuntiat. » 1 Il dit encore :2 « Nemo autem dubitat mentiri eum qui volens falsuin enuntiat causa fallendi : quapropter enuntiationem falsam cum voluntate ad fallendum prolatam, manifestuni est esse mendacium. » Il passe en revue les cas rapportés dans la Bible qui semblent enseigner la doctrine opposée. Ce serait le terrain le plus simple à prendre pour le moraliste. Mais, comme nous l’avons montré plus haut, et comme on l’admet généralement, il y a des cas de tromperie intentionnelle qui ne sont pas criminels.
1 De Mendacio, 3 ; Œuvres, édit. Bénédictines, Paris, 1837, t. VI, p. 712, a.
2 Idem. 5, (iv.), p. 715, a.
Augustin divise le mensonge en pas moins de huit classes. Mais ceux-ci diffèrent pour la plupart simplement quant à leur objet ou à leurs effets. La division telle qu’elle a été donnée par Thomas d’Aquin et très généralement adoptée depuis,3 est en trois classes : les pernicieux, les bienveillants et les joviaux. Sous la première perle viennent tous les mensonges qui sont provoqués par un motif mauvais et qui sont destinés à promouvoir une fin mauvaise. Cela inclut non seulement l’énonciation directe de ce qui est faux, mais aussi toutes les arguties ou prévarications.
3 Thomas d’Aquin , Summa, n. ii. 110, 2 ; édit. Cologne, 1640, p. 203, a, de la troisième série. « Potest dividi mendacium, in quantum habet rationem culpæ, secundum ea quæ aggravant, vel diminuant culpam mendacii ex parte finis intent !. Aggravât autem culpam mendacii, si aliqnis per mendacium intendat alterius nocumentuin : quod vocatur mendacium pernicio-sum. Diminuitur autem culpa mendacii, si ordinetur ad aliquod bonum, vel delectabile, et sic est mendacium jocosum : vel utile, et sic est mendacium officiosum, quo intenditur juvamentum alterius, vel remotio nocumenti. Et secundum hoc dividitur mendacium in tria prædicta. » Le premier, selon les romanistes, est un péché mortel, les deux derniers sont considérés comme véniels.
Cette classe comprend également tous les cas de réserve mentale. Il faut dire pour rendre justice aux docteurs de théologie morale de l’Église romaine que, bien que les jésuites se soient rendus si odieux en affirmant la convenance de la réserve mentale, ils la condamnent au moins en termes généraux. « Restrictio mentalis, dit Gury, est actus mentis verba alicujus propositionis ad alium sensum quam naturalem et obvium detorquentis vel restringcntis. » Il dit que c’est illégal, parce que c’est de la simplicité ! Il est vrai que ces théologiens modifient sérieusement cette règle. Ce n’est que par réserve « proprie mentalis », c’est-à-dire lorsque le vrai sens de l’orateur ne peut être détecté, que cette condamnation est prononcée. S’il est possible, d’après les circonstances ou le mode d’expression, de savoir ce qu’il veut dire, la règle ne s’applique pas toujours. Il y a des cas où il est permis à un homme de se tromper lui-même. C’est sous ce chef que nous sommes saisis dans l’affaire susmentionnée. On dit qu’un confesseur peut dire à juste titre qu’il ne sait pas une chose, quand il veut dire qu’il ne la connaît pas en tant qu’homme, ou avec une connaissance qui est communicable. C’est pourquoi on dit que si un homme est interrogé par quelqu’un qui n’a pas le droit de l’interroger, s’il a commis un crime, il peut dire : Non ; c’est-à-dire rien qu’il fût tenu d’avouer. De même, il est enseigné que les personnes publiques, les ambassadeurs, les magistrats, les avocats, etc., peuvent user de la réserve mentale dans son sens le plus large. De la même manière, un serviteur peut dire que son maître n’est pas à la maison, qu’il sait être dans la maison, parce qu’un tel refus signifie si souvent que la personne interrogée ne veut pas être vue. 1 Cela ouvre une porte très vide dont non seulement les jésuites, mais les hommes qui se disent protestants et chrétiens se prévalent librement. Pour un esprit non sophistiqué, tous les cas spécifiés ci-dessus sont des cas de mensonge absolu.
1 Gun׳, ut supra, t. I, p. 200 , 201.
La mesure dans laquelle les jésuites ont appliqué le principe de la réserve mentale est une question de notoriété. Les trois règles par lesquelles ils pervertirent tout le système des mœurs, et qui menaçaient de renverser les fondements mêmes de la société, et qui conduisirent à un moment donné à la suppression de l’ordre, étaient :
1. La doctrine selon laquelle le caractère d’un acte dépend uniquement de l’intention. Si l’intention est bonne, l’acte est bon ; qu’il s’agisse de mensonge, de parjure, de meurtre ou de tout autre crime imaginable. Pascal cite le moraliste jésuite Escobar comme posant le principe général « que les promesses ne sont pas contraignantes à moins qu’il n’y ait eu l’intention de les tenir, au moment où elles ont été faites ». 1 Sur le même principe, que l’intention détermine le caractère de l’acte, le meurtre d’Henri III. en 1589 ; du prince d’Orange en 1584 ; d’Henri IV. de France en 1610 ; et surtout les massacres de la fête de la Saint-Barthélemy, étaient tous justifiés. Ce principe n’est pas l’apanage des jésuites. Quand, en 1819, le jeune Sand assassina le poète Kotzebue pour des motifs politiques, non seulement il justifia l’acte jusqu’au bout, mais peut-être le sentiment général parmi ses jeunes compatriotes était-il celui de l’approbation. Même De Wette, l’éminent théologien et commentateur, dans une lettre de consolation à la mère de Sand, a parlé de l’assassinat comme « un signe favorable des temps ». 2 On considérait à peu près comme le meurtre de Marat par Charlotte Corday l’est par le public pour cette argile. Lorsque la doctrine en vient à être formalisée comme principe moral selon laquelle l’intention détermine le caractère de l’acte, de sorte que le meurtre commis pour le bien de l’Église ou de l’État est louable, alors la loi de Dieu est réduite à néant et les liens de la société sont relâchés.
1 Blaise Pascal, Lettres cérites à un provincial, édit. Paris, 1829 , p. 180 ; Escobar, dans. Ex. iii. n. 48.
2 De Wette n’approuvait pas l’assassinat de Kotzebue d’un point de vue moral de Hew. Son langage était : « So wie die That geschehen 1st, mit diesem Glauben, mit dieser Zuver-sicht, 1st sie ein schemes Zeichen der Zeit. — Die That 1st — allgemein betrachtet — unsitt-lich und der sittlichen Gcsetzgebung zuwiderlaufcnd. Das Bijse soil nicht durch das Bose iiberwunden werden, sondern allein durch das Gute. Durch Unrecht, List und Gewalt kann kein Recht gestiftet werden, nnd der guteZweck heiligt nicht das ungereclite Mittel. » Cité dans les Conversations-Lexicon, 7e édit. Leipzig, 1827, art. Wette (de). La lettre, bien que ainsi gardée, entraîna la perte de son poste de professeur à Berlin et sa quasi-interdiction. de la ville.
2. La doctrine des probabilités. S’il était probable qu’un acte était juste, il n’y avait pas de péché à le commettre, bien que, dans la conviction de l’agent, l’acte fût mauvais ; et un acte était probablement juste, s’il y avait parmi les moralistes une divergence d’opinion à ce sujet.
3. La doctrine de la réserve mentale mentionnée ci-dessus. On enseignait qu’un homme pouvait jurer innocemment qu’il n’avait pas fait telle chose, pourvu qu’il se dise à lui-même, et non pas aux autres : « Je veux dire que je ne l’ai pas fait il y a dix ans. » Toutes ces différentes sortes de mensonges, bien qu’elles soient rapportées à des chefs différents par les docteurs jésuites, appartiennent proprement à la classe des mensonges pernicieux, tels que la loi de Dieu les condamne absolument.
La seconde classe, appelée « mendacia officiosa », comprend tous les mensonges proférés pour un bon objet. Tels que ceux que leurs serviteurs racontent aux malades, pour les consoler ou les encourager ; celles que racontent les détectives pour la découverte de crimes, ou celles qui sont conçus pour prévenir le mal ou assurer le bien pour nous-mêmes ou pour les autres. Tous ces mensonges sont déclarés par les romanistes comme des péchés véniels, de simples peccadilles.1 L’exemple donné par Dens, à l’endroit mentionné, de cette classe de péchés, est le cas d’un homme qui a de l’argent, niant qu’il en ait pour éviter d’être volé. C’est très différent de la doctrine d’Augustin, qui enseigne qu’il est illicite de mentir pour sauver la vie, ou même pour sauver une âme. 2 La position d’Augustin est conforme à ce qui a été dit plus haut, qu’il y a des occasions où une obligation supérieure absout d’une obligation inférieure, comme l’enseigne Notre-Seigneur lui-même. Mais ce principe ne s’applique au cas du mensonge que lorsque l’énonciation de ce qui est faux cesse d’être un mensonge au sens criminel du mot. On a vu que trois éléments entrent en ligne de compte la nature du mensonge proprement dit, (1.) L’énonciation de ce qui est faux. (2.) L’intention de tromper. 3° La violation d’une promesse ; c’est-à-dire la violation de l’obligation de dire la vérité, l’obligation qui incombe à tout homme de garder la foi avec son prochain. Dans les manœuvres militaires, comme nous l’avons dit plus haut, on ne s’attend pas, et on n’a pas le droit d’attendre, qu’un général révèle ses véritables intentions à son adversaire, et par conséquent dans ce cas la tromperie n’est pas un mensonge, parce qu’il n’y a pas violation d’une obligation. Mais lorsqu’un confesseur était appelé par un magistrat païen à dire s’il était chrétien, il était attendu et tenu de dire la vérité, bien qu’il sût que la conséquence serait une mort cruelle. Ainsi, lorsqu’on demande à un homme s’il a de l’argent sur lui, on s’attend à ce qu’il dise la vérité, et il n’a pas le droit de mentir, pas plus qu’un chrétien n’a le droit de mentir pour sauver sa vie. La doctrine selon laquelle la « mendacia officiosa » ne sont que des péchés véniels, repose sur le principe que l’intention détermine le caractère de l’acte. La règle biblique simple est que celui qui fait « le mal pour que le bien arrive », sa « damnation est juste ».
1 Dens, ut supra, t. IV. Ν'. 242, p. 307. Mcndacium officiosum dicitur, quod com-mittitur solum causa utilitatis propriæ vel alienae : v. g. quis dicit, se non habere pccunias, ne iis spolictur a militibus. Et sur la même page, il dit : « Officiosum autem et joeo-sum sunt ex genere suo peccatum veniale. » Il en est de même de Gury, t. I, p. 100. ' Mendacium officiosum peccatum vénale est, per sc, quia in co gravis dcordinatio 11011 apprehenditur. »
2 De Mendacio, 9, (vi.) ; IKorÀ-s, ut supra, t. VI, p. 719 if.
C’est un fait d’expérience que, en ce qui concerne au moins notre vie intérieure, l’attention exorbitante à la façon de faire une chose détruit la capacité de la faire. Un adepte de la logique peut être un très mauvais raisonneur ; et un homme qui passe sa vie à étudier les règles de l’élocution peut être un orateur très indifférent. Ainsi, un homme versé dans toutes les subtilités de la casuistique est susceptible de perdre l’appréhension claire et simple du bien et du mal. Le professeur Gury a pour devise de son livre de théologie morale, les paroles de saint Grégoire : « Ars artium regimen animarum ». C’est très vrai, mais c’est une mauvaise façon de conduire un homme à un point donné, de le mettre dans un labyrinthe. Ces livres de casuistique ne servent qu’à mystifier les sujets les plus simples. Se livrer à de telles subtilités ne peut guère manquer de conduire à l’adoption de faux principes. Il est bien évident que l’homme qui était à la fois prince et évêque, ne pouvait pas être ivre comme prince et sobre comme évêque ; cependant, comme nous l’avons vu, ces livres enseignent qu’un prêtre peut mentir en tant qu’homme, et cependant dire la vérité en tant que vicaire de Dieu. Les directions claires de la Parole de Dieu et une conscience éclairée par son Esprit sont des guides plus sûrs en matière de devoir que tous les livres de théologie morale que les jésuites aient jamais écrits. Cela ne veut pas dire que la morale n’est pas un sujet d’étude approprié, ou qu’il n’y a pas d’appel dans ce domaine à l’exercice de la discrimination et de la distinction. L’objection n’est pas à l’étude de la morale, mais à la dévotion démesurée à ce département, et aux subtilités déroutantes et pervertissantes de la casuistique.
La fraude pieuse a été réduite par les romanistes à une science et à un art. On l’appelait économie, de οικονομία, « dispensatio rei familiaris », l’usage discrétionnaire des choses dans une famille en fonction des circonstances. La théorie est fondée sur le principe que si l’intention est licite, l’acte est licite. Par conséquent, tout acte visant à promouvoir une fin « pieuse » est justifiable « in foro conscientise ». Ce principe a été introduit très tôt dans l’Église chrétienne. Mosheim lui attribue une origine païenne. Il dit que les platoniciens et les pythagoriciens enseignaient qu’il était louable de mentir pour promouvoir une bonne fin. Le mal, cependant, avait probablement une origine indépendante partout où il apparaissait. Il est assez plausible pour s’élever spontanément dans n’importe quel esprit qui n’est pas sous le contrôle de la Parole et de l’Esprit de Dieu.
1 Histoire ecclésiastique, 1. ii. 2. 3. § 15 ; éditer. New York, 1859, t. I, p. 130.
Augustin a dû lutter contre cette erreur en son temps. Il y avait certains chrétiens orthodoxes qui pensaient qu’il était juste d’affirmer faussement qu’ils étaient priscillianistes afin de gagner leur confiance et de pouvoir ainsi les convaincre d’hérésie. Se posait alors la question de savoir s’il était permis de commettre une fraude dans un but utile ; en d’autres termes, il s’agit de déterminer si l’intention a déterminé le caractère de l’acte. Augustin a pris la négative de la question, et a soutenu qu’un mensonge était toujours un mensonge, et toujours méchant ; qu’il n’était pas permis de dire un mensonge dans quelque but que ce soit. « Interest quidem plurimum, dit-il, qua causa, quo fine, qua intentione quid fiat : 6ed ea quæ constat esse peccata, nullo bonæ causæ obtentu, nullo quasi bono fine, nulla velut bona intentione facienda sunt..... Cum veto jam opera ipsa peccata sunt ; sicut furta, stupra, blasphemiæ, vel cætera talia ; quis est qui dicat causis bonis esse facienda, ut vel peccata non sint, vel quod est absurdius, justa peccata sint ? Quis est qui dicat : ut habeamus quod demus pauperibus, faciamus furta divitibus ; aut, testimonia falsa vendamus, maxime si non inde innocentes læduntur, sed nocentes potius damnaturis judicibus eruuntur ? » 1 Il condamne spécialement toutes les « fraudes pieuses », c’est-à-dire les fraudes commises dans le prétendu service de la religion.
1 Contra Mendacium ad Consentium, p. 18 ; IPbrfcs, édit. Bénédictins, Paris, 1837, t. VI. p. 767, d, 768, a, b.
Malgré l’autorité d’Augustin, la doctrine selon laquelle il était juste d’utiliser la fraude pour promouvoir les intérêts de l’Église a été ouvertement avouée par certains de ses contemporains et beaucoup de ses successeurs immédiats, et pendant le Moyen Âge a été la règle pratique de l’Église romaine, comme elle l’est aujourd’hui. Parmi les premiers défenseurs de ce principe relâché de la morale, on trouve le nom même de Jérôme. Dans son épître à Pammachius, il dit qu’en instruisant, un homme est tenu d’être honnête, mais qu’en traitant avec un adversaire, il peut faire ce qu’il veut ; C’est juste " Nunc hæc nunc ilia proponere. Argumentari ut libet, aliud loqui, aliud agere, panem, ut dicitur, ostendere, lapidem tenere. » 2 Le principe selon lequel l’intention sanctifie l’acte est clairement affirmé par Jean Cassien, disciple de Chrysostome. Le mensonge, dit-il, est comme le poison : pris avec modération et dans la maladie, il peut être salutaire ; mais s’il est pris intempestivement, il est fatal. « Non enim Deus verborum tantum actuumque Nostrorum discussor et judex, sed etiam propositi ac destinationis inspector est..... Hie tamen intimam cordis inspiciens pietatern, non verborum sonum, sed votum dijudicat voluntatis, quia finis, operis et affectus considerandus est perpetrantis. » 3
2 Epistola, xlviii. [30 seu 50] 13, seu Liber Apologeticus ad Pammachium ; Œuvres, édit. Mlgne, Paris, 1845, t. I, p. 502.
3 Collectâmes, xvn. 8, cité par Gieseler , Histoire ecclésiastique, p. 11. i. 6. § 103, traduit par Samuel Davidson, LL. D. ; édit. Édimbourg, 1848, vol. II. à la p. 56.
Le principe ayant été admis une fois qu’il est juste de tromper pour atteindre un bon but, il n’y avait pas de limite fixée dans la pratique à son application. Par conséquent, —
1. Dès les temps les plus reculés, les œuvres authentiques des Pères apostoliques ont été corrompues par des interpolations, et des ouvrages ont été publiés portant les noms d’auteurs morts longtemps avant que les œuvres ne fussent écrites. Outre les livres apocryphes que l’on admet aujourd’hui comme faux, les Lettres d’Ignace, dont une partie est généralement reçue comme authentique, ont été tellement corrompues qu’elles ont été la source d’une influence néfaste étendue et permanente. De ces lettres, il y a, comme on le sait, trois recensions, la plus grande contenant quinze épîtres, la plus courte, et la syrienne, fondée sur une traduction syriaque. La plus grande collection est abandonnée par les érudits comme fausse ; Quant aux autres, beaucoup de ceux qui admettent leur authenticité, insistent sur le fait qu’ils sont plus ou moins corrompus par l’interpolation.1
1 Un bref exposé de cette question très débattue est donné par Uhlhorn dans l’Encyclopédie réalde de Herzog, art. — Ignace.
Néandre dit de ces prétendues lettres d’Ignace : « Même la révision la plus brève, qui est celle qui a le plus droit à la confiance, a été très interpolée..... Un but hiérarchique ne doit pas être erroné. Histoire générale de la religion et de l’Église chrétiennes, par le Dr Augustus Neander. Traduit par Joseph Torrey, professeur à l’Université du Vermont, 2e édition. Boston, 1849, vol. I, p. 661.
Les Constitutions dites apostoliques sont un ensemble de règles ou de canons dérivés en partie du Nouveau Testament, en partie des décisions des premiers conciles provinciaux et en partie de la tradition ; toutes, cependant, imposées à l’Église comme relevant de l’autorité apostolique. Au fur et à mesure que le nombre de conseils augmentait, il était nécessaire de recouvrer leurs décisions. Ces recueils comprenaient des « décrétales » émises par l’évêque de Rome ; les deux classes étant regroupées sous le nom de « canons », ces collections furent peu à peu regroupées dans le droit canonique. C’était une méthode naturelle et facile d’imposer à l’Église d’insérer de temps en temps de fausses décrétales dans les recueils, et de fonder sur ces faux des prétentions exorbitantes à la dignité et au pouvoir sacerdotaux. La plus célèbre de ces impositions est ce qu’on appelle les Décrétales d’Isidore, évêque de Séville, l’écrivain le plus distingué du VIIe siècle. Il mourut en 636. La collection qui porte son nom ne fait son apparition qu’au IXe siècle. Il contient beaucoup de décrétales et de canons authentiques, mais aussi beaucoup qui sont des faux manifestes. L’auteur de la collection et des faux documents qu’elle contient est inconnu. Sa date est fixée par Gieseler entre 829 et 845. Ces décrétales « furent bientôt distribuées, dit cet historien, dans divers recueils, invoquées sans soupçon dans les transactions publiques, et utilisées par les papes, depuis Nicolas Ier, immédiatement après qu’il en eut pris connaissance (864), sans qu’aucune opposition ne fût faite à leur authenticité, et continuèrent dans une réputation intacte, jusqu’à ce que la Réforme conduisît à la découverte de la supercherie. C’est sur ces fausses décrétales que se fondaient les prétentions des papes à l’empire universel dans l’Église ; tandis que la prétendue « donatio Constantini M. », fiction d’un temps antérieur, mais bientôt adoptée, était le premier pas à partir duquel la papauté s’efforçait de s’élever même au-dessus de l’État.» 1 L’authenticité de ces documents fut d’abord sérieusement attaquée par les centuriateurs de Magdebourg, auxquels répondit le jésuite Turrianus. La question a été tranchée par Dav. Blondelli Pseudoisidorus et Turrianus vapulantes, Genev. 1628. Les ultramontains, bien qu’ils admettent la supercherie, nient la révolution des principes ecclésiastiques qu’elle a causée.» 2 Ces décrétales attribuent au pape une suprématie absolue sur l’Église, sur les patriarches, les évêques et les prêtres. Pour lui, il y a appel dans toutes les questions de doctrine, et ses décisions sont définitives. Le don de Constantin conférait au pontife plus que la dignité et le pouvoir impériaux. Il exprimait la souveraineté de la ville de Rome, de l’Italie et des provinces occidentales. On y lit entre autres : « Et sicut nostrum terrenam imperialem potential!, sic ejus (Petri) sacrosanctam Romanam Ecclesiam decrevimus veneranter honorari, et amplius quam Nostrum imperium terrenumque thronum, sedem sacratissimam b. Petri gloriose exaltari : tribuentes ci potestatem et gloriæ dignitatem, atqne vigorem et honorificentiam imperialem. Unde ut pontificalis apex non vilescat, sed magis quam imperii dignitas, gloria et potentia decoretur, ecce tan ! palatium nostrum, ut prædictum est, quam Romanam urbem, et omnes Italiæ, sen occidentalium regionum provincias, loca et 'civitates præfato beatissimo Pontifie ! nostro Sylvestro, universel ! papæ, contradimus atque relinquimns : et ab eo et a successoribus ejus per liane divalem nostram, et pragmaticum constitutum decernimus disponenda, atque juri sanctæ Romans Ecclesiæ eoncedimus permansura.» 3
1 Gieseler, Histoire ecclésiastique, Per. in. ii. 1. 1. § 20 ; éditer. Édimbourg, 1848, vol. II. p. 331 à 336.
2 Idem. p. 335, notes de bas de page.
3 Cité par Gieseler, ut supra, t. II, p. 337, extrait de la Décréta Gratiani.
La seconde grande classe de fraudes pieuses par lesquelles l’Église de Rome s’est efforcée pendant des siècles de soutenir ses erreurs et de confirmer sa puissance, est celle des prétendus miracles. À ce sujet, on peut remarquer :
1. Qu’il n’y a rien dans le Nouveau Testament qui soit incompatible avec l’apparition de miracles dans l’âge post-apostolique de l’Église. Les apôtres ont en effet été choisis pour être les témoins du Christ, pour rendre témoignage aux faits de son histoire et aux doctrines qu’il enseignait. Et parmi les signes d’un apôtre, ou les lettres de créance nécessaires de sa commission, il y avait le pouvoir de faire des miracles. (Rom. xv. 18, 19 ; 2 Cor. xii. 12.) Quand les Apôtres eurent achevé leur œuvre, la nécessité des miracles, dans la mesure où le grand but qu’ils étaient destinés à accomplir était inquiets, ont cessé. Ceci, cependant, n’exclut pas la possibilité qu’ils se produisent, dans des occasions appropriées, dans les âges ultérieurs. Il s’agit d’une simple question de fait qui doit être tranchée sur la base d’une preuve historique. Dans quelques rares cas, la nature de l’événement, ses conséquences et les témoignages à l’appui de celui-ci, ont contraint de nombreux protestants à admettre la probabilité, sinon la certitude de ces interventions miraculeuses. 1 Parmi les écrits controversés qu’ont suscités les grandes questions débattues au fin Concile du Vatican, il y en a deux d’un intérêt particulier qui ont déjà été traduits et diffusés dans ce pays. L’un s’intitule « Le Pape et le Concile » 2, une série d’articles écrits par des érudits catholiques allemands de renom. C’est un argument historique contre l’ultramontanisme. Entre autres choses, il démontre que les prétentions des ultramontains ont été soutenues par un système régulier de faux à toutes les époques de l’Église.3
1 Grotius, dans ses annotations sur Marc xvi, 17, dit : « Cum vero multo etiam seriora secula plena sint testimoniis ejus rei, nescio qua rationc moti quidam id donum ad prima tantum tempora restringant ; Quibus ut uberiorem fuisse miraculorum eopiam, ad jacienda tant ! ædificii fundamenta contra vim mundi, facile concedo, ita cum illis expirasse hanc Christi promissioncm cnr credamus non video. Quare si qnis nunc etiam gentibus Christi ignaris (illis enim proprie miracula inserviunt 1 Cor. xiv. 22). Christum, ita ut ipse annun-tiari voluit, annuntiet, promissionis vim duraturam arbitror. Sunt enim άμ<=ταμέ\ητα τού ©eoû δώρα (sine pœnitentia dona Dei). Sed nos cujus rei culpa est in nostra ignavia aut indifferentia id solemus in Deum rejicere. » Œuvres, édit. Londres, 1679, tome II. vol. i. p. 328, b, 18-32.
2 Le Pape et le Concile, par Janus. Traduction autorisée de l’allemand. Boston, 1870.
3 Voir en particulier chap. in. § 7, pp. 76-122.
L’autre ouvrage est de feu l’abbé Gratry,4 l’un des ecclésiastiques romains les plus distingués de France, dont la mort vient d’être annoncée. Dans ces lettres magistrales, l’écrivain établit deux points, comme il le dit vraiment, au-delà de la possibilité d’une négation rationnelle. La première, c’est que les papes se sont trompés en parlant ex cathedra, et qu’ils ne sont donc pas infaillibles ; et la seconde, que les prétentions de l’infaillibilité papale ont été soutenus par les falsifications et les fraudes les plus flagrantes et les plus persistantes. Ces deux points sont particulièrement prouvés dans le cas du pape Honorius. Pourtant, c’est triste à dire, cet homme éminent, peu de temps avant sa mort, s’est soumis au décret du concile du Vatican par lequel l’infaillibilité du pape a été érigée en article de foi. Il a dit qu’il avait « effacé » tout ce qu’il avait écrit contre cette doctrine.1
4 L’infaillibilité papale est intenable. Trois lettres de A. Gratry, prêtre de l’Oratoire et membre de l’Académie française. Hartford, 1870.
Il est parfaitement compréhensible qu’un homme qui admet l’infaillibilité des conciles généraux puisse soumettre ses convictions personnelles les plus fortes au jugement de l’Église. Mais pas moins de trois conciles œcuméniques et vingt papes avaient déclaré Honorius hérétique. Comment le concile du Vatican a-t-il pu revenir sur ces décisions ? D’ailleurs, Gratry et ses coadjuteurs gallicans et allemands niaient que le dernier concile fût œcuménique ou libre. Le père Hyacinthe écrivit à Gratry sur sa rétractation, et lui dit : « Vous parlez d’effacer ce que vous avez écrit, mais comment pouvez-vous effacer les faits que vous avez démontrés, ou les convictions que vous avez produites dans l’esprit des fidèles ? »
2. Pendant les cent premières années qui suivirent la mort des apôtres, nous n’entendons que peu ou pas parler des miracles accomplis par les premiers chrétiens. Sur ce point, l’évêque Douglass dit : « Si nous exceptons les témoignages de Papias et d’Irénée, qui parlent de ressusciter les morts, .... Je ne trouve pas d’exemples de miracles mentionnés par les Pères avant le IVe siècle, comme ceux qui ont été accomplis par les chrétiens en leur temps, mais les guérisons de maladies, particulièrement les guérisons de démoniaques, en les exorcisant ; ce dernier, en effet, semble être leur miracle favori, et le seul que je trouve (après avoir relu leurs écrits avec soin et en vue de ce point) : ils ont défié leurs adversaires de venir les voir jouer. 2 Les Pères du IVe siècle parlent volontiers de l’âge des miracles comme d’un âge passé ; que de telles interpositions, n’étant plus nécessaires, n’étaient plus à prévoir. Ainsi Chrysostome dit : « Ne itaque ex eo, quod nunc siffna non fiunt, argumentum ducas tunc etiam non fuisse. Etenim tunc utiliter fiebant, et nunc utiliter non fiunt. » 3 Et saint Augustin dit : « Cur, inquiunt, nunc ilia miracula, quæ prædicatis facta esse, non fiunt ? Possem quidem dicere, necessaria fuisse priusquam crederet mundus, ad hoc ut crederet mundus. » 4
2 Critère, ou, le. Règles par lesquelles les Vrais Miracles rapportés dans le Néto Testament sont distingués des Faux Miracles des Payans et des Papistes. 4e édit. Oxford. 1832־, pp. 228-232־. L’auteur était doyen de Windsor, évêque de Carlisle, puis de Salisbury.
3 À Epistolam 1. ad Corinthios, JJomilia, vi. 2 ; B’oris, édit. Montfaucon, Paris, 18-37, t. X. p. 53, a.
4 De Civitate Del, xxn. viii. 1 ; Œuvres, édit. Bénédictines, Paris, 1838, t. VII, p. 1057, d.
Quoi que l’on puisse concilier ces déclarations avec le fait que ces pères eux-mêmes rendent compte de ce qui passait pour des miracles à leur époque, elles montrent du moins qu’à leur avis il y avait une telle différence entre les miracles de l’Écriture et les miracles ecclésiastiques qu’ils n’appartenaient pas à la même catégorie. Bien que ces miracles aient été peu fréquents dans les premiers âges de l’Église, leur nombre a rapidement augmenté jusqu’à ce qu’ils deviennent des événements quotidiens.
3. Ils admettent être classés selon des principes différents. Quant à leur nature, quelques-unes sont graves et importantes ; d’autres sont insignifiants, puérils, et même puérils, d’autres sont inconvenants, et d’autres sont irrévérencieux et même blasphématoires. Le professeur Newman, l’un des prix les plus riches remportés par les romanistes de l’Église d’Angleterre dans cette génération, est assez candide d’admettre le contraste entre l’Écriture et ce qu’il appelle les miracles ecclésiastiques. Du premier, il dit : « Les miracles de l’Écriture sont, dans leur ensemble, graves, simples et majestueux : ceux de l’histoire ecclésiastique participent souvent de ce qu’on peut appeler à juste titre un caractère romanesque, et de cette sauvagerie et de cette inégalité qui entrent dans la notion de roman. » par rapport à celles de l’Écriture. L’Écriture est pour nous un jardin d’Eden, et ses créations sont belles aussi bien que « très bonnes », mais quand nous passons de l’Apostolique aux âges suivants, c’est comme si nous quittions les vallées les plus choisies de la terre, les plus calmes et les plus des paysages harmonieux et le sol le plus cultivé, pour les déserts luxuriants de l’Afrique ou de l’Asie, le foyer naturel ou le royaume de la nature brute, non influencée par l’homme. On peut difficilement imaginer une illustration plus heureuse. Le contraste entre les Évangiles et les légendes des saints, c’est celui entre le divin et l’humain et même l’animal ; entre le Christ (avec révérence) et saint Antoine. Un autre principe d’après lequel ces miracles ecclésiastiques peuvent être classés, c’est le dessein pour lequel ils ont été opérés ou présentés. Quelques-uns sont présentés comme des preuves de la sainteté de personnes particulières, de lieux ou de choses particulières ; certains pour soutenir des doctrines particulières, telles que le purgatoire, la transsubstantiation, le culte des saints et de la Vierge Marie, etc., d’autres pour l’identification des reliques. Ce n’est pas faire injustice aux autorités de l’Église de Rome que de dire que, quelles que soient les fins bonnes que ces miracles puissent avoir dans tous les cas, ils ont été subordonnés à l’accumulation de l’argent et à l’accroissement du pouvoir. La somme d’argent tirée de la doctrine unique du purgatoire et le pouvoir supposé des clefs sur ce lieu imaginaire de torture, est au-delà de tout calcul. Et tout le tissu du pouvoir sacerdotal, le plus absolu et le plus redouté qui ait jamais été exercé sur les hommes, s’écroulerait si ce n’était la croyance du peuple, fondée principalement sur des prodiges mensongers, que les prêtres ont le pouvoir de pardonner les péchés, de sauver ou de détruire les âmes à volonté ou à discrétion. Si cette doctrine est fausse, tout le système romain est faux. Les romanistes ont donc tout en jeu sur cette question. L’évêque Jeremy Taylor, écrivant à une dame « séduite par l’Église de Rome », a dit il y a longtemps : « Tous les points de divergence entre nous et votre Église sont tels qu’ils servent évidemment les fins de la convoitise et de l’ambition, du pouvoir et de la richesse. » 1
1 Deux essais sur les miracles de l’Écriture et sur les miracles ecclésiastiques. Par John Henry Newman, ancien membre de l’Oriel College, Oxford, 2e édit. Londres, 1870, p. 116. Ces essais, il faut le préciser, ont été publiés pour la première fois avant que le Dr Newman n’entre dans l’Église de Rome. Le premier a été écrit en 1825-1826 et le second en 1842-1843. Il se réconcilia avec Rome en 1845. Dans la deuxième édition des essais réunis publiée en 1870, il les approuve à nouveau avec une légère réserve. Voici ce qu’il dit (p. viii) : « Ces vues distinctes de l’action miraculeuse, ainsi opposées, n’impliquent aucune incohérence les unes avec les autres ; mais il faut reconnaître que, dans l’essai sur les miracles de l’Écriture, l’auteur va au-delà des besoins et des prétentions de son argumentation, lorsque, pour montrer leur dignité et leur beauté particulières, il déprécie le but et la valeur des miracles de l’histoire de l’Église. Rencontrer. ce dénigrement excessif dans son premier essai, des faits qui ont leur place définie dans la dispensation divine, il souligne dans son second la ressemblance essentielle qui existe entre beaucoup de miracles de l’Écriture et ceux des temps ultérieurs ; et c’est avec la même dérive que, dans cette édition, quelques remarques en bas de page ont été ajoutées entre parenthèses. Cette nuance n’était guère nécessaire, car le quatrième chapitre du second essai contient la défense la plus ingénieuse des miracles ecclésiastiques que l’on puisse trouver. Il est généralement admis que le professeur Newman était dans l’âme un romaniste quelques années avant sa sécession de l’Église d’Angleterre. Son célèbre Tract n° 90 de la série d’Oxford en est une preuve suffisante.
2 Idem. , p. 150.
1 Première lettre à l’Église de Rome à celui qui est séduit ; Œuvres, édit. Londres, 1828, t. XI, p. 18 !).
4. Une quatrième remarque générale à ce sujet, c’est qu’il n’est pas juste de reprocher aux autorités et au peuple de l’Église romaine d’avoir cru à ces faux miracles. La foi dans l’ingérence fréquente d’influences surnaturelles dans les affaires des hommes a été universelle pendant des siècles. Même au XVIIe siècle, les protestants et les catholiques, de tous rangs, croyaient aux fantômes, aux sorcières, à la nécromancie et à la démonocratie. Cotton Mather’s « · Magnalia " est un match pour les Légendes des Saints.
5. Ce n’est pas que les romanistes croyaient à la fréquence des miracles, mais qu’ils les propageaient les rapports de miracles, sachant qu’ils sont faux ; que cela a été fait dans le but de de tromperie ; qu’il en est ainsi jusqu’à nos jours ; et que l’honneur, la vérité, l’intégrité et l’infaillibilité de l’Église sont promis à l’appui de leur occurrence réelle. La vérité du christianisme dépend de la vérité historique du récit des miracles rapportés dans le Nouveau Testament. La vérité du romanisme dépend de la vérité des miracles auxquels il fait appel. Qu’adviendrait-il du protestantisme s’il dépendait de la démonologie de Luther ou des histoires de sorcières de nos ancêtres anglais ? L’Église romaine, en assumant la responsabilité des miracles ecclésiastiques, a pris sur elle un fardeau qui écraserait les épaules d’Atlas. Ces « prodiges mensongers » sont approuvés, non seulement par l’action négative des autorités de l’Église, en permettant qu’on les croie et qu’on les cite comme preuve de ses doctrines et de sa mission divine ; non seulement par les interprètes reconnus de sa foi qui s’y réfèrent et affirment leur vérité ; mais aussi par l’action officielle solennelle des plus hauts dignitaires ecclésiastiques, y compris une longue succession de papes. Comme personne ne pouvait l’être canonisé à moins que sa sainteté ne fût soutenue par au moins quatre miracles, quand quelqu’un était proposé à la canonisation, une commission était nommée pour vérifier les faits de sa vie, et surtout des miracles qu’il avait opérés. Cette commission rendait compte au pape qui, s’il était satisfait, décrétait l’inscription du candidat sur la liste des saints. Ces documents officiels contiennent le récit des miracles les plus insignifiants et, pour d’autres raisons, les plus répréhensibles. 1 Et c’est à de tels miracles que l’Église de Rome a donné sa sanction, et c’est sur la vérité de ceux-ci qu’elle doit tenir ou tomber.
1 On peut trouver des récits de ces miracles, non seulement dans les documents originaux, mais aussi dans de nombreux ouvrages, comme ceux de l’évêque Stillingfleet et d’autres, écrits pour dénoncer les impostures de l’Église romaine. Le révérend John Cumming, de Londres, dans ses Lectures on Romanism (Boston, 1851), a cité dans ces documents officiels des exemples suffisamment nombreux pour satisfaire tout homme ordinaire. Par exemple, on dit de sainte Rosa Maria de Lima, entre autres choses, que la Vierge lui apparaissait souvent et lui parlait ; que le Sauveur est venu à elle sous la forme d’un enfant appuyé sur le pour ramasser des roses éparpillées sur le sol, puis l’enfant divin prit l’une d’elles et dit : « Tu es cette rose. » (Cumming, p. 629.) Lorsque son tombeau fut ouvert quinze ans après sa mort, ses restes « exhalèrent l’odeur des roses ». De saint Philippe Néri, on dit qu’il fut si agité par l’amour de Dieu, que le Seigneur lui brisa deux côtes pour donner plus libre action à son cœur, (p. 634). De Sœur Maria Francisca, il est certifié qu’en plaçant un saint Bambino (c’est-à-dire une image de l’enfant Jésus) dans la crèche, une telle lumière émanait du Bambino qu’elle l’aveugle pendant trois jours. Une autre fois, alors qu’elle habillait l’image, elle a dit : « Mon petit enfant, si tu n’étends pas tes pieds, je ne peux pas mettre tes chaussures et tes bas », et l’image en bois a immédiatement étendu ses pieds. On prétend aussi qu’elle obtint du Christ la permission de souffrir par procuration pendant un temps limité, à la place de quelques-uns de ses amis, les peines du purgatoire, et qu’en conséquence elle endura pendant un mois les agonies les plus intenses. On dit encore qu’elle lui avait communiqué les souffrances du Christ, sa sueur sanglante, l’angoisse de la couronne d’épines, sa flagellation et ses agonies sur la croix, et qu’elle avait visiblement imprimé sur elle ses plaies. (Cumming, p. 649-653.) Le cardinal Wiseman a édité un livre comprenant les vies de plusieurs saints, et parmi eux celle de sainte Véronique Giuliani, qui a été canonisée en 1839. De cette sainte, il dit, entre autres choses semblables, que Dieu l’a dédommagée de son empressement à boire au calice de la souffrance, en la faisant participer aux tourments de la passion du Christ. Le Christ lui apparut donc et prit la couronne d’épines et la plaça sur sa tête. (Cumming, p. 6G5-G75.) Tels sont quelques-uns des miracles sur lesquels Rome fonde ses prétentions d’être la seule vraie Église et l’enseignante infaillible de l’homme.
Il y a, cependant, deux miracles spéciaux et permanents auxquels les romanistes sont pleinement engagés, et qui, au jugement des neuf dixièmes des hommes instruits de la chrétienté, sont probablement des impostures à visage découvert. L’Église de Rome, par l’intermédiaire de ses plus hauts dignitaires et représentants, a affirmé et continue d’affirmer que la maison dans laquelle la Vierge Marie demeurait à Nazareth fut, lorsque cette ville tomba entre les mains des infidèles, transportée par des anges et déposée à Lorette, village situé à quelques milles d’Ancône en Italie. La première étape de ce transport eut lieu en 1291 de Nazareth à la Dalmatie ; la seconde en 1294 aux environs de Recanati ; et le troisième en 1295 à son emplacement actuel. La maison a trente pieds de long, quinze de large et dix-huit de haut, et est construite en bois et en briques. Elle est maintenant très ornée, ayant une porte d’argent et une grille d’argent, et se trouve au milieu d’une grande église érigée au-dessus et autour d’elle. Son sanctuaire s’est enrichi d’offrandes d’une valeur inestimable, et est considéré comme la Mecque de l’Italie ; le nombre des pèlerins s’élevant quelquefois à deux cent mille dans une seule année. Le revenu annuel de la maison, en dehors des présents, est de trente mille dollars. 1 On dit que la maison d’origine est un fac-similé de centaines d’autres dans le voisinage d’Ancône. Il est évident qu’un édifice aussi frêle n’aurait pu, sans un miracle, être conservé treize cents ans ; Il faudrait un autre miracle pour l’identifier après une si longue période ; un autre miracle prodigieux pour expliquer son transport en Dalmatie ; et deux autres presque aussi grands pour expliquer qu’il atteigne son emplacement actuel. Le seul dessein concevable de tous ces miracles doit être de soutenir les doctrines et l’autorité de l’Église romaine, et de verser de l’argent dans son trésor. Ces deux objectifs, ils les ont accomplis à un degré merveilleux. Aucun homme qui n’est pas prêt à accepter tous ces miracles sans la moindre preuve, ne peut croire rationnellement en l’Église de Rome.
1 Lexique de Coni’ersativns, 7e édit. Leipzig, 1827, art. — Lorette.
L’autre miracle dont l’Église romaine est responsable devant le monde entier, c’est la liquéfaction annuelle du sang de saint Janvier à Naples. La tradition le concernant est qu’il fut jeté par ses persécuteurs païens dans un four chauffé, où il resta trois jours indemne. Il fut ensuite exposé à des bêtes sauvages, qui devinrent comme des agneaux en sa présence. Il fut finalement décapité en 305 apr. J.-C. On dit qu’une femme a recueilli et conservé une partie de son sang. Celui-ci, ainsi que d’autres de ses restes, fut transporté à Naples, étant identifié comme d’habitude par un miracle, car il est dit : « Napolitain ! beatum Januarium revelatione commoti sustnlerunt. » Le sang, conservé avec le plus grand soin dans la cathédrale, est contenu dans des fioles en cristal Hvo, plus grandes et plus petites. Dans son état ordinaire, c’est une substance dure, parfois représentée comme remplissant le flacon, et parfois comme apparaissant sous la forme d’une masse ronde et dure. On dit que le sang des autres saints se liquéfie aux anniversaires de leur martyre, mais le sang de Janvier devient liquide chaque fois que la fiole qui le contient est approchée du crâne du saint, qui est encore conservé. Il se retourne facilement quand le bien est imminent, et refuse de changer quand le mal est à portée de main. Il sert donc d’oracle. Il est produit et exposé chaque année à des foules de fidèles rassemblés dans la cathédrale le premier dimanche de mai, ainsi que le dix-neuvième jour de septembre et le vingtième de décembre, et à d’autres moments en cas d’urgence extraordinaire. C’est à ce miracle que l’Église de Rome est pleinement engagée, puisqu’il est exposé chaque année sous les yeux du pape et des plus hauts dignitaires de l’Église. Il n’y a pas la moindre preuve des faits énoncés ci-dessus concernant ce saint, qui ne puisse être invoquée pour l’une des milliers d’histoires de fées et de sorcières dont l’histoire de toutes les nations abonde, si ce n’est la liquéfaction du sang. Quant à cela, cependant, il faut dire qu’il n’y a aucune preuve que la substance contenue dans la fiole soit du sang ; ou, s’il s’agit de sang, que c’est du sang humain ; ou, s’il s’agit d’un humain, que c’est le sang de Januarius ; ou, s’il s’agit de la sienne, que la cause de la liquéfaction est d’amener la fiole à proximité du crâne du saint. Tout ce que les gens sont autorisés à voir, le changement d’une substance solide rouge foncé en un fluide, n’importe quel chimiste pourrait l’exécuter à cinq minutes d’avis. Il est vrai, comme l’admet le Dr Newman, que ces miracles ne prouvent pas tant la vérité de l’Église, que l’Église prouve la vérité des miracles. Alors que valent-ils.
Les reliques sont les restes de personnes et de choses sacrées, qui ne doivent pas seulement être chéries comme des mémoriaux, mais auxquelles le « cultus » ou un certain degré de culte religieux est dû, et qui sont imprégnés d’un pouvoir surnaturel. Ils guérissent les malades, rendent la vue aux aveugles, l’ouïe aux sourds, la santé aux estropiés, et même, parfois, la vie aux morts. Le monde catholique en est rempli. 1 Le Dr Newman, dans ses Conférences sur la position actuelle des catholiques en Angleterre, prononcées après sa réconciliation avec l’Église de Rome, dit : « À Rome, il y a la Vraie Croix, la crèche de Bethléem et la chaire de saint Pierre ; des portions de la Couronne d’épines sont conservées à Paris ; le Saint Tunique est montré à Trêves ; la feuille d’enroulement à Turin ; à Monza, la couronne de fer est formée d’un clou de la croix ; et un autre clou est réclamé pour le Duomo de Milan ; et des morceaux de l’habit de Notre-Dame sont visibles dans l’Escurial. L’Agnus Dei, les médailles bénies, l’omoplate, le cordon de saint François, tout cela est le médium des manifestations et des grâces divines.» 2
1 Le langage du concile de Trente à propos de l’honneur dû aux reliques des saints a déjà été cité en traitant du second commandement. Perrone, dans ses Pralectiones Theologies, De Cultu Sanctorum, iv. 71, édit. Paris, 1801, t. II. p. 112, b, avance comme l’un de ses arguments en faveur du culte des reliques la déclaration de l’épître de l’Église de Smyrne, que les païens ne craignaient « aucun chrétien !, relicto Christo, Polycarpum adorare inciperent ; omni idcirco qua poterant ratione niartyrum corpora, ne a Christianis colerentur, ethnic ! Gladiatorum corporibus commiscebant ; in amphithcatris feris, in aquis piscibus ut vorarentur exponebant ; aut saltern igne ilia cremabant, cinere dispergentes, nti ex martyrum actis constat. » C’était « l’adoration », le « culte », qui devaient être rendus à ces reliques. Les distinctions entre les différents types de culte n’avaient que peu d’effet sur l’esprit populaire. Perrone lui-même enseigne que le « cœur matériel du Christ » devait être adoré latriæ cultu. De Incarnatione, 11. iv. 454 ; Ibid., p. 81, a.
2 Cité par le Dr Cumming dans ses Lectures on Romanism, p. 595.
Il y a là un champ illimité pour la fraude pieuse. D’abord, en jetant sur le peuple crédule de fausses reliques, et, deuxièmement, en leur attribuant faussement un pouvoir surnaturel. Il a été prouvé dans de nombreux cas que les restes qui passaient pour des reliques des saints étaient des os d’animaux. Dans d’autres cas, il est impossible que tous soient authentiques, car les corps, ou les mêmes parties de corps, d’un seul et même homme, sont exposés dans des lieux différents. Il y a, comme on l’a souvent affirmé, assez de bois de la vraie croix, tenu pour sacré dans différentes localités, pour construire un grand édifice. Écrivant peu de temps après la prétendue découverte de la croix sur laquelle le Sauveur est mort, Cyrille de Jérusalem dit : « Saneturn crucis lignum testatur, quod ad hodiernum usque diem apud nos conspicitur, ac per eos qui fide impellente ex eo frusta decerpunt orbem fere totum hinc jam opplevit. » Et encore, il parle de « crucis lignum, quod per particulas ex hoc loco per totum orbem distributum est ». 3 Saint Paulinas, qui fait partie de la longue liste de témoins cités en faveur de la vénération des reliques, dit « qu’une partie de la croix conservée à Jérusalem en a laissé des fragments sans diminuer ». C’est la seule façon d’expliquer le fait en question. Si cette solution n’est pas admise, il faut reconnaître qu’au moins la grande majorité des parties de la croix actuellement exposées doivent être fausses. Il n’y a aucune preuve historique de quelque valeur qu’une partie de la vraie croix ait été préservée. On n’en entendit plus parler jusqu’en 327 apr. J.-C. Vers cette époque, selon la légende, l’impératrice Hélène, en cherchant le Saint-Sépulcre, trouva à une profondeur de trente pieds de la surface de la terre, trois croix, supposées être celles mentionnées dans les Évangiles. La vraie croix a été identifiée, disent certains, par son inscription ; d’autres, par une femme malade touchée par l’un et l’autre sans effet, mais rendue à une parfaite santé au moment de la vraie croix. sont entrés en contact avec son corps. D’autres disent qu’un cadavre a été ramené à la vie par le contact de la vraie croix. En se référant à ce récit, on peut remarquer (1.) Qu’il y a une forte improbabilité antécédente que les croix utilisées sur le Calvaire aient jamais été enterrées. L’hypothèse selon laquelle les Juifs avaient l’habitude d’enterrer ces instruments de torture repose sur une base très précaire. (2.) La croix était d’une structure très légère, car elle pouvait être portée par un seul homme ; et, par conséquent, s’il avait été enterré superficiellement, comme il a dû l’être au début, il n’aurait guère pu rester intact pendant trois cents ans, surtout si l’on considère les labours et les renversements auxquels la ville sainte a été soumise. (3.) Les preuves historiques à l’appui de cette légende sont de peu d’importance. Cyrille de Jérusalem, vingt ans après la date assignée à la découverte, dit en effet que la vraie croix était alors à Jérusalem, comme Jérôme le fait une soixantaine d’années plus tard, mais ni l’un ni l’autre ne fait mention d’Hélène à propos de la croix ou du sépulcre. On peut donc admettre que ce qui passait pour la vraie croix se trouvait alors à Jérusalem, mais le récit de sa récupération et de son identification reste sans fondement. (4) L’historien Eusèbe, contemporain et témoin oculaire, ne fait aucune mention de la découverte de la croix, événement dont la croyance agita toute la chrétienté et conduisit à l’immense agrandissement de l’évêché de Jérusalem. Il est inconcevable qu’un tel événement, s’il était à sa connaissance, il aurait dû passer sous silence un tel historien, qui avait tant à cœur d’améliorer la gloire de son protecteur l’Empereur. (5) Le Calvaire et le sépulcre que nous connaissons étaient sans la ville. L’endroit où la croix aurait été trouvée se trouve au centre de la ville moderne. La question de savoir si la ville a modifié ses limites au point de faire entrer le lieu de la crucifixion et de l’ensevelissement du Christ à l’intérieur de ses frontières est une question très débattue. Le Dr Robinson, l’un des explorateurs les plus dignes de foi, dit : « L’hypothèse qui fait que le second mur est si long qu’il exclut le site présumé du Saint-Sépulcre, est, pour des raisons topographiques, insoutenable et impossible. » 1 C’est-à-dire, en supposant la vérité de l’affirmation des évangélistes selon laquelle le Christ a été crucifié hors des murs, il est topographiquement impossible que le prétendu emplacement du Saint-Sépulcre soit le vrai. Et c’est ainsi que tout le fondement de la légende de la découverte de la croix à cet endroit tombe à terre. Le Dr Robinson termine sa longue discussion de cette question en ces termes : « Ainsi, dans toutes les vues que j’ai pu prendre de la question, tant topographiques qu’historiques, soit sur place, soit dans le placard, et en dépit de toutes mes prétentions antérieures, je suis irrésistiblement conduit à la conclusion que le Golsotha et le tombeau que l’on voit maintenant dans l’église du Saint-Sépulcre, ne sont pas sur les lieux réels de la crucifixion et de la résurrection de notre Seigneur. La prétendue découverte de ces objets par la vieille et crédule Hélène, comme sa découverte de la croix, n’est peut-être pas improbable et ait été l’œuvre d’une pieuse fraude. Ce ne serait peut-être pas faire injustice à l’évêque Macaire et à son clergé, si nous considérions l’ensemble comme un plan bien conçu et couronné de succès pour restaurer à Jérusalem son ancienne considération, et élever son siège à un degré plus élevé d’influence et de dignité.» 2
3 Catécliesis, x. 9, et xiii. 2 ; Schram, Analysis Patrum, Augsbourg, 1787, t. X, p. 175, 194.
1 Recherches bibliques en Palestine, au Mont Sinaï et en Arabie Pétrate. Journal des voyages en 1838, par E. Robinson et E. Smith. Rédigé à partir des Journaux originaux, etc. Par Edward Robinson, professeur de littérature biblique à l’Union Theological Seminary, New York. Boston, 1841, vol. ii. , p. 69.
2 /enchère. , p. 80.
Le Dr Newman dit que nous devons soit admettre la découverte de la croix, soit croire l’Église de Jérusalem coupable d’imposture. 3 Il est difficile de décider ce qui est dû en cette matière à la fraude, et ce qu’il faut à la crédulité superstitieuse. Que l’un et l’autre aient prévalu pendant des siècles dans l’Église est un fait historique indubitable. Faut-il croire tout ce que Grégoire de Nysse a dit de Grégoire de Néo-Césarée, ou ce que les Pères racontent de saint Antoine ; Devons-nous admettre toutes les légendes des saints, pour éviter d’accuser les hommes de bien de crédulité ou de fraude ? Il est lamentable que des hommes de bien aient défendu le principe qu’il est juste de tromper pour une bonne fin. Il est indéniable que la doctrine des fraudes pieuses a été avouée et mise en pratique dans l’Église de Rome depuis qu’elle a commencé à aspirer à la suprématie ecclésiastique. La prétendue donation de l’Italie par Constantin au pape n’était-elle pas une fraude ? Les Décrétales d’Isidore ne sont-elles pas une imposture ? Les miracles opérés pour prouver la délivrance des âmes du purgatoire ne sont-ils pas des fraudes ? La prétendue maison de la Vierge Marie à Lorette n’est-elle pas une fraude ? L’empreinte de pied (ex pede Hercule) sur une plaque de marbre de la cathédrale de Rouen, n’est-elle pas une fraude ? La plume de l’aile de l’archange Gabriel, conservée dans l’une des cathédrales d’Espagne, n’est-elle pas une imposture ? Tout le monde catholique est plein d’escroqueries de ce genre ; et le seul motif possible pour les romanistes, c’est qu’il est juste de tromper le peuple pour son bien. « Populus vult decipi », c’est l’excuse qu’un prêtre romain donna un jour à Coleridge à propos de cette affaire.
3 Essais sur les miracles, p. 297.
Deuxièmement, de pieuses fraudes sont pratiquées, non seulement en exposant de fausses reliques, mais aussi en leur attribuant faussement un pouvoir surnaturel. Le Dr Newman dit : « Le stock de reliques est inépuisable ; ils se multiplient à travers tous les pays, et chaque particule de chacun d’eux a au moins en elle une vertu dormante, peut-être une vertu énergétique d’opération surnaturelle.» 1 Bellarmin enseigne bien sûr la même2 doctrine. Cyrille de Jérusalem dit : « Et Elisæum qui semel et iterum suscitavit, dum viveret, et post mortem : vivus resurrectionem per suam ipsius animam operatus est, ut autem non animae solum justorum honorarentur, sed crederetur etiam in justorum corporibus jacere vim, projectus in monumentum Elisæi mortuus prophetæ corpus attingens, vitam concepit, 4 Kin. iv. 13, ut ostenderetur, absente etiam anima inesse vim corpori sanctorum propter animam justam, quæ in eo habitaverat.» 3 Le Dr Newman dit que les miracles opérés par les reliques se produisent tous les jours dans toutes les parties du monde. Ce n’est pas que les gens en soient favorablement affectés par l’imagination ou les sentiments, mais que les reliques elles-mêmes sont imprégnées d’un pouvoir surnaturel. C’est ainsi que le Dr Newman, l’un des hommes les plus cultivés du dix-neuvième siècle, s’est rallié au fétichisme pur, simple et non dilué de l’Afrique.
1 Conférences sur la position des catholiques en Angleterre, p. 284.
2 Voir ci-dessus, p. 300 et 301.
3 Catéchèse lUuminandorum, xviii. 7 ; Schram, Analysis Patrum, Augsbourg, 1789, t. X, p. 245, 246.
Notre Seigneur a mis en garde ses disciples contre le fait d’être trompés par des prodiges mensongers. La Bible (Deut. xiii. 1-3) enseigne que tout signe ou prodige donné ou opéré à l’appui d’une doctrine contraire à la Parole de Dieu, doit, sans autre examen, être prononneed false. Si donc des doctrines telles que la suprématie du pape ; le pouvoir des prêtres de pardonner les péchés ; la nécessité absolue des sacrements comme seuls canaux de communication des mérites et de la grâce du Christ ; la nécessité de la confession auriculaire ; purgatoire; l’adoration de la Vierge et de l’hostie consacrée ; et le culte des saints et des anges, sont contraires aux Saintes Écritures, alors à coup sûr tous les prétendus miracles opérés à leur appui sont des « prodiges mensongers » ; et ceux qui les promulguent et les soutiennent sont coupables de fraude pieuse. Si donc, comme le dit Newman, l’Église catholique, de l’est à l’occident, du nord au sud, est, selon nos conceptions, accablée de miracles ; Tant pis. Il est partout suspendu avec les symboles ou les enseignes de l’apostasie.
C’est une interdiction générale de la convoitise. « Tu ne convoiteras point » est un commandement complet. Tu ne désireras pas excessivement ce que tu n’as pas ; et surtout ce qui appartient à ton prochain. Il comprend la commande positive d’être contentés des lotissements de la Providence ; et l’injonction négative de ne pas se plaindre, de ne pas se plaindre à cause des voies de Dieu envers nous, ou de ne pas envier le sort ou les possessions d’autrui. Le commandement d’être content n’implique pas l’indifférence, et il n’enjoint pas la paresse. Un tempérament joyeux et satisfait est parfaitement compatible avec une juste appréciation des bonnes choses de ce monde, et une diligence dans l’utilisation de tous les moyens appropriés pour améliorer notre condition dans la vie.
Le contentement ne peut avoir d’autre fondement rationnel que la religion. La soumission à l’inévitable n’est que stoïcisme, ou apathie, ou désespoir. Les religions de l’Orient et de l’ancien monde en général, en tant qu’elles étaient le sujet de la pensée, étant essentiellement panthéistes, ne pouvaient produire qu’un consentement passif à être emporté pendant un certain temps dans le courant irrésistible des événements, puis à se perdre dans l’abîme de l’être inconscient. Les pauvres et les misérables pourraient, avec une telle foi, avoir peu de raisons d’être satisfaits, et ils seraient soumis à la tentation la plus forte d’envier les riches et les fortunés. Mais si un homme croit qu’il y a un Dieu personnel infini en puissance, en sagesse et en amour ; s’il croit que la providence de Dieu s’étend sur toutes les créatures et sur tous les événements ; et s’il croit que Dieu ordonne tout, non seulement pour le meilleur dans l’ensemble, mais aussi pour le meilleur pour chaque individu qui met sa confiance en Lui et acquiesce à Sa volonté, alors ne pas se contenter des attributions de la sagesse et de l’amour infinis doit être une folie. La foi dans les vérités auxquelles il est fait référence ne peut manquer de produire le contentement, partout où cette foi est réelle. Si l’on considère en outre les aspects chrétiens particuliers de l’affaire ; quand nous nous souvenons que ce gouvernement universel est administré par Jésus-Christ, entre les mains duquel, comme il nous le dit lui-même, tout pouvoir dans le ciel et sur la terre a été confié, alors nous savons que notre sort est déterminé par Celui qui nous a aimés et s’est donné lui-même pour nous, et qui veille sur son peuple comme un berger veille sur son troupeau, de sorte qu’un cheveu de notre tête ne peut périr sans sa permission. Et quand nous pensons à l’avenir éternel qu’il nous a préparé, alors nous voyons que les peines de cette vie ne sont pas dignes d’être comparées à la gloire qui sera révélée en nous, et que nos légères afflictions, qui ne sont que pour un moment, produira pour nous un poids de gloire bien plus grand et éternel ; alors le simple contentement s’élève à une paix qui surpasse toute intelligence, et même à une joie pleine de gloire. Tout cela est illustré dans l’histoire du peuple de Dieu telle qu’elle est rapportée dans la Bible. Paul ne pouvait pas seulement dire : « J’ai appris, dans quelque état que je sois, à m’en contenter » (Phil. 11) ; mais il pouvait aussi dire : « Je prends plaisir aux infirmités, aux reproches, aux nécessités, aux persécutions, aux détresses à cause du Christ. » (2 Corinthiens xii. 10.) Cela a été l’expérience mesurable de milliers de croyants à toutes les époques. De tous les hommes du monde, les chrétiens sont tenus, quel que soit l’état dans lequel ils se trouvent, d’être satisfaits. Il est facile de prononcer ces paroles, et il est facile pour ceux qui sont dans l’aisance de s’imaginer qu’ils exercent la grâce du contentement ; mais quand un homme est écrasé par la pauvreté et la maladie, entouré de ceux dont il ne peut pourvoir aux besoins ; voir ceux qu’il aime, souffrir et s’épuiser sous leurs privations, alors le contentement et la soumission sont parmi les grâces chrétiennes les plus hautes et les plus rares. Néanmoins, il vaut mieux être Lazare que Dives.
La deuxième forme de mal condamnée par ce commandement est l’envie. C’est quelque chose de plus qu’un désir démesuré du bien non possédé. Cela inclut le regret que les autres aient ce dont nous ne jouissons pas ; un sentiment de haine et de malignité envers ceux qui sont plus favorisés que nous ; et le désir de les priver de leurs avantages. C’est un vrai cancer de l’âme ; produisant de la torture et mangeant tous les bons sentiments. Il y a, bien sûr, tous les degrés de ce péché, depuis la satisfaction secrète éprouvée devant les malheurs d’autrui, ou le désir inexprimé que le mal puisse les assaillir ou qu’ils soient réduits au même niveau que nous, à la haine satanique des heureux à cause de leur bonheur, et à la détermination, s’il est possible, de les rendre malheureux. Il y a plus de cet esprit redoutable dans le cœur humain que nous ne sommes prêts à le reconnaître. Montesquieu dit que tout homme a une satisfaction secrète dans les malheurs, même de ses amis les plus clairs. Comme l’envie est l’antithèse de l’amour, c’est de tous les péchés le plus opposé à la nature de Dieu, et plus efficacement que tout autre qui nous exclut de sa communion.
Troisièmement, les Écritures, cependant, mentionnent le plus souvent la convoitise sous la forme d’un désir immodéré de richesse. L’homme dont la convoitise est la caractéristique a l’acquisition de la richesse comme l’objet principal de sa vie. Cela absorbe son esprit, absorbe ses affections et absorbe son énergie. De la convoitise sous cette forme, l’Apôtre dit qu’elle est la racine de tous les maux. C’est-à-dire qu’il n’y a pas de mal — depuis la méchanceté, la tromperie et la fraude, jusqu’au meurtre — à la perpétration duquel la convoitise n’ait pas poussé les hommes, ou à laquelle elle ne menace pas toujours de les pousser. De l’homme cupide, dans ce sens du mot, la Bible dit : (1.) Qu’il ne peut pas entrer au ciel. (1 Corinthiens vi. 10.) (2.) Qu’il est idolâtre. (Éph. v. 5.) La richesse est son Dieu, c’est-à-dire ce à quoi il donne son cœur et consacre sa vie. (3.) Que Dieu l’abhorre. (Psaume x. 3.)
Ce commandement a un intérêt particulier, car il était le moyen, comme nous le dit saint Paul, de le conduire à la connaissance du péché. « Je n’avais pas connu la convoitise, si la loi n’avait dit : Tu ne convoiteras point. » (Rom. vii. 7.) La plupart des autres commandements interdisent les actes extérieurs, mais cela interdit un état du cœur. Il montre qu’aucune obéissance extérieure ne peut satisfaire aux exigences de la loi ; que Dieu regarde le cœur, qu’il approuve ou désapprouve les affections secrètes et les desseins de l’âme ; afin qu’un homme soit pharisien, pur extérieurement comme un sépulcre blanchi, mais intérieurement plein d’ossements d’hommes morts et de toute impureté.
CHAPITRE XX.
Par le moyen de la grâce, on n’entend pas tous les instruments qu’il plaît à Dieu de faire de ses enfants les moyens d’édification spirituelle. L’expression a pour but d’indiquer les institutions que Dieu a ordonnées pour être les canaux ordinaires de la grâce, c’est-à-dire des influences surnaturelles du Saint-Esprit, vers les âmes des hommes. Les moyens de la grâce, selon les normes de notre Église, sont la parole, les sacrements et la prière.
1. La parole de Dieu, telle qu’elle est comprise ici, est la Bible. Et la Bible est la collection des livres canoniques de l’Ancien et du Nouveau Testament.
2. Ces livres sont la parole de Dieu parce qu’ils ont été écrits par des hommes qui étaient des prophètes, ses organes ou ses porte-parole, en ce sens que tout ce qu’ils déclarent être vrai ou obligatoire, Dieu le déclare vrai et contraignant. Ces thèmes ont déjà été examinés dans le premier volume de cet ouvrage, dans la mesure où ils rentrent dans les limites de la théologie systématique.
3. La Parole de Dieu, en ce qui concerne les adultes, est un moyen indispensable de salut. La vraie religion n’a jamais existé, et ne pourra jamais exister, là où les vérités révélées dans la Bible sont inconnues. Ce point a déjà été discuté en parlant de l’insuffisance de la religion naturelle.
4. La parole de Dieu n’est pas seulement nécessaire au salut, mais elle est aussi divinement efficace pour l’accomplissement de cette fin. C’est ce qui ressort de la mission confiée à l’Église. Après sa résurrection, Notre-Seigneur dit à ses disciples : « Allez donc, enseignez toutes les nations, les baptisant au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit ; en leur apprenant à observer toutes choses, tout ce que je vous ai commandé, et voici, je suis avec vous tous les jours, jusqu’à la fin du monde. Amen. (Matth., xxviii. 19, 20). Les paroles rapportées dans Marc xvi. 15, 16 disent : « Allez dans le monde entier, et prêchez l’Évangile à toute la création. Celui qui croira et sera baptisé sera sauvé ; mais celui qui ne croira pas sera damné. La fin à accomplir, c’était le salut des hommes. Le moyen de son accomplissement était l’enseignement. Les disciples devaient enseigner ce que le Christ leur avait enseigné. C’est-à-dire qu’ils devaient enseigner l’Évangile à toute créature sous le ciel. Tous les moyens tirent leur efficacité de l’ordonnance de Dieu ; puisqu’il a ordonné que l’Évangile soit le moyen du salut, il doit être efficace à cette fin. (b.) Cela ressort encore de la manière dont les apôtres exécutèrent la mission qu’ils avaient reçue. Ils sont allés partout, prêchant Christ. Ils étaient envoyés pour enseigner ; et l’enseignement était tout leur travail. « J’ai résolu, dit Paul, de ne rien savoir parmi vous, si ce n’est Jésus-Christ et Jésus crucifié. » (1 Corinthiens ii. 2.) (c.) La puissance de la Parole est prouvée par de nombreuses affirmations directes dans la Bible. Paul dit aux Romains qu’il n’avait pas honte de l’Évangile de Christ, parce que « c’est la puissance de Dieu pour le salut ». (Rom. i. 16.) Aux Corinthiens, il dit, en raison de l’impuissance absolue de la sagesse du monde, qu'« il a plu à Dieu, par la folie de la prédication, de sauver ceux qui croient ». (1 Corinthiens i. 21.) La prédication du Christ crucifié était « pour les Juifs une pierre d’achoppement, et pour les Grecs une folie ; mais à ceux qui sont appelés, Juifs et Grecs, Christ, la puissance de Dieu, et la sagesse de Dieu. (Versets 23 et 24.) Dans l’épître aux Hébreux, il est dit : « La parole de Dieu est rapide, puissante et plus tranchante que n’importe quelle épée à deux tranchants, perçant jusqu’à la division de l’âme et de l’esprit, des articulations et de la moelle, et elle discerne les pensées et les intentions du cœur. » (Héb. iv. 12.)
Les écrivains sacrés, sous la direction du Saint-Esprit, sont exubérants dans leur louange de la Parole de Dieu, car sa puissance a été révélée dans leur propre expérience. « La loi du Seigneur, dit le Psalmiste, est parfaite, elle convertit l’âme. » (Ps. xix. 7.) Par la loi du Seigneur, on entend toute la révélation que Dieu a faite dans sa Parole pour déterminer la foi, former le caractère et contrôler la conduite des hommes. C’est cette révélation que le Psalmiste déclare parfaite, c’est-à-dire parfaitement adaptée pour accomplir la fin de la sanctification et du salut de l’homme. « Ta parole, dit-il, est une lampe à mes pieds, et une lumière sur mon sentier. » (Ps. cxix. 105.) « Le témoignage du Seigneur est sûr, il fait de l’aviso le simple : les statuts du SEIGNEUR sont justes, ils réjouissent le cœur : le commandement du SEIGNEUR est pure, éclairant les yeux : la crainte de l’Éternel est pur, durable à jamais : les jugements de L’ÉTERNEL sont tout à fait vrais et justes. Plus à venir désirés qu’ils soient que de l’or, oui, que beaucoup d’or fin ; plus doux aussi que le miel et le rayon de miel. (Ps. xix. Presque chacun des cent soixante-seize versets du Psaume cent dix-neuvième contient une certaine reconnaissance de l’excellence ou de la puissance de la Parole de Dieu. « Ma parole n’est-elle pas comme un feu ? dit l’Eternel, et comme un marteau qui brise le rocher en morceaux ? (Jér. XXIII. 29.)
Dans le Nouveau Testament, la même efficacité divine est attribuée à l’Héritier de Dieu. C’est l’évangile de notre salut, c’est-à-dire celui par lequel nous sommes sauvés. Paul a dit que Christ l’avait chargé de prêcher l’Évangile aux païens, en disant : C’est dans ce but que je t’ai apparu pour faire de toi un ministre et un témoin, te délivrant d’entre les païens, « à qui maintenant je t’envoie, pour leur ouvrir les yeux, et pour les faire passer des ténèbres à la lumière, et de la puissance de Satan à Dieu, afin qu’ils reçoivent le pardon des péchés et l’héritage parmi ceux qui sont sanctifiés par la foi qui est en moi. (Actes, XXVI, 17, 18.) Tout cela devait être accompli par l’Évangile. Le même apôtre écrivant à Timothée dit : « Dès ton enfance, tu as connu les Saintes Écritures, qui sont capables de te rendre sage pour le salut, par la foi qui est en Jésus-Christ. Toute l’Écriture est inspirée de Dieu, et est utile pour enseigner, pour convaincre, pour corriger, pour instruire dans la justice. (2 Tim. iii. 15, 1G.) L’apôtre Pierre dit que les hommes sont « nés de nouveau, non d’une semence corruptible, mais d’une semence incorruptible, par la parole de Dieu qui vit et demeure éternellement ». (1 Pet. i. 23.) Notre Seigneur a prié : « Sanctifie-les par ta vérité : ta parole est vérité. » (Jean xvii. 17.)
Il n’y a donc aucun doute que les Écritures enseignent que la Parole de Dieu est le moyen spécialement désigné pour la sanctification et le salut des hommes. Cette doctrine de la Bible est pleinement confirmée par l’expérience de l’Église et du monde. Cette expérience enseigne : Premièrement, qu’aucune preuve de sanctification, aucune indication des influences salvatrices de l’Esprit ne se trouve là où la Parole de Dieu est inconnue. Cela ne veut pas dire qu’il n’y en a pas. Nous savons par la Bible elle-même : « Que Dieu ne fait pas acception de personnes ; mais dans toute nation, celui qui le craint et pratique la justice, est agréé avec lui. (Actes, p. 34, 35.) Personne ne doute qu’il n’est au pouvoir de Dieu d’appeler qui Il veut parmi les païens et de leur révéler assez de vérité pour assurer leur salut. 1 Néanmoins, il reste un fait évident aux yeux de tous que les nations où la Bible est inconnue sont assises dans les ténèbres. L’absence de la Bible est tout aussi distincte perceptible comme l’absence de soleil. La déclaration des Écritures est que « le monde entier est dans la méchanceté » (1 Jean v. 19) ; Et cette déclaration est confirmée par toute l’histoire.
1 Dans la deuxième Confession helvétique, chapitre I, il est dit : « Cum hodic hoc Dei verbum per prædicatores legitime vocatos annunciator in ccclcsia, crcdimns ipsum Dei verbum an-nunciari, ct a fidelibus rccipi, neque aliud Dei verbum vel fingendum vel cœlitus esse ex-pcetandum..... Agnoscimus interim, Deum illuminare posse homines ctiain sine externo ministerio, quos ct quando velit : id quod ejus potentiæ est. Nos autem loqiiimur de usitata ratione instituendi homines, et præcepto et exemplo tradita nobis a Deo. » — Niemeyer, CoUectio Confessionum, Leipzig, 1840, p. 4G7, 468.
Un second fait sur lequel le témoignage de l’expérience est tout aussi clair, c’est que le vrai christianisme s’épanouit dans la mesure où la Bible est connue et où ses vérités sont répandues parmi le peuple. Pendant l’âge apostolique, les messagers du Christ allaient partout prêcher son Évangile, à temps et à contretemps ; prouvant par les Écritures que Jésus est le Christ, le Fils du Dieu vivant ; exigeant de ceux à qui ils prêchaient qu’ils sondent les Écritures ; exhorter les jeunes ministres à prêcher la Parole ; pour proclamer la Parole de vie ; de s’adonner à la lecture, à l’exhortation et à la doctrine ; de méditer sur ces choses et de s’y consacrer entièrement. Au cours de cette période, l’Évangile a progressé plus rapidement et a peut-être produit des fruits plus abondants que pendant toute autre période aussi longue de son histoire. Cependant, lorsque la vérité commença à être de plus en plus corrompue par les spéculations de la philosophie et par l’introduction des doctrines juives concernant les cérémonies et le sacerdoce ; lorsque la « réserve » dans la prédication est devenue à la mode, et qu’il a été considéré comme à la fois légitime et sage de cacher la vérité, d’éveiller la révérence et de s’assurer l’obéissance par d’autres moyens ; et quand le culte chrétien fut encombré par des rites païens, et que la confiance du peuple se détourna de Dieu et du Christ, pour se tourner vers la vierge et les saints, alors les ombres de la nuit couvrirent l’Église, et les ténèbres devinrent de plus en plus intenses, jusqu’à ce que la vérité ou la lumière fût presque entièrement obscurcie. À la Réforme, quand la Bible enchaînée fut apportée des cloîtres, donnée à l’imprimerie, et répandue dans toute l’Europe, ce fut comme le lever du soleil : les ténèbres se dissipèrent ; l’Église se leva de la poussière et revêtit ses beaux vêtements, car la gloire de Dieu était montée sur elle. Partout où la lecture et la prédication de la Parole étaient libres, la lumière, la liberté et la vraie religion y régnaient, à un degré proportionné. Partout où la Bible a été supprimée et où la prédication de ses vérités a été interdite, les ténèbres ont continué et demeurent encore.
Un troisième fait important, tout aussi bien établi, c’est que la vraie religion prévaut dans toute communauté, proportionnellement au degré auquel les jeunes sont instruits dans les faits et endoctrinés dans les vérités de la Bible. D’une certaine manière, cela est inclus dans la rubrique précédente, mais il mérite d’être signalé séparément. La question ne concerne pas la raison pour laquelle l’éducation religieuse des jeunes est si importante ; ou la manière la plus avantageuse d’assurer cette éducation ; mais simplement le fait que là où les jeunes sont dès le début imprégnés de la connaissance de la Bible, là demeure le christianisme pur ; Et là où on leur permet de grandir dans l’ignorance de la vérité divine, là la vraie religion languit et perd de plus en plus sa puissance. Tel est le témoignage de l’expérience.
C’est donc le témoignage commun de l’Écriture et de l’histoire que la Bible, la Parole de Dieu, est le grand moyen de promouvoir la sanctification et le salut des hommes, c’est-à-dire d’assurer leur bien-être temporel et éternel. Ceux par conséquent qui s’opposent à la religion ; qui désirent le règne de l’indifférentisme, ou le retour des doctrines païennes et de la morale païenne, sont conséquents et avisés dans leur génération, en s’efforçant de saper l’autorité de la Bible ; pour décourager ses circulation; à déduire l’assiduité à sa prédication ; et surtout de s’opposer à ce qu’elle soit effectivement enseignée aux jeunes. D’autre part, ceux qui croient que sans la sainteté aucun homme ne peut voir Dieu, et que sans la lumière de la vérité divine, la sainteté est impossible, sont tenus, en tant que pasteurs, en tant que parents et en tant que citoyens, d’insister pour que la Bible ait libre cours et qu’elle soit fidèlement enseignée à tous ceux qui sont sous leur influence ou dont ils sont responsables.
A quoi faut-il attribuer la Puissance de la Parole ?
Comme il est admis comme un fait que la Bible a le pouvoir qui lui est attribué, la question se pose : À quoi cela est-il dû ? À cette question, différentes réponses sont données. Certains disent que toute sa puissance réside dans la nature des vérités qu’elle contient. C’est la doctrine défendue par les pélagiens et les rationalistes. À ce sujet, on peut remarquer (1.) Que toute vérité a une adaptation à l’esprit humain et tend à produire une impression conforme à sa nature. Si l’on pouvait concevoir un esprit dépourvu de toute vérité, il serait dans un état d’idiotie. L’esprit est éveillé à l’action et élargi, et sa puissance est augmentée par la vérité, et, toutes choses égales d’ailleurs, en proportion de la quantité de vérité qui lui a été communiquée. (2) C’est la tendance de toute vérité morale en elle-même, à exciter des sentiments moraux justes et à conduire à une action morale juste. Il est en outre admis que les vérités de la Bible et les sources de puissance morale qu’elle contient sont de l’ordre le plus élevé possible. La doctrine, par exemple, qui y est enseignée au sujet de Dieu, qu’il est un Esprit, infini, éternel et immuable en être, en sagesse, en puissance, en sainteté, en justice, en bonté et en vérité, est incommensurablement au-dessus de tout ce que la raison humaine a jamais découvert ou de la philosophie humaine jamais enseignée. Il y a plus de puissance morale dans cette seule vérité que dans tous les systèmes de philosophie morale. On peut dire la même chose de ce que la Bible enseigne de la relation de Dieu avec le monde. Il n’en est pas seulement le créateur et l’architecte, mais aussi le conservateur et le gouverneur constant ; Chacun d’entre eux est présent, travaillant avec et par ses créatures, usant de chacune selon sa nature, et dominant toutes choses pour l’accomplissement des desseins les plus élevés et les plus bienfaisants. À ses créatures raisonnables, en particulier aux hommes, il se révèle comme un père, aimant, guidant et pourvoyant à leurs besoins ; sans jamais les affliger volontairement, mais seulement lorsqu’il serait moralement répréhensible de faire autrement. La doctrine biblique concernant l’homme n’est pas seulement vraie, conforme à tout ce que l’homme se révèle être, mais elle est éminemment adaptée pour faire de lui ce qu’il a été conçu pour être : exalter sans gonfler ; l’humilier sans le dégrader. La Bible enseigne que Dieu a créé l’homme à partir de la poussière de la terre et lui a insufflé le souffle de vie, et qu’il est devenu une âme vivante conforme à l’image de Dieu dans la connaissance, la justice et la sainteté. Ainsi, l’homme est apparemment la plus basse des créatures rationnelles de Dieu, mais rendu capable d’un progrès indéfini en capacité, en excellence et en béatitude. L’état actuel de l’homme, cependant, présente un triste contraste avec ce récit de sa condition originelle. La Bible nous informe donc que l’homme est tombé de l’état dans lequel il a été créé en péchant contre Dieu. C’est ainsi que le péché a été introduit dans le monde : tous les hommes sont pécheurs, c’est-à-dire coupables, souillés et impuissants. Ce sont des faits de conscience, ainsi que des doctrines de la Bible. Cependant, les Écritures nous informent que Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne périsse pas, mais qu’il ait l’éternité vie. On nous dit que ce Fils est l’image de Dieu, égal à Dieu. C’est par Lui qu’ont été toutes les choses créées qui sont dans le ciel, et qui sont sur la terre, visibles et invisibles, qu’il s’agisse de trônes, ou de dominations, ou de principautés ou de puissances : toutes choses ont été créées par Lui et pour Lui ; et Il est avant toutes choses, et par Lui que toutes choses consistent. Cette personne divine, pour nous et pour notre salut, a pris sur Lui notre nature, a accompli toute justice, a porté nos péchés dans son propre corps sur le bois ; et étant morts pour nos offenses, ressuscité pour notre justification ; et est maintenant assis à la droite de la majesté d’en haut ; tout pouvoir dans le ciel et sur la terre ayant été remis entre ses mains. Il y a plus de puissance pour sanctifier, pour élever, fortifier et pour réjouir dans le seul mot Jésus, qui signifie " Jéhovah-Sauveur « , que dans toutes les déclarations des hommes depuis le commencement du monde. Ce divin et exalté Sauveur a envoyé ses disciples prêcher son Évangile à toute la création, promettant à chacun le pardon, la sanctification et la vie éternelle, y compris la participation à sa gloire, à la seule condition qu’il le reçoive comme son Dieu et son Sauveur, et, se confiant en Lui seul pour le salut, qu’il s’efforce honnêtement de faire le sien volonté; c’est-à-dire aimer Dieu de tout son cœur et son prochain comme lui-même, et faire aux autres ce qu’il voudrait qu’on lui fasse. À la vue de toutes ces vérités, Dieu demande : « Qu’est-ce qui aurait pu être fait de plus à ma vigne que je n’y ai pas fait ? » Toutes les ressources de la puissance morale sont épuisées dans la Bible. Toutes les considérations qui peuvent affecter l’intellect, la conscience, les sentiments et les espérances de l’homme y sont présentées, mais tout cela en vain.
Il y a deux conditions nécessaires à la production d’un effet donné. Celui c’est que la cause doit avoir l’efficacité requise ; et l’autre, que le l’objet sur lequel il agit doit avoir la susceptibilité requise. Le soleil et la pluie répand ses influences bienfaisantes sur un désert, et il reste un désert ; quand ces influences tombent sur une plaine fertile, elle est revêtue de toutes les merveilles de la fertilité et la beauté des légumes. L’éclat du soleil de midi n’a plus effet sur les yeux des aveugles qu’un cône ; et si l’œil est ensanglanté, le La lumière la plus claire ne lui permet de voir les hommes que comme des arbres qui marchent. Il en est ainsi de la morale VÉRITÉ : Quel que soit son pouvoir inhérent, il n’a aucun effet salutaire à moins que l’esprit auquel il est présenté ne soit en état de le recevoir.
L’esprit des hommes, depuis la chute, n’est pas en état de recevoir la le pouvoir transformateur et salvateur des vérités de la Bible ; et c’est pourquoi il est nécessaire, afin de faire de la Parole de Dieu un moyen efficace de salut, qu’elle soit accompagnée de la puissance surnaturelle du Saint-Esprit. Le L’Apôtre dit expressément : « L’homme naturel ne reçoit pas les choses de l’Esprit de Dieu, car elles sont folie pour lui ; et il ne peut pas les connaître, parce qu’elles sont discernées spirituellement. » (1 Corinthiens ii. Dans le chapitre précédent, il avait dit que le même évangile qui, pour les appelés, était la puissance et la sagesse de Dieu, était pour les Juifs une pierre d’achoppement, et pour les Grecs une folie. Notre Seigneur dit aux Juifs : « Pourquoi ne comprenez-vous pas mon discours ? même parce que vous ne pouvez pas entendre ma Parole. Celui qui est de Dieu entend Les paroles de Dieu : vous ne les écoutez donc pas, parce que vous n’êtes pas de Dieu. (Jean viii. 43, 47.) Tout ce que les Écritures enseignent sur l’état des hommes depuis la chute prouve que jusqu’à ce qu’ils soient éclairés par le Saint-Esprit, ils sont spirituellement aveugles, incapable de discerner la vraie nature des choses de l’Esprit, et donc incapable de recevoir d’eux l’impression qu’elle mérite.
L’expérience confirme cet enseignement de la Bible. Il montre qu’aucun simple pouvoir moral de la vérité, tel qu’il est présenté objectivement à l’esprit, n’est d’aucune utilité pour changer le cœur des hommes. Il apparut jadis sur la terre une personne divine revêtue de notre nature ; Exposer la perfection de l’excellence morale sous la forme d’une vie humaine : sainte, inoffensive, sans souillure, et séparés des pécheurs ; humble, désintéressée, bienfaisante, tendre, patient, persévérant et dispensant des bénédictions à tous ceux qui s’approchaient de lui. Pourtant, cette personne était pour les hommes de sa génération sans forme ni beauté. Il est venu à lui-même, et les siens ne l’ont pas reçu. Ils l’ont rejeté et lui ont préféré une meurtrier. Et en quoi sommes-nous meilleurs qu’eux ? Comment le Christ est-il considéré par la masse des hommes de cette génération. Des multitudes blasphèment contre Lui. La majorité des à peine pensez-vous à Lui. Il n’est pour eux que Socrate ou Platon. Et pourtant il y a en Lui une telle révélation de la gloire de Dieu, qu’elle contraindrait tout cœur humain à l’aimer et à l’adorer, si le dieu de ce monde n’avait pas aveuglé les yeux de ceux qui ne croient pas. Il est donc vain de parler de la puissance morale de la vérité qui convertit les hommes.
Il y en a qui jettent un voile sur cette doctrine rationaliste, et se bercent d’illusions, ainsi que les autres, en croyant qu’ils se tiennent sur plus de que les rationalistes, parce qu’ils admettent que l’Esprit est dans la vérité. Chaque théiste croit que Dieu est partout présent dans le monde et qu’il soutient et coopère toujours avec les causes physiques dans la production de leurs divers effets. Ainsi l’Esprit est dans le monde, partout présent et partout actif, coopérant avec les causes morales dans le monde. produisant leurs effets légitimes. Il n’y a rien dans l’action des causes physiques qui transcende leurs effets légitimes ; et il n’y a rien dans la régénération, la conversion et la sanctification des hommes qui transcende les effets légitimes de la vérité morale. L’une des séries d’effets est tout aussi naturelle et aussi peu surnaturelle que l’autre. On a déjà montré, à la page précédente, que c’est là tout ce qu’exigent les rationalistes les plus avancés. Il exclut les surnaturel, c’est tout ce qu’ils demandent. Dans les effets produits par les guidées par l’efficacité providentielle de Dieu, il n’y a rien qui excède la puissance de ces causes ; et dans les effets produits par la morale puissance de la vérité sous la coopération de l’Esprit, il n’y a rien qui dépasse le pouvoir de la vérité. Le salut de l’âme est tout autant une processus comme la croissance d’une plante. Les Écritures enseignent clairement qu’il y a une opération de l’Esprit sur l’âme antérieure à l’influence sanctifiante de la vérité, et nécessaire pour rendre cette influence efficace. Un mort doit être ramené à la vie, avant que les objets des sens puissent produire sur lui leur effet normal. Ceux qui sont spirituellement morts doivent être vivifiés par la toute-puissance de Dieu, avant que les choses de l’Esprit puissent produire l’effet qui leur convient. Ceux qui sont spirituellement aveugles doivent avoir les yeux ouverts avant de pouvoir discerner les choses qui leur ont été librement données, ou révélées, par Dieu. Cette influence étant antérieure à la vérité, elle ne peut pas être à travers elle. C’est pourquoi nous trouvons de nombreux des prières dans toutes les parties des Écritures pour cette œuvre antérieure de l’Esprit ; prières pour que Dieu change les cœurs, ouvre les yeux et ouvre les oreilles des hommes; ou qu’il leur donnerait des oreilles pour entendre et des yeux pour voir. L’Esprit est Partout représenté comme un agent personnel, distribuant ses dons à chacun individuellement comme Il le veut. Il éveille leur attention, contrôle leurs jugements, et éveille leurs affections. Il les convainc du péché, de la justice et du jugement. Il œuvre dans le peuple de Dieu à la fois pour vouloir et pour faire. Il enseigne, guide, réconforte et fortifie. Son influence ne se limite pas à une seule activité produisant un changement initial, puis laissant le changement renouvelé l’âme aux influences de la vérité et des ordonnances. Il est permanent. Ce n’est cependant pas l’influence d’une force agissant uniformément et coopérant avec la vérité ; mais celle d’une personne, agissant quand et où il lui plaît ; plus à un moment qu’à un autre, tantôt d’une manière, tantôt d’une autre. C’est un « Aide » que l’on peut invoquer, ou que l’on peut attrister et auquel on peut résister. Toutes ces représentations de l’Écriture, qui sont tout à fait incompatibles avec la doctrine purement rationaliste, aussi bien qu’avec la doctrine qui confond les opérations de l’Esprit avec l’efficacité providentielle de Dieu, ou les considère comme analogues, se sont imprimées dans la conscience générale de l’Église. Tous les béliever sent qu’il se tient devant l’Esprit Saint dans la relation qu’une personne entretient avec une autre : une personne dont elle dépend pour tout bien ; dont l’assistance doit être sollicitée, et dont l’assistance peut être accordée ou refusée à titre amovible ; et qui peuvent venir ou se retirer soit pour une saison, soit pour toujours. Telle a été la foi de l’Église dans tous les temps, comme le montrent ses credo, ses hymnes et ses prières. Bien que tous les chrétiens admettent que l’efficacité providentielle de Dieu s’étend à toutes ses œuvres, et que tout le bien dans l’homme déchu est dû à la présence et à la puissance de son Saint-Esprit, ils ont cependant toujours senti et cru, sous la direction de Dieu. des Écritures, que l’activité divine dans ces différentes sphères est tout à fait différent. Les sphères elles-mêmes sont différentes ; les fins à atteindre sont différentes ; et le mode de fonctionnement est différent. Dans la nature (surtout dans le monde extérieur), Dieu agit par la loi ; Son efficacité providentielle est une « potentia ordinata » ; dans la grâce, c’est plutôt une « potentia absoluta ». sans entrave par la loi. Elle est personnelle et souveraine. Il n’agit pas continuellement ou d’une manière ou d’une autre ; mais comme il l’entend. Il travaille en nous « à la fois pour vouloir et pour faire de son bon plaisir. (Phil, ii. 13.) Par conséquent, comme nous venons de le faire remarquer, Le chrétien ne se sent pas dépendant de la loi, mais de la bonne volonté d’une personne. De là les prières si fréquentes dans l’Ecriture, et si constamment sur les lèvres des croyants, que l’Esprit ne nous rejetterait pas ; ne nous abandonnerait pas ; Est-ce que ne pas être attristé par notre ingratitude ou notre résistance : mais qu’il vienne à nous, nous éclaire, nous purifie, nous élève, nous fortifie, nous guide et nous console ; qu’il viendrait dans nos maisons, renouvellerait nos enfants, visiterait nos églises et multiplierait ses convertis comme les gouttes de la rosée du matin ; et qu’Il donnerait partout l’effet de la Parole de Dieu.
Cette souveraineté dans les opérations de l’Esprit est ressentie et reconnue par chaque parent, par chaque pasteur et par chaque missionnaire. C’est le dessein révélé de Dieu qu’il soit reconnu. « Voyez vos frères, dit l’Apôtre ; Ce ne sont pas les sages, les grands, les bons, mais les insensés, ceux qui n’ont aucune importance, que Dieu a choisis afin « qu’aucune chair ne se glorifie en sa présence ». (1 Corinthiens i. 26-29.) Il ne doit être permis à aucun homme d’attribuer sa conversion ou son salut à lui-même, à la loi ou à l’efficacité des moyens. Elle est entre les mains de Dieu. C’est de Lui que tout homme est en Jésus-Christ. (1 Corinthiens i. 30.) De la même manière, il donne ou retient les influences de l’Esprit de telle sorte que chaque ministre de l’Évangile, comme les apôtres eux-mêmes, devrait sentir et reconnaître que son succès ne dépend pas de sa dignité officielle, ou de sa fidélité, ou de son habileté dans l’argumentation, ou de son pouvoir de persuasion, mais simplement et uniquement de la démonstration de l’Esprit. donné ou retenu comme bon lui semble. Comment se fait-il que si peu de gens se soient convertis sous le ministère du Christ, et tant de milliers sous celui des Apôtres ? Comment se fait-il qu’une expérience semblable ait marqué toute l’histoire de l’Église ? La seule réponse biblique ou rationnelle que l’on puisse donner à cette question est : « C’est ainsi, Père, car c’est ainsi qu’il a semblé bon à tes yeux. » Nous savons, en effet, que la souveraineté de l’Esprit est déterminée dans son action par des raisons infiniment sages et bonnes ; et nous savons que le fait qu’il refuse de coopérer est souvent judiciaire et punitif ; qu’il abandonne les individus, les églises, les communautés et les nations qui ont péché en perdant leur jour de grâce. Il est important que nous nous souvenions que, en vivant sous la dispensation de l’Esprit, nous dépendons absolument d’une personne divine, qui donne ou refuse son influence comme il le veut ; qu’il peut être attristé et offensé ; qu’il faut le reconnaître, le craindre et lui obéir ; que sa présence et ses dons doivent être humblement et sincèrement recherchés, et chéris assidûment, et que c’est à Lui que doivent être attribuées toutes les pensées justes et les bons desseins, toute la grâce et la bonté, toute la force et le réconfort, et tout le succès dans le gain des âmes à Christ.
L’office de la Parole comme moyen de grâce.
Les chrétiens ne rapportent donc pas la puissance salvifique et sanctifiante des Écritures à la puissance morale des vérités qu’elles contiennent ; ou à la simple coopération de l’Esprit d’une manière analogue à la manière dont Dieu coopère avec toutes les causes secondes, mais à la puissance de l’Esprit en tant que personne divine agissant avec et par la vérité, ou sans elle, selon qu’il le juge bon dans son souverain plaisir. Bien que la lumière ne puisse rendre la vue aux aveugles, ni guérir les maladies des organes de la vue, elle est néanmoins essentielle à tout exercice du pouvoir de la vision. La Parole est donc essentielle à tous les saints exercices de l’âme humaine.
Dans tout acte de vision, il y a trois conditions essentielles : 1. Un objet. 2. Lumière. 3. Un œil dans un état sain ou normal. Dans tous les cas ordinaires, c’est tout ce qui est nécessaire. Mais quand l’objet à voir a l’attribut de la beauté, une quatrième condition est essentielle à sa juste appréhension, à savoir que l’observateur ait un discernement esthétique ou un goût naturel ou acquis. Deux hommes peuvent voir la même œuvre d’art. Les deux ont le même objet devant eux et la même lumière autour d’eux. L’un et l’autre voient de la même manière tout ce qui affecte l’organe de la vision ; mais l’un peut voir une beauté que l’autre ne voit pas ; Le même objet produit donc sur eux des effets très différents. Celle qu’elle ravit, élève et affine ; l’autre, il le laisse indifférent s’il ne le dégoûte pas. Ainsi, lorsque notre Seigneur béni était sur la terre, la même personne s’en alla parmi le peuple ; la même Parole retentissait à leurs oreilles ; et les mêmes actes de puissance et d’amour ont été accomplis en leur présence. La majorité l’a haï, tourné en dérision et finalement crucifié. D’autres ont vu en Lui la gloire du Fils unique de Dieu, plein de grâce et de vérité. Ceux-ci l’aimaient, l’adoraient, l’adoraient et mouraient pour Lui. Sans la révélation objective de la personne, des doctrines, de l’œuvre et du caractère de Christ, L’expérience intérieure de ses disciples avait été impossible. Mais cette révélation extérieure aurait été, et a été en fait pour la plupart des intéressés, tout à fait vaine, sans le pouvoir du discernement spirituel. Il est donc clair ce qu’est l’office de la Parole, et ce qu’est celui du Saint-Esprit dans l’œuvre de sanctification. La Parole présente les objets à voir et la lumière par laquelle nous voyons ; c’est-à-dire qu’il contient les vérités par lesquelles l’âme est sanctifiée, et qu’il transmet à l’esprit la connaissance intellectuelle de ces vérités. Ces deux éléments sont essentiels. L’œuvre de l’Esprit est avec l’âme. Que par nature est spirituellement mort ; il faut l’accélérer. Il est aveugle ; Il faut lui ouvrir les yeux. C’est dur ; il faut l’adoucir. L’œuvre gracieuse de l’Esprit est de donner la vie, d’ouvrir les yeux et d’adoucir le cœur. Quand cela est fait, et en proportion de la mesure dans laquelle cela est fait, le Verbe exerce son influence sanctifiante sur l’âme.
Il s’agit d’un la doctrine claire de la Bible et le fait de l’expérience que la vérité, lorsqu’elle est discernée spirituellement, a ce pouvoir transformateur. Paul était plein d’orgueil, de malignité et de mépris pour Christ et son Évangile. Quand l’Esprit lui a ouvert les yeux pour contempler la gloire de Christ, il est instantanément devenu un homme nouveau. L’effet de cette vision, non pas la vision miraculeuse de la personne du Fils de Dieu, mais l’appréhension spirituelle de sa majesté et de son amour divins, dura pendant la vie de l’apôtre et durera toute l’éternité. Le même Apôtre nous enseigne donc que c’est en contemplant la gloire du Christ que nous sommes transformés à son image, de gloire en gloire, par l’Esprit du Seigneur. (2 Corinthiens iii. 18.) C’est pourquoi les Écritures représentent si constamment l’état céleste, comme la vue de Dieu. C’est la vision béatifique de la gloire divine, dans toute son éclat, dans la personne du Fils de Dieu, qui purifie, ennoblit et ravit l’âme ; remplissant toutes ses capacités de connaissance et de bonheur. C’est ainsi que nous sommes sanctifiés par la vérité ; c’est par le discernement spirituel des choses de l’Esprit, lorsqu’il ouvre, ou, comme le dit Paul, éclaire les yeux de notre intelligence. Nous apprenons ainsi comment nous devons utiliser les Écritures pour faire l’expérience de leur pouvoir sanctifiant. Nous devons les sonder avec diligence, afin de connaître les vérités qui y sont révélées ; nous devons avoir ces vérités autant que possible toujours devant l’esprit ; et nous devons prier avec ferveur et constamment pour que l’Esprit nous ouvre les yeux, afin que nous puissions voir des choses merveilleuses de sa loi. Peu nous importe combien les vérités de l’Écriture peuvent être excellentes ou puissantes, si nous ne les connaissons pas. Peu importe à quel point nous pouvons les connaître, si nous n’y pensons pas. Et il importe peu que nous pensions d’eux, si nous ne pouvons pas les voir ; et nous ne pouvons pas les voir à moins que l’Esprit n’ouvre les yeux de notre cœur.
Nous voyons aussi à partir de ce sujet pourquoi la Bible représente comme le grand devoir du ministère de proclamer la Parole de vie ; par la manifestation de la vérité pour se recommander à la conscience de tout homme, aux yeux de Dieu. C’est tout ce qu’ils ont à faire. Ils doivent prêcher la Parole à temps et à contretemps, que les hommes entendent, ou qu’ils s’abstiennent. Ils savent que l’Évangile qu’ils prêchent est la puissance de Dieu pour le salut, et que s’il est caché, il est caché à ceux qui sont perdus, en qui le Dieu de ce monde a aveuglé l’esprit de ceux qui ne croient pas, de peur que la lumière de l’Évangile glorieux de Christ, qui est l’image de Dieu, ne le fasse. devrait briller pour eux. (2 Corinthiens iv. 4.) Paul peut planter et Apollos arroser, mais Dieu seul peut donner l’augmentation.
Outre cette puissance sanctifiante générale de la Parole de Dieu, lorsqu’elle est discernée spirituellement, il faut encore remarquer qu’elle est le moyen de susciter toutes les pensées, tous les sentiments, tous les desseins et tous les actes saints. Même un l’âme sans aucune vérité devant elle, serait dans l’obscurité vide. Il serait à l’état d’un enfant régénéré : ou à l’état d’un enfant à naître par rapport au monde extérieur ; ayant des yeux et des oreilles, mais rien pour appeler ses facultés de la vue et de l’ouïe à l’exercice. Il est évident que nous ne pouvons avoir aucun sentiment rationnel de gratitude, d’amour, d’adoration et de crainte envers Dieu, si ce n’est en vue des vérités révélées à Son sujet dans sa Parole. Nous ne pouvons avoir ni amour ni dévotion pour Christ, si ce n’est dans la mesure où la manifestation de son caractère et de son œuvre est acceptée par nous comme vraie. Nous ne pouvons avoir de foi qu’elle n’est fondée sur une promesse révélée de Dieu ; aucune résignation ou soumission, si ce n’est en vue de la sagesse et de l’amour de Dieu et de sa providence universelle, tels qu’ils sont révélés dans les Écritures ; il n’y a pas d’anticipation joyeuse de la béatitude future qui ne soit fondée sur ce que l’Évangile fait connaître d’un état d’existence futur. La Bible est donc essentielle à l’existence consciente de la vie divine dans l’âme et à tous ses exercices rationnels. Le chrétien ne peut pas plus vivre sans la Bible que son corps ne peut vivre sans nourriture. Le La Parole de Dieu, c’est du lait et de la viande forte, c’est comme de l’eau pour ceux qui ont soif, c’est du miel et c’est du rayon de miel.
Cette doctrine a déjà été brièvement et peut-être suffisamment discutée dans une page précédente ;1 Elle ne saurait cependant être négligée à juste titre à cet égard. Les luthériens sont d’accord en paroles avec les rationalistes et les remontrants, lorsqu’ils se réfèrent à l’efficacité de la Parole de Dieu dans l’œuvre de sanctification à la puissance inhérente de la vérité. Mais les rationalistes ne lui attribuent pas plus de pouvoir que celui qui appartient à toute vérité morale ; une telle vérité est, de par sa nature, adaptée pour former le caractère et influencer la conduite des créatures raisonnables, et comme les vérités de la Bible sont de l’ordre et de la plus haute importance, elles sont disposées à leur concéder un degré proportionné de pouvoir. Les luthériens, d’autre part, enseignent, — Premièrement, que la puissance de la Parole qui est inhérente et constante, et qui lui appartient par sa nature même de La Parole de Dieu est surnaturelle et divine. Deuxièmement, que son efficacité n’est due à aucune influence de l’Esprit, qui l’accompagne à certains moments et non à d’autres, mais uniquement à sa propre vertu inhérente. Troisièmement, que ses effets diversifiés ne sont pas dus à la La parole a plus de pouvoir à un moment qu’à un autre ; ou qu’elle soit accompagnée d’un degré plus ou moins grand de l’influence de l’Esprit, mais des différentes manières dont il est reçu. Le Christ, dit-on, guérissait ceux qui avaient la foi pour être guéris. Il disait souvent : « Qu’il vous soit fait selon votre foi » ou « Ta foi t’a sauvé ». Ce n’est pas parce qu’il y avait plus de puissance dans la personne de Christ quand la femme a touché son vêtement, qu’à d’autres moments, qu’elle a été guérie, mais à cause de sa foi. Quatrièmement, que l’Esprit n’opère jamais de manière salvatrice sur l’esprit des hommes, si ce n’est par et dans la Parole. Luther dans les Articles de Smalcald dit : « Constanter tenendum est, Deum nemini Spiritum vel gratiam suam largiri nisi per verbum et cum verbo externo et præcedente, ut ita præmuniamus nos adversum enthusiastas, c’est-à-dire spiritus, qui jactitant se ante verbum et sine verbo Spiritum habere. » 1 Et dans le Grand Catéchisme,2 il dit : « In summa, quicquid Deus in nobis facit et operatur, tantum externis istius modi rebus et constitutionibus operari dignatur. » Luther alla jusqu’à rapporter même l’inspiration des prophètes au « verbum vocale », ou parole extérieure.3
1 Voir vol. II. p. 656 f.
1 11. viii. 3 : Hase , Libri Symbolici, 184G, p. 331.
2 iv. 10 ans Hase, p. 540.
3 Voir les articles de Smalcald, n. viii. 10, 11 : « Quare in hoe nobis est, constante ! » perseve-randum, quod Beus non velit nobiseum aliter agere, nisi per vocale verbum et sacramenta, et quod, quidquid sine verbo et sacramentis jaetatur, ut spiritus, sit ipse diabolus. Nan! Deus etiam Mosi voluit apparere per rubum ardentem et vocale verbum. Et nullus propheta, sive Elias, sive Elisæus, Spiritum sine deealogo sive verbo voeali aecepit. » Hase, p. 333.
Cependant, comme nous l’avons déjà remarqué, cette puissance divine du Verbe ne doit pas être rapportée à la seule puissance morale de la vérité. Sur ce point, les théologiens luthériens sont parfaitement explicites. Ainsi Quenstedt4 dit : « Verbum Dei non agit solum persuasiones morales, proponendo nobis objeetum amabile ; sed vero, reali, divino et ineffabili influxu potentiæ suæ gratiosæ. » Cet afflux de puissance divine, cependant, n’est pas quelque chose d’occasionnel, donnant à la parole une puissance à un moment qu’elle n’a pas à un autre. C’est quelque chose d’inhérent et de permanent. Quenstedt dit5 : « Verbo Dei virtue divina non extrinsecus in ipso usu demum accedit, sed .... in se et per se, intrinsice ex divina ordinatione et eommunicatione, effieacia et vi conversiva et régénératrice præditum est, etiam ante et extra omnem usum. » Et Hollaz6 dit qu’il a ce pouvoir « propter mysticam verbi cum Esprit !! Saneto unionem intimam et individuam. »
4 Theologia Dldactico-Polemica, I. iv. ii. quæst. xvi. Ιχθισις, 4 ; édit. Leipzig, 1715, p. 248.
5 Idem. I. iv. ii. quæst. κνί. fontes si.lutionum, 7 ; p. 2G8.
6 Examen Theoluyicum Acroamaticum, 111. ii. 1, quæst. 4 ; édit. Leipzig, 17G3, p. 392.
Le professeur Schmid, d’Erlangen, dans son " Dogmatik der evangelisch-lutherischen Kirche « , cite le principal luthérien théologiques leurs points de vue sur ce sujet. Hollaz, par exemple, dit que cette « vis divina » est inséparablement unie au Verbe ; que la Parole de Dieu ne peut être conçue sans l’Esprit ; que si le Saint-Esprit pouvait être séparé de la Parole, ce ne serait pas la Parole de Dieu, mais la parole de l’homme. Quenstedt dit que l’action du Verbe et de l’Esprit est une et indivisible. Baier dit :1 " Nempe eadem ilia infinita virtus, quæ essentialiter, per se et independenter in Deo est, et per quam Deus homines illuminât et convertit, verbo communicata est : et tanquam verbo communicata, divina tamen, hie spectari debet. » Une distinction, dit Quenstedt, doit être faite entre les instruments naturels, tels que le bâton de Kloses, ou la verge d’Aaron, dont Dieu se sert pour produire des effets surnaturels, et ceux-là : comme la Parole et les sacrements, qui sont « sua essentia supernaturalia ..... Illa indigent novo motu et elevatione nova ad effectum novum ultra propriam suam et naturalem virtutem producendum ; hæc vero a prima institutione et productione sufficient !, hoc est, divina et summa vi ac efficacia prædita sunt, nec indigent nova et peculiar ! aliqua elevatione ultra efficaciam ordinariain, jamdum ipsis inditam adprodu-cendum spiritualem effectum.» 2 Si la Parole n’est pas toujours efficace, ce n’est pas parce qu’elle est accompagnée d’une plus grande puissance dans un cas que dans un autre, mais à cause de la différence dans l’état moral de ceux à qui elle est présentée. Sur ce point, Quenstedt dit : « Quanquam itaque effectus Verbi divini prædicati nonnunquam impediatur, efficacia tamen ipsa, seu virtus intrinseca a verbo tolli et separari non potest. Et ita per accidens fit ineffieax, non potentiæ defect!, sed malitiæ motu, quo ejus operatio impeditur, quo minus effectum suuin assequatur. » 3 Un morceau de fer incandescent de chaleur, s’il est mis en contact avec quelque chose de facilement combustible, produit une conflagration immédiate. S’il est mis en contact avec une roche, il produit peu d’effet sensible. Ainsi la Parole de Dieu, pleine de puissance divine, lorsqu’elle est présentée à un esprit, régénère, convertit et sanctifie, et lorsqu’elle est présentée à un autre, elle la laisse telle qu’elle était, ou ne fait qu’exaspérer le mal de sa nature. Il est vrai que ces théologiens disent que l’opération de la Parole n’est pas physique, comme dans le cas de l’opium, du poison ou du feu ; mais morale, illustrando mentem, commovendo voluntatem, etc. Néanmoins, l’illustration tient en ce qui concerne le point principal. La Parole a un pouvoir inhérent, divin et constant. Il produit différents effets selon l’état subjectif de ceux sur qui il agit. L’Esprit n’agit ni sur eux ni sur lui plus à un moment qu’à un autre.
1 Compendium Théologies Positives, Prolegg. II. XXXIX. d; éditer. Francfort et Leipzig 1739, p. 106.
2 Quenstedt, Theologia, I. iv. ii. quæst. χνΐ. « χθ«σ1ί, 7, ut supra, p. 249.
3 Ibid., quæst. xvi. 9. Le
1. Il est évident que cette théorie particulière n’est pas soutenue par l’Écriture. La Bible dit en effet que la Parole de Dieu est rapide et puissante ; que c’est la sagesse de Dieu et la puissance de Dieu ; et qu’elle convainc, convertit et sanctifie. Mais la Bible dit aussi que le Christ a donné à ses apôtres le pouvoir de faire des miracles ; et qu’ils allaient çà et là en communiquant le Saint-Esprit par l’imposition des mains, guérissant les malades et ressuscitant les morts. Mais le pouvoir n’était pas en eux. Pierre s’indigna d’une telle imputation. « Pourquoi nous regardez-vous avec tant d’insistance, dit-il au peuple, comme si, par notre propre puissance ou par notre sainteté, nous avions fait marcher cet homme ? » Si les miracles accomplis par les apôtres n’ont pas prouvé que la puissance était en eux, les effets produits par la Parole ne prouvent pas que la puissance est en elle.
2. Cette doctrine est incompatible avec les représentations constantes des Écritures, qui présentent l’Esprit comme accompagnant la Parole et lui donnant effet, tantôt plus et tantôt moins ; travailler avec et par la vérité comme Il l’entend. C’est incompatible avec le commandement de prier pour l’Esprit. Les hommes n’ont pas l’habitude de prier pour que Dieu donne au feu le pouvoir de brûler ou à la glace de se refroidir. Si l’Esprit était toujours en union mystique et indissoluble avec le Verbe, lui donnant la puissance divine inhérente, il n’y aurait pas de convenance à prier pour son influence comme l’ont fait les Apôtres, et comme l’Église de tous les temps l’a toujours fait et continue de le faire.
3. Cette théorie nous coupe de tout rapport avec l’Esprit et de toute dépendance à son égard en tant qu’agent volontaire personnel. Il ne vient jamais ; Il n’y va jamais ; Il n’agit pas à un moment plus qu’à un autre. Il a imprégné la Parole de la puissance divine et l’a envoyée dans le monde. C’est là que s’arrête son libre arbitre. Dieu a donné à l’opium son pouvoir narcotique, et à l’arsenic son pouvoir de corroder l’estomac, et il les a laissés aux hommes pour qu’ils en usent ou en abusent comme bon leur semble. Au-delà de leur donner leurs propriétés, il n’a rien à voir avec les effets qu’ils produisent. L’Esprit n’a donc rien à voir avec la conviction, la conversion ou la sanctification du peuple de Dieu, ni avec le fait de l’éclairer, de le consoler ou de le guider, si ce n’est de donner une fois pour toutes à sa Parole la puissance divine. Voilà, les hommes peuvent l’utiliser ou la négliger à leur guise. L’Esprit ne les incline pas à l’utiliser. Il n’ouvre pas leurs cœurs, comme Il a ouvert le cœur de Lydie, pour recevoir la Parole. Il n’éclaire pas leurs yeux pour qu’ils voient les merveilles de la loi.
4. Les luthériens n’attribuent pas la puissance divine aux paroles visibles, ni aux sons audibles prononcés, mais à la vérité que ces signes conventionnels sont le moyen de communiquer à l’esprit. Ils admettent que cette vérité, bien qu’elle ait en elle un pouvoir divin inhérent, ne produit jamais aucun effet surnaturel ou spirituel à moins qu’elle ne soit correctement utilisée. Ils admettent aussi que cet usage approprié inclut l’appréhension intellectuelle de sa signification, l’attention et le but de croire et d’obéir. Pourtant, ils croient en la régénération infantile. Mais si les enfants sont incapables d’utiliser la Parole ; et si l’Esprit n’opère jamais que dans la Parole et par son usage, comment est-il possible que les enfants puissent être régénérés. Si donc la Bible enseigne que les enfants sont régénérés et sauvés, elle enseigne que l’Esprit opère non seulement avec et par la Parole, mais aussi sans elle, quand, comment et où il le juge bon. Si Christ n’a guéri que ceux qui avaient la foi pour être guéris, comment a-t-il guéri les enfants ou ressuscité les morts ?
5. La théorie en question est contraire à l’Écriture, en ce qu’elle suppose que la raison pour laquelle un homme est sauvé et un autre non, est simplement que l’un résiste à la puissance surnaturelle de la Parole et qu’un autre ne le fait pas. La raison pour laquelle l’un résiste se réfère à son propre libre arbitre. La raison pour laquelle l’autre ne résiste pas, n’est pas référée à une influence particulière, mais à sa propre volonté impartiale. Notre-Seigneur, cependant, enseigne que ceux-là ne viennent à Lui que ceux qui Lui sont donnés par le Père ; que viennent ceux qui, en plus de l’enseignement extérieur de la Parole, sont intérieurement enseignés et attirés par Dieu. L’Apôtre enseigne que le salut n’est pas de celui qui veut ou de celui qui court, mais de Dieu qui fait miséricorde. La doctrine luthérienne bannit, et a pour but de bannir, toute souveraineté dans la distribution de la grâce salvatrice, des dispensations de Dieu. Pour ceux qui croient que cette souveraineté est imprimée de façon indélébile dans les doctrines de la Bible et dans l’histoire de l’Église et du monde, cette objection est suffisante en elle-même. La croyance pratique commune des chrétiens, quelles que soient leurs théories, est qu’ils ne sont pas chrétiens parce qu’ils sont meilleurs que les autres hommes ; non pas parce qu’ils coopèrent à la grâce commune et suffisante donnée à tous les hommes ; non pas parce qu’ils y cèdent, tandis que d’autres résistent à l’opération de la Parole divine ; mais parce que Dieu, dans sa souveraine miséricorde, les a rendus disposés au jour de sa puissance ; de sorte qu’ils sont tous disposés à dire du fond du cœur : « Ce n’est pas à nous, SEIGNEUR, ce n’est pas à nous, mais à ton nom que donne gloire. »
6. Cette doctrine luthérienne est incompatible avec l’expérience des croyants individuellement et collectivement. Le jour J de la Pentecôte, qu’est-ce qui est tombé sur les Apôtres et sur les frères assemblés avec eux ? Ce n’était pas un « verbum vocale », pas un son de mots ; et pas de nouvelle révélation extérieure. L’Esprit de Dieu Lui-même a éclairé leurs esprits et leur a permis de se souvenir et de comprendre tout ce que Christ avait enseigné, et ils parlaient à tous les hommes, selon que l’Esprit (et non la Parole) leur donnait de s’exprimer. Il y avait là une manifestation claire de l’action de l’Esprit directement sur l’esprit des apôtres. Dire que les effets qui se manifestaient alors étaient dus à la puissance divine inhérente aux paroles du Christ ; et qu’ils aient résisté à cette puissance jusqu’au jour de la Pentecôte, puis qu’ils aient cédé à son influence, c’est une hypothèse incroyable. Il ne rendra pas compte des faits de l’affaire. D’ailleurs, notre Seigneur a promis d’envoyer l’Esprit après son ascension. Il ordonna aux disciples de rester à Jérusalem jusqu’à ce qu’ils soient imprégnés de la puissance d’en haut. Quand l’Esprit est venu, ils ont été instantanément éclairés, dotés d’une connaissance plénière de l’Évangile et de dons miraculeux. Comment le " verbum vocale " pourrait-il transmettre le don des langues, ou le don de guérison. Qu’entend-on, selon la théorie luthérienne, être rempli du Saint-Esprit ? ou, par le séjour de l’Esprit ? ou, par le témoignage de l’Esprit ? ou, par la démonstration de l’Esprit ? ou, par l’onction du Saint qui enseigne toutes choses ? ou, par l’effusion de l’Esprit ? En bref, toute la Bible, et en particulier l’histoire évangélique et les épîtres du Nouveau Testament, représente l’Esprit Saint non pas comme une puissance emprisonnée dans la vérité, mais comme un agent personnel et volontaire agissant avec la vérité ou sans elle, comme il lui plaît. C’est comme tel qu’il a toujours été considéré par l’Église, et qu’il s’est toujours manifesté dans ses relations avec les enfants de Dieu.
7. Luther, tout glorieux et charmant qu’il était — et il est certainement l’une des figures les plus grandes et les plus attrayantes de l’histoire ecclésiastique — était impulsif et susceptible d’être poussé aux extrêmes.1 Les enthousiastes de son époque sous-estimaient les Écritures, prétendant à des révélations privées et à des impulsions spirituelles directes, leur communiquant la connaissance des vérités révélées dans la Bible, et une règle d’action supérieure à celle de la Parole écrite. Cette doctrine était une vanne par laquelle toutes sortes d’erreurs étaient commises et les extravagances se répandirent parmi le peuple et menacèrent le renversement de l’Église et de la société. Contre ces enthousiastes, tous les réformateurs élevèrent la voix, et Luther les dénonça avec la véhémence qui les caractérisait. En opposition à leurs prétentions, il a pris le parti que l’Esprit n’a jamais opéré sur l’esprit des hommes que par la Parole et les sacrements ; et, comme il tenait la conversion des pécheurs pour le plus grand de tous les miracles, il était forcé d’attribuer la puissance divine au Verbe. Il ne s’est pas contenté de prendre le parti que l’Église en général a pris, à savoir que, tandis que la Parole et les sacrements sont les canaux ordinaires de l’influence de l’Esprit, il s’est laissé libre d’agir avec ou sans ces moyens ou tout autre, et quand il fait de nouvelles révélations aux individus, elles sont authentifiées aux autres par des signes. et des miracles, et des dons divers ; et que dans tous les cas, quelque authentifiés qu’ils soient, ils doivent être jugés par la Parole écrite comme la seule règle infaillible de foi ou de pratique ; de sorte que si un apôtre ou un ange du ciel prêche un autre évangile que celui que nous avons reçu, il sera déclaré maudit. (Gal. i. 8.) « Nous sommes de Dieu : » disait l’apôtre Jean, « celui qui connaît Dieu nous écoute ; celui qui n’est pas de Dieu ne nous écoute pas. C’est par là que nous connaissons l’esprit de vérité et l’esprit d’erreur. (1 Jean iv. 6.) Les Écritures enseignent que non seulement le Saint-Esprit, mais aussi les autres esprits, bons et mauvais, ont accès à l’esprit des hommes et contrôlent plus ou moins efficacement leurs opérations. Des instructions sont donc données dans la Bible pour nous guider dans la distinction entre le vrai et le faux.
1 Nul ne connaît Luther qui n’ait lu assez fidèlement les cinq volumes in-octavo de ses lettres, rassemblés et édités par De Wette. Ceux-ci montrent non seulement sa puissance, sa fidélité et son courage, mais aussi sa douceur, son désintéressement et sa simplicité enfantine, ainsi que sa joie et son humour.
Le pouvoir des hommes individuels, qui apparaissent dans des moments spéciaux, sur la foi et le caractère des générations futures, est quelque chose de prodigieux. De ces « contrôleurs du monde », du moins à l’époque moderne, il n’y en a aucun qui puisse être comparé à Martin Luther, Ignace de Loyola et John Wesley. Bien que si différents les uns des autres, chacun a laissé son empreinte sur des millions d’hommes. Notre seule sécurité contre l’influence faillible ou pervertissante de l’homme, c’est en entier, la soumission inconditionnelle à la Parole infaillible de Dieu.
§ 2. Les Sacrements. Leur nature.
1. Dans l’usage classique, le mot " sacramentum " signifie, en général, quelque chose de sacré. Dans les procédures judiciaires, l’argent déposé par les parties en conflit était appelé « sacramentum », car lorsqu’il était confisqué, il était utilisé à des fins sacrées. Ea pecunia, quæ in judicium venit in litibus, sacramentum un sacro. « Sacramentum æs significat, quod pœnæ nomine penditur, sivc eo quis interrogatur sivc contenditur. » Ensuite, dans un sens secondaire, il s’agissait d’un processus judiciaire. Dans l’usage militaire, il exprimait l’obligation du soldat envers son chef ou son pays ; puis le serment par lequel il était lié ; et généralement un serment ; de sorte que, dans le langage courant, " sacramentum dicere " signifiait jurer.1
1 Freund’s Lateinische Wôrterbuch.
2. L’usage ecclésiastique du mot était influençable par diverses circonstances. D’après son étymologie et sa signification, il s’appliquait à tout ce qui était sacré ou consacré. Puis à tout ce qui avait une signification sacrée ou cachée. En ce sens, il s’appliquait à tous les rites et cérémonies religieuses. Cela le rattachait au mot grec μυστηρων, qui signifie proprement un secret, quelque chose à la connaissance duquel l’homme doit être initié. C’est pourquoi, dans la Vulgate, " sacramentum " est utilisé comme traduction de μυστήριον dans Éphésiens i. 9 et iii. 9, v. 32 ; Colossiens i. 27 ; 1 Timothée iii. 16 ; Apocalypse i. 20, xvii. 7. Il a donc été utilisé au sens large pour tout signe qui avait une portée secrète. C’est ainsi qu’Augustin dit : 2 « Nimis autem longum est, eonvenienter disputare de varietate signorum, quæ cum ad res divinas pertinent, sacramenta appellantur. » Et il dit encore : 3 « Ista fratres dicuntur sacramenta, quia in eis aliud videtur, aliud intelligitur. Quod videtur speciem habet eorporalem, quod intelligitur, fructum ] !abet spiritualem. » Tous les rites et cérémonies religieuses, le signe de la croix, l’onction d’huile, etc., étaient donc appelés sacrements. Augustin appelle souvent l’exposition mystique ou allégorique de l’Écriture, un sacrement. Jérôme4 dit : « Sacramenta Dei sunt prædicare, benedieere ac confirmare, communionem reddere, visitare infirmos, orare. 5 Lombard dit : « Sacramentum est sacræ rei signum. »6
2 Epistola cxxxviii. (5) : IForfo, édit. Bénédictines, Paris, 1836, t. VII. p. 615, ch.
3 Sermo cclxxii. (16); Ibid., vol. V, p. 1614, b, ch.
4 IKorZrs, tom. IX, p. 53. (?)
5 Voir Gerhard, Loci Theologici, xix. i. §§ 6, 9 ; édit. Tübingen, 1768, t. VIII. p. 204 et 205.
6 Lombard, Magist er Sententiarum, lib. iv. dist. i. B. édit. ( ?) Année 1472.
L’usage théologique et la définition du mot.
3. Il est évident que la signification du mot « sacrement » est si large et son usage si relâché, qu’il n’y a guère d’aide à apporter dérivé de l’une ou l’autre de ces sources en fixant définitivement sa signification dans la théologie chrétienne. C’est pourquoi les théologiens ont rapidement commencé à formuler des définitions plus ou moins exactes du mot, dérivées des enseignements du Nouveau Testament sur le sujet. Les deux plus simples et les plus généralement acceptées de ces définitions sont l’une d’Augustin et l’autre de Pierre Lombard. Le premier dit :7 « Acceclit verbum ad elementum, et fit sacramentum ; » le second :1 « Sacramentum est invisibilis gratiæ visibilis forma. » Ces définitions sont cependant trop vagues.
7 Dans Joannis Evangelium Tractatus, Ixxx. 3 ; Œuvres, édit. Bénédictines, Paris, 1837, t. III, p. 2290, a.
1 Lombard, ut supra.
Il est évident que la seule méthode sûre et satisfaisante pour arriver à l’idée d’un sacrement, dans le sens chrétien du mot, est de prendre les ordonnances qui, d’un commun accord, sont admises comme sacrements, et de déterminer en les analysant quels sont leurs éléments ou caractéristiques essentiels. Nous devrions alors exclure de la catégorie toutes les autres ordonnances, humaines ou divines, dans lesquelles ces caractéristiques ne se trouvent pas. Le baptême et la Cène du Seigneur sont admis comme sacrements. Ils sont (1.) Ordonnances instituées par le Christ. (2.) Ils sont par leur nature significatifs, baptême de purification ; le Repas du Seigneur de nourriture spirituelle. (3.) Ils ont été conçus pour être perpétuels. (4.) Ils étaient établis pour signifier et pour instruire ; de sceller, et donc de confirmer et de fortifier ; et de transmettre ou d’appliquer, et ainsi de sanctifier, ceux qui les reçoivent par la foi. C’est sur ce principe que se fonde la définition d’un sacrement donnée dans les normes de notre Église. « Un sacrement, dit-on, est un saint sacrement. l’ordonnance instituée par le Christ ; dans laquelle, par des signes sensibles, Christ et les bienfaits de la Nouvelle Alliance sont représentés, scellés et appliqués aux croyants.» 2
2 Catéchisme abrégé de Westminster, quête. Débloquer le niveau 92.
C’est dans le même sens que les autres symboles réformés parlent. Par exemple, la Deuxième Confession helvétique dit : « Sunt sacramenta symbola mystica, vel ritus sancti, aut sacræ actiones, a Deo ipso institutæ, constantes verbo suo, signis, et rebus significatis, quibus in ecclesia summa sua bénéficia, homini exhibita, retinet in memoria, et subinde rénovât, quibus item promissiones suas obsignât, et quæ ipse nobis interius præstat, exterius repræsentat, ac veluti oculis contemplanda subiicit, adeoque fidem nostram, Spiritu Dei in cordibus nostris opérante, roborat et auget : quibus denique nos ab omnibus aliis populis et religionibus separat, sibique soli consecrat et obligat, et quid a nobis requirat, significat. » 3
3 xix. ; Niemeyer , Collectio Confessionum, Leipzig, 1840, p. 512.
La définition donnée dans le Catéchisme de Genève est qu’un sacrement est « externa clivinæ erga nos benevolentiæ testificatio, quæ visibili signo spirituales gratias figurât, ad obsignandas cordibus nostris Dei promissiones, quo earum veritas melius confirmetur ». 4
4 v. de sacramentis ; Ibid. , p. 100.
Le Catéchisme de Heidelberg dit que les sacrements sont « sacra et in oculos incurrentia signa, ac sigilla, ob earn causam a Deo instituta, ut per ea nobis promissioiiein Evangelii magis déclarât et obsignet : quod scilicet non universis tantum, verum etiam singulis credentibus, propter unicum illud Christi sacrificium in cruce peractum, gratis donet remissionem peccatorum, et vitam æternam. » 1
1 IXVI. ; Niemeyer, p. 444.
Les trente-neuf articles de l’Église d’Angleterre enseignent2 que « les sacrements ordonnés par le Christ ne sont pas seulement des insignes ou des signes de la profession des hommes chrétiens ; mais ils sont plutôt des témoins sûrs et des signes efficaces de la grâce et de la volonté de Dieu envers nous, par laquelle il agit invisiblement en nous, et non seulement vivifie, mais fortifie et confirme notre foi en lui.
2 L’art. xxv.
La définition luthérienne des sacrements s’accorde en tous points essentiels avec celle des Églises réformées. Dans la Confession d’Augsbourg, ses auteurs disent : « De usu sacramentorum docent, quod sacramenta instituta sint, non modo ut sint notæ professionis inter homines, sed magis ut sint signa et testimonia voluntatis Dei erga nos, ad excitandam et confirmandam fidem in his, qui ntuntur, proposita. Itaque utendum est sacramentis ita, ut fides accedat, quæ credat promi ssionibus, quæ per sacramenta exhibentur et ostenduntur.» 3
3 I. XIII. 1, 2; Hase, Leipzig, 1846, p. 13.
Dans l’Apologie de cette confession, il est dit : « Si sacramenta vocamus ritus, qui habent mandatum Dei, et quibus addita est promissio gratiæ, facile est judicare, quæ sint proprie sacramenta. Nam ritus ab hominibus instituti non erunt hoc modo proprie dicta sacramenta. Non est enim auctoritatis humanæ, promittere gratiam. Quare signa sine mandato Dei instituta, non sunt certa signa gratiæ, etiamsi fortasse rudes docent, aut admonent aliquid. » 4
4 vii. 3; Hase, p. 200.
« Dicimus igitur ad sacramenta proprie sic dicta duo potissimum requin, videlicet verbum et elementum, juxta vulgatum illud Augustin ! : ' Acccdit verbum ad elementum, et fit sacramentum.' Fundamentum hujus adsertionis ex ipsa natura et fine sacraraentorum pendet, cum enim sacramenta id, quid in verbo evangelii prædicatur, externo clemento vestitum sensibus ingerere debeant, ex co sponte sequitur, quod nec verbum sine elemento, nec elemen-turn sine verbo constituât sacramentum. Per verbum intelligitur primo mandatum atque institutio divina, per quam elementum . . . . separatur ab usu communi, et destinatur usui sacramen-tali ; deinde promissio atque ea quidem evangelio propria, per sacramentum adplicanda et obsignanda. Per elementum non quodvis, sed certum et verbo institutionis expressum accipitur. » 1 Sur tout cela, les réformés et les luthériens sont d’accord. Les différences entre eux par rapport aux sacrements ne concernent pas leur nature.
1 Gerhard , Loci Theologici, xix. 2. § 11 ; éditer. Tübingen, 17G8, t. VIII. , p. 207.
La doctrine distinctive de l’Église romaine à ce sujet est que les sacrements contiennent la grâce qu’ils signifient, et que cette grâce est transmise « ex opere operato ». C’est-à-dire qu’ils ont une vertu inhérente et objective réelle, qui les rend efficaces pour communiquer les avantages de l’épargne à ceux qui les reçoivent. Dans un certain sens, ces mots peuvent être utilisés pour exprimer la doctrine luthérienne ; mais cette doctrine diffère de la doctrine romaniste, comme on le verra quand l’efficacité des sacrements sera établie considéré. Le langage du concile de Trente à ce sujet est : « Si quis dixerit sacramenta novæ legis non continere gratiam, quam significatif ; aut gratiam ipsam non ponentibus obicem non confère ; quasi signa tantum externa sint accept® per fidem gratia ?, vel justitiæ, et not® quædam Christian® professionis, quibus apud homines discernuntur fideles ab infidelibus ; anathème, assieds-toi.» 2
2 Sess. vu. De sacramentis in genere, canon 6 ; Streitwolf, t. I, p. 39.
Le Catéchisme romain définit un sacrement comme suit : « Rem esse sensibus subjectam, qu® ex Dei institutione sanctitatis et justitiæ turn significand®, turn efficiend® vim habet ». 3 Comme la tâche dévolue au Concile de Trente était de présenter et d’harmoniser les doctrines élaborées par les Scolastiques en opposition aux doctrines des Réformateurs, les définitions et les explications données par les écrivains du Moyen Âge jettent autant de lumière sur les décrets du Concile que les exposés des théologiens ultérieurs de l’Église latine. Sur ce point, Thomas d’Aquin dit : « Oportet, quod virtus salutifera a divinitate Christi per ejus humanitatem in ipsa sacramenta derivetur ..... Sacramenta ecclesi® specialiter habent virtutem ex passionc Christi, cujus virtus quodammodo nobis copulatur per susceptionem sacramentorum.» 4 Encore : « Ponendo quod sacramentum est instrument ali s causa grati®, necesse est simul ponere, quod in sacramento sit quædam virtus instrumentalis ad inducendum sacramentalem effectum..... Sicut virtus instrumentalis acquiritur instrumenta, ex hoc ipso quod movetur ab agente principal !, ita et sacramentum consequitur spiritualem virtutem ex benedictione Christi et applicatione ministri ad usum sacrament !. » C’est ainsi que l’opinion de Thomas lui-même fut adoptée, par le Concile, par opposition à celle des Scotistes à laquelle Thomas se réfère, à propos de lui : « Illi qui ponunt quod sacramenta non causant gratiam, nisi per quandam concomitantiam ponunt quod in sacramento non sit aliqua virtus, quæ operetur ad sacramenti effectum, est tan !en virtus divina sacramento assistons, quæ sacramentalem effectum operatur.» 1 C’est à peu près la doctrine de l’Église réformée à ce sujet. L’illustration de Bellarmin est que, de même que le feu est la cause de la combustion lorsqu’il est mis en contact avec des matériaux appropriés, de même les sacrements produisent leur effet par leur propre vertu inhérente. « Exemplum, dit-il, esse potest in re natural !. Si ad ligna comburenda, primum exsiccarentur ligna, deinde excuteretur ex silice, turn applicaretur ignis ligno, et sic tandem fieret combustio ; nemo diceret, causant immediatam combustionis esse siccitatem aut excussionem ignis ex silice aut applicationem ignis ad ligna, sed solum ignem, ut cansam primariam, et solum calorem sen calefactionem, ut cansam instrumentalem. » 2
3 it. i. quæst. G (x. 11) ; Streitwolf, t. I, p. 241.
4 Summa, in. IXII. 5 ; éditer. Cologne, 1G40, p. 129, b, de la quatrième série.
1 Thomas d’Aquin, ut supra, Ixii. 4 ; p. 129, a.
2 Bellarmin, De sacramentis, 11. i. ; Disputationes, Paris, 1608, t. III, p. 109, a.
« Jam vero sacramenta gratiam, quam significatif, continere, eamque conferre virtute sibi insita, sen ex opere operato, Scripturæ, patres, constansque Ecclesiæ sensus traditionalis luculentissime docent. » 3 Selon les romanistes, le sacrement est donc une ordonnance divine qui a le pouvoir inhérent ou intrinsèque de conférer la grâce qu’elle signifie.
3 Joannes Perrone , Prœlectiones Theologicœ, De Sacramentis in genere, n. i. 39 ; édit. Paris, 18G1, t. II. p. 221, a.
Il a déjà été démontré que c’était la tendance des remontrants d’éliminer, autant que possible, l’élément surnaturel du christianisme. Ils ont donc considéré que les Les sacrements ne sont pas proprement des moyens de grâce, mais des rites significatifs destinés à faire connaître la vérité à l’esprit, laquelle vérité exerçait son influence morale sur le cœur. « Sacramenta cum dici-mus, extemas ecclesiæ ceremonias sen ritus illos sacros ac solennes intelligimns, quibus veluti fœderalibus signis ac sigillis visibili-bus, Deus gratiosa bénéficia sua, in fœdere præsertim evangelico promissa, non modo nobis repræsentat et adumbrat, sed et certo modo exhibet atque obsignat : nosque vicissim pa]am publiceque declaramus ac testamur, nos promissiones omnes divinas vera, firma atque obsequiosa fide amplecti, et bénéficia ipsius jugi et grata semper memoria celebrare velle. » 1
1 Confessio Remonstrantium, xxiii. 1 ; Episcopii Opera, édit. Rotterdam, 1665, vol. ii. p. 92, a, de la deuxième série.
« Restât, ut dicamus, Deum gratiam suam per sacramenta nobis exhibere, non earn actu per ilia conferendo ; sed per ilia tanquam signa clara ac evidentia earn repræsentando et ob oculos ponendo non eminus aut sub figuris quibusdam tanquam multo post futuram, sed tanquam præsentem : ut ita in signis istis tanquam in speculo quodam, exhibitionem illam gratiæ, quam Deus nobis concessit, quasi conspiciamus. Estque haec efficacia nulla alia quam objectiva, quæ requirit facultatem cognitivam rite dispositam, ut apprehendere possit illud, quod signum objective menti offert. Hine videmus, quomodo sacramenta in nobis operentur, nimirum tanquam signa repræsentantia menti nostræ rem cujus signa sunt. Neque alia in illis quæri debet efficacia. » 2
2 Limborch , Theologia Christiana, v. Ixvi. 31, 32 ; édit. Amsterdam, 1715, p. 606, b.
Zwingle seul des réformateurs semble enclin à cette conception des sacrements : « Sunt .... sacramenta, dit-il, signa vel ceremoniæ, pace tamen omnium dicam, sive neotericorum sive veterum, quibus se homo Ecclesiæ probat aut candidatum aut militem esse Christi, redduntque Ecclesiam totam potius certiorem de tua fide quam te. Si enim fides tua non aliter fuerit absoluta, quam ut signo cérémonial ! egeat, fides non est : fides enim est, qua nitimur misericordiæ Dei inconcusse, firmiter ct indistracte, ut multis locis Paulus habet. » 3 Ailleurs, il dit : « Credo, imo scio omnia sacramenta, tarn abesse ut gratiam conférant, ut ne adferant quidem aut dispensent..... Dux autem vel vehiculum Spiritui non est necessarium, ipse enim est virtue et latio qua cuncta feruntur, non qui fern opus habeat : neque id unquam legimus in scripturis sacris, quod sensibilia, qualia sacramenta sunt, certo secum ferrent Spiritum, sed si sensibilia unquam lata sunt cum Spiritu, jam Spiritus fuit qui tulit, non sensibilia. Sic cum ventus vehemens ferretur, simul adferebantur linguæ venti virtute, non ferebatur ventus virtute linguarum. » 4 Il est évident que tout ce que Zwingle dit ici des sacrements, pourrait être dit de la Parole de Dieu ; et, par conséquent, s’il prouve quelque chose, il prouve que les sacrements ne sont pas des moyens de grâce ; il prouve la même chose en ce qui concerne la Parole, à laquelle les Écritures attribuent un rôle si important dans la sanctification et le salut des hommes.
3 De Vera et Falsa Religione, Œuvres, édit. Schuler et Schultess, Turici, 1832, t. III, p. 231.
4 Ad Carolum Rom. Imperatorem, Fidei Huldrychi Zwinglii Ratio, § 7 ; Collectio Confessionuni de Niemeyer , p. 24.
Si l’on prend le mot sacrement dans le sens large où il était utilisé dans l’Église primitive pour tout rite religieux significatif, il est évident qu’aucune limite précise ne peut être fixée à leur nombre. Si l’on restreint la parole aux ordonnances divines qui répondent aux conditions qui caractérisent le baptême et la Cène du Seigneur, il est évident qu’elles sont les seuls sacrements sous la dispensation chrétienne ; et tel est le point de vue de tous les protestants. Il est vrai que dans l’Apologie de la Confession d’Augsbourg, il est dit : « Vere sunt sacramenta, baptismus, Cœna Domini, absolutio, quæ est sacramentum pœnitentiæ. Nam hi ritus habent mandatum Dei et promissionem gratiæ, quæ est propria Novi Testament !. » Ce dernier fut bientôt retiré de la liste des sacrements, bien que les luthériens aient conservé la confession en tant qu’institution distincte de l’Église. La confession, cependant, devait être générale, une énumération des péchés n’étant pas requise, et l’absolution qui suivait était simplement déclarative, et non judiciaire, comme chez les romanistes. Les symboles réformés exigeaient une confession privée à Dieu et une confession générale dans l’assemblée du peuple ; et recommandée dans des cas extraordinaires, lorsque la conscience est accablée ou l’esprit perplexe, la confession privée au pasteur ou au conseiller spirituel.
Les romanistes ont sept sacrements, qui s’ajoutent au baptême et à la Cène du Seigneur, au mariage, aux ordres, à la pénitence, à la confirmation et à l’extrême-onction. Le mariage, cependant, bien qu’il soit une institution divine, n’a pas été ordonné pour signifier, sceller et appliquer aux croyants les bienfaits de la rédemption, et par conséquent, n’est pas un sacrement. On peut dire la même chose des commandes. Et quant à la confirmation, à la pénitence et à l’extrême-onction, dans le sens où les romanistes emploient ces termes, ce ne sont pas du tout des institutions divines.
En effet, la confirmation, c’est-à-dire l’introduction des baptisés dans l’enfance, à la pleine communion dans l’Église, fut instituée de bonne heure et longtemps continuée parmi les protestants aussi bien que parmi les romanistes. Ceux qui avaient été baptisés dans l’enfance avaient leur position dans l’Église sur la base de la profession de foi et des engagements pris en leur nom, par leurs parents ou leurs parrains. Lorsqu’ils arrivèrent à l’âge de discernement, ils furent interrogés sur leurs connaissances et leur conduite, et s’ils étaient trouvés instruits avec compétence et exempts de scandale, ils assumaient l’obligation de leurs vœux de baptême sur eux-mêmes, et leur appartenance à l’Église était confirmée. Dans tout cela, Cependant, il n’y avait rien de sacramentel.
Ce simple service, les romanistes l’ont élevé au rang de sacrement. La « matière », disent-ils, c’est l’onction d’huile, ou l’imposition des mains ; ou, comme le disent Thomas d’Aquin et Bellarmin, les deux se sont unis. Perrone fait de l’onction l’essentiel. Le don ou la grâce transmise, ex opere operato, est l’influence surnaturelle du Saint-Esprit, qui permet à celui qui le reçoit d’être fidèle à ses vœux baptismaux. L’administrateur doit être un prélat, car seuls les prélats sont les successeurs officiels des apôtres, et, par conséquent, ils ne sont que des prélats. avoir le pouvoir de transmettre l’Esprit Saint par l’imposition des mains, ce qui était une des prérogatives de l’apostolat.
Les romanistes font la distinction entre la « pœnitentia », le repentir ou la pénitence, en tant que vertu et en tant que sacrement. En tant que vertu, elle consiste dans la tristesse du péché, dans la détermination de l’abandonner, et dans un but « ad sui vindictam in compensationem injuriæ Deo per peccatum illatæ » ; c’est-à-dire un dessein de satisfaire Dieu. En tant que sacrement, c’est une ordonnance instituée par le Christ pour la rémission des péchés commis après le baptême, par l’absolution d’un prêtre ayant juridiction. La matière du sacrement est l’acte du pénitent, y compris la contrition, la confession et la satisfaction. La forme est l’acte d’absolution de la part du prêtre. Par contrition, on entend le chagrin ou le remords. Il n’est pas nécessaire que cette contrition soit autre chose qu’un exercice ou un état d’esprit naturel, par opposition à un gracieux ; ou, comme l’expriment les romanistes, il n’est pas nécessaire que la contrition soit caritate perfccta. La confession incluse dans ce sacrement assumé doit être auriculaire ; elle doit comprendre tous les péchés mortels ; Un péché non confessé n’est pas pardonné. Cette confession est déclarée nécessaire au salut par le Concile de Trente. « Si quis negaverit, confessionem sacramentalem vol institutam, vel ad salutem necessarian ! esse jure divino ; aut dixerit, Secret modum ! confitcndi soli sacerdoti, quem Ecclesia catholica ab initio semper observavit, et observât, alienum esse ab institutione et mandate Christi, et inventum esse humanum ; anathème, assieds-toi.» 1 Dans le péché, il y a à la fois un « reatus culpæ » et un « reatus pœnæ ». La première, ainsi que la peine de la mort éternelle, est supprimée par l’absolution ; mais le reatus pœnæ quant à la peine temporelle, à endurer soit dans cette vie, soit dans le purgatoire, subsiste ou peut subsister. D’où la nécessité de la satisfaction pour le péché dans le sens que nous venons d’indiquer. L’absolution accordée par le prêtre n’est pas seulement déclaratoire, mais judiciaire et effective. Sur ce point, l’Église romaine enseigne : « 1° Christum delere peccata sacerdotum ministerio ; 2° sacerdotes sedere judices in tribunali pœnitentiæ ; 3° illorum sententiam ratam in cœlis esse ; 4° sacerdotes hac potestate præstare angelis et archangelis ipsis. » 2 Cette doctrine qu’aucun péché réel, commis après le baptême, ne peut être pardonné s’il n’est pas confessé à un prêtre ; que le prêtre a le pouvoir de remettre ou de retenir ; qu’il porte à sa ceinture les clefs non seulement de l’Église visible sur la terre, mais encore du ciel et de l’enfer ; et qu’il ouvre et que personne ne ferme, et qu’il ferme et que personne n’ouvre, est l’un des maillons les plus forts de la chaîne par laquelle l’Église de Rome conduit captives les âmes des hommes. Il n’est pas étonnant qu’elle dise que le pouvoir d’un prêtre est au-dessus de celui même des anges et des archanges.
1 Sess. xiv. canon G ; Streitwolf, t. I, p. G8.
2 Perrone, Prœlectiones Theologicœ, De Pœnîtentîa, V. i. 155 ; édit. Paris, 1861, t. II. p. 351, a.
Ordres ou l’ordination est faite sacrement, parce qu’elle est instituée ou commandée par le Christ, et parce que c’est là que le pouvoir surnaturel de consacrer le corps et le sang du Christ et de pardonner les péchés est conféré. Il est ainsi défini : « Ordo sacer et sacramentum divinitus institutum, quo tribuitur potestas consecrandi corpus et sanguinem Domini, nec non remittendi et retinendi peccata. » À ce sujet, le concile de Trente dit : « Si quis dixerit, per sacram ordinationem non dari Spiritum Sanctum, ac proinde frustra episcopos dicere : Accipe Spiritum Sanctum ; aut per earn non imprimi characterem ; vel eum, qui sacerdos semel fuit, laicuni rursus fieri posse ; anathème, assieds-toi.» 3 Le droit et le pouvoir d’ordonner appartiennent exclusivement aux prélats, car eux seuls possèdent la prérogative apostolique de communiquer l’Esprit Saint par l’imposition des mains. Les apôtres, cependant, n’avaient que le pouvoir de communiquer des dons miraculeux. Ils ne prétendaient ni ne prétendaient exercer le pouvoir de conférer les influences sanctifiantes ou salvatrices de l’Esprit. De même que l’Église de Rome revendique pour son clergé un pouvoir bien supérieur à celui des anges ou des archanges, de même elle revendique pour ses évêques des pouvoirs qui dépassent de loin ceux des apôtres.
3 Sess. xxiii. canon 4 ; Streitwolf, t. I, p. 88.
Le mariage est déclaré sacrement parce que, bien qu’il n’ait pas été institué par le Christ, il a été fait par lui le symbole de l’union mystique entre l’Église et son chef divin, et parce que, par sa célébration en bonne et due forme, la grâce divine est conférée aux parties contractantes. Il est ainsi défini : « Sacramentum novæ legis, quo significatur conjunctio Christi cum Ecclesia, et gratia confertur ad sanctificandam viri et mulieris legitimam conjunetionem, ad uniendos arctius conjugum animos, atque ad prolem pie sancteque in virtutis officiis et fide Christiana instituendam ».1
1 Perrone, ul supra, De Matrimonio, 1. vol. II, p. 407.
Il s’agit d’un sacrement dans lequel, par l’onction d’huile (per unctionem olei benedicti) et la prière dans la forme prescrite, par le ministère d’un prêtre, la grâce est conférée aux baptisés dangereusement malades, par laquelle les péchés sont remis et la force de l’âme est augmentée. « Si quis dixerit, sacram infirmorum unctionem non conf erre gratiam, nec remittere peccata, nec alleviare infirmes ; sed jam cessasse, quasi olim tantum fuerit gratia curationum ; anathème, assieds-toi. « Si quis dixerit, presbyteros Ecclesiæ, quos B. Jacobus adducendos esse infirmum inunguendum hortatur, non esse sacerdotes ab Episcopo ordinatos, sed ætate seniores, in quavis communitate ; ob idque proprium extremæ unctionis ministrum non esse solum sacerdotem ; anathème, assieds-toi.» 2
2 cône. Trident, sess. xiv. « De sacramento extremæ unctionis », can. 2, 4; Streitwolf, t. I, p. 70, 71.
Raisons de fixer le nombre des sacrements à sept.
C’est une œuvre de surérogation pour les romanistes que d’assigner une raison quelconque au nombre des sacrements sept, ni plus ni moins, autre que la décision de l’Église. Si l’Église est infaillible, son jugement sur la question est décisif ; S’il n’est pas infaillible, aucune autre raison n’est d’aucune utilité. Ils admettent qu’il n’y a pas d’autorité de l’Écriture sur ce point, et sur aucun sujet en litige entre eux et les protestants, on ne peut faire appel avec moins de raison au témoignage de la tradition. C’est pourquoi les théologiens romains, tout en prétendant être d’un commun accord à l’appui de leur doctrine sur ce sujet, se servent de tous les secours collatéraux qu’ils peuvent commander. Thomas d’Aquin dit qu’il y a une analogie entre la vie naturelle et la vie spirituelle de l’homme. Il est né ; il est fortifié ; il est nourri ; il a besoin de moyens pour se remettre d’une maladie ; il a besoin de propager sa race ; de vivre sous la direction d’une autorité; et de se préparer à son départ de ce monde. Les sacrements pourvoient à toutes ces nécessités de sa vie spirituelle. Il est né dans le baptême ; fortifié par la confirmation ; nourri par la Cène du Seigneur ; guéri d’une maladie spirituelle par la pénitence ; l’Église est continuée par le saint mariage ; le sacrement de l’Ordre fournit au chrétien un guide surnaturellement doué ; et l’extrême-onction le prépare à la mort. Ainsi, par les sept sacrements, tous ses besoins spirituels sont satisfaits.
D’autre part, comme il y a sept vertus cardinales, il devrait y avoir sept sacrements. D’ailleurs sept est un nombre sacré : il y a sept jours dans la semaine ; une année sur sept était sabbatique ; et il y avait sept chandeliers d’or et sept étoiles dans la main droite du Christ. Il n’est donc pas étonnant qu’il y ait sept sacrements. Il est évident que tout cela n’aboutit à rien. Les deux sacrements institués par le Christ dans le but précis de « signifier, sceller et appliquer aux croyants », les bienfaits de la rédemption, sont seuls dans le Nouveau Testament. Aucune autre ordonnance n’a les mêmes caractéristiques ni la même conception. En admettant donc que les Pères et l’Église aient été unanimes à appeler sacrements un certain nombre d’autres institutions sacrées, cela ne prouverait pas qu’elles appartiennent à la même catégorie que le baptême et la Cène du Seigneur.
Il est cependant notoire qu’un tel consentement général ne peut être invoqué en faveur des sept sacrements des romanistes. Les faits simples à ce sujet sont les suivants : — (1.) Comme nous l’avons déjà remarqué, dans l’Église primitive, tout rite sacré était appelé sacrement. Puis leur nombre était indéfini. (2) La prééminence du baptême et de la Cène du Seigneur sur tous les autres rites sacrés étant reconnue, ils furent appelés, comme par Augustin, le principal Sacrements. (3.) Quand l’attention a été attirée sur le fait qu’il y a quelque chose de vrai dans le baptême et la Cène du Seigneur, ce qui n’est vrai d’aucune autre ordonnance ou rite sacré, qu’eux, et eux seuls, des cérémonies extérieures, ont été désignés pour être des « moyens de grâce », alors ils ont été déclarés dans cette lumière comme étant les seuls sacrements chrétiens. C’est ainsi que parlent d’eux4 Justin Martyr,1 Cyrille de Jérusalem,2 et Augustin3. (4.) Au fur et à mesure qu’un esprit ritualiste se développait dans l’Église, on supposait d’abord qu’un rite, puis un autre, était considéré comme un « moyen de grâce », mais pas toujours les mêmes rites, et ainsi le nombre de sacrements augmentait. (5) Pendant des siècles, cependant, aucun nombre défini n’a été admis par quelque chose qui ressemble à un consentement général. Certains ont fait le numéro trois ; le Pseudo Denys, au VIe siècle, en a fait six. Pierre Damiani, l’ami de Grégoire VII, en fit douze. Ratherius, évêque de Vérone († 974), Fulbert, évêque de Chartres († 1028), Bruno, évêque de Wurtzbourg († 1045), Rupert, abbé de Deutz († 1135), n’admettait que le baptême et la Cène du Seigneur ; d’autres, comme Théodulf, évêque d’Orléans († 821), Agobard, évêque de Lyon († 840), Lanfrane, évêque de Cantorbéry († 1089). Hildebert, évêque de Tours († 1134), Hugo, de Saint-Victor († 1141), les appellent « duo sanctæ ecelesiæ sacramenta. » 5 (6.) Il est certain, dit l’auteur que nous venons de citer, que Pierre Lombard (†1164) est le premier qui ait énuméré les sept sacrements tels qu’ils étaient tenus par les romanistes. Il ne donne aucune raison de se fixer sur le nombre sept ; mais ce qui était déjà présent dans la sainteté traditionnelle, attribuée à ce nombre. Il était considéré comme le symbole de l’universalité et de la perfection. C’était suffisant pour décider d’un nombre arbitraire. Ce qui vient d’être dit suffit à montrer que les romanistes n’ont même aucune raison plausible d’en appeler au consentement commun à l’appui de leur doctrine sur ce sujet. Un tel appel à leur théorie n’est pas nécessaire. Si l’Église est infaillible, et si l’Église témoigne que Le Christ a ordonné que le mariage, l’extrême-onction, etc., soient des sacrements ; Ce témoignage est décisif. Mais si l’Église, au sens papal du mot, est tout le contraire de l’infaillible, alors son témoignage, en ce qui concerne la foi des chrétiens, n’est rien.
1 Apologie 1 [11.] Prune d’AdAntoninum, G5, GG ; Œuvres, édit. Commelinus, Heidelberg, 1593, p. 7G.
2 Calecliesis Myslagogicœ Quinque, Schram, Analysis Patrum, Augsbourg, 1789, t. X, p. 250-2G8.
3 Enarratio in Psalmum ciii. 14 ; ! Forts, édit. Bénédictins, Paris, 183G, t. IV. p. 1G2G, d.
4 Perrone dans ses Prœlectiones Theologian, De Sacramentis in genere, i. 14 ; édit. Paris, 18G1, t. II, p. 217 ; s’y réfère et tente d’expliquer les faits.
5 Iléal-Encyclopédie de Herzog, art. Saeramente, t. XIII, p. 241. L’auteur de l’article détaillé de Herzog se réfère à l’examen approfondi de cette question dans la Dis-sertation de (1. L. Hahn, intitulé, Doc.lrinœ Rom. de numéro Sacramcntorum septenario rationes historicœ,Nxnüs\. Année 1859.
§ 4. L’efficacité des sacrements.
Doctrine zwinglienne et remontrante.
D’après la doctrine de Zwingle, adoptée par la suite par les remontrants, les sacrements ne sont pas proprement des « moyens de grâce ». Ils n’ont pas été ordonnés pour signifier, sceller et appliquer aux croyants les bienfaits de la rédemption du Christ. Ils étaient en effet destinés à être des emblèmes significatifs des grandes vérités de l’Évangile. Le baptême avait pour but d’enseigner la nécessité pour l’âme d’être purifiée de la ceinture par le sang de Christ et purifiée de la souillure du péché par le renouvellement du Saint-Esprit. Ils étaient en outre conçus pour être des mémoriaux perpétuels de l’œuvre de la rédemption, et surtout pour être le moyen par lequel les hommes devraient, aux yeux de l’Église et du monde, se déclarer chrétiens. De même qu’un païen, lorsqu’il désirait être admis dans la communauté d’Israël, recevait la circoncision, qui était le sceau divinement désigné de l’alliance abrahamique, de même la participation aux sacrements chrétiens était le moyen désigné pour la profession publique de foi en Christ. Paul présente la question sous cet angle dans 1 Corinthiens x. 15-22, où il soutient que la participation aux rites sacrés d’une religion implique une profession de cette religion, qu’elle soit chrétienne, juive ou païenne. Les sacrements sont donc « les insignes de la profession des hommes chrétiens ». Cette doctrine, cependant, ne leur attribue rien d’autre que ce que Zwingle appelle dans le passage cité ci-dessus, « une puissance objective », c’est-à-dire la présentation objective de la vérité qu’ils signifient à l’esprit.
« Ex quibus hoc colligitur sacramenta dan in testimonium publicum ejus gratiæ, quæ cuique private prius adest..... Ob hanc causam sacramenta, quæ sacræ sunt cerimoniæ (accedit enim verbum ad elementum et fit sacramentum), religiose colenda, hoc est in precio habenda, et honorifice tractanda sunt, ut enim gratian ! facere non possunt, Ecclesiæ apprivoisé !! nos visibilité !־ sociant, qui prius invisibiliter sumus in illam recepti, quod cum simul cum promissionis divinæ verbis in ipsorum actione pronunciatur ac promulgate !־, sunima religione suscipiendum est. » 1 Dans son traité de la vraie et de la fausse religion, Zwingle dit : « Impossible est, ut res aliqua externa fidem hominis internal !! confirm et et stabiliat. » 2 Et encore il dit3 que les sacrements, comme les autres mémoriaux, peuvent ne produisent que de la foi historique, mais non religieuse. Zwingle, dans l’usage d’un tel langage, avait sans doute plus devant l’esprit un objet négatif qu’un objet affirmatif. Il était plus déterminé à nier la doctrine romaine de la puissance inhérente des sacrements qu’à affirmer quoi que ce soit de leur efficacité réelle. Néanmoins, il est vrai que Zwingle a toujours été considéré comme tenant la doctrine la plus basse concernant les sacrements de tous les réformateurs. Ils n’étaient pas plus pour lui un moyen de grâce que l’arc-en-ciel ou les monceaux de pierres sur les bords du Jourdain. Par leur signification et par association, ils pouvaient suggérer la vérité et éveiller les sentiments, mais ils n’étaient pas des canaux de communication divine.
1 Zwinglii Fidei Ratio, Niemeyer, t. I, p. 25, 26.
2 Œuvres, édit. Schuler und Schultess.( ?) Voir Strauss, Dogmatik, t. II, p. 519.
3 Expositio Christianes Fidei, 70 ; Niemeyer, t. I, p. 49.
Doctrine de l’Église réformée.
Le premier point clairement enseigné à ce sujet dans les Symboles de l’Église réformée, c’est que les sacrements sont des moyens réels de grâce, c’est-à-dire des moyens désignés et employés par le Christ pour avoir transmis les bienfaits de sa rédemption à son peuple. Ils ne sont pas, comme l’enseignent les romanistes, les canaux exclusifs ; Mais ce sont des canaux. Une promesse est faite à ceux qui reçoivent correctement les sacrements qu’ils seront ainsi et par là rendus participants des bénédictions dont les sacrements sont les signes et les sceaux divinement désignés. Le mot grâce, quand nous parlons des moyens de la grâce, comprend trois choses. 1er. Un don immérité, comme la rémission des péchés. 2d. L’influence surnaturelle du Saint-Esprit. 3d. Les effets subjectifs de cette influence sur l’âme. La foi, l’espérance et la charité, par exemple, sont des grâces.
Le deuxième point de la doctrine réformée sur les sacrements concerne la source de leur pouvoir. Sur ce sujet, il est enseigné négativement que la vertu n’est pas en eux. Le mot vertu est bien sûr utilisé ici dans son sens latin pour le pouvoir ou l’efficacité. Ce qui est nié, c’est que les sacrements soient la cause efficiente des effets gracieux qu’ils produisent. L’efficacité ne réside pas dans les éléments, dans l’eau utilisée dans le baptême, ou dans le pain et le vin utilisés dans la Cène du Seigneur. Ce n’est pas dans les actions sacramentelles ; soit en donnant, soit en recevant les éléments consacrés. Ni l’un ni l’autre ne la vertu ou l’efficacité dues aux sacrements ne résident ou ne découlent de la personne par laquelle ils sont administrés. Il ne réside pas dans son bureau. Il n’y a pas de pouvoir surnaturel dans l’homme, en vertu de sa fonction, pour rendre les sacrements efficaces. Leur efficacité ne dépend pas non plus du caractère de l’administrateur aux yeux de Dieu ; ni sur son intention ; c’est-à-dire son dessein de les rendre efficaces. L’homme qui administre les sacrements n’est pas un faiseur de miracles. Les Apôtres et d’autres à ce moment-là dans l’Église, étaient pouvoir surnaturel ; et il fallait qu’ils voulussent l’exercer pour qu’elle produisît son effet légitime. Il n’en est pas ainsi des officiers de l’Église dans l’administration des sacrements. L’affirmation affirmative à ce sujet est que l’efficacité des sacrements n’est due qu’à la bénédiction du Christ et à l’action de son Esprit. L’Esprit, il faut toujours s’en souvenir, est un agent personnel qui agit quand et comme il le veut. Dieu a promis que son Esprit accompagnera sa Parole ; et c’est ainsi qu’il en fait un moyen efficace pour la sanctification de son peuple. C’est pourquoi il a promis, par l’opération de son Esprit, de rendre les sacrements efficaces dans le même but.
Le troisième point de la doctrine réformée, c’est que les sacrements ne sont efficaces qu’en tant que moyens de grâce, en ce qui concerne les adultes, pour ceux qui les reçoivent par la foi. Ils peuvent avoir un pouvoir naturel sur d’autres personnes que les croyants en présentant la vérité et en excitant des sentiments, mais leur influence salvatrice ou sanctifiante n’est ressentie que par les croyants.
Tous ces points sont clairement présentés dans les normes de notre propre Église. Les sacrements sont déclarés être. les moyens de la grâce, c’est-à-dire les moyens de signifier, de sceller et d’appliquer les bienfaits de la rédemption. On nie que cette vertu soit en eux, ou en celui par qui ils sont administrés. On affirme que leur efficacité à transmettre la grâce n’est due qu’à la bénédiction du Christ et à la coopération de son Esprit ; et qu’une telle efficacité est n’est expérimenté que par les croyants. Ainsi, dans le Petit Catéchisme, les sacrements sont dits être de saintes ordonnances « instituées par le Christ ; dans laquelle, par des signes sensibles, Christ et les bienfaits de la nouvelle alliance sont représentés, scellés et appliqués aux croyants.» 1 Dans le Grand Catéchisme, il est dit que les sacrements sont institués « pour signifier, sceller et exposer à ceux qui sont dans l’alliance de grâce, les bienfaits de sa médiation [celle du Christ] ». 2 Le mot « exposer », tel qu’il est employé ici, signifie conférer ou communiquer, comme le mot latin « exhibere » signifie aussi quelquefois. Que tel soit le sens du mot dans nos normes, c’est évident, parce que l’exposition dont il est question ici est limitée à ceux qui sont à l’intérieur de l’alliance ; et parce que ce mot est interverti et expliqué par le mot « conférer ». C’est ainsi qu’en dans la Confession de foi3, il est dit : « La grâce qui est manifestée dans ou par les sacrements, correctement utilisés, n’est conférée par aucune vertu en eux. » Et encore,4 que par le bon usage du baptême « la grâce promise n’est pas seulement offerte, mais réellement manifestée et conférée par le Saint-Esprit, à ceux (qu’ils soient majeurs ou enfants) à qui cette grâce appartient, selon le conseil de la volonté de Dieu, au temps fixé ». Tous les autres symboles dominants des Églises réformées sont d’accord avec cette conception des sacrements comme moyen de grâce. Ainsi la Première Confession helvétique 1 dit : « Asserimus, sacramenta non solum tesseras quasdam societatis Christianæ, sed et gratiæ divinæ symbola esse, quibus ministri, Domino, ad eum finem, quern ipse promittit, offert et efficit, cooperentur. » La Confession gallican dit : « Fatemur talia esse signa hæc exteriora, ut Deus per ilia Sancti sui Spiritus virtute, operetur, ne quicquam ibi frustra nobis significetur. » 2 Dans le Catéchisme de Genève3, il est dit : " Quid est sacramentum ? Externa divinæ erga nos benevolentiæ testificatio, quæ visibili signo spirituales gratias figurât, ad obsignandos cordibus nostris Dei promissiones, quo earum veritas melius confirmetur. .... Vim efficaciamque sacramenti non in externo elemento inclusam esse existimas, sed totam a Spiritu Dei manure ? Sic sentio : nempe, ut virtutem suam exerere Domino placuerit per sua organa, quern in finem ea destina vit. » Le langage de la Confession belge4 va dans le même sens : « Sunt enim sacramenta signa, ac symbola visibilia rerum internarum et invisibilium, per quæ, ceu per media, Deus ipse virtute Spiritus Sancti in nobis operatur. Itaque signa ilia minime vana sunt, aut vacua : nec ad nos deeipiendos aut frustrandos instituta. »
1 Quest. 92.
2 Ques. 1G2.
3 Chap., xxvii. 3
4 Chap., xxviii. 6.
1 L’art. xxi. ; Niemeyer, Urne de confession de la Collectio, Leipzig, 1810, p. 120.
2 L’art. xxxiv. ; Ibid., p. 337.
3 v. De sacramentis, 2 et 5 ; Ibid., p. 160 et 161.
4 L’art. xxxiii. ; Ibid., p. 383.
Ces symboles des Églises réformées sur le continent européen s’accordent avec ceux de notre propre Église, non seulement en ce qu’ils représentent les sacrements comme des moyens réels de grâce, mais aussi en niant que leur efficacité soit due à leur vertu inhérente, ou à celui qui les administre, et en affirmant qu’elle est due à l’opération de l’Esprit qui l’accompagne. et est conditionnée par la présence de la foi chez le destinataire. C’est ce qui ressort clairement des citations déjà faites, qui pourraient être multipliées à l’infini. Sur ce point, Calvin dit : « Neque sacramenta hilum proficere sine Spiritu Sancti virtute. » Et encore : « Spiritus Sanctus (quern non omnibus pro-miscue sacramenta advehunt, sed quern Dominas peculiariter suis confert) is est qui Dei gratias secum affert, qui dat sacramentis in nobis locum, qui efficit ut fructificent. »5 Guerike 6 donne comme l’un des principaux points de divergence entre les luthériens et les réformés sur ce sujet, que ces derniers nient le pouvoir inhérent des sacrements, et insistent sur le fait que la « virtus Spiritus Sancti extrinsecus accidens » est la source de toute leur influence sanctifiante.
5 Institutio, iv. xiv. 9, 17 ; édit. Berlin, 1834, partie ii. p. 355 et 360.
6 Allgemeine Christliche Symbolik, von H. E. Ferdinand Guerike, D. D., Leipzig, 1839, p. 378.
Il y a donc une analogie stricte, selon la doctrine réformée, entre la Parole et les sacrements comme moyens de grâce. (1) L’un et l’autre ont en eux une certaine puissance morale due à la vérité qu’ils présentent à l’esprit. (2) Ni l’un ni l’autre n’a en lui-même le pouvoir surnaturel de sauver ou de sanctifier. (3) Toute leur efficacité surnaturelle est due à la coopération ou à l’influence du Saint-Esprit. (4) L’un et l’autre sont ordonnés par Dieu pour être les canaux ou les moyens de l’influence de l’Esprit sur ceux qui les reçoivent par la foi. Rien n’est dit dans la Bible pour placer les sacrements au-dessus de la Parole comme moyen de communiquer aux hommes les bienfaits de la rédemption du Christ. Au contraire, l’Écriture dit dix fois plus de la nécessité et de l’efficacité de la Parole dans le salut des hommes, qu’il n’y est dit ou sous-entendu de la puissance des sacrements.
Outre les points déjà mentionnés comme caractéristiques de la doctrine réformée sur les sacrements, il y en a un quatrième, qui est que la grâce ou les bienfaits spirituels reçus par les croyants dans l’usage des sacrements peuvent être obtenus sans leur usage. Ceci, cependant, peut peut-être être mieux considéré, lorsque la nécessité des sacrements est considérée.
Il y a deux points sur lesquels les luthériens insistent particulièrement en ce qui concerne l’efficacité des sacrements. La première est la nécessité absolue de la foi pour qu’un bénéfice sanctifiant ou salvateur réel puisse être tiré de l’usage de ces ordonnances. Sur ce point, ils sont en parfaite accord avec les réformés. Hase a raison lorsqu’il dit que l’idée qu’un sacrement peut conférer un bienfait salvateur sans la foi est tout à fait destructeur du protestantisme.» 1 Augustin avait enseigné il y a longtemps la doctrine suivante : « Unde ista tanta virtus aquæ, ut corpus tangat, et cor abluat, nisi faciente verbo : non quia dicitur, sed quia creditur. »2 Et Bernard de Clairvaux dit : « Sacramentum enim sine re sacramentel ! Sumenti mors est : res vero sacrament !, etiam, præter sacramentum, sumenti vita æterna est. » 1
1 Evangelische Dogmatik, 11. ii. 1, § 213 ; 3e édit. Leipzig, 1842, p. 442.
2 Dans Joannis Evangelium Tractatus, L.xxx. 3 ; Œuvres, édit. Bénédictines, Paris, 1837, t. III. p. 2290, a.
1 Guigo (attribué à saint Bernard) ; Œuvres de saint Bernard, édit. Migne, Paris, 1859, t. III. p. 327, b, c (ii. 214).
Les symboles luthériens sur ce point sont parfaitement explicites. Dans la «Confession d’Augsbourg» 2, il est dit : « Itaque utendum est sacramentum ita, ut fides accedat, quæ credat promissionibus, quæ per sacramenta exliibentur et ostenduntur. Damnant igitur illos, qui docent, quod sacramenta, ex opere operate justificent, nec docent fidem requiri in usu sacramentorum, quæ credat remitti peccata. »
2 i. xiii. ; Hase, Libri Symbolic, Leipzig, 1846, p. 13.
Dans « l’Apologie de la Confession d’Augsbourg» 3, il est dit : « Damnamus totum populum scholasticorum doctorum, qui docent, quod sacramenta non ponenti obicem conférant gratiam ex opere operate, sine bono motu utentis. Hæc simplicité !· Judaica opinio est, sen tire, quod per ceremoniam justificemur, sine bono motu cordis, hoc est, sine fide..... À sacramenta sunt signa promissiouum. Igitur in usu debet accedere fides..... Loquimur hie de fide special !, quæ præsenti promissioni credit, non tanturn quæ in genere credit Deum esse, sed quæ credit offer !־ ! remissionem peccatorum.
3 vn. 18-21 ; Ibid., p. 203.
Le second point de la doctrine des luthériens en ce qui concerne l’efficacité des sacrements est celui en quoi ils diffèrent des réformés, et comme Guerike, lui-même un luthérien vigoureux, dit correctement, approximativement aux romanistes. Ils soutiennent que l’efficacité des sacrements est due à leur propre vertu ou pouvoir inhérent ; un pouvoir indépendant, d’une part, des influences de l’Esprit (extrinsecus aceidens) et, d’autre part, de la foi de celui qui le reçoit. La foi, en effet, est nécessaire à tout effet salvifique ou sanctifiant, mais ce n’est qu’une condition subjective à laquelle l’opération bienfaisante de la puissance, inhérente aux sacrements, est suspendue. L’exemple de Bellarmin s’applique aussi bien à la doctrine luthérienne qu’à la sienne. Le feu ne fera pas brûler le bois à moins que le bois ne soit sec ; mais sa sécheresse ne donne pas au feu sa puissance. L’illustration préférée de Luther a été tirée du cas de la femme qui a touché le Sauveur vêtement. Il y avait une vertu de guérison inhérente en Christ. Ceux qui le touchaient sans foi n’en recevaient aucun bénéfice. La femme Ayant la foi a été guérie au moment où elle a touché l’ourlet de son miraient. Sa foi, cependant, n’était en aucun cas la source de la puissance qui résidait en Christ. Guerike se plaint que les réformés enseignent que « les signes visibles ne transmettent en tant que tels aucune grâce divine invisible ; que, sans les sacrements, le chrétien puisse jouir par la foi des mêmes dons divins que les sacraments sont censés transmettre, et qu’il n’admet donc pas leur nécessité absolue, et encore moins qu’ils sont le point central de la méthode chrétienne de salut (der christlichen Heilsanstalt).» 1
1 Allgemeine Christliche Symbolik, § 54, Leipzig, 1839, p. 375, 376.
Luther n’a pas d’abord soutenu cette la puissance des sacrements, mais semblait disposé à adopter même les vues basses de Zwingle. Dans son ouvrage sur la captivité babylonienne, il dit : « Baptismus neminem justificat, nec ulli prodest, sed fides in verbum promissionis, cui additur baptismus ..... Nec verum esse potest, sacramentis inesse vim eflicacem justificationis seu esse signa efficacia gratiæ. » 2 Mélancthon utilise à peu près le même langage : « Non justificant signa, ut Apostolus ait, Circumcisio nihil est : ita baptismus nihil est. Participatio mensæ Domini nihil est : sed testes sunt και σφραγίδες divinæ voluntatis erga te, quibus conscientia tua certa reddatur, si de gratia, de benevolentia Dei erga se dubitet..... Quæ alii sacramenta, nos signa appellamus, aut si ita libet, signa sacramentalia. Nam sacramentum ipsum Christum Paulus vocat.»3 « Hine apparet, quam nihil signa sint, nisi fidei exercendæ μνημόσυνα. » 4
2 Luther, Captivitas Bnbylonica, de Sacramento Baptismi ; Œuvres, édit. Wittenberg (latin), 1546, t. II, feuillet 79, page 2.
3 localités communes ; De Signis ; Strasburg, 1523, dans Dodecas Scriptorum Theolog-icorum, Nuremberg, 1646, p. 774, 775.
4 Ibid., De Baptismo, p. 778.
Cependant, Luther a compris les paroles de notre Seigneur dans Jean III. 5, comme enseignant la nécessité du baptême, il en a déduit que si le sacrement est nécessaire au salut, il doit avoir le pouvoir salvateur. Mais comme la Bible enseigne que personne ne peut être sauvé sans la foi, il soutenait que les sacrements ne pouvaient avoir aucun effet salvateur à moins que le destinataire ne soit un croyant. Nous avons donc les deux éléments essentiels de la doctrine luthérienne des sacrements ; ils ont un pouvoir inhérent, salvateur, sanctifiant ; Mais ce pouvoir n’a d’effet pour le bien que sur les croyants.
La nécessité de la foi est clairement énoncée dans les passages déjà cités de la Confession d’Augsbourg et de l’Apologie ; la puissance inhérente des sacrements en opposition à la doctrine réformée est aussi clairement enseignée dans les normes luthériennes. Ces deux points sont repris dans quelques-uns des passages de preuve qui suivent. Guerike dit : « C’est indubitablement chez les luthériens, en opposition à la doctrine réformée de la « virtus Spiritus sancti extrinsecus accedens », que la grâce est dans, et pas seulement avec ou par (mit oder neben), les sacrements. » 1 Il se réfère au langage de Luther dans son Grand Catéchisme à propos du baptême. Luther dit : « Interrogatus, quid baptismus sit ? ita responde : non esse prorsus aquam simplicem, sed ejusmodi, quæ verbo et præcepto Dei comprehensa, et illi inclusa sit, et per hoc sanctificata ita ut nihil aliud sit, quam Dei sen divina aqua. » Il ajoute cependant : « non quod aqua hæc per sese quavis alia sit præstantior, sed quod el verbum ac præceptum Dei accesserit. Quocirca mera sycophantia est et diaboli illusio, quod hoclie nostri novi spiritus, ut blasphèment et contuinelia afficiant baptismum, verbum et institutionem Dei ab eo divellunt, nec aliter intuentur eum, quam aquam e putreo haustam ac deinceps ita blaspheme ore blaterant : Quid vero utilitatis manus aquæ plena præstaret animæ ? Quis vero adeo vecors et inops animi est, qui hoc ignoret, divulsis baptismi partibus, aquam esse aquam ? Qua vero fronte tu tibi tantum sumis, ut non verearis ab ordinatione Dei pretiosissimum KctjL״i<\cov avellere, quo Deus illam constrinxit et inclusit, neque in de di veil ! vult aut sejungi ? Quippe verbum Dei, aut præceptum, item nomen Dei, in aqua ipse solet esse nucleus, qui thesaurus ipso coelo et terra omnibus modis nobilior est et præstantior. » 2
1 Symbdllk, Leipzig, 1839, p. 393, note.
2 Catéchisme majeur, § iv, Do Baptismo ; Hase, Libri Symbolici, édit. Leipzig, 1846, p. 537.
Les luthériens ont l’habitude de se référer à l’analogie entre la Parole et les sacrements. La différence entre eux et les réformés en ce qui concerne les sacrements est analogue à la différence entre les deux églises en ce qui concerne la Parole. Les réformés se réfèrent à la puissance surnaturelle de la Parole, et non à la Parole littérale telle qu’elle est écrite ou parlée ; non pas à la simple vérité morale qui y est révélée, mais à la coopération, ou comme Paul l’appelle, à la démonstration de l’Esprit. Les luthériens, au contraire, enseignent qu’il y a dans le Verbe divin (non pas dans les lettres ou le son, mais dans la vérité), une vertu surnaturelle, divine, inséparable d’elle, et indépendante de son usage ; et qui est la même pour les croyants et les incroyants ; sanctifier et sauver les premiers, à cause de leur foi, et ne leur ces derniers, en raison de leur résistance volontaire. Les sacrements ont donc une puissance inhérente, divine, certaine de produire des effets salvifiques, s’ils rencontrent la foi en ceux qui les reçoivent. « L’Église luthérienne, dit Guerike, considère les sacrements comme des actions dans lesquelles Dieu, par des signes extérieurs qu’il a désignés, offre et confère ses dons invisibles et célestes ; Ils voient dans les sacrements des signes visibles qui, en vertu de la parole divine de promesse prononcée sur eux, contiennent en ce sens les dons divins invisibles qu’ils signifient, qu’ils les communiquent (mittheilen) à tous ceux qui y participent, mais seulement aux croyants pour leur bien. » 1
1 Symbolik de Guerike , p. 372.
Cette vertu divine inhérente aux sacrements ne réside pas dans les éléments ; elle ne découle pas non plus de celui qui les administre ; elle n’est pas non plus due à l’opération concomitante du Saint-Esprit ; mais à la Parole. Les éléments employés ne sont en eux-mêmes que des éléments ; avec la Parole, ils sont divinement efficaces, parce que le divin La Parole, où qu’elle soit, est chargée de cette puissance divine, surnaturelle, salvatrice et sanctifiante qui agit toujours sur ceux qui ont la foi pour la recevoir.
Dr. Schmid d’Erlangen, cependant, admet qu’il y a une divergence de vue à ce sujet, entre les théologiens antérieurs et postérieurs de son Église. Le premier a fait consister le sacrement dans l’élément et le Verbe, et a rapporté son effet surnaturel à la puissance divine inhérente au second, conformément à la représentation de Luther dans son Grand Catéchisme, où, en parlant du baptême, il dit, en ces termes déjà cités : « non tantum naturalis aqua sed etiam divina, eœlestis, sancta et salutifera aqua (est)... hocque nonnisi verbi gratia, quod eœleste ac sanctum verbum est. » Mais les théologiens postérieurs, dès l’époque de Gerhard, n’ont pas fait du sacrement un mélange d’élément et de Verbe ; mais de quelque chose de terrestre et de céleste. Le premier est l’élément ou le symbole extérieur, « quod est res corporea visibilis .... ordinata ad hoc ; ut sit rei eœlestis vehiculum et medium exhibitivum. » Celle-ci, ou « res eœlestis », est « res invisibilis et intelligibilis, re terrena visibili, tanquam medio divinitus ordinato exhibita, a qua fructus sacrament ! principaliter dependet. Selon ce point de vue, l’efficacité du sacrement ne dépend pas de la Parole, mais de cette « res eœlestis », dont la « res terrena » est le véhicule et le support. L’office de la Parole est d’unir les deux. On l’appelle l'« αίτιοι׳ ■ποιητικόν , hoc est, efficere, ut duæ illæ partes essentiales unum sacramentum constituant in usu sacramentorum ». 2 Cette doctrine des luthériens tardifs se heurte à de sérieuses difficultés. Cela les met en conflit avec Luther et les luthériens de l’ancienne école qui s’efforcent de rapporter l’efficacité des sacrements à la Parole. Les éléments, sans la Parole, ne sont que des éléments. C’est le Verbe dans lequel réside la puissance surnaturelle qui produit l’effet que le sacrement est censé accomplir. Mais, d’après cette dernière opinion, il y a dans les sacrements deux tuiles, le signe et la chose signifiée ; une « res terrena » et une « res coelestis ». Ils sont tellement unis que là où l’un est donné et reçu par la foi, l’autre est reçu. Cette « res cœlestis », cependant, n’est pas la Parole. Dans le cas de l’Eucharistie, par exemple, c’est le corps et le sang réels du Christ, et ceux-ci étant inséparablement unis à son âme et à sa divinité, c’est ce don merveilleux, et non la Parole, qui fait de la Cène du Seigneur la nourriture vivifiante de l’âme.
2 Schmid, Die Dogmatik der evangelisch-lutherischen Kirche. Francfort et Erlangen, 1853, p. 415-417.
En ce qui concerne l’efficacité des sacrements, le principal point de différence entre les luthériens et les réformés, c’est que ceux-ci attribuent leur sanctification inférieure aux influences de l’Esprit, les premiers à la puissance inhérente et surnaturelle du Verbe, qui est une partie essentielle de ces ordonnances divines. Même sur ce point, Chemnitz s’exprime d’une manière à laquelle tout théologien réformé peut donner son assentiment. Recte Apologia Augustanæ confessionis dicit, eundem esse effectum, eandem virtutem, seu efficaciam, et verbi et sacramentorum, quæ sunt sigilia promissionum..... Sicut igitur Evangelium est potentia Dei ad salutem omni credent ! : non quod magica quædam vis characteribus, syllabis, aut sono verborum inhæreat, sed quia est medium, organon seu instrumentum, per quod Spiritus Sanctus effieax est, proponens, offerens, exhibens, distribuons et applicans meritum Christi, et gratiam Dei, ad salutem omni credent ! : ita etiam sacramentis tribuitur vis et efficacia : non quod in sacramentis extra seu præter meritum Christi, misericordiam Patris, et efficaciam Spiritus Sancti, quærenda sit gratia ad salutem ; sed sacramenta sunt causæ instrumentales ita, quod per ilia media seu organa, Pater vult gratiam suam exhibere, donate, applicarc : Filins meritum suum communicare credentibus : Spiritus Sanctus efficaciam suam exerccre, ad salutem omni credent !. » 1
1 Examen Concilii Tridentini, de Efficacia et Usa Sacramentorum, édit. Francfort-sur-le-Main, 1573, 1574, partie ii. p. 22, b.
La doctrine luthérienne, telle qu’elle est généralement présentée et telle qu’elle a été énoncée ci-dessus, s’oppose (1). À la doctrine des romanistes qui nie la nécessité d’une foi vivante chez le receveur pour qu’il puisse faire l’expérience de l’efficacité des sacrements ; et qui non seulement les représente comme imbus d’un pouvoir inhérent, mais enseigne aussi qu’ils confèrent la grâce « ex opere operato ». 2° À la doctrine qui fait des sacrements de simples insignes d’une profession chrétienne. 3° À la doctrine qui les représente comme de simples allégories ou des démonstrations significatives de la vérité. 4° À la doctrine qui les considère comme purement commémoratives, comme peut l’être un portrait ou un monument. (5) À la doctrine qui leur dénie l’efficacité inhérente et renvoie leur influence sanctifiante à la puissance du Saint-Esprit qui l’accompagne ; et (6.) À la doctrine qui suppose qu’ils ne confèrent rien qui ne puisse être obtenu par la foi sans eux. Sur tous ces points, à l’exception des deux derniers, les luthériens et les réformés sont d’accord.
Doctrine de l’Église de Rome sur l'Efficacité des sacrements.
Il a déjà été dit que les Romanistes enseignent (1.) Que les sacrements contiennent la grâce qu’ils signifient. (2) Qu’ils transmettent cette grâce « ex opere operato ». 3° Qu’il y a une certaine efficacité commune à tous les sacrements. Ils transmettent tous la grâce , c’est-à-dire « gratia gratum faciens, sanctifians » ; et outre cette influence commune, dans le baptême, la confirmation et les ordres, il y a un caractère indélébile (quoddam indelebile) en vertu de laquelle ils ne peuvent jamais être répétés. (4.) Que les conditions de la l’efficacité des sacrements de la part de l’administrateur sont, premièrement, qu’il avoir l’autorité (celle-ci est limitée dans son application au baptême) ; et deuxièmement, qu’il a l’intention de faire ce que l’Église veut faire ; et dans à l’égard du destinataire, qu’il ne s’oppose pas à un obstacle. Les sacrements sont déclarés efficaces « non ponentibns obicem ».
En quel sens les sacrements contiennent-ils la grâce ?
On entend par là qu’ils possèdent en eux la vertu inhérente de sanctifier ceux à qui ils sont administrés. Leur pouvoir dans le domaine de la religion est analogue à celui des articles de la « materia medica » dans le domaine de la physique. Certains ont un pouvoir narcotique ; certains agissent sur un organe et d’autres sur un autre ; Certains sont des stimulants et d’autres sont des sédatifs. Ou pour se référer à l’illustration si familière à Bellarmin ; La vertu inhérente des sacrements pour conférer la grâce est analogue à celle du feu pour brûler. Le feu produit la combustion parce qu’il est ordonné par Dieu et qu’il est imprégné de puissance à cette fin. Les sacrements confèrent la grâce parce qu’ils sont dotés d’une efficacité conférant la grâce, et qu’ils sont ordonnés par Dieu dans ce but. « Contenir la grâce » et « conférer la grâce » « virtute sibi insita » sont des formes d’expression explicatives. On dit que les sacrements contiennent la grâce parce qu’ils la confèrent par leur vertu inhérente. Il s’agit là d’une négation de leur efficacité due à la puissance morale ou surnaturelle de la vérité ; ou aux influences de l’Esprit, ou à l’état subjectif de ceux qui les reçoivent.
Comme À l’effet particulier attribué au baptême, à la confirmation et à l’ordre, peu de choses sont dit. Ces sacrements ne sont jamais répétés. C’est pour cette raison qu’il fallait et, par conséquent, on supposait qu’ils laissaient une impression indélébile sur l’âme. On ne peut dire plus loin ce que c’est qu’en disant que c’est un « Signum quoddam spirituale et indclebile in anima impressum. Qui eo insigniti sunt, deputantur ad recipienda vel tradenda aliis ea, quæ pertinent ad cultuin Dei. » 1 Le langage du Concile de Trente n’éclaire pas le sujet. Il dit simplement : 2 « Si quis dixerit, in tribus sacramentis, baptismo scilicet confirmatione, et ordine, non imprimi characterem in anima, hoc est signum quoddam spirituale et indelebile, unde ea iterari non possunt ; anathème, assieds-toi. Les seuls passages de l’Écriture auxquels Perrone se réfère à l’appui de cette hypothèse sont 2 Corinthiens i. 22, et Éphésiens i. 13, dans lesquels l’apôtre parle de tous les croyants scellés par le Saint-Esprit. Dans ces passages, il n’y a pas la moindre allusion à une impression sacramentelle. Dans la seconde partie du Catéchisme romain, en réponse à la question de savoir ce que signifie le caractère à cet égard, il est dit que c’est quelque chose qui ne peut être enlevé et qui rend l’âme apte à recevoir ou à remplir certains avantages ou fonctions spirituelles. Ainsi, dans le baptême, une certaine chose est imprimée dans l’âme par laquelle elle est préparée à recevoir le bénéfice d’autres sacrements, et par laquelle elle se distingue des âmes des non-baptisés. Dans la confirmation, l’âme est marquée comme un soldat de Christ et prête à lutter contre tous les ennemis spirituels. Dans les ordres, on reçoit quelque chose qui permet à celui qui reçoit d’administrer les sacrements, et qui le distingue de tous les autres chrétiens.
1 Perrone, Prcelectinnes Theological, De sacramentis in genere, cap. ii. 1, 2 ; édit. Paris, 1SG1, t. II. p. 220, a, 224.
2 Scss. vii. de Sacramentis in genere, canon 9 ; Streitwolf, t. I, p. 30.
Le Concile de Trente anathématise, comme nous l’avons vu, non seulement ceux qui nient que les sacrements transmettent la grâce, mais aussi ceux qui nient qu’ils la transmettent « ex opere operato ». Le sens de cette phrase est assez intelligible s’il n’est pas expliqué. Elle a été obscurcie par les explications données par les romanistes eux-mêmes, ainsi que par les points de vue contradictoires des protestants sur le sujet. Dire que les sacrements contiennent la grâce ; qu’ils la transmettent « virtute sibi insita », qu’ils la transmettent « ex opere » », tout cela revient à la même chose. Le sens simple est que tel est le la nature des sacrements que, lorsqu’ils sont dûment administrés, ils produisent une effet. Il n’y a ni nécessité ni convenance à regarder au-delà d’eux pour en rendre compte pour l’effet produit. Si vous placez un charbon de feu sur la main d’un homme, il produit un certain effet. Cet effet s’ensuit infailliblement. Il résulte de la la nature même de la chose faite et de l’acte de la faire. Il n’y a pas de différence, si l’on dit que la houille contient de la chaleur ; ou, qu’il brûle dans en vertu de sa nature intrinsèque ; ou que l’effet est produit « ex opere operate ».
Bien sûr, il y a certaines conditions nécessaires à la production de l’effet. Il faut que la main soit vivante, sinon ce n’est pas la main d’un homme ; c’est simplement un morceau d’argile. Il ne doit pas y avoir d’obstacle. Si vous interposez une assiette de porcelaine entre le charbon et la main, la main ne sera pas brûlée. Le charbon doit être enflammé, pas simplement un morceau de carbone. Il faut donc que ce qui est fait soit un vrai sacrement. Il doit contenir tout ce qui est essentiel à l’intégrité de l’ordonnance. Le charbon, dans le cas supposé, doit être mis en contact avec la main ; mais qu’il soit placé là à l’aide d’une cuiller d’argent ou d’une paire de pinces de fer, cela ne fait aucune différence. Il n’y a donc aucune différence que le prêtre qui administre le sacrement soit un homme bon ou mauvais, qu’il soit orthodoxe ou hérétique. Il faut cependant qu’il le fasse ; et il ne peut pas le faire sans en avoir l’intention. Si la main de l’homme doit être brûlée, dans un temps et un lieu donnés, le charbon doit être intentionnellement placé dessus.
Bien que la doctrine de l’Église de Rome sur la manière dont les sacrements transmettent la grâce semble être si simple, il n’y a pas peu de diversité apparente parmi les théologiens de cette Église dans leurs vues sur le sujet. Cette diversité, cependant, est en réalité plus dans la manière d’énoncer la doctrine que dans la doctrine elle-même. Les luthériens sont d’accord avec les romanistes pour nier que l’efficacité des sacrements soit due aux influences du Saint-Esprit ; et ils sont d’accord avec eux pour leur attribuer un pouvoir surnaturel inhérent. Le principal point de différence entre eux est que les luthériens insistent sur la présence et l’exercice de la foi chez le destinataire. D’après eux Les sacrements ne transmettent la grâce qu’aux croyants. Tandis que les romanistes, tels qu’ils sont compris par les luthériens et même par tous les protestants, nient cette nécessité de la foi ou des bonnes dispositions pour l’efficacité des sacrements. Ceci, cependant, Bellarmin prononce un mensonge délibéré de la part des protestants ; et il emploie à ce sujet un langage que Luther lui-même aurait pu employer : « Est merum mendacium, dit-il, quod catholique ! dicant, sacramenta prodesse peccatoribus : omnes enim Catholic ! requirent pœnitentiam, tanquam dispositionem ad gratiam recipiendam. « Falsum est Catholicos non habere pro obice incrednlitatcm : omnes enim Catholic ! requirent neccssario in adultis actualen ! fide!!, et sine ea dicunt neminem justificari. » 1 " Voluntas, fides, et pœnitentia in suscipiento adulto necessario requirent !!·, 1 !t dispositiones ex parte subject !, non nt causa ! activæ : non enim fides et pœnitentia efficient gratiam sacramentale!!, neque dant efficacian ! Sacramento; sed solum tollunt obstacula quæ impedirent, ne sacramenta seam efficacian ! exercere passent ; unde in pueris, ubi non requiritur dispositio, sine his rebus fit justificatio. » 2 Luther n’était pas d’accord avec cette dernière clause concernant les nourrissons ; mais au reste du paragraphe, il ne pouvait guère s’opposer. Suit ensuite dans Bellarmin l’illustration citée ci-dessus. 3 Le feu ne doit pas son efficacité à la sécheresse du bois ; Néanmoins, la sécheresse est une condition nécessaire de la combustion.
1 Bellarmin, De sacramentis, 1. 2 ; Disputationes, Paris, 1G08, t. III. p. G, b, c.
2 Idem. 11. I. ; p. 108, d, 109, a.
3 Voir p. 490.
Dans un autre passage, Bellarmin est encore plus explicite : « Igitur ut intelligamus, quid sit opus operatum, notandum est, in justificatione, quam recipit aliquis, dun ! percipit sacramenta, inulta concurrere ; nimirum ex parte Dei, voluntatem utendi ilia re sensibili ; ex parte Christi, passionen ! ejus ; ex parte niinistri potestatern, voluntatem, probitatem ; ex parte suscipientis voluntatem, fidem, et pœnitentiam ; Denique ex parte sacrament ! L’IPSAM actionam external!, quæ consurgit, ex débita applicationc formæ et materiæ. Cæterum ex his omnibus id, quod active, et proximo atque instrumentaliter efficit gratiam justi ficationis, est sola actio ilia externa, quæ sacramentum dicitur, et hæc vocatur opus operatum, accipiendo passive (operatum) ita ut idem sit sacramentiim con ferre gratiam ex opere operate, quod conferre gratiam ex [vi] ipsius actionis sacramentalis a Deo ad hoc institutæ, non ex merito agentis vel suscipientis.» 4
4 De sacramentis in genere, II. i. ; ut supra, p. 108, e.
Malgré tout cela, les romanistes enseignent la doctrine même que les réformateurs leur ont imputée, et que les symboles protestants condamnent si énergiquement. C’est clair, —
1. Parce que les mêmes mots ne signifient pas toujours la même chose. Bellarmin dit que les romanistes enseignent que la foi de la part du receveur est nécessaire à l’efficacité des sacrements, du moins dans le cas des adultes. Les protestants disent la même chose ; Et pourtant, leur signification est tout autre. Par foi, les protestants entendent la foi qui sauve ; cette foi qui est l’un des fruits de l’Esprit, et qui, si l’homme l’a, est certaine de son salut. Les romanistes, cependant, entendent par foi un simple assentiment, qu’un homme peut avoir, et être dans un état de condamnation, et périr pour toujours. C’est leur définition formelle de la foi, telle qu’elle est donnée par Bellarmin lui-même ; et le concile de Trente déclare maudits ceux qui disent que l’assentiment donné par des hommes à la vérité, n’est pas la vraie foi. Les romanistes ne soutiennent pas que les sacrements transmettre la grâce aux athées déclarés ou aux infidèles déclarés ; mais qu’ils exercent pouvoir salvateur sur ceux qui ont le genre de foi dans l’Église que les bandits d’Italie professent et chérissent. De même, le repentir requis n’est pas le pieux tristesse dont parle l’Apôtre, mais ce remords qu’éprouvent souvent les méchants. Ces points ont été abondamment prouvés dans les pages précédentes. 1 Un charbon de feu brûlera la main de l’homme ; Il est vrai que l’homme doit être vivant, mais Qu’il soit un homme bon ou mauvais ne fait aucune différence. Les sacrements confèrent la grâce par leur efficacité intrinsèque. Il est vrai que le destinataire doit être croyant ; mais qu’il ait ce que saint Pierre appelle « la précieuse foi des élus de Dieu », ou le même genre de foi qu’avait Simon le Magicien, cela ne fait aucune différence.
1 Voir ci-dessus le chapitre sur la foi.
2. Il est évident que c’est là la véritable doctrine de l’Église de Rome de la manière dont elle est présentée par ses principaux théologiens. C’est ce qui ressort de la grande distinction qu’ils font entre les sacrements de l’Ancien et ceux du Nouveau Testament. Les premiers ne signifiaient que la grâce, les seconds conféraient la grâce. Ces derniers sont efficaces « ex opere operate » ; les premiers, comme le dit Thomas d’Aquin, n’étaient efficaces qu'« ex fide et devotione suscipientis ». Encore une fois, la nécessité de quoi que ce soit de bon chez le destinataire est expressément niée. Ainsi Gabriel Bienne († 1495) dit : « · Sacramentum dicitur conferre gratiam ex opere operate, ita quod ex co ipso, quod opus illud, puta sacramentum, exhibitur, nisi impediat obex peccati mortalis, gratia eonfertur utentibus ; Sie quod præter exhibitionem sign ! Exposition Foris ! non requiritur bonus motus sen devotio interior in suscipiente. »1 Koellner cite aussi de Duns Scot les mots :2 « præter istam (primam causant meritoriam sc. Christum) non oportet dare aliam intrinsecam in recipiente, qua conjungatur Deo, antequam recipiat gratiam » ; et Petrus de Palude, 3 « In sacramentis novæ legis non per se requiritur, quod homo se disponat : ergo per ipsum sacramentum disponitur. » Les théologiens romains ultérieurs enseignent la même doctrine. C’est pourquoi Klee4 dit que les sacrements, lorsqu’ils sont correctement dispensés, sont nécessairement efficaces. Et Moehler dit : « L’Église catholique enseigne que le sacrement agit en nous, en vertu de son caractère d’ordonnance du Christ, destinée à notre salut (ex opere operato, scl. a Christo, au lieu de quod operatus est Christus), c’est-à-dire que les sacrements apportent du Sauveur une puissance divine, qui ne peut être causée par aucun état d’esprit humain (Stimmung), ni par aucun état ou effort spirituel, mais qui est donnée par Dieu pour l’amour du Christ directement dans le sacrement.» 5 Il est vrai, ajoute-t-il aussitôt, que « l’homme doit les recevoir, et doit être susceptible de leur impression, et cette susceptibilité s’exprime dans le repentir, dans la tristesse du péché, dans le désir de l’aide divine, et dans la foi confiante ; néanmoins, il ne peut que les recevoir, et par conséquent n’avoir que la susceptibilité requise. Tout cela, cependant, selon le système romain, l’homme non renouvelé l’a ou peut l’avoir. Dans le cas des nourrissons, il n’y a que passivité : simple non-résistance ; Et c’est tout ce qui est requis dans le cas des adultes.
1 Epitome sen Collectorium circa Lombardi sent en tiarum, libros 4, d. 1, q. 3 ; cité par Koellner dans son Symbolik, t. II, p. 371.
2 Cité par Kiliner, p. 373.
3 4 d. 1, q. 1 ; Ibid., p. 371.
4 1re édit., t. III, p. 95 ; voir Kollner, p. 376.
5 Symbolik oiler Darstellung der dogmatischen Gegensiitze der Katholiken und Protes-tanten ; von Dr. J. A. Mi hier, iv. § 28 ; Gth édition. Mayence, 1843, p. 255.
3. L’un des points de controverse entre les jansénistes et les jésuites se rapportait précisément à ce sujet. Le. Les jansénistes soutenaient que l’efficacité des sacrements dépendait de l’état intérieur du receveur. S’il n’était pas en état de grâce, et dans l’exercice de la foi quand ils étaient reçus, ils ne servaient à rien. Cette doctrine, les Jésuites la contestèrent, et leur influence prévalait dans l’Église. Le jansénisme fut condamné et réprimé.
4. Un autre argument est tiré de la pratique constante de l’Église romaine. Il n’y a aucune prétention de ses ministres reconnus exigeant la profession, ni la preuve de ce que les protestants entendent par la foi salvatrice afin de recevoir la sacrements, ou comme condition de leur influence sanctifiante. Au contraire Ils agissent d’après le principe que les sacrements confèrent la grâce dans le premier instance. Ils baptisent des foules de païens non instruits, sans le moindre prétendre qu’ils sont pénitents ou croyants. Si la foi est le fruit de et si, comme l’enseignent tous les romanistes, la régénération s’opère dans le baptême, comment la présence de la foi chez celui qui le reçoit peut-elle être une condition de l’efficacité du baptême ?1
1 Voir Ilistorischer Anhang id>er die Wirksamkeit der Sacramente « ex opere operate », vol. II. § 107, p. 363, du Symbolik de Kellner. K< arrive à la conclusion qu’il n’y a pas de grande différence entre les doctrines luthérienne et romaine sur l’efficacité des sacrifices ; une conclusion en contradiction avec la conviction de Luther et de ses associés.
Luthériens et réformés s’accordent à enseigner, premièrement, que l’efficacité des sacrements ne dépend de rien de celui qui les administre ; et deuxièmement, que comme le ministère de la Parole et les sacrements sont unis dans les Écritures, c’est une question d’ordre et de convenance que les sacrements soient administrés par ceux qui ont été dûment appelés et nommés à ce service. C’est pourquoi, dans la deuxième Confession helvétique 2, il est dit : « Baptismus pertinet ad officia ecclesiastic* ». Selon la Confession de Westminster3, « Il n’y a que deux sacrements ordonnés par le Christ notre Seigneur dans l’Évangile. C’est c’est-à-dire le baptême et la Cène du Seigneur : ni l’un ni l’autre ne peuvent être dispensés par quelqu’un, sauf par un ministre de la Parole, légitimement ordonné.
2 xx. ; Niemeyer, Collectin Confessionuni, Leipzig, 1840, p. 518.
3 Chap., xxvii. 4.
La doctrine de l’Église luthérienne est ainsi énoncée par Hollaz : « Jus dispensandi sacramenta Deus concredidit ecclesiæ, quæ exsecutionem aut exercitium hujus juris, observandi ordinis et €υσχ·׳//Λ0συΊ׳^ς causa commendavit ministris verbi divini vocatis et ordinatis. In casu autem extremæ necessitatis, ubi sacramentum est necessarium nec nisi periculo salutis omitti potest, quilibet homo Christianas (laicus aut femina) sacramentum initiationis valide celebrare potest.» 4 Ceci n’est pas incompatible avec la Confession d’Augsbourg, qui dit :5 « De ordine ecclesiastico docent, quod nemo debeat in ecclesia publice docere, aut sacramenta administrare, nisi rite vocatus ».
4 Examen, m. ii. 3, quæst. 6 ; édit. Leipzig, 1840, p. 518.
5 I. 14 ; Hase, Libri Symbolici, 3e édit. Leipzig, 1846, p. 13.
La doctrine de l’Église de Rome sur ce sujet est brièvement exposée dans les canons promulgués au cours de la septième session du Concile de Trente. 1 Nous lisons ainsi : « Si quis dixerit, Christianos omnes in verbo, et omnibus sacrainentis administrandis habere potestatem ; anathème, assieds-toi. Le Conseil dit : dans « tous » les sacrements ; car l’Église de Rome, tout en niant le pouvoir de tout prêtre ordonné canoniquement pour rendre efficace l’administration des sacrements, admet l’efficacité du baptême laïque. De même, « Si quis dixerit, in ministris, dum sacramentis conficiunt, et conférant, non requiri intentionem saltern faciendi, quod facit ecclesia ; anathème, assieds-toi. L’intention est définie comme le but de faire ce que le Christ a ordonné et ce que l’Église a l’habitude de faire. À ce sujet, Bellarmin dit (1.) Il n’est pas nécessaire (dans le baptême du moins) que l’administrateur ait l’intention intelligente de faire ce que fait l’Église ; car il ignore peut-être la doctrine de l’Église ; tout ce qu’il faut, c’est qu’il ait l’intention d’administrer une ordonnance de l’Église. (2) Il n’est pas nécessaire qu’il ait l’intention de faire ce que fait l’Église de Rome ; mais ce que la véritable Église, quelle qu’elle soit, a coutume de faire. C’est pourquoi, dit-il, l’Église catholique ne rebaptise pas ceux qui ont été baptisés par les Églises genevoises. « Non tollit efficaciam sacrament ! error ministri circa ecelesiam, sed defectus intentionis. (3) Qu’il ne s’agit pas d’une intention réelle, mais seulement d’une intention virtuelle. « Virtualis dicitur, cum actualis intentio in præsenti non adest ob aliquam evagationem mentis, tamen paulo ante adfuit et in virtute illius sit operatic. »2 C’est pourquoi le Catéchisme romain dit que le baptême administré par un hérétique, un Juif ou un païen est efficace : « Si id efficere propositum eis fuerit, quod ecclesia Catholica in eo administrationis genere qfficit. » 3 Cela s’accorde avec l’opinion populaire de la doctrine de l’intention. L’administrateur doit avoir l’intention de produire l’effet que le sacrement est censé accomplir. S’il baptise, il doit avoir l’intention de se régénérer ; s’il absout, il doit avoir l’intention d’absoudre ; s’il consacre le pain et le vin, il doit vouloir les transmuter ; s’il offre l’hostie, il doit l’avoir conçue comme un sacrifice ; et s’il est offert à une personne particulière, il doit avoir l’intention qu’il produise un effet à son profit. Selon ce point de vue, tout dépend de la volonté du prêtre officiant.
1 Sess. vii. ; Canones de Sacramentis in genere, 10, 11 ; Streitwolf, t. I, p. 40.
2 Bellarmin, De sacramentis in genere, 1. xxvii. ; Disputationes, édit. Paris, 1608, t. III. pp. 94, d, 95.
3 Catéchisme romain, 11. ii. 18 (xxii. 24) ; Streitwolf, Libri Symbolici, t. I, p. 270.
§ 5. La nécessité des sacrements.
La distinction entre la nécessité du précepte et la nécessité des moyens, est évidente et importante. Personne ne serait disposé à dire, sans réserve, qu’il n’est pas nécessaire d’obéir à un commandement explicite du Christ. Et comme il a ordonné à ses disciples de baptiser tous ceux qui sont reçus comme membres de son Église, au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, et qu’il a exigé de ses disciples qu’ils commémorent sa mort par la célébration de la Cène du Seigneur, l’obligation morale la plus forte incombe à son peuple d’obéir à ces commandements. Mais l’obligation d’obéir à un commandement, tel que d’observer le sabbat, de visiter les malades et de soulager les pauvres, dépend des circonstances. Aucune possibilité ne peut être offerte ; ou l’accomplissement de la tâche peut être entravé par des circonstances extérieures ; ou il se peut que nous ne soyons pas en mesure de fournir le service requis. Ainsi, en ce qui concerne le commandement de se faire baptiser et de commémorer la mort du Seigneur à sa table, il est évident que de nombreuses circonstances peuvent se produire pour empêcher l’obéissance, même de la part de ceux qui ont la disposition et le dessein de faire tout ce que leur Seigneur exige de leurs mains. Et même là où l’obéissance n’est pas empêchée par des circonstances extérieures, elle peut l’être par ignorance ou par des scrupules de conscience sans fondement.
Par nécessité des moyens, on entend généralement une nécessité absolue, une « condition sine qua non ». En ce sens, la nourriture est une nécessité de la vie ; la lumière est nécessaire à l’exercice de la vision ; la Parole est nécessaire à l’exercice de la foi, car elle en est l’objet, la chose qu’il faut croire ; et la foi est, de la part des adultes, nécessaire au salut, car c’est l’acte de recevoir la grâce de Dieu offerte dans la Bible. C’est pourquoi, dans l’Écriture, il est dit dans l’Écriture que nous sommes sauvés par la foi, que celui qui croit sera sauvé, et que celui qui ne croit pas ne verra pas la vie.
La question entre les réformés, d’une part, et les luthériens et les romanistes, d’autre part, est de savoir dans lequel de ces sens les sacrements sont nécessaires. Selon les réformés, ils ont la nécessité du précepte. L’usage en est prescrit comme un devoir ; mais ce ne sont pas des moyens nécessaires de salut. Les hommes peuvent être sauvés sans eux. Les avantages qu’ils signifient et qu’ils sont le moyen de signifier, de sceller et d’appliquer aux croyants, ne sont pas liés à leur usage au point que ces avantages ne puissent être obtenus sans eux. Les péchés peuvent être pardonnés, et l’âme régénérée et sauvée, bien qu’aucun des deux sacrements n’ait jamais été reçu. Les luthériens et les romanistes, au contraire, soutiennent que les sacrements sont des moyens nécessaires de la grâce, en ce sens que la grâce qu’ils signifient n’est pas reçue autrement que dans leur usage. Il n’y a pas de rémission des péchés ni de régénération sans le baptême ; pas de réception du corps et du sang du Christ pour notre nourriture spirituelle et notre croissance dans la grâce, sans la Cène du Seigneur ; et, selon les romanistes, pas de pardon des péchés post-baptismaux sans absolution sacerdotale ; pas de grâce des ordres sans ordination canonique ; et aucune préparation spéciale à la mort sans l’extrême-onction. Cette question est surtout importante en ce qui concerne le baptême, et c’est pourquoi elle se posera lorsque ce sacrement sera examiné. À l’heure actuelle, il n’est nécessaire de se référer qu’aux enseignements généraux de ces diverses Églises. Le " Consensus Tigurinus " est l’exposé le plus soigneusement réfléchi et le plus prudemment formulé de la doctrine des Réformés en relation avec les sacrements, appartenant à la période de la Réforme. Il a été rédigé pour régler les différends à ce sujet entre les églises de Genève et celles de Zurich. Il contient les déclarations relatives aux sacrements sur lesquelles les deux parties se sont mises d’accord. Il enseigne1 (1.) Que les sacrements sont « notæ ac tesseræ » de la fraternité et de la fraternité chrétiennes ; des incitations à la gratitude, à la foi et à une vie sainte, et des « syngraphes » qui nous y obligent. Ils ont été ordonnés spécialement pour que Dieu puisse y témoigner, nous représenter et nous sceller sa grâce. (2) Les choses signifiées ne doivent pas être séparées des signes. Ceux qui, par la foi, reçoivent les seconds, reçoivent aussi les premiers. (3) Que le respect doit plutôt être eu pour la promesse à laquelle notre foi est dirigée ; pour les éléments sans Christ « nihil sint quam inanes larvæ ». (4) Les sacrements ne confèrent rien « propria eorum virtute » ; Dieu seul agit en nous par son Esprit. Ce sont des organes ou des moyens par lesquels Dieu opère efficacement. (5.) On les appelle parfois sceaux, mais l’Esprit seul est proprement le sceau, ainsi que le commencement et le consommateur de notre foi. (6) Dieu n’opère pas en tous ceux qui reçoivent les sacrements, mais seulement dans son propre peuple élu. (7) C’est pourquoi il faut rejeter la doctrine selon laquelle les sacrements transmettent la grâce à tous ceux qui ne s’opposent pas à l’obstacle du péché mortel. La grâce de Dieu n’est pas liée aux signes au point que tous ceux qui ont les seconds aient les premiers. (8) Les croyants reçoivent sans les sacrements les bénédictions qu’ils reçoivent dans leur usage. « Extra eorum usum fidelibus constat, quæ illic figuratur veritas. » Paul a reçu le baptême pour la rémission des péchés ; mais ses péchés lui furent pardonnés avant qu’il fût baptisé. Le baptême était pour Corneille la cuve de la régénération, mais il avait reçu l’Esprit avant d’être ainsi lavé extérieurement. Dans le LNous recevons Christ, mais Christ habite en chaque croyant, et nous devons avoir la foi avant de pouvoir nous approcher de manière acceptable de la table du Seigneur. (9) Le bénéfice des sacrements n’est pas limité au moment où ils sont administrés ou reçus. Dieu régénère souvent longtemps après le baptême ceux qui ont été baptisés dans l’enfance ; certains dans la première jeunesse, d’autres dans la vieillesse. Le bienfait du baptême se poursuit donc toute la vie, parce que la promesse qui y est signifiée reste toujours en vigueur.
1 Niemeyer, Collectio Conjessionum, Leipzig, 1840, p. 193-195.
En ce qui concerne la doctrine luthérienne à ce sujet, Guerike dit que les trois Églises, grecque, romaine et luthérienne, « sont d’accord pour soutenir que dans les sacrements les signes visibles en tant que tels transmettent réellement les choses divines invisibles, et par conséquent, qu’une participation des sacrements est nécessaire pour une participation des dons célestes (göttliche Sache) qu’ils contiennent. Tandis qu’au contraire l’Église réformée enseigne que les signes visibles en tant que tels ne transmettent pas la grâce invisible, et que le chrétien peut par la foi recevoir les mêmes bienfaits divins sans l’usage des sacrements, et par conséquent que les sacrements ne sont pas absolument nécessaires, et encore moins le point médian du plan chrétien de salut ». 1 Le langage des Symboles luthériens justifie ce langage fort de Guerike. C’est ainsi que les signataires de la Confession d’Augsbourg 2 : « Damnant Anabaptistas qui improbant baptismuni puerorum et affirmant pueros sine baptismo salvos fieri ». Et dans le commentaire de cet article de l’Apologie de la confession, il est dit 3 : « Nouns articulas approbatus est, in quo confitemur, quod baptismus sit necessaries ad salutem, et quod pueri sint baptizandi, et quod baptismus puerorum non sit irritas, sed necessaries et efficax ad salutem. » Les théologiens luthériens, cependant, en traitant de la nécessité du baptême, font une distinction entre les adultes et les enfants. En ce qui concerne les premiers, la régénération doit précéder le baptême. En référence à eux, le dessein du baptême est de sceller et de confirmer la grâce déjà reçue. En ce qui concerne les nourrissons, c’est l’organe ou le moyen de régénération. Ainsi Baier dit : 4 « Hie autem, quod ad finem proximum attinet, diversitas occurrit, respecta subjectormn diversorura. Nam infantibus quidem æque omnibus per baptismum primum confertur et obsignatur fides, per quam meritum Christi illis applicetur : Adultis vero illis tantum, qui fidem ex verbo conceperunt ante baptism ! suseeptionem, baptismus earn obsignat et confirmât. » C’est ainsi que Gerhard dit : « Infantibus baptismus principaliter est medium ordinarium regenerationis et mundationis a peccatis, etc. Secundario autem sigillum justitiæ et fidei confirmatio ; adultis credentibus baptismus principaliter præstat usum obsignationis ac testificationis de gratia Dei, υΙοθ^σία et vita æterna ; sed minus principaliter renovationem et dona Spiritus Sancti auget. Infantes, per baptismum primitias Spiritus et fidei accipiunt : adulti qui per verbum primitias fidei et Spiritus Sancti acceperunt, per baptismum increnienta ejusdem consequuntur. » 1
1 Symbolik, p. 374.
2 § i. ix. 3 ; Hase, Libri Symbolici, 3e édit. Leipzig, 1846, p. 12.
3 Apologia, iv. 51 ; Ibid., p. 156.
4 Compendium Theologian Positivœ, in. x. 10 ; édit. Francfort et Leipzig, 1739, p. 648.
1 Loci Theolotjici, xxi. vii. § 124 ; édit. Tübingen, 1769, t. IX, p. 131).
La doctrine de l’Église de Rome à ce sujet n’est pas que les sept sacrements sont nécessaires au salut, mais que chacun est nécessaire à la réception du don ou de la grâce qu’il est destiné à transmettre. Il ne peut y avoir de « grâce de l’ordre » sans ordination canonique, mais il n’est pas nécessaire que tout homme soit ordonné. Le sacrement de pénitence n’est nécessaire que dans le cas du péché post-baptismal, et même l’eucharistie, qu’ils considèrent comme le plus grand de leurs sacrements « en dignité et en mystère », n’est pas nécessaire aux enfants. Le baptême, cependant, étant le seul canal par lequel la rémission des péchés et la régénération sont transmises, est absolument nécessaire au salut. Et l’absolution sacerdotale est absolument nécessaire pour la rémission des péchés commis après le baptême. Des conséquences si révoltantes découleraient de l’application rigoureuse de ce principe, que les romanistes reculeraient devant son affirmation. Cela exclurait de nombreux confesseurs et martyrs du royaume des cieux. Il est donc enseigné que lorsque les circonstances rendent impossible la réception de ces sacrements, le but et le désir de les recevoir en assurent les bienfaits. Ces cas sont toutefois des exceptions et sont généralement négligés dans l’énoncé de la doctrine.. Cette exception ne s’applique pas aux nourrissons et, par conséquent, ils ne peuvent pas en bénéficier. C’est la doctrine de l’Église de Rome que toutes les personnes non baptisées manquent à la vie éternelle. C’est inclus dans leur idée de l’Église. Nul n’est sauvé s’il n’est pas dans le giron de la véritable Église. Il n’y a personne dans l’Église qui n’ait été baptisé et qui ne soit soumis aux évêques canoniques, et en particulier à l’évêque de Rome. Par conséquent, les non-baptisés qui ne sont pas dans l’Église, telle que définie par les romanistes, sont nécessairement exclus du royaume des cieux.
Le langage des normes romaines est parfaitement explicite. Le concile de Trente dit :1 « Si quis dixerit, non dari gratiam per hujusmodi sacramenta semper, et omnibus, quantum est ex parte Dei, etiam si rite ea suscipiant, sed aliquando, et aliquibus ; anathème, assieds-toi. Et encore :2 « Si quis dixerit baptismum liberum esse, hoc est non necessarium ad salutem ; anathème, assieds-toi. Dans le Catéchisme romain3, nous trouvons ce qui suit : « Estne Baptismus ad salutem omnibus necessarius ? » la réponse est : « Sed cum ceterarum rerum cognitio, quæ hactenus expositæ sunt, fidelibus utillissima habenda sit, turn vero nihil magis necessarium videri potest, quam ut doceantur, omnibus hominibus baptême ! legem a Domino præscriptam esse, ita ut, nisi per baptism ! gratiam Deo renascantur, in sempiternam miseriam, et interitum a parentibus, sive illi fideles, sive infidèles sint, procreentur. Selon l’Église de Rome, tous les non-baptisés, que leurs parents soient croyants ou infidèles, sont donc condamnés à la misère et à la perdition éternelles. En ce qui concerne la pénitence, le Concile de Trente dit : 4 « Est hoc sacramentum pœnitentiæ lapsis post baptismum ad salutern necessarium, ut nondum regeneratis ipse baptismus. Il enseigne aussi que la pleine confession de tous les péchés commis après le baptême est « jure divino » nécessaire, parce que notre Seigneur Jésus-Christ, sur le point de monter au ciel, a laissé ses prêtres comme ses vicaires, comme « præsides et judices », à qui tous les péchés mortels, dans lesquels les chrétiens peuvent tomber, doivent être communiqués, et qui sont autorisés à prononcer la sentence de rémission ou de rétention. On dit, en outre, que Notre-Seigneur enseigne que les prêtres, qui sont eux-mêmes en état de péché mortel, en vertu de la puissance du Saint-Esprit donnée alors ! dans l’ordination, exercer, en tant que ministres du Christ, cette fonction de remettre les péchés, et ceux qui prétendent que les prêtres méchants n’ont pas ce pouvoir se trompent. Tout cela est !· réitérée dans les canons et amplifiée et renforcée dans le Catéchisme.5
1 Sess. vii., De sacramentis in genere, canon 7 ; Streitwolf, t. I, p. 39.
2 Ibid., De baptismo, canon 5 ; Ibid., p. 41.
3 § 11. cap. ii. quæs. 25 (31, xxx.) ; Ibid., p. 274.
4 Sess. xiv. cap. 2 ; Ibid., p. 55.
5 Sess. xiv. cap. 5, 6 ; Ibid..
À cet égard, il suffit de faire remarquer :
1. Que la doctrine selon laquelle les sacrements sont nécessaires au salut, parce qu’ils sont les seuls canaux pour transmettre aux hommes les bienfaits de la rédemption du Christ, est clairement contraire aux enseignements exprès de la Bible. Partout, les Écritures enseignent que Dieu regarde au cœur ; qu’Il exige des hommes déchus simplement la foi en notre Seigneur Jésus Le Christ et le repentir envers Dieu comme les seules conditions indispensables du salut ; que tous les hommes ont libre accès à Dieu, par la médiation du Christ, pour obtenir de ses mains la rémission des péchés et tous les bienfaits de la rédemption ; qu’ils n’ont pas besoin de l’intervention des prêtres pour leur assurer cet accès ou la communication de ces bénéfices ; et qu’aucun rite extérieur n’a le pouvoir en lui-même de conférer la grâce. Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne périsse point, mais qu’il ait la vie éternelle. Celui qui croit en Lui n’est pas condamné ; mais celui qui ne croit pas est déjà condamné. Crois au Seigneur Jésus-Christ et tu seras sauvé. Quiconque invoquera le nom de l’Éternel sera sauvé. Quiconque croit que Jésus est le Christ, est né de Dieu. L’Écriture ne peut pas être brisée. Il n’est pas possible que celui qui croit vraiment au témoignage que Dieu a donné de son Fils faille à la vie éternelle. Nous devenons les fils de Dieu par la foi en Jésus-Christ. Il est vrai qu’il nous est commandé d’être baptisés, comme il nous est commandé de confesser le Christ devant les hommes ou d’aimer les frères. Mais ce sont là des devoirs auxquels la foi assure l’obéissance ; ils ne sont pas les moyens du salut.
2. Ce système rituel est tout à fait incompatible avec tout le génie du christianisme. Dieu est un Esprit, et Il exige de ceux qui L’adorent qu’ils L’adorent en esprit et en vérité. Les rites extérieurs sont déclarés n’être rien. La circoncision n’est rien, et l’incirconcision n’est rien. « Il n’est pas juif, ce qui l’est extérieurement ; ce n’est pas non plus la circoncision, qui est extérieure dans la chair : mais c’est un Juif, qui est un intérieur ; et la circoncision est celle du cœur, dans l’esprit, et non dans la lettre ; dont la louange n’est pas des hommes, mais de Dieu. (Rom., II, 28, 29.) Il ne s’agit pas seulement d’un fait, mais d’un principe. Ce que saint Paul dit ici de la circoncision et des Juifs, on peut le dire, et c’est en substance ce que dit saint Pierre à propos du baptême et du christianisme. Un homme qui n’est chrétien qu’extérieurement, n’est pas chrétien ; Et le baptême qui sauve, ce n’est pas le lavage du corps avec de l’eau, mais la conversion de l’âme. (1 Pierre iii. 21.) L’idée que l’état d’un homme devant Dieu dépend de quoi que ce soit d’extérieur, de la naissance, de l’appartenance à une organisation visible, ou d’un rite ou d’une cérémonie extérieure, est tout à fait odieuse à la religion de la Bible. Il n’appartenait au judaïsme que sous une forme corrompue du pharisaïsme. Il est vrai que, sous l’ancienne dispensation, un homme ne pouvait être sauvé s’il n’appartenait pas à la république d’Israël et s’il n’était pas l’un des enfants d’Abraham. Mais selon saint Paul (Rom. ix. 8 ; Gal. iii. 7 et 29), cela signifiait seulement qu’ils devaient croire au Dieu d’Abraham et à la promesse de la rédemption par sa postérité. Si un homme de naissance et de culture païennes parvenait à la connaissance de la vérité, croyait aux doctrines que Dieu avait révélées à son peuple élu, s’appuyait sur la promesse du salut par Christ et avait l’intention d’obéir à la loi de Dieu, alors il était un Juif intérieurement et faisait partie de la postérité d’Abraham. Sa circoncision n’était qu’un « sceau de la justice de la foi qu’il avait, mais qui n’était pas circoncis ». (Rom. iv. 11.) La doctrine selon laquelle un tel homme, malgré ce changement complet dans son état intérieur de connaissance, de conviction et de caractère, est sous la colère et la malédiction de Dieu, jusqu’à ce qu’un petit morceau de chair soit coupé de son corps, n’a jamais fait partie de la religion de Dieu. Cela fait partie intégrante de la religion de son grand adversaire. Par conséquent, quiconque enseigne qu’aucun homme ne peut être sauvé sans le rite du baptême, et qu’en recevant ce rite, il devient un enfant de Dieu et héritier du ciel, est antéchrist, et « même maintenant il y a beaucoup d’antéchrists ». (1 Jean ii. 18.)
3. Ce système ritualiste, qui fait des sacrements les seuls canaux de la grâce, et par conséquent absolument nécessaires au salut, conduit naturellement au divorce de la religion et de la morale. Un homme, selon ce système, peut être dans la vraie Église un enfant de Dieu, et assuré du ciel, et cependant tout à fait frivole, mondain et même immoral dans sa vie intérieure et extérieure. C’est ce qu’illustre à grande échelle tous les pays catholiques romains. Dans ces pays, certains des plus grands dévots sont des hommes ouvertement méchants. Et partout où ce système prévaut, nous trouvons ses défenseurs les plus zélés parmi les gens du monde, qui vivent à l’aise dans la pleine sécurité du salut, parce qu’ils sont dans l’Église et fidèles à observer « les jours, les mois, les temps et les années », et qu’ils sont ponctuellement « soumis aux ordonnances, ne touchent pas, ne goûtent pas, ne manipulent pas ».1 La grande question qui se pose dans la controverse avec le ritualisme est de savoir si le salut d’un homme dépend de son état intérieur ou de rites extérieurs ; ou, comme certains le donneraient, si son état est déterminé par des rites extérieurs, ou si les rites dépendent pour leur valeur et leur efficacité de son état intérieur. Dans l’une ou l’autre forme, la question est : Sommes-nous sauvés par la foi ou par les sacrements ? L’Apôtre nous enseigne qu'« en Jésus-Christ, ni la circoncision ne sert à rien, ni l’incirconcision, mais une nouvelle créature ». (Gal. vi. 15.)
1 Il n’y a pas longtemps, un homme d’esprit et de franchise disait à un ami : « Vous êtes très pieux, mais vous n’avez pas de religion. Je suis religieux, mais je n’ai pas de piété.
4. Les remarques ci-dessus n’ont pas vocation à s’appliquer et ne sont en fait pas applicables au système luthérien. Les luthériens enseignent, il est vrai, la nécessité des sacrements, mais ils enseignent aussi que la foi vraie, vivante et salvifique est la condition indispensable de leur efficacité ; et, comme ils enseignent en outre que, dans le cas des adultes, une telle foi produite par la Parole précède le baptême, ils ne font pas du baptême le canal ordinaire et indispensable pour la communication des influences salvifiques de l’Esprit Saint. Ils soutiennent que tous ceux qui, par la lecture ou l’écoute de la Parole, sont amenés à embrasser le Seigneur Jésus-Christ comme leur Dieu et Sauveur, deviennent ainsi enfants de Dieu et héritiers de la vie éternelle. Ils croient avec l’Apôtre (Gal., III, 26), que nous sommes tous enfants de Dieu par la foi en Jésus-Christ. C’est cette doctrine du salut par la foi, ou, comme le dit Luther, « par la foi seule », qui a sauvé le système luthérien du virus du ritualisme.
C’est valable ce qui est utile pour la fin prévue. La question de la validité des sacrements est donc une question de savoir ce qui est nécessaire pour qu’ils soient ce qu’ils prétendent être. La réponse à cette question est qu’ils doivent se conformer aux prescriptions données dans la Bible à leur sujet. Les éléments employés doivent être ceux que le Christ a ordonnés. La forme, ou la manière dont ces éléments sont donnés et reçus, doit être conforme à ses instructions ; et l’ordonnance doit être administrée avec l’intention de faire ce qu’il a commandé. Ainsi, si le baptême est un arrosage d’eau, il est nécessaire que l’eau soit l’élément employé dans son administration. S’il s’agit d’un lavage à l’eau au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, alors ces mots, ou cette forme, doivent être utilisés ; et l’ordonnance doit être administrée et reçue dans la foi de la Trinité. La foi générale de l’Église a été en faveur de la validité du baptême hérétique ; mais l’hérésie a été faite pour inciter à s’écarter de la norme de la foi, que la négation des doctrines essentielles de l’Évangile. Le baptême est une ordonnance chrétienne. Elle implique, tant de la part de l’administrateur que de celui du destinataire, la profession de la religion chrétienne. Il est parfaitement évident que le même service, quant à la matière et à la forme, rendu par un païen à un païen, qui attachait un sens entièrement différent à ce qui était fait, ne pouvait pas être considéré comme une ordonnance chrétienne.
L’autre condition nécessaire à la validité des sacrements concerne l’intention de ceux qui sont engagés dans le service. Ils doivent avoir l’intention de faire ce que Christ a commandé. Si un homme reçoit l’ordonnance du baptême, il doit avoir l’intention de professer sa foi en l’Évangile et d’accepter les conditions du salut qui y sont présentées. Et l’administrateur doit avoir le but d’initier le destinataire au nombre des disciples professés du Christ. Par conséquent, un sacrement administré par un idiot, ou un maniaque, ou dans le sport, ou dans la moquerie, est absolument nul et non avenu. Il n’a aucune signification et n’a aucune valeur.
La seule question sur laquelle il y a beaucoup de divergence d’opinions sur ce sujet, est celle-ci : La validité des sacrements dépend-elle de la position officielle de la personne par qui ils sont administrés ? Nous avons vu que les romanistes rendent l’ordination canonique ou la consécration absolument essentielle. Si quelqu’un d’autre qu’un évêque (dans le sens où ils l’entendent) confirme ou ordonne, rien n’est fait. Dans les deux cas, le service est un l’un, ne transmettant ni la grâce ni l’autorité. Si un autre qu’un prêtre absout un pénitent, il n’y a pas d’absolution ; et c’est ainsi qu’à propos de la Cène du Seigneur, les paroles de consécration prononcées par d’autres lèvres que celles d’un prêtre canoniquement ordonné, ne produisent aucun changement dans les éléments. La raison en est non seulement que l’officiant agit en pareil cas de manière désordonnée et irrégulière, mais qu’il n’a ni la prérogative ni le pouvoir de rendre les sacrements effectifs. Ils sont invalides, parce qu’ils ne servent pas à accomplir la fin pour laquelle ils ont été nommés. Les romanistes se rendent coupables d’une inconséquence bienveillante en faisant du baptême une exception à cette règle. Il y a la même raison logique ou théorique pour laquelle le baptême devrait être invalide lorsqu’il est administré par une personne non ordonnée, que la confirmation, l’ordination ou l’absolution, lorsqu’elle est ainsi administrée, devrait être nulle et non avenue. Mais comme le baptême est considéré comme essentiel au salut, les âmes doivent souvent périr, lorsqu’un prêtre est inaccessible, à moins que le baptême laïc ne soit autorisé. Dans les cas d’une telle urgence, l’Église de Rome déclare donc que le baptême est valide (c’est-à-dire efficace) lorsqu’il est administré par un laïc, une femme ou même par un païen, à condition que l’administrateur ait réellement l’intention de baptiser, c’est-à-dire de faire ce que l’Église envisage dans l’administration de cette ordonnance.
Les normes de l’Église luthérienne et de l’Église réformée placent la prédication la Parole et l’administration des sacrements sur le même terrain. Ils enseignent (1.) Que le Christ a nommé certains officiers dans son Église. (2) Que par son Esprit, il appelle et qualifie certains hommes pour l’accomplissement des devoirs de ces fonctions. (3) Que ceux qui y aspirent soient examinés quant à leur vocation et à leurs qualifications. (4) Que s’ils sont jugés capables, ils doivent être mis à part ou ordonnés d’une manière ordonnée à la fonction à laquelle ils se croient appelés. (5) Que les fonctions spéciales d’une classe de ces officiers sont la prédication et l’administration des sacrements. (6.) Il résulte de tout cela que quiconque n’est pas ainsi appelé et ordonné à entreprendre l’exercice de l’une ou l’autre de ces fonctions du ministère, dans un état stable de l’Église, est dans l’erreur ; c’est une violation de l’ordre divinement constitué de l’Église du Christ. Selon ce point de vue, la prédication laïque et l’administration laïque des ordonnances (dans des circonstances ordinaires) sont également erronés. Mais sont-ils invalides ? C’est une question très différente. Nous savons que les romanistes, lorsqu’ils déclarent un sacrement invalide, veulent dire qu’il est impuissant. Nous savons que lorsque l’ancienne loi anglaise déclarait invalide tout mariage s’il n’était pas célébré par un homme dans les ordres sacrés, cela signifiait que la cérémonie était nulle et non avenue ; que les parties n’étaient pas mariées. Mais qu’est-ce que la prédication laïque peut signifier comme étant invalide ? L’Évangile est-il invalide ? Perd-elle sa vérité, son autorité ou son pouvoir ? Ce n’est pas possible. Ni son autorité ni son pouvoir ne dépendent des lèvres d’argile par lesquelles il est proclamé. De plus, si un certain nombre de chrétiens pieux s’assemblent, aucun ministre ne peut être eu pour célébrer la Cène du Seigneur, en quel sens un tel service est-il invalide ? Ne commémorent-ils pas la mort du Christ ? Le pain et le vin ne sont-ils pas pour eux les symboles de son corps et de son sang ? Si la foi est en exercice, ne peuvent-ils pas recevoir ces symboles pour leur nourriture spirituelle et leur croissance dans la grâce ? De plus, si le baptême est un lavage à l’eau au nom de la Sainte Trinité, pour signifier et sceller notre greffe en Christ, cesse-t-il d’être, ou de signifier cela s’il n’est pas administré par un ministre ordonné ? L’homme ainsi baptisé ne fait-il pas profession de foi au Christ ? et ne devient-il pas par là membre de ce grand corps qui le confesse devant les hommes ? Peut-elle donc être plus invalide que l’Évangile, lorsqu’il est prêché par un laïc ?
Ce que la Bible semble donc enseigner à ce sujet, c’est que Christ ayant établi certains officiers dans son Église pour prêcher sa Parole et administrer ses ordonnances, pour que tout homme, dans des circonstances ordinaires qui n’est pas dûment nommé, assume les fonctions du ministère, est irrégulière et fausse, parce que contraire à l’ordre de l’Église du Christ. Au-delà de cela, les normes réformées et luthériennes ne semblent pas avoir disparu.
« Le baptême est un sacrement dans lequel le lavage à l’eau, au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, signifie et scelle notre greffe en Christ et notre participation aux bienfaits de l’alliance de grâce, et notre engagement à être au Seigneur. » 1
1 Catéchisme abrégé de Westminster, Ques. 94.
Selon la définition donnée ci-dessus, le baptême est un lavage à l’eau. Par lavage, on entend toute application d’eau sur le corps qui a pour effet de le purifier. Cela peut se faire par immersion, affusion ou aspersion. Le commandement de baptiser est donc simplement un commandement de se laver à l’eau. Il ne s’agit pas spécifiquement d’un ordre d’immerger, d’affuser ou d’asperger. Le mode d’application de l’eau comme moyen de purification n’est pas essentiel. La seule chose nécessaire est de faire une application d’eau sur la personne, qui rendra l’acte significatif de la purification de l’âme.
Le premier argument en faveur de cette conception de l’ordonnance est un argument a priori. Comme, d’un commun accord, le dessein de l’institution est soit de symboliser, soit d’opérer la purification de l’âme de la culpabilité et de la pollution du péché, par le sang et l’esprit de Christ, il semblerait qu’il s’ensuive que le lavage par le sang et l’esprit du Christ. L’eau, quelle qu’en soit la forme, est tout ce qui est nécessaire à l’intégrité de l’ordonnance. L’idée de purification est aussi clairement et aussi fréquemment signifiée par l’affusion que par l’immersion. D’ailleurs, rendre quelque chose d’aussi purement circonstanciel que la manière dont l’eau est employée dans l’acte de purification, essentielle à un sacrement chrétien, qui, selon les uns, est absolument nécessaire au salut ; et, selon d’autres, est essentielle à l’appartenance à l’Église visible du Christ, est opposée à la nature même de l’Évangile. C’est rendre le christianisme plus judaïque que le judaïsme, tel qu’il est compris par les pharisiens ; car ils se purifiaient eux-mêmes, leurs offrandes, leurs lieux saints et leurs ustensiles, par immersion, affusion ou aspersion, selon ce qui était le plus approprié ou le plus commode.
Utilisation du mot dans les classiques.
Le second argument à ce sujet est tiré de l’usage du mot. Dans les Classiques : dans la Septante et les écrits apocryphes de l’Ancien Testament : dans le Nouveau Testament : et dans les écrits des Pères grecs, les mots /3ά7ττω, βατΓτί,ζα^ et leurs apparentés, sont employés avec une telle latitude de sens, qu’ils prouvent l’assertion que l’ordre de baptiser est un commandement d’immersion, d’être tout à fait non autorisée et déraisonnable.
Depuis la Réforme et l’essor des baptistes en tant que dénomination distincte, qui soutiennent que « baptiser c’est tremper, et tremper c’est baptiser », le sens des mots grecs dans a fait l’objet d’un débat, sur lequel des centaines de volumes ont été écrits. Il est évidemment impossible d’entrer dans cette discussion dans ces pages. Tout ce qu’on peut tenter, c’est d’exposer brièvement les conclusions que l’on croit établies, tandis que les preuves sur lesquelles reposent ces conclusions doivent être recherchées dans les ouvrages consacrés à ce sujet. En ce qui concerne l’emploi classique des mots en question, il est clair que βάπτω signifie (1.) À tremper. (2.) Teindre par trempage. 3° De teindre sans égard à la manière dont on le fait ; comme on dit qu’un lac est baptisé (c’est-à-dire teint) par le sang qui y est versé ; On dit d’un vêtement qu’il est baptisé par la matière colorante qui tombe dessus. (4.) Il signifie aussi dorer ; aussi à l’émaillage, comme lorsque la faïence est recouverte d’une matière vitreuse. (-5.) Pour mouiller, humidifier ou laver. (6.) Tempérer, comme le fer chaud est trempé ; Cela peut être fait en plongeant ou en versant. « Trempé, ύ-0 « Λάιου », ne signifie pas plongé dans l’huile. (7.) Imprégner. On dit que l’esprit est baptisé de fantaisies ; n’y est pas plongé, car c’est υπο των φαντασιών.1
1 Il y a deux écrivains américains récents dont les œuvres contiennent tout ce que la plupart des étudiants seraient disposés à lire sur ce sujet. L’un est le révérend Dr Conant, dans son livre, Meaning and Use of the Word Baptizein, New York, 1868 ; et l’autre le révérend James W. Dale, dans son Baptême classique ; Baptême judaïque ; et le baptême johannique ; suivi du baptême chrétien.
On dit d’un homme qu’il est « pénétré de justice ». Cela ne peut pas signifier « plongé ». Il est donc évident qu’un ordre de baptiser, fait dans l’emploi du mot / ?άττττω, ne peut pas se limiter à un commandement de plonger, de plonger ou d’immerger.
Quant à l’emploi classique de βαπτίζω, il signifie, (1.) Pour s’immerger, ou s’immerger. Il est très fréquemment utilisé lorsque l’on parle de navires coulés ou ensevelis dans la mer. On dit alors qu’ils sont baptisés. (2.) De déborder ou de recouvrir d’eau. On dit que le bord de la mer est baptisé par la marée montante. (3.) Mouiller soigneusement, humidifier. (4.) Verser ou arroser. (5.) D’une manière ou d’une autre, d’être submergé ou dominé. C’est pourquoi on dit que les hommes sont baptisés de vin ζ׳» ί βεβαπτισμίνοι sont les intoxiqués), d’opium, de dettes, de questions embarrassantes. On dit que le vin est baptisé en y versant de l’eau.2
2 On trouvera des illustrations de quelques-unes de ces utilisations du mot dans le Thésaurus de Stephen et dans le Lexique de Scapula , ainsi que dans les ouvrages du Dr Conant et du Dr Dale, qui discutent de l’incidence de chacun sur la question débattue à partir de leurs points de vue respectifs.
Le mot βαπτίζω, comme le Dr Dale le soutient avec tant d’acharnement, appartient à cette classe de mots qui indiquent un effet à produire sans exprimer le genre d’action par laquelle cet effet doit être produit. À cet égard, il est analogue au mot « enterrer ». Un homme peut être enterré en étant recouvert de terre ; en étant placé dans une grotte vide ; en étant mis dans un sarcophage ; ou même, comme chez nos Indiens, en étant placé sur une plate-forme élevée au-dessus du sol. L’ordre d’enterrer peut être exécuté de l’une ou l’autre de ces manières. Ainsi, en ce qui concerne le mot βαπτίζω, il y a un effet donné à produire, sans aucune injonction spécifique quant à la manière ; soit par immersion, soit par aspersion, soit par aspersion.
Utilisation des mots dans la Septante et les Apocryphes.
Ces mots sont rares dans la version grecque de l’Ancien Testament. Dans le cinquième chapitre de la deuxième épître aux Rois, nous avons l’histoire de Naaman le Syrien, qui vint trouver le prophète pour être guéri de sa lèpre. Et « Élisée lui envoya un messager, et lui dit : Va te laver sept fois dans le Jourdain » (verset 10). Puis il descendit et se plongea sept fois dans le Jourdain (Ιβαπτ ίσατο) » (verset 14). Le seul intérêt particulier de ce passage est la preuve qu’il fournit que le baptême et le lavage sont identiques. L’ordre de se laver a été obéi en se baptisant lui-même. La Vulgate ne change pas les mots des deux passages, « Vade et lavare septies in Jordane » (verset 10). Descendit et lavit in Jordane septies » (ver. 14). La Septante a λοΰσαι au verset 10, et εβαπτίσ-ατο au verset 14.
Dans Daniel iv. 33, il est dit que le corps de Nabuchodonosor « était mouillé (baptisé , ίβάφη, [LXX. verset 30]) avec la rosée du ciel. Ici, l’idée d’un trempage est absolument exclue.
Le mot βάπτω, lorsqu’il signifie plonger, n’inclut pas nécessairement l’idée d’immersion totale. Un simple contact ou une immersion partielle est souvent tout ce que le mot est censé faire d’exprimer ; comme dans Lévitique iv. 17 : « Le prêtre trempera (βάι/׳ει) son doigt dans un peu de sang. » Lévitique xiv. 6 : « Quant à l’oiseau vivant, il le prendra, ainsi que le bois de cèdre et l’hysope, et il les trempera (β«ι/׳ει) dans le sang de l’oiseau qui a été tué au-dessus de l’eau courante. » Toutes ces choses ne pouvaient pas être immergées dans le sang d’un oiseau. Boaz dit à Ruth, à l’heure du repas : « Trempe (βάζεις) ton morceau dans le vinaigre. » (Ruth ii. 14.) Josué iii. 15 :
« Les pieds des prêtres qui portaient l’arche étaient trempés (« βά-φησαν) dans le bord de l’eau. » 1 Samuel xiv. 27 : Jonathan « trempa » (ΐβαψίν) l’extrémité de la verge qui était dans sa main « dans un rayon de miel ». Psaume LXVIII. 23 (24) : « Afin que ton pied soit trempé (βαφη) dans le sang de tes ennemis. » Ces exemples prouvent que même βάπτω, tel qu’il est utilisé dans le Septnagint, n’inclut pas, lorsqu’il signifie plonger, l’idée d’immersion complète.
βαπτίζω (selon Trommius), outre le passage déjà cité de 2 Rois v. 14, n’apparaît dans le Septnagint que dans Ésaïe xxi. 4, où le grec est ή ανομία μζ βαπτίζζι, « l’iniquité me baptise (ou me submerge) ». La version anglaise, qui s’en tient à l’hébreu, se lit comme suit : « La peur m’a effrayé. » La Vulgate a « Tenebræ stupefecerunt me ». Le mot apparaît deux fois dans les apocryphes, Judith xii. 7, et Siracide xxxiv. 27 [xxxi. 25], Wahl,1 se référant à ces deux passages, définit « βάπτομαι, me lavo = νίπτομαι,״ « Je me lave ». Dans le Siracide, l’expression est βαπ-τιζόμςνος άπο νΐκρου, « baptisé d’un cadavre », c’est-à-dire purifié de l’impureté contractée en touchant un cadavre. Ou, comme le traduit Fritzsche, « Der sich wiischt von einem Tod ten, einer Leiche, sich reinigt von der Befleckung, die ihm die Berührung des Leichn aus zugezogen, vrgl. 4 Moïse xix. 11.» 2 C’est-à-dire : « Celui qui se lave d’un cadavre se purifie de la souillure occasionnée par le toucher. » Nous tirons des leçons de l' passage cité à titre d’illustration (Nombres xix. 11-13), que cette purification s’effectuait par l’aspersion des cendres d’une génisse. (Voir le verset 9, et comparez Héb. ix. 13.) Dans Nombres xix. 13, il est dit : « Quiconque touche le corps mort d’un mort, et ne se purifie pas, souille le tabernacle de l’Éternel ; et cette âme sera retranchée d’Israël, parce que l’eau de la séparation n’a pas été aspergée sur elle, elle sera impure ; son impureté est encore sur lui. L’eau de séparation était l’eau dans laquelle les cendres d’une génisse rousse avaient été mélangées, comme nous l’avons décrit dans la partie précédente du chapitre. Et c’est l’aspersion de cette eau qui a opéré le baptême, ou la purification, de la personne souillée.
1 Claris Librorum V. T. Apocryphorum Philologica, Auctore Christ. Abrah. Wahl, Philos, et Thcol. Doctore, Leipzig, 1853.
2 Kurzgefasstes exegetisches Ilandbuch zu den Apokryphen des Alien Testamentes, ▼on Otto Fritzsche, Leipzig, 1859, vol. V, p. 195.
Le passage de Judith ne détermine rien dans un sens ou dans l’autre quant au sens du mot. Il dit simplement , ίβαπτίζζτο εν τη παρεμβολή επί της πηγης τού ΰδατος, « elle s’est baptisée dans le camp près d’une fontaine d’eau ». S’il est établi que βαπτίζω signifie toujours s’immerger, alors ce passage affirme que Judith s’est immergée dans la fontaine. Mais si, comme le croient la grande majorité des chrétiens, le mot signifie souvent laver ou purifier, sans égard à la manière dont la purification est effectuée, alors on ne peut pas prouver que le passage affirme autre chose que le fait que Judith s’est lavée à la fontaine. Les circonstances de l’espèce plaident toutes en faveur de cette dernière interprétation. Selon le récit, le pays avait été envahi par une immense armée d’Assyriens sous le commandement d’Holopherne. La résistance semblait sans espoir et la destruction totale était imminente. Dans cette situation d’urgence, Jndith, une jeune femme belle et riche, enflammée de zèle pour son pays et sa religion, résolut de faire un effort désespéré pour le salut de son peuple. Dans ce but, elle se rendit dans le camp des ennemis, se présenta à Holopherne et lui promit de l’aider dans la conquête du pays. Le général assyrien, captivé par ses charmes, la traita avec une grande faveur. Elle resta tranquille dans sa tente pendant trois jours, mais on lui permit de recourir la nuit à la fontaine pour se purifier. Le quatrième jour, elle fut invitée à un grand festin, où Holopherne but à l’excès, de sorte que lorsque les convives se furent retirés et que le général fut dans un état d’ivresse impuissante, Judith, avec l’aide de sa servante, lui coupa la tête et la porta au camp des siens. Cela a conduit au renversement des Assyriens et à la délivrance du pays.
Les circonstances de cette affaire qui permettent de supposer que Judith est allée à la fontaine non pas pour l’immersion, mais pour les ablutions, sont les suivantes (1). C’était à l’intérieur du camp, nécessairement, pour une telle armée, de grandes dimensions. Mais un camp rempli de soldats ne semble pas être un lieu de baignade approprié pour une dame de distinction, même la nuit. (2) Le Dr Conant dit : « Il n’y avait évidemment pas de manque d’eau pour l’immersion du corps, à la manière juive, c’est-à-dire en marchant dans l’eau jusqu’à la profondeur appropriée, puis en descendant jusqu’à ce que tout le corps soit immergé. » 1 La probabilité, cependant, semble tout le contraire. Ce devait être une fontaine extraordinaire, si elle permettait une telle immersion. Si le mot βαπτίζω ne peut signifier que « immerger », ces considérations ne valent rien. Mais si le mot signifie laver ou purifier aussi bien que plonger, alors ils sont d’un poids suffisant pour faire pencher la balance en faveur de la première explication. En lui-même, cependant, le passage ne prouve rien.
1 Signification et usage de Baptlzein, New York, 1868, p. 85.
Le mot βάπταν est employé quatre fois dans le Nouveau Testament, et dans aucun d’entre eux il n’exprime l’idée d’une immersion totale. Dans Luc xvi. 24 : « Afin qu’il trempe (βάι/π/) le bout de son doigt dans l’eau. » Le doigt, lorsqu’il est plongé dans l’eau, n’est pas immergé. Lorsqu’il est placé horizontalement sur l’eau et légèrement enfoncé, il retient plus d’humidité que s’il y était plongé perpendiculairement. Jean xiii. 26, parle deux fois de tremper le sop ( et ίμβάψατ). Mais un morceau tenu dans les doigts, n’est que partiellement immergé. Dans Apocalypse xix. 13, les mots πίριβεβλημένοτ ιμάτιον βίβαμ,ρίνον α’ίματι signifient évidemment « revêtu d’un vêtement taché ou teint de sang ». L’allusion est probablement à Ésaïe IXIII. 1 et suiv. : « Qui est celui qui vient d’Édom, avec des vêtements teints de Botsra ? . . . . Pourquoi es-tu rouge dans tes vêtements, et tes vêtements semblables à celui qui marche dans la graisse du vin ? J’ai foulé seul le pressoir ; . . . . et leur sang sera répandu sur mes vêtements, et je souillerai tous mes vêtements. Dans ce cas, donc, le baptême s’est fait par aspersion. Βατπϊξω apparaît dans le Nouveau Testament environ quatre-vingts fois ; βάττησμα une vingtaine de fois ; et βαπτισμός quatre fois. Comme tout le monde admet que le baptême peut s’effectuer par immersion, et comme les purifications sous l’Ancien Testament (appelé par l’Apôtre Hébreux ix. 10, en grec, « baptêmes divers ») s’effectuaient par immersion, affusion et aspersion, il ne serait pas surprenant que dans quelques-uns de ces nombreux passages, le baptême dont il est question implique nécessairement l’immersion. Il se trouve, ou il a été ordonné ainsi, cependant, qu’il n’y a pas un tel passage dans tout le Nouveau Testament. Les lieux où se trouvent ces mots peuvent être classés dans les classes suivantes : 1° Ceux où, pris isolément, la présomption est en faveur de l’immersion. (2) Celles dans lesquelles l’idée d’immersion est nécessairement exclue. 3° Celles qui en elles-mêmes ne sont pas décisives, mais où la présomption est tout à fait en faveur de l’affusion.
C’est à la première classe qu’appartiennent les passages qui parlent des baptisés entrant dans l’eau et « sortant de l’eau ». (Matt. iii. 16 ; Actes viii. 38, 39.) De tels passages doivent toutefois être isolés afin de créer une présomption en faveur de l’immersion. Selon les récits anciens, la manière commune de baptiser était que la personne entrait dans l’eau, quand on lui versait de l’eau sur la tête, puis elle sortait de l’eau, pas le moins du monde incommodée par des vêtements dégoulinants. Et quand nous nous souvenons qu’il est dit au sujet de Jean : « Alors Jérusalem, et toute la Judée, et toute la région autour du Jourdain, sortirent vers lui, et furent baptisées de lui dans le Jourdain, confessant leurs péchés » (Matt. III. 5, 6), il semble physiquement impossible qu’il ait immergé toute cette multitude. Si l’on tient compte de toutes les circonstances, la présomption en faveur de l’immersion, même dans cette catégorie de passages, disparaît.
2. La seconde classe de passages, ceux d’où l’idée d’immersion est exclue, comprend tous ceux qui se rapportent au baptême de l’Esprit. On dit souvent que l’Esprit est répandu sur les hommes ; mais il n’est jamais dit que les hommes sont plongés ou immergés dans le Saint-Esprit. Une telle idée est tout à fait incongrue. Quand donc on dit que les hommes sont baptisés par le Saint-Esprit, comme on le fait si souvent, il faut se référer à l’effusion, ou à l’affusion de l’Esprit par laquelle l’âme est purifiée du péché. Comme le Saint-Esprit est une personne, et non une simple influence ou une force, la préposition εν employée à ce propos (Matt. iii. 11 ; Marque i. 8 ; Jean i. 33 ; Actes i. 5, xi. 16 ; 1 Corinthiens xii. 13) doit avoir sa force instrumentale. L’œuvre accomplie en nous par le Saint-Esprit est un baptême. De même que l’eau dans les mains de Jean était le moyen de purification du corps, de même le Saint-Esprit, tel qu’il est envoyé ou donné par Jésus-Christ, purifie l’âme. Certains commentateurs modernes sont de tels puristes qu’ils ne sont pas disposés à permettre le moindre écart par rapport à l’usage classique dans le grec du Nouveau Testament. Ils parlent comme si les écrivains sacrés étaient des grammairiens grecs, au lieu d’hommes illettrés écrivant dans ce qui était pour eux une langue étrangère. Ainsi, parce que la particule ׳״a en grec classique a toujours une force télique, ils nient qu’elle soit jamais utilisée de manière ecbatique dans le Nouveau Testament, même dans des cas tels que Luc xxii. 30 : « Je vous établis un royaume. ... afin que vous mangiez et buviez à ma table. Jean vi. 7 : « Deux cents deniers de pain ne leur suffisent pas, pour que chacun d’eux en ait un peu. » Romains xi. 11 : « Ont-ils trébuché dans le dessein de tomber ? » 1 Corinthiens xiv. 13 : « Que celui qui parle une langue inconnue prie pour qu’il interprète », etc., etc. Ainsi, aussi, parce que les mots πιστεύω, πίστις et πιστός dans les classiques se trouvent rarement dans la construction avec la préposition εν, ils donnent l’interprétation la plus peu naturelle à de nombreux passages afin d’éviter d’admettre cette construction dans le Nouveau Testament. C’est ce qui est fait en face de passages tels que Marc i. 15, πιστεύετε εν τω εύαγγελι’ω. Galates iii. 26, « Vous êtes tous les enfants de Dieu, δια ττ/ς ττίστεως èv Χριστώ Ιησού. » Ephésiens ΐ. 15, « Après que j’ai entendu parler de votre, πίστιν ε’ν τω Κυρίω Ίησοΰ », et beaucoup d’autres du même genre. De même, parce que la force instrumentale de ε’ν est rare dans les ciassies, elle est évitée autant que possible dans les Écritures. Le baptême ε’ν πνεΰρατι, au lieu d’être compris comme signifiant un baptême par ou avec l’Esprit, signifie « dans la sphère de l’Esprit », et le baptême εν ττυρί, baptême « dans la sphère du feu ». Ce que cela signifie, ce serait difficile pour la plupart de ceux à qui la Bible est destinée à le comprendre. Le baptême de Jean et celui du Christ sont opposés. Celui qui a été baptisé d’eau ; l’autre avec le Saint-Esprit. Dans Actes i. 5, il est dit : « Jean baptisa vraiment d’eau (υδατι, le datif instrumental simple) ; mais vous serez baptisésd (« ׳ Πνευ/ζατι άγίω) avec le Saint-Esprit pas beaucoup de jours lienee. De même que baptiser ΰδαη ne peut pas signifier immerger dans l’eau, de même ean baptiser εν τω Πνεΰρατι ne signifie pas non plus immerger dans l’Esprit. Le fait est que βαπτίζαν n’exprime aucun mode d’action particulier. Quant à la teinture, exprime toute espèce d’action par laquelle un objet est coloré ; enterrer, toute sorte d’action par laquelle un objet est caché et protégé ; Ainsi, baptiser, exprime tout acte par lequel une personne ou une chose est amenée à l’état d’être mouillée, purifiée, ou même abrutie, comme par l’opium ou le vin.
Un autre passage dans lequel ce mot se rencontre où l’idée d’immersion est exclue, est 1 Corinthiens x. 1, 2 : « Tous nos pères étaient sous la nuée, et tous passèrent par la mer ; et tous furent baptisés pour Moïse dans la nuée et dans la mer. Les gens ont traversé la mer à sec. Pour autant que l’on sache, pas une goutte d’eau ne les a touchés. La nuée dont il est question était sans doute la colonne de nuée le jour et la colonne de feu la nuit qui guidait le peuple à travers le désert. Le sens simple et généralement accepté de ce passage est que, de même qu’un homme est amené par le baptême chrétien au nombre des disciples professés et avoués de Christ, de même les Hébreux ont été amenés par les manifestations surnaturelles de la puissance divine spécifiées, dans la relation des disciples et des disciples avec Moïse. Il n’y a aucune allusion à l’immersion, à l’affusion ou à l’aspersion dans le boîtier.
Un autre passage appartenant à cette classe est celui de Marc VII, 4 : « Quand ils reviennent du marché, à moins qu’ils ne se lavent (βαπτ ίσωνται), ils ne mangent pas. Et il y a beaucoup d’autres choses qu’ils ont reçues pour les contenir, comme le lavage des coupes, des pots, des vases d’airain et des tables (κλ״ώ . couches). Soutenir que des lits ou des canapés ont été immergés est un simple acte de désespoir. Le baptême signifie ici, comme partout lorsqu’il s’agit d’un rite religieux, une purification symbolique par l’eau, sans la moindre référence à la manière dont cette purification s’effectuait.
3. La troisième classe de passages comprend tous ceux dans lesquels l’idée d’immersion, bien qu’elle ne soit pas absolument exclue, est au dernier degré improbable. Le regretté Dr Edward Robinson, qu’il n’y a pas de plus grande autorité que lui sur tout ce qui concerne la topographie et la géographie physique de la Palestine et les habitudes de ses habitants, dans la mesure où elles sont déterminées par la nature du pays, dit : « L’idée de bains privés dans les familles de Jérusalem et de Palestine en général est exclue. » (2.) « Dans les Actes, ii. 41, on dit que trois mille personnes ont été baptisées à Jérusalem apparemment en un seul jour à la Pentecôte en juin ; et dans les Actes iv. 4, le même rite est nécessairement impliqué à l’égard de cinq mille autres. Contre l’idée d’une immersion totale dans ces cas, il y a une difficulté, apparemment insurmontable, dans la rareté de l’eau. Il n’y a en été aucun cours d’eau dans le voisinage de Jérusalem, si ce n’est le simple ruisseau de Siloé long de quelques verges ; et la ville est et a été approvisionnée en eau par ses citernes et ses réservoirs publics. 1 Ni l’une ni l’autre de ces sources n’aurait pu être bien approvisionnée pour l’immersion de huit mille personnes. La même rareté de l’eau interdisait l’usage des bains privés comme coutume générale ; et exclut ainsi l’idée de se baigner " dans des passages tels que Luc xi. 38 ; Marc vii. 2-8. Il confirme sa conclusion en faisant d’autres remarques : (3.) « Dans les premiers Les versions latines du Nouveau Testament, comme, par exemple, l’Itala, qu’Augustin considérait comme la meilleure de toutes,2 qui remonte apparemment au IIe siècle et à l’usage lié à l’âge apostolique, le verbe grec, βαπτίζω, est uniformément donné sous la forme latine, « baptizo », et n’est jamais traduit par « immergo », ou tout autre mot semblable. montrant qu’il y avait quelque chose dans le rite du baptême auquel celui-ci ne correspondait pas. 3 (4.) Les fonts baptismaux que l’on trouve4 encore parmi les ruines des plus anciennes églises grecques de Palestine, comme à Tekoa et à Gophna, et qui remontent apparemment à des temps très anciens, ne sont pas assez grands pour admettre le baptême de personnes adultes par immersion, et n’ont évidemment jamais été destinés à cet usage.5
1 Voir Recherches bibliques en Palestine, t. I, pp. 479-516.
2 De Doctrines Christiana, ii. 22 [xv.] ; Œuvres, édit. Bénédictines, Paris, 1836, t. III. p. 54, d.
3 Voir Blanchini, Evangeliomm Quadruplex, etc., Rom. 1749.
4 Voir Robinson’s Biblical Researches in Palestine, édit. Boston, 1841, vol. II. à la p. 182 ; Vol. III. à la p. 78.
5 Voir Robinson’s Lexicon of the New Testament, word βαπτίζω, New York, 1850.
Il est donc au dernier degré improbable que les milliers de personnes mentionnées dans les premiers chapitres des Actes aient été baptisées par immersion. La même invraisemblance existe pour le centurion de Césarée et le geôlier de Philippes. En ce qui concerne le premier, Pierre a dit : « Quelqu’un peut-il interdire l’eau ? », ce qui implique naturellement que l’eau devait être apportée à Corneille, et non pas qu’il devait être amené à l’eau. Quant au geôlier, il est dit (Actes, XVI, 33) que lui et tous les siens furent baptisés dans la prison, comme le récit l’implique clairement, à minuit. Il y a la même improbabilité contre la supposition que l’eunuque, mentionné dans les Actes viii. 27-38, a été baptisé par immersion. Il voyageait à travers une partie désertique du pays en direction de Gaza, lorsque Philippe le rejoignit : « Et comme ils continuaient leur chemin, ils arrivèrent à une certaine eau (e’Wτι ν8ωρ, à une certaine eau). » Il n’y a pas de cours d’eau connu dans cette région d’une profondeur suffisante pour permettre l’immersion d’un homme. Il est possible, en effet, qu’il y ait eu un réservoir ou un réservoir dans ce quartier. Mais c’est un fait qu’il faut supposer sans preuve et contre toute vraisemblance. Il est dit qu’ils « descendirent tous les deux dans l’eau » et remontèrent. hors de l’eau. Mais on pourrait dire cela, si l’eau n’était pas assez profonde pour couvrir leurs chevilles.
La présomption est encore plus forte contre l’immersion dans le cas mentionné dans Marc VII. 4. Il est dit des pharisiens et de tous les Juifs que « lorsqu’ils reviennent du marché, à moins qu’ils ne se baptisent eux-mêmes (« *r μη βαπτΐσωνται), ils ne mangent pas. » Considérons-le ici, (1.) Que les bains privés étaient très rares à Jérusalem, à cause de la nécessité du cas. (2) Que ce qui est dit n’est pas seulement dit des hommes riches et de rang qui pourraient être supposés avoir des commodités et un luxe que le peuple ne pourrait pas commander. On dit des « pharisiens », une classe nombreuse, et non seulement de cette classe, mais de « tous les Juifs ». Il est à peu près incroyable, dans de telles circonstances, que « tous les Juifs » se soient immergés chaque fois qu’ils venaient de l’αγορά, c’est-à-dire « un lieu de villégiature publique dans les villes et les villages ; n’importe quel endroit ouvert, où les gens se réunissaient soit pour affaires, soit pour s’asseoir et converser. Dans les villes orientales, ces places ouvertes étaient à l’intérieur des portes ; et c’est là que les affaires publiques étaient traitées, et que les tribunaux se tenaient, ainsi que les marchés.» 1 Il est très difficile de croire que tous les Juifs s’immergeaient chaque fois qu’ils venaient d’un tel lieu de villégiature publique, si l’on considère que les facilités pour une telle immersion n’étaient pas à leur disposition. (3) Les mots baptiser et laver sont intervertis dans tout cela de manière à montrer que, dans l’esprit de l’auteur, ils étaient des expressions synonymes. Les pharisiens se plaignaient que les disciples mangeaient avec des mains non lavées (arArot ?) ; car ils ne mangent que s’ils se lavent (νί^ωνται) les mains ; et quand ils reviennent du marché, ils ne mangent pas à moins qu’ils ne se lavent (βαπτισωνται) ; et ils s’attachent au lavage (βαπτισμούς) des tasses et des pots, des vases d’airain, et des tables ou des divans. Baptiser les mains, c’était se laver les mains, et le mode habituel d’ablution en Orient est de verser de l’eau sur les mains (voir 2 Rois iii. 11).
1 Robinson, sub voce.
Il est notoire que les diverses ablutions prescrites par la loi mosaïque se faisaient tantôt par immersion, tantôt par affusion, tantôt par aspersion. Et il n’est pas moins vrai que tous ces modes de purification sont appelés par les écrivains sacrés διάφοροι βαπτι, σμοί, comme dans Hébreux, IX, 10, et Marc, VII. 4.
Il n’y a donc pas un seul cas où le baptême implique nécessairement l’immersion ; il y a beaucoup de cas où ce sens est tout à fait inadmissible, et beaucoup d’autres où il est au plus haut degré improbable. Si l’immersion était indispensable, pourquoi le mot · καταδύω utilisé pour exprimer la commande ? Si l’arrosage était Pourquoi n’a-t-on pas utilisé ραίνω ou ραντίζω ? C’est simplement parce que le mode n’est rien et l’idée tout, qu’on a choisi un mot qui englobe tous les modes dans lesquels l’eau peut être appliquée comme moyen de purification. Un tel mot est βαπτίζω, pour lequel il n’y a pas de substitut légitime, et c’est pourquoi ce mot a été conservé par toutes les Églises de la chrétienté, même par les baptistes eux-mêmes.
Il s’agit d’un champ vaste et densément peuplé, dans lequel un homme peut trouver tout ce qu’il veut chercher, à moins que ce ne soit pour prouver que les pères ont toujours utilisé le mot βαπτίζω dans le sens d’immersion. Ils parlent des eaux du chaos comme baptisées par l’Esprit de Dieu qui couve au-dessus d’elles ; Ils ont ainsi été sanctifiés et un pouvoir sanctifiant a été communiqué aux eaux. Le seul point intéressant ici est que Tertullien, par exemple, considérait cela comme un « baptême ! figura », une figure de baptême. Le point de ressemblance n’était assurément pas l’immersion.
Mais en plus de cela, Suicer donne et illustre abondamment, d’après les écrits des Pères, pas moins de huit « significations du mot baptême (vocis βάπτατμα significationes) ». (1) Le déluge était un baptême, non seulement pour le monde, purifiant ses péchés, mais aussi pour Noé et sa famille, comme moyen de salut. De même qu’ils ont été sauvés par les eaux qui soulèvent l’arche, nous sommes sauvés par le baptême. (2) Le baptême de Moïse lorsqu’il traversa la mer Rouge. La mer était le symbole de l’eau du baptême ; la nuée, de la Sainte Esprit. (3) Celle des Hébreux, comme chez eux toute personne ou chose impure, cXovero υδατι, était lavée avec de l’eau. Ce lavage, quelle qu’en fût la forme, était le baptême. (4.) Le baptême de Jean, qui fut considéré comme comme une introduction, non pas spirituelle, ou conférant l’Esprit, mais conduisant simplement à la repentance. (5.) Le baptême de Jésus. Βατττίζ״ Ιησον>, <χλλ' év ιτνήματι. Ici, l’immersion est exclue. (G.) Des larmes, διά δακ-ρύων. « J’en connais un cinquième, dit Grégoire de Nazianze,1 par les larmes, mais très laborieux, quand un homme lave (ό λούω !/) son oreiller et son lit chaque nuit avec ses larmes. » (7.) Du sang. Les martyrs ont été baptisés de sang. La croix et la mort du Christ ont été appelées son baptême, parce que c’est ainsi que la purification a été faite pour les péchés des hommes. (8.) Le baptême du feu. C’est ce qu’on entend quelquefois de l’Esprit Saint, qui purifie comme le feu ; à d’autres de l’embrasement final lorsque la terre doit être purifiée par le feu. Pour les Pères, c’est donc l’acte de purification, et non pas simplement ou seulement l’acte d’immersion, qui était le baptême.2
1 Orat. 39, p. G34.
2 Joli. Caspar! Suiceri, Thesaurus Ecclesiastlcus e Patribus Grœcis ordine alphabetico ex-hibens Quœcunque Phrases, Ritus, Dogmata, Hæreses, et hujusmodi alia spectant. Opus vigintl annorum indefesso labore adornatum, 2e édit., Amsterdam, 1728.
On ne nie pas que βα-π-τίζαν signifie immerger, ou qu’il soit fréquemment employé par les pères comme par les auteurs classiques ; on ne nie pas que le rite chrétien ait été souvent administré, après l’âge apostolique, par immersion ; on ne nie même pas que à certaines périodes de l’histoire de l’Église, et dans certaines régions, l’immersion était la méthode commune d’administration du baptême. Mais il est nié que l’immersion soit essentielle au baptême ; que c’était la méthode commune dans les Églises apostoliques ; qu’elle a été en tout temps et dans n’importe quelle partie de l’Église la méthode exclusive ; et plus particulièrement il est nié que l’immersion soit maintenant et partout obligatoire ou nécessaire à l’intégrité du baptême chrétien.3
3 Voir Hermann Cremer , Biblisch-Theologisches Worterbuch der Neutestamentlichen Grii-citât, Gotha, 18GG. Après s’être référé aux ablutions de l’Ancien Testament, l’auteur dit, à la p. 87 : « Nous devons donc entendre par βαπτϊζαν un lavage dont le dessein, comme des ablutions et des purifications théocratiques, était la purification de l’âme du péché (Ent-eiindignng). » À la p. 89, il est dit : « Nous trouvons le sens secondaire de βα-πτίζιιν dans Mat-thew iii. 11: Βαπτ. Iv πι €1׳ίματι άγίω *ai πνρί, ορρ. TV ϋδατι eïç μετάνοιαν. e< pincer. Luc iii. 16; Jean i. 33. Que ce ne soit pas le sens de l’immersion, mais de 1 lavage avec le dessein de purification, qui soit transféré, c’est ce qui ressort clairement de l’antithèse entre ίν ΰδ. et iv w.t par lequel les deux baptêmes sont distingués.