P

 

PACCA, Barthélémy, né 15 déc. 1756 à Bé-névent, d'une famille distinguée, étudia la théol. à Naples et à Rome, et fut en 1786 nommé archev. in partibus et nonce de Pie VI à Cologne. Il défendit les droits de son maître dans les discussions de la Ponctation d'Ems, et réussit à se défaire par de belles promesses de ceux qui ne reconnaissaient pas sa juridiction. L'arrivée des Français en 1794 lui fit quitter la place. Il reçut la nonciature de Lisbonne jusqu'en 1802, fut nommé cardinal par Pie VII, ministre en 1808 en remplacement de Consalvi, rédigea et publia, 10 juin 1809, le bref d'excommunication contre Napoléon, et fut enfermé au château Saint-Charles, près Fenestrelles, Piémont. Relâché après le concordat de Fontainebleau, il rentra dans Rome avec Pie, 14 mai 1814, continua d'intriguer, à Vienne et ailleurs, en faveur du pouvoir temporel, fit rappeler les jésuites, et f 19 avril 1844. Il a laissé d'intéressants Mémoires sur sa vie mêlée à tant d'événements.

 

PACCANARISTES, v. Baccanari.

 

PACHOME, ou Pacôme, né vers 292 dans la Thébaïde d'Égypte, se convertit de bonne heure au christianisme, et après avoir été quelque temps soldat, se fit disciple de l'anachorète Pa-lémon et entreprit de donner un corps au mo-nachisme en l'organisant militairement. Il réunit dans l'île de Tabenna, Haute-Égypte, un certain nombre de moines, dispersés jusqu'alors dans des laures séparées; il les divisa en 24 classes désignées par les 24 lettres de l'alphabet, leur donna un chef, et à chaque couvent un économe; imposa à tous une discipline rigide dont quelques articles laissent supposer qu'un grand relâchement de mœurs régnait parmi ces ascètes, et les dirigea ou les domina comme leur archimandrite. Il y en eut bientôt jusqu'à 3,000, et ce chiffre alla toujours en augmentant jusqu'à sa f 348, quoiqu'il faille se méfier des exagérations qui abondent chez les auteurs contemporains, et des légendes qui remplacèrent l'histoire.

Pacôme réunissait une fois l'an les directeurs et les économes. Il fonda aussi des couvents de femmes. On de lui des Monita ad monachos, trad. par saint Jérôme; des Verba mystica, et des Lettres à des directeurs de couvents. Les Règles que lui prêtent, soit Palladius et Sozo-inène, soit Jérôme, sont inauthentiques. Ennemi décidé d'Origène, qu'il regardait comme un hérétique, il défendit encore sur son lit de mort, à tous ses moines, d'avoir aucun rapport avec les disciples du célèbre théologien.

 

PACIEN, d'une grande famille d'Espagne, entra tard dans les ordres, fut év. de Barcelone et f 370âgé et très considéré. Il a laissé 3 Lettres contre les Novatiens, un traité sur la Pénitence, et un discours sur le baptême, remarquable par l'élégance de la forme plus que par l'originalité des idées. Il avait été marié, et c'est à son fils, commandant en chef des gardes d'Honorius, que Jérôme a dédié son Catal. viror. illustrium.

 

PACK, Otton (de), conseiller et vice-chancelier du duc Georges de Saxe, et prêté pour un temps par celui-ci à son gendre Philippe de Hesse; il découvrit, ou crut avoir découvert un complot organisé à Breslau 1527, entre G. de Saxe, Ferdinand de Hongrie et plusieurs princes catholiques, pour la destruction du luthéranisme dans les États protestants. Philippe organisa aussitôt des moyens de défense, et pressé d'expliquer ces préparatifs belliqueux, il les justifia en produisant les révélations faites par Pack, et la copie du traité d'alliance. Mais les princes catholiques nièrent absolument la chose, et quoiqu'elle eût quelque vraisemblance, il paraît que Pack l'avait exagérée; il fut en outre convaincu d'avoir rédigé lui-même la piè^e dont il avait montré une copie et dont il n'avait jamais vu l'original. Il fut condamné à la prison. Relâché au bout d'un an, il s'en fut à l'étranger, visita l'Angleterre, la France et les Pays-Bas, et finalement, à la requête de G. de Saxe, probablement à la suite de nouvelles intrigues, il fut décapité 1537 (à Anvers, Vilvorde, Bruxelles ou Malines ? les historiens ne sont pas d'accord). Le complot peut être considéré comme certain, et Pack l'a connu, mais il s'est compromis en en racontant plus qu'il n'en savait; il l'a fait échouer, mais il a porté la peine d'un zèle sans scrupule.

 

PADERBORN, Patrabruna, ou Patrisbrun-nen, vieille ville de l'emp. d'Allemagne, déjà visitée par Charlemagne qui y tint en 777 une assemblée générale, et où furent baptisés un grand nombre de Saxons. Il y reçut aussi la visite de Léon HI, 799, qui en consacra l'église. L'évêché fut fondé vers 800, et son premier titulaire fut Hathuwer, un des ôtages saxons que Charlemagne s'était fait liver en grand nombre; il eut pour successeur Badurad, un autre Saxon, qui acheva la cathédrale (brûlée en 1000). Louis-le-Déb., et plus tard Henri II comblèrent de faveurs cet évêché; Henri lui donna pour évêque son cousin Meinwerk 1009-1036. Indépendant des ducs saxons depuis 1189, Paderborn relevait des archev. de Cologne, qui essayèrent même plus d'une fois de l'absorber entièrement. Myconius , accompagné de Jean-Frédéric de Saxe, y prêcha la Réformation en 1527, mais il eut à lutter contre Hermann de Wied, l'administrateur du diocèse, et contre ses successeurs qui empêchèrent l'établissement du protestantisme dans le pays. Les jésuites et l'év. Théod, de Furstenberg réussirent, par des mesures de rigueur et par des proscriptions, non seulement à préserver le diocèse, mais encore à reconquérir à leur foi la ville elle-même qui s'était en majorité prononcée pour l'Évangile. Son dernier prince-évêque fut François-Egon de Furstenberg 1789-1803. Le diocèse fut sécularisé en 1803 et passa à la Prusse, qui lui adjoignit en 1826 l'évêché de Corvey et augmenta ainsi son importance. Un certain nombre d'églises protestantes s'y sont établies depuis quelques années. L'év. de Paderborn a joué un rôle actif dans le dernier conflit de la Prusse avec la cour de Rome.

 

PADILLA (Juan de), ou le Chartreux, ou le Moine de Santa-Maria de las Cuevas (couvent de Séville, où Christ. Colomb passa quelque temps); auteur de: le Labyrinthe du duc de Cadix 1493; le Tableau de la vie de Christ; les Douze apôtres; il censure les désordres des ecclésiastiques et la simonie. On y retrouve quelques traits de la Divine Comédie, de Dante.

 

PAGANISME, Païens. Ce mot qui a un sens bien déterminé, et qui désigne d'une manière générale toutes les religions polythéistes et fétichistes, vient du latin pagus et signifie proprement la religion des campagnes, la religion des paysans, parce que c'est dans les villes que le christianisme s'est d'abord développé et que les campagnes sont restées plus longtemps la citadelle des faux dieux et des superstitions. Chex les Hébreux les païens étaient compris sous le nom de nations, goyim, que les juifs emploient encore auj. en parlant de ceux qui n'appartiennent pas à leur race; ils étaient- considérés comme ennemis et rebelles, comme impies el méchants, comme livrés au jugement de Dieu, mais comme devant un jour reconnaître le Dieu d'Israël et se soumettre à ses lois. Sous l'économie chrétienne les juifs incrédules sont assimilés aux païens, les uns et les autres appartenant ao royaume des ténèbres et aveuglés par le prioce de ce monde. Il n'y a plus de différence entre le Juif et le Grec, mais les uns et les autres doivent être évangélisés au même titre et sauvés par la même foi. Au milieu de ses plus profondesnèbres, le paganisme ancien cherchait Dieu, il l'entrevoyait confusément, il le pressentait dans la nature et dans sa sainteté, et la conscienee lui servait de loi, Act. 17, Rom. 3, 29. 9, 30. Il y avait chez les païens de nobles cœurs et de grands caractères, des hommes qui avaient trouvé Dieu en dehors de la loi, au bénéfice des traditions anciennes ou sous l'influence de l'esprit. L'A. T. nous montre Melchisédec et Jéthro parmi ces adorateurs non hébreux du Dieu vivant; le N. T. rappelle que Dieu a aimé Naa-man le lépreux et la veuve de Sarepta. et qu'il a fait prêcher la repentance à Ninive. Il y a donc pour les païens une économie spéciale. Si les juifs les méprisaient, Dieu ne les abandonnait pas, et les prophètes célébraient à l'avance leur conversion. Mais à mesure que le christianisme prouvait mieux sa supériorité, les erreurs du paganisme assortaient davantage, et l'abîme naturel se creusait. Les passions théologiques s'en mêlèrent. Déjà Augustin ne voyait plus dans les vertus des païens que des vices brillants, et tout le moyen âge vécut sur cette idée qu'il ne peut y avoir absolument rien de bon chez l'homme naturel en dehors de la foi à l'Évangile. Les Réformateurs, et surtout Zwingle, réagirent contre cette opinion excessive, admettant que les païens pouvaient être sauvés en écoutant la voix intérieure de Celui qui ne s'est jamais laissé sans quelque manifestation et en profitant de cette espèce de lumière diffuse que les anciennes révélations ont léguée au monde.

 

PAGI lo Antoine, né 1624 à Rognes, Provence, franciscain cordelier dès 1641, plusieurs fois provincial de son ordre, f 1699 à Aix. Auteur d'une Critica histor. chonologica, 4 vol. Anvers 1705, dirigée contre les nombreuses erreurs de Baronius, et d'une Dissertation, sur les consuls césariens. — 2o Son neveu François, né 1654 à Lambesc, Provence, f 1721 à Gand, l'aida dans son grand travail critique, et en publia une nouvelle édition améliorée, 1724. Il a écrit aussi une hist. abrégée, Breviarium, des papes les plus illustres, 1717-1747.

 

PAÏENS, v. Paganisme.

 

PAIX des Dissidents, v. Dissidents, et Thorn.

 

PAJON, Claude, né 1626 à Romorantin, bas Blésois, étudia à Saumur sous Amyraut, La Place et Cappelle, fut en 1650 pasteur à Mar-chenoir, en 1666 prof, de théol. à Saumur, donna sa démission ensuite des luttes soulevées par son enseignement, et vint à Orléans comme pasteur, f 1685. Il était accusé à tort de péla-gianisme, mais il est sûr qu'il arrivait difficilement à concilier la liberté de l'homme, sur laquelle il insistait, avec la souveraineté de Dieu. Il n'admettait ni la prédestination, ni la grâce irrésistible, et il fut l'écho d'un parti nombreux qui travaillait à adoucir ce qu'il y avait de trop anguleux dans certaines doctrines du synode de Dordrecht. Après quelques hésitations il fut condamné par les synodes provinciaux; Jurieu fut un de ses principaux adversaires. Pajon n'a rien publié sur ses doctrines spéciales; il s'en est tenu à la controverse; contre Nicole il a écrit: Examen des préjugés légitimes, Orléans 1673; et contre le clergé catholique: Remarques sur l'avertissement pastoral, Amsterdam 1635. Parmi ses adhérents, appelés pajonistes, on compte Isaac Papin, Lenfant, Alix, du Vidal, etc.

 

PALAFOX de Mendoza, Jean (de), né 1600 en Aragon, f 1659; un des prélats les plus dis-tinguésdu clergé espagnol. Nommé 1639 évêque d'Angélopolis, Mexique, avec des pouvoirs civils et administratifs très étendus, il s'appliqua de toutes ses forces à protéger les Indiens contre la rapacité et les cruautés des Espagnols, et s'il travailla à les convertir, ce fut uniquement par la persuasion. Aussi souleva-t-il contre lui la haine furieuse des jésuites, qui ne lui laissèrent aucun relâche et finirent par obtenir son rappel. Il fut nommé év. d'Osma 1653. Auteur d'une Hist. de la Conquête de la Chine par les Tar-tares, Hist. du siège de Fontarabie, Mémorial sur la dignité épiscopale, Homélies sur la Passion, Le pasteur de la nuit de Noël, etc. Vie, par Gonz. de Résende.

 

PALAMAS, Grégoire, né 1296 à Constantinople. aimé et protégé de l'emp. Jean Cantacu-zène, se lassa de la cour, se fit moine au couvent de Berrée, Mont Athos, où il passa dix ans, s'absorbant dans la contemplation, v. Hésy-chastes,et dut se rendre àThessaloniquepour y répondre aux accusations formulées contre lui par Barlaam et d'autres. Il réussit à faire condamner ses adversaires 1341 et fut nommé archev: de Thessalonique 1349. Plus tard il se retira dans l'île de Lemnos où l'histoire le perd de vue. Auteur de nombreux écrits mystiques, ou polémiques.

 

PALATINAT. Sous ce nom général, qui comprenait deux pays de l'ancien emp. d'Allemagne, l'un allant de la Bavière à la Bohême, l'autre du Rhin à l'Alsace et à la Lorraine, on désigne plus particulièrement ce qu'on appelle auj. la Bavière rhénane ou le Palatinat bavarois. Éveillé l'un des premiers aux idées de réforme, soit par la dispute de Heidelberg 1518, soit par la comparution de Luther à Worms 1521, il ne se décida cependant pas l'un des premiers. La semence germa lentement, d'abord chez des lettrés et des théologiens, comme Bucer, Schnepf, Brenz, puis chez des chevaliers comme Sickingen, dont le château d'Ebernburg servit d'asile aux réfugiés et où GEcolampade introduisit dans le culte la lecture de la Bible en allemand. La révolte des paysans marqua un temps d'arrêt sous Louis V, mais déjà Frédéric II en 1544, sur le préavis de Mélanchthon, inaugura la messe en allemand, la Cène sous les deux espèces, et permit le mariage des prêtres. En 1546 eut lieu à Heidelberg le premier service luthérien. Le prince tenait aussi par politique au parti protestant, mais il accepta l'Intérim de 1548. Otton-Henri organisa l'Église dans tout le pays et fit venir des théol. de diverses nuances. Son successeur Fréd. III, 1559, se montra plus décidé encore, se prononça pour le calvinisme avec tout son peuple, simplifia le culte, nomma un conseil d'Église composé d'ecclésiastiques et de laïques, et présida à la rédaction du catéchisme de Heidelberg. Il combattit les jésuites et les luthériens exagérés. Mais son fils, Louis VI, gouverneur du Haut Palatinat, était luthérien et agissait dans ce sens, tandis que son autre fils, Jean-Casimir, continuait les traditions paternelles. Les deux doctrines s'habituèrent ainsi à vivre côte à côte non sans quelques froissements momentanés. Puis après la guerre de Trente ans et après les conflits soulevés par la succession de Juliers, la maison de Neubourg, qui était catholique, hérita du Palatinat, et Wolfgang-Guillaume 1614, s'appliqua à ramener les populations à la foi romaine, et réussit en certains endroits. De la cette cohabitation des 3 confessions par parties presque égales dans le Palatinat.

 

PALEÆ, environ 150 arrêtés ou décrets de conciles, qui n'ont aucune autorité de droit, mais qui sont ordinairement ajoutés à la suite du décret de Gratien et admis dans le Corpus juris. Le mot dérive du grec selon les uns, et signifie anciens, vieillis, démodés; du latin, selon d'autres, avec le sens de paille, chaume, sans valeur. D'autres le font venir de Pauca-palea, disciple de Gratien, qui les aurait ajoutés au recueil du maître.

 

PALEARIO, Aonio, né 1504 à Veroli, Cam-panie, près de Rome, d'une famille distinguée qui s'appelait primitivement degli Pagliarri. Lui-même changea son nom d'Antonio en celui d'Aonio en l'honneur des 9 muses, Aontœ so-rores. Il habita Rome jusqu'en 1527; l'entrée des troupes de Charles-Quint l'en chassa, mais il y revint un moment en 1529, après avoir étudié à Padoue et à Florence. Il ouvrit ensuite lui-même une école de rhétorique à Pérouse, puis à Sienne, et se lia avec les lettrés les plus illustres de son temps. Un brillant plaidoyer qu'il fit en faveur de Ballante, augmenta sa réputation, mais lui attira aussi bien des envieux, surtout à Rome. Il continua d'enseigner les lettres, les antiquités grecques et romaines, et la philos. d'Aristote en opposition aux puériles insanités de la scolastique agonisante. C'est là qu'il acheva son premier grand poème latin, en 3 livres: De l'immortalité des âmes, où l'on trouve encore la foi au purgatoire. Mais alors déjà il commençait à sentir l'influence des idées réformatrices qui germaient dans tous les cercles cultivés de l'Italie. Ses propres travaux, l'étude de saint Augustin, ses relations affectueuses avec l'arche v. de Sienne, Bandini, avec des hommes comme Bembo, Vergerio, Pôle, Sa-dolet, Campanus; la lecture de quelques écrits venus de Suisse ou d'Allemagne, concoururent à le faire réfléchir. Bientôt on le soupçonna d'hérésie, à Sienne, où il possédait une campagne. Une Apologie, qu'il publia, le rendit plus suspect encore, car il en appelait aux pères de l'Église pour justifier Luther, Mélanchthon et GEcolampade. On lui reprochait d'avoir dit que Jésus-Christ était le plus grand bienfait que Dieu eût accordé aux hommes. Et le second, lui demanda-t-on? Encore Jésus-Christ. Et le troisième? Toujours Jésus-Christ. Une persécution éclata contre lui à Sienne en 1544; il trouva un refuge à Rome chez les cardinaux Bembo et Maffei. Sadolet facilita son retour à Sienne. Mais il avait touj. à craindre l'Inquisition. Ses amis l'engageaient à se méfier de toute nouveauté. En 1545 il fut nommé prof, de latin à Lucques, et il y resta jusqu'en 1550, malgré plusieurs tracasseries. C'est vers cette époque, plus tard selon Schmidt, qu'il se déclara franchement pour la Réformation, dans une pièce, ou Action, adressée « aux directeurs de l'Église croyante en Suisse et en Allemagne. » Elle n'était pas destinée à la publicité, mais seulement aux théologiens et aux princes qui voyaient de plus en plus que le concile de Trente n'était pas libre et qu'il ne pouvait pas aboutir. Il s'agissait pour lui d'arracher au papisme le pouvoir temporel; c'était l'œuvre des princes: quant à la réforme de l'Église, la Bible seule pouvait l'accomplir. Appelé en 1556 à Milan comme prof, de littérature classique, il manifesta publiquement, quoique avec prudence et modération, des vues qui devaient déplaire au tribunal de l'inquisition et aux papes Paul IV et Pie V. Une édition de ses œuvres publiée à Bâle précipita la crise. Il professait la justification par la foi et rejetait le purgatoire. Arrêté, il fut conduit à Rome, passa 3 ans dans un cachot et fut brûlé le 3 juillet 1570. Son principal ouvrage: Bienfait de la mort de Christ (Del be-neficio di Giesu Christo crocifi$so)9 qu'on lui a longtemps contesté à tort, est le simple expose de la doctrine de Paul sur la justification, sans aucune controverse. L'inquisition l'appelle un livre très pernicieux. Il parut pour la 1™ fois à Venise 1542 ou 1543, sans nom d'auteur, fat brûlé à Naples 1543, et fut si consciencieusement détruit par l'inquisition qu'on l'a longtemps cru perdu. On en a retrouvé un exemplaire italien original à Cambridge eu 1843; ou en possédait une trad. anglaise de 1548, et une franc, de 1552. v. Jules Bonnet.

 

PALESTRINA, Jean-Pierre-Aloys, ou Pier-luigi, né 1524 à Palestrina, l'anc. Préneste, dont il a pris le nom, celui de sa famille nous étant inconnu. Ses parents étaient pauvres et cherchèrent de bonne heure à tirer parti de sa belle voix et de ses dispositions musicales. En 1510 il entra à Rome dans l'école de Goudimel. Attaché dès 1549 à la chapelle julienne du Vatican, il composa une messe qui lui valut en 1555 une place de chantre dans la chapelle papale. Il avait épousé une jeune fille nommée Lucrezia. Ce mariage, qui ne lui avait pas nui sous Jules III et sous Marcel II, fut vu de mauvais œil par Paul IV, qui renvoya tous les chantres mariés, avec une pension de 6 écus par mois. Il passa de là à Saint-Jean de Latran 1555 comme maître de chapelle, puis 1561 à Sainte-Marie-Majeure. (le fut la grande époque de sa vie. C'est alors qu'il composa l'Improperia Popule meus, qui se chante encore à Rome le vendredi saint; la Messe du pape Marcel, comme souvenir de reconnaissance, et un certain nombre d'hymnes, motets, litanies, etc. En 1571 il fut réinstallé dans les fonctions de maître de chapelle de Saint-Pierre au Vatican, et nommé compositeur du pape, fonctions qu'il conserva jusqu'à sa + 2 févr. 1594. Il était en même temps directeur du chant dans la chapelle de l'Oratoire de son ami Philippe de Néri, et maître dans l'école de Giovanni-Maria Nanini, avec qui il avait étudié sous Goudimel. La mort de sa femme 1580 le plongea dans une profonde mélancolie; il von-lait renoncer à la musique, mais consacrer son deuil par une dernière composition: Super flu-mina Babylonis. Il trouva de si douces consolations dans ce travail, qu'il y puisa des forces nouvelles, et en 1584 il présenta à Grégoire XIII un chef-d'œuvre, le Cantique des cantiques; en 1588 il écrivit les Lamentations, en 1589 des Hymnes pour toutes les fêtes de l'année, en 1590 le Stabat mater; en 1593 les Litanies de la Vierge. On peut dire qu'il mourut en travaillant. Sa fin fut paisible et sereine, malgré de violentes douleurs. Philippe de Néri l'assista. Il ne laissait qu'un fils Igin; 3 autres étaient morts; il lui légua plusieurs ouvrages qui n'avaient pas encore vu le jour. Palestrina fut le réformateur de la musique catholique; il réhabilita le chant figuré que le conc. de Trente avait proscrit à cause de ses abus, et il exploita l'harmonie consonnante et les dissonances naturelles de manière à en tirer d'ineffables beautés et d'immortels chefs d'œuvre.

 

PALEY, William, né 1743 à Petersborough, Northhampton, étudia d'abord à Giggleswick, où son père était maître de latin, puis à Cambridge. Vicaire à Greenwich il obtint erf 1765 le prix pour la meilleure dissertation latine sur la valeur relative des philosophies d'Épicure et de Zénon au point de vue politique et social. Il concluait en faveur d'Épicure. Nommé fellow au Christ College de Cambridge et maître ès arts, il s'y rendit en 1766, se distingua comme prof, de philos, et de théol. par l'originalité de sa méthode, et reprit en 1776 des fonctions pastorales sous le patronage de son ami, le D** Law, archev. de Carliste, qui lui procura plusieurs bénéfices. En 1795 il fut nommé docteur en théol., puis recteur de Bishop- Wearraouth, où il f 1805. La plupart de ses écrits ont un caractère apologétique, mais ils ne s'élèvent guère au-dessus du déisme chrétien qui était à la mode en Angleterre; c'est même probablement à la tiédeur de sa doctrine qu'il doit de n'avoir pu parvenir à l'épiscopat. Il a publié des Éléments de morale et de politique, Londres 1785, où il fonde la morale sur la volonté de Dieu manifestée par l'intérêt général; les Horœ paulinœ, son meilleur ouvrage 1787, trad. par Levade, étude sur les lettres de Paul, établissant la vérité du christianisme; Évidences (ou preuves) du christianisme, 1794; Théol. naturelle, 1802, trad. par Ch. Pictet 1815. Des Sermons de lui ont été publiés après sa mort. Ses ouvrages sont en général solides au point de vue historique et patriotique, mais la pensée a peu d'élan, et son apologétique un peu terre à terre laisse à désirer; il s'est trop préoccupé du côté intellectuel et matériel, pas assez du caractère intime du christianisme, et ses preuves ne sont pas de nature à pénétrer la conscience et à convaincre.

 

PALISSY, Bernard, né vers 1510 à la Chapelle -Biron, Périgord, ouvrier, pauvre et sans culture, fit son tour de France comme peintre-verrier et géomètre-arpenteur, et après avoir visité Tarbes et les Ardennes, il s'établit à Saintes comme potier-faïencier et s'y maria 1529. Il aurait pu s'enrichir par son travail, mais il avait le génie de la perfection, et il passa seize ans à chercher le secret de la belle faïence et de l'émail, se ruinant, séchant sur pied près de ses fourneaux, criblé de dettes, moqué de tout le monde, accusé de vouloir faire de la fausse monnaie, et pour comble de misère, tourmenté par sa femme qui se préoccupait de l'argent plus que du génie et qui aurait mieux aimé le voir faire de la poterie ordinaire pour payer les mois de nourrice de ses enfants. En outre il était huguenot; il s'était joint au petit troupeau de protestants, braves ouvriers « de peu de savoir, » qui se réunissaient le dimanche pour lire tour à tour quelques passages de l'A. et du Nt Testament, les expliquant « selon les dons qu'ils avaient reçus de Dieu. » Il a lui-même raconté cette partie de son histoire dans son Traité de l'Art de terre, où l'on est tout étonné de reconnaître comme style ce fameux « patois de Canaan » dont il est de bon goût de se moquer auj. mais qui reparaît toutes les fois qu'il y a un vrai réveil de la vie religieuse, et qui n'est condamnable que lorsqu'il ne répond plus ii une réalité. Palissy avait fini par vaincre les difficultés; il avait « cuidé entrer jusques à la porte du sépulcre, t mais il avait trouvé l'émail, et des émaux fusibles à un môme degré de feu. Ses plats ornés de poissons, de fruits, d'insectes; ses corbeilles, ses statuettes, ses groupes mythologiques, devenaient célèbres; il avait la gloire, bientôt il allait avoir la fortune. D écrivait des livres, il donnait des conférences à Paris; il avait des commandes pour le connétable de Montmorency, pour Diane de Poitiers, pour la reine-mère; ses deux fils, Nicolas et Mathurin, travaillaient avec lui au Louvre 1570. À la Saint-Barthélémy il fut épargné, comme Paré, parce que Catherine avait encore besoin de lui; il n'avait pas divulgué le secret de ses émaux. Mais en 1588 la Ligue fit jeter le vieillard en prison. Henri III l'alla visiter et lui offrit la liberté, à condition qu'il se fît catholique: « Si non, je suis contraint de vous laisser entre les mains de mes ennemis. » D'Aubigné, qui raconte le fait, donne aussi la réponse: « Sire, j'étais bien tout prêt de donner ma vie pour la gloire de Dieu. Si c'eût été avec quelque regret, certes il serait éteint en ayant ouï prononcer à mon grand roi: Je suis contraint. C'est ce que vous et ceux qui vous contraignent ne pourrez jamais sur moi, pour ce que je sais mourir. » Il mourut en effet dans les cachots de la Bastille en 1590, de misère et de mauvais traitements. Sa tante ayant réclamé son corps, Bussi lui dit qu'elle le trouverait sur les remparts t où il l'avait fait traîner comme un chien qu'il était. » — Outre ses travaux comme potier, il s'est distingué comme naturaliste et il a ouvert à la géologie ses véritables voies. En étudiant les terres il était frappé de leur succession régulière, et aussi de certaines anomalies, coquillages, empreintes, pétrifications, fossiles, dents d'éléphants, que les savants avant lui expliquaient par des jeux de la nature, ou par des conjonctions d'étoiles. Il y vit l'indice et la preuve de nombreuses révolutions du globe, et la science rompit dès ce jour avec la tradition. Il a de même rendu à l'agriculture d'immenses services, en préconisant l'idée du marnage. M. de Chevreuil le met tout à fait au-dessus de son siècle pour ses admirables découvertes, et Lamartine l'appelle un des plus grands écrivains de la langue française, le comparant à Montaigne, Bossuet, La Fontaine et J.-J. Rousseau. Outre l'Art de la terre, ses principaux ouvrages sont: la Recette véritable pour laquelle tous les hommes de la France pourront apprendre à multiplier et augmenter leurs trésors (par l'agriculture), et: Discours admirables de la nature des eaux et fontaines, métaux, sels, terres, etc. Il avait recueilli et classé un grand nombre d'objets, que le public était admis à visiter; c'est probablement le premier cabinet d'histoire naturelle qui ait existé.

 

PALLADIUS lo né vers 368 en Galatie, vécut longtemps parmi les moines d'Égypte, que sa santé l'obligea d'abandonner; il passa ensuite 3 ans parmi ceux du Mont des Oliviers, et apre> un voyage en Europe, fut nommé év. d'Héléno-polis, Bithynie. Ami et partisan de Chrysostome, il fut persécuté avec lui 403, vint k Rom*1 auprès d'Innocent l*r pour implorer la protection d'Honorius, mais à son retour fut banni par Arcadius et envoyé à Syène, Haute Égypte: plus tard il fut nommé év. d'Aspone en Galatie. selon d'autres réintégré à Hélénopolis, et + 430 Auteur d'une Histoire lausiaque, ainsi nommer du préfet Lausius, de Cappadoce. à qui elle fut dédiée; elle porte aussi quelquefois le nom de Paradis des vies des pères, et donne des détails intéressants sur la vie des moines d'Égypte et de Palestine, qui concordent avec ceux de Rutin d'une manière si étonnante qu'on a pu se demander s'il n'y avait pas eu emprunt de l'un à l'autre, ou une source commune. On a aussi attribué, mais sans fondement, à Palladius, un Dialogue avec Théodore, diacre romain, et une Vie de Chrysostome. — 2° Palladius, premier évêque envoyé de Rome en Irlande, vers 431. sous Célestin; f vers 450; c'est tout ce qu'en disent Prosper d'Aquitaine et Bède. Quelques-uns le confondent avec Patrick.

 

PALLAVICINI, Sforza, né à Rome 28 nov. 1607, d'une vieille et noble famille romaine, se distingua de bonne heure comme lettré. Protège par Urbain VIII, il entra 1630 dans les ordres, reçut le gouvernement de Fesi, puis celui d'Or-vieto, et tomba en disgrâce. En 1638 il se fit jésuite pour conserver à son frère les débris de l'héritage paternel. Après un noviciat de 2 ans, il fut chargé d'enseigner la philos., ensuite la théologie, et fut nommé préfet du Collège romain. Son protecteur Alexandre VII le choisit pour son confesseur. Il était membre de la congrégation nommée pour faire une enquête sur U doctrine de Jansénius 1651-1653, et fut nomme cardinal en 1659. f 5 juin 1667. Son principal ouvrage est son Hist. du conc. de Trente, écrite en réfutation de celle de Sarpi, et deux fois retravaillée. Le jésuite J.-B. Gattino en lit une trad. latine. Riche en documents inédits puisés à la source, mais rédigé dans un esprit de parti trop évident, ce travail n'a ni la vigueur, ni même la valeur historique de celui de Sarpi. Pallavicini peut être regardé comme le restaurateur de la belle prose italienne.

 

PALLIUM, ornement ecclés., bande d'étoffe, large de 5 centim., qui se met par-dessus les vêtements pontificaux, et entoure les épaules, pendant des deux côtés1 sur une longueur de 22 à 25 centimètres; il est semé de croix de diverses couleurs, suivant la dignité hiérarchique de celui qui le porte. Il est fait de la laine d'agneaux mis à part le jour de Sainte-Agnès (Agnus), et rappelle que le bon berger porte sur ses épaules la brebis perdue ou souffrante. C'est un symbole de juridiction que le pape envoie aux archevêques.

 

PALMER, Chrétien - David - Fréd., né 1811 à Winnenden, Wurtemberg, prof, de théol. à Tubingue 1843, f 1875. Savant aimable, orateur populaire, il s'est occupé surtout de la partie pratique de la théol.: prudence pastorale, homilétique, morale, hymnologie. Il a publié de bons ouvrages sur ces différentes branches, ainsi que des Sermons et des Mélanges. Très évangélique, il n'aimait ni la controverse ni les exagérations.

 

PAMELIUS, Jacques, né à Bruges 1536, fils d'un des administrateurs civils de Charles-Quint, étudia à Bruges, Paris et Padoue. Chanoine à Bruges et à Bruxelles, il quitta son pays pendant la guerre et se rendit à Saint-Orner, où il fut nommé archidiacre. Il venait d'être promu à l'évêché de Metz, quand il f 1587 à Mons. Auteur d'un traité sur la liturgie latine, d'un Catalogue des Comment, bibliques, de Comment. sur Judith et sur Philémon, et d'éditions estimées de Cyprien, Tertullien et Raban Maur.

 

PAMMACHIUS, le Saint, sénateur romain, ami d'enfance de saint Jérôme, avait épousé Pauline, fille de Paula et sœur d'Eustochie. Devenu veuf, il résigna ses fonctions et se retira dans un couvent, f 410. Il était connu pour sa douceur et sa générosité; il avait fondé dans le port de Rome une hôtellerie pour les étrangers. Jérôme lui a dédié plusieurs de ses écrits, entre autres son ouvrage contre Jean de Jérusalem. Il est nommé avec éloges dans les lettres d'Augustin et de Paulin de Nola. iPAMPHILE, d'une famille considérable de Béryte, Phénicie, étudia à Alexandrie sous Pie-rius, directeur de l'école des catéchistes, et fut nommé prêtre ou ancien à Césarée; il est connu pour sa piété et sa science. Il travailla à rassembler les écrits ecclésiastiques, et à répandre de bonnes copies de la Bible, avec l'aide de son disciple Eusèbe l'historien. Il copia de sa propre main une partie des écrits d'Origène, il fonda une bibliothèque et une école de théologie. Sous Dioclétien il fut persécuté et mis en prison 307. Là il écrivit un ouvrage pour la défense de son ami Origène. Le 16 février 309 il fut décapité, et en même temps que lui son fidèle esclave Porphyre qui avait simplement voulu réclamer le corps de son maître.

 

PANAGIA, grec la toute-sainte, d'abord surnom de la vierge Marie, s'employa plus tard chez les grecs pour désigner l'hostie; le vase qui la contenait reçut le nom de panagiarion. Dans plusieurs couvents grecs on célébrait l'élévation de la panagia en déposant devant l'image de Marie un morceau de pain triangulaire (symbole de la Trinité) avec le vin dans la coupe, et après l'avoir élevé, les assistants se le partageaient. Même au commencement on se bornait à déposer l'hostie devant le siège d'honneur vide, pour annoncer que l'on attendait la présence du Seigneur.

 

PANCRACE, plusieurs saints de ce nom, tous plus ou moins légendaires: un soi-disant disciple des apôtres, envoyé par Pierre comme év. à Taormina, Sicile, où il aurait été martyrisé, le 3 avril; un des 3 saints de glace, 12 mai, doit avoir souffert le martyre à 14anssous Dioclétien; ses reliques abondent, une dame chrétienne, Octavilla, passe pour avoir sauvé ses restes après sa mort. Il a une église à Rome, dans laquelle, au moyen âge, on conduisait ceux qui étaient soupçonnés d'un faux serment, parce qu'on croyait que le coupable serait frappé de mort subite, ou que le démon s'emparerait de lui.

 

PANÉGYRIQUES, livres liturgiques chez les grecs, contenant les éloges de divers saints; ils n'ont plus auj. de caractère officiel. Comme on en rattache souvent la lecture avec les mandements de Pâques, on donne quelquefois à ces programmes le nom de Grammata panegyrica.

 

PANGE LINGUA, premiers mots et titre d'un chant de Thomas d'Aquin, imité de Venantius, en l'honneur du sacrement de l'autel. On le chante le jeudi saint, à la fête-Dieu, et dans d'autres circonstances solennelles.

 

PANIS LITTÆRE, lettres du pain; obligation que les princes pouvaient imposer à un couvent ou à une abbaye, de fournir pour un temps déterminé. ou même à vie, l'entretien à un laïque; le bénéficiaire portait le nom de paniste. Cette coutume se rattachait au droit qu'avaient les princes de se faire héberger dans les maisons religieuses pendant leurs voyages. Elle est à peu près tombée avec la Réformation; les princes protestants en contestèrent le droit à l'empereur. Frédéric-le-Grand le supprima définitivement, et Léopold II déclara en 1790 qu'il n'en userait que là où les titres seraient incontestables. Cette vieille coutume prit fin avec l'empire germanique.

 

PANNONIE. Ce pays, qui fait auj. partie des États autrichiens, allait de l'Illyrie jusque près des Alpes noriques. Il se divisait en P. supérieure, comprenant en partie la Styrie, la Car-niole, la Croatie, la Carinthie et la marche vandale, et P. inférieure, comprenant la Bosnie, l'Esclavonie et la Hongrie jusqu'à la Drave. Elle fut pendant plusieurs siècles le théâtre de guerres entre les Goths et les Romains. Ses premiers habitants, celtes d'origine, furent soumis d'abord par Philippe et Alexandre de Macédoine, puis par Jules-César, et enfin conquis et annexés par Auguste, Tibère et Drusus. L'invasion des barbares changea souvent les frontières et les conditions de vie de cette province, dont les principales villes étaient Sigesta ou Sissek, Petavio ou Petau, Aemona, Nauportus, Vindabona, Taurunum, Sirmium, etc. Une tradition sans fondement veut que Pierre, Paul, Luc, Tite et Clément y aient apporté l'Évangile; mais sans remonter aussi haut, il est sûr que la contrée fut évangélisée de bonne heure, vraisemblablement par des prisonniers chrétiens, et déjà au commencement du 3«ie siècle on y trouve plusieurs évêchés, Petavium en Styrie, Siscia en Croatie, Mursa en Slavonie, et surtout Sirmium qui devint célèbre par ses 4 conciles dans les luttes ariennes et par son év. Photin. Au conc. de Nicée on trouve un évêque de P., Théophile, désigné comme év. des Goths. Le sémiarianisme fut assez longtemps en faveur dans ces contrées, et ne fut supprimé que sous Gratien, par l'influence d'Ambroise, au conc. d'Aquilée381. Mais les barbares arrivèrent, les Vandales, puis les Sarmates et les Gépides, les Visigoths, les Huns. Le christianisme étant refoulé, l'empire romain ne pouvait plus maîtriser le flot de l'invasion, et ce fut sous Charlemagne seulement qu'un gouvernement plus régulier se reconstitua; l'évangélisation du pays fut reprise à nouveau au 9me siècle, par Urolf, mais les rivalités de Salzbourg et de Lorch, comme sièges métropolitains, menacèrent et compromirent un moment la mission. Les Hongrois profitèrent de ces divisions pour faire la guerre à l'Église, 889, mais à leur tour, au lime siècle, ils furent gagnés à l'Évangile.

 

PANNORMIA, collection de canons en 8 livres, due à Ivo de Chartres, une des plus importantes qui aient été faites avant Gratien, et qui a été largement utilisée par Gratien pour son Décret.

 

PANORMITANUS, le Palermitain, surnom du célèbre canoniste Nicolas Tudiscus, ou de Tudesco, surnommé aussi lucema juris. Né 1386 à Catane, bénédictin en 1400, chanoine de la collégiale de Catane 1414, il étudia le droit canon à Bologne, et l'enseigna ensuite dans di-ves universités. En 1425 le pape Martin Y lui donna l'abbaye de Maniacum, près Messine, et le nomma auditeur de la rote et référendaire apostolique. Alphonse de Sicile, le Magnanime, le nomma 1434 archev. dePalerme, et l'envoya au conc. de Bâle comme légat. Là il prit parti, contre Eugène IV, pour les droits du conc. de Bâle que le pape avait transféré à Ferrare. 11 partit avant la destitution du pape par le concile, mais il y revint sur l'ordre de son maître, reconnut l'antipape Félix V, qui le nomma cardinal 1440, et l'envoya comme légat aux diètes de Mayence et de Francfort. Mais Alphonse se réconcilia avec Eugène, 14 juin 1443, et Nicolas fut rappelé. Il + peu de temps après de la peste à Palerme 1443 ou 1445. On a de lui un Comment, fort estimé sur les Décrétais de Grégoire IX et sur les Clémentines. Il a écrit aussi une Justification du concile de Bâle, trad. en fr. par Gerbais 1677 dans l'intérêt du gallicanisme.

 

PANOPLIE (collection d'armes), titre d'un volume de théologie polémique, composé par Euthyme Zigabenus, à la demande d'Alexis Comnène vers 1118.11 est divisé en 24 parties. Il commence par l'épicuréisme et l'athéisme, et les combat au moyen de citations des pères sur la doctrine de Dieu et de la Trinité. Il passe ensuite aux hérésies gnostiques jusqu'aux bogo-miles, sans oublier les juifs et les mahométans, leur appliquant à tous le même procédé de réfutation, au point de vue de l'orthodoxie traditionnelle grecque. Les fragments relatifs auxbo-gomileset aux massaliens ont le plus de valeur; les autres ne brillent pas par l'importance des auteurs cités. Cet ouvrage n'a été imprimé qu'une fois, 1711, à Tergovitz, Valachie, et encore a-t-on supprimé l'art. 25 sur les mahométans, par peur des Turcs; mais ce fragment a été publié à part par Sylbourg.

 

PANTALEON lo en grec Panteleemon, le Miséricordieux, un des 14 saints secourables. Il était médecin et fut martyrisé 305 à Nicomédie sous Maximien; mais c'est une histoire sans preuves. — 2° v. Urbain IV.

 

PANTÈNE, le premier catéchète connu de l'école d'Alexandrie. Athénien selon les uns, Sicilien selon d'autres, il était stoïcien quand il fut amené à la foi chrétienne; vers 180 on le trouve déjà travaillant à Alexandrie. D'après Eusèbe il lit un voyage de missions aux Indes, peut-être au sud de l'Arabie, et il en rapporte un évangile hébreu de Matthieu. Si ce voyage a eu lieu réellement, il doit s'intercaler dans te ministère de P. à Alexandrie. D'après Jérôme, Pantène vivait encore sous Caracalla, mais en 190 il était déjà remplacé par son disciple Cle-ment, et son nom disparait pendant la persécution de Septime Sévère. La date de sa mort est inconnue. Ses écrits sont perdus; Halloix en a retrouvé et publié quelques fragments. Si l'on en croit saint Jérôme, Pantène a plus servi l'Église par sa parole que par sa plume.

 

PANTHÉISME, du grec pan (tout) et thioi (dieu), système philosophique fort ancien, nuis dont le nom est assez moderne, puisque le mot de panthéiste apparaît pour la Ire fois en 1705 dans le titre d9un livre du déiste anglais Toland. Une définition exacte est difficile par le fait des systèmes divers et fort nombreux, plus ou moins logiques et complets, qui se groupent autour du même mot. Pour les uns Dieu est tout, pour d'autres tout est Dieu, ou tout est en Dieu, ou Dieu est en tout. Suivant le sens dans lequel on l'entend, le système est plus ou moins absurde, ou plus ou moins explicable. D'une manière générale, c'est la divinisation de la nature, mais d'autres y voient au contraire l'exaltation de Dieu comme dominant et renfermant toutes choses. Quelques-uns des sages de l'antiquité se sont rangés au panthéisme, pour protester contre les folies du polythéisme, et ne connaissant pas le vrai Dieu ils ont acclamé le Grand Tout. C'est encore auj. avec d'importantes nuances la religion des bramines de l'Inde. La logique du système consisterait à confondre absolument Dieu et la nature, mais on recule d'instinct devant cette confusion, et l'on s'attache surtout à l'idée que toutes les manifestations visibles peuvent et doivent se rattacher à une unité, à un centre qui n'est pas distinct de l'univers, qui forme en quelque sorte corps avec lui, et au delà duquel on ne peut rien concevoir. Saint Augustin a défini Dieu l'Être suprême, le Summum esse; le panthéisme en tire la conséquence qu'il n'y a pas d'être en dehors de Dieu. Le théisme cherche une cause première à tout ce qui existe, et aux lois morales un législateur, le panthéisme n'en demande pas autant, l'effet lui suffit comme cause et les lois morales sont les lois de la nature. Deux chemins peuvent conduire au panthéisme: un profond sentiment religieux, le besoin de s'unir mystiquement avec Dieu d'une manière intensive, d'absorber Dieu en soi et d'être absorbé en Lui; c'est la voie qu'ont suivie les Indous sous l'influence de leurs chefs religieux; c'est celle aussi qui parmi les chrétiens a conduit certains mystiques, le faux Denys, Scot Érigène, Eckhart, Silesius, jusque sur les confins du panthéisme. L'autre chemin, c'est la poursuite de l'unité philosophique; au commencement de ses recherches, on trouve que le panthéisme répond à tout, parce qu'il suppose un principe unique; plus tard aussi l'on y revient volontiers, quand on est mis en présence du théisme, c'est-à-dire d'un dualisme inconciliable entre Dieu et l'univers. Chez les Grecs, Héraclite et les Éléatiques peuvent être considérés comme les vrais pères du panthéisme; ils en ont donné la formule. Tout n'est qu'un, et cet un est Dieu. Les stoïciens, avec leur âme du monde, les néoplatoniciens avec leur théorie des émanations et de l'extase, sont des panthéistes religieux. Au moyen âge, réagissant contre la sécheresse de la scoiastique, les italiens Vanini, Jordano, dans un enthousiasme plein de poésie plus que de philosophie, ont proclamé le panthéisme de la nature. Mais c'est Spinosa qui, tirant du système de Descartes les conséquences les plus rigoureuses, essaya de donner au panthéisme une base scientifique et philosophique. De nos jours Hegel, Schelling, Conradi, Strauss, Bruno, Bauer et une partie de la jeune éeole allemande, représentent à divers titres cette conception de Dieu, les uns dans un esprit religieux, les autres, comme Feuerbach, en haine de toute idée religieuse.

 

PAPAUTÉ, v. Papes.

 

PAPEBROCH, ou Papebroek, Daniel, né à Anvers 17 mars 1628, entra 1645 dans l'ordre des jésuites et collabora activement aux Actes des saints de Bollandus. Professeur d'abord aux gymnases de Malines et de Bruges, il étudia ensuite la théol. à Louvain, fut ordonné prêtre en 1658, enseigna la philos, à Anvers, et choisi pour assister les bollandistes dans leur œuvre, il se rendit avec Henschen en Italie, où il passa 2 ans, 1660-1662, occupé à visiter les archives. De retour il écrivit la vie de Patrick; puis avec Henschen les saints du mois de mars; seul le mois d'avril et les 3 premiers volumes de mai; enfin, avec B»rt et Jenning, les 4 derniers vol. de mai, et une partie de juin. Ayant combattu la prétention des carmes, qui faisaient remonter leur ordre au prophète Elie, il fut vivement attaqué par les carmes des Pays-Bas, auxquels se joignirent bientôt ceux de France. Ils le dénoncèrent à Innocent XII comme hérétique, en relevant des centaines d'erreurs dans les Actes des saints. Le pape prit la chose assez froidement et la renvoya à la congrég. de l'Index. Ils se tournèrent alors vers l'inquisition espagnole 1691, qui condamna en effet le livre bollan-diste; mais sur l'intervention de l'emp. Léo-pold I", Papebroch fut autorisé à se défendre; il publia 3 nouveaux in-quarto, et le pape, ennuyé de cette affaire et ne voulant donner tort ni aux uns, ni aux autres, ne vit d'autre moyen d'en finir que de couper court à la discussion par sa bulle du 20 nov. 1698, qui interdisait sous peine d'excommunieation d'agiter à l'avenir la question de l'origine des carmes. La querelle avait duré 30 ans. Papebroch f 28 juin 1714.

 

PAPES, Papauté. Le mot grec pappas, qui signifie père, s'employa souvent dans un sens de respect affectueux, pour désigner un ecclésiastique de confiance, parfois un simple prêtre, puis tout particulièrement un évêque. Innocent III appelle encore papatus les paroisses de l'archevêché de Thèbes, et Isaac Comnène donne le nom de papa à un de ses lecteurs. L'Égl. d'Occident ne connut que plus tard ce nom étranger, et le réserva exclusivement pour l'év. de Rome, en conservant les noms de père et députer pour les clercs et les religieux. C'est l'év. SU ricius 384 qui l'emploie le premier comme titre; au 5®« siècle il est généralement admis, et au 7™ il cesse complètement d'être employé pour désigner autre chose que l'évêque de Rome. Le mot de pape a dès lors le sens déterminé qu'il a conservé jusqu'ici; le mot papauté désigne surtout la dynastie et le pouvoir temporel; papisme s'applique surtout au système religieux, quoique les deux se confondent fréquemment L'histoire de l'évêché romain se divise assez clairement en 4 périodes d'inégales longueurs: lo l'évêché proprement dit, du milieu du 2«»e siècle au milieu du 8°*, de Pie 1er à Félix II; dans cette époque les év. de Rome luttent pour obtenir la prééminence sur les autres évêques et patriarches; ils travaillent à fonder leur suprématie dans l'Église; — la papauté du moyen âge, depuis la formation des États de l'Église jusqu'au complet développement de l'absolutisme romain: Grégoire VII, Innocent III, Boniface III, le conc. de Florence; de 754 à la Réformation. Rome, maitresse des âmes, travaille à fonder une monarchie universelle, dont elle sera le chef; elle s'en prend surtout aux États de l'Occident, et après une lutte de 2 siècles elle l'emporte sur les empereurs. Mais le schisme d'Avignon, suivi d'un schisme dans la papauté elle-même, réveille chez les peuples le sentiment national et la conscience religieuse; — 3o la cour romaine depuis la Réformation jusqu'au concile de 1870; elle lutte pour reconquérir le terrain perdu par la Rôformation; Charles-Quint, Philippe U, Ferdinand II, la Guerre de Trente ans; pour vaincre elle accepte le secours d'un serviteur qui deviendra son maître, le jésuitisme, et qui, jetant le gant à la société moderne, rêve de faire reculer le 19®« siècle au 14»*, et transforme le catholicisme en ultramontanisme; — 4° c'est le papisme depuis le concile de 1870, c.-à-d. la guerre avouée à tous les droits, à toutes les libertés, à toutes les conquêtes de l'esprit nouveau; d'autant plus dangereuse qu'elle tend à rendre le christianisme responsable des erreurs et des excès qui se couvrent de son nom. L'épiscopat n'ayant commencé à devenir une fonction distincte de la charge pastorale ordinaire qu'au 2me siècle, vers 130 ou 140 (la Ire mention s'en trouve dans les lettres d'Ignace), il n'est pas question d'évêques à Rome avant l'an 140, et tout ce qui va au delà est légendaire; le plus ancien évêque historiquement constaté est Pie I*r, 142, ou peut-être Sixte, 115. Les autres qui figurent sur les catalogues romains sont si peu connus que les catalogues varient même sur l'ordre de leur succession; on ne nie pas qu'ils aient existé, mais s'ils furent à Rome des chrétiens considérables par leurs vertus ou leur position, rien n'établit qu'ils aient exereé un ministère, encore moins qu'ils aient succédé à Pierre, dont le voyage à Rome est plus que problématique; v. Dict. de la Bible. Quant à la mention du siège de Saint-Pierre à Rome, elle n'apparaît qu'au temps de Cyprien, quoique alors déjà les év. de la métropole affichassent vis-à-vis des autres évêques, surtout d'Occident et d'Afrique, la prétention d'être les episcopi episcoporum. Le mode d'élection pour les papes, comme pour les évêques, a varié avec les temps et les circonstances. A l'origine c'était le peuple qui choisissait son pasteur, mode simple, logique et naturel; puis ce fut le clergé, d'accord avec le peuple; puis le clergé seul. Huit papes sont élus au moyen âge sous l'influence de trois femmes débauchées; la papauté est héréditaire pour les trois Jean, XI, XII et XI1L Plusieurs papes sont élus directement par tes emp. d'Allemagne; Léon IX par Henri III; Victor II est élu par le simple Hil-debrand, qui pourvoit à la nomination de 5 papes, avant de croire le moment venu pour lui-même. Les choix furent longtemps soumis à la ratification des empereurs, qui plus d'une fois la refusèrent et firent eux-mêmes directement l'élection. Henri H rendit au clergé son droit de choisir librement. Enfin 1181 les cardinaux revendiquèrent pour eux seuls ce droit, et au siècle suivant les papes décidèrent que l'élection se ferait en conclave. — Pendant longtemps les papes ne possédèrent qu'un pouvoir spirituel; et de siècle en siècle ce pouvoir s'affermissait, d'abord par l'usage et l'habitude, ensuite et surtout par une série de fausses pièces et de documents falsifiés; v. Décrétâtes. Le pouvoir temporel vint plus tard; Constantin en posa la première base en dotant richement l'Église et en lui accordant d'immenses privilèges (mais nullement cette fameuse Donation dite de Constantin, qui n'est qu'un mythe, greffé sur U légende de Constantin baptisé à Rome par Sylvestre). C'est seulement au 8*ne siècle que Pepin-le-Bref et Charlemagne fondèrent le pouvoir temporel eu donnant au pape une partie des États conquis sur les Lombards, l'exarchat de Ravenne, la Pentapole, le Pérugin, le ducbé de Spolète. Puis en 1077 la comtesse Mathilde y ajouta la campagne de Rome, l'Ombrie et Vi-terbe, qui dans leur ensemble portent le nom de Patrimoine de Saint-Pierre. Avec ces domaines qui en faisaient des princes temporels, les papes intervinrent plus souvent et plus facilement dans les affaires des autres royaumes et de l'empire; ils avaient l'influence, ils y joignirent la force, celle de l'argent et celle de leurs armées. Mais ils se trouvèrent par là-même exposés a un amoindrissement de leur influence, et à des chocs qui ne pouvaient que les affaiblir; ils participèrent de l'instabilité des choses terrestres. Personne ne songe à nier l'action prépondérante exercée par le catholicisme sur la civilisation de l'Europe au moyen âge. C'est le pivot sur lequel ont tourné pendant longtemps les empires et les consciences, l'artère principale qui a maintenu l'unité dans une partie de la chrétienté, le centre d'où sont sortis les moines savants et les moines cultivateurs, les missionnaires et les bénédictins. Mais quand on en parle, il y a deux réserves à faire: l'une, c'est que le catholicisme ne doit pas toujours se confondre avec la papauté; l'autre, c'est que cette I action, heureuse souvent, a souvent aussi été désastreuse. S'ils ont sauvé des mss., combien n'en ont-ils pas détruits? La valeur personnelle des hommes qui exerçaient le pontificat pesait d'un plus grand poids que l'institution elle-même, et les conciles servaient quelquefois de régulateurs aux variations dogmatiques des papes. Il suffit de nommer Libère, Honorius Iw, Formose, Étienne VII et Clément XIV, pour faire toucher au doigt le manque d'unité qui caractérise la succession des papes en matière de doctrine et discipline, de culte ou de morale. Sur ce dernier point, il y aurait même tout un «chapitre à écrire qui ne serait rien moins qu'édifiant et qui, s'il ne prouvait pas contre l'institution, serait certainement fort loin delà recommander. — Les luttes incessantes des papes contre les empereurs et les rois s'expliquent par le fait que de part et d'autre on voulait cumuler le pouvoir temporel et le pouvoir spirituel, les limites des attributions n'étant pas déterminées, et l'État empiétant sur les droits de l'Église, comme celle-ci revendiquait le gouvernement de la société civile. — Le système et tout l'ensemble de la hiérarchie peut invoquer en sa faveur de nombreux arguments; il peut se défendre et se justifier comme tous les systèmes humains; il a ses qualités et ses défauts, ses bons et ses mauvais côtés. C'est la question de la monarchie ou de la république, dont ni l'une ni l'autre ne peut revendiquer le droit divin, mais qui ont toutes deux des avantages et des inconvénients. Ce qu'on peut dire, c'est qu'à mesure que l'humanité se développe, elle a moins besoin de la forme monarchique; les services que la papauté a rendus contre l'invasion des barbares et de la barbarie, elle n'est plus dans le cas de les rendre aujourd'hui, e4 comme les progrès de la société sont incessants, l'Église qui a été à la tête pendant un temps, a fini par être dépassée, parce qu'elle a refusé de marcher.

 

PAPESSE, v. Jeanne.

 

PAPHNUCE io év. d'une ville de la haute Thébaïde; il perdit un œil dans les persécutions de Maximien, fut envoyé dans les montagnes, et mérita par sa vie ascétique et par son martyre le respect et la réputation de sainteté qu'il laissa après lui. Déjà fort âgé il assista au conc. de Nicée et combattit avec énergie la tentative qui fut faite d'imposer aux prêtres le célibat; il estimait que ceux qui étaient mariés en recevant les ordres, quel que fût leur rang dans la hiérarchie, ne pouvaient être contraints à renvoyer leurs femmes. On croit qu'il fut aussi membre du conc. de Sardique 343. — 2<> abbé des moines de Scété, haute Égypte, vers 399, partisan de Théophile, et adversaire des exagérations de l'anthropomorphisme.

 

PAPIAS, év. d'Hiérapolis, Phrygie, ami et contemporain de Polycarpe, né vers la fin du l*r siècle, martyr sous Marc-Aurèle d'après Épiphane, vers 156, selon d'autres 163 ou 165. Irénée en parle comme d'un homme fort âgé et qui aurait été disciple de Jean, mais sans dire de quel Jean il s'agit. Il a écrit, en grec, une Exposition des discours du Seigneur, qu'on ne connaît que par quelques extraits conservés dans Irénée, Eusèbe, André de Césarée, etc. On croit qu'il en restait encore au 13m« siècle un mss, à Nîmes. Petit esprit, d'après Eusèbe, qui cependant lui accorde de l'éloquence, il manquait absolument de critique et donne comme faits des anecdotes t qui sentent un peu trop la fable. » J1 a induit en erreur plusieurs écrivains ecclésiastiques anciens, et son témoignage a besoin d'être contrôlé. On lui doit certaines nouvelles paraboles et prédications du Sauveur, la première mention d'un évang. de Matthieu, ou des Logia. écrit en hébreu; l'histoire de Pierre dictant à Marc l'Évangile connu sous le nom de ce dernier; une allusion possible à la tradition d'un voyage de Pierre à Rome, etc. Il est connu surtout par ses idées millénaires charnelles, et par son mode d'interprétation typique allégorique. Ne doit donc être consulté qu'avec précaution.

 

PAPIN 1° Denis, célèbre physicien, né à Blois vers 1650, ami et collaborateur de Boyle en Angleterre, prof, de mathématiques à Marbourg, correspondant de l'Acad. des sciences de Paris, f 1710; le premier qui ait pressenti le rôle de la vapeur comme force. Son Digesteur est surtout connu sous le nom de Marmite de Papin. Il a laissé de nombreux mémoires et fragments. La France lui a fait une réparation tardive 1881 en lui élevant une statue à Blois. — 2° Isaac, son cousin, né 27 mars 1657, étudia à Orléans sous Cl. Pajon, son oncle, dont il épousa les idées et dont il entreprit l'apologie 1683. Pour cette raison, peut-être aussi pour ses idées excessives ou mal formulées sur la tolérance, il eut de vifs démêlés avec les calvinistes et notamment avec Jurieu. La révoc. de l'Édit de Nantes le décida à partir pour l'An-gîeterre 4686 où il fut consacré. Il passa ensuite en Allemagne, et fut appelé à Berlin et à Dantzig, mais il refusa pour rester fidèle au pajo-nisme. Il dut cependant y renoncer bientôt, puisque dégoûté des attaques des protestants qui allaient jusqu'à l'accuser de socinianisme, il se décida en 1690 à se faire catholique, entraînant avec lui les deux fils de Pajon. f 1709. Œuvres, Paris 1723. Il disait entre autres que si Ton accorde de l'autorité à un synode, comme celui de Dordrecht, il n'y a pas de raison pour ne pas en reconnaître autant au conc. de Trente, ce qui prouve que pour lui l'Écriture sainte n'était pas une véritable autorité.

 

PAPPATES, ami et disciple d'Adalbert; d'autres l'appellent Radia; on croit qu'il était frère de Boleslav. duc de Bohême. Il travailla en Hongrie comme missionnaire et fit à la cour l'éducation du jeune prince Étienne. En 997 il alla rejoindre Adalbert en Prusse où il trouva probablement le martyre.

 

PARABOLAINS, hommes de peine, plus spécialement des infirmiers; sorte de confrérie qui, dans l'ancienne Église, surtout dans l'Égl. grecque, constituait l'un des échelons inférieurs du clergé. Ils étaient placés sous les ordres immédiats de l'évêque et pouvaient à l'occasion lui servir de gardes du corps; ainsi, p. ex., au concile des brigands, d'Ephèse 449. On croit que c'est à Alexandrie que la corporation prit naissance. Ils rendaient de grands services en temps d'épidémie. Théodose 1er avait limité leur nombre à 500 à Alexandrie, mais en 418 il fut porté à 600. probablement en suite de besoins extraordinaires.

 

PARACLET, du grec Parakaleïn, prier, exhorter, consoler, appeler à soi, intercéder, plaider pour. Le substantif se ressent de ces diverses significations, et on l'a traduit tour -à tour par consolateur, défenseur, directeur et avocat; dans quelques versions on a choisi tantôt l'un, tantôt l'autre de ces sens, suivant le contexte. C'est le nom par lequel Jean désigne le Saint-Esprit dans son Évangile 14, 16. 26. 15, 26. 16, 7., et Jésus-Christ dans sa lreépître2,1. D'après les paroles de Jésus, le Paraclet est celui qui doit le remplacer auprès de ses disciples quand il sera remonté vers son Père, et comme Jésus dit: un autre paraclet, il vise clairement la même fonction que celle qu'il remplissait; or Jésus est appelé paraclet dans un passage 1 Jean 2f 1. où il ne peut y avoir aucun doute sur le sens spécial de défenseur, ou avocat, plus conforme à l'étymologie, à l'analogie de la langue et aussi à l'ensemble de l'œuvre rédemptrice de Jésus, que le sens de consolateur adopté par Luther à la suite d'Origène et de Jérôme. Quoi qu'il en soit du côté exégétique de la question, le mot paraclet a fini par devenir une espèce de nom propre et par désigner exclusivement le Saint-Esprit. Il vient du Père, il est envoyé par le Fils, il doit conduire les croyants à la connaissance de toute vérité; il doit compléter et accomplir l'œuvre de Jésus-Christ. C'est à l'idée de ce Paraclet que se sont rattachées dans tout le moyen âge, depuis Montanus jusqu'à Joachim de Flores et jusqu'aux exaltés des temps de la Réforme, toutes les sectes se prétendant spirituelles, qui rêvaient d'une nouvelle révélation. S appuyant des paroles mêmes du Sauveur, elles en concluaient qu'il avait laissé son œuvre inachevée, et que c'était au Saint-Esprit, représenté par elles, qu'il appartenait de faire entendre le dernier mot de la vérité divine. Plusieurs églises ou chapelles ont été élevées sous le vocable du Paraclet; la pins célèbre est l'oratoire d'Abélard, à Nogent-sur-Seine.

 

PARAGUAY, contrée de l'Amérique du sud, au nord de la Plata, à l'ouest du Brésil; découverte en 1526 presque simultanément par le vénitien Sébastien Caboto et le portugais Diego Garcia. Les franciscains y établirent vers 1537 une mission, mais qui ne réussit pas. L'évêque de Tucnman y appela les jésuites, qui étaient déjà au Brésil depuis une trentaine d'années; ils y arrivèrent, en 1586, se firent aimer des Indiens et obtinrent en 1610 du gouvernement espagnol, que, moyennant une redevance annuelle, on les laissât indépendants et maîtres absolus du pays. Ils catéchisèrent les Indiens, leur donnèrent quelques notions d'agriculture, leur apprirent quelques métiers simples, les organisèrent en république théocratique, avec une police, des juges, des soldats, établirent solidement leur autorité, et pour mieux s'assurer qu'elle ne serait pas discutée, fermèrent hermétiquement le pays à tous les étrangers. Us se livrèrent dès lors en paix à l'industrie et au commerce le plus fructueux et devinrent exces sivement riches. Ce qu'ils racontent de leur domination et du bonheur des Indiens soumis à leurs lois est plein de charme, et presque tons les écrivains du 18me siècle qui en ont parlé, depuis Montesquieu, l'ont fait avec une vive sympathie. Malheureusement ils oubliaient que pendant un siècle et demi, on n'a rien eonro du Paraguay que ce qu'il plaisait aux jésuites d'en laisser transpirer ou d'en raconter eux-mêmes. Plus tard d'autres renseignements sont venus et ont ajouté beaucoup d'ombres au tableau. En 1750 l'Espagne ayant cru devoir céder aux Portugais, par échange, quelques cercles, ou Réductions, du Paraguay, les jésuites refusèrent de se soumettre au nouveau gouvernement, qui avait à sa tête le marquis de Potn-bal, et ils armèrent 20,000 Indiens pour résister. La lutte dura près de deux ans; les forces réunies de l'Espagne et du Portugal finirent cependant par l'emporter, les Indiens furent réduits en esclavage et les jésuites traités en rebelles. C'est alors qu'une enquête plus sérieuse démontra la fausseté des rapports que depuis si longtemps on avait admis comme vrais, sur le régime patriarcal et le bonheur dont jouissaient les indigènes colonisés par les pères. Mais la brutalité des nouveaux possesseurs fit presque regretter les jésuites et reculer le peu de civilisation qu'ils avaient réussi à introduire dans le pays. En 1777 le Paraguay dut faire retour à l'Espagne. Puis vint l'insurrection de toutes les colonies espagnoles de l'Amérique du sud. Le Paraguay conquit son indépendance en 1809; Francia s'en constitua le dictateur 1813-1840, sécularisa les biens ecclésiastiques, développa l'industrie et maintint le système d'isolement des jésuites. Son successeur, Lopez f 1870, ouvrit les communications, fit faire des routes, mais ruina le pays. v. Beck-Bernard, le Rio Parana.

 

PARÉ, Ambroise, né à Laval 1318, surnommé le père de la chirurgie française, était fds d'un coffretier: il étudia à Paris, accompagna en Italie comme chirurgien le général René de Montéjean, revint à Paris prendre ses degrés et, quoique protestant, fut nommé 1552 chirurgien de Henri II, poste qu'il garda sous les trois rois suivants. Charles IX en particulier, qu'il avait guéri de violentes douleurs, suites d'une piqûre au bras, lui avait voué une amitié à toute épreuve, et le sauva du massacre de la Saint-Barthélemy, trouvant « qu'il n'était raisonnable qu'un qui pouvait servir à tout un petit monde, fût ainsi massacré. * C'est Paré qui accourut le premier auprès de Coligny après l'attentat du 22 août. f22 déc. 1590. Il a laissé plusieurs ouvrages et traités de médecine et de chirurgie, notamment sur les plaies produites par les armes à feu. Ce chrétien modeste, complimenté sur une guérison, répondit: « Je le soignai, Dieu le garit. • Enterré dans l'égl. Saint-André des Arts.

 

PAREAU, Jean-Henri, orientaliste distingué, d'abord prof, à Deventer, puis prof, et pasteur français à Utrecht, a publié quelques ouvrages: en 1790 sur les Lamentations, en 1803 sur ridée de l'Immortalité dans le livre de Job, en 1822 un Manuel de l'interprète de l'A. T., en 4817 un Abrégé des Antiq. hébraïques. Ne pas le confondre avec un autre Pareau, prof, de théol. à Groningue.

 

PARENTÉS spirituelles. A côté de la parenté du sang, qui crée un empêchement naturel ou moral au mariage, comme la loi de Moïse le reconnaissait déjà, tout en établissant des différences de peines suivant le degré de parenté des conjoints, Lév. 18, 8-18. 20, 11-21,, il y a la parenté par alliance qui, chez plusieurs peuples, entre autres chez les Romains, était en quelque mesure assimilée à la consanguinité. Il en était de même de la parenté par adoption. L'Église chrétienne trouva ces lois établies, et elle se les appropria; elle alla même un moment plus loin encore, en étendant pour les parentés fictives et non consanguines la prohibition du mariage au delà de la personne même des intéressés; mais elle dut renoncer bientôt à une rigueur non justifiée. En revanche elle introduisit un nouveau cas de prohibition dans le fait de la parenté spirituelle. Plusieurs pères du 6™ siècle et le conc. de Trull 692 estiment en effet que le baptême et la confirmation constituent une parenté plus intime que celle du sang. D'autres y ajoutèrent même la confession et l'instruction des catéchumènes, mais Boni-face VIII leva ces dernières interdictions. Il en restait cependant encore trop; le père devenait parent du parrain et de la marraine, et les enfants eux-mêmes étaient déclarés parents; en outre il y avait souvent plusieurs parrains et marraines, et comme la même personne pouvait avoir à plusieurs reprises rempli ces fonctions dans des familles très diverses, étrangères les unes aux autres, les parentés spirituelles formant obstacle au mariage se multipliaient outre mesure et il arrivait même que les intéressés les ignoraient. Le conc. de Trente frappé de ces inconvénients, et considérant que le grand nombre de défenses est cause que très souvent on contracte mariage, sans le savoir, dans des cas qui sont défendus, a décidé d'abord qu'il n'y aurait jamais qu'un parrain, ou une marraine, ou tout au plus un parrain et une marraine ensemble; et ensuite que l'alliance spirituelle n'existerait qu'entre l'enfant, les parents et les parrains; de même entre l'enfant, ses parents et celui qui aura conféré le baptême seulement, les autres ascendants ou collatéraux n'étant pas compris dans cette parenté spirituelle. Dans les égl. évangéliques les Ordonnances de Lunebourg 1543 et de Wurtemberg 1553 ont seules maintenu ces empêchements au mariage, mais dans la pratique d'autres ont conservé longtemps l'esprit qui les avait dictés. Aujourd'hui presque partout ils ont disparu, et la loi civile ne reconnaît plus que les empêchements provenant d'une parenté réelle; même là des adoucissements, peut-être trop nombreux, ont diminué les cas d'interdiction: ainsi les mariages entre oncle et nièce, entre cousins germains, entre beaux-frères et belles-sœurs, tendent à devenir fréquents, bien qu'ils soient reconnus peu favorables au développement de la race.

 

PAREUS lo David, de son vrai nom Wœn-gler, théol. réformé, né 30 déc. 1548 à Franken-stein, Silésie supérieure. Destiné d'abord à un état manuel, son amour de l'étude triompha des circonstances, et après avoir reçu quelques leçons de Schilling, élève de Mélanchthon, il vint à Amberg, Palatinat, puis à Heidelberg, où il jouit de la protection d'Ursinus, l'ami de Frédéric III. Ses études achevées 1571, il occupa successivement plusieurs postes de pasteur, fut renvoyé quand Louis eut fait prévaloir le luthéranisme 1577, et revint en 1583 quand la crise fut passée. Maître au gymnase, principal, prof, à l'université, conseiller aulique. premier pasteur, il déploya dans toutes ses fonctions une saine et grande activité. Lors de l'entrée des Espagnols 1621, il se réfugia à Amweiler, près de Deux-Ponts, puis à Neustadt chez son lils; enfin voyant sa fin prochaine il se fit transporter mourant à Heidelberg, où il f 15 juin 1622. Son principal ouvrage est son édition de la Bible, dite de Neustadt, texte de Luther, avec de nouvelles notes et réflexions en remplacement de celles de Luther; les violentes attaques du parti luthérien, d'Andréa en particulier, ne servirent qu'à augmenter la popularité de cette version. Pareus était d'ailleurs d'une nature conciliante, et il se joignit aux efforts du noble Fréd. IV pour rapprocher les calvinistes et les luthériens, en établissant que les points qui les distinguent ne méritent pas de les diviser: Cly-peu* veiitatis 1598, Irenicum 1615. — 2° Son fils Philippe, aussi prof, de théol. à Heidelberg, 1576-1648, avait étudié sous Théod.de Bèze; il enseigna les humanités à Neuhausen, et fut recteur à Neustadt et à Hanau. On lui doit une Vie de son père et plusieurs bons travaux sur Plaute. — 3o Daniel, fils du précédent, né 1605 à Neuhausen, assassiné 1635 par des voleurs, était prof, des lettres à Kaiserslautern, a édité plus, auteurs latins, composé un Dictionn. de Lucrèce et publié plusieurs ouvrages d'histoire.

 

PARIS. L'introduction du christianisme dans la vieille Lutèce, capitale des Parisii, se perd dans les ombres du 3ro« siècle. C'est Grégoire de Tours qui en parle le premier, au 6®« siècle; il raconte que vers l'an 240 ou 250, sept évan-gélistes furent envoyés d'Italie dans les Gaules, et que l'un d'eux, Denys, accompagné d'Eleu-thère et de Rustique, s'établirent à Paris. C'est tout. Aucun détail sur ce Denys, q. v. La légende le confondit plus tard avec l'Aréopa-gite et de faux documents du 4me siècle furent invoqués & l'appui de cette substitution de personnes. Abélard lui-même s'y laissa tromper. On peut admettre cependant que l'évêché de Paris date de saint Denys, et dès360 un synode est réuni dans cette ville. Geneviève en 451 détourne la fureur d'Attila et devient la patronne de la capitale; Clovis lui élève une église. En 1622 Grégoire XV érige l'évêché en archevêché, et lui donne pour suffragants Chartres, Orléans et Meaux; plus tard Blois et Versailles. Un grand nombre de conciles provinciaux ont en lieu à Paris, mais en général peu importants. Celui de 360 rejeta I'arianisme et le semi-aria-nisme; celui de 614 ou 615, en stipulant que l'évêque serait élu par le concours du peuple et du clergé, et en étendant la compétence épiscopale, favorisa le développement de la hiérarchie. En 825 les év. et les théologiens convoqués par Louis-le-Déb., rejettent les actes du conc. de Nicée 787 et se prononcent malgré Adrien 1er contre le culte des images, ainsi qae l'avaient fait les Livres carolins; plusieurs, entre autres Bellarmin, ont contesté, mais sans preuves, l'authenticité de ces décrets. En 829 el 846, questions disciplinaires contre le relâchement des mœurs. En 1050 condamnation de la doctrine de Bérenger sur la Cène. En 1074 protestation énergique contre le décret de Grégoire VII imposant le célibat forcé. En 1147, sous la présidence d'Eugène UI, discussion sans résultat sur la prétendue doctrine trithéiste de Gilbert de la Porrée. Mentionnons encore le synode de 1210 qui condamna le panthéisme mystique d'Amatiry de Bène; ceux de 1223, 1224, 1226, 1228 contre les albigeois, et celui de 1310 contre les templiers. Plusieurs synodes au 15m« siècle s'occupèrent de réformes, mais avec hésitation, et ils aboutirent à celui de 1523 qui condamna Luther et la Réformation. Ceux des év. constitutionnels 1797 et 1801 n'aboutirent pas, non plus que celui de 1811 convoqué par Napoléon pour la formation d'une Église nationale indépendante de Rome. —L'uni-niversité de Paris, qui fut dans la moitié du moyen âge la principale école de théol. et de philosophie, et qui possédait une autorité presque incontestée, au point qu'en 1387 elle résista même au pape sur la question de l'Immaculée conception, date de 1209 et 1213, époque où Innocent III promulgua en faveur des écoles conventuelles existantes des droits et des privilèges collectifs. Elle compta bientôt20,000 étudiants. C'est au temps de la scolastique qu'elle brilla de son plus vif éclat. On reconnaît encore au 13«>e siècle l'influence de l'école de Saint-Victor, et la lutte des théologiens parisiens contre l'invasion des ordres mendiants fut en même temps, et malgré ses écarts, une lutte en faveur de la science et de la liberté, contre la barbarie théologique. L'univ. se montra froide pour la renaissance des lettres, et le mouvement se fit en dehors d'elle; elle fat généralement hostile à la Réforme. Mais même a ces temps elle continua de résister aux prétentions des papes: en 1458 contre les moines mendiants, en 1554 sur la question des jésuites, en 1717 au sujet des libertés gallicanes et de la bulle Unigenitus. Parmi les hommes qui ont illustré l'université de Paris, on cite Abélard, Gilbert de La Porrée, Jean de Salisbury, Albert-le-Grand, Bonaventure, Thomas d'Aquin, Dans Scott, Jean de Paris, Occam, d'Ailly, Clé-mangis, Gerson, etc. La Sorbonne, q. v., distincte de l'université, qnoiqne en rapports intimes avec elle, en était comme la faculté de théologie. — Le protestantisme y fit de bonne heure son apparition et y compta des pasteurs zélés et bien doués. Dés 151S Lefévre publie son Comment. sur les Ép. de Paul, et enseigne k la Sorbonne que c'est Dieu qui justifie par grâce, par la foi. L'influence des « hérétiques de Meaux » se fait sentir et en 1523 Berquin est mis en pri son. Le 20 mars 1524 le parlement rend un arrêt contre les blasphémateurs et les luthériens, et bientôt Pavanne est brûlé vif, ainsi que l'ermite de Livry. A partir de ce moment la persécution se poursuit activement, et François 1er donne des ordres précis contre « les hérétiques qui pullulent dans sa bonne ville de Paris, > 10 déc. 1533. Malgré de nombreuses exécutions, les réformés continuent de tenir leurs réunions, présidées quelquefois par des pasteurs en passage, le plus souvent par des laïques. En 1555 ils pensent sérieusement à s'organiser, et le sieur de la Ferrière met à leur disposition sa maison du Pré-aux-Clercs; ils choisissent pour ministre, l'un d'entre eux, Jean Le Maçon, dit la Rivière, ou Launey, et à la fin de l'année l'Église a son consistoire, des diacres et plusieurs pasteurs. D'horribles massacres eurent lieu en 1557, et suivisde condamnations à mort. En 1559 une accalmie permet aux protestants de se réunir en synode, du 26 an 28 avril, sous la présidence du pasteur Fr. deMorel, dit deCoulonge. Malgré son mauvais vouloir le gouvernement est bien obligé de tolérer le prêche, puisque la noblesse et des princes même le fréquentent. Henri IV pense tout concilier en donnant Charenton aux protestants 1606, mais ce temple plusieurs fois brûlé ou démoli par la populace, avec la complicité des autorités subalternes et du clergé, finit par être abandonné. La Révocation a supprimé le protestantisme, en droit, ce qui ne l'empêche pas de se maintenir en fait pendant tout le 18** siècle, el les autorités qui l'ignorait continuent de traiter avec lui officieusement et par des intermédiaires moralement accrédités. D'une part les puissances protestantes et leurs ambassadeurs, de l'autre la philosophie et ses plus illustres représentants, plaident la cause de la tolérance, et malgré les lois les magistrats se décident à fermer les yeux. LouisXVI accepte en Necker un ministre des finances protestant. Court de Gébelin est l'agent général des églises sous la croix. Malesherbes se prononça à plusieurs reprises pour la liberté. Un pasteur est nommé président de l'Assemblée nationale.

Enfin la loi du 18 germinal an X consacre comme droit ce qui existe depuis longtempscomme fait, et l'Égl. de Paris est constituée.

 

PARIS, Matthew, bénédictin anglais du couvent de Saint-Alban, né à la fin du 12«»« siècle, f 1259, fut chargé de réformer plusieurs couvents norvégiens, et jouit de la faveur d'Henri III. Il a écrit une Hùtoria major d'Angleterre, de 1066 à 1259, publ. par l'archev. Parker, et il en a fait lui-même l'abrégé sous le titre de Hist. minor.

 

PARIS, François (de), né 30 juin 1690, fils d'un conseiller au parlement, avait embrassé avec ardeur les doctrines jansénistes; il rejeta la bulle Unigenitus, et refusa une cure parce qu'il ne voulait pas signer le formulaire. Après s'être miné en aumônes et en bonnes œuvres, il se mit à faire des bas pour vivre, mais il abrégea ses jours par ses austérités. Il f i« mai 1727 en odeur de sainteté, et le bruit courut qu'il se faisait des miracles sur son tombeau; v. Convulsionnaires. Carré de Montgeron a publié le récit de ces miracles.

 

PARKER lo Matthieu, né 6 août 1504 àNor-wich, étudia à Cambridge, fut ordonné prêtre, devint membre du collège Corpus Christi 1527, et se rattacha à la Réforme. Ses talents de prédicateur lui valurent la faveur royale; Anna de Boleyn en fit son chapelain, Henri VIII lé nomma doyen du collège Sainte-Claire, Cambridge, qui acquit sous sa direction une prospérité intellectuelle, morale et financière exceptionnelle. Vice-chancelier de l'université depuis 1545, il se retira sous Édouard VI dans son décanat de Lincoln. Persécuté et proscrit sous Marie-la-Sanglante, il fut rappelé par Éli-sabeth, et malgré sa répugnance, il dut accepter en 1559 l'archev. de Cantorbéry et la tâche de réorganiser l'Égl. anglicane. Il y procéda avec énergie, conformément aux vœux de la reine, mais dépassa peut-être les limites dans la recherche de l'uniformité; la question du costume, propter lanam et linum, amena des luttes, qui ne se terminèrent que par la retraite des puritains. f 1575. Il a publié quelques notices et rendu des services comme historien; il a fondé une société des Antiquités et recueilli des mss. précieux.

2o Samuel, 1640-1687, archid. de Cantorbéry et év. d'Oxford; auteur de plusieurs ouvrages de théologie.

3» Samuel, son fils, auteur d'une Biblioth. Biblica, Oxford 1720.

4o Théodore, né 24 août 1810 À Lexington, Massachussets, fils d'un fermier, se procura par des leçons les moyens de poursuivre ses études et entra en 1834 au collège de Harward près Boston. La théol. rationaliste allemande, la lecture de Eiehhorn, Wegscheider, de Wette, Spi-nosa, Leibnitz, Lessing, détermina sa propre théologie. Nommé en 1837 pasteur de l'égl. unitaire de West-Roxbury, il dut se retirer à cause de ses idées trop libérales. En mai i84i il fit à Boston un discours sur ce qu'il y a de permanent et de transitoire dans le christianisme. Dans l'hiver de 1841-1842 il lut des conférences sur différents sujets religieux, qui amenèrent sa rupture avec les anciens unitaires. En 1843 il vint en Europe et s'occupa spécialement de la théol. allemande. En 1845 il quitta Rox-bury pour prendre la direction d'une égl. con-grégationaliste à Boston, et il y resta jusqu'en 1839; une attaque d'apoplexie l'obligea de renoncer au ministère actif, et il f 1860 à Florence. Parker est avec Channing le représentant le plus autorisé du nouvel unitarisme, qui a fait justice des inconséquences du vieux rationalisme et qui rejette le surnaturel et l'inspiration; il admet de la Bible ce qu'elle renferme de religieux, mais il revendique les droits absolus de la raison, et insiste sur la nécessité de la révélation immédiate de la religion à la conscience. Presque nul au point de vue de la doctrine chrétienne, Parker a dû son influence à ses qualités personnelles, à la générosité de son caractère et à ce qu'il y a eu de vrai dans ses attaques contre la foi morte. Il a pris parti pour l'abolition de l'esclavage en un temps où il y avait du danger à le faire.

 

PARMÉNIEN, donatiste, élu après la mort de Donatus pour lui succéder comme anti-évêque vers 360, expulsé, puis rappelé par Julien l'apostat, demeura à la tête des donatistes d'Afrique jusqu'à la fin du siècle. Il a écrit 2 ouvrages, qui sont perdus, l'un qui a été réfuté par Optatus de Milève, l'autre par saint Augustin.

 

PARRAINS, v. Parenté.

 

PARSES(Parsisme), nom actuel des Perses qui, après la victoire de l'islamisme, ont continué de rester les disciples de Zoroastre et les adorateurs du feu. Le principe fondamental de cette religion est la coexistence éternelle de deux êtres puissants, représentant: Ormuzd ou Ormazd, le bien, le vrai, le bon, le soleil; Ah-riman le mal sous toutes ses formes, le péché, la souffrance, les ténèbres, la nature malfaisante, plantes et bétes. Ormuzd le premier avait créé le monde par sa parole, et il l'avait créé parfait; Ahriman, sous la forme d'un serpent, survint pour le souiller et le corrompre. De là une guerre qui finira par la destruction du mauvais esprit. L'apparition de Zoroastre a été dans cette lutte le moment décisif où la victoire du mal sur le bien a commencé à se dessiner. Le 3»e des grands prophètes, Sosiosch, le Sauveur, apparaîtra au dernier jour pour vaincre, et il jugera le monde. Zoroastre avait demandé à ses disciples de mener une vie pure; ses prêtres, les mages, ont compliqué cette donnée morale par une foule de cérémonies et de pratiques minutieuses, dignes du talmud et de la scolastique. Les Parses sont encore nombreux dans la province de Bombay.

 

PARSON, ou Pertm, Robert, né 1545 à Somerset, d'abord protestant, puis jésuite, un des premiers qui surgirent en Angleterre, avec son collègue Edmond Campion. Chargé de plusieurs missions secrètes en Espagne et ailleurs, il revint dans son pays comme supérieur des missions catholiques, intrigua contre Elisabeth, fat compromis dans la conspiration des poudres, mais s'arrangea de manière à ce qu'il n'y eût pas de preuves contre lui. Son collègue Campion ayant été exécuté, il jugea prudent de quitter l'Angleterre et s'occupa activement de fonder des collèges anglais en Espagne et en France. Il composa un grand nombre d'écrits de controverse, et soutint la thèse que la royauté étant une émanation du peuple, le peuple avait le droit et même le devoir de refuser l'obéissance à un prince non catholique. Très estime de Philippe II, il refusa le cardinalat et f 1610 à Rome, après avoir été 23 ans le directeur dn collège anglais de cette ville.

 

PASAGIENS, ou Passagieru, une des nombreuses sectes du moyen âge, condamnée an conc. de Vérone 1184, et proscrite par Fréd. D. 1224, sous le nom de: les Circoncis. Èlle croyait au Christ, entendu à la façon ébionite, mais elle y joignait la pratique littérale de certaines prescriptions du judaïsme, les sacrifices non compris. C'étaient peut-être des juifs qui. pour se soustraire aux persécutions, avaient adopté quelques formes chrétiennes, tout eu retenant dans leur cœur l'attachement à leur vieille foi, et conservaient des relations avec leurs coreligionnaires d'Orient. On ne les connaît d'ailleurs que par les rapports de leurs ennemis. C. Smidt fait dériver leur nom du mot passage, qui a bien des sens: passer d'une religion à l'autre, d'un pays à l'autre, passer poor chrétiens, etc.

 

PASCAL lo pape 817-824, né à Rome, directeur du monastère de Saint-Étienne, se fut pardonner par Louis-le-Déb., comme son prédécesseur Étienne V, l'irrégularité de son élection qui n'a pas été soumise à son approbation préalable. Il reçoit de Louis les îles de Corse et de Sardaigne, et couronne Lothaire à Rome 833 Ainsi les deux puissances en sont à se reconnaître mutuellement; les empereurs ont peidn du terrain, les papes en ont gagné. Pascal doit rendre compte à Lothaire pour avoir fait incarcérer et décapiter deux dignitaires romains qui avaient juré fidélité au monarque. Sous son pontificat parait Claude de Turin, qui s'élève contre la plupart des superstitions de son temps:

Pascal le combat, mais ne le déclare pas héré* tique. Il ouvre à Rome un refuge pour les Grecs que les persécutions des iconoclastes réduisent à quitter l'Orient.

2° Pascal II, Rainieri, né à Bléda, Toscane; moine de Cluny, nommé par Grégoire VII abbé de Saint-Paul extra-muros, élu pape 1099, continue vis-à-vis de la France la politique hostile de son prédécesseur Urbain II. Il remporte la victoire sur l'emp. Henri IV, en excitant contre lai. sous le masque de la religion, son fils Henri V. Mais celui-ci, une fois roi, défend les mêmes principes que son père, en particulier le droit d'investiture. Le clergé allemand soutient Henri. Pascal persistant à refuser à Henri le droit d'investiture, celui-ci marche sur Rome. Le pape propose, 1110, que les év. allemands rendent à l'empereur tous les llefs qu'ils tiennent depuis Charlemagne, et que l'empereur de son côté renonce à l'investiture comme lui-même renoncera à s'immiscer dans les affaires terrestres, mais le clergé allemand ne veut faire aucune concession. Le pape refuse au roi le couronnement, mais (ait prisonnier avec ses cardinaux, il se décide à sacrer Henri et lui accorde le droit d'investir ceux qui auraient été élus sans violence, ni simonie. Le parti papiste, à son tour (conc. de Latran 1112), délie le pape de son serment et excommunie Henri. Nouvelles luttes. Pascal nie d'avoir excommunié l'empereur, et f en exil 1118. Il avait eu à combattre deux antipapes, Albert et Théodoric, et fonda plusieurs églises.

3o Pascal III, Gui de Crème; étant cardinal il fut chargé par Adrien IV d'une négociation auprès de Frédéric Barberousse; il se laissa séduire par ce prince et fut nommé pape par lui, en opposition à Alexandre III, après la mort de l'antipape Victor IV, 1154. Bientôt abandonné par son protecteur, il mourut misérablement 6 ans après.

 

PASCAL, Biaise, né à Clermont-Ferrand, 19 juin 1623, d'une famille d'Auvergne anoblie en 1478 par Louis XI. Son père était premier président à la cour des aides de Clermont et veilla avec grand soin à l'éducation de ses enfants. Biaise inoutra de bonne heure des dispositions étonnantes pour les sciences, notamment pour les mathématiques et la physique. Son père s'était fixé à Paris en 1631 et réunissait chez lui des savants, dont la conversation était bien faite pour élever l'âme et développer l'intelligence des trois jeunes Pascal, mais il ne voulait pas hâter ce développement par des études qui auraient fatigué son fils, et Biaise résolut de travailler seul. A 12 ans il était arrivé en géométrie à la 32®e proposition d'Euclide, et quand son père le découvrit, il comprit qu'il était inutile de résister à une vocation aussi manifeste et qu'il valait mieux faciliter à l'enfant son travail que de l'épuiser en le laissant travailler seul. Dès lors Pascal ne cessa plus d'inventer, d'imaginer et de découvrir: traité des sections coniques, machine à calculer, triangle arithmétique, théorie de la roulette, expériences sur le vide, équilibre des liquides, brouette, ha-quet, etc. Ses travaux sur le poids de l'air, qui devaient aboutir au baromètre, suffiraient à la gloire d'un homme. Ce n'est cependant pas dans ce domaine qu'il a le plus mérité l'éclat qui entoure son nom, et la théologie a plus de titres encore que les sciences naturelles à le revendiquer comme sien. Son père avait accepté de Richelieu en 1638 la place d'intendant à Rouen. Plusieurs nobles familles jansénistes qui s'y trouvaient, et un ecclésiastique du nom deGuil-lebert de Rou ville, exercèrent sur la vie religieuse des Pascal une influence décisive. Jacqueline en particulier, la plus jeune sœur de Biaise, née 1625, y fut mise en relations avec plusieurs membres de Port-Royal, et prit le voile dans ce couvent après la f de son père 1651. Elle décida aussi un moment son frère, qui avait en elle une confiance pleine de sympathie, à se choisir un directeur janséniste et à s'ouvrir à lui quand l'excès de ses travaux lui ferait sentir le besoin d'une détente. Cependant ces premiers rapports ne furent que passagers. Le jeune homme avait 18 ans; il était maladif, et tous ses efforts se concentraient dans la pensée. Son Discours sur les passions de l'amour est antérieur à la prise de voile de Jacqueline, et rappelle Montaigne à plusieurs égards. Sa conversion est racontée de diverses manières. Une tradition janséniste, dont on ne trouve d'ailleurs aucune trace ni dans sa correspondance, ni dans sa vie écrite par sa sœur aînée, Gilberte, Mra« Périer, porte qu'en octobre 1654 il faillit périr sur le pont de Neuilly, ses chevaux s'étant emportés, et qu'il ne fut sauvé que parce que les traits se rompirent; de ce moment, ajoute-t-on, il croyait toujours voir à sa gauche un précipice ouvert. Il est possible que cet événement ait eu lieu, et qu'il ait fait faire des réflexions sérieuses à celui qui eu avait presque été la victime et qui, depuis 1647, à moitié paralysé des jambes, devait comprendre que sa vie ne tenait qu'à un fil, et que le génie ni la science ne suffisent à l'homme. Mais ce qui fut la véritable crise dans sa vie religieuse, ce fut l'extase, ou la vision qu'il eut dans la nuit du 23 nov. de la même année 1654 et dont il transcrivit le souvenir en double sur un parchemin qu'un serviteur trouva après sa mort, dans la doublure de son vêtement. Cette même année encore il eut avec Sacy la mémorable discussion sur Epictète et Montaigne, qui nous fait connaître la lutte qui se livrait en lui. Sans abandonner ses travaux il se consacra plus entièrement à l'étude des choses religieuses et renoua ses relations avec les jansénistes. En 1656 il fit une première retraite à Pôrt-Royal, et il y retourna souvent. Arnauld ayant été censuré par la Sorbonne, Pascal publia, datées de la province et signées Louis de Montalte, ses célèbres Provinciales, ouvrage de logique, de science théologique et de bonne foi, aussi bien qu'un des chefs-d'œuvre de la langue française, qui obtinrent dès leur publication un immense succès, auquel leur condamnation par le pape, par le parlement d'Aix et par le roi ne firent naturellement qu'ajouter; il n'y en eut pas moins de 60 éditions aussitôt enlevées. Elles furent en même temps traduites en allemand à Cologne, sous le pseudonyme de Wendrock (déguisement) et avec des annotations de Nicole. Voltaire les a traitées de satires, J. de Maistre de menteuses, et Châteaubriand a appelé Pascal un calomniateur de génie; la conscience publique n'en a pas moins ratifié le jugement porté contre les casuistes de la dévotion aisée et des réservations mentales. Mais Pascal méditait un livre d'une portée plus générale, un traité d'apologétique dans lequel il aurait prouvé l'évidence du christianisme par ses rapports intimes et éternels avec les besoins de Pâme humaine. Il demandait à Dieu pour cela dix années de vie et de sanlé, mais ses jours étaient comptés et sa santé était irrémédiablement perdue. L'occasion de ce livre fut la guérison inespérée d'une jeune nièce de 10 ans, qui souffrait d'une fistule lacrymale et qui, à la suite de prières faites dans la chapelle de Port-Royal ftit l'objet d'une guérison presque instantanée, mars 1656. Pascal en fut frappé, comme d'un miracle. Il comprit toujours mieux la force du christianisme, et il entreprit de le justifier vis-à-vis des incrédules et de lui rendre sa forme primitive vis-à-vis de ceux qui en avaient altéré l'esprit. Il écrivit, mais après sa mort on n'en trouva que des fragments détachés, des notes éparses, quelques-unes inachevées. Des mains amies les recueillirent, les classèrent de leur mieux, et les publièrent, mais non sans les avoir retouchées, èmondées, corrigées, embellies (c'est le mot dont quelques-uns se sont servi), de manière à ce qu'elles pussent recevoir 17 approbations de la Sorbonne, et ne déplaire ni aux jésuites, ni à l'orthodoxie du grand roi. Arnaud et Nicole furent les complices de cette impie mutilation, contre laquelle protestèrent en vain dès l'origine les dépositaires de la vraie pensée de Pascal. C'est ce volume qui, sous le titre de Pensées, parut pour la 1" fois en 1670, et a été reproduit dès lors en tant d'éditions et traduit dans presque toutes les langues civilisées. C'était un faux Pascal, et il a fallu que M. Prosper Faugères, en 1844, avec l'autorisation de M. Vil-lemain, collectionnât à nouveau les mss. existants, pour en donner enfin une édition fidèle, authentique, débarrassée de toutes les Mutilations et altérations qu'avaient fait subir an texte vrai les courtisans de Louis XIV et les advérsaires du jansénisme. C'est dans les dernières années de Pascal qu'eut lieu la grande lutte entre Port-Royal et la hiérarchie, et que les religieux eurent à signer, sans distinguer entre le fait et le droit, la Constitution d'Alexandre VI de 1686 condamnant les soi-disant hérésies de Jansénius. Arnaud et ses amis se décidèrent à signer, moyennant une légère capitulation de conscience; Pascal refusa, attendu que le pape se trompait sur le fait même. Jacqueline se laissa induire à signer aussi, mais elle en eut des remords et mourut de chagrin, 4 oct. 1661. Pascal ne tarda pas à la suivre; + 19 août 1662, ayant supporté avec une résignation toute chrétienne des douleurs qui n'avaient fait que s'aggraver depuis 1658. v. Vinet, Études sur W. Pascal; Éloge, par Condorcet; Cousin, Havet, Sainte-Beuve, Schérer, de Pressensé. Le prof. Astié a publié en 1857 une édition des Pensée? d'après un plan nouvfeau, qui dessine mieux le caractère apologétique de l'ouvrage.

 

PASCHASE RADBERT. Tous les anciens pères et docteurs avaient maintenu sur la doctrine de la Cène la foi à une communion réelle avec le Rédempteur, sans chercher à déterminer le comment. La pente à voir partout une influence magique conduisit peu à peu à la doctrine de la transsubstantiation. Paschase Rad-bert, moine à Corbie, + 868, fut le premier i attribuer aux pères cette doctrine. Le pain et le vin, dit-il, après leur consécration ne sont plus autre chose que le corps de Christ et son sang; c'est la même chair, et pas une autre, que celle qui est née de Marie et qui a souffert sur la croix. Des légendes merveilleuses ne contribuèrent pas peu à accréditer le nouveau dogme. Paschase avait fait un recueil de citations des pères; Raban Maur, Ratramne, Scot Érigène, Walfried Strabon le combattirent; Ratramne entre autres, en lui opposant sous le même titre des citations contraires. Mais le courant était dans le sens de l'opinion miraculeuse et en apparence la plus religieuse; l'esprit dn temps matérialisait tout; Haymon d'Halberstadt lui-même se laissa entraîner, et au 11">* siècle c'était une hérésie d'attaquer cette doctrine; v. Rérager. C'est au*si à Paschase qu'on doit la première idée de la conception surnaturelle de Marie.

 

PASOR, Georges, né 1er août 1570 à Ellar, Nassau; prof, à Herborn et à Franeker, t 10 déc. 1637. Auteur d'un petit Dictionn. du N. T. et d'une Grammaire du N. T. très estimée.

 

PASSAGÏENS, v. Pasagiens.

 

PASSAGLIA, Charles, né 1814 près de Luc-ques, prof, à Reggio et à Picoli, entra en 1844 chez les jésuites et fut nommé prof, au Collège romain. Il dut s'enfuir lors de la révolution de 1848, mais revint avec le pape. Très versé dans la scolastique, il possédait toute la confiance du pontife. Il écrivit en 1853 trois volumes pour la défense de l'Immaculée Conception, et présida la Commission qui devait préparer l'adoption du nouveau dogme par le concile. Mais il était plus avancé en politique qu'en religion, et l'étonnement fut grand en 1859, lorsque parut sa brochure patriotique Pro causa italicâ, dans laquelle il défend l'unité nationale et prouvé, tout en restant strictement fidèle à la doctrine orthodoxe, mie le pouvoir temporel est dangereux pour l'Eglise. Cet essai de conciliation entre la papauté et les aspirations populaires fut accueilli avec enthousiasme par le bas clergé, mais l'auteur dut quitter Rome pour n'être pas arrêté, 1860. Il se rendit à Turin, où il fut nommé prof, de philos, morale. Il a dès lors publié quelques autres brochures dans le même esprit, un journal politique Mediatore 1862-1866, et en 1864 une réfutation de la Vie de Jésus, de Renan.

 

PASSAU, ville de Bavière, au confluent de l'Inn et de l'Ilz, siège épiscopal qui date de l'invasion des Avares 738, et qui fut pendant plusieurs siècles en rivalité, soit avec l'ancien évêché de Lorch, première métropole de la Pannonie, soit avec celui de Salzbourg qui finit par l'emporter. Piligrim en 997 portait encore le titre d'archev. de Lorch et Passau, mais au milieu de prétentions rivales, et quand les frontières des pays étaient constamment remises en question, Rome avait de la peine à se décider. Quand elle eut enfin prononcé 1691 en faveur de la suprématie de Salzbourg, Joseph 1er obtint à son tour 1722 que Passau en fût reconnu indépendant. Mais déjà cet évêché qui comprenait dès l'abord la plus grande partie de l'ancienne Pannonie évangélisée par son zèle, avait été diminué par l'érection d'évêchés hongrois, et en 1480 il l'avait été encore par la création du diocèse de Vienne. Ses limites actuelles datent de 1822 et il a perdu toute son importance. La Réformation fut introduite à Passau par le chapelain Léonard Kaiser, qui fut martyrisé à Schàrding 1527; elle y fit de rapides progrès, mais les jésuites, avec l'aide du pouvoir temporel et avec leur collège fondé en 1612, réussirent à l'étouffer. Passau est surtout connu dans l'histoire par le célèbre Traité qui porte son nom. Il fut conclu sous les auspices du roi Ferdinand, à la suite des victoires remportées par Maurice de Saxe sur Charles-Quint. Ouvertes le le 18 avril 1552 à Ehrenberg, les conférences n'aboutirent pas. Elles furent rouvertes à Passau le 26 mai, et posèrent les bases de la paix de religion d'Augsbourg. Elles eurent ceci de caractéristique que c'est là que pour la Ire fois les États protestants comparurent devant l'empereur, non comme des sujets rebelles pour être jugés par le maître, mais comme des puissances indépendantes et pour traiter d'égal à égal. C'est aussi là que fut reconnue l'impossibilité de fonder l'unité politique et relig. de l'Allemagne sur les principes rêvés par Charles-Quint. L'empereur hésita longtemps à signer un compromis, qui était la ruine de tout son système; il écrivait encore le 18 juillet « qu'il ne ferait rien contre son devoir et sa conscience, quand même tout devrait se perdre, » mais l'approche des Turcs, contre lesquels il ne pouvait rien sans l'appui des protestants, finit par le décider; il signa le 2 août 1552.

 

PASSION, nom par lequel l'Église désigne d'une manière spéciale les souffrances du Sauveur depuis sa condamnation jusqu'à sa crucifixion, telles qu'elles sont reproduites entre autres dans la procession dite le Chemin de la Croix. Dans un sens plus étendu le mot s'applique à toule la Semaine sainte, depuis les Rameaux jusqu'à Pâques. L'Égl. catholique donne même ce nom au dimanche qui précède celui des Rameaux. Toutes les églises célèbrent par des lectures et par des méditations spéciales cet événement qui résume la Rédemption. Les ser-monnaires sur ce sujet abondent, Francillon, Galland, Bridel, etc.

Ordres de la Passion. Deux ordres de chevalerie furent créés sous ce nom, l'un par Richard II d'Angleterre 1380, l'autre par Charles IV 1400, en vue de combattre les infidèles, mais ils n'ont duré que peu de temps. Un ordre de femmes du même nom compte encore en Italie quelques représentants; il fut fondé à Naples en 1538 par Marie-Laurence Longa suivant la règle des tertiaires de Saint-François, et autorisé par Clément VIII et Grégoire XV.

Mystères de la Passion, v. Mystères.

 

PASSIONAL, ouvrage d'un auteur inconnu, du 14®* siècle; il chante en 3 livres la vie de Jésus, de Marie, des apôtres, des évangélistes et de 75 saints, « pour vivifier la piété des hommes et les fortifier dans la sainteté. » Luther l'a réimprimé avec quelques modifications, en même temps que le petit livre de prières.

 

PASSIONISTES, confrérie, ou Congrégation, association de religieux ecclésiastiques ayant pour but de rappeler incessamment à tous la vie, les souffrances et la mort du Sauveur; leurs moyens sont la prédication et la mission. Le fondateur est Paul-François de la Croix de Danni, né 1694 à Ovada, Sardaigne. Benoit XUI lui permit en 1725 de recevoir des novices. Paul fut consacré en 1727, ainsi que son frère Jean, et en 1737 ils ouvrirent à Orbitello leur première maison. Dans l'intervalle, la congrégation avait déjà pris un certain développement. 'Pie VI la reconnut par un bref solennel, le jour môme où mourait son fondateur, 18 oct. 1775. Celui-ci a été canonisé par Pie IX, l*r mai 1853. La congrég. possède un couvent à Rome, el a depuis 1782 des missions en Bulgarie et en Va-lachie. Le costume se compose d'une tunique de drap noir avec manteau, portant en blanc le nom de Jésus, un cœur et une croix.

 

PASTOUREAUX, bandes de vagabonds, de bergers et de paysans inoccupés qui en 1251, sous prétexte d'aller délivrer saint Louis, s'organisèrent dans le midi de la France, ayant à leur téte un ex-moine cistercien hongrois, Jacob, qui s'intitulait maître de Hongrie. Les uns agissaient peut-être par enthousiasme religieux, les autres et le plus grand nombre par haine des prêtres, des moines et des juifs, et parce qu'ils trouvaient plus de plaisir et de profit dans cette vie aventureuse que dans un travail régulier qui ne leur procurait pas même le nécessaire. Ils vécurent quelque temps de pillage, ravageant villes et campagnes, et furent enfin vaincus et détruits dans le Berri. Une nouvelle tentative eut lieu en 1320, dévote, fanatique, pillarde, massacrant les juifs sous l'étendard de la croix; elle menaça le clergé et vint jusque sous les murs d'Avignon; le sénéchal de Carcassonne les tailla en pièces.

 

PATARIA, quartier des chiffons (pâtes) à Milan, où se groupaient les fripiers et leurs dépôts de vieilleries. On avait aussi donné par dérision ce sobriquet de Patariens à une secte de dévots rêvant une réforme de l'Église, et qui se recrutait surtout parmi les pauvres; elle ne fut jamais condamnée, parce qu'elle ne fit point d'excès et n'était pas dangereuse; son chef même, Anselme de Badagio, devint év. de Lucques 1056. Elle eut ensuite pour directeurs deux prêtres, Ariald et Landulf. La réforme qu'ils demandaient n'était autre que l'abandon des libertés qui dataient d'Ambroise, et une subordination plus entière du clergé milanais à l'évêché de Rome; ils travaillaient dans l'esprit de Grégoire VII et sous l'influence ascétique et mystique de Cluny. L'archev. Guido de Milan leur était naturellement contraire. Une émeute en 1057 leur donna la victoire, la cathédrale fut envahie et les prêtres durent se séparer de leurs femmes légitimes; mais en 1066, dans une nouvelle émeute, Ariald fut tué. Le parti ne se tint pas pour battu; Herlembald, frère de Landulf, qui revenait de la Terre sainte, en prit la direction, et dès 1072 il triomphait dans tout le nord de l'Italie; Milan avait perdu ses vieilles franchises.

 

PATARINS, ou Patarène*, secte religieuse du 12"" et du 13°* siècle, dont on ne connaît bien ni l'origine, ni la doctrine. Les uns font venir leur nom de pati, souffrir, à cause des persécu tions dont ils ont été les objets; d'autres de pater, parce qu'ils répétaient souvent l'oraison dominicale. Mais il est plus vraisemblable d'admettre que cette secte a reçu son nom par suite d'un malentendu. Celle des patariens, v. Pata-ria, se distinguait par un attachement outré a la hiérarchie et n'a pas été persécutée par les papes; elle cessa d'exister quand elle eut vaiucu. Mais le nom resta comme synonyme d'opposition religieuse, et quand plus tard, à Milan môme et ailleurs, de nouvelles sectes se formèrent, ayant leurs cultes, leurs assemblées et leurs ministres, on leur appliqua le nom ancien et méprisé, dont on avait oublié la véritable signification. En religion les noms se donnent facilement et n'ont jamais rien de bien précis; ils sont ordinairement donnés par des adversaires, par conséquent par des gens qui ne connaissent pas la foi ou les doctrines de ceux qu'ils prétendent flétrir. Les patarins étaient vraisemblablement, sous un autre nom et avec quelques nuances, une des nombreuses manifestations d? la réaction biblique et anticléricale que l'on trouve à toutes les époques du moyen âge, depuis les pauliciens et les cathares jusqu'aux albigeois et aux vaudois, et que l'Égl. de Rome essayait d'assimiler aux manichéens. Artisans petits manufacturiers, industriels, ils vivaient modestement de leur travail. Fort nombreux dans le nord de l'Italie, ils enseignaient que c'est la foi qui sauve, qu'une Église ne doit se composer que de personnes pieuses, que la croix ne doit pas être adorée; ils rejetaient le baptême des enfants et refusaient le serment et le service militaire; ils avaient leurs pasteurs, leurs anciens et leurs évangélistes, qui vivaient de leur travail. Le gouverneur de Milan, 01-drad de Tresseno, lança contre eux en 1233 un décret de persécution, mais d'après le témoignage de l'inquisiteur Saccho, ils possédaient encore en 1259 de florissantes églises.

 

PATRIARCHES, titre d'honneur donné, sans doute en souvenir des pères du peuple d'Israël, aux chefs du sanhédrin en Syrie et en Perse, après la destruction de Jérusalem. Il en est nommé un à Tibériade en 415, un autre à Babylone en 1038. On ignore si c'est des Juifs que ce titre passa dans l'Égl. chrétienne. C'est d'abord dans l'Égl. grecque qu'il fut donné aux principaux évêques, et à partir du conc. de Chalcédoine 451, il fut réservé pour ceux qui avaient plusieurs provinces sous leur juridiction. Déjà au conc. de Nicée on avait accordé un titre analogue à l'év. d'Alexandrie, dont l'inspection comprenait la haute Égypte, la Lybie et la Cyrénaïque. Le conc. de Conslanti-nople 383 reconnut aussi comme patriarche, l'év. d'Antioche qui avait tout l'Orient pour diocèse. A ces deux on adjoignit Rome pour l'Occident. Les mêmes attributions, sans le litre, furent également reconnues aux chefs-lieux des 3 éparchies proconsulaires de l'Asie, Éphèse, Césarée, Héraclée (bientôt transféré à Constantinople). Enfin l'év. de Jérusalem reçut le même titre, mais seulement honorifique et par respect pour le berceau du christianisme. Le conc. de Constantinople 381 donna nn rang d'honneur à l'év. de cette résidence impériale, immédiatement après Pév. de Rome et avec les mêmes droits, ce qui mécontenta à la fois Damase qui trouvait que c'était trop, et les év. d'Orient qui furent jaloux de cette distinction; les disputes origéniennes et christologiques des siècles suivants s'en ressentirent plus qu'on ne pense, et Chrysostome en porta la peine. Les rivalités ne cessèrent que lorsque le conc. de Chalcédoine 451> malgré Léon-le-Grand, eut définitivement soumis au patr. de Constantinople les évêchés de Thrace, du Pont et de l'Asie proconsulaire. Les conquêtes de l'Islam firent disparaître successivement les évêchés de Jérusalem, d'Antioche et d'Alexandrie, et il n'y eut plus en présence que Constantinople et Rome, cette dernière ville affichant depuis Léon, et surtout depuis Grégoire, la prétention d'être le patriarchat universel, et revendiquant le droit de nommer en Orient même des évêques in partibus. En Occident Milan, Aquilée et Arles prétendirent aussi au patriarchat, mais se rallièrent à Rome lors de l'invasion lombarde. L'év. de Bourges et l'archev. de Lisbonne ont porté ce nom comme titre d'honneur. Presque toutes les égl. schismatiques de l'Orient, les nestoriens, les monophysites ont eu leurs patriarches, ainsi que les arméniens et les maronites soumis à Rome. Il y avait en Russie, à Moscou, un patriarche, qui balançait l'autorité du czar; Pierre-le-Grand le supprima 1721 et le remplaça par le saint synode. Auj. il y en a deux, à Moscou et à Kiev, mais sans grande autorité.

— Le Testament des H patriarches, écrit du second siècle, renferme les prétendues instructions qne les fils de Jacob léguèrent en mourant à leurs enfants. L'esprit en est tont messianique et judéo-chrétien; l'auteur a eu pour but de persuader aux juifs d'embrasser le christianisme. Publ. par Grœbe dans son SpiHlegium patrum.

 

PATRICK, ou Patrice, appelé aussi Sukkat, ué à Bannavon, auj. Kil-Patrick, Écosse, ou près de Boulogne, Armorique, vers 372 on 387, fils d'un diacre Calpurnius de son village. Ses différentes biographies sont si légendaires et semées de tant de contradictions et d'incertitudes que quelques auteurs en sont venus à conclure qu'il n'avait jamais existé. Voici cependant ce qui paraît acquis. Vers l'âge de 16 ans il fut enlevé par des pirates et vendu en Irlande comme esclave. Ce malheur dirigea vers Dieu ses pensées, et lui fit rechercher la source des vraies consolations. Au bout de 6 ans d'un pénible travail et de cruelles souffrances, une vision lui fournit le moyen de s'échapper et il rentra dans sa famille. Mais une vocation intérieure irrésistible le poussait à évangéliser l'Irlande. Enlevé une seconde fois il fut vendu en Gaule, mais bientôt racheté par des chrétiens. Il passa 4 ans 410-414 au couvent de Saint-Martin près Tours, sous la direction de saint Germain, et 9 ans dans un autre monastère. Enfin en 431 il arriva en Irlande et, en dépit des druides, opéra de nombreuses conversions; plusieurs rois se firent baptiser. Entouré de jeunes gens pieux, il parcourait le pays en tous sens, et fonda plusieurs églises et de nombreux couvents, entre autres celui d'Armagh. II fonda aussi des écoles et introduisit en Irlande la langue latine. Son zèle, sa foi, l'austérité de ses mœurs, en ont fait l'apôtre et le patron de son pays adoptif. Il a écrit lui-même ses Confessions, f 465 ou 483. Vie, par Josselin, Usher, etc. — On appelle Purgatoire de Saint-Patrick une caverne d'Irlande, près d'un couvent de PUltonie, où sont représentés les tourments de l'enfer.

 

PATRIPASSIENS, v. Noët.

 

PATRISTIQUE, ou Patrohgie, ensemble des études relatives aux pères de l'Église, à leur vie, leurs ouvrages, leurs doctrines, leur rôle, etc. C'est avec l'archéologie, l'hist. des dogmes, la littérature, une des branches de l'étude générale de l'hist. ecclésiastique. Mais dans son ensemble ce n'est pas une science proprement dite et bien déterminée. Ses limites peuvent être fixées arbitrairement, quant à son objet et quant à l'espace de temps qu'elle embrasse. On varie beaucoup sur ce qu'il faut entendre par pères de l'Égl.; les uns s'arrêtent au6ra« siècle, les autres vont jusqu'au 12me et à Bernard de Clairvaux; et même parmi ceux qui s'en tiennent aux 6 premiers siècles, il y en a qui distinguent entre les pères (canonisés), les docteurs et les écrivains. Les catholiques eux-mêmes ne sont pas d'accord entre eux, quoiqu'ils tiennent généralement pour pères les écrivains canonisés des 12 premiers siècles. Si l'on regarde à l'influence exercée, au lieu de ne regarder qu'à la date reculée où ils ont vécu, des hommes comme d'Ailly et Gerson, Luther et Calvin. Bossuet et Fénelon, Pascal et Spener, pourraient tout aussi bien être considérés comme des pères de l'Église et compris dans l'étude de l'enseignement des grands docteurs. II en est un peu des pères comme des classiques; on comprend ce que cela signifie, mais on n'en donnera que difficilement une définition acceptée de tous. Le plus ancien ouvrage connu pour l'étude de la patristique, est celui de Jérôme: De viris Mut-tribu*, s. de scriptoribu* eccle*ia*ticis; puis la Patrologie de Photius. La Réforme imprima une impulsion nouvelle à l'étude des pères, chez les catholiques; les jésuites et les maurins se distinguèrent surtout par leurs recherches; il en fui de même des réformés en France et en Angleterre. Parmi les ouvrages à consulter, il faut citer Bellarmin: De *cript. eccle*ia*tici*; Ellies Dupin, Biblioth. des auteurs ecclés. 1686; Daillé, Remy Ceillier; William Cave, Casimir Oudin, Walch, Schônemann, et de nombreuses monographies, Niemeyer, Neander, etc.; v. aussi Môhler, Alzog, etc.

 

PATRONAGE, Patron. Il arrivait souvent que, sous l'influence de circonstances diverses, heureuses ou malheureuses, par suite d'un vœu ou autrement, un seigneur eût l'idée de fonder une église, une chapelle ou une abbaye. Dans ce cas presque toujours il se réservait certains droits, des honneurs, un revenu en nature ou en argent, des prières spéciales, et surtout le droit de nommer, ou tout au moins de présenter un ecclésiastique pour la désserte de cette église. Ce droit était naturel, et quand le fondateur était lui-même un ecclésiastique on ne pouvait lui contester ni les revenus, ni le droit de prêcher et d'exercer la cure d'âme. Mais les abus ne tardèrent pas à se multiplier, et l'institution, chrétienne dans son principe, dégénéra. Les héritiers du premier patron, devenus patrons à leur tour, s'occupèrent d'exploiter leur droit en affermant le bénéfice au plus offrant; ils en firent la dotation d'un de leurs enfants, ou la récompense d'un service rendu, et le titulaire n'était pas touj. à la hauteur de sa tâche. D'un autre côté une paroisse s'était peu à peu groupée et constituée autour de l'église et avait pris l'habitude d'eu considérer le desservant comme son pasteur. Si le patron avait des droits, les fidèles n'étaient pas moins intéressés que lui au choix du titulaire, mais les intérêts n'étaient pas toujours les mêmes, et dans les cas graves des conflits étaient inévitables. A mesure que l'esprit religieux se développa la crise s'accentua; les synodes s'en mêlèrent et prononcèrent presque toujours contre le patron en faveur des vœux du troupeau. La Réforme, telle qu'elle se produisit en Angleterre et dans l'Allemagne luthérienne, maintint le patronage avec quelques réserves; dans les égl. presbytériennes il eut plus de peine à se maintenir parce qu'il était contraire à leur principe même. Le parlement écossais l'abolit en 1649, Charles II le restaura en 1661, mais en 1690 il futde nouveau supprimé, moyennant une indemnité raisonnable. La reine Anne ayant rendu aux patrons leur droit illimité 1712, une sécession eut lieu en 1733, composée de plus de 500 communautés, et la question toujours ouverte., toujours résolue par les magistrats dans le sens du droit strict et matériel des patrons, a produit la nouvelle sécession de 1840, v. Chalmers. Le patronage tend de plus en plus à disparaître et ne subsiste plus guère que sous la forme générale du patronage des gouvernements, qui président encore à l'élection des ecclésiastiques officiels.

 

PAUL lo pape, 29 mai 757, + juin 767, fr. d'Étienne II, a laissé 22 lettres; il commença à vider les catacombes.

2<> Paul II, Paul Barbo, cardinal de Saint-Marc, élu 30 août 1464, + 26 juillet 1471. Ingrat, avare et cruel. Poussé par l'avarice et par le besoin d'argent il établit les jubilés tous les 25 ans, tandis qu'à l'origine, sous Boniface VIII, ils ne devaient avoir lieu que tous les 100 ans. Clément VI les avait déjà réduits à tous les 50 ans et Urbain VI à tous les 33 ans. Il excommunia le roi de Bohême, Georges Podiebrad, et donna ses États à Matthias Corvin; il prêcha en vain une croisade contre les Turcs et s'occupa de faire restaurer les anciens monuments de Rome.

3° Paul III, Alexandre Farnèse, qui avait pris d'abord le nom d'Honoré V, 1534-1549. Profond et dissimulé, il avait été cardinal sons six papes. Il parle beaucoup de réformes et de conciles, mais nomme cardinaux deux de ses petits-fils, âgés de 16 et de 14 ans (il avait été marié). Il a des conférences avec Luther et tâche de lui faire comprendre qu'J£nèas Sylvios est resté simple chanoine aussi longtemps qu'il a voulu suivre ses propres idées, mais qu'après s'être rétracté il est devenu évêque, cardinal et pape. Sourd à ces suggestions, Luther repousse toute ouverture avec Rome. Paul montre beaucoup de raideur dansses relations avec Henri VIII et finit par l'excommunier après son schisme. Il convoque un concile à Mantoue pour le 7 mai 1537; les princes allemands et même le duc de Mantoue refusent de s'y rendre. Le pape choisit Vicence; même refus. Il ne sait que faire. Inutile conférence à Worms. Il forme avec Charles-Quint et Venise une ligue contre les Turcs 1538. et se porte comme médiateur entre Charles et François I^r, qui concluent la trêve de Nice 1538. Il fonde l'ordre des jésuites par sa bulle Régi-mini. Enfin il se décide à convoquer le concile à Trente, mais il y préside absent, et comme on l'a dit, il y envoie le Saint-Esprit dans la valise de ses légats, après avoir vainement essayé de le rompre ou de le transférer à Bologne. Il fait enfermer dans les prisons de Rome beaucoup de protestants, que son successeur se chargera de faire mourir. Il érige pour son fils,

P.-L. Farnèse, Parme et Plaisance en duché j 1545. On a de lui des Lettres, à Érasme, qu'il aurait voulu faire cardinal, à Sadolet, etc. Mi-chel-Ange continue ses travaux à Saint-Pierre.

4° Paul IV, Jean-Pierre Caraffa, ex-évêque de Thèate, fondateur de l'ordre des théatins, j auxquels il donne une règle; pape 1555-1559. Le plus fier et le plus emporté de tous les hommes, il marche sur les traces sanglantes de ses prédécesseurs. L'inquisition répand partout l'épouvante. Avant son élection il avait rempli plusieurs missions délicates. Il jure que, s'il est nommé, il convoquera le concile avant 2 ans, et que dans l'intervalle il ne nommera pas plus de 4 cardinaux. Mais une fois élu, il veut se faire un grand nombre de créatures. Le sacré collège s'y oppose en lui rappelant son serment. Il convoque alors le consistoire, mais déclare qu'il n'écoutera personne, qu'il veut parler tout seul. Il donne de violents coups de poings dans la poitrine au cardinal Saint-Jacques qui s'était levé pour lui répondre, et répète, après cette préface, qu'il ne peut être lié ni par engagement, ni même par serment; que croire le contraire est une hérésie, et qu'il enverra à l'inquisition les opiniâtres. Il traite de bâtarde la r. Élisabeth. Il ne rêve que pouvoir temporel et spirituel, établit le premier un Index des livres prohibés, s'emporte contre la diète d'Augsbourg <qui a rendu un édit de liberté, rompt avec l'empereur, se venge sur ses neveux du mauvais succès de ses armes, et meurt en recommandant l'inquisition à ses cardinaux. Ses fureurs et ses sévérités avaient irrité le peuple romain qui, après sa mort, le décapite en effigie, traîne sa statue dans les rues, la jette dans le Tibre, et déchire les armes des Caraffa. Après lui le siège resta vacant 3 mois.

5° Paul V, Camille Borghèse, 1605-1621, violent, jaloux, emporté, déclare la guerre aux Vénitiens qui veulent empêcher la trop grande opulence du clergé et qui refusent de relâcher deux religieux saisis et emprisonnés pour crimes capitaux. Henri IV amena un accommodement 1605-1607; les Vénitiens ne cédèrent qu'après avoir vu leurs droits reconnus. Sarpi a écrit cette histoire, et Rome a payé des assassins pour se venger du stigmate de l'historien; Paul V admettait d'ailleurs la morale de Juarez qui justifie le meurtre des rois. Paul termina, sans la décider, la querelle des dominicains et des jésuites, et donna la dernière main à la bulle In Cœnâ Domini (dite Bulle de Paul V) excommuniant hussites, wicleffites, luthériens, zwingliens, calvinistes, etc., ainsi que les schis-matiques, les pirates, etc. Il se distingua par un népotisme elfréné.

Outre l'apôtre Paul, on connaît encore sous le même nom:

6° Paul, de Samosate, Syrie, unitaire du 3®« siècle; il était vers 260 év. d'Antioche, où il occupait aussi une charge de percepteur des impôts. Il fréquentait la cour de Zénobie, reine de Palmyre, auprès de laquelle il était fort en faveur. Ses ennemis lui reprochent son orgueil et des mœurs plus que légères. Il regardait Jésus comme un homme engendré du Saint-Esprit, et en qui le Logos était uni d'une manière particulière. Par des équivoques il sut échapper dans divers synodes tenus contre lui, mais à Antioche même, en 269, un évêque le força de se démasquer, et il se prononça si clairement contre la Trinité, qu'il fut excommunié et destitué. Le pape Félix et l'emp. Aurélien étaient contre lui, mais Zénobie le maintint à son poste, et c'est seulement quand elle eut été vaincue par les Romains que son successeur put entrer en fonctions. Ses sectateurs, ou samosatiens, durèrent jusqu'au 4m« siècle sous divers noms, surtout sous celui de paulianistes.

7° Paul de Thèbes, ou le saint, né d'après Jérôme dans la 1™ moitié du 3m« siècle, perdit de bonne heure ses parents, qui étaient chrétiens et dans l'aisance, et pendant la persécution de Décius, prévenu que son beau-frère voulait le trahir pour s'emparer de l'héritage, il s'enfuit dans le désert de la Thébaïde. Il y trouva une grotte, dans laquelle il vécut encore 97 ans en pcésence de Dieu et sans jamais voir personne. Seulement quelques heures avant sa mort 340, il reçut la visite de l'anachorète Antoine à qui Dieu révéla sa retraite. Des lions creusèrent sa tombe. Toute cette histoire est due vraisemblablement à l'imagination de Jérôme.

8° Paul Warnefried, surnommé aussi le Diacre, ou le Lévite, né vers 730 à Cividale, Frioul, d'une bonne famille lombarde, fut élevé à la cour de Pavie et fut chargé de diriger les études d'Adelperge, fille du roi Didier et femme du duc de Bénévent, pour laquelle il écrivit une Hist, romaine fort estimée de son temps. Il fut ensuite ordonné diacre et entra au mont Cassin. En 782 Charlemagne le fit venir comme prof, de grec et Warnefried se rendit utile non seulement dans le domaine de l'enseignement, mais encore dans la direction des affaires ecclésiastiques. Il publia entre autres 783 un Omiliarus, un recueil d'homélies choisies parmi les meilleures des différents auteurs, qui se répandit bientôt dans toute l'Église franque. Il a écrit encore d'autres ouvrages, surtout des compilations, mais faites avec un grand soin et beaucoup de goût; une Hist. des Lombards, les Chroniques du mont Cassin, une Vie de Gré-goire-le-Grand, etc. On lui attribue entre autres l'hymne qui a donné son nom aux notes musicales, et qui commence par

Ut qae&nt Iaxis resonare fibris.

9. v.Lyra, Macédonius, Paulus, Vincent, etc.

 

PAULA lo Romaine, née vers 347, de la famille des Scipion et des Gracques. Femme de Toxotius, elle lui donna un fils, qui mourut jeune, Pauline, qui épousa Pammaque, et 4 filles, entre autres Blésille et Julie Eustochie. Devenue veuve, elle se joignit avec ses filles à la société de dames qui se groupaient à Rome autour de Jérôme. Quand il partit pour la Palestine, elle l'accompagna avec Julie et fonda près de Bethléhem un couvent d'hommes et 3 couvents de femmes dont elle surveilla elle-même les travaux, f 404. — Sa pelite-fille, fille de son fils Toxotius, et portant aussi le nom de Paula, fut élevée dans le même esprit et suivit les mêmes traditions. L'histoire de ces femmes, connue surtout par les lettres que Jérôme leur écrivait, est une riche et curieuse révélation des mœurs romaines au moment où le monde antique disparaissait peu à peu sous l'influence du christianisme.

 

PAULE (François de), v. François *>.

 

PAULI, Jean, moine franciscain, dont le vrai nom était Pfedersheimer, né vers 1455, vécut de 1506-1510 à Strasbourg où il était custode du couvent des franciscains et suivit assidûment les prédications de Geiler. En 1515 il est à Schlestadt comme lecteur, et rédige les Brœ-samlein de Geiler. En 1517 à Strasbourg il travaille à une nouvelle édition du livre de Geiler sur les Évangiles. Enfin en 1519 à Thann il achève son propre ouvrage Schimpf und Errât, qui ne paraîtra qu'en 1535, probablement après sa mort, et dont on connaît jusqu'à 55 éditions. Sous une forme bizarre, pittoresque, tantôt triviale et burlesque, tantôt sérieuse et indignée, il fait la critique des mœurs de son temps, du clergé surtout. On le compte comme un protestant avant la Réforme; mais s'il est moraliste, l'idée religieuse est peu accentuée; les grandes doctrines sont passées sous silence, et il y a presque de l'ironie dans les miracles qu'il raconte pour recommander l'eau bénite et la confession. v. Dithmar, Choix de récits, Marbourg 1856. Schiffer, Colmar 1863.

 

PAULICIENS. Les persécutions contre les adorateurs des images n'avaient pu réussir à déraciner ce vieil arbre. On s'était adressé à la branche, au lieu de s'en prendre au tronc et aux racines. On avait attaqué la superstition dans ses fruits, au lieu de l'attaquer dans sa source, l'aveuglement du cœur. Il y eut cependant un petit troupeau, plein de ferveur religieuse, quoique avec de graves erreurs, qui attaqua avec succès la hiérarchie grecque et laissa dans l'histoire des traces profondes. Les pauliciens étaient comme un débris transformé des anciens gnostiques et des manichéens. L'origine de leur nom est encore un problème; on croit cependant qu'il vient de leur attachement à la doctrine de l'apôtre Paul. Vers 660 parut un nommé Constantin, probablement marcionite, à Mana-nalis, près Samosate; il reçut un jour un diacre échappé à la captivité des Sarrasins, qui, en reconnaissance de son hospitalité, lui donna un N. T., ou au moins les Epltres de Paul. lise mit à étudier avidement ces écrits, qu'il ne connaissait pas, et ses idées religieuses, sans être entièrement changées, furent purifiées; sa conscience fut réveillée. Il voulut réformer l'Église selon l'esprit de saint Paul, et y travailla avec zèle pendant 27 ans. Il prit le nom de Silas, ou Sylvain; ses compagnons empruntèrent de même des noms nouveaux à l'histoire de l'apôtre et s'appelèrent Tite, Timothée, Ti-chyque. Ses adhérents se multipliant, la hiérarchie et les empereurs résolurent de les combattre. Constantin Pogonat envoya Siméon, officier grec, pour détruire la secte. Arrivé à Colonia, Siméon fit arrêter Sylvain et ses amis et prescrivit à ceux-ci de lapider leur maître s'ils voulaient avoir la vie sauve; un seul obéit, Justus, fils adoptif de Sylvain; les autres périrent. Mais Siméon avait eu avec quelques-nns d'entre eux des conversations sérieuses, qui germèrent après son retour à Constantinople, et au bout de 3 ans il quitta la cour et s'enfnit en Arménie, où il devint chef de la secte sons le nom de Tite; il mourut sur l'échafaud 690 dans une persécution de Justinien II. Vers le même temps deux frères, Paul et Jean, fils d'an manichéen, répandaient les mêmes doctrines; Paul, né 844, qui selon quelques-uns aurait donné son nom à la secte, échappa au bûcher, ainsi que ses deux fils, Gegnase et Théodore. Gegnase, mandé à Constantinople devant le patriarche, se tira d'affaire par des réponses am-bignës et f paisiblement en Arabie. Sergios, vers 777, fut un nouveau soutien de la secte. Tout jeune encore il avait reçu d'une panli-cienne une Bible, il l'étudia soigneusement, se convertit, prit le nom de Tychique, et se mit i enseigner. Il commençait par l'Évangile, et quand il avait gagné les cœurs, il passait à l'étude de la doctrine paulicienne. Il était charpentier et voyagea beaucoup en gagnant sa vie. Sa douceur était extrême, sa piété intime et profonde. « J'annonçais, dit-il, l'Évangile sur mes genoux, c'est-à-dire avec beaucoup de prières. • Il se fit de nombreux partisans par le caractère pratique de sa prédication et par la pureté de sa vie; il combattit Baanes, homme immoral qui s'était glissé parmi les paulkîen* et qui faillit les compromettre. Sergius peut être considéré comme le second fondateur de la secte. Mais ces succès même provoquèrent de nouvelles persécutions sous Léon; ils durent s'enfuir chez les Sarrasins, qui leur firent bon accueil et leur assignèrent pour demeure la petite ville d'Argaum, où Sergius f 811 (ou 835?). L'imp. Théodora, zélée iconolâtre, résolut de ne leur laisser « ni racines, ni rameaux; » elle en fit périr, dit-on, plus de cent mille; en 842 il en émigra 5000 qui, sous la conduite de Car-beas, se rendirent chez les Sarrasins, auprès de leurs frères qui s'y trouvaient déjà, et s'y bâtirent une citadelle, Tephrica, d'où ils livrèrent de nombreuses batailles aux Byzantins. Plus tard on en trouve encore des restes dans la Thrace, en Italie, et à la fin du 17™* siècle dans les vallées des Balkans. — Il n'est pas facile de dire ce qu'était la doctrine des pauliciens; elle a varié suivant les individus, les uns étant plus évangéliques que les autres. En général ils admettaient qu'Adam ayant péché contre les ordres du démiurge, cette désobéissance avait rompu les liens qui les unissaient à lui et élevé l'homme à la connaissance de sa nature supérieure et divine; c'était un pas vers le bien; le dieu mauvais, qui retenait l'homme dans le mal avait été vaincu. Le Christ venait du Dieu bon; il avait uu corps céleste, qui n'avait pu souffrir. Ils n'admettaient ni l'idée d'un Dieu juste qui punit, ni celle d'une expiation. La croix n'était pour eux qu'un gibet de malfaiteur et ils la méprisaient. Ils s'appelaient les concitoyens de Christ. Croyant au sacerdoce universel, ils rejetaient les noms de prêtres et de sacrificateurs, comme trop judaïques. Ils donnaient ii leurs chefs. Constantin, Sergius, les titres de prophètes ou d'apôtres, et à leurs autres docteurs les simples noms de bergers, de maîtres ou d'évangélistes. Sauf un très petit parti, leur morale était pure; ils voulaient délivrer de l'empire des sens le principe moral et divin qui se trouve en l'homme. Quelques-uns cependant, comme Gegnase, pensaient qu'on peut mentir à ceux du dehors, parce que les psychiques ne peuvent comprendre les pneumatiques. Ils étaient fermement attachés à la parole et rejetaient toutes les formes, même la Cène, excepté la génuflexion devant le livre de l'Évangile, v. les Pauliciens, par Alex. Lombard.

 

PAULIN 1° Pontius-Meropius-Anicius Pau-linus, né à Bordeaux 353, d'une famille sénatoriale; riche, condisciple de l'empereur, consul, gouverneur delà Campanie, élève et ami du poète Ausone, époux de la riche et sainte Thérésia, il pouvait aspirer à tout. Son mariage décida sa conversion, mais il ne reçut le baptême que plus tard, à son retour en France, des mains de l'év. Delphinus de Bordeaux. Ayant perdu un jeune enfant, Paulin et sa femme se jetèrent dans l'ascétisme, qui était une des formes de la dévotion à cette époque; ils vendirent leurs biens, en distribuèrent le produit aux pauvres, et décidèrent de vivre ensemble comme frère et sœur dans la retraite et la prière. Ils se rendirent en Espagne 389, où en 394 il fut consacré prêtre à Barcelone, sous la pression d'un mouvement populaire. Il se rendit de là à Rome, où le pape Siricius le reçut assez froidement, puis à Nola en Campanie, où il rendit un culte particulier et un peu superstitieux à saint Félix de Nola, un des 60 saints de ce nom, dont 3 de Nola. En 409 il fut nommé èvêque par le peuple, ce qui le fait parfois appeler Paulin de Nola. Son amitié pour Augustin et Pélage l'empêcha de se mêler à leurs controverses, f 22 juin 431. Il reste de lui un sermon, 50 lettres, et environ 30 poésies très remarquables. Pleuré de tout son diocèse, qu'il avait administré pendant 23 ans, et dont il avait été le bienfaiteur, il brilla comme poète plus que comme théologien; il poussa très loin le culte des reliques. On lui attribue, mais à tort, l'invention des cloches.

2° Paulin de Milan, diacre d'Ambroise, dont il a écrit la vie. C'est lui qui, par ses plaintes contre Célestin au conc. de Carthage, donna le signal des controverses pélagiennes.

3° P. d'Antioche qui, après la destitution d'Eustathe réclamée par les semi-ariens 330, prit la direction de l'Église restée fidèle au symbole de Nicée. Meletius, condamné précédemment comme nicéen, fut élu év. d'Antioche 361, mais P. qui se croyait des droits à ce titre protesta et fut sacré èvêque par le violent Lucifer de Cagliari. Des questions personnelles et des disputes de mots étaient à la base de ce conflit. Nicée avait défini la Trinité: une seule hypostase, trois personnes; Mélèce disait: une seule essence, trois hypostases. Ils donnaient donc au mot hypostase deux sens différents, et faute de s'entendre sur la définition, ils créaient un schisme et troublaient l'Église. Les occidentaux en intervenant, embrouillèrent encore les affaires au lieu de les simplifier. Paulin fut reconnu par Damase comme év. légitime, et Mélèce repoussé comme intrus, malgré les concessions les plus conciliantes. Paulin + 388, et fut remplacé par Evagrius. V. Mélèce 2°.

4o P. de Trêves, 349, successeur de Maxime comme év. de Trêves, fut un des représentants les plus convaincus des doctrines athanasiennes en occident. Il s'opposa à l'einp. Constance et contrecarra ses efforts en faveur du semi-aria-nisme, et fut pour cela exilé en Phrygie, où il f vers 358. L'égl. de Trêves a pieusement conservé son souvenir, et prétend même posséder son corps, qui aurait été exhumé à la fin du 4me siècle et ramené en Europe.

5° Un des compagnons du missionnaire Augustin en Angleterre. Après avoir évangélisé le Kent, il passa comme èvêque dans le Northumberland, avec Ethelburga, déjà chrétienne, et avec son mari Edwin, qui ne devait pas tarder à se convertir et qui se fit baptiser à Pâques 627, ainsi que ses 2 fils et sa nièce Hilda, dans une chapelle provisoire bâtie là où s'élève auj. la cathédrale d'York. Paulin dont les succès étaient immenses auprès des païens, reçut d'Ho-norius I** le pallium, comme archev. d'York, et f 644, év. de Rochester.

6<> P. d'Aquilée, patriarche 776, résidant au Forum Julii, grand ami d'Alcuin et employé par Charlemagne dans plusieurs circonstances difficiles. Né au Frioul, il fut quelque temps prof, de philos., et Charlemagne l'appelle magister artis grammaticœ. Il prit part aux conc. de Ratisbonne et de Francfort contre les adoptiens 792 et 794, présida plusieurs conciles provinciaux, et s'occupa avec zèle de l'évangélisation de la Carinthie, peut-être aussi des Avares, f vers 804. Ses œuvres, en partie contestées, ont été publ. par Madrisius, Venise 1737.

 

PAULUS, Henri-Eberhard-Gottlob, né 1 sept. 1761 à Léonberg, Wurtemberg. Son père était pasteur, mais ayant perdu sa femme il tomba dans un mysticisme visionnaire et dans des rêveries mélancoliques qui l'obligèrent de renoncer à ses fonctions, 1771. Il fit ses études à Tubingue 1779-1784, fut vicaire à Schorndorf, d'où il fut ramené malade 1787, refusa un appel à Gottingue, visita, grâce à la libéralité du baron de Palm, l'Allemagne, la Hollande, l'Angleterre et la France, et à son retour fut nommé répétiteur à Tubingue 1789, puis prof, à Iéna 1793. Il s'était déjà fait une réputation comme rationaliste, mais il l'était à sa façon. Il ne rejetait pas les miracles et ne les traitait pas de mythes, mais il y voyait des faits réels, naturels, dont il s'agissait seulement de trouver l'explication; sous ce rapport il a fait preuve d'un esprit d'invention merveilleux, et ses commentaires sont curieux à étudier à cet égard, quoique sa méthode ait sombré depuis longtemps sous le poids de ses bizarreries. C'était d'ailleurs un cœur droit et qui cherchait sincèrement la vérité, mais il avait l'esprit étroit et ne voyait qu'un côté des choses; il ne voyait en particulier dans la religion et dans le christianisme que le côté moral. Dénoncé pour sa doctrine par le consistoire d'Eisenach, il fut absous sur le préavisfa-vorable de Herder, concluant qu'il n'y avait pas lieu à suivre. C'est pendant son professorat que Fichte fut accusé d'athéisme, et Paulus ne put empêcher sa destitution. Nommé en 1803 prof, de théol. et conseiller consistorial à Wurz-bourg, il n'eut d'abord presque pour auditeurs que des étudiants catholiques, et bientôt même il leur fut interdit de suivre ses cours, ce qui le décida à quitter. Après avoir occupé divers postes, à Bamberg, Nuremberg, Anspach, il fut enfin appelé 1811 comme prof, d'exégèse et d'hist. ecclésiastique à Heidelberg, où il célébra en 1839 son jubilé professoral, prit sa retraite en 1844 et f 1851. Dans ses dernières années il était devenu un rationaliste absolu, appliquant son système à tout, philos., politique et religion, au mysticisme, au piétisme, à la hiérarchie, à l'ultramontanisme. Il prit le parti de Strauss, quoique celui-ci l'eût traité assez dédaigneusement; des catholiques allemands; de l'État contre l'archev. de Cologne; il combattit Schelling et ne voulut voir dans son système qu'une variété de mômerie mystique. Il a écrit lui-même pour sa justification une sorte d'autobiographie, où il raconte l'histoire de ses idées et de son développement. Parmi ses nombreux ouvrages il faut noter surtout son Comment, sur les synoptiques, et sa Vie de Jésus.

 

PAUVRES de Lyon, v. Vaudois. — Les vaudois d'Italie furent aussi par analogie, qualifiés de Poveri italici.

 

PAVIE, ancienne capitale de la haute Italie depuis Théodoric, fut vaincue dans les guerres des Guelfes et des Gibelins, et tomba sous la domination de Milan. Université fondée par Charlemagne et reconstituée en 1361. Célèbre par la défaite de François 1er, 1525. Il s'y est tenu 14 synodes ou conciles; le dernier 1423 fut aussi le plus important. Martin V aurait voulu qu'il fût écuménique, mais il y vint très peu d'évêques, et la peste obligea sa translation à Sienne; il fut dissous en 1424. Son programme portait, comme celui de Constance, la réforme de l'Église. La légende fait remonter l'évêché de Pavie à Cyrus, disciple de Pierre; en tout cas c'est un des plus anciens du nord de l'Italie.

 

PAVILLON, Nicolas, év. d'Alet, Aude, né 1597 à Paris, ami d'enfance de Vincent de Paul, prit part à ses travaux et se fit une réputation comme prédicateur. Nommé évêque par Richelieu en 1637, il n'accepta qu'aprte avoir longtemps hésité, en 1639; fonda des écoles, des séminaires et une école normale d'institutrices. Lié avec Port-Royal, il fut un des rares évêques qui refusèrent de signer les yeux fermés la condamnation des 5 prétendue* propositions de Jansénius. Dans l'affaire de h régale il prit parti pour le pape contre le roi. et s'attira la défaveur de Louis XIV, qui cependant n'osa pas le destituer, f 8 déc. 1677.

 

PAZMANN, Pierre, v. Hongrie.

 

PAYNE, Pierre, surnommé Y Anglais; disciple de Wicleff, soutint contre Pierre Waldensis une thèse sur les principales erreurs de Rome. Obligé de quitter l'Angleterre, il vint en Bohême où ses doctrines furent acceptées avec enthousiasme par Huss, Procope, Ziska, etc. fl avait apporté de magnifiques mss. ornés de garnitures d'or, qui furent brûlés. Il fut choisi comme arbitre dans plusieurs conférences et se prononça en faveur des docteurs de Prague. Au conc. de Bâle 4432 il parla contre les temporalités de l'Église, f date incertaine.

 

PAYS-BAS. v. Hollande.

 

PEARSON. John, né 28 févr. 1612, à Sno-ring, fils d'un pasteur de Norfolk, fit ses études à Eton et à Cambridge. Consacré en 1639, puis pasteur de ïhorington, il fut appelé comme chapelain par lord Goring et s'attacha à sa fortune pendant la guerre civile. Comme royaliste il perdit ses bénéfices universitaires et vécut assez longtemps dans le besoin. Le retour de la monarchie lui rendit ses avantages, et il fut successivement nommé pasteur à Londres, chapelain, prof, â Cambridge, recteur de Trinity-College, et év. de Chester. f 16 juill. 1686. Son érudition en fit pendant un temps un des théol. Jes plus considérables de l'Angleterre, mais sa réputation a baissé. Son principal ouvrage est une Exposition du Credo, 1659, cours de dogmatique développé suivant les articles du symbole, et traité d'apologétique dirigé contre les athées, les juifs et les hérétiques. Aidé de son frère et de quelques amis, il a publié aussi en 9 vol. fo un recueil colossal de matériaux exé-gétiques, sous le titre de Critici sacri, et un travail dans lequel il défend contre Daillé, et dans l'intérêt de l'épiscopat, l'authenticité des lettres d'Ignace. On a aussi de lui les Annales cyprianici. Enfin après sa mort on publia ses 24 Leçons (en latin) sur Dieu et ses attributs, dont la forme scolastique fit un moment le succès.

 

PÉCHÉ, nom sous lequel l'Égl. chrétienne, d'après la Bible, désigne le mal moral. Toutefois entre le l'A. et le N. T. il y a des différences notables, non pas un changement dans la notion môme du péché, mais progrès de l'une à l'autre économie, la première loi s'en tenant plutôt au fait, la seconde à l'intention, aux dispositions du cœur. Les deux alliances reconnaissent l'universalité du péché; le mal est partout, il s'hérite, et il fait retomber sur les enfants l'iniquité des pères. Mais dans l'Ancien il consiste dans tel ou tel acte déterminé; il est plutôt collectif et national qu'individuel, et il ne se rattache pas directement au péché du premier homme. Il semble même pouvoir s'expier en partie par la repentance ou par des réparations fixées par la loi. Dans le Nouveau c'est l'interruption des rapports de l'homme avec la source du bien; la rupture avec Dieu, la rébellion, la révolte, une disposition au mal; c'est un état; l'homme est né, plongé dans le mal, et le père lègue k ses enfants ce qu'il a lui-même reçu de ses aïeux, ses penchants mauvais. Les mystères abondent quand on étudie de près ce dogme qui est un fait, cette doctrine qui est un malheur, et si l'enfant déjà se pose tous les problèmes, le philosophe, pas plus que le théologien, ne peut en résoudre aucun. D'oU vient le mal? Pourquoi Dieu l'a-t-il permis? S'il l'a permis, c'est donc qu'il a sa raison d'être? Y a-t-il un esprit, une incarnation du mal? Si l'homme, par sa nature même, est décidément et irrévocablement pécheur, est-il juste de faire peser sur lui la responsabilité d'un fait dont il est la victime et non l'auteur? Dans quelle mesure le péché d'Adam peut-il être attribué à toute sa race? Dans quelle mesure l'homme peut-il réagir par ses propres efforts contre ses mauvais instincts? N'y a-t-il aucune vertu vraie, aucun noble caractère en dehors du christianisme ?

Toutes ces questions, et d'autres encore, se posent à l'occasion du péché. Cette doctrine, on peut le dire, est le point central de la dogmatique. On peut ajouter que c'est autour d'elle que gravite l'histoire ecclésiastique tout entière, à partir des luttes augustiniennes et pélagien-nes, et si la théologie d'Augustin a touj. eu pour elle les textes bibliques dans leur navrante grandeur, la conscience humaine n'a cessé de protester au nom même du Dieu d'amour contre les conséquences exagérées qu'en tire une logique impitoyable. La formule a beau nous dire que nous sommes les esclaves du péché, nous revendiquons les droits et la responsabilité de notre liberté. D'autre part nous avons beau nous sentir libres, nous n'en répétons pas moins avec l'apôtre: Misérable que je suis ! je fais le mal que je ne voudrais pas, et je ne fais pas le bien que je voudrais. Cette mystérieuse antinomie n'est pas un embarras pour le christianisme seulement; elle existe pour tous ceux qui réfléchissent, et pour tous elle est insoluble. Le christianisme a même l'avantage sur tous les autres systèmes, de rendre la difficulté moins grande en ce sens qu'il met en relief la liberté du pécheur et qu'il fait appel à sa conscience. L'homme n'acceptera jamais la doctrine matérialiste qui fait de lui une machine.

Les mots de péché originel impliquent la transmission delà transgression d'Adam, et par conséquent de sa condamnation et de sa mort, à toute sa postérité. Nous étions tous en Adam, et Adam était nous tous, non seulement notre premier père, mais notre totalité; il était nous-mêmes, et comme il a péché nous avons pèche en lui. C'est la doctrine du conc. de Trente, et les Réformateurs l'ont accentuée davantage encore, mais l'ont rectifiée en quelque manière, ou l'ont complétée en relevant le fait de la justification individuelle par la foi.

L'Église cathol., pour adoucir ce qu'il y a d'énorme dans sa conception du péché et de son châtiment, distingue le péché mortel qui, sur un point important, transgresse volontairement un commandement connu, et mérite l'enfer; et le péché véniel (pardonnable), qui affaiblit la vie spirituelle, mais sans faire perdre la grâce sanctifiante; il peut s'expier par des actes de contrition et le reste s'achève dans le purgatoire. Cette distinction est naturelle, et chacun fera une distinction entre un crime et une simple faute, entre un péché commis par méchanceté et un acte de négligence ou de vivacité; entre celui qui aura connu la volonté du maître et celui qui l'aura ignorée. Mais si naturelle qu'elle soit, elle a son côté artificiel, sans même parler des abus auxquels elle a donné lieu. Le salaire du péché (quel qu'il soit), c'est la mort; et: Le sang de Christ purifie de tout péché (aussi quel qu'il soit) Rom. 6, 23. 1 Jean 1,7.

Quant au péché irrémissible, il résulte des lextes mêmes dans lesquels il en est parlé, Matth. 12, 31. 1 Jean 5, 16. cf. Hébr. 6, 4-6. 10, 26. qu'il consiste dans la résistance opiniâtre, avouée, volontaire aux appels de Dieu et dans l'impénitence finale que ni la grandeur de Dieu, ni l'amour du Fils, ni les lumières du Saint-Esprit n'ont pu vaincre et toucher.

 

PECTORAL, la croix d'or que portent sur la poitrine les archevêques, les évêques et les abbés mitrés. Ils laissent alors pendre l'étoffe des deux côtés au lieu do la croiser.

 

PÉDAGOGIQUE, étude des principes qui doivent présider à l'éducation; le mot vient du •rrec et signifie Conduite, ou direction de l'enfant. Cette science confine d'une part à la philosophie, de l'autre à la religion par sa morale; elle est à la fois psychologique et théologique; lorsqu'un de ces éléments vient à manquer, elle reste incomplète. L'éducation n'est pas seulement la communication de certaines connaissances, elle doit être aussi le développement de toutes les facultés; elle doit former la volonté et donner à la vie une impulsion. Chez les peuples sans culture il n'est question ni d'instruction ni d'éducation; l'enfant apprendra seulement à se procurer la nourriture et à se défendre. A mesure que le niveau intellectuel s'élève, le cercle de l'éducation s'étend, mais dans le sens et dans l'esprit du peuple; on dressera l'enfant chinois à respecter son père et les autorités. Aux Indes le régime des castes et la prépondérance des brahmines donnera à l'éducation un caractère plus religieux et poussera à l'étude des dieux, des légendes et des fables. Dans l'ancienne Perse ou l'État était tout, la jeunesse devait être élevée pour son service; on était prêtre ou soldat; la Cyropédie renferme à cet égard des traits intéressants. Il en était à peu près de même en Égypte, mais avec une prédominance de l'élément sacerdotal; quant au peuple, le père devait apprendre son métier à son fils et en faire un habile ouvrier; la pensée de la vie et du jugement à venir déteignait en sérieux sur l'ensemble de l'éducation. Le centre de toute vie nationale, politique et religieuse chez les Hébreux, c'était la loi, et de bonne heure les parents « instruisaient le jeune enfant > dans la connaissance de l'histoire et des traditions de leurs pères. L'individu n'étant considéré que comme un membre du corps social chez les Doriens, il était élevé pour l'État; la gymnastique et la musique furent d'abord les deux principales branches de l'enseignement; la lecture et l'écriture ne vinrent que plus tard, et les femmes y participèrent comme les hommes. Les tribus ioniennes au contraire donnèrent un grand développement aux études littéraires. artistiques et philosophiques; les parents devaient y pourvoir; ils avaient souvent pour cela des esclaves des deux sexes, pédagogue*, chargés d'instruire leurs enfants: il y avait eu outre des écoles publiques et des gymnases ou l'on enseignait tout, même l'escrime et le métier des armes. A Rome, sous l'influence des Grecs, mais surtout sous celle des Étrusques et desSa-bins, l'on se préoccupa moins de former de* soldats ou des savants, que d elever des citoyens; il y eut de nombreuses écoles élémentaires, pois des écoles supérieures pour les études libérales, à l'instar de celles d'Alexandrie, et enfin de véritables facultés pour la médecine, le droit, U rhétorique, etc. Quand le christianisme parât, il imprima naturellement à l'éducation une direction nouvelle; si les anciens s'étaient préoccupés de faire des élèves, des savants, des soldats, des sujets, des citoyens, il s'occupa, loi. de faire des hommes, de développer l'homme dans tous les éléments de sa nature, aussi bien dans sa conscience et dans ses aspirations que dans son intelligence, mais ce n'est que peu a peu que l'Église comprit sa tâche et la grandeur de sa mission. Elle eut longtemps d'autres sou* cis; elle eut d'abord à combattre pour son existence; elle eut à se défendre contre les perseca tions et contre les calomnies; elle eut ensuite à fixer ses dogmes et sa discipline, et quand après trois siècles elle eut acquis le droit de vivre, elle se trouva tellement mêlée avec le monde que sa vigueur première en était paralysée. U puissance d'initiative lui manquait à plusieurs égards, et si elle s'occupa de fonder des écoles, elle imita plus qu elle ne créa; elle continua les anciennes routines en se bornant à les approprier à la nouvelle religion; le catéchuménat et le sacerdoce étaient d'ailleurs son objectif immédiat, si ce n'est même l'unique. L'invasion des barbares fut un temps d'arrêt. Le triomphe da mahométisme en fut un autre, mais du moins les Arabes et les Maures cultivèrent les arts, les lettres et les sciences; ils eurent de brillantes écoles, qui empêchèrent l'esprit humain de s'endormir, en même temps que Charleraagne, condé par Alcuin, présidait à une sorte de renaissance à la fin du 8m® siècle. Cordoue et Séville d'un côté, York de l'autre, puis Pavie, Fulda, étaient des foyers lumineux, dont chacun avait son éclat particulier. Mais il n'était aucunement question d'un enseignement populaire, et si les couvents et le clergé continuèrent pendant des siècles d'avoir leurs écoles, elles restèrent circonscrites et restreintes, soit quant au choix et à la vocation des élèves, soit quant à la nature des objets d'étude, s'écartant peu des traditions de Raban Maur. Les Frères de la vie commune, en Hollande, furent des premiers à abandonner les voies de la scolastique et à inaugurer l'étude plus libre des auteurs anciens, mais en s'en tenant surtout à la Bible, aux pères et aux écrivains mystiques du moyen âge. On peut dire qu'ils préludèrent au réveil de l'humanisme, et quand parurent Érasme et Reuchlin, la terre était préparée pour les recevoir. Mais ce n'était encore qu'un réveil universitaire, pour les grandes villes et pour les hautes classes de la société. Il appartenait à la Réforme, et à Luther en particulier, de demander que les écoles pour le peuple prissent rang comme une institution de l'État, et c'est à partir aussi de ce moment que la pédagogie fut fondée comme une science distincte. Sous l'impulsion d'une honorable rivalité, les divers peuples et les diverses églises, les philosophes, les théologiens, les littérateurs, les éducateurs étudient it l'envi les nombreuses méthodes qui surgissent, et cherchent à répandre l'instruction dans la mesure qui leur paraît le plus convenable à leurs besoins et à leur tempérament. Plus de 400 ouvrages ont paru dès lors sur l'éducation, depuis l'époque d'Érasme (Mathurin Cordier, Montaigne) jusqu'à nos jours. Port-Hoyal, Rollin, l'abbé de Saint-Pierre, Rousseau, sont des dates, et dans notre siècle seul les noms dePestalozzi, Fellenberg, Zeller, Naville, le père Girard, M®« Guizot, Mme Necker de Saussure, le baron de Guimps, Dupanloup, représentent à bien des égards des travaux de valeur et des progrès considérables, v. Burnier, Hist. litt. de l'éducation morale et religieuse, 1864. Pendant longtemps le clergé avait accaparé l'enseignement; par une brusque réaction, et à la suite d'abus constatés, l'esprit du siècle tend à le lui enlever sans réserve; une espèce de fièvre s'est produite au sujet de l'instruction laïque, gratuite et obligatoire: on reconnaîtra bientôt qu'on est allé trop loin, et que l'éducation sans religion n#est pas une éducation.

 

PEINTURE. On connaissait de nom les grands peintres de l'antiquité classique, mais vu la fragilité des matières sur lesquelles ils travaillaient, leurs chefs-d'œuvre avaient disparu avec le temps, et l'on ne savait de Zeuxis et d'Apelles que ce que la légende en avait conservé. Les Noces d'Aldobrandini étaient peut-être tout ce qui restait de plus ancien, quand les fouilles d'Herculanum et surtout de Pompéi vinrent mettre au jour des fresques d'une admirable beauté et justifier les données de la tradition. Mais tout cet art était au service de la mythologie, et l'on comprend que par une liaison d'idées, exagérée mais naturelle, les premiers chrétiens se soient méfiés d'un art qui dans leur esprit s'associait à tous les souvenirs du paganisme. Ils avaient en outre, pour se tenir sur la réserve, la lettre du second commandement qui semble interdire la peinture aussi bien que la sculpture. Cependant peu à peu quelques timides essais se produisirent, et ce fut d'abord chez les morts, sur les tombeaux, dans les catacombes, avec cette excuse atténuante qu'il ne s'agissait pas d'images, de portraits, def représentations proprement dites, mais uniquement de symboles. Le Christ y apparaissait sous la forme d'un poisson (v. Catacombes), ou d'un berger: l'Église, sous celle de l'arche, ou d'une femme en prière; les vertus chrétiennes, l'espérance, sous celle d'une colombe, du phénix, etc. Déjà vers la fin du siècle on va plus loin; on représente des actes religieux, le baptême, la cène, et l'on se hasarde dans la voie qui bientôt séparera complètement l'art chrétien de l'art païen; on aura la peinture religieuse, où l'A. T. jouera le rôle principal, Daniel dans la fosse aux lions, etc. Puis l'art bysantin; la mosaïque, dont le plus splendide spécimen est à Saint-Marc de Venise, reléguera la peinture au second plan; elle ne servira plus que pour des enjolivures de missels, ornements de mss., vitraux de cathédrales. L'architecture est grave, grandiose, sombre; la peinture se met à l'unisson et les églises n'ont que des tableaux d* marbre; c'est raide, froid, cadavérique, mais cela produit un effet saisissant, de loin. Quand enfin la forme ogivale remplace le plein cintre, quand l'architecture se transforme, à son tour la peinture essaie de réagir et de secouer son linceul de pierres. Une ère nouvelle commence avec Cimabue, élève des Grecs et maître de Giotto; il peint des anges en marge de ses fresques à Florence, mais il ne s'aventure pas encore à faire des sainte Vierge. C'est Giotto le premier qui franchira ce pas, à Padoue, Assise et Florence: son école est vivante et dramatique, ainsi que la manière de Fra An-gelico de Fiesola; ils travaillent pour l'Église, et leur peinture suit une voie parallèle à celle de l'architecture. Mais avec leurs successeurs la peinture s'affranchit et il y a divorce; chacun suivra ses destinées. La renaissance a ouvert trop d'horizons nouveaux pour que les peintres s'astreignent à rester les serviteurs ou les associés de la théologie; l'idéalisme, avec toutes les lumières et les ombres de la réalité, sera leur maître et leur guide. Léonard de Vinci, Raphaël, Michel-Ange surtout, ne connaissent, même pour les églises et les couvents, d'autre règle que leur génie, et s'ils traitent encore les sujets religieux, c'est à leur manière et sans craindre de faire des emprunts à l'antiquité païenne. Sarto, le Gorrège, l'école vénitienne marchent à leur suite et leur font honneur. L'école hollandaise est un peu moins brillante, mais également grande et naturelle; elle a pour chefs les frères van Eyck et Hemmelink de Bruges; ils travaillent pour les églises et trouvent leurs sujets dans la Bible ou dans l'histoire de leurs saints. Au 17m« siècle Rubens reprend les couleurs chaudes de l'Italie pour continuer l'œuvre de ses devanciers, tandis que Rembrandt reproduit consciencieusement les sombres couleurs dû ciel de son pays. Mais les uns et les autres, comme ils se sentent libres dans leur domaine ! Et comme ils sont affranchis de l'Église ! Il suffit de citer le Jugement dernier de Michel-Ange, la Cène de Léonard de Vinci, les Noces de Cana de Véronèse; même la Transfiguration de Raphaël, où il y a deux tableaux en un. L'idée de la couleur locale ne les aborde même pas, et ils transportent les scènes de l'orient en occident, comme les mœurs et les costumes du 1er siècle au dix-septième. En Allemagne Albert Durer avec l'histoire de la Passion, Holbein avec sa Danse des morts et sa Famille en prière devant la madone, ont fait époque au 16®e siècle, comme au 17roc en Espagne Murillo avec sa Conception. Après ces gigantesques représentants de la peinture, l'art ne pouvait plus que décliner; surtout il ne pouvait plus être question de ressusciter une peinture ecclésiastique; de part et d'autre on ne s'entendait plus, et si de nos jours on voit apparaître encore de grands artistes et de grands tableaux représentant des sujets religieux, ils ont un caractère individuel et ne font plus école.

 

PÉLAGE io Le Saint, év. de Laodicée, sa ville natale; quoique marié il vécut avec sa femme comme si elle était sa sœur. Un des chefs du parti orthodoxe contre les ariens, il assista aux conc. d'Antioche, 363 et de Tyana 367. Banni en Arabie par Valens 370, il revint plus tard et assista 381 au conc. de Constantinople, il jouit d'une grande considération.

2° Pape 555-559, Romain de naissance, fils d'un fonctionnaire impérial, accompagna le pape Vigile a Constantinople, et se montra, comme lui, hésitant sur la question des Trois-Chapitres. Devenu pape à son tour, il fit commencer à Rome régi, des Saint-Philippe et Saint-Jacques. 11 eut à se défendre d'une accusation de simonie.

3o Pélage II, pape 578-90, eut à combattre en Italie le schisme dit des Trois-Chapitres, et n'y réussit qu'imparfaitement. Il mourut d'une épidémie causée parles débordements du Tibre.

4<> Moine breton, père du pélagianisme; v. l'art, suivant.

5° Pélage 1er, roi des Asturies, chef des Goths chrétiens, vainquit les Arabes à Caradonga 718, et remporta dès lors d'autres avantages, f 737.

6° Alvarus, franciscain espagnol, grand péni-tentier de Jean XXII, év. de Silves en Algarve, un des plus fougueux défenseurs du pouvoir absolu des papes, auteur d'un livre De planct* ecclesiœ, écrit pendant le schisme d'Avignon, dans lequel il met le pape au-dessus de tousle> pouvoirs humains, même des conciles, identifiant son autorité avec celle de Jésus-Christ; impr. à Ulm 1474. Il vivait vers 1320.

 

PÉLAGE, moine breton, nommé d'abord Morgan, qui signifie en celte maritime, a donné son nom à une doctrine qui était l'exagération de ses principes et qui a été condamnée comme une hérésie, le Pélagianisme. C'était un homme moral, tranquille et religieux, d'une grande austérité de vie, et non moins distingué par ses talents que par son éloquence. Il vint à Rome où il se lia avec Augustin et d'autres illustres personnages. Il avait beaucoup étudié Origène et les philos, païens. Ses études, quelques circonstances particulières, et sans doute aussi la tendance de son esprit, le portèrent à donner aux œuvres une importance qui lui lit sacrifier ou diminuer la doctrine de la grâce. Il crut que l'homme, par un développement successif des germes de bien qui sont dans sa nature, et par la force de sa volonté, pouvait atteindre l'idéal de la sainteté. Il était péniblement frappé de voir partout cette foi morte dont parle Jacques, et voulant réveiller les chrétiens de leur torpeur religieuse, il crut devoir leur montrer combien il y a en l'homme de forces pour faire le bien; seulement, au lieu de leur montrer cette force en Dieu, il la chercha en l'homme. L'homme peut tout, disait-il, il aurait dû ajouter: en Christ qui le fortifie. Cette lacune de sa foi est particulièrement sensible dans la lettre qu'il écrivit à la jeune Démétriade, pour la féliciter de ce qu'elle avait fait vœu de virginité: il lui cite l'exemple d'Abel, d'Enoch, de Jacob et d'autres, comme preuve de ce que l'homme peut par ses seules forces, tandis que la Bible nous montre dans ces mêmes exemples l'action de la puissance de Dieu. Dans une autre lettre, à une veuve chrétienne, il lui enseigne presque la prière du pharisien. « Tu sais, ô Dieu, combien sont saintes et innocentes les mains que j'élève vers toi. » Augustin fut son principal adversaire. Pélage publia des commentaires qui firent peu de sensation. L'avocat Célestius, cependant, gagné par le rèle de Pé-lage, se fit moine. Ce fut lui qui engagea la lutte. Augustin l'appelle apertior, par opposition à Pélage qu'il appelle opertior. En 411 ils vinrent à Carthage, où Célestius se présenta pour une place d'ancien. Mais en 412 le diacre Paulin l'accusa publiquement, devant un concile tenu à Carthage, d'avoir soutenu lo que la chute d'Adam n'avait eu de suites que pour lui-même; 2° que les enfants naissaient dans le même état qu'Adam avant la chute. On lui reprochait encore 3° d'avoir nié la condamnation des enfants morts sans baptême. Il fut excommunié. Pélage se rendit de là à Bethléhem, mais il fut mal reçu par Jérôme qui crut voir en lui un origéniste. Cependant quelques évêques orientaux lui firent bon accueil. Il dut paraître en 415 devant un concile présidé par Jean de Jérusalem. Orosius et d'autres lui citèrent saint Augustin: Que m'importe Augustin? répondit-il. Là-dessus grand émoi. Il s'explique, il présente sa doctrine par ses côtés les moins agressifs, et il est reconnu sain dans la doctrine. Accusé devant un nouveau concile, à Dioscoris, Syrie, par Héros et Lazare, il est de nouveau absous, mais il dut condamner formellement ceux qui enseignaient autrement qu'il ne venait de dire; il le fit en ces mots: Je les anathématise comme fous, non comme hérétiques. Là-dessus cinq évêques, partisans d'Augustin, et deux conciles africains (Carthage et Milève) écrivirent à Innocent qui condamna Pélage. Celui-ci répondit par une confession de foi pour se disculper 416, mais elle arriva trop lard à Rome; Innocent venait de mourir. Célestius ne perdit cependant pas courage; il se présenta devant le successeur d'Innocent, le pape Sozime, et avec l'aide de quelques amis il obtint de ce superficiel personnage la déclaration que Pélage était sain dans la foi. Sur le refus des africains de se soumettre à cette décision, Sozime fut ébranlé et annonça qu'il suspendait son jugement jusqu'à plus ample informé. L'emp. Honorius ayant rendu un édit contre le pélagianisme, le faible Sozime cita de nouveau Célestius à comparaître et sur son refus, confirma l'édit de l'empereur et publia une circulaire qui dut être signée par tous les év. d'Afrique et d'Italie. Plusieurs refusèrent, entre autres Julien, qui devint le champion déclaré du pélagianisme. Il appela la science et la raison à l'aide dans une recherche que l'expérience, l'Écriture et le sentiment peuvent seuls éclairer. Pélage revint à la charge auprès de Sozime par un exposé spécieux de sa doctrine et le pape, peu habile à distinguer le vrai du faux, s'y laissa prendre et adressa aux évêques de l'Afrique une seconde lettre pleine de reproches; mais ils lui firent sentir sa méprise et Pélage, définitivement condamné par divers conciles, Carthage 417, Antioche 424, et Éphèse 431, dut se retirer de la théologie militante. On croit qu'il mourut en Palestine vers 432, mais sa doctrine lui a survécu, en s'accentuant davantage dans le sens du mérite des œuvres pour sauver.— Hist. par Voss, Noris, Patouil-let, etc.

Une doctrine moyenne ne tarda cependant pas à s'élever, qui reçut le nom de Senti-Pélagianisme. C'est dans le sud de la France, dans la Provence en particulier qu'elle apparut, comme une sorte de conciliation entre la doctrine de Pélage et celle d'Augustin sur la grâce. Le moine Jean Cassien en fut le principal représentant. Il reconnaît bien la corruption humaine comme suite de la chute d'Adam; il y a lutte de la chair contre l'esprit, la lutte est en la puissance de l'homme, mais eHe est dirigée de Dieu de manière à concourir au développement moral de l'homme. Le libre arbitre, est insuffisant pour le bien sans la grâce intérieure, voilà ce qu'il soutient contre Pélage; mais il ajoute, contre Augustin, que l'influence de la grâce est déterminée par le libre assentiment de la volonté humaine. C'est extrêmement subtil. Il oppose aux pélagiens l'exemple de Mathieu, de Paul, et aux autres celui de Zachée et du bon larron. Il eut de nombreux partisans. Prosper d'Aquitaine et Hilaire écrivirent à Augustin pour l'informer de ce qui se passait dans les Gaules; il y répondit par son De prœdestin. sanctorum9 et son De dono perseverantiœ. Il reconnaît que Cassien diffère essentiellement du pélagianisme, mais il s'étonne qu'il ne sente pas que c'est nier la grâce de Dieu, que la rendre dépendante du mérite humain. Les semi-pélagiens n'ayant pas cédé à l'appel d'Augustin, Prosper écrivit à son tour son Carmen ingrati9 poème plein de chaleur et qui mérite d'être connu, mais où il a le tort de faire de Cassien un pélagien.

 

PELET DE LA LOZÈRE (comte), né 12 juill. 1785 à Saint-Jean du Gard, f 6 févr. 1871 à Villers-Cotterets, étudia à Paris, Lyon et Genève; auditeur au Conseil d'État, administrateur des forêts de la couronne, préfet de Loir-et-Cher sous la Restauration, 4 fois député de Blois; pair de France, ministre de l'Instruction publique, et ministre des finances sous Louis-Philippe, il se retira des affaires après la révolution de 1848. On lui doit la nomination d'Ad. Monod comme prof, à Montauban. Il s'intéressa touj. au mouvement religieux, présida plus d'une fois la Soc. biblique, et fit partie du consistoire de Paris de 1815 à 1868. Auteur d'un Précis de l'Hist. des États-Unis, et de Pensées morales et politiques.

 

PELLICAN, v. Kurschner.

 

PELLICIA, Alexis-Aurèle, né à Naples 1744, f 1823, prof, de morale dans cette ville, auteur de plusieurs ouvrages d'archéologie ecclésiastique.

 

PELLISSON - FONT ANIER, Paul, né 1626 à Béziers d'une famille protestante, fut avocat à Castres, devint membre de l'acad. des sciences, acheta le titre de secrétaire royal, fut nommé conseiller d'État par Fouquet, partagea la disgrâce de celui-ci, le défendit dans 3 mémoires et passa 5 ans à la Bastille. Libéré en 1670 il se fit catholique, fut ordonné sous-diacre, et obtint de nombreuses pensions et places lucratives, entre autres l'administration des abbayes de Saint-Germain des Prés et de Saint-Denis. Il fonda une caisse pour la conversion des huguenots. Tombé en disgrâce auprès de Mad. de Montespan, il continua de jouir de la faveur de Louis XIV. Il correspondit avec Leibnitz et publia sur la tolérance An mémoire, assez pauvre, intitulé Réflexions sur les différends en matière de religion. Sa tolérance n'était au fond que de l'indifférence. D avait aussi commencé un travail sur l'eucharistie, f 1693 subitement.

 

PÉNISCOLA, petite ville et château-fort du diocèse de Valence, Espagne; c'est là que se réfugia Benoit XIII, le dernier pape du schisme d'Avignon, après que le conc. de Constance l'eut déclaré déchu. C'est de là qu'il excommunia le monde entier; puis il f 1424.

 

PÉNITENCE, mot non biblique par lequel la théol. catholique a remplacé le mot biblique de repentance. On peut dire que c'est, non le mot, mais la chose même représentée par ce mot, qui a provoqué la grande crise du 16®« siècle. Sans nier l'importance de la transformation intérieure, la doctrine cathol. la relègue tropàl'ar-rière-pian et la remplace par des actes matériels imposés par l'Égl. et subis par le pénitent. L'expression même: faire pénitence, implique l'idée d'un châtiment plutôt que celle d'un regret d'avoir mal agi. L'Égl. catholique distingue, dans la pénitence dont elle a fait un sacrement: l'attrition, c.-à-d. le regret par peur du châtiment; la contrition, c.-à-d. le regret par amour pour Dieu; la confession, qui aboutit 4 l'absolution, et la pénitence proprement dite, qui consiste en certains actes de piété, de sacrifices ou de réparation, déterminés par le prêtre. D'après l'Évangile la repentance consiste dans le regret humiliant d'avoir contrevenu à la loi divine, et dans la foi au sang de Christ qui lave de tout péché et qui renferme le principe d'une vie nouvelle. — On désigne sous le nom de Psaumes pénitentiaux les sept Ps. 6,32, 38, 51, 102, 130 et 143.

 

PENN, William (Guillaume), né à Londres 14 oct. 1644, était fils de l'amiral anglais sir W. Penn, qui avait fait la conquête de la Jamaïque. Étant au collège de Christ-Church, à Oxford, à l'âge de 15 ou 16 ans, il fut frappe d'une prédication du quaker Thomas Loe et s'attacha dès lors à la secte. Son père en fut affligé; il fit son possible pour s'opposer à cette direction des sentiments religieux de son fils et finit par l'envoyer à Paris, ville de dissipation. La mesure réussit en partie et le jeune homme revint de Paris moins sérieux et plus léger. Toutefois la semence étouffée repoussa. Il regretta ses erreurs et eut un combat spirituel pénible. Dans un voyage en Irlande il entendit de nouveau ce même prédicateur à Cork, prêchant sur la différence entre la foi qui surmonte le monde et celle que le monde surmonte* Il n'hésita plus; il se joignit publiquement aux quakers, 1768, et ne se laissa ébranler ni par la la colère de son père qui le bannit de la maison, ni par un double emprisonnement à la Tour de Londres, pendant lequel il composa son plus fameux ouvrage: No cross, no crown (pas de croix, pas de couronne). Sou père cependant se réconcilia avec lui et f 1670. Penn, dès lor> libre et indépendant, déploya une plus grande activité. U fit plusieurs tournées missionnaires en Allemagne et en Hollande, notamment eu 1677, où il se mit en relation avec la princesse Élisabeth, abbesse de Herford, et avec différent* centres mystiques et séparatistes, les labadistes, etc. Les persécutions continuant contre ses coreligionnaires, il conçut la pensée de leur offrir un asile en Amérique et d'y fonder un État sur le double principe de la foi chrétienne et de la liberté de conscience. Il avait hérité de son père, outre 40,000 fr. de rente, une créance considérable sur la couronne; Chartes II la lui remboursa en 1681 sous la forme d'un grand lot de terre en Amérique, et en 1687 Penn y installait ses amis et fondait la colonie qui a gardé son nom, la Pensylvanie. Il fit avec les sauvages des environs des traités qu'il exécuta scrupuleusement; il supprima l'esclavage, bâtit Philadelphie, ouvrit le pays aux réfugiés pour cause de religion, et donna à la colonie une Constitution en 24 articles, qui fut la base de celle des États-Unis. Il revint en Europe lorsque Jacques II eut mis fin au régime des persécutions et il s'attacha par reconnaissance à ce souverain, ce qui lui valut des tracasseries de divers genres à la suite de la révolution qui mit Charles II sur le trône; il fut plusieurs fois arrêté comme conspirateur, mais acquitté chaque fois. En 1699 il retourna visiter sa colonie et revint en Europe au bout de 2 ans, 1701. En 1712 il fut obligé, par l'état de ses affaires, de remettre à la couronne sa colonie, pour laquelle il avait obtenu déjà des avantages commerciaux, et il f 1718 dans le Berkshire» après quelque» années de maladie. Montesquieu l'appelle le Ly-curgue moderne; en tout cas Penn fut un homa* aussi remarquable par ses talents d'administrateur que par ses vertus chrétiennes et sa philanthropie. — Vies, par Marsillac 1791, et Clarkson 1813.

 

PENNAFORTE, Raymond (de), né à Barcelone vers la fin du 12^6 siècle, fit ses études et professa à Bologne 1204-1219. Peu après son retour dans sa ville natale, où il remplissait la charge de vicaire, il entra dans Tordre des dominicains 1222, dont il devint général en 1238, après avoir été dans l'intervalle archev. de Tar-ragone. Par ordre de ses supérieurs il avait écrit d'abord une Somme des cas de pénitence. En 1230 chapelain et confesseur de Grégoire IX, il compléta pour lui la collection dite Décret de Gratien, en y ajoutant les décisions papales qui ne s'y trouvaient pas encore. Ce travail fut transmis à l'univ. de Bologne comme faisant seul autorité. Il renonça bientôt à son généralat et consacra le reste de ses jours à la mission parmi les maures et les juifs, f 6 janv. 1275; canonisé 1601 par Clément VIII.

 

PEPIN-le-Bref, premier roi desCarlovingiens, fils de Charles Martel et père de Charlemagne, obtint l'abdication de son fr. Carloman, mit ses neveux au couvent, détrôna Childéric III, et se fit couronner à Soissons roi des Francs par Bo-niface. Sacré de nouveau par Étienne II (111), il reconnut les bienfaits de l'Église en lui faisant donation de la Campagne de Rome et des provinces avoisinantes, qu'il avait prises à As-tolf, roi des Lombards. Il favorisa l'Église sous sa forme romaine et hiérarchique, la jugeant avantageuse pour la solidité de son trône, et il la traita comme une des branches de son gouvernement. f 24 sept. 768. Les écrivains ecclésiastiques de son temps lui donnèrent le surnom de pieux; mais plus tard on se rappela qu'il avait sécularisé et confisqué des biens appartenant à l'Église, et la tradition l'envoya en enfer. En mourant il partagea ses États entre ses fils Carloman et Charlemagne.

 

PÉRATES, secte gnostique de la famille des Ophites q. v. Elle nous est connue surtout par Hippolyte. Son nom est évidemment symbolique et signifie que ses sectateurs estimaient que seuls ils pouvaient passer à travers la corruption de la mort, comme les Hébreux avaient passé à travers la mer Rouge. Ses chefs sont désignés sous les noms de Euphrate-le-Pérati-que, et Ademes-le-Karystiens, deux noms probablement allégoriques, et deux surnoms grecs qui font penser que la secte était en effet une branche grecque du gnosticisme oriental; les allusions de leurs livres à la mythologie justifient cette supposition. A côté de beaucoup de rêveries astrologiques sur les planètes, ils estiment que le but de l'homme doit être de sortir de l'Égypte de la vie terrestre en passant par la mer Rouge de la mort, et d'entrer dans te désert oti il n'y aura plus de dieux terrestres; ils y trouveront sans doute encore des faux dieux comme les serpents brûlants, mais ils en seront délivrés en regardant au vrai serpent libérateur, le même qui déjà dans le paradis avait appris à Éve à s'affranchir des lois de démiurge. Alors seulement l'homme pourra entrer en Canaan.

 

PÈRES lo de l'Église, v. Patristique. 2° de la mort, v. Frères IO®.

 

PÉRICOPES. fragments, coupures; c'est la division du texte sacré. Ce nom avait été employé d'abord pour les parash et les haphtar de l'A. T.; bientôt il fut transporté au Nouveau. Mais la division n'était pas touj. logique, pas plus que celle de nos chapitres, et elle fut plusieurs fois changée, n'ayant aucun caractère officiel. Les plus connues sont celle d'Ammonius d'Alexandrie, et celle d'Eusèbe de Césarée. D'après Suidas et Épiphane il y aurait eu dans Matthieu 355 péricopes ou chapitres; dans Marc 234, dans Luc 342, dans Jean 231; ce seraient presque nos versets.

 

PERPETUA, martyre chrétienne, peut-être montaniste, de la famille noble des Viviens. Mise en prison à Carthage avec l'esclave Félicité, Revocatus, fr. de celle-ci, et deux autres jeunes gens, Satyrus et Saturninus son frère, elle refusa solennellement au proconsul de sacrifier aux idoles, et fut condamnée ainsi que ses 4 compagnons, 202 ou 203, le jour de l'anniversaire de César Géta. L'Église en fait une vierge; d'après un mss. récemment découvert par M. Aubé, elle aurait eu un mari et un petit enfant, qui cherchèrent, ainsi que toute sa famille, à intervenir dans son procès et à la porter à abjurer. Sa mère était chrétienne, son père païen; elle-même ne fut baptisée que dans la prison et fut consolée et soutenue par des visions.

 

PERPIGNAN, ville des Pyrénées orientales, ancienne Navarre, où s'ouvrit le 1** nov. 1408 une espèce de concile officieux, qui avait été convoqué par Benoît Xffl. Désireux d'en finir avec le schisme d'Avignon et lassés des intrigues, de l'ambition et de la mauvaise foi des deux papes Grégoire et Benoît, plusieurs cardinaux s'étaient réunis à Livourne pour demander la convocation d'un concile (celui qui eut lieu en effet à Pise 1409). Ce fut pour prévenir cette convocation que le pape français, Benoît, se hâta de convoquer, sur terre neutre, le conc. de Perpignan; mais il n'y vint que peu d'évê-ques, en majorité espagnols ou français, et le pape ayant refusé de se rendre aux instantes sollicitations de ses partisans qui lui conseil -laient de donner sa démission, les prélats se retirèrent et le concile n'eut pas lieu.

 

PERSE. Cette contrée, dont les limites générales sont le golfe Persique, la Médie, la Car-manie et la Snsiane, et dont la population appartient à la famille iranienne et aux nations indo-germaniques, était déjà célèbre par son courage et sa cavalerie dans les temps les plus anciens. Ezéch. 27, 10. 38, 5. Elle entre dans l'histoire biblique par Cyrus 536 av. C.. et plusieurs de ses rois sont mentionnés: Darius Hystaspe Esd. 5, 15., Xerxès dans Ester, Ar-taxerce 1er >êh. 2,1. Il paraît qu'elle fut évan-gélisée dès les premiers temps du christianisme, quoiqu'il ne faille pas ajouter une foi absolue à la tradition qui nomme Simon et Jude, et Marès, un des 70 disciples, parmi les missionnaires des commencements. Pour avoir des renseignements précis, il faut descendre jusqu'au 4™* siècle. Au concile de Nicée 325, on voit déjà un évêque de Perse, Jean, ce qui suppose des égl. nombreuses et constituées. L'emp. Constantin recommande aussi au roi de Perse Shapur II, ou Sapor, les chrétiens de son royaume, et Ion peut croire que les guerres des Romains contre les Parthes et les Perses avaient indirectement concouru par des prêtres, des soldats ou des prisonniers chrétiens à faire connaître le nom de Christ aux adorateurs du feu et aux disciples de Zoroastre ou de Manès. Les persécutions de Dioctétien et de ses successeurs y avaient probablement aussi contribué en chassant vers les montagnes de la Perse un bon nombre de chrétiens. Mais en 343, peu après la mort de Constantin, une persécution de 40 années éclata, provoquée par les mages qui exploitèrent la mésintelligence survenue entre Constance et le roi de Perse. Des centaines de chrétiens furent mis à mort, entre autres Syméon, év. de Séleucie, Ctésiphon, et le vénérable Guhsciatazades, ancien précepteur du roi. Le même Sapor fit aussi déporter à Ispahan et dans l'intérieur du pays les juifs, dans lesquels il croyait ne voir qu'une variété de chrétiens. Des jours meilleurs parurent sous Iezdéjerdès II qui, grâce à l'év. Maruthas, avait conclu la paix avec les Romains. Un acte de folie ou de fanatisme de l'év. Abdas de Suse remit tout en question; il renversa un temple persan où brûlait le feu éternel d'Ormuzd 418, et il se refusa à toute réparation. Il fut exécuté et les persécutions recommencèrent. Le roi suivant, le sanguinaire Va-ranes, 421, rendit la persécution plus violente encore, et les supplices les plus atroces se multiplièrent. Les historiens Sozomène et Théodo-ret, évaluent à 16,000, dont la plupart ecclésiastiques et moines, le nombre des victimes de ces persécutions, et ils ne citent aucun cas d'apostasie; 22 évêques furent immolés. Il ressort de là que l'Égl. chrétienne avait de profondes racines dans le pays, mais on ne connaît aucun nom d'homme auquel on puisse attribuer la gloire de ce grand mouvement; il est probable que c'est de Syrie, et notamment d'Antioche, que v inrent la plupart des missionnaires et des évêques. Vers le milieu du 5®? siècle les év. de Séleucie se déclarèrent indépendants de ceux d'Antioche, prirent le titre de patriarches, et prétendirent être les égaux des patr. d'occident. Vers cette époque, sous l'influence de Barsumas de Nisibis et de Narsès-le-Lépreui, le nestorianisme s'introduisit en Perse, et bientôt, au 7me siècle, le roahométisme les fit presque disparaître. Au temps de leur prospérité les égl. perses avaient eu de nombreuses écoles à Édesse, Nisibis, Séleucie, Adiabène, Dorca, Ma-huza (Bagdad), où l'on enseignait la philos., les mathématiques et les saintes Écritures, sans parler des écoles primaires attachées à chaque église. Des fragments de la Bible étaient appris par cœur en syriaque, mais il n'en fut fait aucune traduction en langue persane; on ne connaît sous ce rapport que le Pentateuque, trad. par le juif Jacob ben Tawus, qui date tout au plus du 10m« siècle; les Proverbes, l'Ecclé-siaste et le Cantique, date inconnue; les 4 Évangiles, du 14me siècle, et quelques fragments. Do nos jours la Bible a été trad. par les soins des missionnaires: Colebroke, Calcutta 1805; Mar-tyn, 1815, etc.

 

PESHITO, la plus ancienne traduction syriaque de la Bible; elle date de la fin du 1er ou du commencement du2^ siècle et fut faite peut-être par les hommes envoyés en Palestine par l'apôtre Jude et par Abgare, roi d'Édesse. Il ressort des caractères internes que les traducteurs étaient des judéo-chrétiens, et qu'ils ont trad. l'A. T. directement d'après l'original. Sou nom syriaque signifie la simple, ou la fidèle, et elle est en effet très exacte. Elle renferme tous les livres canoniques de l'A. T., et ceux du Nouveau, sauf 2 Pierre, 2 et 3 Jean, Jude et l'Apocalypse. Le N. T. a été impr. pour la lrt fois à Venise 1552, l'A. T. par Lee, Londres 1823. Elle a servi de base aux versions arabes les plus anciennes et à la version perse des Évangiles. Réimpr. dans les Polyglottes de Paris et de Londres.

 

PESTALOZZI, Jean-Henri, né à Zurich lî janv. 1746, d'un père médecin, qui mourut bientôt, et d'une mère excellente, mais peu douée, qui ne put diriger elle-même son éducation. Laid, gauche et maladroit, il avait le sentiment de ce qui lui manquait, et cela ajoutait à sa timidité naturelle. Généreux et plein de cœur, il savait se dévouer, et sa vie entière fut consacrée au bien de ses semblables et au relèvement des petits. Pédagogue d'instinct, il ât-teignit aux limites du génie, et s'il fut pendant 32 ans le contemporain de Rousseau, celui de Basedow pendant 44 ans, par conséquent son-mis aux mêmes influences des idées de lenr époque, il conserva plus d'équilibre dans sa méthode, parce qu'il avait conservé plus de respect pour la Bible et pour la foi chrétienne. Après avoir successivement commencé, puis abandonné la théol. et le droit, il se tourna vers l'agriculture, acheta près de Birr, Argovie, un domaine oti il s'établit 1771 avec sa jeune femme, Anna Schulthess, et en suivant le développement de leur fils, il comprit que l'enfant, peu fait pour les abstractions, pouvait s'épanouir par l'étude des choses réelles et tangibles, par le contact avec la nature. Il se mit aussitôt à recueillir les petits pauvres, mendiants et vagabonds de la contrée, les occupant à la terre, les faisant travailler et réfléchir, leur apprenant à prier. Il obtint des résultats remarquables, mais mauvais administrateur, il était ruiné 1780, et d'insuffisantes souscriptions ne purent pas le remettre à flot. Sur le conseil de son ami Iselin de Bâle, il écrivit ses idées et publia la Soirée d'un ermite, puis Léonard et Gertrude, Berlin 1781, qui obtint un succès européen et lui valut du gouvernement bernois une médaille d'or avec l'inscription: Civi op-timo. En 1782 il publia à Zurich Christophe et Élise, instruction pour les mères; en 1787 la Feuille populaire suisse; en 1797 des Recher-ehes sur la marche de la nature dans le développement de l'humanité. Sa réputation était faite, mais il en revenait touj. à son idée d'une réforme dans l'enseignement populaire, et en 1798 le gouvernement helvétique lui confia la direction d'un orphelinat à Stanz; il y fit merveille; aidé d'une vieille servante il soigna 30 enfants, se faisant aimer d'eux et leur inspirant le goût du travail. Les malheurs de la guerre interrompirent une œuvre si bien commencée. Il vint à Berthoud, et dans le château que le gouvernement mit à sa disposition 1800 il fonda un grand institut qui jouit de quelques années d'une immense prospérité et qui fut sur le point de devenir l'école normale de la république. Mais la réaction survint, elle redemanda son château, et Pestalozzi fut obligé de s'en aller 1804. Il fut un moment l'associé de Fellenberg à Hofwyl, et accepta ensuite l'offre de la ville d'Yverdon, qui mettait son château à sa disposition. Les élèves y accoururent de toutes parts, de Prusse, de Hollande, du Danemark; on en compta plus de 200 à la fois, venus pour étudier la méthode du maître. Ce fut le beau temps de Pestalozzi; son nom et ses idées remplissaient le monde pédagogique. Mais il vieillissait, la jeunesse de son système finissait à son tour par devenir une routine; la discorde s'était mise entre ses maîtres, le vieux directeur n'était plus de taille à intervenir d'une manière efficace, et l'institut fut fermé 1825. Pestalozzi se retira à Neuhof chez son petit-fils Gottlieb, et+ àBrugg 17 février 1827. Il faut nommer encore parmi ses ouvrages, qui forment 16 vol. 8°: Discours à ma maison; Comment Gertrude élève ses enfants, et enfin, 1826, le Chant du cygne. —Vie et notices par Chavannes 1805, le P. Girard 1810, Jullien 1812, Herminie Chavannes 1853, Paroz 1857, Burnier 1864, Bordier 1873, Roger de Guimps 1874, etc.

 

PÉTAU, latin Petavius, Denis, né 21 août 1583 à Orléans, prof, de philos, à Bourges dès l'âge de 20 ans, résigna bientôt ses fonctions pour entrer dans l'ordre des jésuites. Après avoir achevé son noviciat à Nancy et au collège de Pont-à-Mousson, il enseigna la rhétorique à Reims 1610-1613, à La Flèche 1615 et à Paris jusqu'en 1621. Il avait prononcé ses vœux en 1618. Nommé en 1621 prof, de théol. à Paris, il y resta jusqu'à sa f 11 déc. 1652, ayant refusé les offres les plus brillantes du pape et du roi d'Espagne, même le chapeau de cardinal. Très savant, il a laissé 49 ouvrages, dont 10 in-folio. Le plus important, De theologicis dog-matibus, est une espèce d'histoire des dogmes, la première qu'on ait essayée, Paris 1644-1650, 5 vol. f°. Son livre De doctrinà temporum et son Uranologia souvent réimprimés, ont de la valeur pour les études chronologiques. Il a écrit aussi Rationarium temporum, et divers ouvrages de controverse, contre Grotius, Saumaise, les jansénistes, etc. — Son oncle Paul, aussi natif d'Orléans, 1568-1614, a laissé des ouvrages sur les antiquités.

 

PÉTAVEL, Abraham-François, 1791-1870, né à Neuchâtel où il fit ses premières études, sortit déjà du collège à 13 ans, et se rendit à Zurich pour y suivre les leçons de J.-J. Hottin-ger; de là à Berlin où, dans l'université nouvellement fondée, il fut le premier nommé docteur en philosophie. De retour dans sa patrie 1813, et consacré au saint ministère, il restaura les études classiques et enseigna seul pendant plusieurs années le latin, le grec et la rhétorique française. Peu à peu quelques-uns de ses élèves devinrent ses collègues et en 1841 il présida à l'inauguration de l'académie, dont il fut 2 fois recteur. Les discours d'ouverture dont il fut chargé à plusieurs reprises ont été publiés et réunis sous le titre: Disc, sur l'éducation: l'idée fondamentale en est la nécessité de la foi chrétienne comme base de toute étude. Depuis sa conversion 1820, il compta parmi les membres actifs du réveil religieux, prit part à la formation d'une société des missions, à l'organisation de l'Alliance évangélique, à la fondation de la faculté de théol.; mais il s'occupa surtout et avec une sympathie passionnée de l'évangèlisation des juifs et de leur relèvement spirituel et national. C'est vers ce but que tendent presque tous ses écrits: Appel aux égl. chrét. en faveur d'Israël. Conversion de Capa-doce, la Kabbale, etc. La Fille de Sion 1844-1868 est un poème en 7 chants, moitié épique, moitié lyrique, qui célèbre le rétablissement futur d'Israël. De 1851 à 1854 il fit différents voyages pour visiter les principaux rabbins de France. Plus tard il fut appelé k prendre la parole dans diverses assemblées annuelles de l'Al-liance israélite universelle. D'une figure originale et comme inspirée, il faisait penser aux hommes de l'A. T., aux patriarches et aux Voyants. Il a laissé 3 fils dans le ministère.

 

PETERSEN, Jean-Gui»., né à Osnabruck 2 juill. 1649, d'une bonne famille, élevé à Lubeck, fit sa théol. à Giessen, Rostock, Leipzig, Wittenberg et Iéna; se montra l'ennemi acharné des jésuites, qui le lui rendirent et l'obligèrent plusieurs fois à changer de poste. Surintendant k Lunebourg 1688, il se montra le trop ardent partisan des visions millénaires de M"* d'As-sebourg, et fut destitué et banni 1692. Homme d'une imagination ardente, il était très apprécié de Spener k cause de son zèle pour un christianisme vivant, mais son penchant au mysticisme l'égara. Il épousa Jeanne-Éléonore Merlan, qui se vantait aussi d'avoir des révélations divines, et sous l'influence de ces deux femmes, ses vues s'exagérèrent encore. De la terre de Thymern, près Zerbst, qu'il avait achetée, il publia des écrits et des sermons, préchant entre autres un chiliasme un peu fantastique, et le rétablissement final de toutes choses. Lui et sa femme écrivirent leur vie. Il décida le duc Maurice -Guill. de Saxe à rentrer dans l'Égl. évangélique, qu'il avait quittée, et f 31 janv. 1727.

 

PETERSON (fils de Pierre), Olaf né 1497 et Laurent né 1499 à Oerebro, fils d'un maréchal ou serrurier suédois; élevés chez les carmélites de leur ville natale et destinés à l'état ecclésiastique, ils se mirent en route pour aller achever leurs études au collège Sainte-Brigitte k Rome; mais en passant à Wittenberg, 1516, ils furent tellement captivés par Luther qu'ils restèrent 3 ans auprès de lui, gagnés à la cause de la Réforme. De retour chez eux en 1519, et après qu'Olaf eut soutenu k Wisby avec succès une discussion contre le marchand d'indulgences Antonelli, ils furent placés à Strengnâss par le pieux èvêque Matthias. Échappés comme par miracle aux massacres de Stockholm 1519, ils continuèrent d'annoncer l'Évangile et de prêcher la Réforme sous la protection d'Anderson, l'administrateur du diocèse. Gustave Wasa nomma Laurent, que les Allemands appelaient maître Lars, prof, de théol. à Upsal, puis en 1531 premier archev. évangélique. Olaf, chancelier de Gust. Wasa depuis 1524, et son conseiller intime, résigna ses fonctions en 1539 pour devenir pasteur à Stockholm. Les deux frères, aidés de l'archidiacre Laurence AndreS, traduisirent la Bible en suédois, 1540 et 1541. Olaf, k la demande du roi, rédigea en outre l'organisation du service divin après l'assemblée réformatrice d'Oerebro 1529. Accusé d'avoir pris part k un complot contre Wasa, Olaf fat condamné à mort, mais son innocence ayant été reconnue, il rentra en possession de ses charges. f 1552. Laurent f 1573 et fut enterré dans la cathédrale d'Upsal: Ses sermons et ses homélies ont fait longtemps l'édification de son Église. On l'a surnommé l'apôtre et l'évangéliste du nord. Son frère et lui sont les auteurs de la lre Constitution ecclés. de Suède, qui est devenue loi en 1572.

 

PETIT lo Jean, né à Hesdin vers 1360, t 1411; juriste et Dr en théol., cordelier; au service du duc de Bourgogne Jean-sans-Peur, assassin de son cousin Louis, duc d'Orléans, il essaya 1408 de justifier cet assassinat et de prouver qu'il est permis de tuer un tyran; doctrine qui fut condamnée par Gerson, par le parlement et le conc. de Constance.

2o Samuel, né 25 déc. 1594 à Nîmes, f 12 déc. 1643. Fils du pasteur de Saint-Ambroix, et orientaliste distingué, il étudia la théol. à Genève, et fut en 1615 nommé prof, d'hébreu k Nîmes. o(i il exerça aussi des fonctions pastorales. Le Consist. lui témoigna touj. beaucoup d'égard* et lui confia plusieurs missions, politiques et religieuses. En 1637 il fat délégué au synode d'Alençon. Il finit par être nommé anssi principal du collège, qu'il s'agissait de relever. Auteur de quelques traités dogmatiques, sur la Réunion des chrétiens, etc. Le card. Bagni, et l'archev. de Toulouse, Montchal, le tenaient en haute estime. Sa biblioth. fut vendue 5,000 L tournois.

 

PETITOT, Jean, né à Genève 1607, f 1691? créateur de la peinture sur émail; attaché d'abord k Charles d'Angleterre, il vint ensuite en France sous Louis XIV, mais fut emprisonné après la Révocation, et ne sortit du For-l'Évêque que lorsqu'on craignit pour ses jours. Bossuet essaya vainement de le convertir.

 

PETRIKOW, ville de Pologne où se sont tenus plusieurs synodes. En 1551 la Conf. de foi catholique fut confirmée et des dispositions furent prises contre les évangéliques. La diète de 1555 demanda un concile national, la réforme des abus, le culte en langue vulgaire, la cène sous les deux espèces, le mariage des prêtres, etc. Le synode réformé de 1565 excommunia les antitrinitaires, et acheva le schisme entre les évangéliques et les sociniens.

 

PEUCER, Gaspard, né 6 janv. 1525 à Baut-zen, fit ses études à Wittenberg, fort l'ami, le commensal et en 1550 le gendre de Mélaacb-thon. Prof, de mathématiques en 1554, de médecine en 1560, il gagna la confiance d'Auguste de Saxe qui, en lui conservant sa place à Wittenberg, le nomma directeur des études et se l'attacha comme médecin. Mais ils se brouillèrent à cause de ses tendances philippistes; on lui attribua un écrit du Dr Curaus sur la Cène, jugé trop calviniste, et il fut condamné à un emprisonnement, qui dura 12 ans et ne finit que sur les instances de la duchesse Agnès, et de son père Joachim-Ernest. Remarié 1587, il f 25 sept. 1602. Il a laissé de nombreux ouvrages de médecine, théol., mathématiques, philos, et histoire.

 

PEUTIXGER, Conrad, né 1465 à Augsbourg, étudia en Allemagne et en Italie, fut secrétaire d'État dans sa ville natale et conseiller impérial, f 1547. Très cultivé, auteur de plusieurs travaux sur les antiquités historiques, il fut en relations suivies avec les humanistes et favorisa les débuts de Luther; mais déjà à Worms il trouva qu'il allait trop loin et lui conseilla d'enrayer.

 

PFAFF, Christophe-Matthieu, né 26 déc. 1686 à Stuttgard, fils d'un pasteur, se distingua de bonne heure par une rare intelligence, et et était déjà répétiteur à Tubingue à 19 ans. Le prince lui facilita un voyage de plusieurs années en Allemagne, Angleterre et Hollande, et le chargea ensuite de l'éducation de son fils, avec lequel il visita Turin et la Hollande. Nommé prof, et chancelier de l'univ. de Tubingue, et doté de plusieurs bénéfices, il abandonna soudainement son poste en 1756, sans motifs connus et se rendit à Giessen, où il fut nommé prof., recteur et surintendant général, t 19 nov. 1760. Il aurait aimé la réunion des Égl. luthérienne et réformée. Sa controverse avec les catholiques était modérée.

 

PFENNINGER. Jean-Conrad, nè 1747 à Zurich, étudia la théol. et fut en 1775 nommé diacre de l'égl. des Orphelins, puis diacre à Saint-Pierre quand son ami Lavater en devint le premier pasteur, + 1792. Écrivain fécond, il fut enveloppé dans les controverses de Nicolaï avec Lavater, dont il avait épousé les idées. Ses Lettres juives du temps de Jésus de Nazareth. 1783-1792, furent très appréciées, et sont encore auj. citées avec éloge par Stier.

 

PFLUG, ou Pflugk, Jules (de), fils d'un conseiller de la cour de Saxe, homme savant, patriote, doux et bienveillant, chanoine de Mayence et Naumbourg, doyen du chapitre deMeissen, conseiller de l'empire. Charles-Quint le délégua en 1541 au colloque de Ratisbonne. Nommé évêque par le chapitre de Naumbourg-Zeitz, il ne put entrer en fonctions qu'après la bataille de Mtihlberg et l'expulsion de l'év. évangélique Amsdorf, nommé par le prince-électeur. Il fut appelé à présider le nouveau colloque religieux de Ratisbonne, en 1546, et travailla avec Agri-cola et d'autres à préparer l'intérim d'Augsbourg. Il présida en 1557 la conférence de Worms et f 1564.

 

PHILADELPHIE. Plusieurs tentatives furent faites au 17*6 et au 18me siècle par des sectes mystiques, pour réaliser l'idéal du règne de Dieu par l'amour fraternel, tel qu'il semble symbolisé par l'Égl. de ce nom, Apoc. 3, 7. Il s'agissait seulement de rassembler tous les vrais chrétiens, d'en former une association, et de les organiser théocratiquement en une église gouvernée uniquement par l'Esprit de Dieu, dans l'attente du retour de Christ et du règne de mille ans. Ce furent les idées de Mm* Petersen, née Éléonore de Merlau, et de Jeanne Leade à Londres; là-dessus, et plus tard, se formèrent les sociétés philadelphiques de Portage à Londres, de Poiret et de Bourignon en Hollande, celle de Berleberg, etc. En général elles durèrent peu; quelques-unes même tournèrent mal. Celle de Guill. Penn et des quakers a seule survécu, parce qu'elle avait une base sérieuse et vivante.

 

PHILASTER, ou Philastrius, év. de Brescia depuis 381 jusqu'à sa f 387. Zélé athanasien, il avait fait pour combattre l'arianisme de nombreux voyages en Occident. Il assista au conc. d'Aquilée 381, où sous l'influence d'Ambroise l'arianisme fut condamné et ses timides défenseurs, Palladius et Secundianus d'Illyrie, ana-thématisés. Il a laissé un traité qui a eu d'ailleurs peu de succès, sur les Hérésies; il en compte 28 avant Christ et 128 après; trop passionné, il manque de critique: il compte comme héresies les vues différentes des siennes sur l'auteur de l'ép. aux Hébreux. Son idéal comme écrivain était Épiphanes. On lui attribue d'avoir le premier donné le nom d'apocryphes à des livres que Rufin désigne plus exactement sous celui d'ecclésiastiques.

 

PHILÉAS, év. de Thmuis, Egypte, martyr décapité 310 ou 311 après une longue détention à Alexandrie. Son nom figure parmi les signataires d'un Avertissement à Mélétius de Lyco-polis, et Eusèbe cite un fragment d'une lettre de lui à ses fidèles, pour les encourager à la persévérance.

 

PHILIPPE, nom d'un grand nombre de personnages, souverains, ecclésiastiques, anciens ou modernes. Voici les noms de ceux qui, en dehors de la Bible, intéressent l'hist. de l'Église.

lo Philippe VArabe, Marcus Julius, emp. romain 244-249, né à Bostra dans l'Arabie Pé-trée, fils d'un chef de brigands, entra au service militaire, se distingua dans la guerre contre les Perses, s'éleva rapidement aux plus hauts grades, et profita de son influence pour soulever les troupes et faire assassiner le jeune Gordien III. Il se fit nommer empereur à sa place et gouverna avec sagesse et modération. Les chrétiens jouirent d'une entière tranquillité sous son règne. D'anciens auteurs ecclésiastiques disent môme qu'il devint chrétien, ainsi que sa femme Severa et son fils Julius Saturai -nus; Origène lui reproche le meurtre de Gordien, et Babylas, év. d'Antioche, lui interdit pour le même motif l'entrée de l'église à Pâques, jusqu'à ce qu'il eût fait une pénitence publique. D'un autre côté il semble avoir fait acte de paganisme en assistant en 247 au 10m« jubilé séculaire de la fondation de Rome. II tomba dans la bataille de Vérone contre Dè-cius, 247.

2<> Év. d'Héraclée, refusa de quitter son poste malgré les persécutions. Son église ayant été fermée, il prêcha de devant la porte, Conduit devant le gouverneur Bassus, il reçut l'ordre de livrer les vases sacrés et les livres saints qu'il possédait: Nous sommes prêts, répondit-il, à endurer les plus cruels tourments, si tu prends plaisir à nous voir souffrir. Nous te livrerons même les vases sacrés, car ce n'est pas avec de l'or ou de l'argent qu'on adore Dieu, mais je ne me séparerai pas de mes saints livres. La foule des païens se rua dans l'église et brûla tout ce qu'elle put trouver. Philippe fut mis à la torture sur la place publique; le gouverneur lui donna l'ordre de sacrifier à une statue d'Hercule; mais il lui répondit par un discours sur la vraie nature de la Divinité, et il fut jeté dans un misérable cachot. Sous Justin, le nouveau gouverneur, il subit d'atroces tortures. Après avoir langui sept mois dans sa prison, il fut brûlé publiquement, f 304.

3° Ph. Sidétès, prêtre à Side, Pamphylie, jusque vers 430. Ses écrits contre Julien l'apostat, mentionnés par Socrate, sont perdus. On l'a fait à tort directeur de l'école philos. d'Alexandrie.

4° Philippe, pape ou antipape d'un jour, nommé par les Lombards après la chute de Constantin II, et installé 31 juillet 768. Il céda la place à Etienne IV (III) nommé régulièrement, ce qui ne l'empêcha pas d'être déposé par une assemblée d'évêques, et honteusement maltraité par une foule ameuté? sous la conduite de Chartophylax Gratiosus; on lui creva les yeux. Il était auparavant moine au couvent de Saint-Vit sur l'Esquilin.

5° Philippe IV, dit le Bel, roi de France, né 1267, le véritable fondateur de la monarchie française, qu'il établit sur les ruines de la vieille féodalité. Il eut aussi l'honneur de briser la puissance papale en bravant les foudres de l'excommunication qui le frappèrent deux fois sans le blesser ni l'ébranler. Ses luttes contre Boni-face VIII forment le caractère principal de son règne; il refusait au pape le droit de cumuler les deux pouvoirs, temporel et spirituel, nuis il ne se gênait pas pour les revendiquer en sa faveur. Dans ses difficultés avec 'Édouard 1" d'Angleterre, il repoussa l'arbitrage deBoniface. ce qui lui valut 1296 la bulle Clerieit laitot qui, sans le nommer, défendait aux ecclésiastiques de payer aucune redevance à des laïques; il y répondit en prohibant la sortie des métaux précieux. La paix ayant été cependant conclue par l'intervention officieuse du pape, qui négocia une alliance matrimoniale entre les deux familles belligérantes, les prétentions du légat Bernard de Saisset irritèrent et froissèrent Philippe, qui fit arrêter le prélat. La bulle Salvator mundi suspendit tous les privilèges du monarque, et bientôt, 5 déc. 1301, parut la célèbre bulle Ausculta fili, qui le sommait de se présenter à Rome. Il la fit brûler. L'université, le clergé et les États généraux, 10 avril 1302, se mirent du côté du roi (par patriotisme, car en réalité ses exactions l'avaient rendu odieux), el une nouvelle bulle de Boniface, Unam Sanctam. vint réclamer 18 nov. 1302 en faveur du pape la domination universelle. Le parlement français proclama en revanche la complète indépendance de la couronne, déclara le pape convaincu d'hérésie et d'autres crimes, 1303, et Philippe envoie à Anagni, où résidait le pape, son procureur Nogaret, qui s'empare de sa personne. 7 sept. 1303. Après la mort de Benoît 1301 on 1305, Philippe fait élire Bertrand de Got, qui se fixe à Avignon, mettant la papauté au service de la France. Le pape et le roi condamnent l'ordre des templiers; la torture fournit les preuves dont on a besoin pour paraître suivre les fonnes de la justice: des milliers d'hommes périssent sur l'échafaud ou sur le bûcher 1307-1314, et leurs immenses richesses sont confisquées. Le grand-maître Jacques Molay périt un des derniers et assigna dans l'année le roi, qui t en effet 1314. Cruel et dévoré d'avarice, Philippe avait également voué les juifs à la des truction pour s'emparer de leurs biens; il avait aussi fait saisir tous les banquiers italiens et u\\ certain nombre de commerçants français, sous prétexte d'usure, et ils ne s'étaient rachetés de la torture qu'à force d'argent. Enfin ce roi inique et odieux, qui levait des taxes énormes, faisait de la fausse monnaie et refusait de recevoir en paiement l'argent qu'il avait falsifié. En mourant il recommanda à ses fils la piété, la clémence et la justice.

6° Philippe-fe-ifagrnantW, landgrave de Hesse, né 23 nov. 1504 au château de Mar bourg, perdit son père en 1509, et fut déclaré majeur par l'empereur à 14 ans. Sa conduite dans les luttes contre Sickingen, et surtout dans la guerre des paysans, lui valut la réputation d'un capitaine prudent autant que brave. A U diète de Worms, il reçut de l'attitude de Luther une impression profonde, qui se fortifia encore par ses rapports avec Mélanchthon. En 1525 il se déclara ouvertement, et introduisit la Réforme dans ses États; les biens incamérés servirent à fonder 1527 l'univ. de Marbourg, qui compta Lambert d'Avignon parmi ses premiers professeurs. Lui-même penchait plutôt du côté des théologiens suisses, notamment pour la question de la Cène, et il se lia avec ceux de Bâle et de Zurich, mais il évita d'accentuer trop cette divergence, pour ne pas compromettre l'œuvre même de la Réforme. Il prit l'initiative de l'alliance de Torgau, se joignit à la célèbre protestation de Spire, prêta peut-être trop facilement l'oreille aux révélations de Pack, organisa la ligue de Smalcalde, et combattit avec succès à Augsbourgle projet de concessions que la molle diplomatie de Mélanchthon avait élaboré avec le légat. Il signa l'Augustana, mais en faisant des réserves sur l'article relatif à la Cène. Le rétablissement du duc Ulrich de Wurtemberg en 1534, la défaite des anabaptistes en 1535, l'extension et l'affermissement de la ligue de Smalcalde en 1536, mirent le comble à sa gloire. Mais son influence dans les affaires protestantes fut paralysée par le fait de son double mariage. Sa première femme était fille de Georges de Saxe; de son vivant, et avec son consentement en 1540, il épousa encore Marguerite de la Saal. Les Réformateurs le subirent sans l'approuver formellement, mais la conscience de l'Église protesta. Charles-Quint, après avoir fait la paix avec François 1er, et arrivé au faîte de sa puissance 1544, en revint à sa vieille idée de briser l'indépendance des princes allemands dans l'intérêt du catholicisme et de la maison de Habsbourg. La bataille de MUhlberg 24 avril 1547 trancha la question en faveur de l'empire. Philippe dut se rendre après que Charles eut solennellement promis à Maurice de Saxe qu'il ne serait porté atteinte ni à sa liberté, ni à l'intégrité de son territoire. La perfidie fut complète; le malheureux Philippe fut déclaré déchu de sa dignité électorale, il perdit le duché de Saxe et le MUhlberg, et fut traîné de prison en prison, en Allemagne et dans les Pays-Bas, jusqu'à la paix de Passau qui le délivra, 1552. Il employa ses dernières années à gouverner paisiblement son peuple, sans négliger les conférences religieuses, à Naumbourg, Worms, Erfurt, Fulda, où il se prononça toujours dans un esprit conciliateur. Avant sa f 31 mars 1567, il partagea ses États entre ses 4 fils.

7o Philippe II, roi d'Espagne, né 21 mai 1527, fils de Charles-Quint, épousa en 1554 Marie-la-Sanguinaire. En 1556 il succéda à son père comme souverain de tous ses États, sauf l'emp. d'Allemagne. Sombre, fourbe, cruel et despotique, il a laissé dans l'histoire une trace sinistre. Autant par fanatisme que par politique, il se donna pour tâche de défendre le catholicisme par tous les moyens et d'en faire la base de son trône. Le résultat fut ce qu'il devait être, il avait reçu le pays en pleine prospérité, les gallions lui apportaient l'or des colonies, et quand il mourut l'Espagne démembrée était ruinée, et elle ne s'en est jamais relevée. Sans le vouloir il a contribué aux succès du protestantisme. L'inquisition a pu brûleries évangéliques pêle-mêle avec les maures et les juifs en Espagne même, mais l'établissement de cet inique tribunal dans les Pays-Bas provoqua la révolte de ces provinces, leur déclaration d'inde-pendance et la guerre avec l'Angleterre, dans laquelle fut détruite par une tempête la flotte de l'Invincible Armada, ainsi que la flotte de réserve qui attendait dans le port de Cadix, 1588. Son alliance avec la Ligue et les Guise, son espoir de ceindre la couronne de France, fut une nouvelle déception: il dut en 1598 signer avec Henri IV la paix de Verviers, et il f 13 sept, la même année, laissant son royaume en ruines. Le seul succès de sa politique fut la conquête du Portugal, dont il s'empara après la mort du roi-cardinal Henri. Il gagna aussi la bataille de Lépante contre les Turcs 1571, mais malgré les instances du pape il ne put pas en profiter à cause de la jalousie haineuse dont il était animé contre le glorieux vainqueur, don Juan d'Autriche, son frère, qu'il fit empoisonner plus tard. Il fit également périr dans un cachot son propre fils don Carlos, que Schiller a poétisé. Son règne illustré par des littérateurs et des généraux que lui avait légués le règne précédent, ne légua que des décombres à ses successeurs. Il a beaucoup écrit, entre autres des Lettres récemment publiées, qui prouvent qu'à ses heures il savait encore badiner avec ses enfants et cultiver la vie de famille.

8° Ph. de Nêri, v. Néri.

 

PHILIPPISTES, v. Cryptocalvinisme.

 

PHILIPPONS, v. Rascolnicks.

 

PHILLIPS, Georges, né 1804 à Kônigsberg, passa au catholicisme et fut successivement prof, de droit à Munich et à Vienne. Écrivain et journaliste, il défendit l'ultramontanisme avec la fougue d'un nouveau converti et soutint la dépendance absolue de l'État, qui n'est qu'un rouage de police, vis-à-vis de l'Église comme seule autorité.

 

PHILON lo le Juif, le plus célèbre représentant de la philos, juive-alexandrine. Né à Alexandrie 20 ou 30 ans av. C. d'une famille distinguée et de la race sacerdotale, il développa par de fortes études de brillantes facultés, et chercha à concilier en quelque mesure la philos. de Platon et les révélations des saints livres.

Vers l'an 42, à la snite d'une émeute, il fut envoyé à la téte d'une députation auprès de l'emp. Caligula, pour plaider la cause de ses compatriotes. Caligula les reçut grossièrement, au pas de course, et la mission échoua presque complètement. Philon f vers le milieu du siècle. Il a laissé de nombreux ouvrages exégétiques, philos, et politiques: une explication du Pen-tateuque, des notices biographiques sur Abraham, Joseph, Moïse; une étude sur la Création; des traités sur la Charité, la Pénitence; 5 livres sur la condition des Juifs sous Caligula; De la vie contemplative, de la Providence, De l'incorruptibilité du monde, Tout homme honnête a le droit d'être libre, etc. L'hist. de son ambassade a Rome s'est perdue. Éditions de Morel. Genève 1613;Mangey, Londres 1742; Tauchnitz, Leipzig 1831-1834, etc. Dans son système Dieu est l'Etre absolu, sans qualificatif possible, l'opposé du fini. La matière est éternelle, car, source de tout mal, elle ne peut procéder de Dieu. On ne saurait comprendre un rapport de Dieu avec le monde; mais comme ce monde est cependant plein de l'action de Dieu, il faut admettre son intervention puissante, laquelle se manifeste, selon Philon, comme selon Platon, par les types généraux, ou idées, qui se détachent de l'Être suprême pour se placer sur une portion de la matière et la modifier. En combinant ces idées de Platon avec la doctrine stoïcienne des lois du inonde ou de la nature, Philon arrivait à un Logos, l'idée des idées, résumant en lui toutes les idées, espèce d'image de Dieu, premier-né, fils aîné de Dieu, en qui toutes les âmes trouvent leur patrie, leur nourriture, leur manne du désert. Il est étrange que ces mots n'aient jamais éveillé chez lui la pensée que ce Logos ne serait autre que le Messie de l'A.-T. Quant à sa morale, elle ressort de l'idée qu'il se fait de la matière, et sous ce rapport elle est aussi platonicienne: puisque l'âme est comme emprisonnée dans la matière, elle doit chercher à s'en affranchir; c'est l'ascétisme qui la conduira à la contemplation de l'absolu. Quoique la doctrine de Philon s'éloigne beaucoup des enseignements de l'Écriture, il était persuadé que les sages de la Grèce ne tenaient leur sagesse que de Moïse et des prophètes. Sa méthode d'interprétation consistait à allégoriser les faits historiques, et c'est ainsi qu'il entendait concilier le judîaïsrae et l'esprit grec.

2° Philon de Carpathe, nommé comme évêque de Carpasia, en Chypre, dans une prétendue biographie d'Épi phanes, écrite soi-disant par un contemporain, l'év. Polybe, de Rhino-eorura, Égypte, mais probablement quelques siècles plus tard. Cette impossible légende le met en rapports avec l'emp. Arcadius de Rome. Comme il n'y a point en Chypre d'évêché Carpasia connu, on peut regarder ce Philon comme un personnage fictif. Suidas lui prête an Comment. latin sur le Cantique, mais ce travail est bien postérieur.

3° Philon Herennius, né l'an 24 à Bybloe, historien, a publ. une trad. grecque de l'Hiat. phénicienne, de Sanchoniaton, dont quelques fragments ont été conservés par Eusèbe.

 

PHILOPATRIS, dialogue satirique dans lequel le paganisme et le christianisme sont également tournés en ridicule. On Pavait attribué à Lucien, mais la mention de la Trinité et les allusions au monachisme ne permettent pas de le faire remonter si haut, et d'ailleurs il manque d'esprit. Il est probable qu'il fut composé sous Julien l'apostat.

 

PHILIPON, Jean, v. Jean 6<>.

 

PHILOMÈNE, v. Philumène.

 

PHILOSTORGE, auteur d'une Hist. ecclésia* que, allant du commencement des luttes ariennes jusqu'à Valentinien III, 423. Elle se divisait eu 2 parties et 12 livres. Cet ouvrage, malheureusement perdu, ne nous est connu que par quelques extraits donnés par Photius. Arien zélé, ses indications peuvent servir à contrôler les rapports des orthodoxes. L'auteur, né 368 en Cappadoce, était fils de l'arien Carterius; il se rendit à 20 ans à Constantinople pour y suivre ses études, + vers 425.

 

PHILOSTRATE, Flavius, de Lemnos, enseigna d'abord à Athènes, puis à Rome comme sophiste, dans le premier quart du 3°" siècle. Il a écrit une vie d'Apollonius de Tyane, espèce d'apologie enthousiaste et merveilleuse de ce néo-pythagoricien du 1er siècle, l'opposant au christianisme comme l'idéal de la sagesse. On a aussi de lui des Lettres, quelques autres ries de sophistes, uu Dialogue, des descriptions de Tableaux, etc. Publ. par Olearius 1709. H fut protégé par Julie, femme de Septime Sévère.

 

PHILOXÉNE, ou plutôt Xenaïas, de Tahal en Perse, nommé 485év. d'Hiérapolis par Pierre-le-Tanneur, patr. d'Antioche, qui changea son nom. Ses adversaires prétendent que c'était nn esclave non baptisé et qu'il avait été d'abord manichéen, mais ce n'est pas établi et d'ailleurs ne prouverait rien. Contraire au nestorianisme, il fut un des chefs du parti monophysite qui, protégé par l'emp. Anastase, combattit les décisions du conc. de Chalcédoine. Il entra en lutte avec le patr. Flavien d'Antioche, successeur de Pierre, qui paraissait pencher vers les décisions de ce concile, et il fut exilé par Justin Ier à Gangres en Cappadoce, où on le lit périr 522. Les jacobites le regardent comme nn martyr. La version syriaque de l'A. T., connue sous le nom de philoxènienne* porte son nom, parce qu'il la fit faire par le chorévéque Poly-carpe d'Hiérapolis 508 et qu'elle lui est dédiée;

publ. par White, Oxford 1778. Il a écrit encore d'autres ouvrages.

 

PHILUMÈNE ou Philomène. Des ossements forent trouvés en 1802 dans une des catacombes de Rome, et sur une pierre voisine cette inscription: Philumena pax tibt, avec une ancre, une palme, un fouet, un vase à recevoir te sang, etc. Transportés à Magnano, ces restes firent des miracles, et il n'en fallut pas davantage pour donner le jour à une légende; les visions de rigueur eurent lieu et le nouveau culte, celui de la « bienfaitrice du 19m« siècle » fut sanctionné par Grégoire XVI. — On connaît aussi les os d'une autre sainte du même nom, de l'époque de Totila, trouvés en 1527 dans la marche d'Ancône.

 

PHOCAS 1° jardinier â Sinope, f 303 martyr, dans la persécution dioclétienne, a remplacé Castor et Pollux comme patron des navigateurs. — 2<> Emp. grec 602-610. Cappadocien de naissance, exarque des centurions, il monta sur le trône à l'aide d'une révolte, fit trancher la tête;t Constantinople à son prédécesseur Maurice et à ses 6 fils, se montra cruel, rapaceet lâche sur le trône; perdit contre Chosroès plusieurs de ses provinces, et fut à son tour renversé par Héraclius et décapité. Il est connu par le chant de triomphe que Grégoire 1er entonna en son honneur; le premier il reconnut Rome comme chef-lieu de la chrétienté et le pape comme patriarche universel. — 3° Jean, moine de Crète, auteur vers 1150, d'un voyage en Palestine et à Jérusalem, assez important pour la géographie biblique.

 

PHOTIN lo v. Pothin. — 2<> Diacre d'An-cyre, sa ville natale, puis év. de Sirmium. Disciple de Marcellus, il développa encore son système et de manière à en faire une espèce de sa-bellianisme. Dans le Logos il ne voyait que la raison divine, celle de Dieu même, ayant dans le Christ sa plus haute manifestation. Il parlait aussi de Jésus dans un sens ébionitique. D'ailleurs il employait différentes formules, et ses contemporains lui reprochaient d'être peu clair. En somme il fut le grossier antécesseur de So-cin, niant la Trinité et la préexistence de Christ. Il fut condamné par les orthodoxes et par les ariens, à Milan, au 2m« conc. de Sirmium et à Antioche. Ses adhérents furent de nouveau condamnés à Aquilée 381. On ignore si les photiniens du 5mc siècle étaient aussi ses disciples.

 

PHOTIUS, né vers 815 à Constantinople, savant, poète, orateur, philologue, juriste, grammairien, théologien, mathématicien, génie universel, un des hommes les plus instruits et les plus éminents de son époque, avait servi l'emp. Michel comme son ambassadeur en Assyrie et comme secrétaire d'État, quand il fut appelé par l'empereur, quoique laïque et capitaine des gardes, à la dignité de patriarche, en remplacement d'Ignace déposé pour un sermon qui avait mécontenté la cour, 857. Photiusétait d'ailleurs avare, ambitieux, cassant, et trop humble serviteur de la couronne; il se montra passionné dans des circonstances qui auraient demandé plus de calme, et peut être considéré comme le principal auteur du grand schisme d'orient, v. Grecs. Ignace s'étant adressé au pape Nicolas I*r pour demander réparation, celui-ci qui se croyait le droit de décider en dernier ressort, cassa en 863 les décisions du conc. de Constantinople, où cependant avaient siégé 2 de ses légats, rétablit Ignace, punit ses légats et excommunia Photius. Photius répondit par une encyclique violente, insistant sur les différences dogmatiques et liturgiques des deux Églises, et dans uu concile tenu à Constantinople 867 il condamna le pape à son tour. Mais peu après il fut déposé par Basile-le-Macédonien, Ignace fut rétabli et le conc. de 869 annula les résolutions de celui de 867. A la mort d'Ignace, Photius était rentré en faveur, les deux patriarches ayant fait la paix; il fut rétabli sur son siège et Jean VIII fut obligé par politique de garder le silence. Deux nouveaux conciles 879 et 880, auxquels assistaient les légats du pape, annulèrent les décrets de celui de 869; les légats se laissèrent berner, et c'est en 882 seulement que le pape mieux informé intervint de nouveau et réexcommunia Photius. Léon-le-Philosophe étant monté sur le trône mit définitivement un terme à la carrière du patriarche; il le fit arrêter sous prétexte de haute trahison et enfermer 886 dans un couvent d'Arménie, où il + 890. Photius a laissé un grand nombre d'écrits; le plus complet est son Myriobiblos, ou Bibliothèque, qui renferme sous 280 titres des notices et des extraits d'une foule d'écrivains ecclésiastiques et d'auteurs que nous ne connaissons que par lui, Genève 1611, Berlin 1824; le Nomocanon, recueil des lois impériales et des canons des conciles, important pour l'étude du droit canon; un Lexique, des Lettres, et divers traités de théol. et de controverse, contre les latins, sur la Procession du Saint-Esprit, etc.

 

PIARISTES, pères, ou frères des écoles pieuses, ou Pauvres de la mère de Dieu, congrégation qui a pour 4m« vœu d'instruire gratuitement les enfants pauvres. Elle fut fondée par Joseph Calasanzio, né 1556 d'une famille noble d'Aragon, f 1648. Après avoir étudié la théol. à Lérida, Valence et Alcala, il entra dans les ordres malgré sa famille 1582, et occupa différents postes ecclésiastiques. En 1592 il vint à Rome, et en 1597, avec le concours de quelques prêtres, il eut l'idée de rassembler dans les rues les enfants pauvres et abandonnés, et de leur donner des leçons chez lui. Paul V en 1607 les organisa en une congrégation, qu'il appela de son nom, paulinienne, et Grégoire V la confirma «n 1625. Les intrigues des jésuites la réduisirent à n'être plus qu'un institut sous Innocent X et Alexandre VIL mais Clément IX les releva et Innocent XII leur accorda tous les privilèges des ordres mendiants. Ils ont un général nommé pour 6 ans, et des provinciaux; leur costume est noir, avec robe et manteau. On les trouve surtout en Italie, Espagne, Autriche et Pologne, où ils possèdent de nombreux collèges.

 

PIC de la Mirandole, v. Mirandole.

 

PICARDS, surnom donné quelquefois aux hussites par leurs ennemis; probablement par corruption du mot beghard* prononcé à l'allemande. On entendait aussi par là les frères et les sœurs du libre esprit qui trouvèrent en Bohême un refuge, mais qui, ayant dégénéré, furent cruellement persécutés par Ziska. *

 

PICOT, Pierre, né 29 janv. 1746 à Genève; après avoir fini ses études de théol., il visita la France, la Hollande et l'Angleterre, et revint dans son pays où il fut dix ans pasteur à Sati-gny, puis pasteur à la ville, et successivement prof, d'hist. ecclésiastique et de dogmatique, f 1822. Il était connu comme orateur et s'occupait volontiers de sciences naturelles et d'astronomie. Auteur de plusieurs sermons, dont un d'actions de grâces pour la Restauration de la rép. de Genève. Son fils Jean, né 6 avril 1777, auteur d'une Hist. de Genève, juriste et prof, d'histoire, avait aussi beaucoup de goût pour l'hist. naturelle, + 1864.

 

PICPUS, petit village des environs de Paris, qui a fini par faire partie du faubourg Saint-Antoine. En 1601 il était le siège d'une con-grég. du tiers-ordre de Saint-François, qui prit le nom d'ordre de Picpus, ou pénitents, ou tier-celins. En 1805 une nouvelle association s'y forma sous la direction du p. Coudrin, pour l'adoration perpétuelle du saint sacrement, l'enseignement de la jeunesse, l'éducation de jeunes prêtres et la propagation de la foi. Elle se procura une maison dans la rue Picpus à Paris et fut reconnue en 1817 par Pie VII. Après avoir fondé en France plusieurs séminaires, elle entreprit en 1825 l'œuvre des missions païennes, spécialement en Australie. Dans la même rue Picpus se trouve également une maison pour les femmes. Elles ont de nombreuses succursales. L'influence des jésuites y règne en maître.

 

PICTES et Scotsranciens habitants de laCa-lédonie; ils apparaissent dans l'histoire au 2"* siècle et jouent un certain rôle sous Sep-time Sévère. Ces deux tribus, presque toujours en guerre entre elles, ne s'unissaient que pour combattre les Bretons ou les Romains. Les Scots habitaient plutôt l'Irlande, les Pietés l'Écosse, mais ces derniers, souvent vaincus, finirent par décliner et cédèrent leurs monta-gnes aux vainqueurs. Le nom de Pietés, pirti, s'explique, suivant les uns, par l'habitude qu'ils auraient eue de se peindre le visage et le corps pour se donner une apparence plus effrayante; selon les autres, il dériverait du gaëlique pic-tioch, voleurs, nom que leur auraient donné les Bretons à cause de leurs habitudes de brigandage. Ils luttèrent pendant 4 siècles contre les Romains; ils eurent aussi à lutter contre Vor-tiger, roi des Bretons, qui avait appelé à son aide les Germains. L'Évangile leur fut apporté par des prisonniers qu'ils firent dans leurs guerres; quelques églises furent fondées, à Ossony par Kiaran, à Ardmore par Declan, mais en somme ils restèrent résolument hostiles à la nouvelle doctrine. Au 9me siècle Kenneth II, roi des Scots, extermina les Pietés à la bataille de Stirling; leur nom disparut, et celui de Scot-land resta seul.

 

PICTET, Bénédict, théologien réformé, un des représentants les plus distingués de l'orthodoxie genevoise; neveu de François Turret-tini, il naquit à Genève 30 mai 1655, et après y avoir achevé ses études, il fit suivant l'usage d? ses jeunes compatriotes, un voyage dans quelques universités étrangères et revint dans sa ville natale où il fut bientôt nommé pasteur, et en 1702 prof, de théol. dogmatique. Il avait dé cliné un appel qui lui avait été adressé de Leyde pour remplacer Spanheim. f 10 juin 1724. Ora teur, poète et savant, il était membre de l'Académie de Berlin. On a de lui. outre des cantiques devenus populaires, une cinquantaine d'ouvra ges sur des sujets religieux; on estime surtout son Traité contre l'indifférence des religions, sa Morale chrétienne 1697, Défense de la religion des protestants 1716, Lettres à un catholique 1717, Hist. de l'Église et du monde 1712, Annales des 12*0 et 13™ siècles, et en latin 7W logia christiana 1696, Medulla Theol. didact. W elench. 1711. Vie par E. de Budé.

 

PIE 1° év. de Rome, qui dut son nom à sa piété, 142-157. Il combattit les hérésies de Va-lentin et de Marcion. On a quelques lettres de lui

2o Pie II, Aeneas Sylvius Piccolomini, ne 1405 à Corsiguano (Pienza), cardinal 1436. pape 27 août 1457, + 1464. Il remplit diverse* missions politiques et, devenu pape, fit tout pour organiser contre les Turcs une croisade, qui ne réussit pas. D y invita le roi de France le duc de Bourgogne, la république de Venise, et il allait se mettre lui-même à la tête de l'expédition, quand il mourut à Ancône au moment de s'embarquer. Savant et doué des talents le* plus variés, il fut tout ensemble théologien, canoniste, diplomate, orateur, écrivain, historien, géographe et poète. Malheureusement cV tait un homme immoral et sans principes; il combattit de toutes ses forces les désirs d'une reformation qui surgissaient de partout, et il se montra infidèle en cela aux principes qu'il avait si vigoureusement soutenus au conc. de Bâle. li déclara excommunié de fait et d'avance tous ceux qui en appelleraient à un concile général, et il obtint de Louis XI la révocation de la Pragmatique sanction de Bourges. Il avait coutume de dire que l'on avait eu de bonnes raisons pour introduire le célibat des prêtres, mais qu'il y en aurait de plus fortes encore pour l'abolir. On a de lui une Description de l'Étal de l'Allemagne, une Histoire de l'empire sous Frédéric III, des Lettres, des Harangues, un roman d'Euryale et Lucrèce; il a collaboré à ses Mémoires, publiés par son secrétaire Gobel-lini.

3<> Pie III, Fr. Todeschini, ou Piccolomini, neveu du précédent par sa sœur, ne régna que 26 jours, 1503, entre Alex. VI et Jules II.

4° Pie IV, J.-Angelo Medici, ou Medichino, frère du marquis de Marignan, fut pape de 1559 à 1566. Ennemi juré des Caraffa, il abolit quel-ques-uus des édits de son prédécesseur Paul IV, dont il surpassa encore le règne en cruautés. Massacres en Calabre, à Rome et ailleurs; il fait construire un nouveau palais de l'inquisition. Guerre contre les Turcs. Le conc. de Trente se dissout assez expéditivement sous son règne 1563, et il en confirme les décisions, 26 janv. 1564, sans qu'elles soient généralement acceptées. Il autorise plusieurs petits ordres religieux, entre autres l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem. Il embellit Rome et crée l'imprimerie du Vatican. Palestrina compose sa Messe du pape Marcel.

50 Pie V; Michel Ghisleri, né à Basco 1504, dominicain, prieur de l'ordre dont il relève la discipline, élu pape 7 janv. 1565. Sévère et mélancolique, cruel et inexorable, son pontificat présenta en grand autant d'horreurs que la Révolution française. Il fut impitoyable pour les hérétiques et en livra un grand nombre au tribunal de l'inquisition; cet acharnement lui valut d'être canonisé en 1712 par Clément XI. Sa bulle In cœnâ Domini se lit chaque année à Rome à la Fête-Dieu. Il participa à l'armement de la flotte qui remporta la victoire de Lépante. f l«r mai 1572. Ses Lettres ont été publiées à Anvers 1640.

6® Pie VI, J.-Ange Braschi, né à Césène 1717, trésorier de la chambre apostoliqne sous Benoit XIV, cardinal sous Clément XIV, pape de 1775-1799. Il suivit une politique contraire à celle de son prédécesseur et protégea les jésuites. Il eut la satisfaction de voir sombrer le système d'opposition du marquis de Pombal, mais ce fut presque sou seul triomphe. Des orages fondirent sur lui de toutes parts; il en vint même de l'Autriche. Joseph II interdit les appels à Rome et la publication des bulles avant qu'il les eût approuvées; il exigea des évêques un serment qui les rendait indépendants du pape; il soumit les moines à sa puissance et les mit sous la loi commune; il supprima 7 à 800 couvents; il exigea du clergé des études plus sérieuses. Pie fit en 1782 un voyage inutile à Vienne et ne put rien obtenir. Les év. allemands forment un congrès antipapal, dont les conclusions sont connues sous le nom de Fondations d'Ems. En Italie même une réforme profonde est conçue sous les auspices de Léopold, duc de Toscane, et de l'év. de Pistoie, Scipion de Ricci. La mort de Joseph et l'élévation de Léopold son frère et successeur 1790, délivrèrent Pie VI de ce cauchemar de réformations. Mais à ce moment survint la Révolution française qui lui causa d'autres soucis. II désapprouva la constitution civile du clergé, favorisa les Austro-Russes, se vit enlever par Bonaparte Urbin, Ferrare, Bologne, Ancône;fut contraint de signer la paix avec la France à Tolentino 1797, paya 31 millions, fut dépouillé d'un grand nombre de tableaux de maîtres. Dépossédé de son siège par Berthier à la suite de l'émeute où périt Duphot, il fut enlevé de Rome, conduit à Florence, puis en France, où on le promena de ville en ville. Il montra dans son malheur une force d'âme remarquable et finit par mourir 29 août 1799 à Valence, où l'on voit encore sa chambre et son mausolée. Bourgoing l'a attaqué dans ses Mémoires, l'abbé Blanchard l'a défendu dans son Précis historique, 1800.

7o Pie VII; Bamabé Chiaramonti, né à Césène 1740, bénédictin, év. de Tivoli 1780, cardinal-évêque d'Imola 1785, élu pape à Venise après un long conclave 1800; homme tranquille, ferme et versé dans le droit canon. Il réorganisa de son mieux les États romains, chercha à réconcilier la France avec sa cour, signa le 15 juill. 1801 un concordat religieux avec Bonaparte, et obtint la reconnaissance de la religion catholique comme celle de la majorité des Français; le premier consul se réservait le droit de nommer les évêques, mais le pape avait à les confirmer. En 1804 Pie VII sacra Napoléon à Paris, mais il eut bientôt avec lui des démêlés, il maintint les principes hiérarchiques et refusa de céder à diverses exigences de l'empereur; son territoire fut occupé; il excommunia Napoléon 1809 qui répondit en le faisant arrêter par le général Miollis et conduire à Savone, puis à Fontainebleau, où il subit une dure captivité. II recouvra la liberté en 1814 et rétablit aussitôt l'ordre des jésuites. Il eut l'heureuse et singulière bonne fortune de pouvoir bientôt offrir dans Rome un asile à la famille de son persécuteur. f 21 août 1823. Vie par Beauchamp, (lohen, et Artaud.

8° Pie VIII; Saverion (Xavier) Castiglione, né à Cingoli (Ét. de l'Église) 1761, év. de Fras-cati, élu 31 mars 1829, régna un an et 8 mois. Sous son régne eut lieu la révolution de juillet; il reconnut Louis-Philippe comme roi, non des Français, mais de France et de Navarre, f 1er déc. 1830. Vie par Artaud.

9<> Pie IX, comte Jean-Marie-Mastaï Feretti, né 13 mai 1792 à Sinigaglia, étudia 1803-1809 au collège Scolopi à Volterra. Ne pouvant entrer à l'armée à cause de crises nerveuses, on le destina à l'Église. Guéri de son mal par l'imposition des mains d'un prêtre, il prit la résolution de se vouer aux œuvres de miséricorde, et il s'affermit encore dans cette voie à la suite d'un grand danger qu'il courut au Chili et dont il fut préservé, 1823. A son retour il se distingua dans l'administration de plusieurs établissements de bienfaisance, fut directeur de l'hôpital Saint-Michel, archev. de Spolète en 1827, év. d'imola 1833, cardinal 1840. Après la mort de Grégoire XVI, il fut élu pape à sa place dans un conclave de 2 jours, et monta 16 juillet 1846 sur le trône pontifical. Ses débuts, d'un libéralisme éclairé, excitèrent un enthousiasme général; réforme des abus, amnistie, constitution municipale, amélioration de la justice et de l'instruction publique, facilités données à la presse, protestation contre l'occupation de Fer-rare par les Autrichiens, tout se réunit pour faire voir en lui un pape libéral et national. Mais l'année 1848 fit évanouir le rêve. Il avait donné un peu par force une constitution à son peuple, 14 mars 1848; il avait chassé les jésuites, mais il résista quand on voulut l'entraîner dans une guerre contre l'Autriche, et après l'assassinat de Rossi, 15 nov. 1848, il s'enfuit à Ga'éte. Ce fut la fin de son pouvoir temporel. II revint sans doute en 1850, grâce à l'occupation française, et il put conserver l'ombre du pouvoir jusqu'au moment où les troupes italiennes, sous la pression de l'opinion publique, entrèrent dans Rome et firent de Victor-Emmanuel le roi d'Italie avec Rome pour capitale, 20 sept. 1870. Mais ce ne fut plus qu'une apparence de règne, protégé mais réglé par les baïonnettes étrangères. Ce fut, sous le ministère d'Antonelli, une violente réaction, mais ce fut aussi un émiette-ment; la Romagne s'affranchit en 1859, et après Castelfidardo l'Ombrie et les Marches. Le roi étant entré à Rome 2 juill. 1871, avait assuré à Pie IX par la Loi des Garanties ses droits de souveraineté, sa pleine liberté de souverain pontife, le Vatican avec des possessions à Rome même et hors de la ville, enfin une dotation de plus de 3 millions de francs. Mais ce que le prince temporel perdait, le souverain spirituel

le regagnait largement, et il ne cessa d'afficher les vieilles prétentions autoritaires qui se trouvaient déjà contenues dans sa Ire encyclique. En 1848 il obtenait de la Russie nn concordat; en 1850 il essayait en Angleterre et en Hollande de réorganiser l'épiscopat; en 1851 il traitait avec la Toscane et l'Espagne; plus tard encore avec Costa-Rica, Guatimala, l'Autriche, le Wurtemberg, Baden, etc. Plusieurs de ses succès furent de courte durée, ainsi en Russie à cause de l'insurrection polonaise, en Espagne à cause de la chute d'Isabelle. La France fut de tous ses alliés le plus fidèle, mais Napoléon III ! et Eugénie ne sauvèrent pas le pape, et le pape ne sauva ni l'empire, ni son impérial filleul. La partie la plus importante du pontificat de Pie IX est dans le rôle qu'il a joué comme chef spirituel de son Église, et dans les changements qu'il a décrétés quant au dogme et quant à l'administration ecclésiastique. Il suffit de rappeler la proclamation de l'Immaculée Conception 1854, l'assemblée des évêques en 1867, le conc. dn Vatican 1869-1870, de nombreuses canonisations des 26 martyrs japonais, Marie Alacoqne, Fr.-Marie des cinq plaies, etc.); enfin l'Encyclique et le Syllabus, véritable défi jeté soit aux idées modernes, soit aux pouvoirs civils, et qui prouve l'influence fatale exercée par les jésuites sur cet esprit faible et vaniteux, mais qui, laisse à ses propres inspirations, serait resté jusqu'à la fin patriote et libéral. S'étant constitué lui-même prisonnier dans le Vatican, avec les jésuites pour geôliers, il réalisa celte parole de Massimo d'Azeglio: « Il y a des gens qui ont la manie du suicide. » f 7 févr. 1878 d'hydropisie.

 

PIÉMONT, v. Sardaigne, et Vaudois.

 

PIERIUS, prêtre d'Alexandrie, de la fin da 3m« siècle, mentionné par Photius comme chef de l'école des catéchistes, mais par Eusèbe seulement comme un des hommes les plus distingués et les plus pieux de cette église. Il survécut aux persécutions dioclétiennes. Photius le fait mourir martyr en même temps que son frère Isidore, mais c'est une légende postérieure. D'après saint Jérôme il aurait passé à Rome les dernières années de sa vie, et la date de sa mort serait inconnue. Une église avait été élevée à Alexandrie sous son vocable. D'après Jérôme et Photius il a écrit de nombreux ouvrages, entre autres des Comment, sur Luc, 1 Cor.. Osée, etc. On l'appelait Origène-le-jeune, et quelques-uns lui reprochent des erreurs origé-nistes. Photius dit qu'il fat le maître de Pam-phile, qui écrivit l'apologie d'Origène dans sa prison de Césarée.

 

PIERRE lo Saint Pierre, apôtre, envisage par quelques auteurs comme le premier pape, v. Dict. de la Bible.

2o Denier de Saint-Pierre, contribution que plusieurs États du nord s'étaient habitués à payer au siège romain. La plus ancienne mention que Ton en connaisse, date d'Ina de Wessex 728; on trouve ensuite Offa de Mercie 796. Ethel-wulf 895, enfin Édouard d'Angleterre 901-924, qui en fit une institution régulière. Le chiffre en était calculé à raison d'un denier par famille; il fut plus tard fixé au total de 299 marcs. Les efforts des papes pour transformer cette contribution en impôt échouèrent. Le Danemark, la Suède, la Pologne, la Norwège, l'Islande, payèrent également leur denier à partir du 12m« siècle, mais la France, l'Espagne, la Prusse refusèrent de s'y soumettre, et la Réformation y mit fin partout. Depuis 1859, grâce à des circonstances et à des besoins nouveaux, l'institution a repris vie, mais sous la forme de dons volontaires et purement individuels, sans que les États interviennent comme tels. Ce sont ordinairement des caravanes de pèlerins qui le portent à Rome; les sommes transmises sont quelquefois considérables.

3° P. de Lampsacus, Mysie, jeune martyr mis à mort dans la persécution de Décius, parce qu'il ne voulut pas sacrifier à Vénus.

4° P. d'Alexandrie, fit excommunier Meletius de Lycopolis, q. v., soit pour usurpation de fonctions, soit à cause de son attitude trop sévère contre les lapri. Lui-même périt 311 dans la persécution de Maximin, d'après Eusèbe; de Dioctétien, d'après Épiphanes. On a conservé un traité de lui sur la Pénitence; d'autres écrits sont douteux, entre autres une lettre à son troupeau sur les usurpations de Melétius.

5° P. Termite, d'Amiens, connu par le zèle fanatique avec lequel il organisa et prêcha la l*e croisade. Le jésuite Oeltreman a fait de sa vie un roman; Sybel a réduit à de plus modestes proportions une histoire qui a presque tous les caractères de la légende. Il parait que le premier pèlerinage à Jérusalem 1093, la vision dans l'église de la résurrection, la lettre du patr. Siméon, le discours à Urbain II, la tournée dans les pays de l'occident pour soulever les populations, n'ont existé que dans l'imagination fertile de quelques écrivains postérieurs, surtout de moines désireux d'enlever aux papes et de revendiquer pour leur ordre l'honneur d'avoir provoqué ces belles entreprises. Guillaume de Tyr, qui est la principale source pour l'hist. des croisades, ne sait rien de cet ermite, sinon qu'il était une persona contemtibilis, dont le sort fut celui de tous ces autres aventuriers. C'est le pape seul qui parla au Conc. de Cler-mont et qui enleva la croisade, 1095. Mais la légende même ne fait pas grand honneur à l'ermite, car elle le fait partir sans argent ni vivres, conduisant de nombreuses bandes, avec Gauthier-sans-Avoir, pillant pour vivre, massacrant les juifs sur leur chemin, ravageant la Hongrie, la Bulgarie et l'Asie Mineure, et perdant en route les neuf dixièmes de ses hommes, f 1115 à Neu-Moûtiers, diocèse de Liège, s'il n'est pas mort pendant l'expédition, ce qu'on ignore.

6° P. du mont Cassin, diacre, savant bénédictin, d'une famille noble de Rome; né vers 1100, il entra à 15 ans au couvent du mont Cassin, dont il prit à cœur les intérêts contre le pape, et dont il plaida la cause avec talent devant Lothaire, pendant le séjour de celui-ci au sud de l'Italie 1138. Nommé la même année cartulaire et chapelain de l'empire, il fut en 1159 nommé administrateur du mont Cassin par Alexandre III, et mourut peu de temps après. Ses nombreux ouvrages ont presque tous pour objet l'hist. de son couvent, ses chroniques, ses hommes illustres, des morts édifiantes, les Lieux saints, etc.

7° P.-le-Vénérable, ou de Cluny. Il s'appelait Maurice de Montboissier et était fils d'un gentilhomme auvergnat. Né 1094, il fut voué au couvent par sa mère qui, après la mort de son mari, s'était elle-même faite religieuse. 11 fit de bonnes études théologiques à l'abbaye de Soucilanges, fut successivement prieur des abbayes de Vézelay et de Domaine. Élu en 1122 abbé de Cluny, il fut un des derniers grands représentants de son ordre, à une époque où Bernard de Clairvaux donnait à celui des cisterciens un relief qui faisait pâlir tous les autres monastères de Saint-Bernon. Il rétablit la discipline, qui s'était un peu relâchée sous son prédécesseur Pontius, et restaura les études théol. des moines. Il revisa ses statuts en 1146, et à Noël 1157. Protecteur d'Abélard dans des circonstances difficiles, il mériterait pour ce seul fait, dit Lamartine, qu'on lui élevât une statue. II se fit traduire le Coran de l'arabe lors d'un voyage en Espagne 1141, pour pouvoir mieux réfuter les Sarrasins. Dans son rapport contre Bruys il cherche au moins à être exact et impartial. Ses Lettres, comme son livre Des miracles de son temps, sont précieux à consulter et font honneur à sa mémoire, car tout en partageant les superstitions et les préjugés de la vie monacale, il sut s'élever au-dessus d'un horizon restreint, et respecter ses adversaires.

8° P. de Celle, abbé de Moutier-la-Celle, faubourg de Troyes 1150, de Saint-Rémi à Reims 1162, év. de Chartres 1181, f 1183. Auteur de comment, mystiques sur la Bible, et de Lettres au pape et k différents princes et évêques, où il émet sur les questions religieuses des idées indépendantes et pleines de justesse; publ. par Sirmond, Paris 1613.

9<> P. chanoine de Saint-Victor, mystique, professait le culte spirituel, et a combattu le caractère extérieur des cérémonies ecclésiastiques, l'abus des indulgences et les stériles disputes de mots des scolastiques. f 1197 au couvent cistercien de Long-Port, près Soissons. Auteur d'un traité de morale intitulé Verbum abbreviatum. Son plus célèbre disciple fut Ful-eon de Neuilly.

10° P.Collivacinusde Bénévent, appelé aussi Morra, prof, de droit canon à Bologne, puis secrétaire d'Innocent III, publia 1210 les décrétales appartenant aux onze premières années de ce pape, en utilisant la compilation romaine de Bernard de Compostelle. Ce recueil fut agréé par l'univ. de Bologne et reçut le titre de compilation: la étant le Décret de Gratien, et la 2m* celle de Jean Galensis.

Ho P. de Blois, ou Blesensis; né vers 1140, disciple de Jean de Salisbury, étudia à Paris et à Bologne, fut nommé en 1167 précépteur et secrétaire du jeune roi Guillaume II de Sicile, mais il abandonna bientôt cette place par crainte du poison ou du poignard italien. Il s'enfuit en France, et accepta en 1168 une place auprès de Henri II d'Angleterre. Là il ne tint pas longtemps non plus, et malgré la protection du roi il craignit d'être compromis comme complice de l'assassinat de Becket. Devenu chancelier de Richard, archev. de Cantorbéry, il passa à Bath comme archidiacre, toucha de riches émoluments, fit remplir ses fonctions par un vicaire, encourut la disgrâce de son évéque et dut prendre à Londres un poste moins bien rétribué, f 1200. Ses Lettres, pleines de verve et de fines observations sur les nombreux abus de l'Égl. et de l'État, ont une vraie valeur. Il a écrit aussi quelques ouvrages historiques.

12° P. de Vérone, martyr, patron de l'Inquisition espagnole, dominicain, prédicateur et inquisiteur; il persécuta avec la plus féroce cruauté les cathares de Lombardie (ses parents en étaient), et haï de tous, il finit par être assassiné 1252 près de Côme.

13° P. de Pisis, de son vrai non Gambacorti, fondateur de l'ordre des ermites de Saint-Jérô-me. Né 1355 à Pise, d'une bonne famille, il se retira en 1377 dans les solitudes du Montebello, Ombrie; il s'y bâtit une église et un ermitage, où sa congrégation se réunit, f 1435. Canonisé.

14° P. d'Andlo, docteur et prof, de droit canon à Bâle, écrivit vers 1460, un traité dans lequel il étudie le droit germanique en se plaçant sur le terrain de la tradition. D'après lui l'empire allemand n'est que le continuateur de l'ancien emp. romain; tous les princes doivent être soumis à l'empereur, et l'empereur au pape qui lui délègue ses pouvoirs de la part de Dieu. Ce curieux ouvrage a pour titre De Imperio ro-mano, ou Libellas de Cmsarum monarchi4, ad

Fridericnm. Impr. Strasbourg 1603; mss. à Paris.

15° P. Bernardin, florentin, d'extraction vulgaire, qui s'attacha à Savonarole et continua après sa mort de réunir ses adhérents. Il défendait la participation aux sacrements dvune église qui marche à sa ruine, ordonnait la vie commune. la prière assidue et la pauvreté dans les vêtements. Traqué par les autorités civiles et ecclésiastiques, il se réfugia avec les siens chez le Pic de la Mirandoie, mais il finit par être pris et brûlé.

16° P. Moglianus, cél. prédicateur de l'ordre des minorités en Italie; f 1489 à Camerino.

17® P. martyr, d'Arona, sur le lac Majeur, né 1455, prof, à Salamanque 1487, très estimé, prit part aux guerres contre les Maures et em -brassa 1505 l'état ecclésiastique. Prieur de Grenade, il fut employé par Isabelle dans plusieurs négociations importantes, f 1525. Il a raconté sa mission au Caire dans son livre: De legatiome babylonicâ. Il a écrit aussi des Lettres sur les affaires d'Espagne, Alcala 1530.

18° P. d'Alcantara, né 1499, étudia à Salamanque et entra à 16 ans chez les franciscains; en 1519 il était prieur au couvent de Badajoz, prêtre en 1524. Après avoir vécu en solitaire pendant quelques années, il devint supérieur général de son ordre, pour l'Estramadure, qu'il réforma 1538-1540, et après avoir fait un séjour dans un couvent réformé de Lisbonne, il fonda avec l'autorisation de Jules III une congrég. particulière de la stricte observance, 1555. C'est dans le même esprit qu'il assista sainte Thérèse pour la réforme des carmélites, f 1562. Canonisé 1569. Il a publié un travail sur La prière et la méditation, qui eut un grand succès. On lai en prête, mais à tort, un autre sur La paix de l'âme.

— Pour les nombreux Pierre qui ne sont pas compris dans cet article, v. Aichspalt, d'Ailly, Benoît XIII, Chrysologue, Comestor, Damien, Lombard, Mogilas, Mongus, Nolasque, Otiri, Valdo, Vermigli, etc.

 

PIÉTISTES, Piétisme. Historiquement et vulgairement on désigne sous ce nom, comme lin* dique son étymologie, une tendance religieuse et des personnes dont la vie présente d'une manière spéciale les caractères ou les apparentes de la piété. Quoiqu'il n'ait rien d'injurieux en lui-même, il se prend presque toujours en mauvaise part et avec une nuance d'ironie, comme la plupart des noms qui servent à désigner une église ou une doctrine de minorité; ainsi huguenot, parpaillot, vache à Colas, méthodiste, etc. Le nom même de chrétien semble à l'origine avoir été donné aux fidèles par les ennemis du christianisme. C'est à l'époque de Spener, à ses CoUegia pietatis, réunions de piété, qu'il faut remonter pour avoir le sens vrai du mot. Une orthodoxie sèche et morte avait remplacé dans l'Église la foi vivante; les réunions de Spener furent une réaction, une protestation contre ce manque de vie, contre ce formalisme sans piété, et les ennemis eurent bien vite fait de trouver le mot qui devait ridiculiser les membres des petites assemblées. Mais, comme il arrive d'ordinaire en pareil cas, on confondit avec ou sans intention les bons et les mauvais, et surtout on remarqua davantage les mauvais, ceux qui compromettaient par leur conduite leur profession de foi chrétienne, et l'on s'habitua à mettre sur le compte de l'hypocrisie ce qui n'était peut-être que de l'inconséquence. Il faut ajouter aussi que souvent des personnes réellement pieuses ont compromis, par des exagérations, par petitesse d'esprit, ou par une aigreur peu chrétienne dans leurs jugements, le mot même de piété qui se résume pour la grande masse dans les simples notions de largeur et de charité. L'ancien piétisme accentuait la séparation de l'Église et du monde au point de condamner tout ce qui ne tendait pas directement à développer la communion intime avec Dieu, ainsi les arts et les sciences; il aimait les petites assemblées et tombait volontiers dans le sentimentalisme. Le piétisme moderne a été au contraire une réaction contre le rationalisme, et il a eu quelque chose de moins efféminé, de plus militant. Il n'a ni lieu de naissance, ni date précise, mais il est né, après les négations du 18me siècle et sur les ruines fumantes de la révolution, du besoin de croire et de s'élever des choses visibles vers les choses invisibles. Il a paru à la fois dans presque toutes les Églises des différents pays protestants, et il s'est fait connaître aussitôt par ses œuvres missionnaires et par ses œuvres de miséricorde. Le nom de piétiste a été peu à peu abandonné, comme venant de la méditative Allemagne, et remplacé par celui de méthodiste qui rappelle davantage l'influence anglaise sons laquelle, à tort cependant, on lui reproche de s'être développé.

 

PIGHIUS, Albert, de Kampen sur l'Yssel, né vers 1490, mathématicien et astronome, puis théologien, prof, à Louvain et à Cologne, accompagna Adrien VI en Italie, et fut employé par lui dans diverses missions, p. ex. à Worms et à Ratisbonne. f 24 déc. 1543 prévôt d'Utrecht. Sou principal ouvrage est son: Affirmation de la hiérarchie ecclés. 1538. Il a écrit aussi, contre les protestants, sur La grâce et le libre arbitre; les cathol. eux-mêmes ne le regardent pas comme très orthodoxe.

 

PILET, Jean-Alexandre-Samuel, né 15 sept. 1797 à Yrerdon, f 5 avril 1865 à Genève. Il étudia à Lausanne; consacré en 1821, il fut successivement principal du collège de Morges, pasteur & Francfort s. Mein 1828-1835, pasteur à Arzier sur Nyon, enfin depuis 1836 pasteur et prof, de théol. à l'Oratoire à Genève. Orthodoxe et national décidé, il resta touj. lui-même et n'abdiqua aucune de ses libertés, ni quant à la critique biblique et historique, ni quant à ses rapports avec les autres églises. Comme son enseignement, sa prédication était nourrie, élevée, pleine de fraîcheur. Sous une apparence bonhomme, et même un peu lourde, il était pétillant d'esprit, et sa conversation était assaisonnée de sel avec grâce. Auteur de quelques sermons et discours, et d'un petit écrit sur la Communion; il a laissé plus de 300 discours à la Biblioth. de l'Éc. de théologie.

 

PINYTUS, év. de Cnosse, Crète, contemporain de Denys de Corinthe. Eusèbe donne des extraits de leur correspondance, d'après lesquels Pinytus recommande les principes de l'ascétisme comme moyen de sanctification.

 

PIONIUS, prêtre de Smyme, martyrisé sous Décius, ou sous Marc-Aurèle, avec Sabine, Ma-cedonia et d'autres prêtres.

 

PIPER, Ch.-Phil.-Ferdinand, né 1811 à Stral-sund, répétiteur de théol. à Gôttingue 1833-1836, fixé en 1840 à Berlin, prof, en 1842, Dr théol. en 1847, et depuis 1849 fondateur et directeur du musée d'antiquités chrétiennes. Il a beaucoup écrit sur les questions d'archéologie* et publié de nombreux et curieux calendriers et almanachs d'un intérêt général. Son principal ouvrage est l'Introd. à la théologie monumentale, Gotha 1867.

 

PIRKE ABOTH (hébr. chapitres des pères), une des subdivisions du 4®e Séder, ou livre, de la Mishna. Ce traité, divisé lui-même en 6 chapitres, contient les maximes des pères qui depuis Moïse ont conservé les traditions de la loi orale; il va de Siméon-le-Juste à Jéhuda-le-Saint. De beaucoup le meilleur des traités du Talmud.

 

PIRKHEIMER, Vilibald, né 1470 àEichstâdt, d'une famille patricienne de Nuremberg, reçut une éducation excellente, fit le service militaire sous les auspices de l'év. d'Eichstâdt, étudia ensuite à Padoue et à Pise le droit, la théol., les mathématiques et l'histoire; occupa une place distinguée dans les conseils de sa ville natale, fut nommé général de l'empire et fit contre les Suisses une expédition, qu'il a racontée lui-même. Savant et littérateur, il a traduit Grégoire de Naziance et Nilus, édité Fulgence de Ruspe, et publié divers écrits historiques et politiques. Sa riche bibliothèque et ses nombreuses relations faisaient de lui le centre d'un mouvement intellectuel et littéraire et l'un des chefs de l'école de Reuchlin. Il salua avec joie l'apparition de Luther, reçut le réformateur dans sa maison de Nuremberg, et réussit à détourner l'excommunication dont il fut menacé pour ce fait. En 1524 il tenait encore pour Luther et la Réforme, mais il s'en détourna peu à peu, soit qu'il trouvât que Luther allait trop loin, soit que sa sœur et sa fille qui étaient au couvent aient exercé sur lui une certaine influence. En 1529 il écrivit assez vivement contre la doctrine d'OEcolampade sur la Cène, f 1530. Ses œuvres et ses lettres ont été publ. Francfort 1610. On dit beaucoup de bien de sa sœur Cha-ritas, sur laquelle ont paru diverses notices.

 

PIRMINIUS, ou Pirmin, abbé du couvent de Melci (Metz, ou Meaux, ou Mels près de Saint-Gall ? ou plus probablement Meltesheim, duché de Deux-Ponts); se rendit à la demande de quelques chrétiens, et avec l'appui de Charles Martel, sur les bords du lac de Constance, pour en évangéliser les populations encore païennes, 724. L'év. lui fit obtenir l'Ile de Owa-Augia, auj. Reichenau, pour y bâtir une église et un couvent; il la défricha et changea ce désert marécageux en un charmant jardin. Mais dès 727 il en fut chassé par le duc Théobald, qui l'accusait d'être un partisan du roi des Francs» son ennemi, et Firmin, laissant le vaillant Heddo pour le remplacer, se rendit en Alsace, dans le Brisgau et en Suisse, où il fonda de nombreux couvents, Pfeffers, etc. L'un des derniers fut celui de Hornbach près Deux-Ponts, où il eut la joie, avant de mourir, de recevoir son vieil ami et collaborateur Boniface. f 3 nov. 753. Il a laissé un petit Ltbellus abbatis Pirminii de $ing. libriê canonicis, étude pratique sur les livres du N. T.

 

PISCATOR (allem. Fischer) né 27 mars 1546 à Strasbourg, aidé dans ses études par le pasteur Thomas, obtint ses grades en 1567, et entra dans l'enseignement à Strasbourg et à Heidelberg. Mais Andreâ et Marbach le rendirent suspect, et il dut abandonner différents postes, jusqu'au moment où il fut appelé vers 1581 dans la nouvelle univ. réformée de Herborn, dont il fit la fortune et la réputation, avec son collègue Olevien, et où il resta jusqu'à sa f 26 juill. 1626. Parmi ses nombreux ouvrages on remarque surtout sa trad. de la Bible 1602 et 1603, plusieurs fois réimpr. avec notes; ses Comment, et des dissertations sur la Cène, la prédestination et différents sujets dogmatiques. Les synodes de Gap et de La Rochelle lui ont reproché sa théorie de l'obéissance active de Christ comme diminuant la doctrine de la mort expiatoire. Cependant la plupart des théol. réformés sont restés en correspondance avec lui, entre autres Bèze, et d'autres l'ont franchement défendu: ainsi Caméron, Alting, Blondel, Cappel, Parâus.

 

PISE, ville célèbre par ses conquêtes, son commerce et les luttes qu'elle soutint comme gibeline contre les républ. guelfes de l'Italie; évêché au 2me siècle, archev. en 1117; patrie d'Eugène IU, d'Ugolin, de Galilée (?) et des architectes Jean et Nicolas de Pise. Il s'y tint du 25 mars au 7 août 1409 un conc. écuméniqae destiné à mettre fin au grand schisme qui depuis 1378 désolait la papauté. Il fut convoqué sur la demande des (Ordinaux des deux papes rivaux, Grégoire XII et Benoit XIII, réuni* à Livourne et à Pise; le chancelier Gerson et Pierre d'Ailly poussèrent activement à sa convocation. Malgré le préavis de l'emp. Rupert du Palatinat en faveur de Grégoire, l'assemblée déposa les deux papes dans sa session du 5 juin, et dans celle du 26 les remplaça par Alexandre V, croyant à la parole qu'il avait donné*1 de ne pas clore le concile avant qu'il eût fait quelque chose pour la réforme de l'Église. Il trompa l'attente de ses électeurs, brusqua la clôture, mécontenta tout le monde, et il eu résulta qu'au lieu d'un pape, l'Église en eut trois. Quelques auteurs nient que ce concile ait été écuménique, parce qu'il ne fut pas convoqué par un pape. — Un autre concile eut lieu en 1511, convoqué par Louis XH et Maximilien. mais sans l'assentiment de Jules II; de Pise il fut successivement transféré à Milan, Asti el Lyon; sans importance.

 

PISTOIE. Un concile provincial ou diocésain se réunit du 18 au 28 sept. 1786 dans cette ville de Toscane, sous les auspices de son évé-que Scipion de Ricci, pour examiner un plan de réorganisation de l'Église en 57 articles, que le grand-duc Léopold, d'accord avec son fr. Joseph II de Vienne, avait élaboré pour améliorer l'état de l'Égl. catholique. Par une circulaire du 26 janvier, il l'avait soumis à l'approbation des évêques, mais la plupart l'avaient repoussé. Celui de Pistoie et son synode l'approuvèrent et allèrent même plus loin dans la voie des réformes; ils travaillèrent dans l'esprit du gallicanisme et du jansénisme, opposant, même en matière de foi, l'autorité des évêques et de> prêtres au pouvoir absolu du pape, réclamant le culte en langue vulgaire, débarrassant l'absolution et la pénitence des abus et% des superstitions qui les déshonoraient, réduisant à un seul tous les ordres religieux, supprimant te vœux éternels, et réclamant un concile national. Ce concile fut en effet convoqué à Florence par le grand-duc, 23 avril 1787, mais il rejeta toutes les réformes proposées, et le duc, san> s'obstiner et sans rien céder, décida que chaque évêque, même Ricci, resterait le maitredan* son diocèse. Malheureusement le successeur d? Léopold suivit une politique contraire, et w? bulle du pape du 28 août 1794 condamna 85 propositions du synode de Pistoie.

 

PISTORIUS (Beckei-, boulanger) lo Jean, curé (le Saint-Jean, puis pasteur et surintendant luthérien k Nidda, Hesse; homme paisible, prit part avec Bucer et Mélanchthon aux conférences de Ratisbonne 1541 et 1546, et k celles de Worms 1547. Il travailla aussi k établir la Réforme dans le diocèse de Cologne 1544. — 2<> Son (ils Jean, né 4 févr. 1546 k Nidda, étudia la médecine, le droit et la théol., mais finit en 1588 par se faire catholique. Il avait amené au protestantisme le margrave Ernest-Frédéric; il travailla ensuite avec non moins de succès k amener au catholicisme le margrave Jacob, et publia pour justifier cette conversion et la sienne propre un Theorema de fidei christ, mensurâ. Chanoine k Constance, puis doyen du chapitre de Breslau, il devint conseiller de Rodolphe II, et f 1608. Il a écrit sur la Pologne, l'Allemagne, l'Espagne et la Hongrie. — 3* Conrad, né à Brunswick, pasteur surintendant k Gtistrow 1562, renvoyé par le duc Ulrich de Mecklem-bourg, vécut quelque temps k Rostock, Anvers et Vienne, fut nommé surintendant k Hildesheim, et de nouveau congédié, f 1588 à Brunswick.

 

PITHOU, deux frères, l'un et l'autre savants canonistes. 1° Pierre, né 1 nov. 1539 k Troyes, étudia le droit sous Cujas, dont il resta l'ami, fut reçu avocat k 21 ans, mais ne fut pas admis à pratiquer, parce qu'il était protestant; il vint k Sedan, où il rédigea des lois k la demande du duc de Bouillon, fit un séjour k Bâle, revint en France en 1570, faillit périr massacré k laSaint-Barthélemy et se décida peu après k abjurer. Il fut successivement bailli de Tonnerre, procureur à la chambre temporaire de Guyenne, et enfin procureur général au parlement de Paris. 11 nov. 1596 de la peste. 11 a concouru k la rédaction de la Satire Ménippée. On lui doit aussi un Mémoire aux évêques, destiné k leur prouver qu'ils n'ont pas besoin du pape pour relever Henri IV de son excommunication; la publication du Corpus juris, les Libertés de l'Égl. gallic., des ouvrages de droit et des éditions de classiques latins. — 2° François, né 1543, aussi ami et disciple de Cujas, abjura également 1575, et devint avocat au parlement de Paris, + 1607; collaborateur de son fr. pour plusieurs de ses ouvrages.

 

PLACET, autorisation donnée par l'État de promulguer certaines lois ou communications de l'autorité ecclésiastique. Ce droit de permettre ou d'interdire rrtnonte en fait aux luttes de Philippe-le-Bel et de Louis de Bavière contre les prétentions des papes. En droit il ne peut exister que lorsque les 2 pouvoirs sont distincts et indépendants; c'est une sorte de convention, acceptée ou imposée, par mesure de précaution. Dès le 14®e siècle les lois en Espagne, Portugal, France, Belgique et Naples, défendaient la pu* blication d'aucune bulle du pape sans autorisation préalable. En 1594 la chose était reconnue partout comme de droit coutumier. L'Égl. catholique s'y est soumise parce qu'elle ne pouvait faire autrement, mais elle a touj. protesté, et elle a cherché k s'affranchir, parfois en l'éludant, de cette limitation imposée k sa puissance. Au fond cette garantie de l'État, aussi bien que l'appel comme d'abus, a été souvent illusoire, et depuis que la liberté de la presse existe et permet toutes les publications, il importe peu au clergé de pouvoir lire ses circulaires en chaire; il a d'autres moyens de les faire connaître. Aussi le placet n'est-il plus guère auj. qu'une formalité, un souvenir.

 

PLACIDE, né k Rome, élevé par saint Benoit, devenu abbé d'un couvent près de Messine, fut surpris et massacré par des pirates, ainsi que ses compagnons, 546; probablement une légende.

 

PLANCK 1* Gottlieb-Jacob, né 15 nov. 1751, l'aîné des 16 enfants du greffier de Murtingen sur le Necker; élève de Tubingue, il occupa différents postes, notamment une place de pasteur k Stuttgard 1780, et finit par être nommé prof, de théol. k Gftttingue, où il fut comblé d'honneurs académiques, ecclésiastiques et autres. f 31 août 1833. II a écrit de nombreux volumes sur l'hist. de l'Église, en particulier sur le développement du dogme dans le protestantisme, ainsi que des nouvelles et romans très appréciés sur des sujets instructifs et moraux. — 2° Henri-Louis, son fils, né 1785 k Gottingue, déjk répétiteur en 1806, en même temps que Gesenius, après avoir eu 2 mémoires couronnés, sur Philon et sur la crédibilité des premiers adversaires du christianisme; prof, de théol. depuis 1810. f 1831 k la suite de longues souffrances épileptiques. Il a cultivé surtout l'exégèse et la critique du N. T. Principaux ouvrages: De la signification du canon dans l'ancienne Église; Quelques observations sur Luc (contre Schleiermachçr), lai" kTimothée(id.), une Synopse, la Révélation et l'Inspiration; enfin et surtout: De verâ naturâ atque indole orationisgr. N. T. 1810.

 

PLATINA, Barthélémy, né 1421, de son vrai nom Barthélémy de Sacchi de Piadena, près Crémone; d'abord soldat, s'adonna ensuite k l'étude des sciences. Nommé abréviateur apostolique par Pie II, il vit son emploi supprimé par Paul II, et comme il s'en plaignit amèrement, en ménaçant le pape d'un concile général, il fut jeté en prison pour 4 mois. Trois ans plus tard, compromis injustement dans un complot contre la vie du pape, et accusé d'hérésie, il fut mis k la torture. Sixte IV le nomma bibliothécaire du Vatican 1475 et le combla de bienfaits, f 1481. Auteur de Vies des souv. pontifes jusqu'à Sixte IV, Venise 1479, ouvrage assez impartial, sauf pour Paul II.

 

PLATONISME, v. Néoplatonisme.

 

PLATTER lo célèbre imprimeur, à qui l'on doit la Ire édition de l'Institution de Calvin. Né 1499 à Glenchen, paroisse de Wisp, Valais, il fut tour à tour chevrier, tisserand, cordier; à 20 ans il ne savait pas lire. Après un voyage malheureux en Allemagne, il vint à Zurich où il vit Myconius et Zwingle. Il s'attacha à la Réforme, apprit le latin, le grec et l'hébreu; n'ayant pas de quoi manger il se mettait dans la bouche de l'eau salée, des raves crues, du gravier, pour tromper sa faim. Après la Ire guerre de Cappel, il revint à Zurich où il épousa la servante de Myconius, avec l'arrière-pen-sée de se fixer en Valais comme instituteur. L'év. Schinner le reçut bien, et Platter compta à Viège jusqu'à 30 élèves en été. Mais comme il était protestant, il préféra rentrer à Bâle. Il monta une imprimerie, en même temps qu'il prit la direction d'une école, et il finit par réussir, grâce à ses persévérants efforts. L'aisance et les honneurs couronnèrent sa vieillesse, f 1582, d'une chute.

2o Félix, son fils, né 1536 à Bâle; tout jeune, il aimait la botanique, copiait les recettes, s'enthousiasmait au dépècement d'un animal et faisait des autopsies clandestines. Docteur en médecine en 1557, il fut en 1571 nommé professeur, et médecin de la ville, charge qu'il occupa 43 ans. Il fut l'honneur, ou comme dit Haller, l'étoile de l'univ. de Bâle. Auteur de plusieurs ouvrages, il a inauguré l'anatomie pathologique, pressenti l'importance de la statistique, et recommandé des traitements humains et raisonnables pour les aliénés, + 28 juill. 1614, un an après sa femme, après 56 ans de mariage.

 

PLINE, v. Trajan.

 

PLOTIN, le plus illustre représentant de la philos, néo-platonicienne, né 205 en Égypte, étudia à Alexandrie sous Ammonius Saccas, vint à Rome 245 où il obtint comme prof, de philos, d'immenses succès, et f 270 en Campa-nie, aussi respecté pour ses vertus que pour ses talents. Il admettait un Être souverain, Celui qui est: au-dessous de lui des dieux inférieurs, dont les uns sont au-dessus du monde, les autres dans le monde, tels que Marc, Mercure, Minerve. Ces derniers ont l'inspection des diverses parties du monde, et le peuple les adore. Mais les sages doivent tendre à la divinité suprême. Le paganisme reçut ainsi une base rationnelle, grâce à laquelle on espérait en arrêter la chute. Plotin alla plus loin, il atta-jqua le christianisme. Christ, selon lui, était un sage des plus distingués; il avait été néo-platonicien, mais ses disciples ne l'avaient pas compris et s'étaient trompés, surtout quant à sa divinité.

 

PLYMOUTH (Frères de), v. Darby.

 

PNEUMATOMAQUES (qui dispute à propo* de l'E9prit), surnom donné aux partisans de Macédonius, q. v.

 

POCOCKE lo Édouard, né 8 nov. 1604 i Chively, Berkshire, prof, d'arabe et d'A. T. à Oxford et pasteur à Childry, f 10 sept. 1691. Il est un des premiers qui aient compris l'utilité des langues orientales pour l'intelligence de l'hébreu; il s'en est servi pour ses Comment, sur Osée, Joël, Michée et Malachie. Œuvres publ. par Twels, Londres 1740. Son hist delà dynastie des Abulfaradseh est assez importante. — 2o Richard, né 1704 à Southampton, év. de Meath, archidiacre de Dublin, év. d'Ossory; connu par plusieurs voyages en Orient 1737-1742, qu'il a publiés, avec planches et cartes, f 1765.

 

PODIEBRAD, George, roi de Bohême, successeur deLadislas-le-Postume qu'il avait remplacé comme régent pendant sa minorité; né 1420 d'une illustre famille, il monta sur le trône en 1458. Favorable aux hussites modérés, il lenr assigna sur les confins de la Moravie et de la Silésie le district de Litiz, 1543, pour assurer lenr liberté de conscience, peut-être aussi pour en débarrasser le reste du pays, car il était très partagé entre ses devoirs de souverain catholique et ses sympathies religieuses personnelles. Mais le clergé le tenait toujours, et pour sauver les calixtins il se crut obligé en 1558 et en 156$ de recommencer les persécutions contre les ta-borites et les Frères. Il y eut des massacres horribles. Podiebrad se crut en droit de maintenir au moins les articles de Bâle, dits Compactata, mais il ne put obtenir de Rome même cette mince faveur, et comme il insistait au nom de ses droits, les catholiques mirent à leur téteson gendre Matthias Corvin, roi de Hongrie 1468, quoique le reste du pays continuât de lui rester soumis, f 1471.

 

POESCHL, Thomas, né 2 mars 1769àHoritx> Bohême, prêtre en 1796 dans le diocèse de Linx* en 1806 recteur de l'école de Braunau. D assista aux derniers moments de l'imprimeur Palm, qu'il prépara à la mort, mais à partir de ce moment il tomba dans une noire mélancolie, qui dégénéra bientôt en un sombre et parfois ridicule mysticisme. On eut beau le déplacer et l'envoyer à Ampfelwang, dans lfInn, le mal ne fit qu'empirer. De l'huile ét une certaine pondre de son invention lui paraissaient propres à purifier l'âme, à lui procurer des visions extatiques, et à le mettre en communion avec tteo, le Christ et la vierge Marie. Il recommandait aussi le jeûne, les pèlerinages, des exercices de prières; il attendait le règne de mille ans, et d'abord la conversion des juifs. Il s'adressait surtout aux femmes, et il fit de nombreux partisans. Emprisonné à Salzbourg depuis 1815, il apprit avec stupeur en 1817 les crimes que le fanatisme avait fait commettre à quelques-uns de ses sectateurs. Transféré à Vienne dans la prison des prêtres, il donna des preuves suffisantes d'égarement et de faiblesse d'esprit pour qu'on lui imposât sa démission. Il f 15 nov. 1837, à Linz, complètement oublié. Sa secte ne lui survécut pas.

 

POÉSIE CHRÉTIENNE. Tout grand mouvement a en lui-même une poésie, qui se traduit et se reflète naturellement dans une littérature spéciale. Entre l'art et la religion il y a comme des rapports d'origine, et l'on a pu remarquer chez tous les peuples, que leurs premières poésies et quelques-uns de leurs plus grands poèmes ont été consacrés à l'histoire de leurs dieux ou à l'exposé de leur foi, de leurs souvenirs et de leurs espérances d'avenir. Le christianisme n'a pas échappé à cette loi générale, dont le cantique a été la plus constante manifestation; v. Hymnes. Mais, même en dehors du cantique chaque siècle a eu plus ou moins ses poètes et ses poèmes chrétiens, depuis l'évêque égyptien Nèpos, depuis Bardesanes qui a célébré le gnos-ticisme, jusqu'à la Nobla Leycson des vallées vandoises, jusqu'à Châteaubriand et Lamartine qui ont exalté le catholicisme ou glorifié le crucifix. L'histoire, et même la simple énuméra-tion de ces travaux formerait un volume. Clément d'Alexandrie cite déjà de nombreux auteurs qui ont chanté la religion, et dès lors ils se sont multipliés sous toutes les formes et dans tous les pays chrétiens. Bornons-nous à quelques indications. Dans les débuts les poètes tâtonnent, sauf en ce qui concerne les hymnes; ils n'osent pas innover, ils se traînent dans les ornières classiques. Falconia-Proba, femme du proconsul Adelphius, écrit une histoire de Jésus en hexamètres imités de Virgile, pendant qu'en Orient un rhéteur anonyme de Béryte et de Laodicée s'exerce à faire un Homère, un Pin-dare, un Ménandre chrétiens. Le feu sacré n'y est pas. Jean Damascène chante la théogonie, la Pentecôte, l'Ascension, mais très didactique-ment. Commodien prêche dans ses 80 Instructions contre les dieux des nations, et il enseigne juifs et païens dans son Carmeti apologétique. Juvencus f 413 raconte en beaux vers l'histoire évangélique et la vie du Sauveur. Paulin de Nola célèbre dans ses Natalitia l'évêque-martyr qu'il a remplacé. Prudence écrit des poèmes didactiques, polémiques, descriptifs, des quatrains, des hymnes, un Cathèmérinon (directions pour chaque heure du jour). Au 5®® et au 6®* siècles on trouve les noms bien connus de Sedulus, de Prosper d'Aquitaine qui fait un poème contre les semi-pélagiens, de Damase l'inventeur de la rime; de Fortunat l'ami de Radegonde, qui raconte en vers l'histoire de saint Martin; de saint Avit, qui laisse 6 poèmes sur la création, le péché, le déluge, etc. (v, Ruflfet, Les poètes chrétiens d'Occident). L'invasion des barbares amène un temps d'arrêt, mais dès l'entrée du moyen âge nous retrouvons presque ininterrompue la chaîne des hymnes religieux, et en outre une nouvelle littérature poétique dont les légendes surtout forment la base, et qui ne tarde pas à aboutir aux drames bibliques, ou mystères. Après Bède, le diacre Paul, Théodulphe, Walafried et Raban-Maur, vient au 10me siècle la célèbre Roswitha de Gandersheim. Du au 13®« siècle on remarque un notable épanouissement de la poésie latine: Odon de Cluny, le roi Robert, auteur du Veni Creator; Pierre Damien, Abélard, saint Bernard, Thomas d'Aquin, Bonaventure, Thomas de Célano, l'auteur présumé de Dies irœ; Jaco-poni. l'auteur du Stabat, illustrent cette période, qui se termine par les suaves et profondes méditations des mystiques, tels que Thomas a Kempis. Les langues modernes commencent à se former. Kâdmon, dans le Northumberland, emprunte le style épique pour raconter les histoires de la Bible; un poète alsacien chante Héliand et Louis-le-Débonnaire; les minnesân-ger exploitent le sentiment religieux qui a donné naissance aux croisades; d'autres poètes célèbrent le Krist, ou font le procès aux hérétiques; il y a là tout un monde d'histoires, d'anecdotes, de satires, de raisonnements et de mythologie ecclésiastique, et déjà l'on entrevoit dans des poèmes comme celui de Renard, le commencement de ce malaise qui doit finalement aboutir à la Réforme; les poètes donnent la main aux sermonnaires. L'Espagne au 13®* siècle, a son Gonzalo de Berceo, qui chante la Vierge, et Dominique le Jugement dernier; l'Italie, après s'être longtemps servie du latin, essaie son nouvel et poétique idiôme par l'organe de quelques franciscains et du fondateur de leur ordre, pour atteindre avec Dante, à la fin du 13"* siècle, la dernière limite de l'art et du génie. La Réforme inaugure avec ses psaumes et ses cantiques populaires, une ère toute nouvelle. Hans Sachs cultive tous les genres; Murren et Hutten manient avec vigueur le fouet de la satire contre les erreurs et les abus ecclésiastiques. Le Tasse en Italie chante les croisades et la Jérusalem délivrée; Corneille écrit Polyeucte; Racine, Athalie et Esther. Au 17®e siècle l'Angleterre a Mil ton, le Paradis perdu et le Paradis reconquis. Enfin dans les temps plus modernes l'Allemagne enregistre avec orgueil les noms de Klopstock et de sa Messiade; de Gellert, Cl audit», Lavater, Herder, Novalis, etc. Des essais religieux en une prose poétique ont été faits, ainsi que des tentatives pour porter sur la scène des sujets bibliques, Joseph, Moïse, Hazaël, Jean-Baptiste; mais les uns ont échoué, les autres appartiennent plutôt à l'art musical. Parmi les poètes religieux tout à fait modernes, dont le nombre est considérable, on doit citer en Angleterre Wordsworth, en Allemagne Arndt, Schenkendorf, Rttckert, Gerok, Knapp, et les catholiques Brentano, Diepenbrock, Pocci; en France des fragments de Victor Hugo, Lamartine, De Lavigne, Vidal, Pétavel, Malan, Vinet, Louisa Siefert, Alice de Chambrier. Il ne saurait échapper à personne que les vers, même les plus beaux, s'ils n'étaient pas dictés par une inspiration chrétienne, ont été éclipsés par ceux qui accentuent davantage la doctrine évangélique.

 

POIRET, Pierre, né 1646 à Metz, fds d'un armurier, était destiné à l'état de sculpteur, mais les circonstances lui permirent de faire à Bâle, dès 1664, des études de théol., et il en profita. En 1666 il était nommé pasteur à Heidelberg, en 1672 à Anweiler, près Deux-Ponts. La guerre le força de partir; il vint à Hambourg où il fit connaissance avec M'ieBourignon, puis en Hollande. Il finit par s'établir à Beinsbourg, près Leyde, où il f 1719. Conduit au mysticisme par Tauler et a Kempis, il sympathisa vite avec M1** Bourignon, dont il publia plus tard les œuvres, avec une notice. Il a trad. en français Thomas a Kempis, la Théol. germanique, et quelques autres ouvrages mystiques; il a publié aussi quelques opusculnsdeM™* Guyon. Parmi ses propres écrits, on distingue: La paix des bonnes âmes, L'économie divine, La théol. du cœur, La théol. réelle, Principes solides de la relig. chrét. Il avait été enthousiaste de Descartes; il finit par le combattre dans son traité: De eruditione triplici, Amsterd. 1707.

 

POISSON. L'Eglise des premiers temps, des catacombes et des martyrs, avait sa symbolique, on pour mieux dire, ses hiéroglyphes, une écriture mystérieuse et de convention. Le poisson, qui figure sur plusieurs monuments, formait en grec, par ses cinq lettres ixer2, les initiales de: Jésus-Christ, fils de Dieu, Sauveur, Iwou; xpicT&ç *jio; ScotYip. C'était la consolation des chrétiens, et les païens qui n'en avaient pas la clé, ne s'expliquaient pas ce signe de ralliement.

 

POISSY, petite ville de 2 à 3000 âmes, située sur la Seine, Seine-et-Oise, à 15 kilom. de Versailles; connue surtout par le colloque de 1561. Le conseil privé du roi, dans sa séance du 9 juillet, avait décidé d'interdire toute assemblée religieuse, mais avait adouci, sous la pression des circonstances, les peines prononcées contre les réformés. Il avait arrêté en même temps, par un édit publié le 25 et qui combla de joie les Guise et leurs amis, qu'une réunion aurait lieu en août, dans laquelle, en présence des prélats et des évêques, les ministres et les délégués des églises, munis de sauf-conduits, viendraient exposer leurs motifs devant le roi. Ce ne pouvait être ni un concile, ni un synode; on donna à cette réunion le nom de Colloque; conversation, conférence. Les égl. de France s'empressèrent de nommer leurs délégués, choisis presque tous parmi les hommes les plus distingués. Plusieurs églises étrangères s'y firent également représenter, entre autres Genève par Bèze, sur la demande du roi de Navarre, et Zurich par Pierre-Martyr (Vermigli), avec des garanties spéciales données par Charles IX aux sénateur* de Zurich. Dès le 17 août les membres présent adressèrent au roi une requête préliminaire, demandant lo que les évêques ne fussent pas à la fois juges et parties; 2° que le roi voulût bien présider lui-même le colloque; 3o que les questions fussent décidées par la seule Parole de Dieu, et 4o que deux secrétaires, choisis par les deux partis, comparassent journellement leurs procès-verbaux des séances, qui ne seraient valables qu'autant qu'ils auraient été ai-gués par chacun d'eux. II ne fut pas répondu à cette requête, cependant aussi modérée que légitime. Les pasteurs la renouvelèrent le 8 sept., en s'adressant à la reine-mère, qui s'engagea verbalement, mais sans promesse écrite, à faire observer ces conditions. Le 23 août Bèze arrivait à Saint-Germain, où les députés, crainte d<> surprise, étaient tous logés près du palais, dans une maison appartenant au cardinal de Châtil-lon, frère de Coligny. Le soir même, selou d'autres le lendemain, Bèze se présenta chez le roi de Navarre, et discuta avec le cardinal de Lorraine, en présence de Catherine et de plusieurs personnages du plus haut rang, sur la valeur et l'importance du dogme de la transsubstantiation. Le lendemain 24 il prêchait dan* le salon du prince de Condé; les autres pasteurs employèrent également à prêcher en divers endroits, les jours qui précédèrent la réunion. Jeanne d'Albret, reine de Navarre, finit aussi par arriver, accompagnée de son vieux pasteur, Jean de la Tour, septuagénaire. Le 9 sept., un mardi, la conférence s'ouvrit enfin dans le grand réfectoire du couvent des religieuses de Poissy. Le roi l'ouvrit en personne, assis sur son trône, ayant à sa droite le duc d'Orléans et le roi de Navarre, à sa gauche Catherine de Médicis et la reine de Navarre, devant lui des princes, des chevaliers, des seigneurs, des dames de qualité, 6 cardinaux, 36 évêques et archevêques, une foule d'ecclésiastiques, de docteurs et de délégués du clergé. Les 12 ministres et les 22 dépotés des églises ne furent introduits qu'après le discours du roi et une réponse du cardinal de Tournon. Ils étaient conduits par des gardes qui paraissaient aussi bien les surveiller que les protéger. Bèze, chargé d une voix unanime de porter la parole, commença par la belle prière, ou Confession des péchés, qui 4ès lors a pris place dans les liturgies réformées; puis, dans un discours précis, clair, mesuré, plein de convenance et de fermeté, que M. Henri Martin regarde comme un des plus beaux spécimens de l'éloquence protestante, il établit d'abord les articles de foi sur lesquels les deux Églises étaient d'accord; après quoi, passant k ceux sur lesquels il y avait divergence, il insista surtout sur le fondement de la foi, la Cène et le gouvernement de l'Église. On l'écouta tranquillement sur le premier point, quand il déclara que les protestants n'admettaient d'autre autorité que la Bible, les écrits des pères et les conciles n'ayant eux-mêmes de valeur qu'autant qu'ils y étaient conformes. Mais quand, en parlant de la Cène, il dit que • le corps de J.-C. est éloigné du pain et du vin autant que le plus haut ciel est éloigné de la terre, t les prélats soulevèrent une véritable tempête, demandant que la parole lui fût retirée, ou qu'il leur fût permis k eux de se retirer de l'assemblée. Le roi leur refusa l'un et l'autre, et Bèze put achever son discours en paix, relevant les vices du gouvernement de l'Église, sans trop insister sur ses abus, et prolestant de la fidélité des réformés à la puissance royale et de leur soumission en tout ce qui ne touchait pas le service de Dieu. Après une courte prière il présenta derechef au roi la Confession de foi des Églises réformées.

Le lendemain Bèze écrivit à la reine-mère pour justifier ce qu'il avait dit de la Cène et pour donner les explications que le tumulte des prélats l'avait empêché de compléter.

En même temps les évêques s'occupaient de la réponse à faire. Ils comprenaient la difficulté de la chose et cherchèrent à la tourner de deux manières: d'abord en ne répondant pas et en se bornant k opposer simplement aux ministres une profession de foi contraire, à laquelle ils seraient sommés de souscrire, sous peine d'être condamnés et de voir la conférence close; mais le chancelier de l'Hôpital refusa de se prêter à cette étrange manœuvre qui eût été la négation même du colloque. Déboutés de ce côté, les catholiques, à l'instigation du card. de Lorraine, imaginèrent un autre expédient, savoir de mettre aux prises les calvinistes et les luthériens, mais ce projet n'aboutit pas non plus, l'un des docteurs venus de Tubingue étant mort de la peste en arrivant à Paris, deux autres (dont Baudouin) ayant retardé leur voyage à cause de cet accident, et les deux autres, de Heidelberg, étant d'accord avec les réformés. Il fallut donc que le cardinal s'exécutât, qu'il fit son discours, et il le fit le 16 sept., ne manquant ni de talent, ni d'adresse, un peu prolixe et diffus, ne parlant que de la Cène et de l'autorité de l'Église, et demandant la clôture des conférences. Bèze demanda de répondre immédiatement, mais le roi ajourna à une autre séance et ne reparut plus au colloque. Malgré les efforts des prélats qui se réservaient de dire que les ministres n'avaient pas répondu, les réformés obtinrent une nouvelle conférence, mais non publique, dans la chambre priorale du couvent. Les deux reines y assistèrent avec 2 dames d'honneur, les princes du sang et les membres du conseil privé. Le nombre des ministres fut réduit k 12, le nombre des docteurs catholiques, réduit aussi, fut fortifié en qualité par l'arrivée du cardinal de Ferrare et de Jacq. Lainez, général des jésuites. Cette conférence, qui eut lieu le 24, fut suivie d'une 4™ et dernière le 26 et roula surtout sur l'unité de l'Église et sur la Cène. Bèze et P. Martyr défendirent les doctrines de la Réforme avec un tact et une éloquence qui furent admirés même de leurs adversaires; le docteur d'Espense, le moine Xaintes, le cardinal de Lorraine et Lainez défendirent la doctrine catholique; ce dernier se couvrit de ridicule en traitant les protestants de singes et de renards. Le Colloque fut rompu, mais Catherine, pour traîner les choses en longueur, essaya d'organiser encore deux ou trois conférences privées où les théologiens qui ne s'entendaient pas sur la Cène devaient tâcher de trouver une formule commune, qu'ils pussent signer les uns et les autres. Les ministres rejetèrent la première formule, comme trop vague; les docteurs de Sorbonne rejetèrent la seconde comme trop précise et hérétique, et après 6 jours de débats, le 4 oct.. les prélats déclarèrent que si les ministres n'adîhéraient pas à la doctrine catholique sur la Cène, ils ne voulaient plus avoir affaire avec eux. Ce fut la fin du Colloque de Poissy: les ministres rentrèrent dans leurs églises; Bèze seul, retenu par les deux reines, resta k la cour.

 

POITIERS, vieille cité romaine, siège d'un évêché qui date du 4^ siècle, et qui relève auj. de l'archev. de Bordeaux. Il ne s'y est pas tenu moins de 23 conciles, mais en général peu importants. Le premier 589 ou 590 fut convoqué k propos d'une révolution de religieuses, dans laquelle le sang coula; une nonne Chrodieldis s'était révoltée contre son abbesse Leubovera. En 935, nouveau synode, sans signification. Celui de l'an 1000 préluda à l'établissement de la Trêve de Dieu, par la résolution qui fut votée que toutes les questions litigieuses se résoudraient par le droit et non par la force. En 1075 Bérenger fut presque assassiné pour avoir soupçonné Hilaire de Poitiers d'hérésie. En janvier 1078, concile provoqué par l'év. Hugo de Die, Fun des partisans les plus ardents de Grégoire VII; ses dix canons ne sont guère que le développement et l'application des décrets rendus par le pape contre la simonie et le mariage des prêtres. Celui de 1100 s'occupa surtout du mariage de Philippe Ier qui, divorcé, avait épousé Bertrade, également divorcée, et était excommunié depuis 1092. — Poitiers a été illustré par ses évêques Hilaire et Fortunat et par Radegonde. Il a eu beaucoup à souffrir pendant les guerres de religion.

 

POLANUS, Amand de Polansdorf, né 16 déc. 1561 à Oppeln, Silésie; après ses premières études, visita Breslau, Tubingue, Bâle, Genève, Heidelberg, passa 2 ans chez les moraves, et fut nommé 1596 prof, de théol. pour l'A. T. à Bâle. Considéré pour sa piété et pour son érudition, il reçut les plus grandes distinctions académiques, et f 18 juill. 1610. Outre ses ouvrages sur l'A. T.. il a écrit sur l'élection de grâce, d'après Rom. 9, 11., et quelques traités sur les différences qui séparent l'Égl. cathol. des Églises protestantes.

 

POLE, ou PooL Reginald, né en mars 1500 à Stowerton-Castle, Stafford, était par sa mère, une Salisbury, parent de Henri VII, Édouard IV et Henri VIII. Doté de riches bénéfices, il put après ses études d'Oxford, visiter Padoue, Londres et Paris. Il consacra quelques années à ces voyages. Ayant désapprouvé le divorce du roi, il dut quitter l'Angleterre et se rendit à Avignon, puis à Padoue, où il publia en 1535 un écrit très vif Pro unitatis ecclesiœ defensione, dirigé contre Henri VUI. Le pape l'en récompensa en 1536 par le chapeau de cardinal; le roi l'en punit en lui retirant ses bénéfices, le déclara coupable de haute trahison, fit mettre sa tête à prix, et fit exécuter son frère et sa mère. Envoyé en France comme légat du pape, et son extradition ayant été réclamée, Pôle s'enfuit de nouveau en Italie, et le pape l'employa à plusieurs missions en Allemagne; il en fit un des 3 légats qui présidèrent à l'ouverture du conc. de Trente. Malgré ses relations avec les luthériens, et quoique son adhésion à la doctrine de la justification par la foi, l'eût rendu suspect, il fut sur le point d'être nommé pape après la mort de Paul III. Sous Marie-la-Sanguinaire il fut nommé par Jules III, cardinal-légat en Angleterre; mais Charles-Quint le retint longtemps, parce qu'il craignait de le voir s'opposer au mariage de Marie avec Philippe 11. C'est seulement quand tout fut conclu qu'il put rentrer à Londres, nov. 1554. Il obtint d'un parlement servile le retrait de toutes les lois contraires au catholicisme et le retour de Y Angleterre k l'unité romaine. Il combattit cependant l'usage des moyens violents contre les protestants, mais comme son orthodoxie était déjà suspecte, il ne put empêcher ni les cruautés commandées par l'archev. Gardiner, ni la rentrée des jésuites. Devenu en 1555 archev. de Cantorbéry, il dut subir ce qui avait été décidé par son prédécesseur. Ses efforts pour réformer son clergé réveillèrent de nouveau les soupçons élevés contre lui, et il ne fallut rien moins que la protection d'Élisabeth pour faire révoquer la bulle de Paul IV qui l'appelait à venir se justifier à Rome, f 4558. Il est hors de doute qu'il penchait vers la Réforme, mais sa faiblesse de caractère l'empêcha de réaliser le bien qu'il rêvait.

 

POLÉMIQUE, signifie d'une manière générale Discussion; dans un sens plus restreint c'est, en théologie, l'étude, l'examen et la réfutation des idées que l'on regarde comme erronées, te encore on distingue: l'Apologétique, ou défense du christianisme contre les incrédules et les indifférents; la Controverse, ou discussions entre les protestants et les catholiques; et la Polémique, discussion entre les protestants des diverses dénominations. Cependant la démarcation entre ces trois branches n'est pas si marquée qu'elles n'empiètent souvent l'une sur l'autre. Les plus anciens polémistes connus sont auai des apologètes: Irénée, Hippolyte, Épiphanet. Mais c'est depuis la Réformation surtout, que la polémique a pris un caractère positif comme branche d'enseignement. Les jésuites s'y sont distingués: Alphonse de Castro dans ses 14 livres Advenus amnes hœresei; Bellarmin dans ses Disputationes. Bossuet occupe un rang éleve par son Exposition de la doctrine de l'Égl. catholique. Du côté des protestants l'Allemagne nomme Chemnitz, dans son étude sur le conc. de Trente; Calov, dans sa synopse des controverses; Hunnius. Hombeck, Walch, etc.; la France a Claude, Charnier, Du Moulin, Drelin-court, F. Turretin et grand nombre d'autres. Avec Schleiermacher et Lttcke la polémique est devenue une science plus objective, qui participe de la philos, et de l'histoire des dogmes. Sack a écrit un livre sur la Polémique chrétienne; enfin Hase, un de ses principaux ouvrages: Des rapports du protestantisme avec l'Égl. cathol. 1871.

 

POLENZ, v. Georges 6<>.

 

POLIANDER (Graumann, l'homme gris), Jean, né 1487 à Neustadt, Palatinat. Recteur de l'école de Saint-Thomas à Leipzig, il assista, comme secrétaire d'Eck, à la dispute de Leipzig et fut gagné à la cause de la Réforme. Il laprfr-cha dès 1520, mais dut donner sa démission. En 1522 il se rendit à Wittenberg et, par l'influe** de Luther, fut placé par le duc Albert de Prusse, comme pasteur à Kônigsberg 1525. 11 y rendit de grands services, non seulement an aidant ses collègues Brismann et Speratu*, mais encore en travaillant à l'organisation de l'Égl. de Prusse. + 1541. Auteur de cantiques estimés.

 

POLOGNE. Ce grand pays, sans frontières naturelles, placé entre les Slaves orientaux auxquels il appartenait comme race, et l'Allemagne à laquelle il appartenait par sa position géographique, a été longtemps tiraillé entre ces deux influences contraires, par conséquent entre l'Église grecque, dont il reçut l'Évangile par la Moravie, et l'Égl. romaine que représentaient pour lui les empereurs d'Allemagne. Longtemps idolâtre, ivrogne et voluptueux jusque dans le culte de ses dieux, il ne parait avoir été évangélisé sérieusement qu'au 10me siècle par des chrétiens venus de Moravie à la suite de l'invasion hongroise. Le duc Zymyslav, qui régna depuis 913, se montra mieux disposé que ses prédécesseurs Sémowit et Lesco, mais c'est son fils Miécislav, ou Miesco, 963, qui le premier se déclara franchement chrétien, peut-être sous l'influence de sa pieuse femme Dombrowka, fille de Boleslav, et le 7 mars 967 le peuple fut engagé à jeter ses idoles dans le fleuve. Le culte se faisait encore en langue grecque, d'après le rite grec, et les prêtres se mariaient. Mais l'emp. Othon l*r, qui venait de fonder l'archevêché de Magdebourg, et qui désirait étendre sa puissance en Pologne, décida l'érection d'un évê-ché à Posen, et le subordonna au métropolitain de Magdebourg, c.-à-d. à l'Église de Rome. Pour ces populations il n'y avait là qu'une nuance; elles se soumirent, et ne résistèrent quelque temps que pour l'emploi du latin qui leur était antipathique. La seconde femme de Miécislav entraîna le roi et la noblesse dans le sens du catholicisme, et la question fut tranchée. Adalbert et Gaudentius arrivèrent dans le pays, gagnèrent Dantzigà l'Évangile, vers 997, et bientôt le christianisme fut la religion nationale; Gaudentius était archev. de Gnesen, Popo év. de Cracovie, Reimbert de Colberg, Clément de Breslau. Pendant les siècles qui suivirent, le pays resta catholique, mais avec des alternances de révolte contre Rome, suivant que la politique de ses princes le rapprochait de l'Allemagne ou de la Russie, et surtout parce que son caractère le rendait impatient de tout joug et très susceptible à l'endroit de son indépendance. 11 ne prit aucune part aux croisades parce qu'il n'était pas sur leur route, et parce qu'il avait assez à faire chez lui comme avant-poste du christianisme dans le nord. La Réforme s'y introduisit d'abord sans trop de difficultés. Les nombreux proscrits pour cause de religion, auxquels dans le moyen âge la Pologne avait donné asile, vaudois, beghards, et autres, avaient préparé le terrain; Mi liez avait prêché à Gnesen, Jérôme avait professé dans l'univ. de Cracovie, et l'inquisition dont Jean XXII voulut la doter ne fit que donner plus de force aux tentatives réformatrices des hussiles. D'ailleurs la noblesse était aussi instruite qu'intelligente; la Bible était traduite en polonais, le culte se célébrait presque partout en langue vulgaire, les relations commerciales avec l'Allemagne s'étaient multipliées, et l'autonomie municipale permettait à chaque ville de s'organiser librement au point de vue religieux, pourvu que la manifestation n'allât pas jusqu'à l'émeute, comme il était arrivé à Dantzig sous la direction de Jean Hegge, 1525-1526. Le dominicain Samuel, à Posen en 1520, et Jean Seclucyan en 1526 par sa publication du N. T., donnèrent le signal et prêchèrent les premiers la Réforme; Culva ouvrit en 1529 une école évangélique à Wilna; le mouvement se généralisa, et de 1548 à 1572, sous Sigismond- Auguste, la Pologne et la Lithuanie étaient presque entièrement acquises à l'Évangile. Le roi lui-même était sympathique et s'était mis en relation directe avec Calvin. La diète de Petrikau, 1555, demandait un concile national, malgré l'opposition de l'év. Hosius d'Ermland. Les réformés s'organisaient en 1559 sous la conduite de Cruciger, Verge-rius, Lasky; les luthériens en faisaient autant de leur côté. En 1563 un Édit de tolérance accordait à tous le droit de vivre et leur imposait la paix et des égards mutuels. Malheureusement les jésuites s'étaient introduits dans le pays, et ils avaient ouvert un premier collège à Brauns-berg 1563. D'un autre côté les antitrinitaires, avec leurs doctrines énervantes, Socin, Biandrata, Occhino. jetaient le trouble dans les églises et forçaient en 1570 les évangéliques de conclure le Consensus de Sandomir, pendant que les sociniens se constituaient en Ecclesia minor. A l'avènement de Henri d'Anjou 1573, un traité, Pax dimdentium, assura aux protestants l'exercice de leur culte, mais Sigismond III, tout en respectant la lettre du traité, s'arrangea pour ne donner d'emplois et d'honneurs qu ses amis les catholiques, ce qui décida la défection d'une grande partie de la noblesse. Le traité de Varsovie 1717 interdit d'élever de nouvelles églises; un édit de 1733 exclut les protestants de toutes les charges publiques, et le mal en vint à ce point qu'en 1764 la Russie et la Prusse durent se charger du protectorat des dissidente. Par une occupation de plus de 40 années, les jésuites avaient ruiné le pays. La diète de 1768 réduisit à néant les promesses et les garanties qui avaient été données aux évangéliques, et il ne fallut rien moins que l'arrivée du prince russe Repuin, qui vint avec des troupes et transporta en Russie les magnats réGalcitiants, pour forcer la diète à retirer ses intolérantes mesures. Mais c'était trop tard pour les protestants; c'était trop tard aussi pour la Pologne elle-même, les puissances voisines allaient procéder à son premier démembrement. En 1839, à la suite du synode de Polotsk, un ukase rompit les relations des grecs-unis, qui existaient avec Rome depuis 1595. et en 1847 de nouvelles restrictions furent apportées au concordat de 1818. Enfin le clergé ayant pactisé avec l'insurrection en 1863, l'empereur supprima les couvents, sécularisa leurs biens, imposa la langue russe dans le culte, paya le clergé et travailla ostensiblement à ramener la Pologne à la foi grecque orthodoxe.

 

POLOTSK, petite ville de Lithuanie, à 500 kil. S.-O. de Petersbourg. Les luthériens de Pologne y tinrent en 1563 une conférence, où ils élaborèrent leur constitution ecclésiastique, telle qu'elle fut adoptée en 1565 par le synode de Gostyn. En 1839 un synode grec-uni déclara pour la Lithuanie et la Russie blanche, rompre ses relations avec Rome.

 

POLYCARPE, une des plus nobles figures du siècle apostolique. Disciple de saint Jean, et par conséquent instruit par un témoin oculaire des actes de la vie de Jésus, il fut converti fort jeune au christianisme. Son disciple Irénée nous a conservé le souvenir de sa charité, de son zèle et de sa foi. A la fin du 1er siècle il fut nommé év. deSmyrne.il étaitamidePapias. On ne sait presque rien de son long ministère, si ce n'est qu'il se rendit à Rome vers le milieu du second siècle, qu'il y vit l'év. Anicet, et que c'est là que fut constatée pour la l*e fois la divergence qui existait entre les Égl. d'Orient et celles d'occident sur le jour où se célébrait la Pâque. Il vit poindre et se répandre beaucoup d'hérésies et les combattit vivement. Rencontrant un jour Marcion, et il lui dit: Je te connais, fils de Satan. En 167, sous Marc-Au-rèle, les persécutions ayant éclaté à Smyrne, ses amis et son église l'engagèrent à fuir, mais il fut découvert par ses persécuteurs. On hésitait à condamner un vieillard presque nonagénaire, et on lui demanda de renier le Christ. Les juges et le proconsul lui offraient de crier seulement: A bas les athées ! Mais comme ils entendaient par là les chrétiens, dont le Dieu n'est pas visible, il s'y refusa: « Que la volonté de Dieu soit faite, dit-il; voilà 86 ans que je le sers; et il ne m'a jamais fait que du bien. Comment renierais-je mon Seigneur et mon Maître ! » Le peuple apporta alors du bois, et le vieux martyr fut livré aux flammes; il mourut en paix après avoir rendu grâce à Dieu, 168 ou 169 (d'après Waddington 154; d'après Lipsius 156). Il reste de lui uneépître aux Philippiens, qui est un précieux document; style simple, beaucoup d'onction; elle est citée par Irénée et Eusèbe. Il avait écrit aussi une relation de la mort de Jean, malheureusement perdue.

— On connaît aussi sous le nom de Polycarpe (cueilli partout) un recueil de canons fait avant 1118 par le card. Grégoire de Pavie, un des principaux travaux du parti de Grégoire VU, qui fut utilisé pour la revision du Corpus juris 1580.

 

POLYCRATE, év. d'Ephèse vers 190, écrivit au sujet de la date de Pâques une lettre synodale, en réponse à Victor de Rome qui prétendait imposer aux orientaux l'époque usitée en occident. Il cite l'autorité des apôtres et des évêques ses prédécesseurs; sa lettre est intéressante parce qu'elle fait connaître l'état des églises et l'usage qu'on faisait du N. T.

 

POLYGLOTTES, éditions de la Bible qui, dans un intérêt critique et scientifique, présentent à côté du texte original, les traductions qui en ont été faites en diverses langues. Les plus connues sont 1° celle de Complutum, v. Complutensis; 2° celle dePlantin, Anvers 1569-1572, 8 vol. fo, impr. par ordre de Philippe II, et appelée pour cela editio regia; elle fut faite avec le concours de plus, savants par Benoit Arias, v. Montanus 2o, et renfermait l'hébreu, la Vulgate, les Septante; pour le N. T. la Pe-shito, et plus, fragments des targums avec trad. latine; 3° l'édition de Paris, faite aux frais d'un avocat au parlement, Guy Michel le Jay, qui y consacra toute sa fortune; impr. chez Vitré 1629-1645, 18 vol. f*. C'est la reproduction de la précédente, plus pour le N. T. une version arabe avec sa trad. latine, et pour l'A, T. le Pentateuque samaritain, avec trad. arabe et syriaque, et la version latine; c'est la plus riche polyglotte comme édition, mais sans grande valeur scientifique; 4° l'éd. de Londres, publ. par l'év. Bryan Walton de Chester, avec l'aide des savants et des orientalistes les plus distingués, achevée 1657, 6 vol. f° Elle contient pour l'A. T. le texte hébreu avec la version intercalaire d'Anvers, le Pentateuque samaritain, les Septante (mss. du Vatican avec les variantes du mss. Alexandrin), des fragments de l'Itala, la Vulgate, la Peshito avec les Apocryphes, la version arabe, les targums, la trad. samaritaine du Pentateuque. l'éthiopienne des Psaumes et du Cantique; nne trad. latine accompagne partout le texte non latin. Le N. T. donne le texte d'Étienne, avec la version d'Arias Montanus et les variantes du mss. alexandrin; la Peshito, la Vulgate, l'arabe et l'éthiopienne; même les évangiles en persan; le tout avec une trad. latine littérale. Un Lexicon en 7 langues, deCas-tellus, y est joint. Les éditions postérieures sont dédiées à Charles II, mais il en reste encore quelques exemplaires avec la dédicace républicaine. Cette polyglotte est très estimée; 5<> celle de Heidelberg 1599, n'a que l'hébreu, les Septante, la Vulgate, et pour le N. T. la version interlinéaire d'Arias; 6° Celle de Hambourg 1596: hébreu, grec, allemand de Luther, latin; peu importante; 7° Celle de Nuremberg 1599, inachevée, ne va que jusqu'à Ruth; hébreu, grec, latin et allemand; 8° celle de Leipzig, de Reineccius, 1750, en 3 langues, avec notes et variantes; 9° celle de Bielefeld, par Stier et Theile, 1845; hébr., grec, latin, allemand, parfois anglais, avec les principales variantes pour le N. T.; 10° enfin la magnifique Polyglottè de Londres, en 8 langues 1831, et celle de 1876.

 

POLYNÉSIE, c.-à-d. beaucoup d'îles, ou Australie, terres australes. On comprend généralement sous cette désignation, et comme 5me partie du monde, toutes les îles, grandes ou petites, de l'Océan Pacifique, que Y on divise, assez arbitrairement d'ailleurs, en 3 ou 4 groupes distincts, dont le premier et le plus considérable est formé par la Nouvelle-Hollande, la terre van Diemen et la Nouvelle-Zélande. C'est en 1788 que les Anglais s'y établirent pour la lr« fois, et peu à peu ils en firent des lieux de déportation. On y eut des chapelains pour les condamnés. Vers 1824 plusieurs sociétés missionnaires tentèrent de porter l'Évangile aux indigènes papous, mais sans succès. Les moraves ne se découragèrent pas, et depuis 1859 quelques conversions ont eu lieu, quelques églises ont été fondées, d'autres sociétés de missions sont venues travailler dans ce champ difficile, et à côté des nombreuses congrégations formées d'immigrants européens, on y compte auj. des écoles, des églises et des séminaires formés de naturels convertis, et entretenus par différentes sociétés qui se sont partagé la tâche. Les épis-copaux sont les plus nombreux; ils n'ont pas moins de 12 évéques, dont celui de Sidney est le primat. Les catholiques ont un archevêque, et dans chaque province un évêque; ce sont presque tous des Irlandais. Il y a des presbytériens presque partout, régis par une Assemblée générale qui se réunit chaque année. Les wes-leyens, puissamment organisés, ont des missions prospères sur plusieurs points, soit dans la Nouvelle-Hollande, soit ailleurs; v. Nouvelle-Zélande. La Nouvelle-Guinée, évangélisée par les Hollandais, et depuis 1771 par la London mission. Soc. est un sol réfractaire, grâce au peu de développement de ses habitants qui sont Papous. Célèbes en.revanche, sur 114,000 insulaires, compte 80,000 chrétiens, avec 125 écoles et 199 paroisses. A Sumatra il y a 25 missionnaires allemands et environ 5,000 indigènes convertis. Dans la Polynésie proprement dite, presque en entier christianisée, et malaise de race, on remarque les centres d'O' Tahiti, que v., les îles de la Société, de Tonga, Sandwich, Carolines et Marquises. Dans la Micronésie, l'archipel Gilbert. Dans la Mélanésie enfin, les Iles Fidji où, sur une population de 120,000 âmes, naguère cannibale, on compte plus de 102,000 assistants réguliers au cuite, avec plus de 300 chapelles, et 42,000 enfants fréquentant 1534 écoles; les Nouvelles-Hébrides, 3,000 natifs suivant le culte, 800 communiants, une centaine d'instituteurs indigènes; les lies de Banks, Santa-Crux, Salomon, où le pieux évêque Patteson trouva le martyre en 1871. En tout, non compris la Nouvelle-Hollande et les Européens établis, la mission compte en Polynésie environ 340,000 chrétiens indigènes. Darwin lui-même rend hommage au bien fait par les missionnaires.

 

POLYTHÉISME. La foi en un certain nombre de dieux spéciaux se rattache d'une part au sentiment presque instinctif qui révèle à l'homme une puissance supérieure, fatale, irresponsable, invisible; de l'autre, à la vue des phénomènes extérieurs qui en sont comme la manifestation. Le premier sentiment mène d'abord au monothéisme, à l'idée de l'unité de Dieu; mais l'action de ce Dieu étant multiple, diverse, souvent contradictoire, se manifestant partout à la fois dans la nature, avec autant d'unité réelle que de variété dans la forme, l'homme en vient in* volontairement à confondre l'effet avec la cause, la création avec le créateur, et il aboutit à un certain panthéisme, à la divinisation de la nature, qui est pour lui, sinon l'explication, du moins la conciliation des deux termes contraires. Mais comme d'un autre côté les phénomènes naturels se présentent indépendants les uns des autres, chacun ayant son existence propre, par* fois en lutte et par conséquent sans unité, le panthéisme se décompose en forces, c.-à-d. en divinités distinctes, chacune préposée à une manifestation particulière de la vie générale. Ici l'imagination, ou le génie, a beau jeu, et suivant le développement d'un peuple, sa religion sera plus ou moins esthétique. Au bas de l'échelle on rencontre le fétichisme, c.-à-d. l'adoration d'objets matériels. Puis, un peu plus haut, le culte de la nature et de ses forces, tantôt sans représentations extérieures, sans temples, dans les bois, au bord des fleuves; tantôt avec des images symboliques, chez les Assyriens, les Babyloniens, les Phéniciens; c'est l'idolâtrie proprement dite. Les anthropomor-phismes, la personnification des forces de la nature, forme un degré plus élevé; de même l'idéalisation des vertus, des arts, des sciences. C'est la mythologie grecque; plus tard il s'y est joint, mais à un tout autre point de vue, comme dans le bouddhisme, l'exaltation, ou l'apothéose d'hommes ayant rendu de grands services à la patrie, culte des morts qui s'est reproduit au sein (le l'Égl. chrétienne. Enfin le dualisme, qui n'est qne la réduction du polythéisme, et qui ramène à deux principes, l'un bon et l'autre mauvais, toutes les manifestations de ces puissances étranges, dont les unes créent et fécondent, les autres nuisent et détruisent. On comprend que l'idée morale n'ait aucune place dans ces différents systèmes, ou si la morale y pénètre, c'est par sa force propre, par la force de la conscience et de la volonté, par conséquent malgré le système et en lui faisant violence, v. Paganisme, et Panthéisme.

 

POMBAL (dom Sébastien-Joseph de Carvalho-Melho, comte d'Oeyras, marquis de), né 1699 à Soura près Coïmbre. Après avoir étudié le droit il fit quelques années de service militaire, se remit aux études, fut envoyé en 1739 à Londres comme secrétaire d'ambassade, en 1745 à Vienne comme ambassadeur. En 1750 le roi Joseph le nomma ministre des affaires étrangères et en 1756 premier ministre. Il garda le pouvoir pendant 27 ans, et se distingua par des mesures utiles, par l'impulsion qu'il imprima au commerce, par la sage réorganisation des finances et par un grand nombre d'importantes réformes. Il avait trouvé le Portugal endetté; en quittant les affaires il laissait 240 millions dans les caisses de l'État, malgré toutes les dépenses qu'il avait faites, entre autres pour relever Lisbonne détruite par le tremblement de terre de 1755. Mais ce qui a le plus contribué à le rendre célèbre, c'est la lutte victorieuse qu'il eut à soutenir contre les jésuites. Ses réformes lui avaient attiré la haine des nobles et du clergé; il avait diminué le pouvoir de l'inquisition et défendu les droits de l'État. Les jésuites lui déclarèrent une guerre sourde; il leur répondit à ciel ouvert, leur retira l'administration du Paraguay, obtint contre eux du pape un décret de réforme 1757, confisqua leurs biens, et ayant reconnu leur main dans un complot contre la vie du roi, en fit exécuter ou bannir quel-ques-uns et finalement les expulsa du Portugal et du Brésil 1759. Il les fit tous embarquer pour l'Italie et faillit se brouiller à ce sujet avec le pape; il était môme sur le point de rompre avec Rome, quand Clément XIII mourut. Le pape suivant ayant donné satisfaction au Portugal et à l'Europe, en supprimant l'ordre, la paix fut rétablie. En 1777 Marie ayant succédé à Joseph, la politique changea; Pombal fut disgracié, ses ennemis reprirent le dessus; on lui fit son procès; on exploita contre lui ses idées philosophiques et son caractère hautain. Il fut condamné à mort, mais la reine commua la peine, et il f en exil 8 mai 1782. C'est un des ministres qui ont le plus fait pour la grandeur du Portugal. Malgré des rivalités commerciales très vives, il avait pris parti pour l'Angleterre contre les Bourbons en 1762.

 

POMÈRANIE, province située entre la Vis-tule, l'Oder et la Baltique; envahie au 6» siècle par les Vendes, les Polanes et les Luticiens, sous le nom général de Lèches. Charlemagne et Louis-le-Déb. étendirent jusqu'à eux leurs conquêtes, et fondèrent l'évêché de Hambourg pour les évangéliser; les moines de Corvey fondèrent aussi une mission à Rugen et y installèrent un èvêque; Otton y envoya des moines de Magdebourg, mais tous ces essais n'eurent pas de suite. C'est seulement au 10®« siècle, après que la Pologne se fut soumis le pays, qu'une mission sérieuse put commencer, et les débuts ne furent pas faciles. Un évêché fut fondé à Colberg l'an 1000 par Boleslav 1er, mais il dura peu, les Poméraniens s'apercevant qu'on ne voulait les convertir que pour les mieux dominer. Sous Boleslav ni l'œuvre reprit dans de meilleures conditions. Le moine espagnol Bernard, simple et pauvre, avait échoué en personne 1122, mais il envoya à sa place le saint év. Otton, de Bamberg, q. v. et celui-ci amena les populations et la diète à la foi. L'év. Adal-bert lui succéda, fonda l'évêché de Wollin, qui fut plus tard transféré à Cammin, et placé sous la direction immédiate du pape. L'île de Rugen ne se soumit qu'en 1168 à Waldemar et à l'Évangile. Avec Henri-le-Lion la Pomèranie fut définitivement acquise à la profession du christianisme. La Réforme y pénétra 1520 par les écrits de Luther, avidement lus dans les couvents, entre autres dans celui de Belbuk (d'où Bugenhagen sortit pour se rendre à Wittenberg), malgré l'opposition de l'év. Érasme de Manteufel. La diète de Treptow 1534 consacra la liberté des cultes. L'évêché de Cammin resta aux évangéliques, et fut longtemps occupé par des princes de la maison ducale. La Formule de concorde, d'abord repoussée, finit cependant vers le milieu du 17me siècle par être admise. Après la guerre de Trente ans une partie de la Pomèranie resta aux Suédois. Elle fut donnée à la Prusse en 1815, et l'Union confessionnelle y fut introduite, quoiqu'il s'y trouvât peu de réformés; les luthériens stricts de la Pom. postérieure s'organisèrent en dissidence et se rattachèrent au consistoire de Breslau.

 

POMERANUS, v. Bugenhagen.

 

POMORÉNIENS, v. Raskolniks.

 

POMPONACCI, Pierre, 1462-1526, prof, de philos, à Padoue et à Bologne, un des humanistes les plus distingués de l'Italie, connu surtout comme disciple fervent d'Aristote. On l'a soupçonné d'athéisme. Il partait du principe qu'une chose peut être vraie en philos, et basse en théol., et il distinguait entre la connaissance philosophique et la connaissance pratique, dont les résultats peuvent varier; cela pourrait mener loin. Dans son traité de l'Immortalité des

âmes, qui fat condamné en 4513, il soutenait qu'on ne peut prouver l'immortalité de l'âme par la seule raison, et subsidiairement que les âmes meurent jusqu'au jour du jugement. Il explique aussi les miracles par un développement croissant des forces de la nature, dans son De naturalium effectuum admirandorum causis. Son traité Des Incantations fut mis à l'index. Esprit original, il parait avoir eu plus d'idées que de foi.

 

PONTICUS, garçon de 15 ans, qui souffrit avec beaucoup de fermeté le martyre sous Marc-Àurèle, pendant les persécutions de Vienne et de Lyon, 177: d'après Eusèbe.

 

PONTIEN, 18">e év. ou pape de Rome, 230. Inconnu; n'est pas même dans Douillet. On dit que sous la persécution maximienne il fut banni en Sardaigne avec son ami Hippolyte, qu'il y donna sa démission et f 236. Son corps aurait été transporté à Rome par Fabien et enterré au cimetière de Galliste. C'est sous lui qu'un synode aurait adhéré à la condamnation d'Origène prononcée 231 par Démétrius, év. d'Alexandrie.

 

PONTIFE, du latin pontifex, faiseur de ponts, nom donné d'abord dans l'ancienne Rome aux chefs du culte, soit qu'ils présidassent à la construction des ponts de la ville, soit qu'ils eussent la charge spéciale de l'entretien et des réparations du pont sublicien (sur pilotis). Leur autorité était très grande. Ils étaient élus tantôt par le peuple, tantôt par les empereurs; parfois ils * se recrutaient eux-mêmes. Ils choisissaient dans leur sein le souverain pontife, nommé à vie, qui consacrait les prêtres, rédigeait les annales, tranchait les questions religieuses et matrimoniales. convoquait et présidait les comices, et avait une inspection spéciale sur les jeunes vierges vouées au culte de Vesta. Les pontifes portaient la robe prétexte; ils avaient pour coiffure un bonnet de laine de forme conique, et k la main une baguette entourée de laine et se terminant par une houppe. Cette magistrature, à la fois puissante et populaire, datait de Numa. Quand les chrétiens, sortis de l'ère des persécutions, commencèrent à se sentir les maîtres à Rome, ils s'emparèrent des positions existantes et, pour ménager la transition vis-à-vis des païens en leur empruntant leurs usages, leurs cérémonies et leur vocabulaire, ils donnèrent à leur pasteur, ou évêque, le nom de pontife, qui finit par devenir souverain pontife. Le mot pontifical s'applique à tout ce qui concerne le pontife, emploi, costume, honneurs; il se dit spécialement d'un volume renfermant divers formulaires et prescriptions concernant les évêques, approuvé en 1596 par Clément VIII avec défense d'y jamais rien changer, il fut réédité et revu par Urbain VIII en 1644. — On connaît aussi sous le nom de Pontifices un ordre

de frères hospitaliers, qui s'établissaient le long des rivières pour transporter gratis les voyageurs d'une rive à l'autre, ou qui s'associaient pour construire des ponts. L'un des plus connus est le petit Benoît, ou Bénézet 1177. On leur doit le premier pont d'Avignon et celui de Saint-Esprit. L'ordre fut sécularisé 1519.

 

POPES, nom des prêtres dans l'Égl. grecque.

 

POPER, parti de raskolnicks qui, vers la fin du 17®« siècle, décida de conserver des prêtres et fit ainsi un schisme dans la secte. Ils se trouvaient surtout dans les environs de Novogorod, et se divisèrent de nouveau en plusieurs branches dont les plus connues sont les Slobodâer qui attachaient une grande importance au pain consacré, et les Reconsacrants de l'Ukraine, qui tenaient à oindre de nouveau avec une huile particulière les prêtres qui se joignaient à eux.

 

PORDAGE, Jean, né 1608 à Londres, f 1685 (Bouillet 1625-1698), étudia à Oxford la théol. et la médecine, et fut nommé pasteur à Reading, puis à Bradfield. Amené au mysticisme par la lecture de Bœhme, il réunit autour de lui quelques amis, auxquels il communiqua ses visions et qui finirent par en avoir à leur tour. Destitué il se rendit à Londres avec ses partisans, mais la peste de 1655 les décida à retourner à Bradfield. Là Jane Leade se joignit à eux, mais la mort de Pordage mit fin à ce petit cercle d'amis, v. Philadelphie. Pordage voit Dieu dans un monde pur et sphérique, d'où jaillissent incessamment des âmes ou esprits purs qui, s'unis-sant à la matière éternelle, forment la sphère des anges et celle des hommes suivant leur plus ou moins grande finesse. Le premier homme, Adam, était androgyne; sa chute a amené la séparation des sexes. La rédemption consiste dans la réunion de l'homme avec la Sophia ou Sagesse, et par elle avec Christ, enfin par Christ avec Dieu. Le célibat est essentiel pour y arriver. Tout le christianisme historique est le con-trepied du vrai christianisme. — Ses principaux ouvrages sont: la Théol. mystique, la Divine et vraie métaphysique, Court aperçu sur le monde des esprits et des anges.

 

PORNOCRATIE. Le latin n'est pas seul à braver l'honnêteté dans les mots. Le grec en fait autant. Le mot grec pornê signifie une femme au comble de la dégradation, femme à vendre ou à louer. La pornocratie est donc le règne et le gouvernement de femmes de cette espèce. On désigne sous ce nom la fatale période de l'histoire où l'Égl. chrétienne eut à sa tête trois femmes de mauvaise vie, prostituées de haut rang, les deux Théodora et la Marozzia, qui, pendant plus d'un demi-siècle, 904-963, firent des papes dans tous les sens du mot, et soulevèrent le dégoût et l'indignation de la chrétienté tout entière. Ce régime, qui a eu pour principal historien Liatprand, alla de Serge III à Jean XII, et ne flétrit pas moins de onze papes. — v. les diff. art.

 

PORPHYRE lo philos, néoplatonicien, né vers 233 à Tyr ou à Batanée en Syrie; de son vrai nom Mélek, ou Malchus, roi, grécisé en purpureus, revêtu de la pourpre, ou Porphyre; étudia à Athènes soos Longin, à Rome sous Plotin, cultiva les sciences, se distingua dans l'art d'écrire, et succéda à Rome à son maître. Il fut le premier qui écrivit contre le christianisme, qu'il haïssait comme prétendant être la seule vraie religion. Son traité Contre le Christianisme, en 15 livres, fit sensation. Il y combat surtout l'origine divine des saintes Écritures. Si Christ est le seul chemin du salut, que sont devenus ceux qui ont vécu avant lui? Il s'applique à chercher des contradictions, surtout entre Pierre et Paul; de même entre Jean 7, v. 8 et 14; dans Galat. 2; il estime que les prophéties de Daniel se sont accomplies sous Antiochus Épiphanes et ne concernent pas le Messie. Il hésita cependant à dire du mal de Christ « qui est mort comme un dieu. » Il a écrit encore beaucoup d'autres ouvrages. Ses attaques ont été réfutées par Méthodius de Tyr, Eusèbe de Césarée, Apollinaire de Laodicée, etc.

2® Fidèle esclave de Pamphile q. v.

 

PORRÉE (G. de la), v. Gilbert 4«.

 

PORTE-GLAIVES, v. Frères 6®.

 

PORTIUNCULA, nom de la petite église et du petit presbytère que les bénédictins d'Assise cèdèrent aux disciples de saint François. Le saint ayant obtenu de Dieu qu'une indulgence fût attachée à la célébration du jour de la dédicace, 2 août, Honoré III confirma cette indulgence, et d'autres papes l'étendirent même à ceux qui feraient la fête sans se rendre dans cette église. Paul III l'étendit à tous les jours de l'année, et les franciscains de la Carinthie en exploitèrent dès le 17me siècle le bénéfice en l'étendant à toutes leurs églises. Innocent XI décida même 1687 que les morts pourraient en profiter.

 

PORT-ROYAL, célèbre abbaye de religieuses bernardines, située à25 kil. S.-O. de Paris, non loin de Versailles, dans une petite vallée, près d'un étang, et surnommée des Champs par Philippe-Auguste, qui s'y était reposé quelques moments pendant une chasse. Sur le désirqu'il en manifesta, Odon de Sully y fit construire un monastère 1223 qui fut remis à des religieuses de l'ordre de Cîteaux; elles prirent le nom de filles de Saint-Bernard, mirent leurs biens en commun et se consacrèrent à la prière et à l'éducation de la jeunesse; en 1647 elles ajoutèrent k leurs devoirs celui de l'adoration perpétuelle du Saint-Sacrement, dont elles reçurent aussi le nouveau surnom. Cette abbaye, qui avait d'abord prospéré, était tombée dans le relâchement. Une nouvelle abbesse, Marie-Angélique Arnaud, sœur du grand Arnaud et fille d'Antoine, s'efforça de ramener le couvent dans les voies de la piété et de rétablir la règle de saint Benoit dans toute sa rigueur, mais elle rencontra des difficultés qui la firent hésiter à conserver ses fonctions. Zamet, év. de Langres, avait fondé à Paris une confrérie féminine, et comme les nonnes de P.-R. étaient à l'étroit chez elles, il persuada Angélique de transférer dans son monastère une partie de son personnel et d'en accepter la direction. Comme succursale cette nouvelle maison s'appela Port-Royal de Paris; elle était au faubourg Saint-Jacques, local actuel de la Maternité. Diverses difficultés survenues entre Saint-Cyran qui en était le directeur, et Richelieu appuyé par Zamet, décidèrent Angélique à se retirer à Paris avec ses religieuses, et P.-R. des Champs, ainsi abandonné, devint en 1738 la retraite préférée de quelques hommes pieux et savants qui, sans règle apparente, formèrent cependant une sorte de confrérie, se livrant à toutes sortes de travaux intellectuels ou manuels, aux études et à l'agriculture, donnant des leçons, et subvenant par eux-mêmes à leurs divers besoins. L'un des premiers fut Antoine Lemaitre; puis vinrent les frères Simon Séricourt et Isaac de Sacy; puis Robert d'Andilly, Antoine Arnaud, Singlin, Racine, le duc et la duchesse de Luynes, Til-lemont, Nicole, Pascal, etc. Ils ouvrirent des écoles et des pensionnats de garçons, et inaugurèrent dans l'enseignement une méthode toute nouvelle, en en bannissant la routine, le pédan-tisme, l'ennui et la frivolité. Les premiers ils firent des livres d'école en français et donnèrent leurs leçons en français. En 1648 la plupart des religieuses étaient revenues à leur première maison, et dans le voisinage des savants anachorètes, elles avaient aussi fondé des écoles de jeunes filles. Cet ensemble d'institutionsscolaires peut être considéré comme la vraie gloire du grand siècle; avec des maîtres comme Saint-Cyran, de Sacy, Nicole, Singlin, cet enseignement qui. restaurait les sciences, la littérature, la morale, obtint un brillant triomphe et une grande notoriété, mais cela ne dura que quelques années, de 1636 à 1656. La jalousie des jésuites et le bigotisme du roi Louis devaient avoir raison d'une école dont la prospérité rainait les uns, dont la gloire éclipsait celle du monarque. Port-Royal se sentait menacé. Une guérison miraculeuse qui se fit dans une de ses églises à Paris, et les premiers succès des Provinciales, le sauvèrent pendant quelque temps. Mais ses ennemis étaient tenaces. Ils eiploitè-rent l'accusation de jansénisme portée contre les solitaires de P. R., qui étaient en effet presque tous jansénistes, même les femmes, et ils trouvèrent moyen de faire intervenir la politi* que là où elle n'avait que faire, et Annat, que Pascal avait plus particulièrement attaqué, se chargea de prouver au roi que les jansénistes étaient les ennemis du royaume, et que P.-R. -complotait contre la sûreté de l'État. Le 13 avril 1661 une ordonnance royale condamna tous les prêtres, moines, nonnes et instituteurs à signer un formulaire rédigé par les évêques contre les cinq thèses de Jansénius. Plusieurs, même des hommes de P.-R. signèrent en faisant des réserves; les femmes montrèrent plus d'énergie. Angélique f le 6 août 1661 après avoir reçu la notification que sa maison allait être fermée; sa soeur Agnès refusa de livrer les novices qu'on lui réclamait; on les lui arracha par la force. Cependant poussées à bout, quelques unes cédèrent à leur tour sous l'influence d'Arnaud, qui fut sévèrement blâmé par Pascal. Les négociations sur la signature et sur le sens qu'il convenait de lui donner durèrent longtemps. Sacy fut mis à la Bastille. Mais avec Clément VIII on en revint à l'idée d'une conciliation fondée sur des équivoques. En 1702 l'archev. de Noail-les blâma tout ce qui était réservation mentale ou duplicité, et malgré une bulle du pape il fit déclarer par ses évêques que les décisions papales n'avaient force de loi que si elles étaient acceptées par les docteurs de l'Église. Le roi n'en voulut pas moins imposer aux nonnes de P.-R. la nouvelle signature, et sur leur refus, un édit du 11 juillet 1709, inspiré par Letellier, supprima P.-R. des Champs, et dispersa les religieuses. Le 22 janv. 1710 on démolit la chapelle et le couvent, on passa la charrue sur ses ruines, et les tombeaux même furent profanés. Ainsi finit un des centres qui avaient le plus contribué à la grandeur littéraire, morale et scientifique de la France, en un temps où le clergé, la routine et le roi pesaient sur les esprits et les consciences. V. Sainte-Beuve, Fau-gère,Ranke, et L. Burnier. Hist. de l'éducation.

 

PORTUGAL. Après avoir partagé longtemps les destinées de l'Espagne, ce pays en fut virtuellement détaché quand Alphonse VI de Cas-tille céda à son gendre Henri de Bourgogne les provinces reprises sur les Maures, 1094. Mais le fils de celui-ci, Henriquez, sous le nom d'Alphonse I*f, se fit couronner roi par l'archev. Pélage de Braga 1143, et en échange de ce service rendu, accepta que son royaume fût considéré comme un fief pontifical. C'était trop et 4e ce moment les conflits se multiplièrent; les rois trouvaient que les pontifes et les évêques dépassaient en exigences les bornes permises, et les légats répondaient par des excommunications et des interdits. Un concordat conclu 1289 entre Denys et la curie mit un terme à ces luttes et à la trop grande concentration de terres entre les mains de l'Église. Jean I", fondateur d'une nouvelle dynastie 1385, obtint du pape que l'évêché de Lisbonne fût reconnu indépendant de l'Égl. d'Espagne, et bientôt par la prise de Ceuta, et par des découvertes en Asie et en Amérique, le Portugal regorgea de richesses; mais l'Inquisition, les jésuites et les persécutions contre les juifs l'amoindrirent et l'épuisé-rent; il retomba entre les mains de l'Espagne 1580-1640. Avec la maison de Bragance, que le pape n'osa pas reconnaître, par égard pour l'Espagne, Jean IV rechercha l'appui de la France, mais Pierre H pencha vers l'Angleterre, et l'influence de cette dernière puissance n'a dès lors pas cessé de se faire sentir, souvent d'une manière heureuse, quelquefois trop ostensiblement. Le cléricalisme et l'amour du faste inspira à plusieurs rois l'idée de s'attacher le clergé et les jésuites en les protégeant et en les comblant, mais le marquis de Pombal mit fin à toutes ces intrigues, et rendit à la circulation des biens qui lui avaient été enlevés. L'Inquisition fut abolie par l'occupation française, et ni Jean VI, ni Marie n'ont osé rappeler les jésuites. Le clergé ayant favorisé l'usurpation de don Miguel, don Pèdre en profita pour limiter son pouvoir, supprimer la plupart des ordres et séculariser leurs biens. Mais toutes ces mesures n'ont réussi ni à réformer, ni à relever l'Église. Le Portugal compte, outre le patriarche cardinal de Lisbonne, 2 archev. à Braga et à Évora, 14 évêques sur le continent, et 6 dans ses colonies. Il y a un archev. à Goa. Les églises protestantes sont peu nombreuses, à Lisbonne, Oporto, et se composent surtout d'étrangers anglais et allemands. La liberté des cultes existe en droit, et même en fait, mais dans des conditions qui la rendent presque illusoire.

 

POSIDIUS, év. de Calama, Numidie, un des principaux adversaires des donatistes, a écrit 432 une Vie de saint Augustin, son maître et ami.

 

POSSEVIN, Antoine, né 1534 à Mantoue, étudia à Rome, entra dans l'ordre des jésuites en 1559, s'exerça comme missionnaire dans les vallées vaudoises et chez les protestants français, fut successivement recteur des collèges d'Avignon, Lyon et Bologne, et mérita de Grégoire XIII, par son habileté, d'être employé dans plusieurs négociations difficiles. Il fut envoyé en Suède el décida la conversion de Jean MI en le menaçant de la damnation éternelle; mais il avait promis au roi diverses réformes, et comme le pape refusa de les octroyer, le toi se trouva peu à peu délié de ses engagements et la position des jésuites devint intolérable. Possevin passa en Pologne, où il obtint quelques succès, puis en Russie, ,où il fit conclure en 1582 à

Kieverova-Hôrka la paix entre la Russie et la Pologne; il espérait que Ivan IV se soumettrait à Rome; il dut se contenter de quelques faveurs accordées aux catholiques. Après avoir travaillé encore quelque temps comme nonce en Polo-logne, il passa ses dernières années à Padoue, Bologne et Venise, f 1611 à Ferrare. Auteur d'un Apparatus sacer ad scriptores V. et N. T., revue des auteurs ecclésiastiques, d'une Hist. de la Moscovie, et de plusieurs autres ouvrages. Vie par Dorigny, 1712.

 

POSTEL, Guillaume, né 1510 à Barenton, Normandie, jésuite, un des plus savants hommes de son temps, mathématicien, orientaliste, parlant presque toutes les langues de l'Europe; envoyé par François 1er en Orient, il en rapporta de précieux manuscrits, et fut nommé prof, à Paris. Mais le cerveau était atteint, son enseignement s'en ressentit; il parla d'une prochaine émancipation des femmes, qui régneraient avec les hommes; il se crut une mission divine pour réunir tous les hommes dans une même foi sous un mêméroi. Il se lia à Venise avec une femme aussi folle que lui, la mère Jeanne, qui acheva de l'égarer. Destitué, repoussé de son ordre, poursuivi par l'Inquisition, emprisonné, il fut déclaré fou et relâché. Il quitta la France, 1553, erra de ville en ville, vécut à la cour de Ferdinand I«r, guérit, désavoua ses erreurs, reprit ses fonctions, mais après une rechute il fut enfermé au couvent de Saint-Martin des Champs à Paris,oùil f 1581. Il a laissé de nombreux écrits dont plusieurs, dit-il, par révélation, sur la théol. et les langues orientales.

 

POSTILLES, notes ajoutées après le texte (post illas) dans les anciens mss. On donnait aussi ce nom au petit commentaire que le prédicateur ajoutait à la péricope du jour; ce doit même avoir été le premier nom de l'Homiliaire de Charlemagne.

 

POTAMLENA, jeune martyre égyptienne, plongée dans une cuve de poix fondue, sous Septime Sévère 207. Eusèbe ajoute que le soldat qui la gardait, Basilides, frappé de son courage, se convertit à l'Évangile, confessa sa foi et fut décapité.

POTHIN ou Phatin, év. de Lyon. Agé de plus de 90 ans, il souffrit le martyre sous Marc-Au -rèle 177, et succomba dans une dure prison anx mauvais traitements qui l'accablèrent. Eusèbe a conservé la Lettre, ou rapport, que les égl. de Vienne et de Lyon adressèrent aux chrétiens d'Asie au sujet de cette persécution.

 

POUVOIR des Clefs, expression tirée deMatt. 16,19. où Jésus dit à Pierre: « Je te donnerai les clefs du royaume; » promesse expliquée et complétée par ces mots: « Ce que tu lieras sur la terre sera lié dans les cieux. » Dans un passage parallèle pour le sens, Jésus dit de même aux apôtres réunis: t A quiconque vous pardonnerez les péchés, ils seront pardonné*, » etc. Jean 20,19. C'est une promesse faite à tous les chrétiens, aux vrais chrétiens, et à eux seuls, dans la mesure même de leur foi, et l'interprétation abusive qu'on en a faite plus tard ne se justifie ni par le texte, ni par le contexte. Pendant les premiers siècles on n'y a vu qu'un droit général donné à l'Église, et plus spécialement à ses prêtres et à ses martyrs, le droit d'excommunier et celui de réhabiliter les pécheurs, sans prétendre toutefois prononcer une sentence définitive, qui n'appartient qu'à Dieu seul. Il semble, d'après Tertullien, que l'év. de Rome ait été un des premiers à réclamer pour l'épis-copat ce privilège, mais toujours sans en exagérer la portée. Jérôme. Grégoire-le-Grand, Pierre Lombard lui-même, distinguent encore soigneusement l'absolution donnée par le prêtre et le pardon qui vient de Dieu. Mais déjà l'on commençait à s'habituer à l'idée que le prêtre est un intermédiaire, un médiateur entre Dieu et les hommes, et que le pardon promulgué par lui sur la terre est nécessairement ratifié dans le ciel. C'est Thomas d'Aquin, le scolastique par excellence, qui a définitivement formulé le dîog-me, à peu près tel qu'il est reçu aujourd'hui, et tel que le conc. de Trente l'a voté, Sess. XIV, chap. VI, c.-à-d. « Le ministère des ciels n'appartient qu'aux évêques et aux prêtres..., et les prêtres même qui sont en péché mortel, ne laissent pas de remettre les péchés, en qualité de ministres de J.-C. » C'est logique dans le système, mais c'est aussi une présomption contre le système. La Réformation est revenue à l'idée évangélique; ce n'est pas l'homme qui pardonne, c'est Dieu; ce que le chrétien (et non pas seulement le prêtre) peut faire, c'est de déclarer, d'annoncer le pardon qui est en J.-C. Luther dit même dans ce sens, que le prédicateur de l'Évangile ne peut pas ouvrir la bouche sans annoncer l'absolution et la grâce. Au 17* siècle il y eut quelques tentatives de restaurer le sacerdoce catholique et de rétablir pour le pasteur luthérien le pouvoir des clefs tel que le possédait le prêtre, en le rattachant à la personne, même indigne. Le piétisme réagit contre cette fâcheuse tendance, et le rationalisme alla plus loin encore, puisqu'il conteste le pardon dans la mesure où il nie le péché. Schleierma-cher a défini le pouvoir des clefs le droit que l'Église a de déterminer ce qui constitue la fie chrétienne et d'agir en conséquence vis-vis de ses ressortissants dans les limites de sa compétence.

 

PRAGMATIQUE-SANCTION (du grec: ordonnance réglant les affaires), nom donné à certaines lois d'un caractère et d'un intérêt général, par les rois de France ou par les diètes impériales. Les » connues sont: lo celle de saint Louis 1269, qui devint la base des libertés de l'Église gallicane. On en a contesté à tort l'authenticité. Après avoir déclaré que la France ne relève que de Dieu seul, le roi repousse toute ingérence étrangère, revendique le droit de la libre élection des évéques et des prêtres, prohibe les réserves et les grâces expectatives, dénie au pape le droit de promotion, défend de faire pour Rome des levées d'argent en France sans son autorisation, et fixe les cas où il est permis d'en appeler (comme d'abus) de la justice ecclésiastique à la justice royale.

2° celle de Charles VU qui, en 1438, en présence du clergé rassemblé à Bourges, renouvela la précédente en la développant, proclama les libertés de l'Égl. gallicane telles que le conc. de B&le venait de les définir, reconnaissait la supériorité des conciles sur le pape, défendait la publication des balles avant leur enregistrement au parlement, confiait aux chapitres l'élection des évéques, retirait à la carie le revenu des Iténéfices vacants, restreignit les effets de l'excommunication, etc. Les ducs de Bourgogne et de Bretagne refusèrent de l'admettre. Pour se concilier Pie II, Louis XI la supprima en principe 1461, tout en la laissant subsister en fait. Charles VIII la rétablit, François Ier l'abandonna de nouveau par le concordat de 1516 avec Léon X.

3» celle de Charles VI, dite Pragm. autrichienne, 1713, par laquelle l'emp. désigne comme héritière de tous ses États sa fille aînée, Marie-Thérèse. — 4« Celle de Charles III d'Espagne, 2 avril 1767, qui supprime l'ordre des jésuites.

 

PRAGUE, évêché fondé 973 pour la Bohême, qui relevait précédemment de Ratisbonne. Son premier titulaire fut le saxon Dithmar t 982, auquel succéda l'apôtre de l'Allemagne, Adal-bert f 996. En 1346 il fut érigé en archevêché, après avoir été jusqu'alors sous la direction de celui de Mayence. Son université, la première en Allemagne, fat fondée par Charles IV, 1348, et illustrée par d'éminents docteurs. Prague fut au 15me siècle le théâtre d'un grand mouvement religieux (Huss, Jérôme). Les Compactata de 1433 rétablirent un moment la paix. C'est aussi à Prague qu'eut lieu la fameuse défenestration 1618, qui déchaîna la guerre de Trente ans.

 

PRAXEAS, docteur de l'Asie Mineure, qui parut à Rome vers le milieu ou la fin du 2d siècle, et qui, sous prétexte de combattre le mon-tanisme, mit en avant des idées erronées sur les rapports du Père et du Fils. Il était patripas-sien; v. Unitaires. Mis en prison pour sa foi, il en conçut beaucoup d'orgueil; mais de retour chez lui il rétracta momentanément ses erreurs. Tertullien l'a combattu avec vivacité, lui reprochant d'avoir fait deux fois l'œuvre du diable: en crucifiant le Père, et en repoussant le Saint-Esprit (le montanisme).

 

PRÉBENDE, revenu attaché à une place de chanoine dans un chapitre. C'était primitivement le droit de tous les clercs à la table commune. Il s'est, avec le temps, augmenté et modifié de diverses manières.

 

PRÉCISTE. Celui qui a été nommé à une place ou charge ecclésiastique en vertu du droit de premier postulant.

 

PRÉCONISATION, acte par lequel le pape, dans l'assemblée des cardinaux, désigne et proclame les évéques élus dans les formes régulières, après avoir vérifié leurs titres, et leur assigne leur diocèse.

 

PRÉMONTRÉS. Cet ordre fondé 1121 par Norbert de Santenq.v., avait pour objet la cure d'&me et la prédication; il avait pour règle l'ascétisme le plus rigoureux; dans le principe il ne mangeait même pas de viande. Son costume était blanc. L'abbé de Prémontré était général de l'ordre, mais peu à peu les provinces d'Allemagne et d'Espagne se rendirent indépendantes; celle d'Espagne se réforma 1575 dans le sens de la stricte observance. En 1630 la règle fut revisée et confirmée. Des religieuses du même ordre, portant le même costume, plus un voile et un tablier, vécurent d'abord dans le même couvent, n'étant séparées des moines que par un mur, mais il parait que ce mur ne suffit pas, car en 1138 cette espèce d'association fut supprimée par une résolution portant entre autres < qu'il n'y a rien de plus hideux et de plus antichrétien que les femmes, c L'ordre, qui compta jusqu'à mille abbayes, n'en possède plus auj. qu'un petit nombre, et très peu de femmes.

 

PRÉPON, Marcionite, cité par Eusèbe comme auteur d'une lettre à Bardesanes. Il voit dans le démiurge de Marcion (auteur du mal et vrai Dieu) deux dieux distincts, un bon et un mauvais; en tout, par conséquent, trois dieux.

 

PRESBYTÉRIENS; du grec presbyteros, prebstre, prêtre, ou ancien. On nomme ainsi les hommes ou systèmes qui regardent le prêtre ou ancien comme la plus haute dignité ou charge ecclésiastique établie par J.-C. pour le gouvernement de son Église, par opposition à ceux qui placent les évéques au-dessus des prêtres, et qui créent ainsi une hiérarchie comme étant d'ordre divin. L'identité de fonctions entre l'évêque et l'ancien est clairement établie par plusieurs passages du N. T.; les diacres en sont distingués; v. Hiérarchie, et Diacres. Cela ne signifie nullement que la forme épiscopale. ou toute autre soit interdite; elle peut se justifier à certains points de vue et dans certaines circonstances, mais elle n'est pas plus de droit divin que la forme monarchique pour le gouvernement des peuples. C'est une des questions que la Bible, dans sa largeur et sa spiritualité, laisse à l'appréciation de l'Église et des fidèles. D'après le N. T. le prêtre ou pasteur, ayant charge d'Âme, était nommé par la communauté, avec ou sans la participation des apôtres. Clément de Rome est le premier qui, dans sa lettre aux Corinthiens, réclame pour les prêtres une autorité positive; il part de l'idée que, nommés par les apôtres, ils ont hérité de ceux-ci le pouvoir des clefs, et il inaugure la distinction entre l'ecclésiastique et le laïque. Pour éviter un émiette-ment trop grand de leurs congrégations et pour maintenir entre elles une sorte d'unité, les presbytériens, notamment en Angleterre, ont en général un gouvernement commun composé de délégués des différentes églises, chargé dans certaines limites de contrôler la marche, les résolutions et même le personnel des paroisses. Il y a d'abord, comme base et point de départ, le conseil de paroisse, composé du pasteur et d'anciens choisis parmi les pères de famille; puis le presbytère, mixte aussi, qui a une compétence plus étendue et qui examine les titres des candidats au ministère: puis le synode provincial ou de district; enfin l'Assemblée générale, ou Cour ecclésiastique supérieure, qui se réunit ordinairement une fois par an. La doctrine est presque partout représentée par la Conf. de foi de Westminster, quoique en certains endroits, notamment aux États-Unis, un relâchement se soit produit sous le nom de Nouvelle école et ait abouti à l'unitarisme. Le culte est chez plusieurs réduit à sa plus simple expression; les liturgies sont supprimées, ainsi que les Dix commandements, le Symbole, les doxo-logies, les fêtes ecclésiastiques; les orgues même sont en suspicion, comme un reste de catholicisme. Le sermon en forme la partie principale. La vie religieuse se distingue par une grande connaissance de la Bible, par l'observation du dimanche, par l'habitude du culte domestique, par le zèle pour les missions et par la participation active des laïques à tout ce qui regarde le gouvernement de l'Église. On évalue à près de 7 millions le nombre des presbytériens dans le monde; c'est surtout en Ecosse et aux États-Unis qu'ils se trouvent; il y en a aussi en Angleterre, en Irlande et en France; en Écosse ils se divisent en trois branches: l'Église établie, nationale, dont la reine est le chef nominal, et qui a maintenu en beaucoup de paroisses le système du patronage; l'Égl. libre, qui date de 1843 et qui a pour but de défendre l'autonomie de l'Église; enfin l'Égl. presbytérienne unie, qui date du siècle dernier, qui s'est séparée à cause du patronage, et qui finira par se réunir à la précédente. Aux États-Unis on distingue l'ancienne école, qui a son principal séminaire à Princeton, et la nouvelle dont le séminaire est à New-York; ce sont en réalité deux égl. différentes.

 

PRÉSENCE. Les chanoines sont astreints à une participation personnelle au service da chœur. Pour la mieux assurer, une partie des revenus des chapitres est distribuée chaque jour entre ceux qui ont assisté aux offices; c'est ce qu'on appelle ailleurs des jetons de présence. Le conc. de Trente confirme cet usage. — v. aussi Résidence.

 

PRÉSENTATION (Droit de). C'est le droit que possède le patron d'un bénéfice de présenter à l'evêque un titulaire; deux conditions doivent être remplies; le titulaire doit être qualifié pour la fonction, et la présentation doit être faite dans un délai déterminé. En cas de simonie constatée, ou si les conditions ne sont pas remplies, le patron perd son droit pour l'élection pendante. Dans la plupart des Égl. protestantes, les paroisses ont le droit de présentation; la nomination appartient au consistoire, au synode ou à l'État.

 

PRÉTEXTAT, archev. de Rouen vers 555, parrain de Mèrovée, second fils de Chilpéric, bénit le mariage de Mérovée avec sa tante Brune-haut, ce qui lui valut la colère de Chilpéric, la destitution par le concile de Paris 577, et l'exil à Jersey. Après la mort de Chilpéric il revint à Rouen, mais Frédegonde le fit «iss&ssiDër 588r pour se venger des reproches qu'il lui avait adressés et de ses sympathies pour firunehaut v. Rouen.

 

PRETORIUS lo Abdias. né 1524 en Bran debourg, recteur de l'école de Magdebourg prof, de théol. à Francfort s. l'O. Dans le coo flit avec A. Musculus, sur la nécessité des bonnes œuvres, il dut fléchir devant son adver saire protégé par le prince, et se retira à Wit tenberg. f 1573.— 2» Stephan, pasteur de Salz-wedel à la fin du 16®* siècle, engagé dans de nombreuses controverses et difficultés, pour avoir émis des idées qu'on ne trouvait pas suffisamment orthodoxes; il soutenait entre astres l'inamissibilité de la grâce, le bonheur à venir commençant déjà sur la terre, etc., doctrines qui comptent encore auj. bien des adhérents. Son disciple Martin Statius, diacre à Stettin, t 1655, a publié de nombreux extraits de ses ouvrages, même en en retranchant les passages les plus accentués, ce qui ne l'a pas mis à l'abri de nombreuses tracasseries.

 

PRÊTRES-JEAN. Curieuse apparition d» lime et du 12«« siècles. Le bruit se répandit k l'époque des croisades, qu'il y avait en Orient un puissant prêtre chrétien, qui gouvernait ses États avec une magnificence inouïe. La légende, la curiosité, l'ambition s'emparèrent de ce mystérieux personnage et l'on multiplia les tentatives pour le découvrir. On le chercha d'abord en Afrique et Ton crut l'avoir trouvé en Abys-sinie, mais on reconnut qu'on s'était trompé. On n'arriva à une solution un peu claire de cette énigme qu'au moment où la dynastie elle-même allait cesser d'exister, et c'est Assemani qui, au siècle dernier, a donné enfin des renseignements exacts sur l'histoire de ces rois et de ce royaume. Sur les frontières de la Chine, au sud du lac Baïkal, se trouvait un peuple connu sous le nom de Kèrithes, en chinois Unch-Khans. Ils se convertirent au christianisme vers l'an 1000, sous l'influence du patriarche Jean; leur roi, qui résidait à Karakarum, se fit baptiser et reçut le nom du patriarche. Soit qu'il se fût fait aussi consacrer (avec les évêques nestoriens c'était assez facile), soit comme titre d'honneur, soit au contraire par humilité et pour établir qu'il n'était qu'un serviteur de Dieu, il prit le titre de prêtre, au lieu de s'appeler roi, et il légua à ses successeurs cette appellation dynastique. Le premier n'est connu que par sa conversion et son baptême. Le second du nom, vers 1060, fut un conquérant; l'histoire relève son humanité et sa justice, vertus chrétiennes au milieu de populations barbares. Le prêtre Jean III, vers 1145, riche et puissant, voulut venir au secours des chrétiens de Syrie et de Palestine, mais il en fut empêché; il est connu par une lettre à l'emp. Manuel Commène, découverte par Assemani, contestée à tort par Mosbeim qui l'attribue à un nestorien, dans laquelle il parle des Israélites des dix tribus comme faisant partie de son empire. Jean IV, surnommé David, régna pendant le dernier quart du 12me siècle; sous son gouvernement le christianisme fit de grands progrès dans l'Asie centrale, grâce aux missionnaires nestoriens. Alexandre III lui écrivit en 1177 pour essayer de le rattacher à l'Égl. de Rome, mais cette lettre n'eut pas de suites; l'orage qui éclata 25 ans plus tard et qui ébranla l'empire, porta les préoccupations partout ailleurs. Le jeune Te-mugin, né 1164, ayant eu une intrigue avec Visulogine, fille du prêtre Jean, dut quitter la cour; il jura de se venger, fomenta une révolte, reparut sous le nom de Gengis-Kan, épousa celle qu'il aimait, renversa du trône le dernier des prêtres-Jean, qui fut assassiné 1202, et mit fin à cette étrange dynastie sacerdotale, sans toutefois se montrer dès l'abord hostile au christianisme. Sa femme même resta chrétienne et conserva son confesseur. Gengis-Kan prit pour devise: Un Seigneur dans le ciel, un seigneur sur la terre, le grand dominateur des Tartares.

 

PRÊTRES, v. Hiérarchie, Presbytériens, etc.

 

PRIDEAUX lo John, né 1578 à Stawford, Devonshire; recteur et vice-chancelier à Oxford, témoigna pour le monarque et l'anglicanisme un zèle qui fut récompensé par l'évêché de Woroester 1641, mais la révolution lui fit perdre sa place, et il f pauvre 1650 à Bredon. — 2° Humphrey, l'auteur de l'Hist. des Juife; né 1648 à Padston, Cornouailles, fut successivement pasteur à Saint-Clément près d'Oxford; à Bladen, à Suffolk, et enfin doyen de Norwich, où il f 1724.

 

PRIERIAS, Sylvestre, moine dominicain, maître du palais à Rome, écrivit le premier contre les thèses de Wittenberg un Dialogue au sujet des conclusions présomptueuses de Luther contre la majesté papale. Luther y répondit par un autre Dialogue, qui lui ferma la bouche. Un second écrit de controverse: Des erreurs et des arguments de Luther, eut encore moins de succès, et Léon X dut imposer le silence à ce malheureux avocat. Il le nomma cependant l'un des juges qui devaient examiner l'affaire de Luther. Dans les démêlés de son ordre avec Reuch-lin, il porta la question devant le pape. Sa Summa Sylvestrina, ou Des cas de conscience, est connue dans l'histoire de la Casuistique.

 

PRIESTLEY, Joseph, né 1733 à Field-Head près de Leeds, Yorkshire, d'une vieille famille puritaine. Unitaire, il fut en 1768 pasteur d'un troupeau dissident à Leeds, en 1770 bibliothécaire de lord Shelburn, puis de nouveau pasteur dissident à Birmingham. Il s'occupait en même temps beaucoup de physique et de chimie; il a écrit sur la vision, l'électricité, les différentes espèces d'air; le premier il a isolé l'oxygène, qu'il a appelé d'abord phlogistique. En philos, il était partisan de Hartley et tendait au matérialisme. Il a écrit plus de 70 volumes. Son enthousiasme pour la révolution française lui attira des persécutions. Pendant qu'en France on le nommait citoyen et membre de la Convention, sa maison était saccagée par le peuple et il dut s'enfuir en Amérique. Il se fixa à Northumber-land, Pensylvanie, comme professeur, et il f 1804. C'est dans les sciences naturelles qu'il s'est fait sa meilleure réputation. Comme théologien il n'a pas grande importance; son ouvrage le plus considérable dans ce domaine est son Hist. de la corruption du christianisme. Il a écrit ses Mémoires, complétés par son fils, 1806.

 

PRIMAT, titre de l'archevêque qui, dans un un pays, jouit d'un droit de préséance et de juridiction sur les autres archev. ses collègues. C'est à lui que revient l'honneur de les installer, de convoquer les conciles nationaux, de couronner les princes, de recevoir les appels. Ce droit, concédé par le pape, se rattachait à certains sièges, et souvent il avait été la récompense d'un vicariat apostolique. C'est en Occident un titre qui équivaut à celui de patriarche en Orient. Certains sièges l'ont revendiqué, mais sans y avoir des droits suffisants, Arles, Reims, Bourges, Narbonne, Vienne, Bordeaux, etc. Les seuls bien authentiques sont celui de Lyon, qui date de Grégoire VII, (renouvelé par Pie IX en 1851) et celui de Bourges, dont le titulaire s'appelait primat d'Aquitaine. Cantorbéry, Upsal, Prague, Guesne en Pologne, Séville, Taragone et Tolède en Espagne, ont été des primaties; de même en Allemagne Mayence, dont l'archev. baron de Dalberg 1806-1810 s'appelait prince-primat. Cette institution est à peu près auj. abandonnée.

 

PRIMICIER (primus in cera, le premier inscrit sur les tablettes de cire), titre donné au premier employé d'une certaine catégorie; puis spécialement, dans un chapitre, le chanoine qui vient après l'archidiacre et l'archiprêtre, et qui est chargé de conduire le chœur et de diriger le clergé inférieur.

 

PRISCILLIEN. Un rêveur égyptien, Marc, de Memphis, se disant enchanteur, et demi-manichéen, ayant passé en Espagne vers la fin du 4®e siècle, séduisit par ses discours deux Espagnols, Agape et Elpidius, et par eux un homme considéré et instruit, Priscillien, qui commença vers 379 d'annoncer sa doctrine, curieux mélange de gnosticisme, de christianisme et de manichéisme. Pour lui, Dieu, le diable, les anges sont éternels; le diable gouverne le temps et le monde; le corps c'est le mal et ne saurait ressusciter; Christ n'a qu'une nature. Ses disciples, ascètes, méprisaient le mariage, sans vivre dans l'impureté; ils regardaient toute procréation comme un mal. Ils autorisaient le mensonge et même le parjure, pour les choses de la foi. Parmi ses adhérents se trouvaient deux évêques, Instance et Salvien. Hyginde Cordoue et Idace d'Émerida s'élevèrent contre les pris-cilliens, qui furent condamnés dans un concile à Saragosse, 380. L'empereur les bannit; ils se rendirent à Bordeaux, où l'évéque les repoussa, mais la veuve Euchrotia les reçut. Après avoir été inutilement à Milan chez Ambroise, à Rome chez Damase, ils finirent par être rétablis en Espagne, et Pr. fut sur le point d'être nommé év. d'Avila. Ithace d'Ossonuba, qui les avait le plus persécutés, fut exilé à son tour. Mais après la mort de Gratien, Maximin reprit la question et les obligea de comparaître devant un nouveau concile à Bordeaux 384; d'abord acquittés, ils forent ensuite condamnés; ils en appelèrent à l'empereur, et furent conduits à Trêves, où Priscillien, Euchrotia et deux anciens, malgré l'énergique intervention de Martin de Tours, eurent la tête tranchée 385, et un grand nombre furent bannis. Voilà le glaive qui entre pour la 1" fois dans l'Église; jusqu'alors les chrétiens avaient été mis à mort pour leur foi par les emp. païens; à présent c'est un emp. chrétien qui frappe des hérétiques. Ithace avait provoqué cette intervention du pouvoir civil, Martin de Tours rompit la communion avec lui. Le peuple d'ailleurs n'était pas plus éclairé; il lapida la priscillienoe Orbica. Mais en dépit de ces persécutions, el malgré le conc. de Tolède 400, malgré les réfutations d'Orose, d'Augustin, de Léon-le-Grand, la secte persista en Espagne; elle ne disparut qu'après le synode de Braga 563.

 

PRIVAT (Saint-), vieux château aux tours sarrasines, situé sur le Gardon, à 24 kilom. de Nimes, non loin du fameux Pont du Gard, et dans l'ancien diocèse d'Uzès. D'abord propriété des évêques, il passa aux mains de la famille Faret, venue du Piémont, 1451, dont un des descendants, Honorât, embrassa la Réforme vers 1535, et aidé de son ami le notaire Louis Colet, travailla et réussit à la répandre dans le pays, notamment à Remoulins. A défaut de temples le manoir servit longtemps d'abri au culte évangélique et se mit en rapport avec Genève. Mao-get, Mutonis, Viret y prêchèrent devant de nombreux auditoires. L'évéque Jean Saint-Gelais d'Uzès se joignit un moment aux réformés, et se maria, mais prétendit rester évôque. La protection de Charles IX ne l'empêcha pas d'être déposé; il finit par se réconcilier avec l'Église et f 1574. Anatole Frontin fut le premier pasteur régulier de Saint-Privat. Charles IX logea au manoir le 12 déc. 1564, avec les futurs Henri IU et Henri IV, et d'autres seigneurs; le comte de Crussol était alors suzerain do royaume. Renée de France y avait passé quel* ques semaines auparavant. Mais la réaction était partout; la Michelade précipita la crise. A Lé-denou l'église fut en partie démolie et une de ses cloches transportée à Saint-Privat. Pendant la guerre de 1570, Coligny est à Nimes avec le jeune roi; il s'avance vers Remoulins et visite le château qui donne un appui solide à la petite armée protestante; mais c'est le dernier grand jour de ce manoir; la Saint-Barthélemy marque le terme de son histoire. Le 30 juin 1629 le roi, accompagné de Richelieu, reçoit dans la salle qui porte encore le nom de Louis XUI, la soumission des habitants de finies. Les Faret s'inclinèrent, mais gardèrent dans leur cœur la foi à l'Évangile. Aujourd'hui le château, plein de curiosités historiques et artistiques, n'est plus qu'un noble et beau domaine, appartenant à M. Th. Caldéron. — v. J. Bonnet.

 

PROBABILISME, v. Jésuites.

 

PROCLUS lo patr. de Constantinople 434-446, avait été le grand ami de Chrysostome, dont il fit revenir les restes en 439. Alors qu'il était encore simple prêtre, il combattit les erreurs de Nestorius et s'allia dans cette controverse avec Cyrille d'Alex, et Jean d'Antiod*. Il jouissait d'un grand crédit auprès de Théodose II. On lui a attribué à tort quelques ouvrages de son homonyme qui suit.

2° Proclus ou Proculus, le dernier des néoplatoniciens un peu considérables. Né 412 à Constantinople, ou à Xanthe en Lycie, il étudia à Alexandrie, puis à 20 ans à Athènes sous Plutarqueet Syrianus; après quelques années de voyages destinés à compléter son éducation, il revint à Athènes 450 où il succéda à Syrianus, comme directeur de l'école, d'où il reçut le surnom de Diadochus, successeur. Il compta de nombreux élèves, f 485. Il combattit avec violence le christianisme et chercha à rendre le paganisme plus acceptable en l'expliquant. Aux doctrines de Platon, dont il a commenté quelques écrits, il mêla celles de Pythagore, d'Orphée, de Platon, de Porphyre, de Jamblique, de sorte que son système est un mélange de théurgie, de magie, de mysticisme et de démo-nologie difficile à comprendre. Il s'était fait initier à une foule de mystères et se disait le hiérophante, le prêtre de la nature entière; il a célébré par des hymnes les dieux les plus divers. Beaucoup de ses ouvrages sont perdus; Cousin a publ. en 6 vol. les principaux de ceux qui restent: la Providence, Traité de la Liberté et du mal, etc. Paris 1820-1825. V. aussi La théol. platonicienne, Hambourg 1618.

 

PROCOPE lo de Gaza, théol. et prof, d'éloquence, 500 à 520, auteur de Comment, sur les Rois, les Chroniques, les Proverbes, Ésaïe, formés d'extraits d'exégètes grecs.

2° Pr. de Césarée, étudia le droit à Béryte et tint une école de rhétorique à Constantinople. Il accompagna Bélisaire dans ses campagnes depuis 526, et devint sénateur et préfet de Constantinople 562. f 565. La manière dont il parle des églises et des monuments de culte construits par Justinien, dans son De œdificiis, laisse présumer qu'il était chrétien. Son Hist. de son temps, en 8 livres, renferme des documents précieux, même au point de vue de l'hist. eccl.; il fait l'éloge de Justinien et de sa cour. Que s'est-il passé?Dans son Hist. anecdota (secrète, ou intime) ses jugements sont tout différents, et il désenchante le lecteur sur le compte de Justinien, de Bélisaire et surtout de Théodora. Quoi qu'il en soit, il fournit des faits et des matériaux abondants pour l'hist. de l'Église. Un ouvrage purement ecclésiastique, auquel il semble faire allusion, doit s'être perdu.

3° et 4<> deux fameux chefs hussites: Pro-cope-le-Grand, ou le Tondu, aide-de-camp de Ziska et souvent son lieutenant, commandait aux taborites; en 1430 il fit une incursion eu Allemagne et s'empara d'un riche butin; en 1431 à Tauss il défit l'armée impériale. Son seul aspect, dit-on, faisait fuir l'ennemi. En 1433 il parut au conc. de Bâle. Son fr., dit le Petit, était également redoutable. Us périrent tous deux en 1434 à Bomischbrod, leurs troupes ayant été affaiblies et diminuées par la retraite des utraquistes.

 

PRODICUS et Prodiciens, gnostiques antino-miens, qui rejetaient toute espèce de culte en leur qualité de fils du soleil, fils du Dieu Très-Haut, maître de toutes lois. Ils avaient des livres apocryphes sous le nom de Zoroastre.

 

PROFESSION, engagement solennel de celui qui prononce ses vœux pour entrer dans un ordre religieux. La cérémonie est accompagnée de la célébration de la messe. L'abbé du couvent y préside pour les hommes, l'évêque pour les femmes. Pour que l'engagement soit valable, il faut que le profès ait un certain âge, qui varie suivant les pays; qu'il ait fait un noviciat, et qu'il soit complètement libre de sa personne, c.-à-d. non marié. Les vœux étant irrévocables, l'ordre se charge à son tour de l'entretien de son nouveau membre et lui accorde tous les droits dont il dispose lui-même.

 

PROLES, André, prédécesseur de Staupitz comme vicaire général des augustins. Né 1429 à Dresde, il étudia la théol. à Leipzig où il prit son grade de magister en 1451. II entra au couvent des augustins à Wermigerode 1452, fut nommé en 1458 prieur et maître à l'école cathédrale de Magdebourg, et enfin vicaire général. Prédicateur estimé, il déplorait l'abaissement de l'Église et le caractère tout formaliste de la religion. On lui reprocha même d'avoir, dans un concile italien, attaqué la hiérarchie et repoussé la création d'un nouveau jour de fête. En tout cas il fut excommunié, mais cela n'empêcha pas ses moines de le bien accueillir. Réhabilité eu 1502, il mourut l'année suivante dans un voyage qu'il fit à Rome par ordre. On a encore quel-ques-uns de ses sermons.

 

PROLI. Maximilien-Bernard-Louis, fils illégitime d'une jolie couturière qui avait travaillé quelque temps au château du coadjuteur Dal-berg à Aschaffenbourg, et que l'on maria précipitamment en 1787 au jardinier Muller, de Kostheim, en lui donnant une place d'inspecteur pour le dédommager. L'enfant né à peu près à cette époque, mais on ne sait où, était magnifique et devint un fort bel homme. Après avoir été tailleuret danseur de corde, il fut reçu enfant de chœur; on l'envoya à Rome d'où il revint par Bamberg et Ratisbonne. Un missionnaire anglais, Shykson, un peu visionnaire, développa chez le jeune homme des instincts de mysticisme exalté. Muller, qui avait pris le nom de son père légal, se crut prophète; il écrivit 1810 à Napoléon une lettre qui fit mettre sa tête à prix. Il s'enfuit à Londres, puis en Irlande où un jésuite, du nom de Martin, chassé de France pour crime, acheva de lui faire perdre la raison. Ils parlèrent du règne de mille ans, d'un royaume théocratique, et le jésuite exploitant le mystère de sa naissance, lui persuada qu'il était le prince désigné pour régner dans la nouvelle Jérusalem: il l'appela Prott, semence, comme étant de la semence de David. Une riche miss anglaise leur fournit les fonds nécessaires, un nouveau culte fut inauguré, des adeptes se groupèrent autour du prophète-sacrificateur; Martin partit avec la caisse, la police intervint; les chefe émigrèrent en Allemagne, à Offenbach, Stuttgard, Wurzbourg, 1822. Enfin après bien des odyssées et des péripéties, après des appels inutiles adressés aux souverains d'Europe, 1828, la secte alla s'échouer en Amérique, où Proli f vers 1833, du choléra, ou noyé dans le Missouri.

 

PROPAGANDE. Une bulle de Grégoire XV, du 22 juin 1622, fonda à Rome la congrég. pour la propagation de la foi, et la composa de 12 cardinaux, 3 prélats et un secrétaire. Elle avait à s'occuper de tout ce qui concerne l'œuvre missionnaire et l'extension de la foi catholique. Urbain VIII qui lui succéda en 1623 dota cet établissement de riches revenus, et lui adjoignit un séminaire spécial, dit collège de la Propagande, à l'instar des 2 collèges que les jésuites possédaient à Rome. Plus tard l'institution se compléta par une bibliothèque, une imprimerie, un musée. Ils ont la veille de l'Épiphanie, la féte des langues, dans laquelle chacun des élèves fait un discours dans sa langue maternelle. Tous les pays du monde sont partagés en un certain nombre de provinces, à la téte desquelles est placé un directeur, généralement missionnaire lui-même, sous le nom de préfet apostolique; et à mesure que la mission progresse, il monte en grade et devient vicaire apostolique. et enfin évéque-missionnaire. La propagande doit prendre soin des prosélytes et des missionnaires renvoyés ou hors de service.

 

PROPHÉTIE (Réunions de). En prenant ce mot dans son sens le plus général, 1 Cor. 14, 3. 4., Zwingle en 1525 remplaça les Heures ou services ordinaires des chanoines par des assemblées régulières de pasteurs, chapelains, chanoines et étudiants en théol., dans lesquelles on étudiait exégétiquement et pratiquement, au point de vue de la prédication, certaines parties des Écritures; ces assemblées furent appelées Réunions de prophétie. De même à Londres Lasky donna ce nom à des réunions hebdomadaires de pasteurs, docteurs et anciens, où l'on étudiait en général le texte et le sermon du dimanche précédent. Le synode de Wesel 1568 définit ces réunions une Explication publique de l'Écriture avec le concours du presbytère, des maîtres et des pasteurs. C'est ce que Spener avait fait avec ses collèges de piété, ce que nous appelons Leçons ou lectures bibliques, ce que les quakers ont adopté pour leur seul culte.

 

PROSPER d'Aquitaine, né vers 403, f 435 ou 463; laïque, ami d'Augustin, poète estimé, appelé 440 à Rome, dit-on, par Léon 1er qui k nomma son secrétaire. Il combattit avec persévérance le pélagianisme et surtout le sérai-pé-lagianisme, dans des lettres à Rufin, à Augustin (où il y a peut-être quelque exagération, puisqu'il traite Cassien de pélagien), et dans son beau poème Des Ingrats, où il reproche aux pélagiens de méconnaître la grâce divine. Il défendit Augustin après sa mort contre les attaques de moines gaulois, et publia de nombreui extraits de ses écrits. Son principal ouvrage est intitulé: De la grâce de Dieu et du libre Arbitre. Il a écrit aussi une Chronique, qui fait sait? â celle de Jérôme et va jusqu'à 455. Ed. Tille-mont.

 

PROTAIS, fr. de Gervais, q. v,

 

PROTERIUS, 26rae patr. d'Alexandrie, élu en opposition aux eutychiens, qui le massacré rent 457 et traînèrent son cadavre par les rues.

 

PROTESTANTISME. Tandis qu'à la diète de Spire, 1526, Charles-Quint menacé de tous côtés avait dû faire aux évangéliques d'énorme* concessions, en leur accordant de n'observer l'édit de Worms 1521 que dans les limites de leur conscience, à la diète de Spire 1529 il » trouvait dans une position beaucoup plus avai-tageuse pour traiter ou plutôt pour imposer » volonté. II fit remettre en vigueur l'édit de 1511 et annuler celui de 1526; c'était en quelque sorte le maintien du statu que, mais dans des conditions qui, laissant toute liberté aux catholiques, paralysaient tous les mouvements des évangéliques. Les princes et les États qui avaient déjà embrassé la Réforme, rédigèrent immédiatement une protestation énergique, et ils la lurent à la diète, quoique Ferdinand, malgré leurs réclamations, eût déjà levé la séance et quitté la salle. Par cette pièce ils déclarent protester contre la suppression de l'édit de 1526 qui avait été voté avec des engagements solennels réciproques; ils regardent comme nulle et non avenue la nouvelle résolution qui vient d'être prise; soumis à l'empereur en toutes choses, ils ne peuvent l'être dans les questions de conscience; il s'agit de leur salut, de leur honneur et de la gloire de Dieu. Cette protestation fut signée par Jean de Saxe, George de Brandebourg, Ernest et Francis de Lune-bourg, Philippe de Hesse, Wolfgangd'Anhalt, et par les députés de 13 villes impériales, Strasbourg, Nuremberg, Ulm, Constance, Landau, Memmingen, Kempten, Nôrdlingen, Heiibrone, Reutlingen, Isny, Saint-Gall, Weissenbourg et Windsheim. Déposée le 19 avril 1529, cette protestation fut discutée le lendemain à la requête de Henri de Brunswick et de Philippe de Bade qui tentèrent, mais inutilement de la conciliation; il n'y avait pas de transaction possible. L'original en fut remis le dim. 1525 au chapelain de l'égl. de Saint-Jean, à Spire, Pierre Mutterstadt. La protestation était un fait; les princes protestants étaient des hommes; le protestantisme devint un principe à partir de ce jour, et servit à désigner toutes les oppositions positives qui, depuis des siècles, n'avaient cessé de réagir contre les erreurs, les abus, les prétentions ou les usurpations de l'égl. de Rome. Pauliciens, cathares, albigeois, vaudois, lollards, ces nombreuses sectes, isolées et sous des noms différents, toujours persécutées, écrasées, mais sans cesse renaissantes, avaient pour fonds commun la haine du matérialisme et de la forme en matière religieuse et le désir ardent d'en revenir au christianisme primitif. Le protestantisme a sans doute un sens négatif; il rejette certaines doctrines, certaines formes et cérémonies, le culte des saints, et surtout l'autorité du pape. Mais il a aussi un côté positif, sans lequel il serait une simple irréligion; il ne se borne pas à démolir, il reconstruit; il admet l'autorité de la Bible, et le droit pour chacun de l'interpréter, droit qui ne va pas jusqu'à la tordre, nier ou rejeter. Il croit au salut par la foi et non par les œuvres, encore moins par les cérémonies, mais ce droit ne va pas à nier l'importance et la nécessité des œuvres. Il demande une piété personnelle et ne se contente pas d'une piété collective ou de manifestations extérieures. Le mot même comprend toutes les églises qui reposent sur le môme principe, mais il n'en définit aucune en particulier. Si des princes luthériens l'ont inauguré, l'esprit public lui a donné aussitôt une portée plus étendue, et les calvinistes, comme les anglicans, ont été compris sous cette désignation générale.

 

PROTONOTAIRES apostoliques, institution que la tradition fait dater de Clément Romain. Il y en avait primitivement 7; Sixte-Quint les a porté à 12, Grégoire XVI les a ramenés à 7. Ce sont les secrétaires de la chancellerie romaine; ils ont à tenir les procès-verbaux et les registres des consistoires, à surveiller le contentieux, à préparer les béatifications et les canonisations; ils pouvaient nommer des docteurs et des notaires, légitimer des enfants naturels, etc. Leurs occupations sont auj. simplifiées sur bien des points. Ils ne relèvent d'aucune juridiction épiscopale.

 

PROTOPAPE, ou protoprétre, dans l'Égl. grecque, correspond au titre d'archiprêtre, ou doyen, chez les latins; c'est hiérarchiquement le degré intermédiaire entre l'évêque et le simple prêtre. Il a plusieurs paroisses sous son inspection, et peut être marié. En

Sicile et à Corfou, ce titre désigne encore un prélat.

 

PROVINCIAL. Les couvents de presque tous les ordres religieux sont groupés en un certain nombre de districts, déterminés autant que possible par leur situation géographique. Ils forment ainsi une province, et ils sont placés sous la direction d'un supérieur, qui porte le titre de provincial, et est de droit le supérieur du principal couvent de l'ordre dans cette province, et membre du chapitre général.

 

PROVINCIALES, v. Pascal.

 

PROVISION canonique, droit de conférer certains bénéfices, comprenant la désignation, l'installation et la mise en possession des revenus.

 

PRUDENCE lo Aurelius-Prudentius-Clemens, né vers 348 à Saragosse, ou à Calahorra, sous le consulat de l'ancien Salia, fut élevé avec sévérité et n'en eut pas moins une jeunesse dissipée. Il étudia avec succès les lettres et le droit, devint un avocat distingué, fut deux fois nommé par Théodore gouverneur d'une province d'Espagne, et reçut un grade militaire élevé qui le rapprochait du souverain. Mais à 57 ans il se retira du monde et des affaires pour se consacrer tout entier aux exercices de piété et à la littérature religieuse, f 408 ou 413. Il a laissé de nombreux poèmes et des poésies qui comptent parmi les meilleures de l'Église chrétienne à cette époque, soit pour la beauté de la forme, soit pour le sérieux de leur contenu. On remarque surtout le Cathémérinon (compagnon du jour), douze hymnes décrivant les devoirs du chrétien pour les divers moments de la journée; le Pèristéphanon, livre des Couronnes, 14 hymnes, célébrant autant de martyrs; l'Apothéose, 2 hymnes sur la Trinité et la divinité du Christ; la Hamartigénie, sur l'origine du mal, contre le dualisme marcionite et manichéen; la Psychomachie, combat de l'âme, la lutte des vertus contre les vices, poème descriptif sous forme épique, longtemps populaire; deux livres contre Symmaque et contre le rétablissement de l'autel de la Victoire, etc. V. Ruffet.

2° Év. de Troyes 847, f 861; Espagnol de naissance, nommé Galindo, mais élevé en France. Il est surtout connu comme ayant combattu les sémi-pélagiens, et par la part qu'il prit dans les controverses relatives à la prédestination, s'étant rangé du cété de Gottschalk. Il écrivit en sa faveur à Hincmar et à Pardulus 849, et envoya à Scot Erigène un traité sur le sujet 852. Il composa enfin une Epistola tractoria, après avoir signé les 4 articles du conc. de Quiercy 853. On a encore de lui des Annales 836-861, avec une Élégie. A Troyes il est vénéré comme un saint.

 

PRUM ou Pruym, non loin de Trêves, sur nn affinent de la Sure, célèbre abbaye de bénédictins, fondée 720 par Bertrade. Pepin-le-Bref, mari de sa petite-fille Bertha, la restaura et la dota richement. Par la protection des rois qui se succédèrent, elle atteignit un degré de prospérité inoui. A la fin du 12m« siècle elle possédait 119 domaines ou seigneuries et comptait des ducs et des comtes pour vassaux; des princes s'y retiraient; Lothaire l*r y prit l'habit. La discipline s'y étant relâchée, Boniface la rattacha au diocèse de Trêves 1397. Napoléon Ta sécularisée 1803, et ses bâtiments ont été utilisés pour des établissements scolaires.

 

PRUSSE, contrée du nord-est de l'Allemagne, longtemps sans frontières bien déterminées, avoisinant la Baltique et la Vistule et connue av. C. sous le nom de Samland, ou Saumland (pays riverain); population de race Lette, parente des Lithuaniens, nommée pour la lr« fois Pruzzi, ou Prutheni, par Gaudenlius au H»® siècle; d'une réputation incertaine; doux et paisibles suivant les uns, passablement cruels selon les autres, venant en aide aux naufragés, brûlant vifs leurs malades et leurs vieillards, ne laissant vivre qu'une fille par famille. Ils adoraient différentes forces de la nature. Leurs 3 principales divinités leur venaient des Goths: Perkunos, ou le tonnerre, dieu de la pluie et du beau temps; Potrimpos, conservateur des choses, dieu de la fécondité; Potollos, ou Pikullos, dieu du mal et de la mort. A la tête de leurs prêtres était un chef, dit Griwe (Graf ?), qui jouissait d'un pouvoir absolu. Parfois aussi des prêtresses, ou devineresses, attiraient à elles le pouvoir. Ils croyaient à l'immortalité de l'âme et à des récompenses au delà de la tombe. Le christianisme leur fut apporté par Adalbert de Prague et par Bruno de Quer-furt, qui furent martyrisés, 997 et 1009. D'autres essais furent tentés de Pologne, de Suède, de Norwège et du Danemark, mais ils échouèrent. Enfin 1209 vint Christian, q. v. qui avec l'aide de Conrad, duc de Massovie, aidé du pape, et appuyé par Frédéric II, réussit au bout d'une trentaine d'années, grâce à une croisade et au concours de l'ordre teutonique, à obtenir la soumission extérieure des Prussiens au christianisme imposé par Borne, 1244. Le pays fut partagé en 4 évêch 1249: Cul m, avec Hei-denreich pour èvêque; la Pomésanie, avec Ernest deTorgau; l'Ermland, et le Samland qu'on ne tenait pas encore. Albert d'Armagh en fut l'archevêque. Les évêchés furent partagés en 3 portions, dont 2 pour l'ordre Teutonique, et une pour l'évêque. Mais ce n'est qu'en 1283, après une suite de nouveaux massacres, que les païens furent complètement écrasés, et que le vaillant Skurdo, désespérant de vaincre, se retira en Lithuanie après avoir tout détruit derrière lui. L'alliance de l'Église avec Tordre Teutonique ne lui porta pas bonheur; elles se cor* rompit, et les mœurs avec elle. Une espèce de réaction se fit au 15™ siècle, sous l'influence du mouvement hussite, et prépara les voies à la Béformation. L'ordre ayant succombé après sa malheureuse guerre de Pologne 1519-1521, son dernier grand-maltre, Albert de Brandebourg, passa au protestantisme 1522. Plusieurs évêques favorisèrent ouvertement la Réforme; Wittenberg y envoya des prédicateurs, et entre 1525 et 1530 la Réformation fut de.initivement acceptée et organisée; une sorte de régime synodal (Restitutions* synodales) y fut introduite, et confirmée en 1544. Le souverain fut longtemps l'évêque de fait de l'Église; mais ce droit, dont il avait hérité des évêques, lui apportai! plus d'ennuis que de profits, à cause des confessions différentes qui se partageaient le pays. Le luthéranisme dominait, et avec un caractère de raideur qui devait le conduire à la foi morte. Le réveil de Spener amena un peu de vie dans cette orthodoxie sèche et froide. L'électeur de Brandebourg Jean Sigismond, ayant passé 1653 de l'Égl. luthérienne à la réformée, les princes qui lui succédèrent sur le trône de Prusse travaillèrent à réunir les 2 communions. Ils commencèrent par abolir la Formule de Concorde, beaucoup trop confessionnelle, 1656. Puis, de nombreux réfugiés réformés étant venus de France, amenèrent un esprit nouveau qui permit de faire quelques pas dans le sens de la tolérance et d'un rapprochement fraternel. Enfin le 27 sept. 1817, à l'occasion du 3** jubilé de la Réformation, le roi Fréd.-Guillaume IV invita les 2 Églises à se réunir en une seule, et 4 ans après, une Agende, ou Liturgie, était publiée et imposée de fait à toutes les églises du royaume. L'idée était bonne, mais on ne légifère pas en matière de conscience; beaucoup d'églises résistèrent, il fallut employer la coutrainte, parfois la force armée. En 1835 un grand nombre de luthériens se constituèrent en églises indépendantes, plus de 60,000 en Silésie; d'autres émigrèrent en Amérique. Avec le temps, et en laissant aux dissidents la liberté, l'union a fini par être assez généralement acceptée. Dans cette union, c'est la doctrine luthérienne qui a dû faire le plus de sacrifices, parce que c'est elle qui avait le plus d'angles et les prétentions les plus absolues. On compte auj. en Prusse environ 17 millions de protestants, 8 à 9 millions de catholiques, et 350 mille juifs.

 

PSELLUS, Michel-Constantin, dit le Jeune, par opposition à un philos, grec du même nom, contemporain de Photius, surnommé l'Ancien. Né vers 1020 à Constantinople, prof, de philos., sénateur sous trois règnes, il exerça une grande influence politique sous Michel Ducas, mais tomba avec loi 1078, se fit moine et se retira dans nn couvent où il f 1106. Mathématicien, médecin, historien, théologien, il a énormément écrit, en prose et en vers: des traductions et des ouvrages originaux, sur Aristote, les minéraux, l'acoustique, la chronographie, Grégoire de Naziance, l'âme, la Trinité, la personne de Christ, etc. v. Allatius, De Psellis 1644; Bois-sonade, Paris, 1838.

 

PSEUDÉPIGRAPHES, livres faussement attribués aux auteurs dont ils portent le nom, et par conséquent apocryphes, mais tellement sans valeur qu'on ne les a pas même admis parmi les apocryphes bibliques, dont quelques-uns sont cependant bien médiocres. On connaît sous ce titre 1° pour l'A.-T., des Psaumes de Salomon, composés sous Pompée, ou sous Antio-chus Epiphanes; le livre d'Enoch, sous Jean Hyrcan; le 4®* livrs d'Esdras, vers la fin du siècle; l'Ascension et la vision d'Esaïe, d'origine chrétienne avec une teinte gnostique; le Testament des 12 patriarches, de la fin du 2™ siècle; Le Livre du Jubilé, à peu près contemporain de l'ère chrétienne; la Vie d'Adam, comprenant son Testament et celui de Noé; la lettre de Baruch aux 9 ■/» tribus; l'Assomption de Moïse, citée Jude 9; un Testament de Salomon, et beaucoup d'autres ouvragés, découverts ou publiés récemment; 2° pour le N.-T.: les Actes de Pilate et la Descente de Christ aux enfers, l'Évangile de Thomas, le Protévangile de Jacques, le faux Matthieu ou l'Êvang. de l'enfance, la Nativité de Marie, l'enfance du Sauveur, l'Hist.' de Joseph charpentier, l'Assomption de la Vierge, et une quantité d'autres Évangiles, d'Actes, de Discours, d'Épîtres (comme celles d'Abgare) et d'Apocalypses, autant d'ouvrages des 2®e et 3m« siècles, plus ou moins complètement conservés, ou connus seulement par des citations.

 

PSEUDO-ISIDORE, v. Isidore, et Décrétales.

 

PTOLÉMÉE, disciple de Valentin, q. v. 2<>.

 

PULCHÉRIE, tille de l'emp. Arcadius, née 398, tutrice de son jeune frère Théodose II, proclamée augusta 415, co-régente avec lui; femme à tendances monastiques, ambitieuse, zélée pour la foi, ayant fait vœu de virginité. Elle maria son frère avec Eudoxie ou Athénaïs 421, mais dès qu'elle s'aperçut qu'elle avait de l'influence et qu'elle s'en servait en faveur du nestorianisme, elle la poursuivit de sa haine, et n'eut de repos qu'après l'avoir réduite à aller s'ensevelir dans la retraite à Jérusalem. Son fr. étant mort 450, le trône lui revint, car la fille de Théodose, Eudoxie, avait perdu ses droits en épousant Valentinien III, emp. d'Occident. Elle épousa de son côté pour la forme, pour avoir un co-régent, le sénateur Marcien, âgé de 60 ans, qui la laissa libre de continuer au palais son existence de religieuse. Elle était sous l'influence du pape Léon 1er. C'est elle qui convoqua les conc. d'Ephèse et de Chalcédoine, et assista môme avec son mari, 25 oct. 451, à la 6®« session de ce dernier, où elle eut l'occasion de se venger de Dioscure, év. d'Alexandrie, qu'elle haïssait, et de faire condamner le mo-nophysitisme. f 11 sept. 453. Honorée comme sainte par les grecs.

 

PUNSHON, William Morley, prédicateur wesleyen très éloquent, surnommé le Chrysostome du méthodisme. Né 1825 à Doncaster, fils d'un drapier, il fut placé à 14 ans chez son grand-père, marchand de bois à Sunderland, et nommé à 17 ans prédicateur local. A 21 ans, il était prédicateur itinérant. Il donna aussi de brillantes conférences sur les Huguenots, Bu-nyan, Wesley, Macaulay, etc. Il se fixa au Canada en 1868, revint en Angleterre en 1873, et fut en 1874 nommé président de la Conférence wesleyenne, puis secrétaire de la maison wes-leyenne des missions, f 14 avril 1881 à Brixton, Londres.

 

PURGATOIRE, lieu de purification, sorte d'intermédiaire entre le ciel et l'enfer, ou plutôt l'enfer sans l'éternité, un enfer d'une durée plus ou moins longue, où, d'après l'Égl. catholique, sont envoyés ceux qui, morts en état de grâce, n'ont cependant pas entièrement expié leurs péchés. On cherche à justifier ce dogme par 2 Macc. 12, 40. sq., et en recourant aux Apocryphes, on reconnaît implicitement que la Bible ne l'enseigne pas. Mais qu'est-ce que le Purgatoire, et où est-il? Bellarmin compte là-dessus 8 opinions différentes. Pour les uns c'est un vrai feu dévorant, pour les autres un état spirituel, un monde sans matière; les uns le placent dans la région moyenne de l'air, les autres sous la Méditerranée, avec l'Etna et le Vésuve pour soupiraux. La peine des malheureux peut être abrégée par les prières des vivants, par certains actes, et surtout par des aumônes. Les rapports du Purgatoire ayec le scandale des Indulgences, éveillèrent l'attention des Réformateurs, qui, après avoir d'abord rejeté simplement la pensée d'un salut par l'argent, finirent par rejeter l'idée même du purgatoire, comme n'ayant aucune base biblique. Les origines de ce dogme ne remontent pas plus haut que saint Augustin et Grégoire-le-Grand, qui semblent avoir admis la possibilité de peines expiatrices temporaires après la mort. Le concile de Florence 1439, et après lui celui de Trente (session 25) précisèrent le dogme c qu'il y a un Purgatoire, et que les âmes qui y sont détenues sont soulagées par les suffrages des fidèles particulièrement par le sacrifice de l'autel >. L'Église grecque s'en tient à l'idée générale de l'hadès, ou lieu invisible.

 

PURITAINS, nom donné en Angleterre, après la Réforme, à ceux qui auraient désiré une réforme plus complète et plus radicale que celle qui se fit sous les auspices du roi et de son parti. Ils subissaient l'influence de Genève et de la Hollande, c.-à-d. celle de Calvin; ils demandaient un culte plus simple et repoussaient l'épiscopat. Le nom même qu'on leur donna caractérisait leur intention de purifier l'Église autant que possible, dans ses institutions, dans son clergé et dans ses membres. Us demeurèrent d'abord dans l'Égl. épiscopale, se contentant de protester contre ce qu'ils appelaient des restes de papisme, mais quand ils virent qu'ils n'avaient à espérer aucune concession, ils se retirèrent 1570 et se constituèrent d'après le système presbytérien. On chercha à les ramener par des persécutions, et l'archev. Whitgift, ancien puritain lui-même, se distingua dans cette campagne, mais naturellement sans rien obtenir. Élisabeth en 1583 institua une commission d'enquête, composée de 12 évêques et de 32 magistrats, qui troubla et irrita le pays par ses procédés inquisitoriaux. L'avènement des Stuarts, et surtout Charles 1er, aviva la persécution, et les presbytériens, surtout les brownistes, q. v. se cramponnèrent touj. plus à leur foi pour laquelle ils souffraient. En 1620 un grand nombre émigrèrent en Amérique. Le roi, l'archev. Laud et le comte Strafford allèrent si loin qu'ils tournèrent enfin contre eux la majorité de la nation; la révolution éclata 1640. En 1643 l'épiscopat fut aboli, les puritains étaient les maîtres, mais à leur tour ils allèrent trop loin, et en 1658 la réaction se fit; on rappela Charles II, le fils du roi mort sur l'échafaud. Celui-ci, qui n'avait rien appris en exil, recommença l'œuvre de la persuasion par la force, et entreprit de soumettre les dissidents par l'Acte d'uniformité, qui entra en vigueur le 24 août 1662; 2000 ecclésiastiques furent contraints de se retirer, après qu'on eut en vain offert aux plus distingués d'entre eux des postes d'évêques, et l'Acte des 5 milles leur interdit en 1665 de se rapprocher de plus de cinq milles de leurs anciennes paroisses. En 1673 ils furent, comme les catholiques, exclus des fonctions publiques. Enfin les tentatives papistes de Jacques II ayant soulevé contre lui les épiscopaux aussi bien que les puritains, l'avènement de Guillaume d'Orange mit fin à leurs souffrances, et leurs droits furent officiellement reconnus. Mais en même temps disparut, non leur foi, mais la raideur de principes qui les avait caractérisés et qui n'était due qu'au fait même de la persécution; ils s'allièrent dès lors avec moins de scrupule à d'autres églises synodales ou congrégationalistes, aux presbytériens, aux baptistes, et disparurent presque de la scène, laissant à l'Église et à leurs descendants le souvenir de leur persévérance et de leur fidélité.

 

PUSEY, Puséisme. Le docteur Édouard-Bou-verie Pusey, né août 1800, et depuis 1818 prof, d'hébreu et chanoine du collège de Christ-Church à Oxford, a donné son nom à une nouvelle forme de l'anglicanisme, plus rapprochée encore du catholicisme et y aboutissant, sinon logiquement, du moins presque fatalement comme l'a prouvé l'exemple de quelques-uns de ses chefs et de ses adhérents. Élève d'Oxford, mystique par tempérament, avec quelque chose de nuageux dans les pensées et dans le style, qu'un séjour en Allemagne n'avait pas contribué à rendre plus lucide, Pusey joignait à des connaissances variées une vraie et profonde piété, une grande générosité, des manières agréables et un aimable caractère. Mais, comme tout le monde, il avait son côté faible; il avait en horreur le libéralisme, soit en politique, où il était représenté par le ministère whig de lord Grey, ouvertement hostile à l'Église établie, et qui venait de supprimer une dizaine d'évéchés en Irlande; soit en religion, toute hérésie et même toute dissidence lui apparaissant comme une révolte contre Dieu. Il avait avec lui quel-ques amis de son bord, et ils s'excitaient les uns les autres: Newmann, q. v., Froude, qui mourut pendant la lutte; Keble, philosophe idéaliste, qui ne pouvait pas souffrir qu'on appelât la Bible la religion des protestants; Palmer,etc. Us s'unirent pour propager leurs vues, et ils publièrent un grand nombre d'écrits, qui firent sensation. Ces écrits, sous le nom de Traités pour les temps, valurent au mouvement le nom de Tractarianisme; on l'appella aussi Puséisme, du nom de son principal représentant; ou Ri-tualisme, du nom de sa tendance, qui consistait à développer le rituel dans l'Égl. anglicane. C'est même ce dernier nom qui a fini par prévaloir. Le premier Traité, de Newmann, parut en sept. 1833; le 90e et dernier, aussi du même auteur, à Pentecôte 1841. Les crucifix, les cierges, les processions, les prières pour les morts, le signe de la croix, ont pris place dans ce nouveau culte, et les imperfections de la législation anglaise n'ont pas encore permis de mettre ordre à ce retour de catholicisme, qui flatte certaines couches aristocratiques, mais qui est profondément antipathique à la nation. Les ri-tualistes sont aussi connus sous le nom deHigk Church, ceux qui sont très attachés à l'Église, par opposition à la Low Church, qui tiennent davantage à la doctrine. La Broad Church, on église large, a plutôt pour principe le maintien de l'union entre l'Église et l'État, et se mont* assez large et tolérante pour le reste; c'est dans ses rangs surtout que se recrute le rationalisme; Colenso, etc. A la suite d'un sermon prêché en 1843 à l'université, Pusey fut suspendu de la prédication pour 2 ans. Effrayé de voir quelques-uns de ses amis se faire catholiques, il écrivit à l'év. de Londres pour justifier sa doctrine; lui-môme n'innova pas en matière de costume et de cérémonies. Il continua jusqu'à la fin ses cours d'hébreu et se retira peu à peu du mouvement qu'il avait provoqué, f sept. 1882 au prieuré d'Ascot. Marié en 1828, il perdit en 1838 sa femme, qui lui laissa 2 filles et 1 fils; ce dernier, infirme, mais bien doué, est mort en 1880.

 

PYT, Henri, né 5 avril 1796 à Sainte-Croix, Vaud, étudiait la théol. à Genève, quand le règlement du 3 mai 1817 vint briser sa carrière officielle. 11 appartenait au réveil et n'hésita pas à refuser sa signature. Nommé pasteur de l'égl. du Boorg-de-Four, Genève, il accepta bientôt nne suflfragance à Saverdun. visita la Picardie, fut consacré 1819 à Londres, passa 8 ans à Bayonne et dans le Béarn, où il revisa le N. T. en langue basque; vint ensuite à Boulogne, puis à Versailles et à Paris, où il t 21 juin 1835. Auteur de quelques ouvrages de controverse et d'apologétique, et de quelques articles dans le Semeur, il était remarquable comme orateur par son onction pleine de force et de logique. Il avait épousé une sœur d'Ami Bost, qui le seconda puissamment dans son ministère. — Vie par Gners.