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MABILLON, Jean, savant bénédictin, ne 23 nov. 1632 à Pierremont, près Sedan, fit premières études avec son oncle, qui était prêtre, vint ensuite à Reims et entra 1654 dans l'abbaye des bénédictins de SaintpRemi de Saint-Maur. Sa santé ayant souffert d'études trop prolongées, il fut chargé de diverses missions qui l'obligèrent à voyager. En 1660, comme il était rétabli, il fut nommé prêtre à Amiens; il reprit ses études dans la bibliothèque de Corbie, et les continua comme trésorier de l'abbaye de Saint-Denis. Ses supérieurs l'envoyèrent 1664 à Saint-Germain pour aider d'Achery dans la rédaction de son Spicilège, et le chargèrent ensuite d'achever l'édition des œuvres de saint Bernard, commencée par Chantelon; elle parut en même temps en deux formats, Paris 1667, 2 vol. f°, et 9 vol. 8°. A la demande du gouvernement français, il visita en 1683 l'Allemagne, en 1685 l'Italie pour en étudier les bibliothèques, et il en rapporta plus de 3000 mss. précieux pour la Bibloth. royale. Il passa ses dernières années dans l'abbaye de Saint-Germain-des-Pré> à Paris, où il f le 27 décembre 1707. Il fut un des ornements de son ordre. Malgré sa mauvaise santé, malgré ses travaux incessants, il refusa tous les adoucissements qui lui furent offerts a la rigueur de son régime. Outre les ouvrages déjà cités, il a écrit les Aeta Sanctorum de l'ordre de saint Benoît, 9 vol. f°, les Annales ordt-nisy 6 vol. f°, Vetera Analecta, pièces recueillies dans plnsieurs bibliothèques, le Muséum itali-cum, un Traité des études monastiques, un autre sur la Liturgie gallicane, etc. On regarde comme le meilleur de ses ouvrages, celui qui a fondé la science des Chartes et qui auj. encore n'a pas été dépassé, son livre De re diplomaticâ, où il explique tout ce qui regarde l'écriture, le style, l'origine des chartes et diplômes. Son amour pour la vérité Jui avait déjà fait des ennemis à l'occasion de son histoire de Tordre; cela ne Pempécha pas d'écrire, mais sous le couvert de l'anonyme, un livre sur le Culte des saints inconnus dans lequel il attaque les abus de Rome, et qui fut mis à l'index. Il a écrit aussi contre l'abbé Rancé, fondateur de l'ordre des trappistes, pour montrer que les moines ont non seulement le droit, mais même le devoir de se livrer à des études scientifiques. Vie, par son disciple Ruinart.

 

MACAIRE lo le saint, le grand, ou l'ancien, né vers 300 dans la Haute-Égypte, de parents pauvres. Disciple de saint Antoine, il se retira à 30 ans dans le désert de Scété, Thébaïde, et y vécut près de 60 ans dans l'ascétisme le plus rigoureux. Il en fut un moment retiré pour être, malgré lui revêtu du sacerdoce, mais son attachement à la doctrine de Nicée lui valut les persécutions de Valens, qui le fit reléguer dans une île du Nil. Cet exil ne fut pas de longue durée; le peuple mécontent contraignit le préfet à le rappeler, et le vieillard reprit le chemin de sa solitude où il f vers 390. On a sous son nom 50 Homélies et des Fragments pleins de vie et d'un mysticisme sérieux. —2° Macaire le Jeune, ou le politique, d'Alexandrie, païen de naissance, boulanger de son état, disciple de saint Antoine comme le précédent, se retira vers 335 dans les solitudes de la vallée de Natron et fut nommé abbé par ses confrères. Il fut également persécuté par Valens à cause de son zèle contre les ariens, f 2 janv. 404 (ou 394). — 3o Macaire d'Antioche, condamné comme inonothélète par le 6me conc. ecuménique 680, et banni de la ville.

 

MACÉDOINE, contrée évangélisée par saint Paul, et qui, lors du partage de l'emp. romain 395, était entièrement gagnée au christianisme. Elle appartient dès lors à l'emp. d'Orient, dont elle partagea les destinées. Placée auj. sous la domination turque, elle est en majorité catholique grecque et relève en religion des 4 arche v. de Salouique, Sérès, Koslendil et Uskub. Le mont Athos et ses nombreux couvents en font partie.

 

MACÉDONIUS. Après la mort d'Eusèbe de Nicomédie, ce jeune et brillant représentant de l'arianismefutélu par son parti év. de Constantinople 341, en concurrence avec le pieux et savant Paul, que les orthodoxes avaient déjà nommé en 336, mais que l'influence impériale avait réussi à écarter. Ces deux hommes occupèrent successivement le siège, suivant les caprices de la cour, jusqu'à ce qu'en 348 Paul fui définitivement établi patriarche par Constance, sur la demande de son fr. Constant. Mais à la mort de ce dernier, 350, Macédonius essaya de remonter sur le trône épiscopal; il y eut du tumulte, et le jour de son installation il y eut du sang versé; on parle de 3000 personnes qui périrent dans cette rixe. Le conc. de Constantinople le condamna 360. et Constance le déposa. Macédonius mourut peu de temps après, mais non sans avoir fait un schisme dans l'Église, et créé une secte qui porta son nom, les Macédoniens. Lui-même, arien d'abord, était devenu semi-arien, et les ariens l'excommunièrent. C'est surtout sur la question du Saint-Esprit que ses sectateurs différaient de la doctrine reçue; les uns niaient sa personnalité tout en accordant sa divinité, les autres faisaient le contraire. Le conc. de Constantinople de 381 mit fin à cette discussion pneumatomachique en proclamant la divinité hypostatique du Skint-Esprit, comme procédant du Père.

 

MACHSOR (cycle, cercle), titre d'un livre de prières juif, espèce de liturgie, qui renferme par ordre la succession des prières publiques destinées à être lues aux différentes fêtes, ainsi quo les chants (piutim) qui s'y rapportent. Ces chants ont été composés entre 1000 et 1300 par des juifs espagnols et allemands, dont le plus ancien est le rabbin Éléazar ben Jacob Kalir. Outre les idées talmudiques, ils renferment des pensées empruntées à la spéculation scolastique du moyen âge et ne sont pas à la portée de tout le monde. Les exemplaires qu'on en possède varient notablement d'un pays à l'autre. Hei-denheim en 1800 en a publié une édition â l'usage des juifs d'Allemagne et de Pologne.

 

MADAGASCAR, grande île de l'océan indien, dont les habitants appartiennent les uns à In race nègre, les autres à la race malaise. Leur religion est une idolâtrie informe; leur principal rite est la circoncision, leurs prêtres sont plutôt des sorciers. Les Portugais cherchèrent les premiers à y établir une colonie et des comptoirs 1505-1545, et Fr. Xavier, en route pour l'Inde, y missionna quelques jours, mais cette tentative ne réussit pas. En 1642 les Français essayèrent à leur tour d'y fonder un établissement, mais l'insolente imprudence du père Étienne qui avait arraché à un chef ses amulettes pour les jeter au feu et qui le menaçait de faire venir des troupes s'il ne renvoyait pas immédiatement les femmes qu'il avait de trop, provoqua le massacre de la colonie et mit fin à la mission française. Van der Kemp en 1811, puis Campbell et Lebrun en 1814, furent chargés de sonder le terrain, mais pour diverses raisons ces essais n'aboutirent pas. Enfin en 1817 l'Angleterre réussit à conclure avec le roi Ra-dama I^, à Tamatave, un traité pour la suppression de la traite. Radama fit aussi venir d'Angleterre des ouvriers; quelques missionnaires les accompagnèrent, et le roi favorisa leurs écoles, mais c'est seulement sur son lit de mort qu'il autorisa le baptême et la conversion de ses sujets. En 1818 la mission fut un moment renforcée par l'arrivee de Bevan et de Jones, mais le premier mourut bientôt et le second dut retourner à l'île Maurice. Les négriers avaient su réduire à rien la convention relative à la traite, l/agent du gouvernement anglais, à Tamatave, le dévoué Hastie (f 1826) reprit à nouveau les négociations à Tananarive et les mena à bonne fin. En 1826 les écoles étaient en pleine prospérité et une presse publiait de nombreux écrits; en 1832 on comptait 10,000 Madécasses sachant lire. Mais Radama f 1828; une de ses femmes, Ranavalona, s'empara du trône par l'intrigue et en faisant mettre à mort les membres de la famille royale. Elle laissa quelque temps le champ libre aux missionnaires; mais peu à peu elle leur devint hostile, ferma les écoles, refusa de recevoir l'agent de l'Angleterre, Lyall, successeur de Hastie; bannit le missionnaire Atkinson qui venait d'arriver, interdit la lecture de la Bible, et finalement, février 1835, ouvrit contre les chrétiens une ère de persécutions. De juillet 1836 à mars 1837, en huit mois, il n'y eut pas moins de 1,016 exécutions publiques, sans parler des malheureux qui furent égorgés dans les bois et dans les cavernes, ou jetés dans des précipices. Les missionnaires quittèrent l'ile, mais de l'île Maurice où ils se réfugièrent ils continuèrent d'encourager leurs disciples et d'évan-géliser ceux qui vinrent à eux. En 1845 le prince héritier Rakoto se mit du côté des chré tiens, mais sans que cela améliorât beaucoup leur position; c'est seulement après la mort du ministre Reniordo, le grand ennemi des chrétiens, qu'il fut associé au gouvernement, et les choses changèrent. Le missionnaire Ellis vint en 1852, puis de nouveau en 1856, visiter les troupeaux restés fidèles; mais les intrigues d'un Français, Lambert, marchand d'esclaves, qui projetait de soumettre l'île au protectorat de la France, provoquèrent en 1857 une révolution qui fut également fatale aux catholiques et aux protestants. La reine mourut en 1861. Son fils lui succéda, après avoir écarté un compétiteur au trône; il prit le nom de Radama II. Il proclama la liberté de conscience, et rappela Ellis qui vint, accompagné de plusieurs autres missionnaires. Des prêtres catholiques arrivèrent aussi, et Radama hésita longtemps entre les deux, faisant dire la messe on jour, écoutant Ellis le lendemain. Il s'était engagé à reconnaître le protectorat français. Le parti païen, de sou côté, exploitait les penchants sensuels et débauchés du roi et ses superstitions. A la fin le massacre des chrétiens fut décidé, mais Radama s'était aliéné le peuple et la cour par ses folies: l'ordre était profondément troublé, et il fut assassiné le 11 mai 1863. La reine Rosaherina prit en main la directiop des affaires, promit aide et protection aux étrangers et donna toute liberté aux chrétiens. Dès lors les protestants et les catholiques travaillent à la conversion des naturels, en même temps que l'Angleterre et la France rivalisent pour assurer leur prépondérance. En 1881 le nombre des chrétiens évangéliques était de 300,000, avec 1200 églises, 33 missionnaires anglais, 69 indigènes et 862 écoles. En 1883 la- France, après le bombardement de Tamatave a réussi à s'emparer d'une partie de l'île et à y imposer son protectorat au profit de son commerce et de la mission catholique.

 

MADELEINE, etc. v. Magdeleine.

 

MADELONNETTES, v. Magdalenum.

 

MADIAI, Francisco, et Rosa sa femme, furent condamnés en Toscane en 1852, pour des réunions évangéliques tenues dans leur maison, et parce qu'on avait trouvé chez eux des Bibles et des traités religieux. Ces actes, qualifiés de blasphèmes, leur valurent d'être jetés dans des cachots. L'Europe protestante s'en émut; des députations arrivèrent d'Angleterre, d'Allemagne, de France, de Suisse, de Hollande, pour solliciter leur élargissement; le roi de Prusse écrivit lui-même au grand-duc, mais en vain. Il fallut les menaces de l'Angleterre pour décider le gouvernement toscan à commuer en un exil perpétuel la peine de ces deux vénérables vieillards.

 

MADRUZZIUS, Christophe, né 1512. étudia à Bologne et à Padoue et reçut de bonne heure de riches bénéfices. S'étant distingué à Venise comme envoyé de Ferdinand, il fut, sur la recommandation de Charles-Quint, nommé prince-évêq. de Trente, 1539, n'ayant que 27 ans; piris évêque de Brixen. cardinal, et gouverneur de Milan 1555-1560. Au conc. de Trente il appuya les demandes de réformes, notamment la communion sous les deux espèces et la Bible en langue vulgaire. Le légat du pape lui répondit que s'il fallait rétablir l'ancienne discipline ecclésiastique, un évêque serait réduit à n'avoir qu'un seul diocèse, f 1578.

 

MAERLANT, Jacob, un des plus célèbres poètes hollandais du 13™® siècle, f vers 1300 à Damm près Bruges; plus savant encore que poète, auteur d'une Chronique du monde, da plusieurs poésies relig., et d'une Bible envers, dont la première partie fait suite à Y Hist. esco-lastre de P. Comestor, chancelier de Paris, et la seconde est une Harmonie des évangiles assez estimée.

 

MAFFE1 1° ouMaffeo Vegio, néàLodii407, prof, de belles-lettres à Pavie, chanoine de Saint-Jean de Latran, f 1458 à Rome; auteur d'une suite à l'Enéide, d'une Antoniade en l'honneur de saint Antoine, d'un traité sur l'éducation chrétienne des enfants, sur la persévérance dans la religion, de plusieurs biographies, etc.

Bernard, cardinal, secrétaire de Paul III, né à Bergame 1514, f 1553; auteur d'un Comment. sur les épîtres île Cicéron; honoré comme protecteur des lettres.

3° Jean-Pierre, ou Giampietro, né vers 1536 à Bergame, f 1603 à Tivoli, entra 1565 dans l'ordre des jésuites et fut prof, d'éloquence dans leur collège de Gônes et secrétaire de la république. 11 fut mandé à Lisbonne 1570 par le cardinal Henri pour écrire rHist. des Indes d'après les derniers documents. Il écrivit aussi l'hist. du pontificat de-Grégoire XIII et celle de Loyola. Il avait obtenu du pape la permission de réciter son bréviaire en grec, pour ne pas risquer de compromettre l'élégance classique de sar latinité.

François-Scipion, marquis de Maffei. né à Vérone 1er juin 1675, élève des jésuites de Parme, membre depuis 1698 de la Société arca-dienne de Home, fit en 1704 une campagne au service de la Bavière, puis revint en Italie et se consacra tout entier à la littérature. En 1713 il publiait Mèrope, qui fut depuis imitée par Voltaire; plus tard une Hist. de Vérone. En 1732 il visita la France, puis l'Angleterre, la Hollande, l'Autriche. De retour à Vérone il y fonda une société savante et réunit une collection d'inscriptions antiques, f 11 févr. 1753. Parmi ses Œuvres compl., Venise 1790, on compte quelques dissertations théol. sur le duel, le théâtre, des écrits contre le Jansénisme, etc. Il a publié aussi une édition d'Hilaire de Poitiers 1730, le Musée de Vérone, Vérone illustré, etc.

 

MAGARITA, Magarites, nom donné par quelques écrivains du moyen âge aux apostats de la religion chrétienne, spécialement à ceux qui passaient à l'Islam et qu'on appela plus tard renégats. On fait dériver ce nom du grec Mâga-ron, le saint des saints à Delphes et dans les temples païens?

 

MAGDALENUM, nom donné dans les églises évangéliques aux établissements destinés à recevoir et à relever les jeunes filles tombées, les Magdeleines repentantes. Deux furent fondés à Londres en 1758 et en 1787, et d'autres suivirent. En Allemagne le premier fut ouvert à Hambourg 1822, le second à Kaiserswerth 1833, puis un autre à Berlin 1843. Dès lors ils se sont multipliés. Dans les pays de langue française ils portent plutôt le nom de Refuges; il y en a à Genève, à Paris, à Nîmes, etc. Les catholiques en possèdent aussi, les uns indépendants, les autres rattachés à des couvents (les sœurs de Marie et Joseph). Le plus ancien connu date de Louis IX, 1226-1270. En 1618, sous Louis XIII, une maison religieuse, dite les Madelonnettes, fut fondée à Paris pour les filles de cette catégorie et placée sous l'invocation de Magdeleine. Plus tard elle devint une prison politique: elle sert aussi de maison de détention pour les femmes de mauvaise vie. Elle est située entre la rue du Temple et la rue Saint-Martin.

 

MAGDEBOURG, ville et archevêché datant d'Othon 1er 967-970, qui y avait fondé d'abord un couvent de bénédictins 937. Il servait de centre archiépiscopal à plusieurs évêchés fondés au milieu des Slaves, notammentMeissen, Hai-berstadt qui remontait déjà à Gharlemagne. Zeitz-Naumbourg, Havelberg, Cammin, Lebus et Brandebourg. Le premier archev. fut Adel-bert 968-981; 44 archev. et 3 administrateurs ont depuis lui occupé ce siège; le plus important est Norbert 1126-34, fondateur de l'ordre des prémontrés. Cesarch. eurent, comme princes temporels, de nombreuses guerres à soutenir contre les Slaves leurs voisins, ainsi que contre Henri IV, Henri-le-Lion, les margraves de Brandebourg, etc. Ils eurent aussi beaucoup à souffrir pendant les guerres hussites. La Réformation s'y établit rapidement, et l'archev. Albrecht, qui était en même temps prince-électeur de Mayence, ayant fait de vains efforts pour l'empêcher, abandonna sa résidence. L'archev. Jean-Albert 1545-1550 dut, avant cl^ prendre possession de son siège, s'engager à accepter le compromis de Wittenberg qui accordait le libre exercice de la religion. La ville avait dès 1526 adhéré à l'alliance de Torgau. Elle entra aussi dans la ligne de Smalcalde et fut mise au ban de l'empire. Après la guerre elle devint le refuge des théol. luthériens et le principal centre littéraire de la lutte dirigée contre l'Intérim. Après la diète d'Augsbourg 1550. qui la déclarait hors la loi, elle se rendit. 5 nov. 1551, à Maurice de Saxe qui lui fit de faciles conditions. Le dernier archev. nommé par le pape, Sigismond, 1553-1566, passa au protestantisme; de même l'arch. Joachim-Frédéric, qui se maria, ainsi que son fils et successeur Chrétien-Guillaume, administrateur du diocèse 1598-1631. Il dut fuir pendant la guerre de Trente ans et fut remplacé par Auguste de Saxe, mais lorsqu'il revint et que la ville le reçut de nouveau, elle fut attaquée, assiégée, prise le 10 mai 1631, el saccagée par les troupes de Tilly, qui y commirent d'horribles massacres. Les Suédois la reprirent l'année suivante et elle fut incendiée. Â la paix de Westphalie elle fut sécularisée et donnée au Brandebourg, mais Auguste en conserva l'administration sa vie durant; c'est lui qui fixa en 1652 son organisation ecclésiastique. Dans les temps modernes elle a fait parler d'elle par les excès du pasteur Sin-tenis 1840, qui regardait le culte rendu à Christ comme une superstition et qui fut menacé de suspension, ce qui agita beaucoup la ville et provoqua le mouvement des Amis des lumières, et par la formation de Pégl. libre rationaliste du pasteur Uhlich 1848, après qu'il eut été destitué 1845 par le Consistoire. Magdebourg est le siège du Consistoire pour la province de Saxe.

Centuries de Magdebourg. On désigne sous ce nom une Hist. de l'Église, rédigée par Flacius avec l'aide des pasteurs de Magdebourg Wigand, Matth. Judex et Basile Faber, et rédigée par siècles, ou centuries. Cette Historia ecclesias-tica, le premier travail complet qui ait été fait dans ce genre, parut de 1560-1574, réimpr. 1624, et va jusqu'au 14™ siècle. Malgré quelques lacunes et imperfections, cet ouvrage a une grande valeur historique par l'importance des matériaux rassemblés et par le sens critique avec lequel les faits sont jugés. Il a pour but de prouver, l'histoire à la main, que l'Égl. luthérienne est la véritable Égl. chrétienne primitive. L'Égl. cathol. a essayé plus tard de faire un travail analogue, dans les Annales de Baro-nius.

— On connaît en physique sous le nom d'Hémisphères de Magdebourg, un appareil destiné à prouver la puissance de compression de l'air; il fut imaginé par Otton de Guericke.

 

MAGDELEINE de Pazzi, de son vrai nom Catherine, née 1566 à Florence, de l'illustre famille des Pazzi, entra en 1584 dans le couvent carmélite de Saint-Frigidien, ouJSaint-Fri-<lien; ses austérités l'amenèrent au bord du tombeau, et pendant sa maladie elle eut des extases et s'entretint avec des saints et même avec la Trinité. Guérie en 1590, elle fut nommée sous-prieure et directrice des novices, et édifia tout le monde par son ascétisme, f 1607. On lui attribua des miracles. Béatifiée la mêmean-née par Urbain VIII, elle fut canonisée 1669 par Alexandre VII. Ses Œuvres spirituelles ont été publ. par le P. Salvi, Venise 1739.

 

MAGDELEINE (Ordre de Sainte). Plusieurs couvents de cet ordre, destiné à sauver les filles perdues, existaient déjà en Allemagne au 12®« siècle, sans qu'on sache qui en fut le fondateur. Les papes leur accordèrent de nombreux privilèges. Contrairement à l'esprit de la fondation, ils finirent par recevoir aussi des jeunes filles non tombées que l'on désigna, à cause de leur costume, sous le nom de Dames blanches. Ber-tranchntroduisit cet ordre en France et le soumit à la règle d'Augustin. Lors de la fondation d'un couvent à Paris 1497, les statuts remirent en vigueur la disposition primitive qui n'admettait que les filles perdues. Mais peu à peu des désordres se glissèrent dans la maison; une réforme fut nécessaire, et en 1629 l'ordre fut placé sous la direction des visitandines, puis des ursulines, puis des dames de la miséricorde. L'ordre se divisait en 3 classes: celle de Magdeleine, comprenant les religieuses proprement dites; celle de Marthe, formée de femmes qui ne prononçaient point de vœux, et qui pouvaient rentrer dans le monde et se marier; celle de Lazare, ou de femmes enfermées malgré elles par mesure disciplinaire, et qui pouvaient être rendues à la liberté quand elles avaient donné des preuves d'amendement.

 

MAGIE, magiciens. Le culte de la nature, et le fait que les astres, ou tout au moins le soleil, exercent sur la terre une grande influence, avaient accrédité chez les Çhaldéens, trop généra-lisateurs, l'idée qu'il y avait un rapport intime et constant entre les phénomènes célestes et les événements de ce monde. Grâce à la superstition, grâce à la disposition des uns à profiter de la crédulité des autres, les habiles érigèrent en science ce qui n'était d'abord qu'une impression vague, et ils décidèrent que les destinées des hommes sont ecrites dans les cieux et réglées par les constellations. L'astronomie devint l'astrologie. Bientôt il ne s'agit plus seulement de regarder les étoiles, il fallut les consulter et leur demander leur secret. Mais si l'on tombait juste quelquefois, souvent aussi l'on se trompait. Pour expliquer ces erreurs fréquentes, on dut faire un pas de plus, qui devait servir également à neutraliser les mauvais présages. On admit qu'il y avait, à côté de l'influence stel-laire, d'autres influences mystérieuses, bonnes ou mauvaises, qui pouvaient contrecarrer les données des constellations. Les mages, qui étaient les savants de l'époque, les hommes nécessaires, ceux que l'on consultait, devaient donc conjurer les mauvaises puissances, si les astres étaient favorables, et implorer les puissances bienfaisantes si l'horoscope était fâcheux. Dans tous les cas ils avaient à intervenir, et c'était pour eux une source de richesse et de crédit. Le contact des Perses avec les Mèdes, qui avaient reçu des Babyloniens l'adoration des astres, initia les premiers à la magie qui était étrangère à Zoroastre et au Zend-Avesta, et familiarisa les autres avec la notion des principes mauvais qui sont dans la nature et qui peuvent exercer une influence fatale sur la vie des hommes. La magie eut ainsi pour tâche de rechercher les moyens secrets, connus des ini-liés seuls, de combattre les mauvais esprits et de les contraindre à renoncer à leurs coupables projets; on inventa des formules, des anneaux constellés, des mélanges d'herbes, et l'on y joignit certaines connaissances physiques, bien incomplètes, mais inconnues du vulgaire. Le nom de mages, d'origine indogermanique et désignant dans l'origine les prêtres de la religion naturelle, passa successivement aux Chaldéens, aux Perses et aux Mèdes, mais en s'accenluant de plus en plus dans le sens de la magie, tout en conservant aussi la signification générale, souvent justifiée, de sages et de savants. À mesure que les religions anciennes perdirent de leur prestige et que leur fausseté éclata davantage aux yeux des populations plus éclairées, la magie gagna du terrain et sembla surnager seule sur les ruines des idées morales et supérieures. Il n'y eut plus de mages, mais les magiciens demeurèrent et fourmillèrent, sous les noms de devins, d'enchanteurs, de sorciers, etc. Ils envahirent la Grèce et Rome (Simon l'enchanteur, Élymas, la servante pythonisse), et acquirent parfois un tel ascendant que les lois durent intervenir pour prévenir des abus et une trop jrrande exploitation delà crédulité publique. Le séjour de Rome leur fut interdit sous Sylla, Auguste, Tibère, Caracalla, Dioclétien. Les emp. chrétiens défendirent également d'avoir recours k la magie, mais comme les chrétiens eux-mêmes croyaient à l'action des démons, il leur était difficile d'établir l'imposture des magiciens qui prétendaient s'en servir ou les combattre. C'est ainsi que la foi k la magie se perpétua dans tout le moyen âge, et elle trouva dans la Kabale et l'alchimie de nouveaux aliments; la transition fut facile pour arriver aux extravagances populaires sur les diableries, les sortilèges, les sorciers et la sorcellerie, que l'Église exploita tout en les persécutant, et qu'elle enracina plus qu'elle ne les détruisit. Le miracle suppose l'action absolument libre de la toute-puissance de Dieu; dans le sortilège au contraire on a l'action puissante du mauvais esprit, du démon, mais subordonnée k des causes humaines et terrestres, quoique mystérieuses. La dogmatique du moyen âge, en attribuant une efficace magique k l'ordination, aux exor-<ismes, aux sacrements, a pu entretenir sans le vouloir des idées fausses sur les relations réciproques des choses matérielles avec les choses spirituelles.

 

MAGISTER sacri palatii (le maître du sacré palais). Il n'avait d'abord pour fonctions que d'enseigner la religion, pendant leurs heures de loisir, aux domestiques du pape et des cardinaux. Cette charge, que Dominique avait revêtue volontairement, fut transformée en dignité par Honorius III1218. et confiée toujours à un dominicain. Eugène IV y ajouta 1435 le droit de censure sur tous les sermons destinés à être prêchés dans la chapelle papale, et en 1515 elle se compliqua encore du droit de censure sur tous les livres publiés k Rome. Elle finit par comprendre aussi l'approbation des ouvrages publiés à l'étranger. Auj. le droit de censure est le seul qui subsiste encore.

 

MAGNENCE, Flavius Magnus, ou Magnen -tius, né en Germanie, capitaine des gardes de Constant, profita de l'indolence de ce prince pour le détrôner et se faire nommer empereur k sa place, à Autun 350. Constant mourut dans sa fuite. Magnence marcha sur Rome, se défit de Népotien qui aspirait à le renverser, refusa orgueilleusement le partage de l'empire que lui offrait Constance II, et vaincu par lui à Mursia en Illyrie 352, il s'enfuit dans les Gaules et se suicida à Lyon 353. Pour se rendre favorables les populations, il fav orisa le paganisme en Germanie et l'orthodoxie athanasienne dans le reste de l'empire. Il se donnait lui-même pour le Christ sur ses drapeaux.

 

MAGNIFICAT, nom latin du cantique de Marie, Luc 1, 46. d'après le premier mot par lequel il commence dans la Vulgate. César d'Arles doit l'avoir introduit comme hymne dans l'Égl. latine, qui le chante aux vêpres de l'Office divin. L'Égl. grecque le récite à la messe le dimanche; plusieurs Égl. protestantes l'ont également mis en vers et en musique pour le culte de Noël (v. Bost, le Gloria et le Magnificat

 

MAGNUS. Outre plusieurs rois de Suède et de Norwège qui portèrent ce nom (Magnoald, Maginald, Mangold, Mang), l'hist. ecclés. mentionne 1° un compagnon de Saint-Gall, qui lui survécut et qui, avec son ami Théodore, présida k l'établissement du monastère et de la ville de ce nom. Après la dispersion des religieux par les Francs, les deux amis restèrent seuls fidèles à leur poste, exposés k beaucoup de mauvais traitements, mais soutenus et secourus par l'év. Bosko de Constance. Une tradition leur attribue aussi la fondation du couvent de Ftlssen en Souabe, mais ces hommes vivaient au 7 me siècle, et les plus anciens documents qui les concernent (un mss. de la biblioth. deSaint-Gall) sont du 10*e ou même du 12me siècle, et par conséquent peu sûrs. — 2<> Jacobus M., où Jacques Legrand, moine au-gustin, né 1350 k Toulouse, prof, k Padoue et k Paris, grand et courageux prédicateur, qui ne craignit pas de blâmer en chaire les désordres d'isabeau de Bavière, 1405. f 1422; auteur d'un Livre des bonnes mœurs, un des plus anciens livres écrits en langue vulgaire; impr. 1478. — 3° Jean M. archev. d'Upsal, né à Lin-kôping 1488, s'opposa aux projets de réforme de Gustave Wasa, et dut se retirer k Rome où il

1544; auteur d'une Hist. des Goths, et d'une bist. de l'univ. d'Upsal. — 4° Son fr. Olatts, ^ui lui fut donné pour successeur, ne put prendre possession de son siège et f 1568 au couvent de Sainte-Brigitte à Rome; auteur d'une Hist. (latine) des peuples septentrionaux, et <d'un tableau ou table des matières sur le même sujet.

 

MAGYARES, ou Madgyarcs, peuplade chassée par les Petchenègues du Turkestan; elle s unit un moment aux Chazares et occupa la côte N. 0. de la mer Noire. Avec l'aide des Bulgares et d'Arnolf de Garinthie, ils combattirent la Moravie, s'établirent sur le Danube, firent des expéditions en Italie (où ils furent battus à Brenta 899), en Suisse, en Allemagne, en Lorraine et dans le sud de la France, jusqu'à ce que la bataille de Lechfelde 955 les refoula dans leurs limites actuelles de la Hongrie. Leur férocité dépassait toute idée. Leur religion consistait uniquement en la foi à un être suprême et à l'immortalité de l'âme. Geisa et sa femme Sarolta, qui était chrétienne, introduisirent dans le pays les premiers principes de la civilisation et du christianisme. Le fils de Geisa, Étienne-le-Saint, se fit baptiser 994, et Sylvestre II lui envoya une couronne d'or. Cependant il se passa encore un siècle avant que le paganisme fût entièrement extirpé. Le nom de Magyares, qui ne désignait d'abord qu'une des tribus du pays, finit par désigner la contrée tout entière; auj. il se dit surtout de l'aristocratie du pays.

 

MAHOMET, en arabe, Mohammed (le louable), né à La Mecque 569, de la noble tribu des koreishites, perdit son père à l'âge de 5 ans, et fut élevé par son oncle Abu Taleb, qui le mit dans le commerce. Il fit plusieurs voyages avec des caravanes et eut l'occasion de faire la guerre sur les frontières de Syrie. D'un extérieur agréable, d'un jugement pénétrant, d'un esprit méditatif, il pensait beaucoup, mais il ne savait ni lire, ni écrire. A 25 ans il épousa Kadisha, la veuve d'un riche marchand, dont il avait quelque temps géré les affaires. Entouré d'Arabes païens, dont le grossier fétichisme le dégoûtait, de juifs cupides et sensuels, de chrétiens superstitieux qui déshonoraient leur foi, il rêvait une réforme religieuse dans le sens du monothéisme, et pendant 15 années, se retirant souvent dans une caverne du Mont Harah, il combina ce qu'il pouvait conserver, comme dogmes et comme préceptes, de l'A. T. qu'il avait étudié avec un savant juif, et du N. T. qu'un chrétien nestorien lui avait fait connaître. A 40 ans il apparut enfin comme prophète, se disant honoré de révélations spéciales de l'ange Gabriel, qui lui avait donné dans le Coran q. v. la parole éternelle de Dieu, gravée sur des tablettes avec des rayons de lumière. Il fut modeste dans ses premiers essais de prosélytisme; il gagna d'abord sa femme, puis son cousin Ali, puis un riche marchand de la Mecque, nommé Abu Beker, qui devint plus tard un de ses beaux-pères par la belle Aïcha, puis Othman, qui fut calife après les deux précédents. Mais pendant 3 ans la nouvelle doctrine resta renfermée dans ce cercle restreint. Il se décida alors à se produire publiquement comme envoyé de Dieu, et son parti finit par s'accroître; assez pour lui susciter de nombreux adversaires, pas assez pour qu'il pût leur résister. Une violente insurrection l'obligea 622 de s'enfuir, et il trouva un refuge sûr à Yatreb, où il comptait déjà des partisans. Cette ville reçut en récompense de son hospitalité le nom de Medinet-al Nabi, ville du prophète, et par abréviation: Médine. C'est de cette époque que date l'ère des mahométans, connue sous le nom d'hégire, ou fuite. Poursuivi par ses ennemis, il leur répondit les armes à la main, et n'hésita plus à employer la force pour propager sa doctrine. Ses progrès furent rapides; il soumit plusieurs tribus de l'Arabie, et dans l'espace de dix ans, tout le pays fut convaincu et converti, de gré ou de force; il prit la Mecque 630 et en renversa les idoles. Il allait même pousser plus loin ses conquêtes, lorsqu'il f à Médine 632, léguant à ses généraux le soin de continuer son œuvre. Il avait eu 15 femmes légitimes, sans parler des autres, mais il n'en eut point de fils. Une seule fille lui survécut; elle avait épousé Ali, qui était naturellement désigné pour devenir le successeur de Mahomet; mais Abu-Beker réussit à se faire nommer à sa place et fut le premier calife (lieutenant); il mourut 634. Omar fut le second, t 644; Othman, le troisième, f 656; Ali, le 4™ f 660. Mais alors déjà deux partis violents se partageaient l'empire et la religion: les orthodoxes, sunnites ou traditionnaires, et les chyites ou hétérodoxes, ces derniers estimant que le califat aurait dû passer directement de Mahomet à Ali, et regardant les califes intermédiaires comme des usurpateurs. — La religion musulmane, ou Islam, repose sur le Coran. Le nom de musulman dérive, comme celui d'islamisme. de l'arabe islam, qui signifie mettre sa confiance en Dieu, s'abandonner à Dieu. Pendant un siècle la nouvelle religion marcha de conquête en conquête; elle couvrit une partie de l'Asie, fut sur le point de prendre Constantinople, s'étendit au nord de l'Afrique sur tout le littoral de la Méditerranée, franchit le détroit de Gibraltar, inonda l'Espagne où elle fut pendant 700 an> maîtresse absolue, passa en France, menaça l'Allemagne, et ne fut arrêtée dans sa marché envahissante que par la bataille de Poitiers 732 où Charles Martel lui fixa les limites qu'elle ne devail plusx franchir. Auj. Ton compte dans le monde plus de cent millions de musulmans appartenant à différentes sectes, qui sont loin d'être unies. Ils ont reconnu longtemps pour leurs chefs les califes; c'est auj. le sultan qui est reconnu par la majorité d'entre eux; il possède l'étendard du prophète et peut déclarer la guerre sainte. Vie de Mahomet par Aboul-Féda, Paris, Didot, 1838. — Plusieurs princes orientaux ont porté le nom de Mahomet, Mohammed, Méhémet, etc.; le plus célèbre est Mahomet II, fds d'Amurat II; il prit Constantinople 1453, fat battu à Belgrade par Hunyade 1456, fit aux chrétiens une guerre acharnée, soumit la Moldavie, le Frioul, la Dalmatie, Otrante, mais échoua devant Rhodes défendu par les chevaliers de Saint-Jean de Jérusalem, f 1481.

 

MAIMBOURG, Louis, né 1610 à Nancy; jésuite dès l'âge de 16 ans, étudia à Rome, prof, des lettres à Rouen, prédicateur très couru, volontiers burlesque et faisant rire son auditoire; attaqua 1667 l'édition de la Bible de Mons el fut réfuté vigoureusement par Arnauld et Nicole. Plus tard il se mit à l'histoire, et commença par celle des iconoclastes; puis celle du schisme des grecs; celle du calvinisme, qui lui valut de Bayle et de Jurieu une de ces réfutations dont un historien ne se relève pas; celle du luthéranisme 1680, réduite à sa valeur par Seckendorf; des sermons, des traités de controverse, etc. Tout cela aussi passionné que superficiel, f 13 août 1686 à Paris.

 

MAILLARD, Olivier, né à Paris ou en Bretagne, f 13 juin 1502 à Toulouse; cordelier, docteur en Sorbonne, prédicateur de Louis XI, confesseur de Charles VIII, un des représentants les plus curieux du style macaronique burlesque. Il envoie souvent ses auditeurs ad omnes diabolos, raconte en chaire des drôleries et ne se géne pas pour chanter des chansons, même indécentes, de sa composition. Sermons, Lyon 1474. Dans un sermon de 1500, on marque par des hem/ les passages où l'orateur s'est interrompu pour tousser. On ne peut le comparer qu'à Menot.

 

MAIN-MORTE, v. Amortisation.

 

MAISTRE (comte Joseph de), né à Chambéry i«r avril 1753, d'une famille d'origine française. En 1784 il écrivit un Éloge du roi Victor-Amédée, qui fut suivi de plusieurs brochures contre la révolution et de Considérations sur la France. Nommé sénateur en 1787, il quitta la Savoie lorsqu'elle fut envahie par les Français en 1793, passa en Piémont et accompagna Charles-Emmanuel dans l'île de Sardaigne. De 1803 à 1817 il fut ministre plénipotentiaire à Saint-Pétersbourg, mais dut quitter la Russie lors de l'expulsion des jésuites, parce qu'il avait embrassé leur cause avec plus d'ardeur qu'il ne convenait à un diplomate étranger. De retour à Turin il fut nommé ministre d'Etat et régent de la chancellerie, f 1821. Il s'est fait un nom dans les lettres par la précision de son style et l'exagération de ses idées. Absolutiste en politique et partisan des vieux régimes, il l'était également en religion et ne voyait de christianisme que sous la forme papale et théocratique. Il se borne d'ailleurs à affirmer, à lancer ses oracles, sans se mettre en frais pour les justifier. Ses principaux écrits sont: Du pape, 1809; De l'Église gallicane, 1821 (il la combat); les Soirées de Saint-Pétersbourg, et Lettre sur l'Inquisition, 1822 (posthumes).

 

MAIEUL, ou Mayeul (Majolus), d'une riche famille d'Avignon, né vers 906, coadjuteur ot abbé de Cluny 948-994, distingué par sos talents, sa science et sa piété; il réforma plusieurs couvents relevant de Cluny et mérita d'en être regardé comme le second fondateur. Il avait refusé l'archevêché de Besançon et repoussa d? même les avances d'Othon II qui voulait le faire nommer pape. v. Somasques.

 

MAITRE du sacré Palais, v. Magister.

 

MAJAL, Matthieu, pasteur du désert et martyr sous Louis XV, plus connu sous le surnom de Désubas qu'il tenait du lieu où il était né en 1720. D'un extérieur agréable, d'un caractère aimable, plein de zèle et de talent, ce jeun*1 ministre était très aimé des églises et du peuple; il était d'autant plus détesté du roi et redouté des prêtres. Par ordre de Saint-Florentin, La Devèze se mit en campagne, et grâce à ses espions il réussit à l'arrêter à Mazel, près de Saint-Agrève, la nuit du 11 au 12 déc. 1745. Deux fois les protestants essayèrent de le délivrer, mais plus de 40 d'entre eux furent tués ot 200 blessés. Conduit d'abord à Vernoux, puis à Tournon, il fut enfin transporté dans la citadelle de Montpellier. L'évêque et d'autres prélats firent ce qu'ils purent pour le ramener dans le giron de l'Eglise romaine. Il comparut devant l'intendant Le Nain, chevalier d'Asfeld, qui, pour se conformer aux ordres précis du roi, le supplia d'abjurer. Sur son refusil fut condamné à mort, mais Le Nain en prononçant la sentence fondit en larmes; les juges savaient qu'il était innocent, mais ils avaient des ordres à exécuter, non un jugement à rendre. Une foule immense accompagna le martyr à l'échafaud; deux jésuites essayèrent jusqu'au dernier moment de lui faire baiser un crucifix; il les pria de le laisser mourir en paix, f *er févr- 1746. Une complainte populaire en 35 couplets a perpétué sa mémoire. Vie par D. Benoît.

 

MAJESTÉ (Lettre de Sa). C'est le nom sous lequel on connaît l'édit impérial par lequel Rodolphe II, 12 juillet 1609, accordait aux États de Bohême le libre exercice de la religion. La violation et le retrait de cet édit par l'emp. Matthias 1618 fat la première cause de ta guerre de Trente ans.

 

MAJOUTES, clercs réguliers de Saint-Maïeul, v. Somasques.

 

MAJOR lo Georges, théol. luthérien, né 1502 à Nuremberg, successivement pasteur à Magde-bourg, à Eisleben, à Mersebourg, prof, à Wittenberg, et enfin surintendant à Eisleben, d'où il fut banni 1551. f 1572. Il soutint la doctrine subtile que les bonnes œuvres sont nécessaires pour le salut, mais non pour la justification, et réussit à la faire passer dans la formule de l'In-térim de Leipzig dont il était un des rédacteurs. Mais il s'attira de vives répliques d'Amsdorf, de Flacius et des luthériens purs. Il finit par renoncer à sa définition pour ne pas donner prise à la doctrine cathol. de la nécessité des œuvres pour le salut. Mélanchthon aurait préféré dire: une nouvelle obéissance est nécessaire. Cette controverse d'équivoques se termina par la formule de Concorde qui posa la nécessité des bonnes œuvres comme résultant de la reconnaissance et non comme condition du salut La secte, qui portait son nom, ne lui a pas survécu.

2<> Jean (Hânsel Meyer) poète humaniste et satyrique de Wittenberg, né 1533 à Joachims-thal, prof, à Wittenberg, docteur en théol. de Mayence 1557, couronné en 1558 à Francfort par Ferdinand I«r comme poète lauréat. Il représenta le philippisme dans ses satires et se moqua de ses adversaires, notamment de Flacius; il fut emprisonné après la première défaite des cryptocalvinistes 1578, et de nouveau après la chute du chancelier Krell 1591. f à Zerbst 1608.

3<> Jean M., prof, de théol., collègue de Him-inel el de Gerhardt, né à Iéna 2 févr. 1615, f 1654.

4o John M., écossais, né près de North Ber-wick en 1469, fit ses études à Paris et pendant 15 ans fut prof, de théol. à la Sorbonne. En 1519 il enseigna à Saint-André, de nouveau à Paris, puis retourna à Saint-André oQ il passa les 20 dernières années de sa vie f 1550. Il avait des idées très larges et avancées pour son siècle. Il soutenait que l'autorité d'un concile était supérieur à celle du pape, et que les excommunications papales n'avaient pas de valeur. En politique il reconnaissait au peuple le droit de déposer son souverain quand celui-ci outrepasse ses droits. Il eut parmi ses élèves Bucha-nan et Knox sur lesquels il exerça une grande influence. On a de lui des commentaires en latin, une Hist. d'Écosse et d'autres ouvrages.

 

MAJORIN, élu 311, après la mort de Mensu-rius év. de Carthage, par le parti de ceux qui se montraient sévères envers les tombés; ceux qui tenaient pour l'indulgence avaient élu l'archidiacre Cécilien. Après sa f 313, ses sectateurs furent appelés le parti de Majorin, et reçurent plus tard de son successeur le nom de Donatistes.

 

MAJORITES (Controverse des), v. Major lo.

 

MAKOWSKY, Jean, de Lobzenic, Pologne, né 1583, prof, de théol. réformée à Franeker 1615-1644, accusé d'erreur, mais acquitté par le synode de Dordrecht: on lui reprocha seulement de vouloir ramener la méthode scolastique dans l'enseignement de la théol., et on le pria de s'en abstenir.

 

MAKRINA, ou Macrina, sœur de Grégoire de Nysse. Élevée sous l'influence d'une vie de famille pieuse, elle consacra sa vie, après la mort de son fiancé, au recueillement et à la pratique des œuvres de la charité dans un couvent de femmes que son père avait fondé dans le Pont. Son frère lui a élevé un monument de piété fraternelle dans sa Vita Macrinœ. Son aïeule, qui portait le môme nom, a également édifié l'Égl. par sa piété et sa constance dans les persécutions.

 

MALACHIE, archev. d'Armagh, né à Armagh 1095, il fut un des élèves du solitaire Imar, et se fit une réputation méritée par l'austérité de sa vie. Nommé d'abord assistant de l'archev. d'Armagh, puis év. de Connereth en 1130, il chercha à introduire dans l'Égl. déchue d'Irlande les formes de l'Égl. romaine. Désigné par l'archev. Celse comme son successeur, il dut attendre 5 ans que son rival et concurrent Maurice lui cédât la place. Ce n'est qu'en 1135 qu'il pût entrer en fonctions, mais il se démit de sa charge entre les mains de Gélase à Rome 1137 et rentra humblement dans la pauvreté d'un couvent de clercs réguliers. Pour obtenir le pallium il retourna en 1139 à Rome et fut nommé légat d'Irlande. Il visita Clairvaux en passant et fit la connaissance de saint Bernard, qui devint son ami et son biographe. Il n'obtint pas le pallium, le pape estimant qu'il aurait dû être demandé par un synode irlandais. Il fonda en Irlande, non sans difficulté, plusieurs couvents cisterciens, et f 2 nov. 1148 à Clairvaux dans un nouveau voyage à Rome pour les intérêts de son Église. Canonisé. On lui attribue faussement un livre, assez plat, de prophéties relatives aux papes, qui fut fabriqué en 1596.

 

MALAN, César, né à Genève le 7 juill. 1787, d'une famille originaire des vallées vaudoises, fut consacré en 1810 et bientôt nommé régent de cinquième au collège. Ses premiers sermons firent sensation, parce qu'il prêchait, et d'une manière quelquefois aggressive, la doctrine évangêlique. Le réveil religieux était dans l'air, et quoiqu'il dût en être un jour un des représentants les plus autorisés, il ne s'y joignit pis d'abord. La chaire lui ayant été interdite, il se fit construire une chapelle dans son jardin.

Privé en 1818 de sa place de régent, puis destitué et déclaré déchu du ministère ecclésiastique, il ne forma qu'en 1824 une égl. indépendante, qu'il rattacha à l'Église presbytérienne d'Écosse. Klle prospéra pendant six ans, mais en 1830 un schisme éclata, provoqué soit par ses allures trop autoritaires, soit par sa doctrine trop absolue, notamment sur la prédestination. Il n'en continua pas moins de réunir ceux des membres de son troupeau qui lui étaient restés fidèles. Son activité littéraire et musicale était immense; ses Traités religieux, ses Cantiques, Chants de Sion, Chants d'Israël, seront longtemps populaires. ainsi que son Véritable Ami des enfants et plusieurs volumes de récits de ses courses missionnaires, f le 8 mai 1864 dans sa campa-gne de Vandœuvres. Vie par C. Malan, fils. Notice par Bost, et passtm dans la plupart des écrits sur le réveil.

 

MALDONAT, Jean, né 1534 à Las-Casas de la Reina, Estramadure, étudia d'abord le droit, puis, sur le conseil d'un ami, la théologie. Après quelques années passées dans l'enseignement à Salamanque et à Rome, il entra dans l'ordre des jésuites 1562, et fut bientôt appelé comme prof, de philos, au collège de Clermont, à Paris, puis à Pont-à-Mousson. Il réussit moins bien dans une mission en Lorraine. De retour à Paris il <mt deux procès, l'un pour une captation d'héritage, dont il eut le bonheur de se justifier, l'autre pour accusation d'hérésie, parce qu'il n'admettait pas le dogme de l'Immaculée Conception. Acquitté, il n'en donna pas moins sa démission et se retira au collège de Bourges, où il f 1583. Son principal ouvrage est un Comment. sur les 4 Evangiles, publ. en 1596 à Pont-à-Mousson et encore estimé, quoique les jésuites l'aient falsifié et mutilé. Il corrige souvent le texte de la Vulgate. Sa polémique contre les protestants est précise mais passionnée.

 

MALÈSHERBES, Chrétien-Guill. (de Lamoi-gnon de), né 1721 à Paris, arrière-neveu de Bâville, fat passionné du bien sous toutes ses formes. Exilé par Louis XV à cause de ses remontrances contre les nouveaux impôts, il fut rappelé 1774 par Louis XVI, et travailla avec Turgot et Necker à créer un régime plus libéral, a vider les prisons d'État et à relâcher les derniers galériens protestants, Contrecarré par Xaurepas, il n'en continua pas moins, un peu avec l'aide des encyclopédistes et de quelques magistrats, de prendre le parti des persécutés, notamment en ce qui concerne l'état civil, mariages, baptêmes, des protestants. Il fut secondé par La Fayette à son retour des États-Unis, par Franklin, par la famille de Jaucourt, sans parler de Court de Gébelin, de Rabaud Saint-Étienne et de quelques abbés intelligents et de bonne volonté. Il obtint quelques réformes de détail; la révolution de 1789 les compléta, en même temps qu'elle balayait, bons ou mauvais, tous ceux qui représentaient le passé. Malesher-bes eut le courage de s'offrir pour défendre Louis XVI, et il f sur l'échafaud 22 avril' 1794. v. Ch. et Ath. Coquerel, Ant. Court, et le livre de M. Pelletan sur Jarousseau.

 

MALINGRE, Thomas, ou Mathieu, contemporain de Calvin. D'abord dominicain, il se convertit au protestantisme, prêcha à Blois, où il connut Marot 1534, et vint ensuite au canton de Vaud. Pasteur à Aubonne 1546, à Yverdon 1556. On a de lui (en vers) une « Épître à Cl. Marot, en laquelle est demandée la cause de son département de France, » avec la réponse du dit Marot, etc. Bâle 1548, Paris 1869. Ses poésies eurent du succès. Très intéressant pour l'hist. de la Réf. à Genève et en France, f 1572 chez son fils Daniel, pasteur à Vuarrens.

 

MALLET, Fréd.-Louis, célèbre prédicateur de l'égl. de Saint-Étienne, Brème. Né le 4 août 1792 à Braunfels, + 6 mai 1865; auteur de nombreux écrits d'édification.

 

MALMESBURY, v. Guillaume 7o.

 

MALTE (Ordre de), v. Jean (Chevaliers de Saint-).

 

MALVENDA, Thomas, né 1566 à Xativa, province de Valence, entra dans l'ordre des dominicains à Lombay et se distingua par son talent pour les langues. Lecard. Baronius le fit venir à Rome 1600 et lui confia la correction du bréviaire et du missel. Il fut employé à des travaux analogues par la Congrég. de l'index à Rome et par l'Inquisition en Espagne. Ses annales de l'ordredes prédicateurs sont inachevées. Son principal ouvrage est une traduction de l'A, T. avec commentaire, qui va jusqu'au chap. 16 d'Ezéchiel; mais la trad. est trop littérale et souvent incompréhensible à cause de cela.

 

MAMACHI, Thomas-Marie, dominicain, né 1713 dans l'île de Chios, vint de bonne heure en Italie et se distingua par son attachement au saint-siège et par sa connaissance des antiquités chrétiennes, f 1792. Son livre des origines et des antiq. chrétiennes est inachevé. Il a aussi écrit sur les coutumes des premiers chrétiens, 1753.

 

MAMAS, saint très estimé en Orient et en Occident, célébré par Grégoire de Naziance, Basile de Césarée, Walafried Strabon, mais dont on ne sait à peu près rien. Il doit être mort vers 274. La légende le fait naître dans une prison, d'une confesseuse, et sa vie est pleine de miracles et de souffrances courageusement supportées pour la foi.

 

MAMERT lo archev. de Vienne, Dauphiné, f le H mai 475. On admet généralement que c'est lui qui, à l'occasion d'un terrible incendie à Vienne, a institué les Rogations, processions pour demander à Dieu la tin d'un fléau ou pour le remercier de l'avoir détourné. Baronius et Bingham le contestent, mais en tout cas c'est lui qui en a généralisé l'usage en France, et le conc. d'Orléans 511 l'a sanctionné.

— 2o Claudien Mamert, son frère; v. Clau-dien.

 

MAMMJSA, v. Julia.

 

MAMMILLAIRES, secte d'anabaptistes hollandais, de Harlem, date inconnue. Un jeune homme avait mis la main sur le sein d'une jeune fille qu'il voulait épouser. Cet acte inconvenant fut blâmé par le Consistoire des anabaptistes, et le coupable fut excommunié. Ceux qui se prononcèrent pour l'indulgence furent appelés mammillaires. Une dispute semblable eut lieu à Venise 1743.

 

MANDATA de providendo, ordres de repourvue. Quand certains bénéfices devenaient vacants, les papes avaient le droit d'indiquer leur candidat préféré, et au besoin de le nommer d'office, par ordre, v. Menses episcopales.

 

MANDÉENS, v. Mendéens.

 

MANDEVILLE, Bernard (de), né 1670 à Dordrecht, d'une famille originaire de France, se fit médecin et se fixa à Londres, où il f 21 janv. 1733. Esprit paradoxal, il soutint les thèses les plus étranges. En 1709 il publia la Vierge démasquée, satire; en 1714 la Ruche bourdonnante, ou les Fripons devenus honnêtes gens, poème didactique de 550 vers, et en 1723 la suite ou le développement du précédent, sous le titre de: La Fable des abeilles, ou: Les vices privés font la fortune publique, dans lequel il attaque tous les gouvernements, préconise tous les vices, et cherche à prouver qu'un État qui ne se composerait que d'honnêtes gens et de bons chrétiens serait un État perdu. Il n'a aucune idée du bien et du devoir. Le dévouement et la vertu n'existent pas pour lui; le désintéressement n'est qu'un masque; l'intérêt et la vanité sont les seuls mobiles dont on puisse attendre quelque chose. Condamné par les tribunaux et par l'opinion, il essaya de se justifier en disant qu'il avait voulu plaisanter; il publia même en 1732 des Recherches sur l'honneur et sur l'utilité du Christianisme, mais personne ne s'y laissa prendre. La Fable a été trad. en fr. par Bertrand, Amsterdam 1740.

 

MANDRA (parc, étable), nom qu'on donnait quelquefois aux couvents du moyen âge et des temps primitifs, par allusion au mauvais état des huttes qu'habitaient les solitaires ainsi groupés.

 

MANÉS, Mani, ou Manichée, et MANICHÉENS. En même temps que les Perses recouvraient leur indépendance, vers le milieu du 3me siècle, leur religion se relevait aussi et Zo-roastre retrouvait ses partisans. Manès, qui avait été acheté comme esclave par une riche veuve de Ctésiphon, élevé par Térébinthe, puis affranchi, entreprenait de créer une religion de transition, ou de conciliation, en mêlant aux dogmes de Zoroastre un certain nombre de dogmes et de faits chrétiens. On possède sur cette tentative des sources occidentales, exploitées depuis longtemps, et des sources orientales plus récemment découvertes; elles s'accordent en général. Manès fut persecuté par les mages, à cause des éléments chrétiens de son système et s'enfuit en Chine, où il se lit de nombreux partisans. Il avait été banni par Sapor I dont il n'avait pu guérir le fils. A son retour sous Hormisdas. partisan de l'ancien culte, il fut vaincu dans une discussion publique avec un èvêque chrétien; il essaya de fuir encore, mais fut arrêté par ordre deBehram, écorché vif et sa chair donnée aux oiseaux, vers 277. Il admettait deux royaumes, ou principes éternels, la lumière et les ténèbres. La guerre ayant éclaté entre eux, chacun franchit ses limites, et ainsi la lumière fut mêlée aux ténèbres. De ce mélange Dieu créa l'Esprit vivant. Ainsi se forma le monde visible, afin que la lumière qui se trouvait emprisonnée dans les ténèbres en fût dégagée. Les démons enchaînés dans les étoiles s'opposaient à cette réalisation du monde actuel; mais l'âm* du monde, sans mélange avec la matière, résidant dans le soleil, le Christ, fils de la lumière éternelle, travaille pour l'accomplissement de ce but, aidé du Saint-Esprit qui réside dans Téther. Leur but est de dégager toujours plus l'âme souffrante, le Jésuspassibilis répandu dans le monde. Chaque homme a une âme lumineuse et une âme matérielle; il faut que la première remporte la victoire, par le même procédé de purification qui s'accomplit dans toute la nature, ob la lumière est la source de la vie, dans la végétation, etc. Le Jésus souffrant, apparente au Jésus céleste du soleil, a paru dans l'humanité avec l'apparence d'un corps, et il a été crucifié en apparence pour délivrer entièrement l'âme prisonnière. Les manichéens postérieurs ont enseigné que Manès, Bouddha, Zoroastre. Christ et le soleil ne sont qu'un même être. Selon eux les apôtres n'ont pas compris les enseignements du Christ, et leurs disciples k eut se sont encore plus trompés. Mais Christ qui avait prévu cette inintelligence de sa doctrine, y avait pourvu par avance en annonçant la venue du Paraclet, qui n'est autre que Manès. Ils rejetaient tout l'A. T. et presque tout le Nouveau: en revanche ils se servaient de différents ouvrages de Manès; la Bible, ou le Livre des mystères; le Livre des Chefs, ou têtes, etc. Ils distinguaient dans leur église les catéchumènes, auxquels on distribuait des indulgences, et qui étaient moins sévèrement tenus, et les Parfaits, qui s'abstenaient du mariage, des viandes et autant que possible de tout travail manuel, abstinences qui étaient figurées par trois sceaux, ceux de la bouche, des mains et de la poitrine. Manès avait établi dans l'Église un prince, 13 apôtres et 72 évêques ou disciples, sous la direction desquels fonctionnaient des anciens, des diacres et des évangélistes. Ils jeûnaient le dimanche. Ils avaient aussi un jour solennel en l'honneur de la mort de Manès. Cette secte se répandit rapidement dans l'empire et trouva des sectateurs parmi les hommes les plus cultivés; Augustin en fut membre pendant 7 ans. Elle avait certains points communs avec le pnosticisme, mais modifiés sous l'influence des idées parses et boudhistes. Un édit de Dioclé-tien les condamna, ainsi que plusieurs conciles, mais ils se maintinrent au nord de l'Afrique jusqu'à l'invasion des Vandales. Justinien les punissait de mort. Cependant on en trouve encore au 8me siècle. L'idée principale du manichéisme, celle de l'éternité du mal et de son identité avec la matière, a reparu sous diverses formes au moyen âge, et notamment chez quelques sectes religieuses qui poursuivaient avec ardeur leur santification, et qui voyaient dans la chair le principal obstacle: les cathares, les bogomiles, les pauliciens, mais on lésa trop légèrement accusées de manichéisme, quoiqu'elles y aient peut-être donné lieu par des paroles imprudentes,.v. Lombard. Les Pauliciens.

 

MANHARTIENS. ou Manhartistes, secte ou parti catholique qui se montra dans le Tvrol 1814*4826. Un chapelain nommé Haagleitner, de Hopfgarten, ayant refusé de se soumettre au coadjuteur de Salzburg nommé par Napoléon, et ayant amené de l'agitation dans le pays, fut mis en prison par les Français. Il réussit à s'échapper, et après la paix il se fit un parti qui le regarda comme son seul véritable prêtre. Il fut soutenu dans ses prétentions par le land-mann Sébastien Manzl, de Westendorf, qui s'appelait aussi Manhart, du nom d'un de ses domaines. C'est sur cette propriété que l'on se réunit; Manhart et sa femme y prêchèrent eux-mêmes, et naturellement la congrégation fut baptisée de leur nom. En 1823 ils finirent par s'adresser au pape, qui les renvoya au prince-archevêque Gruber, et ils se soumirent.

 

MANI, Manichéens, v. Manès.

 

MANIPULE, petite étole qui se porte au bras gauche, de la même couleur que les vêtements de la messe, et ornée de petites croix au centre et à ses extrémités. On la bénit avant de s'en servir.

 

MANSFELD, Ernest (de), fils naturel du comte Pierre-Ernest, gouverneur du Luxembourg, et d'une dame hollandaise. Né 1585, il fut élevé dans le catholicisme par son parrain, Ernest d'Autriche. Il servit d'abord l'Autriche et ses services lui valurent d'être légitimé par Rodolphe II, mais comme malgré cela on ne voulut pas lui restituer les biens de son père, qui étaient en Hollande, il devint l'ennemi acharné de l'Autriche, passa à la Réforme 1610, offrit son aide aux révoltés de Bohême qui le nommèrent leur général 1618, se battit pour l'électeur Frédéric V dans le Palatinat et sur le Rhin, défit les Espagnols à Fleurus, et réussit avec une armée nouvelle, et malgré une défaite que lui fit éprouver Wallenstein, à pénétrer jusqu'au centre de la Hongrie, 1625. MaisBeth-len Gabor ne lui ayant pas amené les troupes fraîches qu'il lui avait promises, il licencia son armée et se disposait à se rendre en Angleterre quand il f à Zara, presque subitement, 20 nov. 1626. Sans lui l'Autriche aurait pu réaliser son plan de soumettre l'Allemagne et d'écraser le protestantisme.

 

MANSI, Jean-Dominique, né à Lucques 16 févr. 1692, entra dans l'ordre des clercs réguliers de la Mère de Dieu, fondé 1593 par Léonardi, et enseigna la théol. à Naples. Rappelé à Lucques par son archev., il y fonda une académie pour la littérature et l'hist. ecclésiastique, se fit une réputation européenne par ses écrits et fut nommé archev. de Lucques. f 27 sept. 1769. Il a traduit en latin les Comment, et le Dictionn. de Calmet, publié les Annales de Baroniuscon-tinuées par Raynaldi, et fait une collection des saints conciles avec un supplément au travail de Colet.

 

MANSIONATICUM, indemnité au moyen de laquelle les prêtres pouvaient se racheter de l'obligation de nourrir les évêques et leur suite lors des visites d'églises. Innocent IV, au conc. de Lyon 1274, avait interdit ce rachat, mais après lui Boniface VIII et le conc. de Trente, sans le recommander, l'ont laissé facultatif.

 

MANSUS ecclesiœ, portion de terrain donné à une église comme sa dot, attenant à la fondation, et à ce titre dispensée de toute charge et impôt. L'étymologie du mot est incertaine; comme dans le français du midi, mas, il signifiait peut-être habitation, demeure. Chez les Francs les prestations militaires étaient calculées d'après les manses, et l'église elle-même n'était dispensée de cet impôt que pour sa dot, mansus inte-ger, et pour les biens-fonds que les rois en avaient expressément dispensés.

 

MANTOUE, la patrie de Virgile, une des places les plus fortes de l'ancien royaume lombard-vénitien. Il s'y tint en 1459 un congrès convoqué par Pie II, où les princes chrétiens furent invités à se croiser pour délivrer Constantinople qui venait d'être conquise par les Turcs. Les princes promirent peu et tinrent encore moins;

la mode n'était plus aux croisades. Pie profita de la réunion pour condamner les appels qu'on faisait souvent de l'autorité du pape à celle d'un concile. Paul III eut aussi l'idée de convoquer en 1537 à Mantoue un concile auquel seraient invités les princes protestants, dans des conditions que Paul Vergère avait préalablement réglées avec eux. Mais les circonstances, l'époque de la réunion et le mode de l'invitation prouvaient que Paul III ne se souciait que médiocrement de réussir dans ses démarches, et le congrès n'eut pas lieu, les princes ayant refusé les lettres de convocation dans la forme où elles leur étaient adressées. A toute éventualité cependant Luther avait préparé les Articles de Smalcalde, et les Suisses la seconde confession de Bâle.

 

MANUEL 1° Comnène, lils de Jean, emp. d'Orient 1143-1180. Distingué par son courage, non moins que par sa perfidie, il monta sur le trône au détriment de son fr. Isaac, et fut constamment en guerre avec la Hongrie, les Turcs, les Serbes, les Normands, les Vénitiens, presque toujours vainqueur, sans cependant avoir assuré rien de stable à son royaume. La seconde croisade échoua misérablement, grâce à lui, parce qu'à l'aide de faux renseignements il livra l'armée aux Sarrasins et à la famine. Adrien IV et Alexandre UI ouvrirent avec lui des négociations pour la réunion des Égl. d'orient et d'occident, mais elles échouèrent, parce qu'il exigeait pour prix de la réconciliation la couronne d'occident. II favorisa les moines, mais chercha à régulariser leur vie. Comme beaucoup d'empereurs precs il se plaisait aux controverses théologiques; il rédigea même une confession de foi, qu'il voulut imposer aux évêques sous peine de destitution, d'excommunication et de mort. Vaincu en 1175 dans les déniés de Myriocéphales, Asie Mineure, il vit son royaume à deux doigts de sa perte, mais il réussit à se relever par une victoire sur Azeddin, près du Méandre, f 1180.

2° Nicolas Manuel, appelé Deutsch, né 1484 à Berne, peintre et poète populaire, satirique et controversiste, qui a beaucoup travaillé et avec succès pour la Réforme. On a de lui: Complainte des idoles (contre les iconoclastes), Épigramme sur le Dr Eck, Dialogues sur la maladie et la mort de la messe, le Testament de la messe, le Marchand d'indulgences, une espèce de drame; le Croquemort, un autre drame: Parallèle entre Jésus sur un âne et le pape à cheval. Il avait fait de la peinture à Colmar sous Martin Schœn, et à Venise sous le Titien qui l'appelle Emmanuello Tedeschi; son chef-d'œuvre, la Décollation de Jean-Baptiste est à Bâle; son portrait, par lui-même, à Berne. Marié en nov. 1509 avec Catherine Frisching il en eut six enfants. Probablement à cause d'une gêne momentanée, il se mit au service de François et assista à la prise de Novare et au désastre de la Bicoque 1522. Dès 1510 il avait été nommé membre du Conseil souverain, en 1323 il fut nommé bailli deCerlier, et il y passa 5 de ses plus belles années. Il s'était attaché de cœur à la cause de la Réformation et il la servit avec autant de zèle que de tact et de modération. Il fut l'ordonnateur de la célèbre Dispute de Berne, il négocia avec Strasbourg et avec Philippe de Hesse dans l'intérêt de la paix de son pays; il contribua à apaiser la révolte de l'Oberland. Élu membre de l'Exécutif et banneret des tanneurs, il fut chargé de plusieurs missions à l'intérieur et au dehors; il se rend encore à la diète de Bade, puis à Bâle, toujours calme et prudent, et après avoir vu la Réforme solidement établie dans son canton et pure d'alliage mondain, épuisé de fatigue, il f à 46 ans, 30 avril 1530.

 

MAPHRIANAT. Après le patriarcat d'Antio-che, c'est la plus haute dignité épiscopale de régi, jacobite monophysite syriaque; sa résidence est à Takrit sur le Tigre, et sa juridiction s'étend sur la Chaldée. la Syrie et la Mésopotamie.

 

MAPPE, drap d'autel. Sur chaque autel où la messe doit être dite, il y a 2 ou 3 draps de lin blanc; celui de dessus est plus lin et descend jusqu'à terre; il ne sert qu'après avoir été consacré. Après la messe on étend sur ces drap> une mappe ou couverture pour les protéger contre la poussière.

 

MARANES, ou Marano*, nom donné en Espagne aux juifs, et probablement aussi aux musulmans qui, ayant été convertis par force, conservaient encore dans leur cœur, ou étaient suspects de conserver un secret attachement pour leur ancien culte. La famille de Maïmoni-des était dans ce cas et ne manquait pas de bonnes raisons pour justifier une conduite équi voque imposée par la violence. Les maranes et leurs descendants n'inspiraient pas grande con fiance; ils pouvaient devenir prêtres, mai> montaient difficilement en grade. Tolet cependant fut nommé cardinal, mais on n'eut pas a s'en applaudir; la vieille indépendance de U race se laissa toujours apercevoir. Les jésuites ne les recevaient qu'avec peine et sous toutes réserves.

 

MARANUS, Prudence, savant bénédictin de la congrégation de Saint-Maur, né 14 oct. 1683 à Sézanne ou à Troyes, f 2 avril 1762. On lui doit une bonne édition de Cyrille de Jérusalem, grec et lat. 1720, une de Cyprien 1726, une de Justin Martyr 1742, et un Traité (latin) sur U divinité de J.-C. d'après la Bible et la tradition 1746. Quoiqu'il n'ait pas pris une part active aux controverses sur la bnlle Unigenitus, il eut beaucoup à souffrir comme Appelant.

 

MARBACH, Jean, né à Lindau 24 août 1521, étudia à Strasbourg et à Wittenberg, occupa plusieurs postes, fut entre autres pasteur de l'égl. de Saint-Nicolas à Strasbourg, et reçut diverses missions. Appelé en 1553 à succéder à Hedion comme surintendant, président du consist. et prof, de théol., il se donna pour tâche d'implanter à Strasbourg le luthéranisme le plus pur et de bannir de la'ville toute contradiction. Éloquent, mais peu instruit, zélé mais imprudent, pointilleux surtout, il fit plus de mal que de bien par son intolérance. En 1554 il demanda au conseil de la ville l'expulsion des catholiques, contrairement au traité de paix d'Augsbourg, et s'attira une humiliante réponse. En 1555 il réussit à faire partir le pasteur de l'égl. réf. française, Garnier, et en 1557 l'égl. elle-même fut fermée. En 1556 l'électeur palatin Othon-Henri lui confia la réorganisation des égl. du Palatinat dans cet esprit de luthéranisme absolu; il voulut même lui en remettre la surintendance, mais il la refusa. Ses dernières années furent plus calmes et sans éclat, f 17 mars 1581. B avait décidé en 1577 le clergé stras-bourgeois à adhérer à la Formule de concorde. Ses dix ou douze écrits ont peu d'importance. — Son fils Érasme, né 1548, fut prof, de théol. à Strasbourg, f 1593. Le second, Philippe, né 1550, f 28 sept. 1611, fut co-recteur à Grâtz, prof, de théol. à Heidelberg, recteur du gymnase de Klagenfurt, et enfin prof, à Strasbourg en remplacement de son frère. Érasme avait publié un Comment, sur le Pentateuque; Phi-lippe, quelques discours, et des dissertations sur la Cène, etc.

 

MARBOURG, résidence des landgraves de Hesse sur la Lahn, célèbre par sa jolie église de Sainte-Élisabeth, chef-d'œuvre de l'art gothique allemand. Philippe-le-Magnanimey fonda30 mai 1527 la première univ. protestante, qui fut reconnue en 1541 par Charles-Quint: il la dota avec les biens des couvents sécularisés, et elle acquit bientôt une grande réputation. Un moment fusionnée avec l'univ. de Giessen, elle se reconstitua en 1653 après le traité de Westpha-lie. Elle représentait d'abord la tendance philippine, mais lorsque Hunnius, en enseignant l'ubiquité et la formule de concorde, eut amené le schisme entre les deux Hesse et que Giessen eut été fondée avec un caractère strictement lu thérieu, Marbourg devint comme un centre de la théol. réformée, d'autant plus que le landgrave Maurice penchait dans ce sens et se fit représenter au synode de Dordrecht. Cependant l'univ. eut toujours une tendance modérée*. Parmi ses prof, les plus distingués on remarque Hypérius, Hunnius, Cruciger, le philos. Wolf, puis plus récemment Daub, Stîlling, Richter, Ranke, etc. — On appelle Bible de Marbourg une édition de la trad. de Luther, faite par Horch et Scheffer 1712, avec des introductions et des notes dont plusieurs sont empruntées aux explications mystiques de Mad. Guyon. Cette version était très estimée des mystiques, jusqu'au moment où elle fut remplacée par la Bible de Berlebourg.

Le Colloque de Marbourg fut nécessité par l'impossibilité où les protestants se trouvaient de constituer une unité politique en face du mauvais vouloir de l'emp. et des États catholiques; et comme ils ne pouvaient pas même constituer une unité religieuse, aussi longtemps que les théologiens de Wittenberg déclaraient contraire à leur conscience toute communion avec les Suisses, Philippe de Hesse résolut de travailler à un rapprochement. Luther refusa longtemps de s'y rendre, et il ne s'y décida que parce que Mélanchthon, à Spire 1529, l'avait promis à Philippe de Hesse. Zwingle s'y rendit en dépit des craintes exprimées par le conseil de Zurich. Du côté des luthériens se trouvaient Luther, Jonas, Mélanchthon, Osiander, Agricola et Brenz; du côté des Suisses réformés, Zwingle, OEcolampade, Bucer et Hedion. La conférence commença le 1er oct. 1529, après le service du matin, par deux discussions séparées, l'une entre Luther et OEcolampade, l'autre entre Zwingle et Mélanchthon; l'accord fut complet sur tous les points, sauf celui de la Cène. Le 2 oct. la discussion roula exclusivement sur le point en litige, et Luther, pour se prémunir contre toute faiblesse, écrivit à la craie en grosses lettres sur la table: Hoc est corpus meumy confondant l'Écriture avec son interprétation et se refusant à tout examen, sous prétexte qu'il faut se soumettre à la Parole de Dieu, « même si elle nous ordonnait de manger des pommes sauvages. > On discuta longtemps sur Jean 6, sur la question de savoir si le corps de Christ a une forme et des dimensions, et sur la différence qu'il peut y avoir, comme bénédiction, entre manger le corps de Christ matériellement, avec la bouche (manducatio oralis), et le manger spirituellement. Cette discussion sans issue fut reprise le lendemain, dimanche 3 oct., et quand elle fut close sans avoir abouti, le chancelier Feige exhorta les théologiens à l'union. Zwingle tendit la main à Luther, mais celui-ci la repoussa en lui disant: « Vous avez un autre esprit que nous. » Néanmoins, à la demande du landgrave, on collationna le 4 oct. les articles sur lesquels l'entente s'était faite, et ceux sur lesquels on différait. Les 14 premiers comprenaient les doctrines fondamentales du christianisme. Trinité, christologie, péché, ainsi que celles qui caractérisaient la Réformation, la justification par la foi, la confession des péchés, le baptême des enfants- Le I5<ne% Sor la Cène, se bornait à repousser la doctrine catholique, insistait sur l'usage spirituel du sacrement et promettait l'amour fraternel et l'union, dans la mesure où la conscience de chacun le permettrait. De ces articles, qui sont la première Confession de foi protestante et qui ont servi de base à la Conf. d'Augsboarg, Luther a fait les articles de Schwabach, mais en les accentuant davantage dans le sens luthérien. Si le colloque de Marbourg n'atteignit pas complètement son but, il eut cependant pour effet de réveiller chez tous la conscience d'une unité évangélique supérieure; il facilita la Concorde de Wittenberg, et il assura aux réformés la même protection qui fut accordée aux adhérents de la Conf. d'Augs-bourg.

C'est aussi à Marbourg, en mai 1540, que fut consacrée la bigamie de l'électeur. Luther et Mélanchthon n'allèrent pas jusqu'à l'approuver; ils constatèrent seulement qu'il n'y avait pas dans le N. T. un passage qui l'interdit d'une manière formelle. Mélanchthon y tomba gravement malade, du regret, dit-on, d'avoir montré tant de faiblesse.

 

MARC 1° l'évangêliste. v. Dict. de la Bible.

2° pape presque inconnu, Romain, successeur de Sylvestre 336. De lui date peut-être l'usage, dans le service de la messe, de lire après l'Évangile le symbole de Nicée. On lui attribue à tort une lettre à Athanase, dans laquelle il est fait mention de 70 canons qui auraient été votés à Nicée.

3° Marc-Aurèle, ou Aurèle-Antonin, dit le philosophe, né 121 à Rome, d'une famille espagnole distinguée, préfet de Rome sous Adrien, adopté par Antonin-le-Pieux, marié avec sa tille Faustine. Dès l'âge de 12 ans il adopta le costume et les allures des stoïciens, et il posa toute sa vie pour un disciple de leurs doctrines. Il se distingua par une conduite honnête et régulière, et s'appliqua à introduire d'utiles réformes dans l'administration et dans le gouvernement. 11 a même composé un recueil en 12 livres, de Réflexions morales (en grec), sous le titre: A moi-même, où il dit d'excellentes choses sur la vertu. Mais il n'était pas capable de comprendre le christianisme qui, par son origine et par l'enthousiasme qu'il excitait chez ses disciples, faisait un si grand contraste avec sa philosophie. Il ne paraît même pas qu'il se soit donné beaucoup de peine pour chercher à le connaître, et il est une preuve frappante de l'insuffisance de la philos, pour inspirer les vrais principes de la tolérance et du respect des convictions. L'hist. de son règne présente une suite presque ininterrompue de persécutions; il rivalisa avec Néron et Domitien, et il eut pour fils Commode. Il débuta par un édit portant la peine de mort contre quiconque prêcherait une nouvelle religion, de manière à troubler la paix des individus ou celle de l'État. Son règne 161-180 compte entre autres martyrs célèbres Justin 166, Polycarpe 169, et les martyrs de Lyon 177, peut-être Félicité et ses 7 fils. S'il n'est pas directement responsable de tous les détails dé ces persécutions, c'est cependant sous son nom, par son ordre et sous son inspiration qu'elles ont eu lieu. Justin eut le courage de loi présenter sa Seconde Apologie en faveur des chrétiens: il l'expia par la mort. D'autres défenseurs prirent sa place, Athénagore, Méliton de Sardes, Tatien, etc. Marc-Aurèle, qui encourageait la délation, méprisait l'humilité et ne voyait dans l'héroïsme et la persévérance des chrétiens qu'une folle obstination et un fanatisme insensé. Il était en même temps superstitieux. Pendant la guerre aux Marcoraans, il offrit des sacrifices aux dieux et fit faire des prières par des prêtres appartenant à toutes sortes de religions. Surpris par le manque d'eau et par un soleil brûlant, la veille d'une bataille, la 12me légion qui comptait beaucoup de chrétiens se mit à genoux, et bientôt un orage qui justifiait son titre de légion fulminante vint désaltérer les soldats. Les païens attribuèrent cette délivrance aux enchanteurs d'Égypte, les chrétiens à Dieu, Marc-Aurèle au Jupiter des pluies; mais peut-être que dans sa conscience il fut plus juste envers les chrétiens. Cela ne l'empêcha pas, trois ans plus tard, d'ordonner de nouvelles persécutions, f 180 usé par l'âge, la fatigue et la maladie.

4o ermite, contemporain de Chrysostome, vivait dans le désert scétique, et se distingua par sa science, sa piété et ses miracles, si bien qu'il a passé dans la liste des saints de l'Égl. grecque et d'une partie de l'Égl. latine, f vers 410, plus que centenaire. On a sous son nom, et vraisemblablement authentiques, 9 traités de morale, sur la valeur et la signification de la vie ascétique, du baptême, du péché, de la grâce, etc. Ils jettent du jour sur la mystique des moines d'Égypte. En dogmatique ils inclinent vers le monophysitisme et reproduisent la doctrine des pères grecs sur le baptême, le péché originel et la liberté. Comme ils insistent sur la justification par la foi, Rome les a mis à l'index. Bel-larmin croyait y reconnaître des interpolation* d'un hérétique, v. Patrol. grecque, de Migne.

5o autre ermite, mentionné par Nicéphore comme disciple de Chrysostome et auteur d'écrits ascétiques.

6o ermite anglais, auquel on attribue, mais sans fondement suffisant, une Historia Brtto-rum, qui, selon d'autres, serait l'œuvre de Neo-nius.

7°, 80 et 9*. On connaît sous ce nom trois gnostiques devenus chefs de secte; un disciple de Valentin, q. v.; un disciple de Marcion, le chef des marcosiens; il enseignait que Dieu avait donné à l'homme du démiurge le pneuma, l'esprit, lequel s'était perdu par le péché et était reconquis par la rédemption. Comme il distinguait entre les pneumatiques et les psychiques, il admettait un double baptême, en Jésus le messie des psychiques, et en Christ. C'est dans cette secte qu'on constate pour la première fois l'usage de l'extrême onction. Le 3e Marc gnostique doit être né à Memphis; on le trouve en Espagne vers 350 comme le père du priscillia-nisme.

10o Marc-Eugène, archev. d'Éphèse, un des délégués de l'Égl. grecque au conc. de Ferrare-Florence 1438-1439, et le chef du parti hostile à la réunion des deux Églises. C'est lui qui à la fin des négociations déclara les latins non seulement schismatiques, mais hérétiques, et dit que les grecs aimeraient mieux mourir que latiniser, c.-à-d. s'allier aux latins. Seul il refuse de signer le décret d'union, sans se laisser effrayer par la crainte d'une condamnation papale. Après son retour il continua la lutte et réussit à empêcher le décret d'entrer en vigueur, t1447.

 

MARCA, Pierre (de), né 24 janv. 1594 à Gan, Béarn, élevé à Auch au collège des jésuites; il fit son droit à Toulouse. En 1615 il fut nommé membre du Conseil souverain du Béarn, lui seul catholique, et fut nommé par Louis XIII en 1621, président du parlement de Pau, en récompense de ses efforts pour réintroduire le catholicisme dans la province. Conseiller d'État à Paris en 1639, il écrivit en 1641 à la demande du roi un livre De Cancordia, etc., de l'Alliance du sacerdoce et de l'empire, ou Des libertés de l'Égl. gallicane, qui fut mis à l'index à Rome. Après la mort de si femme 1632 il était entré dans les ordres; en 1643 le roi lui donna l'évêché de Conserans, mais le pape refusa de le confirmer, à cause de son livre, et il ne put prendre possession de son diocèse qu'en 1650. après avoir signé une rétractation en 1647 pendant une grave maladie qu'il fit à Barcelone et qui lui ôtait la conscience de ses actes. Le roi qui l'employait souvent pour des négociations politiques, le promut en 1652 à l'archevêché de Toulouse. Mais sa confirmation traîna, parce qu'on le soupçonnait de jansénisme; il se lava de ce reproche en condamnant le jansénisme dans l'assemblée du clergé de France de 1656. + 1662, peu de mois après avoir été appelé à l'archevêché de Paris. Son compatriote Baluze a écrit sa vie et publié une édition complète de sa Concordia, qui continue d'être à l'index.

 

MARCEL lo pape 308, succéda à Marcellin après une vacance de deux ans et sept mois. On raconte que Maxence, pour le punir de ce qu'il refusait de sacrifier aux dieux, lui imposa plusieurs fois les fonctions de valet d'écurie. Il réussit à s'évader et se cacha dans la maison d'une veuve, qu'il fit plus tard, quand il eut recouvré sa liberté, transformer en église. Devenu pape il partagea Rome en 20 paroisses avec leurs prêtres et leur administration indépendante. Il fut banni par Maxence sous prétexte qu'il causait des troubles par sa sévérité envers les tombés. On dit qu'il souffrit le martyre, 16 janv. 309.

2<> Marcel II, 1555, Cervin, cardinal dé Sainte-Croix, ne changea pas de nom en devenant pape. Homme grave et sévère, d'une âme ferme et élevée, il avait un tel désir de réformer l'Église, en commençant par la cour de Rome elle-même, qu'il mourut d'apoplexie 22 jours après son élévation. Il avait déclaré, en frappant du poing sur une table (Adrien avait déjà dit quelque chose de semblable), que personne n'était plus misérable qu'un pape romain, et qu'il ne pouvait pas se persuader que ceux qui sont revêtus de cette haute dignité pussent être sauvés.

3o Marcel d'Ancyre, Galatie, adversaire d'A-rius au conc. de Nicée, écrivit contre lui, mais souleva les protestations des orientaux. Il ne pouvait admettre une distinction hypostatique du Logos, et il rapportait à Jésus seul l'expression de fils de Dieu, qu'Athanase regardait comme équivalant à celle de Logos. Il n'y a pas un fils éternel de Dieu, mais il y a un Logos éternel, un avec Dieu, qui n'est devenu son fils que par l'incarnation. Une fois la rédemption accomplie, la qualité de fils disparaît et le Logos rentre dans l'unité de Dieu. On l'accusa pour cela de sabellianisme et de samosaténisine. Les ariens, aux synodes de Jérusalem et de Constantinople, le destituèrent et l'excommunièrent ainsi qu'Athanase. Après la mort de Constantin il revint; puis, banni de nouveau, il s'adressa à Jules 1er de Rome, qu'il réussit à gagner à sa cause et qui le déclara orthodoxe. Plusieurs conciles consécutifs se prononcèrent les uns pour, les autres contre; enfin le conc. de Sardique 347 le libéra en même temps qu'Athanase. Mais à l'instigation de Basile, Atha-nase se sépara de Marcel, et celui-ci donna sa démission, mais en publiant une confession de foi pour laquelle il sollicitait l'approbation des Égyptiens, f vers 373.

4° Martyr, à Chalon-sur-Saône, vers 140. Le préfet Priscus le voulut contraindre à prendre part à un banquet païen, mais Marcel refusa et se moqua des faux dieux. Le préfet le fit enterrer jusqu'à mi-corps et le laissa mourir dans cette position.

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5° Capitaine de la légion trajane à Tingis en Mauritanie; sur son refus de participer à des sacrifices il fut décapité, 20 oct. 280. Sa constance frappa Cassien, greffier du tribunal militaire. qui se convertit à la foi chrétienne et fut à son tour mis à mort.

6° Fils d'un païen et d'une chrétienne de Rome; il s'enfuit à Argenton pendant la persécution d'Aurélien. Ses miracles attirèrent l'attention; il confessa sa foi; on le mit sur un gril pour le brûler, mais comme la mort ne venait pas, on finit par lui trancher la tête. 29 juin.

7° Év. de Die au 5«»e siècle: il était d'Avignon. Son élection fut décidée par une colombe qui vint se poser sur lui. Arrêté par les ariens, il f en prison le 9 avril.

8° Év. d'Assamée, Syrie, vers 380. Comme il avait fait démolir un temple d'idoles, les païens se jetèrent sur lui et le traînèrent à l'échafaud.

9<> Moine qui vivait vers 450. Après la mort de ses parents qui étaient riches, il distribua ses biens aux pauvres et se retira dans un couvent d'acémètes à Constantinople; l'archimandrite Alexandre étant mort, il s'enfuit pour ne pas être nommé à sa place; il réussit à faire élire Jean, mais celui-ci, jaloux de lui, l'envoya aux écuries pour soigner les ânes du couvent. Après la mort de Jean il ne put se soustraire à la dignité qu'on lui imposa, et il procura à son couvent honneur et prospérité, f vers 485.

10 Év. de Paris, célèbre par sa pitié; nommé vers 400 f vers 440; enterré dans un petit village des environs, qui est auj. le faubourg Saint-Marcel.

 

MARCELLIN, pape 296-304. Sous son pontificat ont lieu les persécutions de Dioclétien. La plupart des docteurs de l'Église racontent qu'il renonça solennellement à la religion chrétienne et qu'il sacrifia aux dieux de Rome, à Vesta et à Isis (Platina, De vitis ac gestis summ. Pont. p. 71). Il se serait repenti plus tard de cet acte de faiblesse, et n'en est pas moins ho* noré comme saint et martyr. On a démontré la fausseté de l'histoire qu'un prétendu concile de Sinuesse, Campanie, se serait refusé à prononcer sur lui après sa chute, sous prétexte qu'un év. de Rome n'a pas de juge au-dessus de lui dans ce monde. — Après lui, interrègne de 4 ans à cause des persécutions. Le conc. d'El-vire 305, essaie d'introduire le célibat forcé des prêtres.

 

MARCELLINE, femme qui arriva à Rome vers 160 et qui chercha à y introduire le système gnostique de Carpocrate. Ses adhérents, mentionnés par Celse sous le nom de marcellinistes. ne doivent pas être confondus avec les marcel-liens, disciples de Marcel d'Ancyre.

 

MARCION, Marcionites. Né païen, mais fils d'un homme qui se convertit plus tard et qui devint év. de Sinope, Paphlagonie, Marcion, converti lui aussi et ayant embrassé la foi chrétienne avec enthousiasme, vint à Rome vers 143 ou 144 et y vécut dans un grand renoncement qui lui valut l'estime de tous. Le monde exterieur et l'hist. même du peuple de Dieu lui paraissaient morts; il ne pouvait reconnaître h* vrai Dieu dans l'histoire des Hébreux; il n'y voyait que Satan, ou un dieu diminué, dénaturé; la nature aussi lui apparaissait comme frappée d'anathème. Il avait attaqué d'abord les doctrines judaïques qui régnaient dans l'Asie et à la suite d'une faute grave il s'était fait ex -communier à Sinope. A Rome il appliqua à la nature et à l'A. T. le passage Matt. 9, 17. sur les vieilles outres et le vin nouveau. Rejeté par l'Église, il fut amené à se faire un système à part, dont l'idée principale était que le christianisme avait paru dans le monde comme une révélation indépendante de tout ce qui avait précédé, comme quelque chose d'entièrement nouveau. Il rencontra Cerdon dont le système servit à compléter le sien. Différent des autres gnostiques qui prétendaientiunover, il croyait que ses doctrines étaient la doctrine primitive de l'Église, et qu'elles appartenaient à tous, bien loin d'être le privilège des sages ou des parfaits. Il ne cessa de voyager et de combattre pour propager ses idées: haine à la nature, haine à l'histoire, amour de Christ en Dieu. Il appelait ses disciples ses compagnons de haine et de souffrance. Il ne mettait pas la connaissance, la gnôsi*. au-dessus de la foi. Son système était essentiellement moral; il distinguait trois principes: Le Dieu bon, qui est celui du N. T.; le Dieu juste ou démiurge, qui est celui de l'Ancien; et la matière qui est mauvaise, le monde qui est le royaume du démiurge, du Dieu légal. L'homme n'aimait pas le démiurge à cause de sa justice, et Christ est venu pour l'en délivrer. Celui qui aime le Dieu bon et qui vit dans la sainteté, sera éternellement heureux. Voilà à quel mélange de faux et de vrai l'imagination peut en venir, quand elle abandonne le terrain biblique. Tertullien dit que Marcion reconnut ses erreurs et que, sur sa demande, il fut réin -tégré dans la communion de l'Eglise, f vers 170. Marcion est un des premiers qui aient eu l'idée de faire une collection complète des livres apo>-toliques; plusieurs de ces collections existaient sans doute déjà; elles s'étaient formées peu à peu, mais il voulut en faire un recueil authentique, une récension critique et savante. Mal -heureusement pour son travail, il avoue lui-même qu'il s'est laissé guider dans ses recherches par des considérations dogmatiques, et cela suffit pour lui enlever une partie de sa valeur. Il n'admettait que les écrits purs de tout alliage judéo-chrétien et ceux qui pouvaient donner quelque appui à son système; même dans ces derniers il supprimait les passages qui ne concordaient pas avec sa doctrine. Il n'a donc conservé que l'Évangile de Luc, tronqué, et dix Épîtres de Paul dans l'ordre suivant: Galates, 1 et 2 Corinthiens, Romains, 1 et 2 Thessaloni-ciens, Laodicéens (Ephésiens),Colossiens, Phi-lémon.et Philippiens. Au point de vue critique ce catalogue a cependant une certaine signification, car outre le témoignage indirect qu'il rend aux autres écrits, en ne les repoussant que par rapport à leur contenu, il renferme des données critiques étrangères à toute préoccupation de doctrine, des variantes confirmées par Epiphane et Tertullien, et une succession des epîtres, qui prouve que ce travail a été fait sérieusement. Plusieurs des disciples de Marcion, entre autres Marc 1° et Lucain, ont dénaturé son système en l'exagérant.

 

MARCK (comtes et comté De LA), ancien État de l'empire d'Allemagne, dans le cercle de Westphalie, appartenant depuis le 14me siècle aux duchés de Juliers, Clèves et Berg, et tombé en partie depuis 1609 dans la possession de la maison de Brandebourg. Il appartient auj. à la Prusse, et relève ecclésiastiquement du diocèse de Paderborn. Un des princes de La Marck, Evrard III, ayant épousé en 1410 Marie de Braquemont, sœur de Louis, seigneur de Sedan, acheta cette seigneurerie et la fit ériger en comté. Les de La Marck furent dès lors, et pendant près de 2 siècles, les souveraius de cette principauté. Evrard III f vers 1448. Son fils Jean fit achever le château et entoura la ville de murailles 1454; il eut 6 fils, dont Robert I«r, et Guillaume, baron de Lumain, le Sanglier des Ardennes. En 1484 les La Marck obtiennent le château et le duché de Bouillon. Jean f 1469; Robert I*r lui succède; il f 1489, laissant 2 fils, Robert II, né vers 1460, prince de Sedan, Rau-court, Jametz et Bouillon, et Évrard, cardiual-archev. de Liège, év. de Chartres, archev. de Valence, f 1538. Robert II, caractère inquiet, eut une vie agitée; il prit parti pour Charles-Quint contre François I«r, mais l'empereur n'ayant pas tenu ses promesses, il lui envoya un cartel à Worms; ses États furent ravagés; t 1536. Vie par Brantôme. Son fils Robert III, maréchal deFleuranges, dit T Aventureux, vaincu à Pavie et prisonnier à Madrid, très aimé de François Ier, lui succéda, mais f 1537 à Long-jumeau, avant d'avoir pris possession de son gouvernement. Sous Robert IV, Sedan fut érigé en souveraineté et ses frontières s'étendirent, grâce à sa femme Françoise de Brézé, fille de Diane de Poitiers. Fait prisonnier à Hesdin par Emmanuel-Philibert 1553, il languit 3 ans et f 1556 au moment où il venait d'être racheté. La Réforme s'introduisit à Sedan sous son fils Henri-Robert et sa femme Françoise de Bourbon- Montpensier. Son fils aîné Guillaume-Robert, né 1562, lui succéda à l'âge de 11 ans. sous la tutelle éclairée de sa mère; devenu ma jeur et menacé par la Ligue, il prit parti pour le roi de Navarre; il était très estimé de La Noue. Vaincu par les Lorrains, il vint mourir à Genève, janv. 1588, peu de temps après sa mère et son fr. Jean. Charlotte sa sœur et son héritière, défend avec autant de succès que d'énergie sa principauté contre des ennemis de tous genres. Elle épouse le 11 oct. 1591 Henri de La Tour, vicomte de Turenne et f en couches, ainsi que son enfant, juin 1594; son mari épouse bientôt après Élisabeth de Nassau, qui sera la mère de Turenne. Les héritiers naturels de Charlotte, et désignés par elle, sont ses oncles de La Marck et Montpensier, mais La Tour, duc de Bouillon, est en possession, et protégé par Henri IV il n'entend pas se dessaisir du pouvoir. Il traite avec le duc de Montpensier, moyennant la cession de Jametz, et avec le comte Charles-Robert de La Marck pour uno somme d'argent, et ceux-ci, ne pouvant en appeler ni au droit, ni aux armes, sont obligés de se contenter de ce qu'on leur offre. Dès ce jour les La Marck ne sont plus princes de Sedan, et c'est en vain que Charles essaiera plus tard, en 1598. et sou fils Henri-Robert sous Louis XIV, de protester contre l'usurpation du duc de Bouillon et de revendiquer leur héritage; l'acte de cession existe et leur cause est perdue. V. Peyran, Hist. de la princip. de Sedan, 1826.

 

MARCOMANS, peuplade germanique déjà mentionnée par César; elle habitait sur les deux rives de l'Elbe, dans les monts Hercyniens, et finit par s'étendre sur la Bohême. Ils cherchèrent à envahir l'Italie, 167-174, mais furent repoussés. On raconte qu'entre 374 et 397 un chrétien italien disposa la reine Fritigil en faveur du christianisme et qu'un écrit d'Ambroise l'y gagna entièrement. Elle se décida même à faire le voyage de Milan pour voir le pieux évêque, mais lorsqu'elle arriva il était déjà mort.

 

MARCOSIENS, v. Marc 7*.

 

MARCULF, moine français, vers 660, auteur d'un recueil dans lequel il a réuni des modèles de formules pour les contrats et les actes publics, civils ou religieux, les plus usités de son temps. Publ. par Bignon 1613, Baluze 1677.

 

MARETS (DES), Samuel, en latin Maresius, né à Oisemont, Somme, 9 août 1599, fils de David, seigneur du Feret, lieutenant civil et juge ordinaire, eut une enfance débile et souffreteuse. Dès 12 ans sa santé se raffermit et il se mit aux études avec énergie, fit sa philos, à Paris, sa théol. à Saumur sous Gomar et Cappel, puis à Genève, revint en 1619, fut consacré en 1620 au synode de Charenton, nommé pasteur à Laon qu'il quitta à la suite d'une tentative d'assassinat le 13 déc. 1623, et après avoir servi quelque temps l'égl. de Falaise, Champagne, il fut appelé comme prof, à Sedan, où il arriva à la fin de 1625, après avoir visité la Hollande et l'Angleterre. Ministre du duc de Bouillon, il dut l'accompagner dans sa campagne de Hollande et fut nommé par lui pasteur de Maastricht; il quitta celte ville pour Bois-le Duc, 1636, après que le duc se fut fait catholique par amour pour Éléonore de Berghes, et il accepta la place de prof, de théol. à Groningue, enseignant la dogmatique et l'hist. ecclésiastique, recteur, prédicateur infatigable, écrivain, polémiste, il jouit bientôt d'une grande réputation et de nombreuses universités se le disputèrent, Montauban, Marbourg, Lausanne, Franeker. Il était sur le point d'accepter une vocation à Leyde, quand il f 18 mar* 1673. Sans avoir été le premier, ni comme orateur, ni comme savant, il a brillé dans presque tous les domaines, et s'il avait été plus paisible et plus modéré dans ses controverses avec les catliol. et avec les théol. protestants, il occuperait une place plus élevée dans l'histoire et dans le souvenir de ses coreligionnaires. D'une grande fécondité comme écrivain, il a publié plus de cent ouvrages, livres, brochures, dissertations, discours, d'une valeur inégale sans doute, mais ayant tous au moins le mérite de l'actualité. Le plus connu est son édition de la Bible, 2 vol. in-f°, texte de la version de Genève, avec des notes tirées de Diodati et d'autres, plus recherchée comme Elzevier que comme commentaire. Le plus important est son Collegium theologi-cum, ou Breve systema theol. souvent réimpr., à Groningue, de 1645 à 1673. — Il laissa 2 fils, Henri, qui eut pour marraine Élisabeth de Nassau, pasteur à Bois-le Duc et â Delft 1662-1696; et Daniel, né 1635, pasteur à Middelbourg et La Haye, 1662.

 

MARGUERITE 1° d'Antioche en Pisidie, repoussée comme chrétienne par son père païen. Le préfet Olibrius, sous Dioclétien, lui offrit sa main; elle le refusa el il la fit décapiter. Son culte en occident ne date que du 9m« siècle et son hist. porte le caractère de la légende. Raphaël la montre aux prises avec le dragon et victorieuse. On la fait la patronne des femmes enceintes.

2° Arrière-petite-fille du roi d'Angleterre Éthelred, née en Hongrie 1046, forcée avec son frère Edgar (Ethaling), après la bataille d'Has-tings, de chercher son salut dans la fuite, 1066, elle fut repoussée par la tempête sur les côtes d'Écosse, où le roi Malcolm III leur accorda l'hospitalité. Puis séduit par la noblesse de ses sentiments Malcolm l'épousa, et l'héritière des rois d'Angleterre devint reine d'Écosse 1070. Elle eut 2 filles et 6 fils, dont 3 succédèrent à leur père sur le trône. Elle passa sa vie à faire le bien, puissamment secondée par Anselme de Cantorbéry. Sa fille Mathilde épousa Henri roi d'Angleterre, et fut surnommée la bonne reine (f 30 avril 1118). Marguerite avait une piété simple, une foi humble et personnelle. Son mari, engagé dans une guerre contre Guillaume-le-Roux, perdit la vie, ainsi qu'un de ses fils; ce fut un coup fatal pour l'épouse dévouée qui était malade et déjà avancée en âge. • Je te rends grâce, ô Dieu, dit-elle en apprenant par son fils Edgar la triste nouvelle, de ce que tu veux encore à ma dernière heure purifier ma foi par un calice amer. • Et elle mourut 10 juin 1093. Canonisée en 1251. Sa vie a été écrite par Théodoric, moine de Durham, qui avait été son confesseur.

3° Marguerite-la-Veuve, ou la Déchaussée, sainte de l'ordre des dominicains, f 1395; n'est guère connue que dans son village natal de Saint-Séverin, marche d'Ancône. Ses deux surnoms résument son histoire et ses vertus.

4<> Marguerite de Crotone f 22 févr. i297? expia par une vie de dures pénitences neuf années d'une vie trop légère, dont elle fut tirée par la vue du cadavre à moitié rongé des vers, d'un homme qu'elle avait trop connu. — Les Actes des saints mentionnent encore plusieurs saintes de ce nom, mais peu importantes.

5<> Marguerite d'Orléans, improprement appelée de Valois, était fille de Charles d'Orléans, duc d'Angoulême, et de Louise de Savoie, par conséquent sœur de François Née à Angoulême 11 avril 1492, elle fut élevée à la cour de Louis XII, qui lui fit donner une éducation digne de lui, digne d'elle aussi et de ses admirables dispositions pour tout apprendre et tout approfondir. Outre les ouvrages de son sexe elle étudia la philos, et la théologie, la poésie, les langues savantes, le grec, le latin, l'hébreu, et se distingua par ses connaissances à une époque où beaucoup de nobles se vantaient encore de ne rien savoir. Louis XII la maria 9 oct. 1509 à Charles d'Alençon, dernier duc de ce nom. Ils restèrent dans leur duché jusqu'en 1515. Dès lors ils vinrent habiter la cour, et elle entra en relations avec les poètes du temps et avec les hommes éminents qui travaillaient à une réforme de l'église. Par Le Fèvre d'Êtaples elle apprit à connaître Briçonnet 1521, puis Farel, Roussel, d'Arande nn\ devint son pasteur. Elle sauva du bûcher plusieurs victimes de la foi, poursuivies ou condamnées parla Sor-bonne et le Parlement; elle ne put les sauver toutes. Le désastre de Pavie, attribué en partie au duc d'Alençon qui lâcha pied avant m£me d'avoir été attaqué, la rendit veuve; son mari f à Lyon 44 avril 4525, d'une pleurésie. Le triomphe de Charles-Quint, c'était la réaction. Louise de Savoie et les chambres établirent l'Inquisition. Marguerite se rendit à Madrid pour travailler, non sans courir elle-même beaucoup de dangers, à la délivrance de son frère. Le 24 janvier 4527, à 35 ans, elle épousa Henri d'Albret, roi de Navarre, qui en avait 24. Elle en eut deux enfants: un fils, Jean, né 45 juillet 4530, qui ne vécut que 2 mois, et une fille, Jeanne, née 45 janv. 4528, qui devint la célèbre Jeanne d'Albret, mère de Henri IV. Avec son second mari, leur résidence de Nérac devint de plus en plus le centre, et au besoin l'asile des notabilités de la Réforme; on y vit les Marot, les Des Périers, les Du Moulin, Le Fèvre d'Éta-ples, Toussaint, Calvin lui-même. Elle prit G. Roussel pour son chapelain, lui donna l'abbaye de Clairac et le fit même nommer évêque d'Olorou. Elle avait fondé l'abbaye de Tusson, où elle aimait quelquefois à se retirer; à Paris, l'Hospice des Knfants-Rouges, ou des Enfants de Dieu-le-Père. Elle donna à l'académie de Bourges une illustration nouvelle, en y appelant des hommes comme Volmar, qui attiraient à eux des élèves comme Bèze et Calvin. A sa cour on faisait de la théologie, on récitait des vers, on jouait des moralités. Deux chagrins marquèrent ses dernières années; elle perdit son frère le 34 mars 4547, et dut consentir au mariage de sa fille avec Antoine de Bourbon, le 20 oct. 4548. Elle y survécut peu, et f 24 déc. 4549 en son château d'Odos en Bigorre. Ses funérailles furent célébrées en grande pompe dans l'égl. de Lescar. Tous les poètes tinrent à honneur de la chanter. Par ses talents, sa verve gracieuse et le nombre de ses écrits, elle mérite en effet une place parmi les illustrations de la littérature française. Outre son Décaméron projeté, qui, faute de temps, est réduit à n'être qu'un Heptaméron (sept nouvelles au lieu de dix), 4559, et dont on a singulièrement exagéré la note légère et licencieuse, qui était cependant bien dans les mœurs du temps, il faut noter ses poésies: Marguerites de la Marguerite des Princesses, un grand nombre de petites comédies, des allégories, des Dialogues, des Lettres, des fables, et surtout son Miroir de l'âme pécheresse, Alençon 4534, Genève 4539, que l'Université mit au nombre des livres suspects et qui lui valut de nombreuses et violentes attaques du haut des chaires, parce qu'elle voyait en Christ le seul intercesseur et sauveur. — On a discuté la question de savoir si elle était catholique ou protestante. Ce qui précède peut suffire, ce nous semble, à la résoudre. A une époque où la Réforme était dans l'air sans que les positions fussent encore tranchées, et lorsque pour plusieurs il ne s'agissait que de nuances ou de tendances, Marguerite a montré aussi clairement que possible ses idées, ses sympathies et ses sentiments. Elle n'a pas fait d'abjuration formelle, mais toute sa vie a été une abjuration. Avec son penchant au mysticisme elle a pu conserver quelques cérémonies catholiques, assez pour que Calvin lui conseillât de prendre garde; mais elle a protégé partout les réformés, elle a introduit la Réforme dans sa maison même, â sa cour et dans son royaume; si elle a conservé un service de messe, c'est en français, sans élévation ni adoration de l'hostie, sous les deux espèces, avec du pain ordinaire. Enfin son livre condamné par la Sorbonne et les attaques du clergé lui font dans l'Égl. protestante une place qui ne peut guère lui être contestée. Les accusations dont on a voulu la flétrir et qui ne se fondent sur aucun témoignage et sur aucune apparence, n'ont d'autre base que ses lettres à elle, et il est plus qu'évident que si elles avaient le sens que la haine a voulu leur donner, elle ne les aurait pas écrites. Les âmes pures se laissent seules aller à certains entraînements de parole, parce qu'elles ne soupçonnent pas le mal.

6° Marguerite de France, ou de Valois, fille d'Henri II et de Cath. de Médicis, sœur d* François II. Charles IX, Henri III et du duc d'Alençon, née 1553 à Saint-Germain, belle «le corps, dévote de religion et débauchée de mœurs, était déjà à 49 ans la maîtresse d'Henri de Guise, quand elle épousa Henri de Béarn 4572, et il fallut que son fr. Charles IX lui appuyât la main sur la tête pour la forcer de s'incliner en façon de réponse k la question sacramentelle. Elle continua sa vie dissolue et fut successivement encore la maîtresse de Bussy d'Ainboise, de La Môle et de beaucoup d'autres. Son mari finit par la faire enfermer au Château d'Usson, gardée plus ou moins bien par le marquis de Canillac; elle y passa 48 ans, 4587 à 4605. Enfin Henri, devenu roi de France, obtint le divorce. Elle vint passer ses dernières années à Paris, fonda des couvents, prit Vincent de Paul pour confesseur et f 4645. Ses Mémoires, qui vont de 4565 à 4587 sont curieux à lire.

 

MARHEINEKE, Philippe-Conrad, né ieMnai 4780 à Hildesheim, où son père était brasseur, directeur des postes et sénateur. Il étudia la théol. à Gottingue, fut nommé Dr en philos, à Erlangen 4803, et après avoir occupé différents postes de pasteur et de prof, à Gottingue, Erlangen et Heidelberg, il fut appelé à Berlin 4811 comme prof, d'hist. ecclés., de droit canon, de symbolique et de théol. morale. En 4820 il devint collègue de Schleiermacher à l'égl. de la Trinité, et en 4824 membre du Consistoire supérieur f 34 mai 4846. Il s'est fait une position dans l'hist. de la théologie, en ce que, disciple convaincu de Hegel et son successeur après sa mort, il en a appliqué les idées et les principes à la dogmatique. En 1810 il a publié le: Système du catholicisme dans son développement symbolique, qui a ouvert à la symbolique de nouvelles voies. De 1810-1813 il a fait la Symbolique chrétienne, ou la Critique historique des doctrines cathol., luthér., réf. et socinienne; on 1816 une Hist. de la Réforme en Allemagne, et dès lors un certain nombre de travaux sur la dogmatique.

 

MARIAGE. Cet acte si important de la vie sociale existait déjà en principe et en droit chez presque tous les peuples, quand Jésus vint sur la terre, et il n'eut pour ainsi dire rien à innover. Mais le fait même qu'il releva la personnalité de la femme comme l'aide et l'égale de l'homme, releva l'idée du mariage, consacra définitivement la monogamie et réduisit le divorce ii n'être qu'une mesuré extrême. L'importance du mariage pour la société, pour la vie de famille, pour l'État, lui donna aussitôt le caractère d'un acte religieux, et l'Église l'appela un sacrement 'pour exprimer d'un mot le respect dont il devait être entouré. D'un autre côté, ne l'envisageant qu'au point de vue matériel du rapport des sexes, il y a eu dans la même Kglise une tendance à le rabaisser, et il en est résulté l'interdiction du mariage pour les ecclésiastiques. Les deux extrêmes se sont rencontrés. Luther n'a pas entièrement échappé à l'influence des traditions monacales, et il considère trop le mariage comme s'il était avant tout une digue contre l'impureté. Le N. T. ne le déconseille que dans des circonstances exceptionnelles, Matt. 19, 12. 1 Cor. 7, 1. A mesure que la vie religieuse a été reconnue plus indépendante de l'État, l'idée du mariage civil s'est développée, et si pour les gens religieux il n'enlève rien à son caractère religieux, il reste avec toutes ses conséquences civiles un acte qui intéresse la société dans son ensemble, sans engager l<*s convictions de ceux qui n'en ont pas. Les Égl. peuvent réclamer de leurs membres qu'ils recherchent la bénédiction nuptiale, mais l'État ne peut connaître que le mariage civil. C'est le Code Napoléon qui l'a le premier formulé et institué, et il était naturel qu'il fit son apparition d'abord en France où, pendant près de deux siècles, les abus du mariage religieux refusé à la population protestante avaient créé des positions irrégulières sans nombre, aucun mariage n'étant reconnu sans la sanction du prêtre, et le prêtre la refusant aux religionnaires. L'Angleterre admit en 1836 le mariage civil comme facultatif, pour les dissidents; puis la Prusse de même, 30 mars 1847, après le préavis conforme du consist. de Coblence au synode provincial de 1844. L'Italie une fois constituée l'a admis sans hésitation. La législation des cantons suisses a varié sur plusieurs points à cause des concordats et de l'intervention des puissances; la Constitution fédérale a fini par trancher la que** tion dans le sens du droit moderne, qui est aussi le plus respectueux pour la religion, puisqu'il n'oblige personne à feindre des sentiments qu'il n'a pas à profaner par une adhésion hypocrite ou légère un acte qui n'est sérieux que s'il est fait avec foi. — On appelle mésalliance (nuptiœ indecorœ, disparagium), un mariage entre personnes oui n'appartiennent pas à la même classe; l'Eglise n'a pas à en connaître; l'État non plus, puisque les effets civils restent les mêmes et que les enfants sont légitimes; il peut arriver seulement que certains droits, certains titres nobiliaires appartenant à l'époux d'un rang supérieur ne passent pas aux enfants issus d'une mésalliance. C'est en particulier le cas pour les mariages dits morganatiques, ou de la main gauche, vieux reste du droit germanique et du droit romain, qui ont lieu quelquefois entre des souverains ou des personnes de haute noblesse et des femmes d'une condition inférieure. Ces femmes et leurs enfants, dont la position se règle par contrat avant le mariage, n'ont aucun droit aux titres et dignités de l'époux et du père. C'est pour marquer cette différence que l'Eglise les marie de la main gauche. L'Église a reconnu comme valides des mariages de conscience, accomplis par consentement mutuel et engagement réciproque, sans formalités ecclésiastiques ou civiles, quand des circonstances impérieuses ou des obstacles de droit rendaient impossible le mariage légal, quelquefois chez des prêtres catholiques ou chez des princes. Le mariage clandestin est peut-être un peu plus légal. Il est célébré à huis-clos par le prêtre, et inscrit dans un registre à part, ou sous des noms supposés. Il est canoniquement valable. Les mariages mixtes, c.-à-d. contractés entn^ personnes de religions différentes, sont condamnés par l'Égl. catholique, puisque l'une des parties est nécessairement étrangère au sacrement; c'est une question de logique et de conscience; mais dans la pratique elle fléchit quand il le faut, en faisant le possible pour sauver le principe et en imposant aux conjoints des sacrifices correspondant à ceux auxquels elle doit elle-même se résigner.

 

MARIANA, Juan, né 1537 à Talavera, près Tolède; savant jésuite, prof, de théol. à Rome, en Sicile, à Paris, revint en 1574 à Tolède où il se fixa dans la maison de son ordre et consacra le reste de sa vie à la composition de nombreux ouvrages, f 1623 à Madrid (ou 1624 à Tolède). Il a laissé une Hist. d'Espagne, trfc estimée, en 30 livres; des Comment, sur l'A. et le N. T., une étude sur le Roi et la royauté, où il examine si dans certains cas il est permis de tuer un tyran, et conclut par l'affirmative (c'est ce livre qui, dit-on, a inspiré Ravaillac; il fut brûlé à Paris 1610 par ordre du parlement); enfin un Traité sur les infirmités (enfermedades) de la compagnie et les moyens d'y remédier. Cet écrit, non mentionné dans Bouillet, fut publié sans le consentement de l'auteur, mais son authenticité n'est pas contestée; il critique plusieurs des statuts de l'ordre et en particulier le pouvoir trop absolu du général. Il parut à la fois en espagnol, en italien, en franç. et en allemand, Bordeaux 1625, et fit une grande sensation; il fut condamné par Urbain VIII à la demande du général.

 

MARIANIENS, ou Fr. joyeux, v. Frères 3*.

 

MARIE. Outre les femmes de ce nom citées dans la Bible, l'hist. ecclésiastique enregistre plusieurs Marie, dont quelques-unes ne sont que des nuances ou des variétés de la mère du Sauveur; ainsi: a. Notre-Dame de Lorette, q. v. 6. N.-D. de Liesse (Picardie), vierge de bois, apportée « du Nil en Turquie • par trois chevaliers français, avec une sultane qu'ils avaient convertie; pèlerinage très estimé pour les boiteux et les pieds malades; c. la Vierge éthiopienne, la Vierge noire, etc.

Parmi les personnages qui ont réellement existé, nommons:

lo Marie d'Égypte. Après avoir vécu 17 ans dans le vice, elle fut convertie par un pèlerinage qu'elle fit à Jérusalem, auquel elle s'était jointe avec de mauvaises intentions. Sur l'ordre de la sainte Vierge, elle se retira dans un désert au delà du Jourdain. Le moine Zozimas l'y retrouva 47 ans plus tard, toute brûlée par le soleil et n'ayant pour se couvrir que ses longs cheveux blancs. Elle se confessa à lui, et il lui donna, quand il revint au bout d'un an, la sainte Cène. Trois ans plus tard, quand il repassa, il ne trouva plus que son cadavre; un lion l'aida à lui rendre les derniers devoirs. On place sa mort sous Théodose-le-Jeune, entre 408 et 450. L'Égl. grecque l'honore le 2 avril.

2<> et 3<> v. Agreda (Marie d') et Alacoque.

4o Marie-la-Sanglante, reine d'Angleterre. Fille de Henri VIU et de Catherine d'Aragon, née 8 févr. 1515, elle fut- élevée loin du trône dans une sorte d'exil. Sa mère ayant été répudiée, le parlement refusa de reconnaître la légitimité de sa naissance. Mais après la mort de son fr. Édouard VI, et malgré l'opposition de Dudley, v. Grey, elle réussit à s'emparer du trône et régna de juillet 1553 au 17 nov. 1558. Ces cinq années furent pour l'Angleterre le règne de la terreur. Elle commença par faire mettre à mort sa rivale Jeanne Grey, qui n'avait que 17 ans; Guildford son mari, et le duc de Northumberland, père de celui-ci, qui avait été l'âme du parti opposant. Bigote et passionnée,

elle avait hérité de sa mère la haine de la Réforme et rôva l'extermination de tout ce qui était protestant. Latimer, Ridley, Hooper, Cran-mer, furent envoyés au supplice, et la tentative de Wyatt fut cruellement réprimée. Le 25 juillet

1554 elle épousa Philippe II, et ce mariage fut le signal de nouvelles persécutions. Les lois sur le culte furent abrogées, les édits de Henri VIII contre l'hérésie furent remises en vigueur; en

1555 l'Égl. cathol. était de nouveau dominante en Angleterre, grâce à des bûchers par centaines et à des proscriptions par milliers, sans parler de tous ceux qui s'enfuirent du royaume. Son farouche mari l'abandonna, quand il fut nommé roi d'Espagne. Elle mourut, dit-on, du chagrin que lui causa la perte de Calais, la dernière ville française qui fût encore au pouvoir des Anglais. Élisabeth sa sœur lui succéda.

5° Marie Stuart, fille de Jacques V et de Marie de Lorraine; née 1542, proclamée reine d'Ecosse à l'âge de 8 jours; épousa en 1558 le dauphin de France qui fut François II. Veuve après 18 mois, elle retourna en Ecosse, épousa en 1565 son cousin Darnley, dont elle eut Jacques VI; aima Rizzio, que son mari fit assassiner. Darnley étant mort de mort violente, en 1567, elle épousa 3 mois après Bothwell, que la voix publique désignait comme son amant et l'assassin de Darnley. Les Écossais indignés se révoltèrent; elle s'enfuit en Angleterre. Élisabeth la retint 18 ans en prison, et à la suite d'un complot finit par la faire mettre à mort, 15 févr. 1587. Malgré l'ardeur de son catholicisme, elle n'exerça aucune influence sur l'Écosse et n'appartient pas à l'hist. de l'Église. Aux yeux de ses admirateurs ses malheurs doivent faire oublier ses crimes, et Schiller l'a chantée de manière à intéresser à elle ceux qui ne s'inquiètent ni de la religion, ni même de la morale.

 

MARIN, v. Martin 2<> et 3<>.

 

MARINA d'Escobar, née 1554 à Valladolid, fille d'un juriste distingué, compte parmi les lumières du mysticisme espagnol. Après plusieurs années de retraite et de vie contemplative, elle se produisit au dehors en 1599, et réforma l'ordre de sainte Brigitte. La maladie la retint sur son lit pendant ses 30 dernières années; elle eut des extases et des visions, dans . lesquelles elle reconnut que le vrai but de la vie chrétienne devait être l'entière conformité de la volonté de l'homme avec la volonté de Dieu. Vie par L. de Ponte, son confesseur.

 

MARINUS, ou Marin. 1° Deux papes qui, depuis le 13™ siècle, furent appelés Martin H et III, q. v. 2° Martyr, centurion sous Gallien, il fut dénoncé comme chrétien. Sur son refus de sacrifier à l'empereur, il fut misa mort àCé-sarée. Le sénateur Astérius lui fit d'honorables funérailles. — 3° Dalmate du 4®« siècle; employé comme tailleur de pierres aux travaux du port de Rimini, il étonna par sa piété l'év. Gaudence, de Brescia, qui l'admit comme diacre dans l'état ecclésiastique. Il se retira sur le mont Titano, pour y vivre dans la prière, et s'y bâtit une cellule. Après sa mort il se fit des miracles sur son tombeau; de nombreux solitaires vinrent s'y établir pour se livrer à l'exercice de la piété. Ce fut l'origine de la ville de Saint-Marin.

 

MARION, Élie, né mai 1678 à Barre-des Cé-vennes, forcé de fréquenter la messe dans son enfance, fit des études de droit à Nîmes et à Toulouse, mais quand il dut se procurer un certificat de catholique pour être reçu avocat, il hésita et finit pir refuser, 1701. Il se retira dans les Cévennes, assista aux assemblées des prophètes, fut gagné par leur esprit, et finit à son tour par prophétiser. Dans une réunion extraordinaire, aux environs de Pâques 1703, il versa des larmes de sang qui tombèrent sur ses habits et sur son fusil. Il était sous les ordres du capitaine-prophète Salomon Couderc, et le remplaça plus tard avec Mazel; mais il dut traiter en octobre 1704 avec le marquis de Lalande, dans d'assez bonnes conditions, et vint à Genève avec, quelques amis, qui ne furent pas très bien reçus. Après une nouvelle tentative insurrectionnelle déjouée par la trahison, il se rendit à Lausanne, puis à Londres 16 sept. 1706, où il prophétisa pendant 2 ans sans grand succès. Ils visitèrent ensuite la Hollande, l'Allemagne, la Pologne, Stockholm, enfin Constantinople et Rome. Marion f 29 nov. 1713 à Livourne. V. Théâtre sacré des Cévennes.

 

MARIS, où Marès. 1° év. de Beth-Hardashir, en Perse; connu par la lettre qu'il adressa à Ibas d'Édesse, relativement à Nestorius et à sa doctrine, lettre qui fut déclarée orthodoxe par par le conc. de Chalcédoine 451, mais que Jus-tinien condamna comme un des Trois chapitres. Maris vécut encore quelque temps à Édesse et fut le propagateur du nestorianisme en Perse. — 2° Les nestoriens comptent parmi les 70 disciples de Jésus, un Maris qui aurait été le collaborateur de Thomas et aurait apporté l'évang. en Mésopotamie. — 3° Patr. nestorien, vers 987, le premier qui se fit reconnaître comme tel par les califes. — 4° Maris, fils de Salomon, vivait au 12me siècle; auteur d'une Hist. des patr. nestoriens. v. Assemani. — 5° Solitaire, nommé par Théodoret dans son Historia religiosa.

 

MARIUS. ou Maire, gentilhomme originaire d'Autun, destiné dès sa jeunesse à l'état ecclésiastique; il bâtit sur ses terres en Suisse une métairie et une église; ce fut le commencement de Payerne. Devenu év. d'Avenches 573-581, il dut quitter cette ville ruinée par la guerre et transporta son siège à Lausanne 585-593. f 31 déc. 593. A la fois agriculteur, industrieux de ses mains, architecte et savant, il a laissé une Chronique, découverte par le p. Chifflet, qui se rattache à celle de Prosper d'Aquitaine et qui comprend les années 455 à 581; il raconte Thist. des Bourguignons, v. Mémoires et docu -ments de la Soc. d'hist. de la Suisse romande t. XIII. et le Cartularium Lausannense.

 

MARK (de La), v. Marck.

 

MARLORAT, Augustin, né 1506 à Bar-le-Duc, orphelin à 8 ans, envoyé par un tuteur avide au couvent des augustins, où il fit de bonnes études, ordonné prêtre en 1524. Il se fit bientôt une réputation comme prédicateur. Prieur d'un couvent de son ordre à Bourges 1533, il prêcha le carême à Poitiers et à Angers. Mais on reconnut en lui un homme nourri des pères, de l'Évangile et des doctrines de la Réforme; il dut fuir, se retira à Genève en 1534 où il fut correcteur d'imprimerie, se rendit à Lausanne où il se lia avec Bèze, fut nommé pasteur de Crissier en 1549, puis à Vevey. En 1559 Genève l'envoya à Paris, et en 1560 l'égl. de Rouen l'appela comme pasteur. Le 12 mai 1561 il présidait le synode provincial à Dieppe. Il fut député au colloque de Poissy où, de concert avec François de Saint-Paul, il présenta au roi la conf. de foi des Égl. réformées; il fut un des 5 commissaires chargés de s'entendre sur une formule commune. Après le soulèvement du 15 avril 1562, provoqué par le massacre de Vassy, il fut nommé membre du Conseil de Rouen, mais après la prise de la ville il fut enfermé, le 26 oct., dans la prison du Vieux Palais, brutalement interrogé par le connétable de Montmorency, et 4 jours après, accable d'outrages et de mauvais traitements, il fut martyrisé avec deux de ses amis Grucber et Cotton. Sa veuve et ses 5 enfants se réfugièrent à Londres. Il a laissé une douzaine d'écrits, en latin et en français, dont quelques-uns ont été impr. chez les Étienne. Les principaux sont: Novi Test. Expositio catholica eccles., Genève 1561, souv. réimpr. et trad., et divers Comment. sur les Psaumes, Genèse, Ésaïe, le N. T. etc. — Son fr. Martin resta catholique et f 1571. Un autre Marlorat, Samuel, peut-être aussi son fr., fut pasteur à Lausanne en 1563, et prof, de théol. 1567.

 

MARNIX de Saint-Aldegonde, Philippe (de), une des plus nobles figures de la réforme hollandaise, à la fois orateur, écrivain, homme d'État, négociateur et militaire, l'ami intime du prince d'Orange, Guill.-le-Taciturne. Né 1538 à Bruxelles, il étudia à Genève avec son fr. aîné sous Calvin et Bèze, et rentra dans son pays en 1560. Sa vie publique ne commença guère qu'en 1565 par la rédaction du Compromis, et en 1566 par la rédaction de la requête de la noblesse à la régente pour demander la suppression de l'Inquisition. La même année, 26 oct., il préside à Anvers le premier synode wallon. Vaincu à Austrewel, comme il se proposait dè secourir Valenciennes assiégée, il passa en Allemagne et se mit au service de Frédéric III du Palatinat, ce qui ne l'empêcha pas de servir son pays en diverses manières. C'est ainsi qu'il assista aux synodes de Wesel et d'Emden, 1568 et 1571. Lors de la guerre de 1572, il rentra dans les Pays-Bas, fut fait prisonnier, puis échangé; essaya, mais en vain, d'amener une entente entre l'Espagne et les Provinces-Unies aux conférences de Breda 1575; mais réussit dans les négociations préliminaires qui aboutirent à la Pacification de Gand 1576, et à l'Union de Bruxelles 1577. Il fut chargé de plusieurs ambassades, eu Angleterre, aux diètes de Worms et de Cologne, et enfin auprès de François d'Anjou à qui les États-Généraux firent offrir la couronne en 1586. Comme bourgmestre d'Anvers en 1583, il eut à la défendre pendant le siège qui aboutit à la capitulation du 17 août 1585. Sa conduite, pendant ces temps difficiles, fut inspirée par l'illusion qu'il se faisait sur l'honneur et la loyauté de l'Espagne, et par l'espoir qu'il avait d'obtenir la liberté de conscience sans qu'il fût nécessaire de séparer violemment les provinces. Il s'était trompé. De ce moment sa carrière publique est finie. Il se retira dans une de ses terres, et plus tard à Leyde, à cause de l'univ. de cette ville, à la création de laquelle il avait puissamment contribué. Là il s'occupa de la trad. de la Bible, dont les États-Généraux l'avaient chargé, mais il ne put achever que la Genèse. Parmi ses différents ouvrages on cite sa controverse avec Baïus, ses écrits sur l'Église et sur la Cène, son Catéchisme, et surtout sa Ruche 1569, qui. très augmentée, fut réimpr. en 1601 sous le titre de Tableau de la différence des religions; il fait ressortir avec une verve satyrique les principales doctrines qui caractérisent le système romain. Il fut marié 3 fois, et laissa 1 fils et 3 filles, f 15 déc. 1598. Ses Œuvres ont été publ. par Quinet, avec une biographie.

 

MARO, ou Maron 1° Couvent de Syrie, fondé \ers 400 par un pieux solitaire de ce nom, d'après Théodoret; moine et prêtre, d'après Chrysostome. f 433. — 2° Jean Maron, né à Sirum près d'Antioche, étudia à Constantinople. et devint moine et prêtre au couvent de Maron. Nommé par le légat du pape évêque de Botrus, on raconte qu'il ramena à la foi orthodoxe tout le Liban, monothélètes et monophy-sites, qu'il fut nommé patr. d'Antioche et que le pape Honorius le confirma. Les Grecs ayant détruit l'ancien couvent de Maron. il en construisit un nouveau à Kafar-Hai, près de Botrus, et f 707. Tout cela est peu vraisemblable; Honorius vivait 60 ans auparavant, et il était mo-nothélète. Ce qui est positif c'est que Maron jouissait d'une grande influence et qu'il réunissait dans le Liban le pouvoir temporel et le pouvoir spirituel. C'est à lui que les maronites font remonter leur existence comme secte. Les écrits qu'on lui attribue sont inauthentiques, sauf peut-être un seul.

 

MARONITES, peuplade d'origine syrienne, qui occupe avec les Druses la partie nord du Liban et quelques districts de la Syrie. On en compte 500,000. Les Druses sont leurs ennemis acharnés et l'ont prouvé par les massacres de 1860. Ils forment un état militaire indépendant, sous la domination de la Turquie qui, depuis 1842, leur a concédé un chef de leur race. Comme mœurs et coutumes ils ressemblent aux Arabes. Ils portent le turban vert en signe de leur noblesse. Ils forment religieusement une église à part, dont le chef s'appelle le patriarche d'Antioche et réside au couvent de Kano-bin sur le Liban, non loin de Tripoli. Pendant les croisades ils se rattachèrent au siège romain, en ce sens qu'ils reconnurent l'autorité du papr. mais tout en gardant leurs doctrines et leurs usages. Lorsqu'en 1736 on voulut leur faire adopter le conc. de Trente, au synode réuni dans le couvent de Luweiza, Kesrouan, il fallut leur faire tant de concessions qu'on put se demander s'ils étaient encore catholiques. Ils adoptèrent la formule du filioque dans le symbole, ils acceptèrent les jeûnes prescrits, le catéchisme romain, le calendrier grégorien, mais conservèrent leur ancienne liturgie qu'ils font remonter à Éphrem le Syrien, l'usage du syriaque et de l'arabe dans le culte, la Cène sous les deux espèces pour les ecclésiastiques, le mariage du clergé inférieur, et le libre choix du patriarche; celui-ci toutefois doit être confirmé par le pape et lui faire tous les dix ans un rapport sur la situation de la communauté. Déjà en 1584 Grégoire XIII, pour relier davantage les maronites à la métropole, avait fondé à Rome le fameux Collège maronite, séminaire destiné à former des ecclésiastiques pour la Syrie. Parmi les savants qui en sont sortis on compte Gabriel Sionita et Abraham Ecchellensis, collaborateurs de la Polyglotte de Paris, 1629-1645; les Assemani et d'autres. Avant leur réunion avec Rome les témoignages sont unanimes à constater qu'ils étaient monothélètes. C'est comme tels qu'ils furent condamnés au conc. de Constantinople 680, et pour le nier Assemani et d'autres avec lui sont obligés de forcer les textes ou de les déclarer apocryphes. C'est, sans doute, du monophysitisme qu'ils ont passé au monothéisme, car ils ont conservé dans leur Trishagion (formule trinitaire) la mention: « qui a été crucifié pour nous, • et les moines du couvent de Maron passent pour avoir été martyrisés par leurs compatriotes à cause de leur adhésion au conc. de Chalcédoine.

 

MAROT, Clément, né à Cahors vers 1495. Son père, Jean, était le poète d'Anne de Bretagne et passa ensuite au service de François 1er, comme valet de chambre. Après des études as-srz négligées, Clément fut placé chez un homme de loi, mais il n'y resta pas longtemps; ses goûts étaient ailleurs. François le recommanda à sa sœur Marguerite. Il suivit la cour au Camp du Drap d'Or 1520. Il accompagna le duc d'Alen-çon en Italie, fut blessé à Pavie et fait prisonnier. Deux fois il tomba entre les mains de l'Inquisition, et il fallut sa position à la cour et l'influence de puissants amis pour le tirer de là. L'affaire des Placards, dans laquelle il n'avait pas trempé, et quelques vers satiriques au sujet des persécutions contre les protestants, l'obligèrent de s'enfuir; il se rendit dans le Béarn d'abord, puis à Ferrare et à Venise. Rappelé par François 1er il lui présenta la traduction de ses 30 premiers psaumes, et fut encouragé par lui à continuer ce travail. Ces essais lyriques, les premiers qu'on eût vus en-France, obtinrent un tel succès de vogue que tout le monde les chanta; le pape lui-même en fit faire une édition, pendant que la Sorbonne les faisait mettre à l'interdit comme pleins d'erreurs. Il dut fuir de nouveau et vint à Genève où il continua sa traduction. Calvin mit une préface à l'édition des 50 premiers psaumes, que Marot dédiait aux Dames de France, 1er août 1543. Mais l'air de Genève était un peu sévère pour cet esprit léger, nuancé de profane; on lui reprocha d'avoir joué au trictrac avec Bonivard, et quoique la chose n'ait pas eu de suites, elle le décida à s'éloigner; il se retira à Chambéry, visita le camp de Cérisoles après la bataille, chanta le comte d'Enghien héros de la journée, et à son retour tomba malade il Turin, où il f mai 1544, peut-être empoisonné. Une de ses poésies porte la date du 5 mai 1546, ce qui mettrait sa mort au moins 2 ans plus tard, Mais il est probable qu'il y a là une faute d'impression. Sans être créateur, il porta la poésie ancienne à sa perfection et surpassa ses devanciers autant par la grâce et la naïveté que par la ferme structure du vers. Ses productions sont très nombreuses; la seule qui nous intéresse sont ses Psaumes, trad. en vers, queBèze acheva. Il avait choisi pour devise: La mort n'y mord; son fils Michel, le seul de ses enfants dont le nom soit connu, fut placé comme page d'abord chez la reine de Navarre; ensuite chez Renée de France; il était poète aussi, mais sa devise était moins gaie que celle de son père; c'était • Triste et pensif. Œuvres compl.

de Marot, Lyon 1538, La Haye 1731, Paris 1824. L'Epistre de M. Malingre à Marot contient d'intéressants détails sur ce poète et son époque.

 

MAROZZIA, Marousie ou Mariuccia, fille de Théodora, belle, intrigante et vicieuse, épousa 906 Albéric, comte de Tusculum et marquis de C^amerino, f 927; puis Guido, duc de Tuacie, t 928; enfin Hugues de Provence, roi d'Italie, t 945. En même temps elle était la maîtresse de Serge III, dont elle eut un fils qu'elle fit nommer pape sous le nom de Jean XI. Son influence sur les seigneurs de la ville était telle qu'elle réussit à faire élire successivement Serge III, Anastase IU et Landon, dont on ne parle pas. Jean X ayant été élu sous l'influence de Théodora, Marozzia, à l'aide de son second mari, réussit à le faire jeter en prison, où il mourut. Les papes suivants, jusqu'à Jean XI, furent encore son ouvrage. Son mari Hugues ayant donné un soufflet à Albéric II, fils aîné de la Marozzia, celui-ci se vengea, réunit la jeunesse romaine, chassa de Rome son beau-père 933, et enferma sa mère au château Saint-Ange, où elle f vers 945. Mais si les femmes ne régnaient plus, il restait encore des traces de leurs désordres. Après la mort d'Albéric, son lils Octavien lui succéda comme prince de Rome, et sur le conseil de ses amis ce petit-fils de l'impure Marozzia se fit couronner pape sous le nom de Jean XII, gardant le nom d'Octavien comme souverain temporel, et se montra le digne héritier de la Pornocratie, q. v.

 

MARRON, Paul-Henri, né 1754 à Leyde, de* cendant de réfugiés, vint à Paris 1782 comme chapelain de l'ambassade de Hollande, et travailla avec Rabaut Saint-Étienne et grâce à la complicité cachée de Malesherbes, à reconstituer l'Égl. prot. de Paris. En 1789 il célébrait déjà le culte dans une salle de la rue Mondétour, et en 1790 dans la rue Dauphiné. Le 23 brumaire an II il déposa sur le bureau de la Commune les 4 vases d'argent de la communion, et le culte fut interrompu. Il fut 3 fois arrêté comme suspect. Le 20 mars 1795 il reprit ses fonctions, et eut d'abord pour collègues Rabaut-Pommier et Mestrezat, puis Jean Monod. La loi de germinal an X le confirma comme pasteur officiel, et le 15 août 1806 il célébra l'anniversaire de la naissance de l'empereur dans un style un peu ampoulé. Il salua tous les régimes qui suivirent, mais il sut défendre contre tous, même contre M. de Blacas, les droits et la dignité de son ministère, + 30 juill. 1832. Il faisait des vers latins et des vers français, et ne se tâchait pas trop quand on leur refusait son admiration.

 

MARSABA, v. saint Sabas.

 

MARSAY, Charles-Hector (de Saint-Georges, marquis de), né 1688 à Paris, quitta la France à cause des persécutions religieuses, entra dans i l'armée allemande comme enseigne, fit la guerre de la succession d'Espagne, et converti par les écrits de Bourignon, se retira 1711 avec deux amis, Cordier et Baratier, à Schwarzenau pour y vivre dans la solitude. En 4742 il épousa mystiquement Clara Élisabeth de Callenberg, gagnant sa vie comme horloger, voyageant et écrivant beaucoup pour répandre ses doctrines. Il travailla avec quelque succès à la diffusion de la Bible de Berlebourg et des idées de Mad. Gnyon. Sa femme f 4745, et lui-même 4746 à Ambleben, ayant abandonné ce qu'il y avait d'excessif dans ses vues séparatistes et quiétisles.

 

MARSEILLE.^L'Évangile y fut apporté, dit la légende, et la première église y fut fondée par Lazare, qui y arriva vers 63 avec Marie, Marthe et Maxime. C'est dans ses environs que Cassien groupa ses premiers couvents, et comme il leur imprima une direction intermédiaire entre la doctrine d'Augustin et celle de Pélage, on s'habitua à donner aux sémi-pélagiens le nom de Massiliens (Marseillais). C'est contre eux qu'à l'instigation de Prosper d'Aquitaine, Augustin écrivit son livre: De dono perseverantiœ. L'évêché actuel relève de l'archev. d'Aix.

 

MARSILIUS, ou Marsile lo v. Ficin.—2<>M.de Padoue, né d'une famille bourgeoise, professa à Orléans et à Paris dans toutes les facultés, quoiqu'il fût surtout juriste. En 4342 il était recteur de l'univ. de Paris. Son grand ouvrage, celui qui a fait sa réputation, Defensor pacis, 4324, le fit mettre à l'interdit et l'obligea de s'enfuir. Il se retira en 4327 chez Louis de Bavière, et f après 4342, puisqu'à cette date il publiait encore son livre sur le Droit en matière matrimoniale. Ces deux ouvrages étaient trop avancés pour leur temps. Le premier, le Défenseur de la paix, prend le parti du pouvoir impérial contre les prétentions de la curie romaine. Il y établit qu'aucun prêtre n'a d'autorité civile et temporelle à exercer; que tous les prêtres sont égaux; que la supériorité hiérarchique des uns sur les autres est d'institution humaine, non divine; enfin qu'il n'y a jamais eu une primauté de Pierre. Il ajoute que Christ étant en réalité le chef de l'Église, l'autorité ne saurait appartenir à l'év. de Rome, mais seulement à une assemblée générale de l'Église, laquelle nff peut être convoquée que par l'empereur, auquel seul il appartient aussi d'employer les moyens de contrainte ou de répression. L'État, comme institution divine, n'est pas au-dessous de l'Église, mais à côté. Ces principes, alors tout nouveaux, ne furent reconnus que par les grands conciles du siècle suivant et par les hommes de la Réforraation. Dans son Traité De jurisdic-tione Imperatoris in causis matrimonialibus, il défendit comme fondé en droit, et malgré l'opposition intéressée de Louis, le divorce prononcé par l'empereur entre le comte Jean de Bohême et Catherine Maultasch du Tvrol.

 

MARTÈNE, dom Edmond', né 22 déc. 4654 à Saint-Jean de Lône, près Dijon, savant écrivain de la congrég. de Saint-Maur, disciple et ami de d'Achéry et de Mabillon, étudia la diplomatie, visita les archives de la France et des pays voisins pour recueillir des documents relatifs à l'hist. de France, vécut surtout dans les couvents de Marmoutier et de Saint-Germain-des-Près, où il f 20 juin 4739. âgé de 85 ans. Il observa dans toute sa sévérité la règle de saint Benoît, et la crainte que l'éloge qu'il faisait de l'ascétisme mystique de Claude Martin, son maître, ne fit une impression fâcheuse, décida ses supérieurs à empêcher la publication de cette biographie, et lui valut même d'être enfermé pour quelque temps dans un couvent de Rouen, 4697. Très versé dans l'archéologie monacale, il a publié un Comment, sur la règle de saint Benoît, 5 livres sur les Anciens Rites des moines, 3 sur les Anciens Rites de l'Église, une Nouvelle collection des anciens livres et monuments, faisant suite à celle de d'Achéry. C'est après cette publication qu'il entreprit, avec Ursin Durand, un voyage à travers les biblioth. de France, d'Allemagne et des Pays-Bas, qui amena la publication de son Trésor de nouvelles anecdotes, 2 vol. Paris 4747. Un second voyage lui fournit les matériaux de son grand ouvrage: Collectio amplis*, Vet. script, et mo-nurn. 9 vol. Paris 4724-1733. Il continua aussi les Annales de Mabillon, Paris 1739.

 

MARTENSEN, Jean, év. de Seeland. Né à Flensbourg 19 août 1808, il étudia à Copenhague, où il fut nommé 1838 prof, de philos, et en 1839 de théol.; en 1840, Dr théol. honoraire de l'univ. de Kiel, en 1845 prédicateur de la cour, et en 1854 év. de Seeland en remplacement de l'év. Mynster. En 1879, pour la 25™ année de son épiscopat, une souscription publique lui a offert un don de 20,000 couronnes. Orateur distingué, profond penseur, écrivain remarquable, il a publié de nombreux volumes, en latin, dapois et allemand: en 1837 De auto-nomid conscientiœ; en 1841, un Système de Philos, morale, très estimé et souvent réimprimé; en 1840 et 1850 une Dogmatique chrétienne, traduite en plus, langues, et récemment en français par le pasteur Ducros; une autobiographie intéressante, ainsi que plusieurs brochures de circonstance. Disciple de Hegel et de Schleiermacher, il met cependant le surnaturel à la base de son système religieux. Sa tendance générale est conservatrice; il combat le libéralisme politique moderne (et jusqu'à la réforme de l'orthographe); mais il appuie les revendications modérées des classes ouvrières. Sa polémique est aussi courtoise que décidée. + 4 févr. 1884.

 

MARTIANAY, Jean, né 30 déc. 1647 à Saint-Sever-le-Cap, près d'Aire (Landes), entra en 1667 au couvent bénédictin la Daurade à Toulouse. Il s'adonna surtout aux langues orientales et à l'étude de la Bible, et fit sur ces sujets des lectures ou conférences dans plusieurs couvents. Sa Défense du texte hébreu et de la Chronologie de la Vulgate, Paris 1689, attira sur lui l'attention. Ses supérieurs l'appelèrent à Saint-Gerraain-des-Prés, et le chargèrent de faire une nouvelle édition de saint Jérôme; elle parut en 5 vol., f°. Paris 1693-1706, après que dans son Prodromus 1690, il en eut établi la nécessité. En 1706 il publia une Vie de Jérôme, et en 1709, une Trad. du N. T. Son édition de Jérôme lui valut quelques attaques, qu'il repoussa avec vivacité et avec trop d'amour-propre, + 16 juin 1717.

 

MARTIN lo pape 649-654. Sa biblioth. est si dépourvue de livres qu'il prie instamment un év. de Maestricht de lui en envoyer des parties les plus reculées de la Germanie. Il tient aussi à se procurer des livres qu'on ne trouve pas facilement à Rome. Il convoque à Rome 640 le 1er concile de Latran, condamne les monothélè-tes et encourt la colère de l'emp. Constant II, qui le fait enlever de Rome, traîner à Constantinople, et l'envoie enfin mourir en exil, 16 sept. 655, après l'avoir fait remplacer sur le siège de Rome par Eugène 1er.

2o Martin II, ou Marin, 882-884, voit commencer en Italie ces luttes terribles entre les grands, luttes dont ce malheureux pays fut si longtemps le théâtre, et dans lesquelles les papes sont tour à tour le jouet du peuple et l'instrument du parti dominant; plusieurs périssent de mort violente, ou terminent leurs jours en prison.

3° Martin III, ou Marin II, 942-946, romain, n'a rien fait de remarquable, f 4 août 946.

4o Martin IV; Simon de Rrione, 1281-1285, pape français, prit parti pour Charles d'Anjou, roi de Sicile, qui l'avait fait élire, contre Pierre d'Aragon, et condamna sévèrement les Vêpres Siciliennes 1282. Il ranima la guerre entre les guelfes et les gibelins et provoqua l'anarchie, f 28 mars 1285.

5° Martin V, Othon Colonne, élu 1417 à Constance en remplacement des trois papes déposés; homme doux en apparence et du juste milieu. Son élection met fin au grand schisme d'Occident. On s'en réjouit beaucoup le premier jour, mais on s'en repent déjà le second, et l'on regrette de n'avoir pas suivi le conseil de Sigismond, qui aurait voulu qu'on procédât à la Réforme de l'Égl. avant l'élection du pontife. Il présida le conc. de Constance jusqu'à sa fin, 22 avril 1418, anathématisa les partisans de Jean Huss, convoqua un concile à Pavie 14Î3. puis à Sienne 1424, et f 1431 au moment où allait s'ouvrir le concile de Bâle.

6° Martin de Tours, né vers 316 à Sabaria (Sarwar, Stein-am-Anger), Pannonie, de parents païens; il se convertit de bonne heure à l'Évangile; à dix ans il était catéchumène. A 15 ans. son père qui était tribun le contraignit d'entrer dans l'armée. Comme ses pratiques religieuses faisaient douter de son courage, il demanda, un jour de marche contre des hordes germaines, d'être placé à l'avant-garde. Un rude hiver, comme il passait par la porte d'Amiens à la téte d'un escadron, il partagea sonmanteau avec un pauvre mendiant qui mourait de froid; la nuit suivante il vit en songe le Sauveur vêtu de cette moitié de manteau. Après la campagne, ayant obtenu son congé, il se rendit chez Hilaire, év. de Poitiers, qui lui confia la charge d'exorciste, Martin ne se jugeant pas encore digne d'être diacre. Il alla visiter ses parenls en Pannonie. réussit à convertir sa mère, combattit les ariens, courut beaucoup de dangers et finit par être chassé du pays. Il rejoignit Hilaire qui, banni de Poitiers, était dans la haute Italie, et déploya à Milan un grand zèle contre les ariens. De retour à Poitiers, vers 360, il fonda à quelques lieues de la ville, un couvent pour former des jeunes gens au ministère, le Monast. de Loco-ciagense ou Lieugé. Sa réputation de sainteté et de pouvoirs miraculeux se répandit au loin, et en 371 le peuple de Tours l'appela comme évA-que. Il accepta, mais fuyant les grandeurs mondaines il se choisit dans un désert, sur un rocher, non loin de la Loire, une solitude où il se construisit une cellule, autour de laquelle d'autres ne tardèrent pas à s'élever; ce fut l'origine du fameux couvent de Marmoutiers (Jfartini Mo-nasterium). Bientôt 80jeunes gens s'y réunirent pour se préparer à l'œuvre du pastorat ou de 1 évangélisation. Il travailla à la conversion des païens qui étaient encore nombreux dans cette partie de la France, et fit abattre les temples des idoles. D s'opposa, au conc. de Trêves 384, à ce que les priscilliens fussent condamnés et punis par l'empereur, et rompit toute relation avec les évêques qui avaient voté dans ce sens. La pieuse reconnaissance de ses contemporains lui a prêté beaucoup de miracles; Grégoire de Tours en mentionne 206, même une résurrection, qui presque tous appartiendraient plutôt à la première partie de sa vie. f vers 397. Sa fête se célèbre le 11 nov. en France, en Belgique et dans le nord de l'Allemagne, où elle coïncide avec les anciens sacrifices de la mi-automne. Vie par Sulpice Sévère.

7o Martin, de Pannonie; après un pèlerinage en Palestine, il se rendit en Galice, Espagne, et contribua à rattachera l'Égl. de Rome les Suè-ves qui avaient de* tendances ariennes. Il fonda plusieurs couvents, et il était abbé à Dumia, quand il fut appelé à l'archevéché de Braga vers 560. Il assista 563 au 2®« conc. de Braga contre les ariens et les priscilliens, et présida celui de 572. f vers 582. Outre quelques écrits moraux, on lui doit une collection (probablement retravaillée) des Canons orientaux et des Actes des conciles grecs. Une traduction des Sentences des pères égyptiens, qu'on lui attribue, a plutôt été faite par le diacre Lachase, de Dumia, mais sous sa direction.

8° David Martin, traducteur de la Bible, né à Revel 7 sept. 1639, étudia à Montauban et à Nîmes. D«- en philos. 21 juillet 1659, il fit sa théol. à Puy-Laurens, fut consacré à Mazamet 1663, fut nommé pasteur d'Espérausse, épousa à Castres 1666 Florence de Malecare, dont il eut 5 enfants; fut appelé à Lacaune en 1671 et refusa tous les autres postes qui lui furent offerts. Savant, aimable, influent, chéri des siens, respecté des catholiques, il était haï du clergé qui lui suscita plus d'une méchante affaire, mais son innocence fut reconnue. Il fallut la révocation de l'Édit de Nantes pour le forcer à partir. Sur le point d'être arrêté, des amis catholiques l'avertirent et pourvurent à sa sûreté. Il arriva à La Haye en nov. 1685, et fut bientôt nommé pasteur de l'Égl. wallonne d'Utrecht, qu'il servit fidèlement jusqu'à sa f 9 sept. 1721. Il prit mal en chaire, et 2 jours après il n'était plus. Il avait refusé sa nomination comme prof, à De-venter, et une place de pasteur à La Haye. Son travail le plus connu est sa revision de la Bible d'après la version de Genève, avec notes et introduction, Amsterdam et Utrecht, 1707, 2 vol. f°; souvent réimpr. jusqu'à nos jours, et partiellement revue au siècle dernier par Osterwald. elle a été longtemps la meilleure. Il a publié aussi le N. T. expliqué par des Notes courtes et claires, Utrecht 1696; Hist. du V. et du N. T., Amst. 1700, 2 vol. f° avec 424 excellentes gravures, espèce de chef-d'œuvre; quelques Sermons, des ouvrages de polémique et d'exégèse, etc. Il soutient l'authenticité de 1 Jean 5, 7 et du passage de Josèphe touchant J.-C.

9o Jacques, né 1794 d'une famille originaire des Cévennes, entra à Saint-Cyr 1812, fit comme officier la campagne d'Allemagne 1813, assista aux batailles de Bautzen, Leipzig et Waterloo, où il fut blessé; revint à Genève reprendre ses études de théol. et fut consacré 1822. D abord régent, puis inspecteur des écoles, il fut nommé pasteur à Chêne 1831, et à Genève 1844-1856. f 1874. Orateur populaire, sympathique, puissant, il n'a cessé de progresser dans le sens évangélique. Membre de plusieurs sociétés savantes, littér. et religieuses. Auteur d*: Souvenirs du jubilé de 1835; Sermons, Méditations sur l'Oraison dominicale, Médit, et prières pour le culte domestique, Confér. sur la Rédemption (2séries), Conf. sur la Prière, Souvenirs d'un officier, etc.

10° Joseph, plus connu sous le nom de Mar-tin-Paschoud, né 14 oct. 1802 à Nîmes, étudia à Genève; pasteur à Luneray, puis à Lyon 1828-1837, enfin à Paris, où il f 24 mai 1873. Nature impétueuse, ardente, chaleureuse, il se jetait avec fougue dans toutes les causes qui faisaient appel au cœur, et ne reculait devant aucune hardiesse; il ne s'inquiétait plus des conclusions, quand il avait cru devoir accepter les prémices. En théologie il poussa cette logique à l'extrême et arriva ainsi jusqu'au théisme. Rédacteur depuis 1839 du Disciple de /.-C., feuille mensuelle d'édification plutôt que de controverse, il a fondé en 1853 l'Alliance chrét. universelle (par opposition à l'Alliance évangélique), et à concouru en 1867 à fonder la Ligue internationale et permanente de la paix. Ses derniers jours furent attristés par la guerre de 1870, et pir l'acuité de son conflit avec le Consistoire de Paris, conflit qui éclata en 1864 et fut envenimé de part et d'autre par des questions ou des répugnances personnelles. Très bien doué, il avait dans la vie privée un caractère aimable et bienveillant.

 

MARTINIUS, Matthias, théol. réformé et pédagogue, né 1572 à Freienhagen, étudia à Her-born sous Piscator, et fut tour à tour pasteur, prédicateur de la cour, prof, et recteur en diverses villes. En 1610 il fut appelé à Brème comme prof, de théol. et recteur du Gymnase illustre. Il fut un des trois délégués de cette Église au synode de Dordrecht, et regretta plus tard d'y avoir participé.

 

MARTYN, Henri, missionnaire aux Indes et en Perse, né 18 fév. 1781 à Truro, Cornouailles, fit de brillantes études à l'univ. de Cambridge. Amené à la foi en suite de la mort de son père, il se décida à se vouer an ministère évangélique, fut attaché à la Compagnie des Indes en qualité de chapelain et partit comme missionnaire en 1805. Fixé à Dinapore, il travailla avec un infatigable dévouement au milieu des indigènes et des Européens et traduisit le N. T. en hindoustani. Le mauvais état de sa santé et le désir d'améliorer sa traduction persane du N. T. le déterminèrent à se rendre en Perse où il eut de nombreux entretiens avec les savants et écrivit contre l'islamisme. Contraint par la maladie de retourner en Angleterre, il se mit en route pour Constantinople, mais f au milieu de son voyage à Tokat, en Arménie, 16 oct. 1812. Vie trad. de l'anglais par Guers, Genève, 1828.

 

MARTYR lo v. Justin. 2° Pierre, v. Ver-migli.

 

MARTYROLOGE, liste officielle et histoire, à l'usage de l'Église, des hommes qui sont morts, ou qui ont souffert pour la foi. C'est le développement des anciens calendriers des martyrs, qui se bornaient à mettre le nom en regard de la date. Les Grecs avaient pour le même but leurs ménologes, q. v. Le plus célèbre est celui qui fut fait par l'emp. Basile de Macédoine au 9™ siècle. En occident on connaît surtout les martyrologes de Jérôme et de Bède, quoique ceux qu'on leur attribue ne soient pas tous authentiques; et ceux de Florus. sous-diacre à Lyon vers 800, Rhaban Maur 845, et Notker (Balbu-lus) f 912. Grégoire XIII fit faire par Baronius un Martyrologe universel, comprenant les saints de tous les pays, Rome 1536; réimpr. et augmenté par le jésuite Rosweyd, Anvers 1613. Il va de soi que les martyrs de la Réforme n'y figurent pas; Crespin a comblé en partie cette lacune, au moins pour les Vallées vaudoises et les provinces du sud de la France.

 

MARTYRS. Ce mot grec qui signifie témoins suppose, dans l'usage ordinaire, le témoignage rendu jusqu'à braver la mort, Act. 22, 20. 1 Pier. 5, 1. Partout où se trouvent des convictions on peut trouver des hommes prêts à tout souffrir plutôt que de les renier. Toutes les religions spiritualistes, le paganisme lui-même, ont eu leurs martyrs, et l'on comprend le respect dont ils sont entourés. Il y a toujours persécution quand des idées nouvelles semblent menacer le crédit ou l'avenir des vieilles idoles, et Ton doit regarder comme complices ou responsables de ces persécutions, soit la hiérarchie religieuse, soit les pouvoirs politiques, s'ils reposent sur une base religieuse. Ce qu'il y a de caractéristique dans l'hist. des martyrs du christianisme, c'est le long espace de temps pendant lequel les persécutions n'ont cessé de se produire régulièrement, 64 à 314; preuve irrécusable de l'antagonisme profond, quoique souvent inconscient, qui existait entre les principes du christianisme et ceux de la société païenne. La vénération, peu à peu exagérée, dont l'Église honora les martyrs, s'explique non seulement par l'admiration qu'on éprouve touj. pour la force d'âme et l'énergie du caractère, pour cette imitation de Jésus-Christ poussée jusqu'au sacrifice de sa propre vie, mais encore par le relief que les persécutions donnaient, en l'accentuant, à l'antagonisme fondamental qui existe entre le monde et le christianisme, entre la chair et l'esprit. La vie terrestre était alors considérée comme si peu de chose, qu'on était tenté de regarder comme une délivrance la glorieuse mort qui affranchissait l'homme du mal et qui l'introduisait dans la félicité éternelle. De là cette soif du martyre dont les païens se moquaient. De là aussi la sévérité de l'Église contre ceux qui employaient pour s'y soustraire les moyens, même les plus légitimes, tels que la fuite; v. Lapsi. Dodwell (De paucitate mart.) a cherche à établir qu'on a beaucoup exagéré le nombre de ceux qui furent mis à mort; mais même en admettant, ce qui n'est point établi, que, sous l'influence de l'angoisse et de la terreur, les contemporains aient involontairemént grossi le chiffre des victimes, il n'en est pas moins vrai qu'il a été considérable, surtout si l'on y ajoute ceux qui furent punis par la torture, la prison, l'exil ou la privation de leurs biens. Il était impossible de ne pas honorer leur mémoire, et bientôt on leur rendit un culte; on fit de leurs tombeaux des lieux de pèlerinage, on y alla prier, on invoqua les martyrs eux-mêmes et l'on implora leur intercession. Déjà la lettre do l'égl. de Smyrne au sujet de la mort de Poly carpe recommande la célébration de la fête des martyrs, de leur jour de naissance (naissance à la vie du ciel). La piété des fidèles leur éleva des églises, on chercha à se procurer tout ou partie de leurs corps, comme si quelque chose de leur âme restait attachée à ces débris, et h> culte des reliques prit cet étrange développement qu'on lui connaît et qui aboutit à la théorie de la valeur surérogatoire des mérites des saints et à leur transfert à d'autres par le moyen des indulgences. Ainsi ce qui n'avait été d'abord qu'un pieux souvenir, un exemple rappelé, dégénéra rapidement en fausses doctrines et eu superstitions; on avait commencé par raconter leur vie, leur histoire et leur mort, on finit par Içs légendes et les faux miracles.

Plusieurs groupes de martyrs sont devenus célèbres, sans que pour cela leur authenticité soit mieux établie, ainsi:

1<> Les onze mille vierges de Cologne, massacrées ou noyées par les Huns, en 384, ou 453; fable généralement abandonnée, et dont l'origine s'explique soit par l'inscription UNDECIM M. VIRGINÉS. les onze martyres vierges, qu'on avait traduite par les onze mille vierges (Rett-berg, Gieseler, Friderich); soit, moins vraisemblablement par l'inscription: S. Ursula et Un-decimiUa F. if., Ursule et Undécimille, vierges martyres (Valesius, Leibnitz). Cette Undécimille, dont le nom signifie la fille, ne se rait d'ailleurs connue que par cette mention.

Les quarante martyrs; 40 soldats qui furent mis à mort en 320 à Sébaste, en Arménie, sous l'emp. Licinius. Comme ils refusaient de sacrifier aux dieux, on les exposa tout nus sur la glace au milieu de la nuit. L'un d'eux faiblit et renia sa foi. On le plongea dans un bain chaud pour le ranimer, mais il y mourut. Frappé de cet événement un de ses gardiens se convertit et alla prendre sa place sur la glace. Leurs cadavres furent brûlés et les cendres jetées à l'eau On célèbre leur fête le 9 mars.

Les dix mille martyrs. D'après la légende on compterait sous ce nom deux massacres distincts: l'un arrivé en 303 en Nicomédie sous Dioclétien, à la suite de l'incendie du palais impérial, que Ton attribua aux chrétiens; Eusèbe dit cependant que la cause en est inconnue. L'autre, sous Adrien et sous Antoninl serrés de près dans une émeute des Gadaréniens et des Euphratésiens(l), ils furent délivrés par un ange et se convertirent. A la demande du reste de l'armée, ils furent soumis à diverses tortures et finalement crucifiés comme le Christ. Les bollandistes eux-mêmes rejettent cette légende comme inconciliable avec l'histoire.

4° v. Massa.

 

MARUTHAS, év. de Tagritt, ou Maipherkat, en Mésopotamie, un des écrivains les plus distingués de l'Égl. syrienne. En 403 il vint à (Constantinople prier Arcadius d'intervenir en faveur des chrétiens auprès de Jezdegerd, roi de Perse. Envoyé une seconde fois par Théodose II auprès de ce monarque, il réussit en dépit des mages à exercer sur lui une bonne influence et à le mieux disposer pour le christianisme. Il était lié avec Chrysostome, et assista à plusieurs conciles, entre autres à celui d'Antioche contre les messaliens, 383, ou 390. On a de lui une Hist. des martyrs de la Perse, une Explic. des Évangiles, et un ouvrage liturgique, conservé dans le missel des maronites.

Assemani.

 

MASIUS, ou Dumas, André, né 1516 à Len-nich, près Bruxelles, un des plus grands savants et philologues de son siècle, philosophe et jurisconsulte. Secrétaire de l'év. de Constance, Jean de Weege, il demeura quelque* temps à Rome, et fut ensuite nommé conseiller de Guillaume, duc de Clèves. f 1573. Il a concouru à la publication de la Polyglotte d'Anvers (éd. Plantin 1559-1572); il a fait aussi un Comment, sur Josué, une grammaire et un dictionn. syriaque.

 

MASORAH, ou Massore, et Masorètes. Le mot caldéen mesar signifie transmettre; la ma-sorah est donc la transmission, la tradition. Après l'achèvement de la Guemara de Jérusalem, de savants compilateurs de l'école de Tibériade s'occupèrent, non plus de commenter, mais de fixer le texte sacré, de le mettre en sûreté, • d'élever une haie autour de la loi. » Ils comparèrent les meilleurs mss., laissèrent intact l'ancien texte (ketib, ce qui est écrit), ajoutèrent en marge leurs notes et observations (keri, ce qui doit être lu), et pour garantir le texte contre toute falsification volontaire ou involontaire, comptèrent tous les mots et toutes les lettres de chaque livre et du code entier, conservant même les lettres trop grandes, trop petites, renversées ou hors de ligne, que l'on rencontre dans le texte hébreu. A force de scrupule, ils firent des notations qui semblent avoir quelque chose de puérile, grossissant une lettre Lév. H, 42. pour marquer que c'est la lettre du milieu du Pentateuque, élevant une lettre de Ps. 80, 14. parce que c'est la lettre du milieu des Psaumes. Quant aux changements qu'ils firent au ketib en lui donnant dans le keri d'autres voyelles, les uns sont purement grammaticaux, d'autres sont des euphémismes, comme Es. 36, 12., d'autres enfin n'ont pour objet que d'affirmer la tradition. On distingue la grande Masore, plus volumineuse que le texte; la petite, dont le résumé se trouve au bas de la plupart des Bibles hébr. imprimées, et la finale, due au rabbin Jacob Ben Hhayim, Venise 1526, qui résume à la fin du volume les comment, et les principales variantes signalées. Quoique dans un domaine tout matériel et littéral, les masorètes ont rendu un vrai service aux sciences bibliques et ont complété avantageusement l'œuvre des talmudistes. Commencé au 6me ou au 7me siècle, ce travail était achevé probablement au 10me, car déjà au 11 me il sert de base aux textes de rabbi Ben Asher pour l'occident, et de rabbi Ben Naphthali pour les copies babyloniennes. V. Buxtorf, Tiberias, Bâle 1620, réimpr. 1665 par son petit-fils, et Èlie-le-Lé-vite, Masoreth Hammasoreth, trad. par Semler, Halle 1772.

 

MASSA candida, ou sancta, la masse sainte, ou encore les martyrs de Cyprien: on désigne ainsi un ensemble de martyrs qui furent mis à mort à Carthage du temps de Cyprien, lors des persécutions valériennes. D'après Prudence ils auraient été obligés, au nombre de 300, de se précipiter dans un four à chaux ardent. Augustin n'en mentionne que 153 qui auraient eu la tête tranchée, et il fait dériver leur nom de leur sainte et glorieuse mort. On les fête le 24 août (la Saint-Barthélemy).

 

MASSILIENS, v. Marseille.

 

MASSILLON, Jean-Baptiste, né à Hyères, Provence, 24 juin 1663. d'une famille pauvre (son père était notaire), entra à 18 ans dans la congrég. de l'Oratoire, où il avait été élevé, et professa les belles-lettres et la théol. à Pézenas, Montbrison et Vienne. Quelques discours qu'il prononça attirèrent sur lui l'attention de ses supérieurs. Il fut envoyé à Paris comme un des directeurs du séminaire de Saint-Magloire. Le succès obtenu par quelques conférences sur les devoirs des ecclésiastiques assurèrent sa réputation et le décidèrent à se présenter comme prédicateur du Jeûne et de l'A vent. Le roi le charga en 1698 d'une mission à Montpellier et en 1699 il prêcha le carême devant la cour, à l'Oratoire et à Versailles. Son premier texte fut: Heureux ceux qui pleurent I II fut tellement apprécié que de 1701-1704 il fut rappelé pour ces mêmes services du carême. Cependant Louis XIV ne lui donna point d'avancement. Le régent, plus juste, le nomma év. de Clermont 1717; en 1719 il devint membre de l'Acad. française. Après avoir prononcé l'oraison funèbre de la duchesse Élisabeth d'Orléans, sa meilleure, il se renferma dans son diocèse et n'en sortit plus, f 28 sept. 1742. On a de lui une centaine de sermons, dont dix réunis sous le titre de Petit Carême et prêchés devant Louis XV âgé de 8 ans, sont considérés comme des chefs-d'œuvre. Ce ne sont pas des discours sur la Passion, mais une série de méditations sur les devoirs des grands; parfaitement écrits, mais un peu monotones. Ses sermons sur l'Aumôme et sur le Petit nombre des élus, ont plus de vigueur et d'originalité. Ses Oraisons funèbres l'égalent presque à Bossuet; les plus remarquables sont celles de Louis XIV, et de la duchesse BL d'Orléans. Il a aussi écrit des Mystères el des Panégyriques des saints, des Mandements, des Discours synodaux, des Conférences ecclésiastiques, des Paraphrases de Psaumes, etc. Son style est doux, facile, harmonieux, plein d'onction, mais la pensée manque en général d'énergie, quoiqu'elle atteigne parfois une grande élévation. Il avait le talent qui convient à la cour, et il savait dire au roi des vérités que celui-ci pouvait entendre sans en être ni blessé, ni touché. Le régent et Louis XV l'appréciant et le protégeant sont à la fois l'éloge et la critique de son éloquence sacrée. Il a prêché la morale plus que le dogme, et sans le vouloir il a fait la régence et le 18™ siècle. Il a signé l'attestation de bonne vie et mœurs dont l'abbé Dubois avait besoin pour être nommé cardinal, et il assista au sacre de ce grand débauché, qui l'avait fait nommer év. de Clermont. La morale et la religion payèrent ainsi la dette de sa reconnaissance. Il était à la foix doux, modeste et charitable.

 

MASSORAH, Massorètes, v. Masorah.

 

MASSUET, René, maurin, né 1665 à Saint-Ouen, Normandie; prof, de théol. et de philos, dans plusieurs maisons de l'ordre, licencié en droit, s'établit en 1703 à Saint-Germain-des-Prés, où après la mort de Ruinart, il publia le gnne vol. des Annales des bénédictins, et se consacra ensuite â la publication des Œuvres com-pl. d'ïrénée, qui parurent en 1710, avec 3 dissertations sur la vie d'Irénée, son enseignement, et les hérétiques qu'il eut à combattre.

 

MATÉRIALISME. On comprend sous ce nom général un certain nombre de systèmes, assez différents les uns des autres (le sensualisme, le naturalisme, le positivisme, etc.), mais qui sont d'accord sur le point de départ, c'est que tout ce qui existe provient de la matière, et sur les conclusions, c'est qu'il n'y a ni Dieu, ni âme, ni morale. Les diverses manifestations delà vie et de l'esprit sont de simples modifications physiques ou chimiques de la matière, des combinaisons, des vibrations, des empreintes ou des sécrétions. L'homme n'est pas un être libre; il est esclave; il n'est donc pas responsable; soumis à la loi des sens, il ne peut connaître d'antre loi, et la notion du devoir lui est étrangère, comme celles de vertu, de vice, de dévouement, de reconnaissance, etc. L'égoïsme est la senle règle de sa nature. Dans la pratique le matérialiste vaut presque toujours mieux que ses doctrines. Le représentant officiel le plusanciende cette tendance est Épicure, qui succédait à Dé-mocrite et aux Cyrrhénaïques. La recherche du bonheur, de la tranquillité, de la volupté, du repos, doit être le but suprême de chacun. Ce qu'il y a de démoralisant dans cette maxime était adouci ou neutralisé par cette autre considération qu'on ne trouve de jouissances solides, vraies et durables, que dans la recherche de la sagesse et de la vertu, les plaisirs matériels ou coupables ne procurant qu'une satisfaction trompeuse ou momentanée. C'est cette doctrine qu'ont relevée au siècle dernier les matérialiste* français: non pas seulement Condillac, qui était plutôt sensualiste, mais La Mettrie dan* son Homme-machine, d'Holbach dans son système de la nature, et la plupart des encyclopédistes. C'est aussi, plus ou moins, le système qu'avait préconisé Locke, tout en maintenant la foi en Dieu, comme manifestée à l'homme par une révélation qui n'avait rien de contraire â la raison. C'est enfin le système dont parait s'enorgueillir aujourd'hui une partie de l'Allemagne philosophique: elle estime que le matérialisme est la conséquence logique et naturelle des découvertes scientifiques modernes. L'homme est le produit brut ou artificiel de ses père et mère, de sa nourrice, de l'air et du climat, de sa nourriture et de ses vêtements; il dépend des traditions de sa famille, de réduction qu'il a reçue, de ce qu'il mange et de ce qu'il boit. Ce désolant naturalisme, qui abaisse l'homme après l'avoir élevé si haut et qui lui fait payer si cher ses grandes découvertes, a Tair d'une ironie ou d'un cri de désespoir. Sous des j formes plus fines et plus élégantes, des écri- j vains français sont retombés depuis un demi- I siècle dans ce même matérialisme auquel la France paraissait avoir renoncé depuis quelle en avait éprouvé les fatales conséquences. V. Janet, le Mat. contemporain, Caro, le Matér.el la Science; Ch. Secrétan, Discours laïques,etc.

 

MATERNUS lo le premier év. connu deCo-logne; il vivait sous Constantin et assista 31 i au conc. d'Arles, dont il signa les décrets. Ine légende le place au 1*** siècle et le fait disciple de Pierre, qui l'aurait envoyé avec Enchère et Valerius sur les bords du Rhin; mort à Elegia,

en Alsace, il aurait été ressuscité au bout de 40 jours par le bâton de Pierre mis sur son tombeau, et serait allé fonder les égl. de Tongres et de Cologne. Canonisé.

2<> Juiius Firmicus M., auteur d'un traité apologétique: De errore profanarum religionum, adressé aux emp. Constance et Constant, vers 343-330. Il montre l'origine du paganisme dans une fausse intelligence de l'histoire biblique et dans l'apothéose d'hommes corrompus et mortels; il recommande comme un devoir chrétien l'emploi des moyens violents contre les païens. — Un ouvrage d'astronomie qui porte le même nom d'auteur, doit avoir été écrit par un autre Maternus, qui était païen et dont le style est différent.

 

MATHESIUS, Jean, né 24 juin 1504 à Roch-liLz en Saxe, étudia la théol. à Ingolstadt, puis vint 1528 à Wittenberg, attiré par les écrits de Luther, dont il fut pendant plusieurs années le commensal et l'ami. Recteur en 1542, pasteur de Joachimsthal, en 1545, il f en chaire, frappé d'apoplexie, 8 oct. 1565. Homme pieux, nature élevée, il est l'auteur du cantique: Aus meines Herzens Grunde, qui était l'un des favoris de Gustave-Adolphe, et de quelques autres. Devenu majoriste plus tard, il eut des doutes sur la doctrine de la justification par la foi et finit même par douter de l'efficace suffisante de la mort de Christ. Plusieurs de ses sermons ont été mis en vers par son chantre et ami Nie. Hermann.

 

MATHEW, ou Mathieu (le père Théobald), dominicain, né 10 oct. 1790 à Thomastown en Irlande, surnommé l'apôtre de la tempérance. Orphelin de bonne heure, il étudia à Kilkenny, puis 1810 au séminaire deMaynooth, et fut appelé. 1814 à desservir un poste dans le sud de l'Irlande. Ayant constaté que l'ivrognerie était la principale cause de la misère dans son pays, il se décida à la combattre énergiquement, commença à Cork en 1838 des prédications sur la tempérance, et parcourut successivement l'Irlande, l'Angleterre et l'Amérique, remuant les masses et recevant par milliers les adhésions de convertis qui prenaient entre ses mains l'engagement de ne plus boire de liqueurs fermentées. Il revint d'Amérique malade 1851, et f 1856 à Queenstown. Si son activité n'a pas obtenu tous les résultats espérés, et si l'enthousiasme du moment n'a pas tenu tout ce qu'il promettait, il n'en a pas moins exercé une grande et bonne influence.

 

MATHILDE lo la sainte; fille du comte Théo-doric, elle épousa fort jeune en 909 Henri l'Oiseleur, et devint ainsi reine de Germanie; elle en eut deux fils, Othon et Henri. Elle fonda plusieurs couvents, et s'attacha particulièrement à celui de Quedlinbourg. Ses abondantes et ruineuses aumônes la firent en partie interdire pàr son fils Othon-le-Grand et elle se retira dans ses terres jusqu'au moment où la femme d'Othon eut décidé son mari à une démarche de réconciliation. Elle eut aussi beaucoup à souffrir des longues divisions qui éclatèrent entre Henri, son fils préféré, et Othon, mais elle réussit à les rapprocher. Depuis la mort d'Henri 955 elle ne posa plus le deuil. Elle perdit encore un autre lils, Bruno-le-Grand, archev. de Cologne, et son petit-fils Guillaume, arch. de Mayence. Elle f à Quedlinbourg 14 mars 968, laissant une grande réputation de piété et de charité.

2o Autre sainte, fille de Malcolm, roi d'Écosse, mariée en 1100 à Henri 1er, roi d'Angleterre, fut sur le trône l'exemple de toutes les vertus, t 30 avril 1118.

3° La grande ami de eGrégoire VII. Fille de Boniface II marquis de Tuscie, et de Béatrix, elle naquit en 1046 et monta sur le trône en 1076. Mariée d'abord avec Godefroy-le-Bossu 1063, puis avec Guelfe V de Bavière 1089, elle se sépara de ses deux époux, parce qu'ils n'étaient pas assez dévoués au saint-siège: quelques-uns prétendent même que ces mariages furent purement fictifs, et qu'elle ne les contracta que pour pouvoir disposer librement de ses biens en faveur du pape. Cette donation faite en 1076, elle la renouvela en 1102. Avec toutes les qualités de la femme et de la princesse, elle avait hérité de sa mère le dévouement politique à la cause des papes, et elle fut le plus ferme appui de Grégoire VII; c'est dans son château de Canossa que Henri IV subit l'humiliation que lui imposa le pontife. Elle fit longtemps la guerre aux empereurs, mais la guerre éclata surtout après sa mort à propos de son héritage, qui faisait le pape maître de toute l'Italie. Finalement les deux puissances en vinrent à se partager les dépouilles en litige.

 

MATINES, latin matutinœ, la première des prières indiquées pour chaque jour dans le bréviaire. Elle commence par le Pater, Y Ave et le Credo. Puis viennent le Ps. 94, quelques hymnes, quelques lectures et le cantique d'Ambroise qui termine la nuit. Le mot allemand de Mette, qui désigne les matines en général, mais plus spécialement celles de nos grands jours de fêtes dans l'Égl. catholique, et qui peut dériver de matutina, a été dérivé aussi de Cantus metten-sis, le chant de Metz, en souvenir de la célèbre école de chant fondée dans cette ville par Charlemagne. Les matines se disent d'ordinaire par le prêtre seul, sauf aux grandes fêtes, et dans les couvents où elles se chantent solennellement avant le jour.

 

MATTER, Jacques, né 1791 à Alt-Eckendorf, prof, d'hist. à Strasbourg, directeur du gymnase, inspecteur d'acad. depuis 1828, puis inspecteur général des études en France, id. des bibliothèques; enfin 1846 prof, de la philosophie de la religion, f 1864. Auteur de nombreux ouvrages, dont deux couronnés: Hist. de l'école d'Alexandrie, Hist. génér. du christianisme, Hist. critique du gnosticisme, le Visiteur des écoles, Influence des mœurs sur les lois, Hist. des doctrines morales et politiques des 3 derniers siècles, Saint-Martin, Swedenborg, le Mysticisme au temps de Fénelon, etc. Il a dirigé de 1835 à 1849 une revision des versions françaises de la Bible.

 

MATTHiEI, Chrét.-Fréd., né 1744 à Grôst, Thuringe, prof, à Wittenberg et à Moscou, où il f 1811. Adversaire décidé de Griesbach en matière de critique, il n'admet pas des familles de mss., et met les mss. de Moscou, c.-à-d. la recension constantinopolitaine, beaucoup au-dessus des autres. Il en avait collationné 103, et il a eu le tort de compromettre un système déjà faible et factice, par une polémique hautaine et passionnée.

 

MATTHIESEN, ou Matthiszeen, boulanger de Harlem, gagné aux idées anabaptistes, devint le chef des melchiorites. Se donnant pour Énoch et revendiquant les fonctions de prophète, il suivit Bockhold à Munster, où il se mit à la téte des plus violents, chassa ceux qui ne pensaient pas comme lui, brûla les tableaux, les manuscrits et les livres, sauf la Bible, et périt 1534 dans une sortie que son fanatisme avait provoquée.

 

MATTHIEU lo v. Mathew. — 2o Matthieu Paris (on ignore d'où lui vient ce second nom;, né en Angleterre vers la fin du 12m<* siècle, bénédictin de la congrég. de Cluny à Saint-Alban, où il entra 1217. Un des hommes les plus savants de son temps, il était très estimé d'Henri IU et d'Innocent IV. Celui-ci l'envoya même en Nor wège 1248 pour réformer le couvent de Holm et d'autres. On lui doit une chronique intitulée Hist. Angliœ major, qui va de 1066 à 1259, qui avait été commencée et qui fut continuée par d'autres. Il raconte librement ce qu'il a à dire sur les désordres des papes, et jette de la lumière sur les circonstances de l'Allemagne. Il a fait lui-même un abrégé de sa chronique: Hist. Minor, et a écrit la vie des abbés de Saint-Alban.

 

MAULBRONN, ancien couvent de cisterciens dans le diocèse de Spire; fondé 1148. Lors de la Réforme il servit de retraite aux moines qui désiraient continuer la vie commune, mais en 1557 il passa lui-même à la Réforme et fut employé comme école. Il s'y trouve auj. un petit séminaire. Deux colloques y eurent lieu entre théologiens: l'un du 10 au 15 avril 1564 sur la doctrine de la Cène, qui n'aboutit pas, les palatins soutenant leur point de vue d'après les paroles de l'institution, et les wurtembergeois s'en tenant au fait de l'ubiquité; le second, janv.

1576, entre badois et wurtembergeois, qui servit de préparation à la Formule de concorde votée à Torgau.

 

MAUR lo v. Raban. — 2o Disciple de Benoit de Nursie, accompagna son maître à Subiac et au mont Cassin. La légende lui prête d'ayoir marché sur les eaux. On dit aussi qu'il fut envoyé en France pour y établir la règle de son ordre, f vers 584. — 3o autre moine de bénédictins, fondateur et premier abbé de Glanfeuil en Anjou, au 7** siècle.

Congrégation de Saint -Maur; célèbre association de bénédictins, qui s'organisèrent en France vers 1613 près de Vannes par les soins du moine Didier de Vannes, qui introduisit dans l'ordre quelques réformes. La congrég. fut autorisée et reconnue en 1621 et 1627, et jeta dès lors un vif éclat par le grand nombre de savants qu'elle produisit et par ses importantes publications. C'est Tariffe, son premier général, qui lui imprima sa direction scientifique. Les novices devaient faire 5 années d'études de théol. et de philos, avant d'être ordonnés prêtres. De là ils étaient envoyés dans une académie de l'ordre, soit pour y remplacer les professeurs sortants, soit pour y faire des travaux particuliers. La congrég. ne s'occupa d'abord que d'étudier ses origines et sa propre histoire, celle de ses couvents et de ses grands hommes; mais peu à peu elle étendit le cercle de ses recherches. Elle eut à lutter contre le fondateur de l'ordre des trappistes, Rancé, qui regardait l'étude comme incompatible avec l'ascétisme religieux, et contre les jésuites qui regardaient une culture sérieuse comme dangereuse et favorisant l'émancipation de la pensée. A l'époque de leur plus grande prospérité, les maurins comptèrent jusqu'à 180 couvents, dont les plus célèbres furent Saint-Germain-des-Prés, la maison-mère, près Paris; Saint-Denis, Saint-Be-noit-sur-Loire, Marmoutier, Vendôme, Saint-Rémi de Reims, Fécamp, etc. La révolution supprima tous ces monastères. C'est en 1833 seulement qu'une nouvelle maison fut rouverte, à Solesmes, diocèse du Mans, mais l'ambition de dom Guéranger ne lui a pas fait une brillante réputation (v. des Pilliers). Parmi les maurins distingués, on nomme Mabillon, Montfaucon, Martène, Tillemont, DuCange, Tassin, etc.

 

MAURES (de l'arabe maghreb, occidental), nom qui désignait dans l'origine les habitants de la Mauritanie, jusqu'en Numidie, et qui a fini par s'appliquer indistinctement à toutes les populations du nord de l'Afrique occidentale, toutes musulmanes, croisées surtout de sang arabe, mais mélangées aussi des différentes races qui s'étaient succédées comme maîtres du pays. Ce qui les distingue des Kabyles, c'est moins la question de race ou de religion que leur genre de vie et leurs habitudes, ces derniers, les Kabyles, étant plus nomades et plus parqués en tribus, tandis que les Maures vivent davantage dans les villes, adonnés au commerce et à diverses industries. Le point saillant de leur histoire est la conquête qu'ils firent de l'Espagne au siècle, conquête qui se divise en deux périodes distinctes: la première plus purement arabe, avec Cordoue pour centre; la seconde plutôt maure, ou mauresque, ayant Grenade pour capitale. Musa, de Mauritanie, et son général Tarik ayant mis fin 711 à la domination des Visigoths en Espagne, s'y installèrent eux-mêmes et cherchèrent à y établir leur puissance, mais les éléments étaient trop disparates pour qu'il fût possible d'y constituer une unité, et c'est en 756 seulement qu'Àbderrhaman ayant été chassé de Bagdad réussit à installer définitivement son califat à Cordoue; il y amena la culture arabe, et ses successeurs marchèrent sur ses traces. Sous Abderrhaman III en particulier les sciences et les arts fleurirent au point d'exercer une influence considérable sur toute l'Europe occidentale; ce fut l'âge d'or des musulmans, 912-961, et l'on citerait difficilement un pays chrétien qui se soit élevé à un pareil degré de développement et de prospérité. Ils se montrèrent d'abord bienveillants pour les chrétiens, leur laissant toute liberté de culte et jusqu'à leurs tribunaux; des conciles même se réunirent librement, et ni les églises, ni les monastères ne furent inquiétés; ils ne devaient que l'impôt. Les Maures ne sévissaient que lorsqu'un zèle indiscret les attaquait dans leurs croyances ou faisait des prosélytes. Mais quand les puissances chrétiennes leur déclarèrent la guerre, le fanatisme religieux se réveilla et de cruelles persécutions eurent lieu. Les mozarabes, chrétiens en petit nombre disséminés au milieu des Maures, et se rattachant à Rome plutôt qu'aux puissances envahissantes, furent épargnés, ainsi que les juifs qui avaient eu trop à se plaindre des chrétiens pour être suspects aux musulmans, et qui virent fleurir à cette époque leurs plus belles écoles. Peu à peu les princes chrétiens gagnèrent du terrain, les Asturies, laVieille-Castille, Léon, la Navarre, la Catalogne, chassant devant eux les Maures et les refoulant en Afrique, jusqu'à ce qu'enfin, sous Ferdinand et Isabelle, Grenade elle-même fut prise 1491. Ce fut la fin de la domination musulmane. Les Maures eurent la permission de rester dans le pays et on leur laissa quelque temps le libre exercice de leur culte. Mais le cardinal Ximenès souleva contre eux une véritable croisade d'extermination; un grand nombre furent baptisés par force ou par ruse. Le Coran et leurs livres religieux furent brûlés. Philippe II leur interdit tout port d'armes, ainsi que l'usage de leur langue, le costume national et même des noms arabes, 1556. Ils se soulevèrent, furent vaincus, internés au centre du pays, soumis à de nombreuses vexations. A la suite de nouveaux soulèvements Philippe III décida de les chasser tous d'Espagne 1609, et cette mesure fut exécutée avec la plus cruelle barbarie. L'Espagne perdit ainsi un million d'hommes intelligents et laborieux et, par contrecoup, tomba sans résistance entre les mains d'un catholicisme sombre et fanatique, dont l'influence devait achever l'œuvre de décomposition commencée par Philippe II et le saint-office.

 

MAURICE lo v. Légion thébéenne. — L'hist. des saints grecs mentionne un autre officier de ce nom, qui, sous Dioclétien, a été mis à mort, avec 70 de ses soldats, à Apamée en Syrie.

3° Maurice, ou Moritz, landgrave de Hesse, fils de Guillaume et petit-fils de Philippe-le-Magnanime. Né 25 mai 1572, il reçut une éducation soignée, et apprit le grec, l'hébreu, le latin, le français, l'italien, l'anglais, l'espagnol et le magyare. A l'âge de 20 ans, en 1592, il succéda à son père. La Hesse avait jusqu'alors tenu une position intermédiaire entre le luthéranisme et la doctrine réformée; il se décida franchement pour la Réforme et résolut de l'introduire dans son Église. Cette faute lui coûta cher. En 1604, sur le préavis de Bâle, de Genève, et de ses surintendants, et sans en avoir référé à un synode général, il ordonna: que les prédicateurs s'abstiendraient, en parlant du Christ, de le faire dans le sens de l'ubiquité; que le commandement du décalogue relatif aux images serait rétabli, que les images seraient enlevées des temples, et que le pain de la Cène serait rompu. Il résulta de cet acte d'autorité des troubles intérieurs; il rencontra une violente opposition chez son peuple, et surtout il fournit au landgrave Louis de Darmstadt, le prétexte de lui contester ses droits au duché, comme ayant violé la condition stipulée par le testament de son oncle Louis de Marbourg, f 1604, portant qu'il maintiendrait l'état religieux tel qu'il le trouverait au moment de sa mort. Après de longs débats, luttes et procès, il se décida à abdiquer en faveur de son fils 17 mars 1627, et f 1632 à Eschwege, triste exemple des conséquences de ce droit de reforme religieuse que le protestantisme allemand n'a que trop souvent accordé à ses princes.

4o Maurice de Saxe, né 21 mars 1521 à Frei-berg; fils d'Henri-le-Pieux et de Catherine de Mecklembourg, reçut une brillante éducation, passa quelque temps à Dresde auprès de son oncle Georges, et à Mayence chez Albert de Brandebourg, puis à Torgau chez son cousin Fréd.-le-Magnanime. Ainsi que son père, il embrassa le protestantisme en 1539, mais désapprouva les procédés employés par celui-ci pour introduire la Réforme dans ses États. Il se retira à la cour de Philippe de Hesse dont il épousa en 1541 la fille Agnès à l'insu de son père. Ce dernier étant mort la même année, il lui succéda, travailla à rétablissement de la Réforme, tout en abrogeant certaines mesures trop autoritaires ou trop précipitées prises par son père; fonda d'importantes écoles, mais refusa de se joindre à la ligue de Smalcalde, pour ne pas déplaire à Charles-Quint. Il ne tarda pas à se brouiller complètement avec l'électeur Jean-Frédéric, et à associer sa fortune à celle de l'empereur, dont il servit vaillamment les intérêts en Hongrie et en France, sous prétexte que la religion n'y était nullement intéressée. Cela lui valut le titre d'électeur, et lorsque la guerre éclata entre Charles et les princes alliés, il conclut à Ratisbonne avec Charles un traité secret, qui lui garantissait en échange de son appui ses Etats et ses droits. Après la bataille de Mtlhl-berg, Jean-Frédéric ayant abdiqué, la branche albertine, en la personne de Maurice, fut investie officiellement de l'électorat et de presque tous les biens de la branche ernestine, 1 juill. 1547, Augsbourg 24 févr. 1548. Cependant il finit par s'apercevoir que l'emp. ne cherchait qu'à se soumettre tons les princes de l'Allemagne en les usant les uns par les autres, et soit esprit d'indépendance, soit qu'il vît le protestantisme menacé par l'Intérim d'Augsbourg, soit enfin qu'il fût froissé de la déloyale captivité de son beau-père Philippe de Hesse, il quitta brusquement le parti de l'empereur, publia un manifeste devant Augsbourg pour justifier ce revirement, alléguant que Charles avait violé sur plusieurs points ses engagements et opposa l'Intérim de Leipzig, rédigé par Méianchthon, à celui d'Augsbourg. L'ernp. vaincu dans le Tyrol fut obligé de traiter, Passau 2 août 1552; il promit une amnistie générale, accorda la liberté de conscience, et mit Philippe en liberté. Maurice combattit encore les Turcs en Hongrie, puis chargé de réduire son ancien ami Alb. de Brandebourg qui refusait de se soumettre au traité de Passau, il fut grièvement blessé à Sievers-hausen, et f le surlendemain. H juill. 1553. Sa fille Anna épousa en 1561 Guillaume-le-Taci-turne. Profond politique et vaillant guerrier, Maurice était en même temps un homme tout d'impressions et passionné. Après avoir un moment compromis la cause protestante par ses tergiversations, il l'a finalement sauvée en renonçant à servir l'ambition de Charles-Quint.

 

MAURINS, v. Maur.

 

MAURY, Jean-Siffrein, né 26 juin 1746 à Vauréas, comtat Venaissin, fils d'un pauvre cordonnier, étudia la théol. à Avignon, vint 1765 à Paris, se fit connaître dès 1766 par un éloge de Stanislas roi de Pologne et par une oraison funèbre du dauphin; puis par des discours sur les bienfaits de la paix, des panégyriques de saint Louis, de saint Augustin, un éloge de Fénelon, une étude sur Charles-Quint, etc. Élu membre de l'Académie en 1785, il demeura à Paris, prédicateur renommé, et fut nommé en 1789 député du clergé aux États Généraux où il se distingua comme chef du parti clérical et monarchique, habile & traiter toutes les questions financières ou autres; luttant souvent avec avantage contre Mirabeau, défendant l'Église en toute occasion, et protestant contre le décret qui constituait le roi et sa famille prisonniers après leur fuite de Paris. En 1791 il se rendit en Allemagne; de là en Italie, à Rome. Le pape l'envoya comme légat an couronnement de François II, emp. d'Allemagne, puis à Francfort; en 1794 il le nomma archev. in partibus de Nicée; en 1796, cardinal et év. de Monte-fiascone. Louis XVIII le fit son ambassadeur à Rome en 1799, ce qui ne l'empêcha pas de se rallier par lettre à Napoléon, 1804, qui lui permit de rentrer en France, et le nomma en 1810 archev. de Paris, en remplacement du cardinal Fesch. Il administra son diocèse sans avoir été autorisé par le pape, et lors de la chute de l'empire il se rendit à Rome pour se justifier, mais il fut enfermé au château Saint-Ange, où il passa plusieurs mois; de là dans un couvent; fut dépouillé de son diocèse, et f 1817 dans la retraite. Il avait mis de grands talents au service d'une grande ambition. Comme littérateur, son principal ouvrage est son Essai sur l'éloquence de la chaire, Paris 1810. Vie, par Poujoulat, et d'Haussonville.

 

MAXENCE, fils de Maximien et gendre de Galère, devint auguste par la mort de Constance-Chlore. A la suite d'une émeute des prétoriens et de la ville de Rome contre Sévère, il s'empara de la pourpre impériale et, de concert avec Constantin, Licinius et Maximin, gouverna l'Italie et l'emp. romain en prince tyrannique et débauché. Il persécuta cruellement les chrétiens, fut vaincu par Constantin sous les murs de Rome, et se noya dans sa fuite 312, le pont Milvius s'étant écroulé sous lui.

 

MAXIME lo Claude-Pupien Maxime, emp. romain, successeur de Gordien, nommé à l'empire avec Balbin par le sénat, qui l'opposa à Maximin, 237. Après quelques mois paisibles, ils furent massacrés par les gardes prétoriennes, parce qu'ils voulurent rétablir la discipline.

2o Max. Magnus, tyran des Gaules, se fit proclamer emp. 381 ou 388 et s'établit à Trêves; vaincu par Théodose en Pannonie, il fiit massacré 388.

3° PetroniusMax., emp.d'occident, renversa Valentinien DI 455, et contraignit Eudoxie sa veuve à l'épouser. Pour se venger, elle appela Genséric et lui livra Rome. Max. ne songea qu'à fuir et fut lapidé par le peuple.

4o Valerius Max. V. Valère.-

5° Maxime de Tyr, philos, platonicien du 2™* siècle, connu par 41 discours ou dissertations sur des questions philosophiques (trad. par Combe-Dounous 1802). Il avait beaucoup voyagé. On a cru à tort qu'il avait été l'instituteur de Marc-Aurèle.

60 Év. de Turin au milieu du 5m« siècle, prêcha avec succès en Lombardie et assista 451 au synode de Milan, en 465 à celui de Rome. Ses écrits, surtout ses homélies renferment d'utiles renseignements sur ce qui restait encore de paganisme à son époque.

7° Philos, platonicien éclectique, un des maîtres et amis de Julien, qui le poussèrent àapos-tasier.

8° Païen de Madaura en Afrique, écrivit à Augustin pour justifier le monothéisme philos, païen; connu surtout par la réponse d'Augustin.

9° Auteur (chrétien) d'un Fragment sur la Hulè et sur l'origine du mal; v. Môller, Cos-mol., et Gieseler.

10° Un des ennemis de Grég. de Naziance, pendant son patriarcat de Constantinople.

Ile Abbé de Lérins, év. de Riez, f 460. Son corps est dans la cathédrale de cette ville.

12° Abbé de Constantinople, combattit les monothélètes el fut exilé pour sa foi. f 662.

 

MAXIMIEN-Hercule (Marcus Aurelius Vale-rianus), emp. romain, né à Sirmium, Panno-nie, vers 250; simple soldat, s'éleva de grade en grade jusqu'à être associé à l'empire par Dioctétien. A son tour il s'associa Constance Chlore. Lors du partage de l'empire 292, il eut pour lot l'Afrique et l'Italie et se fixa à Milan. Démissionnaire en 305, il regretta sa résolution et reprit la pourpre 306* quand son fils Maxence fut devenu auguste; mais ayant voulu dépouiller ce fils à qui il devait la couronne, il dut s'enfuir, et se rendit dans la Gaule auprès de Constantin qui avait épousé sa fille Fausta: dévoré d'ambition il voulut aussi faire assassiner son gendre, mais le complot fut découvert, et il finit par s'étrangler à Marseille dans sa prison, 310.

 

MAXIMILIEN 1° martyr, qui doit avoir été cnis à mort en 284 dans sa ville natale de Cilly, Styrie, pour avoir refusé de sacrifier à Mars. Une biographie du 13me siècle le fait aussi archev. de Lorch. Le culte dont on l'entoura de bonne heure en Bavière et en Styrie témoigne des succès de l'œuvre missionnaire.

2° Saint, martyr en Numidie, 295.

3° Maximilien II, né 1527 à Vienne, fils de Ferdinand I**; roi des Romains en 1558, de Hongrie en 1563, emp. d'Allemagne en 1564.

Élevé par Wolfgang Stiefel, qui était luthérien, il se montra favorable au protestantisme et le prouva en choisissant pour son secrétaire particulier Jean-Sébastien Phauser, qui avait été le chapelain de son père; il lisait volontiers les écrits de Luther, de Mélanchthon et de Brenz, et entretenait les relations les plus amicales avec les électeurs de Saxe et du Palatinat, ainsi qu'avec Philippe de Hesse. Il intervint même pour assurer aux protestants des avantages dans la Paix d'Augsbourg. Mais il n'alla plus loin. Il parut même un peu se refroidir par la suite, soit qu'il fût influencé par les traditions paternelles, soit qu'il cédât aux instances de sa femme, Marie, fille de Charles-Quint, ou de sa sœur Jeanne de Portugal, dirigée par le jésuite Rodrigue, par l'év. Hosius et par le cardinal Commendone; soit enfin par politique, par amitié pour l'Espagne et pour affermir la puissance de la maison de Habsbourg. Il ne pouvait trouver un appui suffisant dans les princes évangéliques, trop divisés entre eux. Ainsi en 1562, lors de sa nomination comme roi des Romains, il remplaça Phauser par un chapelain catholique, et en 1571, lorsque s'ouvrit la succession au trône d'Espagne, il se rapprocha des États cathol. et ne se prononça même pas franchement en faveur de la liberté religieuse. En 1568 il accorda aux.châteaux et aux nobles l'exercice du culte évangélique dans leurs domaines, et publia en 1571 une circulaire, inspirée par Chy-trâus, qui réglait pour l'Autriche la situation du protestantisme. Élu roi de Pologne après le départ du duc d'Anjou, il trouva un rival en Étienne Bathori, et il se disposait à défendre ses droits par la force, quand il f 1576, pendant la diète.

 

MAXIMIN 1° Julius-Verus, né en Thrace, de parents pauvres. D'abord pâtre, puis soldat, très bien doué, il se fit aimer d'Alex. Sévère et de ses soldats. Il fut appelé à l'empire après que Sévère eut été assassiné, et fit de nombreuses guerres; mais il se rendit odieux par ses cruautés et se montra un ardent persécuteur des chrétiens. Remplacé sur le trône par le sénat, il quitta la Germanie plein de fureur pour aller se venger en Italie, mais au siège d'Aquilée il fut assassiné par ses propres soldats, 238. Il était d'une force et d'une taille colossale; sa voracité n'était pas moins grande.

2° Caïus-Galerius-Valerius M., fils d'un berger de Thrace, berger lui-même, césar en 305, auguste en 307, empereur en 311 avec Constantin et Licinius, ennemi acharné des chrétiens, se brouilla avec ses collègues, fut vaincu par Licinius à Andripople, s'enfuit sous un déguisement, et f à Tarse 313; on croit qu'il se suicida. C'était un ivrogne; il avait même eu la précaution d'exiger qu'on n'exécutât que le leu-demain les ordres qu'il donnerait sous l'influence du vin.

3° V. Juventin.

 

MAYENCE. Le catalogue du moine Megen-fried, de Fulda, composé au 10®« siècle, donne pour fondateur à l'égl. de cette ville, et pour premier évêque, Clément disciple des apôtres; il lui prête aussi quelques évêques qui ont combattu l'arianisme, et un martyr, Alban, décapité, qui, à l'instar de plusieurs autres, a porté sa tête jusqu'au lieu de la sépulture. Mais le premier év. authentique est Sidoine, du 6me siècle, célèbre comme constructeur d'églises. Pépin fit de Mayence un archevêché, dont Bom-face fut le premier métropolitain, et l'importance de ce siège alla croissant sous ses successeurs, comprenant Liège, Cologne, Utrecht, Spire, Prague, Strasbourg, Constance, etc. L'archev. était l'archichancelier de la Germanie, vicaire de l'empire en cas de vacance, occupant le premier rang parmi les 7 électeurs. Nommés tantôt par les chapitres, tantôt par les rois avec l'agrément du peuple, quelquefois par les emp. ou par les papes, ces dignitaires constituaient une véritable puissance et l'on comprend que l'élection fût vivement disputée pendant les luttes et les rivalités du moyen âge. Tout le territoire environnant Mayence, et depuis 1462 la ville elle-même, qui avait été jusque là ville libre, était soumis au prince-archevêque, ajoutant ainsi à son pouvoir spirituel des forces matérielles que les titulaires s'appliquaient soigneusement à augmenter à chaque nouvel avènement. Parmi les archev.de Mayence les plus illustres, et il y en a eu beaucoup, on remarque, après Boniface; Raban Maur, Willigis qui donna à la ville ses armoiries et qui construisit la cathédrale; Bardo qui la rebâtit après qu'elle eut été brûlée; Siegfried 1060-1084, qui passa au parti de Grégoire VII, et 'qui faillit être tué par le clergé à Erfurt, lorsqu'il publia la bulle imposant le célibat; Rudhard qui, en expiation de la part qu'il avait prise à une cruelle persécution des juifs, bâtit le couvent de Johannisberg, où il fut enterré; Adolphe Iw, qui érigea l'univ. d'Erfurt 1389; Diether, celle de Mayence 1477; Albert II de Brandebourg, 1514-1545, qui accapara le commerce des indulgences, à cause des nombreuses dettes de l'archevêché; qui combattit violemment la Réformation, quoiqu'il fût obligé de la subir dans la Hesse et dans la Thuringe, et qui appela les jésuites en 1542; Joseph d'Erthal, le dernier archev.; il signa la Ponctation d'Ems contre Rome, s'appuya sur la Prusse contre l'Autriche, et prit pour coadju-teur Théod. de Dalberg. A l'arrivée des Français 1792, l'électorat fut sécularisé, l'archevêché transféré à Ratisbonne, Dalberg nommé chancelier du royaume et primat d'Allemagne, ne conservant plus qu'une petite partie de son diocèse. Le concordat rétablit Mayence comme évéché, avec Joseph-Louis Colmar comme titulaire; il f 1818, et le siège resta vacant 11 ans; Joseph Vitus fut nommé en 1829, son diocèse comprenant la Hesse des deux rives, et les conflits entre l'État et l'Égl. furent momentanément écartés; mais ils éclatèrent lorsqu'en 4849 le pape refusa de ratifier l'élection du prof. Léopold Schmidt, de Giessen, et nomma à sa place l'ardent Ketteler, qui a fait de Mayence l'une des places fortes de l'ultramontanisme.

 

MAYER, Jean-Fréd., luthérien, théol. de combat. Né 1650 à Leipzig, fils de pasteur, il occupa successivement divers postes, k Strasbourg, Leissnig, Grimma, Wittenberg; fut appelé k Hambourg comme pasteur et directeur du gymnase, et à Kiel comme prof, sous les auspices de Christian V, de Danemark. D'abord ami de Spener, il s'en sépara lorsque le schisme éclata entre la piété vivante et l'orthodoxie morte. Son animosité s'accrut en suite de Fatti -tude que prit Spener, comme président du consistoire, lors de son déplorable divorce. Il s'attaqua surtout au pasteur Horb, gendre de Spener, ainsi qu'à ses collègues qu'il traitait de horbistes, et demanda qu'on leur fît jurer, par écrit, qu'ils ne s'écarteraient en rien des livres symboliques. Son talent de parole mit le magistrat et le peuple de son côté. Charles XII l'appela en 1701 à Greifswald, comme chancelier de l'univ. et surintendant de la Poméranie. f 1712 à Stettin où il s'était réfugié à cause de la guerre. Il a laissé 378 écrits différents, mais très peu d'une valeur sérieuse.

 

MAYNOOTH (Collège de), séminaire cathol. d'Irlande, situé dans le comté de Kildare;crété en 1795 parle parlement britannique,avec une dotation annuelle de 8000 livres (200,000 fr.). Jusqu'alors les ecclésiastiques irlandais allaient fkire leurs études dSns les collèges du continent, Douai, Rome, etc.; car lorsqtTen 1560 l'Égl. anglicane devint officiellement l'Égl. nationale d'Irlande, les catholiques perdirent à la fois leurs biens et le droit d'avoir des collèges et des séminaires. Mais la révolution ayant supprimé les collèges irlandais en France, en Espagne et dans les Pays-Bas, il fallut bien pourvoir au recrutement du clergé, et Maynooth fut fondé. Quoique sous la surveillance nominale de l'État, ce collège est dirigé en réalité par les év. romains, et l'on comprend qu'ils prêchent à leurs élèves la haine de l'Égl. établie; on l'a vu lors de l'agitation de 1829 pour le Rappel. La dotation a été portée en 1845 k 20,000 Liv. (500,000 fr.) par le ministère de Robert Peel, après une discussion qui passionna toute l'Angleterre. Parmi les opposants à ce bill on comptait tous les dissidents et un grand nombre de catholiques décidés à ne rien accepter de l'État; en outre, des hommes qui voyaient dans cette mesure une atteinte aux droits de l'Église établie; enfin tous ceux que scandalisait l'esprit jésuitique dont était animé le séminaire. Ce vote fut à la fois un subside matériel et un encouragement donné aux catholiques à poursuivre leur agitation; on peut le considérer comme le premier coup porté à l'anglicanisme en Irlande; le ministère Gladstone lui porta le dernier par son bill de désétablisse-ment, juillet 1869. On ne leur en a pas su gré.

 

MÉCHITÀR, ou Mekhitar, surnom qui signifie Consolateur. Manuk, né 7 févr. 1676 à Sé-haste, Asie Mineure, de parents pauvres et pieux, entra à 14 ans au couvent de la Sainte-Croix, près Sébaste, où il se distingua par son amour pour l'étude, et où il fut ordonné diacre. Il y composa des hymnes, dont plusieurs se chantent encore dans l'égl. arménienne. La Bible et les pères étaient ses lectures favorites. 11 accompagna un vieux et pauvre archevêque à Etchmiazin, principal centre de la science arménienne, et, touj. désireux de s'instruire, il fit d'autres voyages et fut mis en relation avec des prêtres romains, qui naturellement tournèrent ses regards vers Rome. Il résolut de s'y rendre, mais une grave maladie épuisa ses ressources et l'obligea de rentrer à son couvent. En 1696 il fut consacré prêtre, et en 1699, au couvent d'Erzeroum, où il prit le nom de Mechithar, il reçut le titre de Wardapet, c.-à-d. docteur en théologie, et fut chargé de l'enseignement. Il se proposait surtout de développer la vie religieuse de sa nation, de former des missionnaires et d'établir des relations avec Rome. Il se rendit dans ce but à Constantinople, où il avait déjà passé quelques mois comme prédicateur, chercha à concilier les Arméniens qui étaient divisés en deux partis, et n'ayant pu y réussir, il se fit catholique, mais secrètement. Il déguisa sous le nom d'imprimerie pour la publication de livres religieux arméniens, l'institut missionnaire qu'il ouvrit le 8 sept. 1701; mais ayant fini par prêcher la soumission au pape, il s'attira la haine et les persécutions de ses anciens coreligionnaires, et s'enfuit 1703 à Smyrne, puis dans la Morée, qui appartenait alors aux Vénitiens. Quand ceux-ci perdirent cette province, il dut fuir de nouveau et se rendit à Venise, où il vécut quelque temps misérablement, jusqu'à ce que 1717 le sénat lui donna l'île de Saint-Lazare. Là avec l'aide de riches Arméniens il rétablit son couvent, qu'il peupla de moines de son pays; ils prirent de lui le nom de méchitarites, ou mékhitaristes, et s'adonnèrent à l'étude des Écritures, des classiques arméniens et des pères de l'Église. Dans le but de ranimer la vie nationale et religieuse de ses compatriotes, il composa une gramm. arménienne, un Dictionn. de la même langue, et publia de nombreux ouvrages religieux, entre autres une trad. de la Bible. Après sa f 27 avril 1749, ses successeurs continuèrent son œuvre; leur biblioth. fut bientôt une des plus riches en mss. arméniens, et leurs presses n'ont cessé de fonctionner et de rendre des services à la littérature arménienne. Ils ont donné ainsi une meilleure trad. de la Bible, 1804. et des trad. de la Chronique d'Eusèbe, d'Éphrem le Syrien, de Philon, etc.; de même une Chronique arménienne, les œuvres de Narsès. etc. Ils se divisèrent en 1773, et quelques-uns s'établirent à Trieste, puis 1810 à Vienne. Ils ont des succursales à Padoue, et depuis 1846 à Paris. Leurs rapports avec la Propagande de Rome sont passablement tendus.

 

MECHTHILDIS lo fille du comte Berthold d'Andechs, née 1125, mise déjà en 1130 au couvent de Diessen, Bavière, dont elle devint l'ab-besse en 1153. Par ordre de l'évêque elle fut chargée de réformer le couvent d'Edelstetten, dont elle assura la prospérité. Elle retourna dans son couvent avant sa f H60.

2o Comtesse de Hackeboni, née à Eisleben, fut mise à 7 ans au couvent bénédictin de Ro-desdorf, et passa 1258 avec les autres nonnes à Helpede. Ses visions et révélations, qui furent recueillies par un ami, montrent un grand sens religieux et une profonde connaissance de la Bible.

 

MECKLEMBOURG. Ce double grand-duché, borné au nord par la Baltique, tire son nom de l'ancien village de Mikilinborg. Habité d'abord par les Obotrites, il fut occupé ensuite par les Hérules. les Vandales et les Wendes; la maison de Mecklembourg est la plus vieille de l'Europe et ses ducs s'appellent encore princes des Vandales; ils prétendent remonter à Genséric. L'Évangile fut apporté dans ce pays du temps de Charlemagne par des moines de la Nouvelle-Corbie, dirigés de Brème ou de Hambourg; mais son établissement qui eut dès l'abord un caractère trop politique, fut souvent compromis par les guerres, et sous les derniers carlovin-gieus il avait entièrement disparu. L'év. Adal-ward de Verden 931, puis Adalbert de Brème avec l'appui du prince Gottschalk 1043, firent de nouveaux essais d'évangélisation, fondèrent des couvents, créèrent des évêchés, mais leur œuvre périt en partie sous le prince suivant. C'est seulement sous Henri-le-Lion 1161 que le christianisme obtint une existence assurée et définitive; Henri vainquit Niclot, fit mettre à mort Wertislaw, l'aîné de ses fils, et obligea le second, Pribislaw, à se faire baptiser; il eut pour collaborateur spirituel dans cette campagne J'archev. de Brème. Dès lors l'œuvre fut fixée;

il y eut des évêchés à Lubeck et à Ratzebourg, une abbaye de cisterciens à Doberan H 70, puis des prémontrés. Vicelin de Lubeck et son successeur Gerold favorisèrent la mission intérieure; seulement l'Église se ressentit toujours de son vice originel, la main des princes. L'univ. de Rostock, fondée 4419, fut un progrès. La réformation, commencée par les augustins et favorisée par Henri-le-Pacifique, préchée parKfltzker de Dijmitz, pasteur à Rostock, fut définitivement acceptée en 1550, et les couvents supprimés en 1552. Les États adoptèrent la forme consistoriale et le dogme luthérien pur, avec des droits étendus accordés au clergé. Plusieurs prédicateurs pieux essayèrent de secouer le joug d'une orthodoxie morte; le mouvement partit surtout de Rostock, mais les princes et le clergé réussirent momentanément à l'étouffer, et le déclin de la vie religieuse se traduisit rapidement et de diverses manières, entre autres par l'immense accroissement des naissances illégitimes et par l'abandon du culte public. Mais aussi de nombreuses associations et institutions se formèrent en dehors de l'officialité pour lutter contre le mal, et depuis 1848 surtout elles ont obtenu de grands succès. L'Égl. réformée n'a dans le pays que peu d'adhérents, une église de réfugiés à Butzow, quelques congrégations bap-tistes, etc. Les catholiques ont une chapelle à Schwerin depuis 1732 et une à Ludwigslust depuis 1810. Les derniers événements ont cependant donné plus de liberté aux différents cultes. Le Mecklembourg-Schwerin a 6 surintendants et 476 pasteurs; le Mecklembourg-Strelitz a 7 synodes sous un seul surintendant et 64 paroisses.

 

MÉDARD, né vers 457 ou 465 à Salency, Vermandois, fils d'un Franc noble et d'une femme distinguée dont la piété amena la conversion de son mari; il fut élevé selon l'Évangile, acheva son éducation à Tournay, et reçut la prêtrise à 31 ans. Il se consacra d'abord à l'évangélisation des païens encore nombreux dans ces contrées, fut sacré év. de Vermandois par saint Remi 530, vit son diocèse ravagé par les Huns et les Vandales, et dut en transporter le siège à Noyon, qui était fortifié. Cédant à de vives instances, il accepta encore en 532 la charge du diocèse de Tournay et consacra ses dernières années à l'accomplissement des devoirs multipliés que lui imposaient ce double diocèse et les féroces habitants de la Flandre, au milieu desquels il fut souvent en danger de mort. Sa piété sans tache et son zèle dévoué lui valurent l'amitié de Childéric I«r et de Clo-taire I. f 545, 8 juin. La légende lui attribue de nombreux miracles et les traditions populaires lui prêtent une curieuse influence sur la pluie. Un couvent a été élevé à Soissons sur son tom.

beau; les seigneurs francs y ont souvent tenu leurs assemblées.

 

MEDICIS, famille italienne célèbre, mais dont l'origine n'est pas sûre; les uns la font remonter aux paladins de Charlemagne, les autres à de modestes médecins. Le nom se rencontre à Or-vieto, Lucques,Milan et ailleurs; c'est la branche florentine qui est la plus connue, parce qu'elle a donné à Florence une dynastie de grands ducs, et à l'Église onze cardinaux, dont deux papes, Léon X et Clément VII, q. v. Le premier Médicis bien historique est Cosme, dît l'Ancien, qui fit la banque et l'usure aux conc. de Constance et de Bâle, 1415-1430; en 1453 il accueillit les savants grecs chassés de Cou* stantinople et fonda la première acad. platonicienne. Son fils Pierre 1416-1469, fut le père de Laurent-le-Magnifique, 1449-1492, intrigant, rusé, corrompu, l'ennemi de Sixte IV, mais le protecteur des lettres et des savants. Laurent a laissé plusieurs enfants, petits-enfants et neveux; mais l'adultère règne dans la famille: hommes et femmes ont des enfants naturels, et l'on ne sait pas à qui les donner. Il semble bien que Léon X est son fils, quoique d'autres en fassent son neveu. Clément VH est son neveu, fils naturel de Julien son frère f 1516. Laurent II, fils de Pierre n et petit-fils du Magnifique, est pendant 3 ans le tyran de Florence, et f 1519 en France d'une honteuse maladie; c'est le père de la fameuse Catherine qui a produit la triste dynastie des Valois. Quelques assassinats et empoisonnements viennent interrompre la succession régulière au trône de Toscane, assez compromise déjà par les débauches de la famille. Cosme, fils du capitaine Jean, est élu premier grand-duc, grâce à des actes de félonie et de simonie; il se distingue par plus de 70 édits draconiens contre toutes les libertés et par plusieurs assassinats domestiques (1519-1574). Son fils François II est pire encore, et il continue de cultiver la belle littérature; c'est le père de Marie de Médicis. Enfin Ferdinand I*r (3me fils de Cosme) 1549-1609, et Léopold, 1617-1675, relèvent un peu l'honneur desdicis par leur instruction, leur caractère et leurs mœurs. La famille s'éteignit en 1737, et le duché passa au duc de Lorraine.

 

MEDLER. Nicolas, né 1502 à Hof, Voigtland. étudia à Erfurt et à Wittenberg, et se fit con -naître dès sa 20®* année par des conférences sur l'A. T. et sur les mathématiques. Après avoir occupé diverses places dans l'enseigne* ment, il fut nommé diacre à Wittenberg et chapelain de la princesse Élisabeth de Brandebourg: en 1536 pasteur à Naumbourg, en 1546 surintendant à Brunswick; il y ouvrit une école qui jeta un moment un vif éclat; enfin à Bernbourg. mais il fut frappé d'apoplexie à son premier sermon, et f 1551. Lnther vante ses talents oratoires. La plupart de ses écrits appartiennent à la pédagogie.

 

MÉGANDER (Grassmann, grand homme), Gaspard, né à Znrich 1495, enseigna d'abord à Bâle, puis fut nommé chapelain de l'hôpital de Znrich, où il s'attacha à Zwingle. En 1524 pasteur de la ville, il se maria, travailla en 1525 à l'abolition de la messe, et après la dispute de Berne, fut nommé prédicateur et prof, de théol. dans cette ville, où il ne tarda pas à jouir d'une très grande influence. Il fut délégué à Zofingue en 1532, à Lausanne en 1536 et 1537, et fut chargé de la rédaction du catéchisme bernois. D'un caractère absolu, il combattit les tentatives conciliatrices de Bucer et voulut maintenir la Conf. helvétique, dont il était un des auteurs, contre la Concorde de Wittenberg que l'on proposait d'adopter. Il lutta quelque temps avec succès, mais en 1537 le synode de Berne donna raison k Bucer, et les conseils ordonnèrent de reviser le catéchisme dans le sens de la conciliation. Mégander donna sa démission, se retira à Zurich où il trouva une place à la cathédrale, continua de travailler contre Bucer, et f 1545. Il a laissé des Considér. sur la Genèsé, l'Exode, l'Ép. aux Hébreux, et 1 Jean, d'après les leçons de Zwingle.

 

MEIER lo Fréd.-Charles, né 11 août 1808, prof, à Iéna 1835, à Giessen 1836, f 13 févr. 1841; auteur d'une Vie de Savonarole, Comment. sur Éphés., Hist. de la doctrine de la Transsubstantiation, Manuel de l'Hist. des dogmes, etc.

2o Ernest-Henri, né 17 mai 1813 à Rusbendt, Schaumbourg-Lippe, prof, de langues orientales à Tubingue, f 2 mars 1866; auteur d'un grand nombre d'ouvrages sur: Les racines hébr., la forme du pluriel en hébreu, le Décalogue, la Poésie hébr., Ésaïe, les Petits prophètes, Hist. littér. des Hébreux, etc.

 

MEINHARD, moine augustin de Segeberg, partit de Brème sur un vaisseau marchand et se rendit en Livonie pour y prêcher l'Évangile; il fonda les égl. d'Yxkull et de Hohn et fut ordonné év. de Livonie par Henri II de Brème, t 1196.

 

MELNHOLD, J.-Wilhelm, né 27 févr. 1797, occupa diverses places de pasteur en Poméranie, mais donna sa démission en 1850 à cause de sa tendance au catholicisme et f 30 nov. 1851 à Charlottenbourg. Niant la valeur de la critique historique, et voulant démontrer la vérité des récits évangéliques, il écrivit son roman de la Sorcière de Bernstein, de pure invention, quoiqu'il prétendit en avoir emprunté le fond à d'anciennes sources; il réussit un moment, trompa beaucoup de lecteurs, et manqua finalement son but. On en peut dire autant de ses deux autres romans à tendances: Sidonia de Bork, et La sorcière du couvent.

 

MEINRAD, né vers la fin du 8*e siècle,'d'une famille illustre (des Hohenzollern, disent quelques-uns), il fut élevé au couvent de Reiche-nau, consacré prêtre, et envoyé comme prof, à Bollingen, près Zurich, une des succursales de Reichenau. Après quelques années il se retira pour vivre en ermite dans une solitude de l'Et-zel; il y passa 7 ans, mais pour se soustraire à la foule qui venait le visiter, il se retira plus loin encore, et se construisit une chapelle. Des brigands l'assassinèrent, 21 févr. 863. La légende raconte que des corbeaux poursuivirent les assassins avec tant d'insistance, qu'ils finirent par les dénoncer à la justice. Au bout de 40 ans, un chanoine de Strasbourg, Benno, ou Benoît, rebâtit la cellule; d'autres solitaires se joignirent à lui, et en 934 ils élevèrent un couvent, avec une chapelle consacrée à la légion thébaine; c'est auj. Einsiedeln.

 

MEINWERK, appelé aussi Meginwerk, Me-ginwark, fils d'un comte Imed et de la cruelle Athêla qui fit périr un fils du premier lit qu'elle avait eu du comte Balderich. Il eut pour condisciple à Hildesheim celui qui fut plus tard l'empereur Henri II. Chanoine à Halberstadt, il fut nommé chapelain d'OthonlII, 1001, et plus tard par Henri H, év. de Paderborn, 1009. Il intervint assez souvent dans les affaires de l'État comme négociateur, non seulement sous Henri qu'il accompagna à Rome 1013, mais encore sous son successeur Conrad IL 1026. Il profita de son influence pour enrichir son diocèse, et dépassa quelquefois les bornes. Il réforma le couvent de la Vielle-Corbie, établit des rapports avec Cluny, en fit venir 13 moines qu'il installa à Paderborn, fonda des couvents, bâtit des églises et fortifia la ville épiscopale. Il déploya beaucaup de zèle et fut canonisé; mais sa culture littéraire laissait à désirer. C'est de lui qu'on raconte qu'ayant obtenu d'Henri par trop d'instances un beau tapis dont il avait grande envie, l'empereur pour se venger fit raturer en secret quelques lettres sur le missel; le pauvre évêque qui ne s'en aperçut pas, lut le dimanche suivant dans le texte des Actes: pro mulis et mulabus, au lieu de famulis et famula-bus. Il obtint aussi d'Henri une investiture, qu'il accepta quoique l'emp. l'accompagnât de ces mots: « Que la haine de Dieu et de tous les saints soit sur toi qui ne cesses de me dépouiller au détriment de mon royaume l » Il répondit: « Tu es bienheureux, Henri, tu prospéreras, puisque par cette offrande le ciel te sera ouvert; une telle oblation produit l'abolition des péchés. » f 1036.

 

MEISNER, Balthazar, né 1587, f 29 déc. 1626; prof, de théol. à Wittenberg, auteur d'une

Philoiophia sobria, et de Pia desideria, où l'on voit qu'il sentait vivement les lacunes et les vices 3e l'Égl. de son temps.

 

MEISSEN, sur l'Elbe, Saxe; évêché fondé par Othon I, 938, et reconnu par le pape 968, en vue de l'évangélisation des Slaves. Chaque habitant fut imposé de la dîme de son revenu en sa faveur. Il eut beaucoup à souffrir par suite des guerres des Slaves et des Polonais avec les Allemands; il finit pourtant par s'enrichir et prospérer. Mais il fut perdu pour Rome lors de la Réformation, que Jean de Schleinitz introduisit 1518-1537; en vain Adrien VI canonisa l'év. Benno, pour donner un saint à cette Église ébranlée, cela ne produisit pas d'effet. Le dernier év., Jean IX de Haugwitz, déposa sa charge et passa au protestantisme. Il se trouve cependant encore à Meissen, depuis le siècle dernier, une petite église catholique.

 

MÉLANCHTHON (mot composé grec, traduction du nom de Schwarzerd, terre noire), Philippe, né à Bretten, Palatinat, 16 févr. 1497, fils de l'armurier Georges Schwarzerd (f 1507); sa mère, Barbara, était parente de Reuchlin. Après avoir étudié à Bretten et à Pforzheim, il vint à Heidelberg où il trouva des leçons à donner à de jeunes comtes, et en 1511 il devint bachelier. Ne pouvant à cause de sa jeunesse postuler un degré supérieur, il se rendit à Tubingue, et tout en donnant des conférences philos., il se mit à étudier la théologie, en même temps que le droit, l'astronomie et même la médecine. La publication d'une grammaire grecque le lit avantageusement connaître. Sous l'influence de Reuchlin et d'Érasme, et gagné à la cause dés lettres et de l'humanisme, il s'adonna à la lecture de la Bible et des pères et s'éloigna touj. plus de la théol. scolastique. Sur le conseil de Reuchlin il déclina des offres qui lui furent faites d'Ingolstadt et de Leipzig, et accepta la place de prof, de grec à l'univ. nouvellement fondée de Wittenberg. Il inaugura ses leçons 25 août 1518 par un discours d'ouverture sur les réformes à faire dans l'enseignement de la jeunesse. En 1520 il épousa Catherine Krabb, fille du bourgmestre de Wittenberg. Bientôt il s'établit entre Luther et lui une de ces profondes et solides affections qui naissent d'une estime mutuelle et de la sympathie qu'éprouvent l'un pour l'autre des hommes faits pour s'entendre dans la recherche des grandes choses. Dans les leçons d'exégèse que M. donnait, comme prof, de grec, sur les Ep. aux Romains, et d'autres, Luther trouva la justification de ses thèses réformatrices, et M. fut appelé à une chaire de théologie. Il fut amené à intervenir à l'occasion de la dispute de Luther avec Eck; il en avait écrit à OEcolampade, et cette lettre lui valut une attaque du Dr Eck, à laquelle il répondit par sa Defensio contra Eccianam incul-pationem. En 1521, sous le pseudonyme de Di-dymus Faventinus, il adressa aux États de l'empire une justification de Luther contre les calomnies romaines. Pendant le séjour de Luther à la Wartbourg, il fut à Wittenberg la vraie tête et le chef du mouvement de réforme, l'expliquant et le justifiant auprès de l'électeur, et le défendant contre les exagérations de Cari-stadt et des prophètes de Zwickau. Il est probable, pour lui comme pour Luther, que ce sont les excès de ces fanatiques qui ont déterminé son attitude dans les questions de politique ecclésiastique. En parfaite communion d'idées avec Luther, il publia successivement les divers écrits qui peuvent être considérés comme la base du protestantisme allemand: en 1521 les Loti communes rerum theol., souvent retravaillés et réimprimés; en 1524 YEpitome doctr. christianœ, dédié au très illustre prince de Hesse, et qui décida la conversion de Philippe; en 1530 la Confession d'Augsbourg, et son Apologie; puis le traité De potestate. papœ, dont l'avaient chargé les princes de l'union de Smal-calde, et qu'ils sanctionnèrent comme annexe ou appendice à la Confession. En 1544 il écrivit la Réformation de Wittenberg, pour l'offrir à l'empereur à Worms en 1545; et enfin, pour exposer au conc. de Trente les doctrines de la Réforme, la Repetitio Confessionis augustanœ saxonica. Tout en défendant l'Église, il s'occupait avec soin de l'organiser, et en 1528, lors de la grande visite des égl. saxonnes, à laquelle il prit une part considérable, il publia ses Instructions pour les visiteurs et les pasteurs de l'Égl. de Saxe. C'est le premier travail qui ait paru en ce genre, et il a servi de base et de modèle à tous ceux qui ont paru plus tard. L'importance du rôle de Mél. dans l'hist. de la Ré-formation allemande est marquée par le titre de Prœceptor Germaniœ qui lui fut donné; mais plus encore par le fait qu'il n'y a eu aucune assemblée un peu considérable de princes ou de théologiens à laquelle on ne l'ait convoqué; ainsi au colloque de Marbourg, à Spire, & Augsbourg, Smalcalde, Francfort, Cassel, Wittenberg, Haguenau, Worms, Ratisbonne, etc. Par sa largeur d'esprit, sa douceur de caractère et l'étendue de ses connaissances, il était l'homme le mieux fait, si la chose eût été possible, pour adoucir tous les angles et pour concilier les contraires. Il reçut de nombreux appels de Nu* remberg, Leipzig, Iéna, Tubingue, Francfort, même d'Angleterre et de France, mais il ne put jamais se décider à quitter Wittenberg, si ce n'est temporairement pour servir la Réforme dans quelques villes allemandes, à Meissen, à Cologne, ou pendant la guerre qui suivit la ligue de Smalcalde; l'université de Wittenberg ayant été fermée, il se fixa pendant quelque temps à Brunswick. Des divergences éclatèrent entre Luther et lui à l'occasion des théol. suisses. Jusqu'au colloque de Marbourg il s'était montré aussi opposé que Luther à tout compromis avec eux, mais à mesure que les discussions se prolongèrent, son opposition s'adoucit; non seulement l'exégèse trop littérale de Luther lui parut injustifiable, mais il comprit que dans la Cène ce qui importait, c'était moins l'acte matériel que la communion objective, réelle, mais spirituelle avec le corps de Christ. Luther lui en voulut d'avoir, dans les dernières éditions de sa Confession 1540, modifié le texte dans le sens de ses nouvelles convictions, et dès lors les divergences de ces deux grandes individualités allèrent s'accentuant toujours plus. D'un autre côté Àgricola lui reprochait 1527 sa doctrine sur la nécessité de la loi, et Cordatus 1536 son synergisme (bona opéra causa sine qud non). La patience de Mél. et l'inaltérable attachement qu'il ne cessa d'avoir pour Luther, empêchèrent seuls une rupture qui aurait sans doute éclaté lors de la Réformation de Cologne 1544, où Mél. d'accord avec Bucer se sépara décidément de Luther sur la doctrine de la Cène. La mort de Luther fut une époque dans sa vie; il devint par là le vrai chef du protestantisme allemand, son représentant le plus autorisé, et par conséquent responsable. Aussi son attitude lors de la publication de l'Intérim fut-elle amèrement critiquée comme un acte de faiblesse, quoiqu'elle s'explique d'un côté par la confiance qu'il n'avait cessé de mettre en l'empereur, de l'autre par la conviction qu'il avait que l'Église finirait par se réformer, et il ne voulait pas fermer la porte à un rapprochement possible; surtout il ne se rendait pas compte que des concessions pour lui peut-être indifférentes (adiaphora) à cause de son élévation scientifique et religieuse, ne devaient pas l'être aux yeux de la masse qui voit seulement le fait et ne s'arrête pas beaucoup aux explications. Il crut donc opportun de rédiger le provisoire de Leipzig, comme meilleur que l'Intérim d'Augsbourg imposé par l'empereur. D a cependant reconnu plus tard qu'il avait été trop loin dans ses concessions. Mais le mal était fait, et ses ennemis ne manquèrent pas de l'exploiter contre lui, ainsi que son refus de quitter Wittenberg pour Iéna. D'interminables discussions éclatèrent alors par la voie de la presse, par des colloques, dans les diètes même, entre les partisans de Mélanchthon et les luthériens purs (Flacius rillyrien), les intérimistes, les adiaphoristes, les majoris-tes, les synergistes, les osiandristes, etc., qui exagérèrent singulièrement les différences de doctrine entre Luther et Mél., sur le libre arbitre, la corruption originelle, la justification, les bonnes œuvres, l'Église et la Cène. Les fla-ciens cherchèrent même à humilier personnellement Mél. à la conférence luthérienne de Wei-mar, 12 janv. 1556, et plus encore à celle de Worms 1557, où, à la grande joie des catholiques, ils se séparèrent officiellement de lui, après avoir prononcé la condamnation de tous ceux qui n'adhéraient pas fidèlement à la conf. d'Augsbourg. Quelque patient qu'il fût, on comprend qu'il désirât être délivré de « la rage des théologiens. * Ses vœux furent exaucés le 19 avril 1560 par une heureuse et paisible fin. Ses dernières années avaient été éprouvées par les désordres de son gendre Sabinus, et par la mort de sa femme, dont il apprit la nouvelle dans un voyage à Heidelberg, 1557. La seule chose que ses plus ardents ennemis aient pu lui reprocher, est son indulgence pour le double mariage de Philippe de Hesse; ce fut un acte de faiblesse, un manque de foi; il se laissa effrayer par la pensée des suites que son refus pourrait avoir pour les destinées de l'Église. Mais on sait aussi la douleur et le repentir qu'il en eut; il tomba malade à la mort à Weimar 1540, comme il se rendait à Haguenau, et ne se releva que par les puissantes exhortations et les prières de Luther. L'amour de la paix, qui le caractérisait, ne l'amena jamais à transiger sur un point essentiel de la doctrine évangélique, et il résista à Ratisbonne 1542 à toutes les instances de l'empereur. Il sut même résister à Luther et quand il parut céder sur certains points, il montra clairement que c'était non par conviction, mais par condescendance. Son influence resta capitale, même après sa mort, même après que ses adversaires eurent réussi à faire condamner sa tendance, v. Philippisme. Ses Lieux communs sont restés le livre classique de la théol. luthérienne, et si l'orthodoxie postérieure des Lyser et des Hutterus n'a pas craint de lui attribuer de nombreuses erreurs de doctrine, son influence n'en est pas moins restée aussi heureuse que puissante sur le développement religieux, littéraire et philos, de son pays. Au nombre de ses écrits, notons encore une Gramm. latine, un Traité de l'âme, un Manuel de philos, morale, De la dialectique, etc. Plusieurs éd. et trad. par son gendre Peucer, par Bretschneider. Vie par Camerarius, Merle d'Aubigné, Ledderhose, etc.

 

MELCHIADES, v. Miltiade.

 

MELCHISÉDÉKIENS: secte juive, gnostique, an ti tri ni taire, ayant pour chef Théodote-le-Chan-geur. et qui subsista quelque temps à Rome. Ils tenaient Jésus pour un homme comme tous les autres. Melchisédec était pour eux une puissance divine d'origine inconnue, souverain sacrificateur des anges et des êtres célestes. Jésus, intercesseur pour les hommes, n'était que son image sur la terre.

 

MELCHITES (de Mélek, roi), chrétiens royalistes ou impérialistes de l'Égypte et de la Syrie, ainsi nommés parce que, à l'inverse des mono-physites et des coptes, ils se soumirent à l'ordre de l'empereur, qui leur manda de Constantinople de se soumettre à la doctrine de l'Égl., telle qu'elle avait été fixée par la conc. de Chalcé-doine 451. C'étaient les vrais catholiques.

 

MELDENIUS, Rupert, connu seulement par un écrit, sans indication de date, ni de lieu, mais contemporain de la guerre de Trente ans, intitulé: Paraenesis votivapro pace ecclesiœ• ad theologos Aug. confessionis. Sa tendance, indiquée déjà par le titre, est mieux résumée encore par ces paroles qui sont de lui, quoiqu'on les ait longtemps attribuées à Augustin: In necessa-riis unitas, in non necessariis liber tas, in utris-que caritas. Il résume ce qu'il appelle le nécessaire, dans les doctrines principales clairement exprimées dans la Bible et le Catéchisme, et sur lesquelles les théol. sont d'accord. Lttcke, Got-tingue 1850.

 

MELDORF, petite ville et vieil évêché du pays des Dithmarses (Holstein), tristement célèbre par le martyre du moine Augustin Moller, q. v. 1524. La conséquence de cet acte de fanatisme fut que 3 ans après, tout le district passait au protestantisme.

 

MÉLÈCE lo ou Melecius, métropolitain de Lycopolis, Thébaïde, et chef d'un parti qui finit par se joindre aux ariens, + 326. Les auteurs qui en parlent, Épiphanes, Athanase, Socrate et d'autres, ne sont pas d'accord sur les faits qui lui sont reprochés. On l'accuse a) d'avoir sacrifié aux faux dieux (?) et de s'être fait un parti après qu'il eut été excommunié et destitué par Pierre, év. d'Alexandrie: b) d'avoir été un homme orgueilleux, et de s'être permis dans le diocèse de Pierre et ailleurs, plusieurs usurpations de fonctions, entre autres d'avoir consacré des prêtres; c) de s'être montré sévère envers les lapsi, et d'avoir refusé de les admettre de nouveau, comme avait fait Pierre, quand son propre passé aurait dû lui inspirer plus d'indulgence, car il paraît avoir été lui-même un tombé. Le conc. de Nicée lui conserva son titre, mais en en restreignant les fonctions et les attributs. Mélèce se soumit, mais après la mort d'Alexandre, Athanase son successeur ayant voulu recourir à des mesures plus rigoureuses, les partisans de Mélèce résistèrent et se constituèrent en communauté séparée, pour bientôt se perdre dans l'arianisme.

2° ou Meletius, né dans la Mélitène, Arménie; év. de Sébaste 357, patriarche d'Antioche 361. Comme il tenait pour la doctrine de Nicée, les Eustathiens lui opposèrent Paulin, que Lucifer de Cagliari sacra évêque, au risque de perpétuer et d'envenimer le schisme, que le conc. d'Alexandrie 362 avait essayé de prévenir par des mesures de douceur. Les empereurs s'en mêlèrent; Julien exila Mélèce, Jovien le rappela, Valens l'exila de nouveau; enfin Gratien le rétablit 373, et malgré l'opposition persistante des occidentaux, le déclara seul et légitime évêque, à cause de 9on attachement aux résolutions de Nicée, et lui fit remettre les églises des ariens. Mélèce f 381 à Constantinople, pendant un concile qu'il présidait. Il semble que les partis étaient convenus qu'après la mort de l'un des 2 évêques, ils se réuniraient autour du survivant; mais les év. de Syrie se hâtèrent de donner Flavien pour successeur à Mélèce, et le concile le reconnut, de sorte que le schisme continua. Chrysostome réussit 398 à poser les bases d'une conciliation entre Flavien et Théophile d'Alexandrie, mais l'accord ne fut réellement conclu qu'en 415. Alexandre, le second successeur de Flavien, ayant consenti à assister le premier avec ses fidèles au culte des Eustathiens, et ces derniers ayant consenti en retour à ne pas donner de successeur à leur év. Évagrius, qui venait de mourir. Chrysostome a prononcé l'éloge de Mélèce, qui a été dès lors canonisé par les deux Églises.

 

MÉLITO, év. de Sardes, Lydie, vécut au milieu du 2">e siècle et fut un des plus grands savants de son temps. On a peu de détails sur sa vie: il ne se maria pas; sa piété lui avait valu un respect universel; quelques-uns le considéraient comme un prophète. Il présenta à Marc Aurèle une Apologie du christianisme. Il visita la Syrie et la Palestine, en vue de recherches sur les livres de l'A. T. f peu après 170. Ses écrits sont perdus presque en totalité; Eusèbe en a conservé une liste, mais incomplète. On l'a accusé d'anthropomorphisme, peut-être pour des expressions peu mesurées ou mal comprises, sur la gloire de Dieu dans l'homme. Il est également peu probable qu'il ait été montaniste. Anastase, au 6** siècle, cite de lui un passage où il expose la triple nature de Dieu; en loul cas il a défendu nettement la divinité de J.-C. et sa mort expiatoire.

 

MELK, ou Mœlk, cél. couvent de bénédictin* dans la basse Autriche, la Namare des Romains, déjà mentionné 861 comme fondé par des chanoines séculiers; relevé par Martin V qui j envoya 20 bénéd. de Subiaco. Il eut dans la Ire moitié du 18me siècle une certaine réputation par la science et les travaux de ses membres.

 

MELVILLE, lat. Melvinus lo André, né 1545 en Écosse, vint sur le continent après la fin de ses études, et les poursuivit à Paris, Poitiers et Genève, où il enseigna aussi quelques années à l'académie. En 1574, sur la recommandation de Bèze et avec la réputation d'un savant distingué, il revint dans son pays, où l'assemblée générale le nomma prof, de théol. et principal de l'univ. de Glascow. En 1580 il accepta la direction du séminaire théol. de Saint-André. Pendant qu'il était à Glasgow, pasteur en même temps que prof., il avait été appelé à intervenir dans les affaires de l'Église, et par la fermeté de son caractère, non moins que par l'étendue de ses connaissances, il était devenu le vrai chef de TÉgl. d'Écosse dans sa lutte pour ses libertés contre Jacques IAprès Knox il est certainement le personnage le plus considérable de la Réforme écossaise. Traduit devant le conseil le 15 févr. 1584 sous l'accusation de trahison, pour un sermon qu'il avait préché, il prouva son innocence, mais n'en fut pas moins condamné, et ses ennemis allaient le conduire au château de Blackness pour l'y faire périr, quand il réussit à s'échapper et se réfugia en Angleterre, à Berwick. Il revint en nov. 1585 après la chute d'Arran et reprit ses fonctions. En 1606, ayant composé une épigramme latine sur une cérémonie à peu près catholique à laquelle on l'avait contraint d'assister à Londres dans la chapelle du roi, il fut consigné comme prisonnier chez le doyen de Saint-Paul, où il passa 3 mois, puis chez l'év. de Winchester, enfin à la Tour, où il lui fut permis de recevoir des visites. Malade et tremblant de fièvre, il obtint la faveur d'aller respirer un air plus pur à 10 milles de Londres, et là il apprit que, sur les instances du duc de Bouillon qui l'appelait comme prof, de théologie à Sedan, il pouvait se rendre en France. Il partit 15 avril 1611, vit Dumoulin à Paris, et arriva à Sedan où il enseigna avec beaucoup d'éclat et fut généralement considéré, en dépit des attaques de Tilenus. + 1622.

2o Jacques, son neveu, fut aussi l'un de ses plus fidèles disciples et collaborateurs. D'abord prof, à Glasgow, puis à Saint-André, il prit en 1590 un poste de pasteur de campagne, et fut enfin nommé à Anstruther. Lors de l'affaire de son oncle il fut interné à Newcastle, et ne put pas même aller voir sa femme mourante, ni son oncle enfermé à la Tour, à qui il put seulement envoyer quelques meubles et quelques vêtements. Exilé, il quitta l'Angleterre en juin 1607. Le roi le craignait encore plus qu'André. Gracié, mais trop tard, il se remit en route pour PÉcosse, févr. 1614, mais ne put aller plus loin que Berwick, où il f 1614, paisiblement à 55 ans, après 8 ans d'exil. Il a laissé lui-même son Autobiographie, utile à consulter pour cette époque.

 

MÉXAION: les livres ecclésiastiques des grecs, renfermant pour chaque jour de fête des hymnes et des prières de circonstance, avec de courts extraits de la vie des saints. Ils étaient ordinairement arrangés par mois, d'où leur est venu leur nom.

 

MÉNANDRE. Samaritain, de Kaparattée, comme Dosithée, disciple de Simon-le-Magicien, fondateur d'une secte samaritaine à laquelle il se donna comme le rédempteur, et qu'il avait gagnée par ses arts magiques. La secte n'était pas chrétienne, quoi qu'en disent quelques pères, et dura peu.

 

MENDÉENS, ou plutôt Mandèens, disciples de la Manda de Hhajje, ou parole de vie; appelés aussi zabéens et chrétiens de Saint-Jean-Baptiste, secte gnostique ennemie du christianisme et du mahométisme, quoiqu'elle leur ait emprunté, ainsi qu'au judaïsme, des rites et des dogmes. On les trouve sur les bords du Tigre et de l'Euphrate, aux environs de Bagdad; il y en avait encore 20,000 au siècle dernier; maintenant ils ne sont plus que 1,500, la plupart orfèvres, tourneurs, serruriers ou ferblantiers. Ils célèbrent le 7®e jour et 4 grandes fêtes par an, dont la principale est le Pantscha, jour solennel où tous les mandèens doivent se faire baptiser (dans l'eau courante); les plus dévots se font baptiser chaque dimanche. La cène se célèbre avec le baptême; on mange un agneau qui a été tué par le prêtre. Ils sont polygames, mais n'ont guère que deux femmes; le divorce est interdit; leurs mœurs sont honnêtes et sévères.

 

MENDELSSOHN lo Moïse, célèbre écrivain et philos, juif du siècle dernier qui, par son influence sur ses propres coreligionnaires, a exercé aussi une certaine influence sur la vie religieuse en général. Nè 6 sept. 1729, fils d'un pauvre maître d'école de Dessau, il reçut ses premières impressions de la lecture de l'A. T., qu'il ne cessa jamais de considérer comme la vraie source d'une religion fondée sur la raison. En 1743 il vint à Berlin, où il eut à lutter pour l'existence, et où il finit par trouver des moyens de vivre, d'abord dans une place de précepteur, ensuite comme intéressé dans une maison de soieries. En 1755 il eut le bonheur de faire la connaissance de Lessing, avec qui il resta en relation toute sa vie, et qui l'illustra sous les traits de Nathan-le-Sage. Son livre sur: L'évidence des sciences métaphysiques, fut couronné par l'Acad. de Berlin, 1763. Ses deux traités: Phédon, ou l'Immortalité de l'âme 1767, et Heures du matin 1785, sont importants pour la théologie. Son écrit: Jérusalem, ou de la Puissance religieuse et du judaïsme, 1783, a inauguré au sein du judaïsme moderne une direction nouvelle et libérale. Mentionnons encore ses Lettres sur les sentiments 1755, Lettres juives, 1771, sa Lettre au diacre Lavater, déclinant l'invitation qui lui était faite de passer au christianisme, 1770. Il défendit son ami Lessing contre l'imputation de spinosime qui lui avait été adressée par Jacobi. + 4 janv. 1786.

2° Félix Mendelssohn -Bartholdy, petit-fils du précédent, compositeur éminent, auteur du Lobgesang, et des Oratorios de Paulus, 1836, et d'Élias 1846, est né à Hambourg 3 févr. 1809, f à Leipzig 4 nov. 1847. Élevé à l'école sévère de Séb. Bach, il a l'ampleur et la magnificence de Hândel, sans atteindre cependant à la hauteur de ces deux maîtres, dont il est quelquefois l'écho affaibli.

 

MENDIANTS. On désigne spécialement sous ce nom les dominicains et les franciscains parce que leurs vœux, leur interdisant de rien posséder, leur imposaient le devoir de mendier leur subsistance par humilité. On peut ranger dans cette même catégorie les carmélites, les augus-tins-ermites, et les servîtes. Ils ont en général exercé une grande influence sur les classes pauvres et ignorantes, mais aussi l'on a toujours été frappé du contraste qui existe entre la richesse de leurs couvents et leur prétention à l'indigence; on n'a pas le droit de mendier quand on est riche.

 

MENG-SE ou Meng-t*eu, appelé Mencius par plusieurs missionnaires, fut, avec Gonfucius, un des premiers éducateurs des Chinois, qui le révèrent comme un saint. Né vers 400 av. C. il est f 314. Après avoir reçu une excellente éducation, il parcourut les diverses parties de la Chine, prêchant la sagesse et la vertu. Ses discours, remarquables par leur brièveté, leur fraîcheur et leur originalité, ont été conservés par ses disciples et publiés sous le titre de: Le livre de Meng-tseu, on les range parmi les Quatre livres qui servent à l'éducation des jeunes Chinois; il y en a eu des milliers d'éditions. Trad en lat. par le p. Noël, Prague 1711; en français par Pauthier, Paris 1841.

 

MENIUS (ou Menig) Justus, né à Fulda 13 oct. 1494 (ou 13 sept. 1499). Il voulait d'abord être moine, mais se décida ensuite pour la prêtrise et vint 1514 étudier à Erfurt, puis à Wittenberg. Là il fit la connaissance de plusieurs hommes, notamment de Luther, et il s'attacha à la Réformation. Après avoir occupé divers postes, il fut nommé surintendant à Eisenach 1528, et prit une part active à presque tous les colloques et conférences qui eurent lieu, jusqu'à Mulhouse 1542. En 1546 il fut appelé à la surintendance de Gotha, sans être obligé d'abandonner Eisenach. Mais il rencontra des difficultés de plus d'un genre. Sans parler de l'Intérim, qu'il repoussa, il eut à lutter contre le parti d'Osiander et refusa entre autres de souscrire sans réserves à la proposition de Major, que c les bonnes œuvres sont nécessaires au salut. > Bien que l'affaire eut fini par s'arranger, il resta suspect et finit par donner sa démission, 1556. Sur la recommandation de Mélanchthon, qui l'aimait et mit unepréfaceà ses œuvres, il fut nommé past. de l'égl. de St-Thomas,à Leipzig, où il f 1558.

 

MENKEN, Gottfried, né à Brème 29 mai 1768, petit-fils de Lampe par sa mère. Ses sentiments religieux furent éveillés de bonne heure par l'influence des écrits de Lavater. Étudiant à Iéna 1788, et repoussé par le rationalisme ou le kantisme de ses maîtres, il résolut de devenir « un saint idiot, » et se mit à l'étude seule de la Bible, en y joignant cependant la lecture de Paracelse et de Boehme. En 1790 il vint à Duisbourg, où les travaux de Bengel et la connaissance personnelle du Dr Collensbusch, de Hoffmann et d'autres, le fortifièrent dans la direction qu'avaient déjà prise sa théol. et sa piété. La néologie superficielle et vulgaire de cette univ. le révolta, et il écrivit sous le voile de l'anonyme une Étude sur la démonologie, ou Réfutation des assertions exégétiques du prof. Grimm, 1793. Cette brochure, accueillie avec colère par les uns, avec joie par les autres, fit sensation. Suffragant en 1794 à Francfort sur le Mein, il publia une seconde brochure anonyme: Du bonheur et de la victoire des impies (Gott-losen), pour montrer que le triomphe des Français n'était pas une preuve de la faveur de Dieu à leur égard. Pasteur à Wetzlar en 1796, il fut appelé à Brème en 1802, et prit sa retraite en 1825. + juin 1831. après une carrière bien remplie. Prédicateur puissant, il tenait peu aux dogmes et aux livres liturgiques de l'Église, mais il s'attachait d'autant plus au texte de la Bible, et ne ménageait pas ceux qui pensaient autrement que lui sur l'inspiration. En revanche les orthodoxes lui reprochèrent de ne pas admettre l'expiation par le sang de Christ (dans le sens d'une satisfaction à la justice divine). Il a laissé un grand nombre de sermons très appréciés); on en a publié un choix à Brème pour le centenaire de sa naissance, 1868.

 

MENNAS, né à Alexandrie, nommé au patriarcat de Constantinople par Justinien à la demande d'Agapet I*', après que le monophy-site Anthime eut été déposé par le conc. de Constantinople 536. C'est le premier exemple d'un èvêque oriental nommé sous l'influence d'un év. de Rome. D'abord avec l'emp. il expulsa de la capitale et de leurs sièges épiscopaux les principaux chefs des monophysites. Dans la lutte des Trois chapitres il se laissa entraîner à signer les deux édits impériaux de 541 et 551 qui les condamnait, ce qui le fit excommunier par Vigile, 14 août 551. Mennas se soumit et se rétracta. Les latins et les grecs l'honorent comme un saint.

 

MENNO et les mennonites. Meno Simons, le chef de la secte, est né à Witmaarsum en Frise, 1496 ou 1498, et fut d'abord pasteur ou cuit, dans le petit village de Pirsgjum, 1524. H eut des doutes sur la transsubstantiation, telle qu'elle était alors définie, et il se décida à étudier la Bible, ainsi qne les écrits de Luther et de Bucer. Cependant il n'arriva à une pleine connaissance de la vérité qu'après avoir été mis en rapports avec les anabaptistes; le martyre du pieux héros chrétien à Leeuwarden, 1531, acheva de lui ouvrir les yeux. Appelé peu de temps après dans son village natal, il se déclara franchement contre Rome, rompit avec l'Église, et finit par donner sa démission 1535, quand son frère, un des chefs des anabaptistes qui avaient attaqué le couvent de Dokkum, eut été exécuté. Il devint prédicateur itinérant, se fit rebaptiser, et visita les petites communautés anabaptistes qui ne voulaient ni du fanatisme, ni des violences, et qui repoussaient également les procédés de Jean de Leyde et les doctrines de Munster ou de Batenbourg. 11 écrivit même contre Jean de Leyde en 1535. Attaqué par les protestants et par les catholiques, sa tête ayant été mise à prix par Charles-Quint 1540, il visita comme évêque, ou ancien, la Frise, le Hol-stein, le Mecklembourg et la Livonie. Faible et malade, il passa ses dernières années dans son petit bien de Wœstefeld, dirigeant de loin les petites églises, f 13 janv. 1561. Son principal ouvrage est intitulé: Livre fondamental de la vraie foi chrétienne, Amsterdam 1539. Il a écrit beaucoup d'autres traités, sur la Trinité, l'ex-communication, etc. Sa pensée dominante était le rétablissement du règne de Dieu par la fondation d'une Église pure et sainte. Il maintenait l'autorité absolue de la Bible jusque dans sa lettre; il rejetait le baptême des enfants, et condamnait le service militaire, le serment et les procès. Ses disciples et sectateurs se sont émiettés en une foule de petites sectes; déjà de son vivant, en 1554, ils s'étaient partagés à Wismar en stricts et indulgents, ou relâchés, et Grotius en 1616 disait que leurs subdivisions allaient à l'infini» Il est donc assez difficile aujourd'hui de préciser exactement en quoi consistent leurs doctrines et leurs usages, puisqu'il y a entre eux assez de variétés, mais on peut dire d'une manière générale, qu'ils se caractérisent par leur attachement à la Bible, leur indépendance vis-à-vis de toute autorité ecclésias-tique, le baptême des adultes, le refus du serment, le refus du service militaire, la douceur des mœurs, l'absence de luxe et une grande libéralité. Dès 1581 ils se multiplièrent dans toutes les provinces, malgré les ordonnances qui leur étaient contraires, et leur nombre s'accrut à plusieurs reprises par la communauté d'idées qui les rattachait aux remontrants, aux labadis-tes, aux hernoutes, aux baptistes chassés de la Suisse ou du Palatinat. Le nom d'anabaptistes pacifiques leur a été donné quelquefois pour marquer les rapports et les divergences qu'il y a entre eux et leurs coreligionnaires plus militants. On en compte auj. environ 42,000, répandus en Hollande, sur les bords du Rhin, en Alsace, en Prusse, en Moldavie, au sud de la Russie, en Transylvanie, en Hongrie, et au sud des États-Unis. Presque tous sont adonnés à l'agriculture, mais ils ont des pasteurs et depuis 1735 un séminaire; ils ont aussi une mission à Java.

 

MENOLOGION, calendrier des saints, en usage dans l'Égl. grecque, rappelant par ordre de dates, les noms et les traits principaux de la vie des saints. Il y en a plusieurs; le plus ancien est celui qui porte le nom de Basile; celui de Morelli est plus considérable, Rome 1788, 2 vol.

 

MEJNOT, Michel, f 1518, cordelier, prof, de théol. à Paris, vécut sous Louis XI et jusqu'à François I«r. Il s'est rendu célèbre par ses sermons en style macaronique, et surtout par la grossièreté de son style et l'indécence de ses bouffonneries. Il dit de Madeleine: « Venit se presentare face à face son beau museau ante nostrum Redemptorem, ad attinendum eum à son plaisir. > Impr. Paris 1518, 1519, 1525. Il est un spécimen pariant de ce qu'étaient la chaire chrétienne avant la Réforme, et la langue française avant Calvin.

 

MENSES papales. On nomme ainsi le droit des papes de disposer à leur gré des bénéfices devenus vacants en certains mois (menses). Depuis le 12me siècle il avait passé en coutume que les papes pouvaient recommander leurs candidats préférés. Si cette première démarche, la prière (preces), n'aboutissait pas, ils en faisaient une seconde, l'exhortation, puis l'ordre (mandata), enfin l'exécution. Mais peu à peu, et malgré la défense du conc. de Latran de disposer à l'avance des successions non encore ouvertes, des papes se permirent de disposer de bénéfices en attendant leur vacance. Cet abus finit par provoquer de vives réclamations. Aussi, pour donner satisfaction à l'opinion, Martin V fit décider au conc. de Constance que tout en réservant les droits acquis, les patronages laïques, les bénéfices relevant directement du saint-siège, la collation des bénéfices vacants devait alterner suivant les mois entre le pape et les évêques, de manière à ce qu'il fût impossible d'en disposer à l'avance, personne ne pouvant prévoir à qui reviendrait le droit de collation. Le conc. de Bâle contesta même au pape ce droit, de manière à supprimer toute tentation d'expectance. Le concordat de Vienne 1448, conclu entre Frédéric HI et Nicolas V, en accordant certains privilèges aux 3 électeurs ecclésiastiques, rendit aux papes pour les mois impairs, en laissant aux évêques pour les mois pairs, le droit de disposer des bénéfices. Mais le conc. de Trente ayant supprimé toutes t les grâces dites expectatives > (Sess. 24, chap. 19), le droit des papes fut non seulement restreint, mais presque supprimé en fait, l'alternance n'ayant été conservée qu'en Prusse jusqu'à ces dernières années,

 

MENSURIUS, év. de Carthage. Pendant les persécutions dioclétiennes 303, il crut devoir dans l'intérét de son église, faire quelques concessions apparentes; sommé de livrer la Bible il livra des ouvrages hérétiques, et s'opposa à l'adoration fanatique des confesseurs jetés dans les prisons. L'év. Secundus, de Tigisis, primat de l'Égl. de Numidie, l'accusa de ce double fait au concile de Ceuta 305, mais comme presque tous les év. africains étaient dans le même cas, on étouffa la chose. Accusé de nouveau, il dut se rendre à Rome, se justifia, mais + au retour 311. Après sa mort les modérés de Carthage, pour contrebalancer l'influence des rigides de la Numidie, se hâtèrent d'élire pour évêque l'archidiacre Cécilien, ce qui provoqua le schisme des donatistes, q. v.

 

MENTALES, v. Réservations.

 

MENTHON, petite ville située sur les bords du lac d'Annecy, patrie de saint Bernard 1° q. v.

 

MERCATOR, Marins, écrivain ecclésiastique du 5m<> siècle, très utile à consulter pour les luttes pélagiennes et nestoriennes, à cause de ses nombreuses citations. On n'en connaît que 2 mss. (Beauvais et Vatican) publiés par le bé-néd. Gerberon, Bruxelles 1673, et réimpr. par Baluze. On peut conclure d'une lettre de saint Augustin, qu'en 418 il était encore un jeune homme. Personnellement ami de Célestin I et de Sixte III, il fut leur agent officiel à Constantinople, entre 430 et 440, Rappliquant à établir l'autorité du siège romain. D'après le père Gar-nier il serait né en Italie, mais sa parfaite connaissance du nord de l'Afrique et ses rapports avec Augustin plaident en faveur de Bergeron et de Baluze, qui le font Africain. Comme il cite encore Eutyche, Théodoret et le conc. d'Éphèse, et qu'il ne va pas plus loin, on conclut qu'il doit être f entre 449 et 451. V. Tille-mont, Mémoires.

 

MERCURIAN, Éverard, belge et par conséquent sujet espagnol, 4me général des jésuites, élu 23 avril 1573 à l'âge de 68 ans; doux, prudent et vif. f 1 août 1580. Il avait été envoyé en Écosse sous Marie Stuart, pour voir ce qu'il y avait à faire, et il avait concouru à la fondation des collèges anglais de Reims et de Rome. 11 a écrit un Sommaire des Constitutions, et mis en ordre les Règles communes, et les Règles des différents offices.

 

MERICI, Angela, surnommée la Colombe de Salo. Née 21 mars 1470 à Desenzano, près du lac de Garde, et élevée chez un oncle après la mort de ses parents, elle quitta cet oncle pour aller vivre dans la solitude, avec une sœur qui mourut bientôt. Ramenée chez son oncle, elle entra dans les tertiaires de Saint-François, et s'occupa avec quelques autres jeunes filles d'instruire de petits enfants; elle le fit avec tant de succès qu'elle fut appelée à Brescia comme institutrice. Devenue aveugle dans un pèlerinage en Palestine, elle n'en visita pas moins tous les saints lieux, et fut miraculeusement guérie an retour, à Candie, par un crucifix. Touj. plus enflammée d'un saint zèle, et comme déjà sa réputation de sainteté se répandait, elle fonda 1535 sous le patronage de sainte Ursule une association de 12 femmes pour l'éducation des jeunes filles et le soin des malades, mais sans costume spécial, sauf le noir et un voile, sans vie commune, sans vœu de chasteté perpétuelle. Paul III les confirma 1544, et leur donna le nom d'ursulines, d'après celui de leur patronne. Angela + 27 janv. 1540. Il y eut pendant un mois grande dispute entre le chapitre et le chœur de Saint-Afre, pour savoir à qui appartiendraient ses restes, et le corps resta tout ce temps sans se décomposer. Béatifiée 30 avril 1768, elle fut canonisée en 1807. L'ordre avait été en 1572 soumis à la règle de saint Augustin et à la clôture; en 1789 il comptait H provinces et plus de 300 couvents. V. les Chroniques de l'ordre des ursulines, Paris 1676.

 

MERITUM de condigno et de congruo, deux expressions imaginées par Thomas d'Aquin, et adoptées par la théol. cathol., pour distinguer la valeur des œuvres et concilier les principes pélagiens avec ceux d'Augustin. Une œuvre n'est absolument méritante et digne que lorsque, la grâce de Dieu agissant, la volonté de l'homme l'accomplit spontanément et librement; en vertu de sa justice et de ses promesses, Dieu lui doit une récompense (M. de condigno). Quant aux œuvres purement humaines, Dieu ne peut, à cause de la distance qui sépare le créateur de la créature, lui accorder une récompense que par une concession de sa bonté (ex quddam congrui-tate), et c'est à ce litre seulement que l'homme peut l'attendre (M. de congruo). La première de ces deux classes de mérite est seule parfaite, et nul autre que Christ n'en est le représentant: mais la seconde a également sa valeur, et la foi d'un homme peut servir au salut de son prochain. De là s'est développée l'idée des vertus surérogatoires, qui a abouti à la théorie des indulgences. Les Réformateurs ont fait justice de cette distinction subtile, qui supprime en réalité le seul médiateur entre Dieu et les hommes, et qui inspire aux pécheurs une fausse sécurité.

 

MERLE d'Aubignè, Jean-Henri, né 16 août 1794 à Genève, fils d'un maître d'armes et descendant de réfugiés. Étudiant en théol. au moment où la lutte s'engageait entre le réveil religieux et le vieux socinianisme, il prit parti pour ce dernier et pour ses professeurs, ne prévoyant pas qu'un jour il serait lui-même professeur dans les rangs opposés. Il acheva ses études à Berlin, fut nommé en 1818 pasteur de l'égl. franc, réf. de Hambourg, en 1823 chapelain de Guillaume I«r roi de Hollande et pasteur de l'égl. réf. de Bruxelles. Il perdit cette position lors de la révolution belge, et fut appelé en 1831 comme prof, d'hist. ecclés. à l'école de théol. qui venait de se fonder à Genève. Il y resta jusqu'à sa f 21 oct. 1872. Pendant son séjour à Berlin il avait assisté à la féte de la Réformation; l'impression qu'il en reçut fut si vive qu'il forma le dessein d'écrire l'histoire de cette époque si glorieuse et si féconde en heureux résultats. Ce fut le but de sa vie et il ne s'en laissa plus détourner. De là ces volumes devenus si populaires, et trad. en plusieurs langues: Hist. de la Réf. du 16me siècle, 5 vol., Hist. de la Réf. en Europe au temps de Calvin, 6 vol. (achevé d'après ses notes par son gendre Duchemin); puis quelques épisodes détachés: La républ. d'Angl. aux jours de Cromwell, Trois siècles de luttes en Écosse; enfin un grand nombre de sermons. Rapports et Discours sur des sujets très variés, presque touj. de circonstance. Une instruction solide, beaucoup de recherches, une vive imagination, des convictions évangéliques arrêtées et un style souvent brillant, ont fait la fortune de ces ouvrages et ont assuré à l'auteur, ^n Angleterre et en Écosse surtout, de chaudes et justes sympathies.

 

MÉSA, ou Méscha. roi de Moab, mentionné 2 Rois 3, 4. sq. Un stèle découvert il y a quelques années par le missionn. Klein, mutilé par le fanatisme arabe, mais en partie reconstitué par M. Clermont-Ganneau 1870, reproduit le récit biblique, sinon littéralement, du moins de manière à en confirmer l'exactitude. Les principaux frag. de cette inscript, sont auj. au Louvre.

 

MÉSALLIANCE, v. Mariage. MESROB, ou Mietrob, appelé aussi Maschtoz, né vers le milieu du 4"* siècle dans un petit village de la province de Taron. D'abord secrétaire du patr. arménien, Nersès-le-Grand, son maître, puis secrétaire d'État pendant 7 ans, il résolut de se consacrer à Dieu, entra dans un cloître, et n'y trouvant pas ce qu'il cherchait, il se retira dans une solitude, oti bientôt de nombreux disciples se groupèrent autour de lui. Sous le règne de Bram Shapuhr, il reçut du patr. Isaac la charge de prêcher l'Évangile comme missionnaire, ce à quoi sa connaissance de la langue arménienne le rendait tout à fait propre. Mais il rencontra un sérieux obstacle dans l'absence d'une traduction arménienne de la Bible, la version syriaque, seule en usage pour le culte, étant inintelligible pour le peuple. Il entreprit de faire ce travail, mais il lui fallut d'abord créer un alphabet arménien, et cela lui prit plusieurs années; l'aide de quelques savants syriens ne lui fut même pas d'un grand secours. Enfin en 406 à Samosate, après de ferventes prières, il lui sembla voir dans une vision une main qui gravait sur un rocher les caractères dont il avait besoin. Il se mit alors à l'œuvre, traduisit le N. T. et les Proverbes, et après une persécution qui paralysa momentanément ses etforts et le contraignit de se rendre à Constantinople, il put retourner dans sa patrie avec son ami Sahak, et ils emportèrent des mss. grecs qui lui permirent d'achever et d'améliorer son travail, dont le commencement avait été fait d'après la version syriaque. Après une vie longue et bien employée, il f 441, administrateur du patriarcat, peu de mois après Sahak.

 

MESSALIENS (les priants). Trois sectes de ce nom: 1° Parti religieux non chrétien de l'Asie Mineure, au milieu du 4me siècle. D'après Épiphanes ils reconnaissaient plusieurs dieux, mais n'en adoraient qu'un, le Tout-Puissant, lui élevant des temples et chantant ses cantiques. Selon Cyrille d'Alexandrie c'étaient des déistes, dégoûtés du paganisme et ne conservant plus que pour la forme la foi en plusieurs dieux; ils avaient quelque analogie avec les hypsistariens, q. v. Le judaïsme et l'hellénisme leur avaient fourni certaines idées, et ils avaient adopté comme culte les formes chrétiennes, mais sans les doctrines; ils fnrent même quelquefois persécutés par les chrétiens et purent se vanter d'avoir eu des martyrs.

2° Enthousiastes mystiques de la fin du 4®« siècle, appelés aussi euchites, pneumatiques, choreutes (danseurs), ou d'après quelques-uns de leurs chefs, lampétiens, marcianistes, adel-phiens, etc. Ils représentaient la réaction contre les exagérations de l'ascétisme monacal, contre les disputes ecclésiastiques et contre la trop grande préoccupation de l'influence des démons. Ainsi ils rejetaient les formes ecclésiastiques, le baptême, la cène, les jeûnes, et se montraient assez indifférents vis-à-vis de certains préceptes de morale. Ils tenaient surtout à la prière, persuadés que par elle seule on peut chasser les démons, recevoir le Saint-Esprit et connaître l'avenir. D'abord nombreux dans les couvents de Syrie, ils renoncèrent peu à peu à la vie commune et se mirent à courir le pays en mendiant. Ils ne formaient pas une société fermée et n'entendaient pas se séparer de l'Église; ce n'est que plus tard qu'on leur a reproché des erreurs gnostiques. Persécutés, leurs maisons brûlées, ils disparurent peu à peu. Amphiloque d'Icône avait écrit contre eux.

3° Secte gnostique, thrace, du 10*»e siècle, en rapports avec les pauliciens, et qui avait quelque analogie avec les euchites.

 

MESSE. Cette cérémonie, qui est l'acte principal da culte catholique et se célèbre tous les jours dans la plupart des églises, correspond à la liturgie des orientaux et i\ la sainte Cène des protestants. Son nom vient du latin missa, dans la formule anciennement employée pour congédier les catéchumènes après la première partie du service. On leur disait: lté, wwsa est (eccle-sia); allez, l'assemblée est congédiée, et l'adjectif missa a fini par devenir un substantif et par désigner, avec le renvoi des catéchumènes, le second service auquel pouvaient seuls assister les fidèles: la messe. Le mot paraît pour la première fois dans une lettre d'Ambroise, 397, mais il n'a pas encore la signification qui lui fut donnée beaucoup plus tard, et qui sous sa forme actuelle remonte au conc. de Trente. Le rituel dans ses traits principaux date de Gré-goire-le-Grand, vers 600; mais il fut modifié dans la suite des siècles, et il subit tant de changements, il y eut tant de livres de messe différents, que le conc. de Trente jugea nécessaire d'y introduire une certaine unité. Une commission d'évêques n'ayant pas réussi à s'entendre, Pie V fut chargé d'y veiller; il remit ce travail à la Congrég. des rites, dont la rédaction adoptée et promulguée en 1570, légèrement amendée sous Clément VIII 1604 et sous Urbain VIII 1634, est auj. définitive. Plusieurs des prières de la messe sont empruntées aux anciennes liturgies et prouvent que l'Égl. des premiers siècles ne donnait nullement au repas eucharistique le caractère et la signification que l'Égl. lui attribue aujourd'hui, sans même parler du dogme de la transsubstantiation qui ne commença à poindre qu'au 9me siècle, et qui ne prit un peu de consistance qu'en 1215 au conc. de Latran. Comme la plus grande partie de cette cérémonie se compose de lectures, on dit habituellement: lire la messe. On distingue dans ce service six actes liturgiques principaux: 1° La Confession des péchés, qui se fait sur les marches de l'autel, avec le diacre et les enfants de chœur; lecture de Ps. 43, 3. 4. — 2° L'Introït, à l'autel; prières et lectures préparatoires, passages de la Bible et cantiques appropriés aux circonstances: Kyrié eleison, Gloria, Graduel et Alléluia; lecture des Évangiles, explications familières. — 3° L'oblation du pain et du vin, ou Offertoire, le commencement de la vraie messe; l'ancienne missa fidelium; les fidèles, seuls admis, apportaient à l'autel le pain et le vin, comme offrandes pour le culte; auj. le prêtre offre à Dieu le pain et le vin de la communion; il élève le pain et découvre la coupe; encens, lavage des doigts, psaume 26, prière. — 4° Consécration des espèces, ou Canon de la messe, règle invariable. Ce u'était d'abord que la lecture des paroles de l'institution; peu à peu, depuis Grégoire-le-Grand, la liturgie s'est développée. Après la préface sursum corda, viennent les prières d'actions de grâces et d'intercession, puis la consécration par le signe de la croix. Dès lors les éléments étant transsubstantiés, 1h prêtre les adore, l'assemblée se met à genoux, et une prière est faite pour les vivants et les morts. — 5° La Communion; le prêtre partage l'hostie en trois et la trempe dans la coupe; ensuite il communie lui-même, ce dont la clochette avertit les assistants, et il donne la communion à ceux qui le désirent, en l'accompagnant de prières ou de citations appropriées, Agnus Dei, Pater, Libéra nos, etc. Puis vient la purification; il nettoie la coupe avec du vin non consacré, qu'il boit pour qu'il ne se perd*1 rien du sang de Christ. — 6° Enfin l'action de grâces, ou Postcommunion, lecture de Jean 1. 1-14, prières et collectes. Le diacre termine par: Rendons grâces à Dieu; après que l'officiant a dit: lté, missa est, et l'assemblée se disperse. — La messe orientale ressemble sur plusieurs points à la messe latine, mais elle ne repose pas sur le dogme d'une hostie devenant le même corps que celui qui a été offert sur la croix, que celui qui a été pris de la vierge Marie; en outre l'Égl. orientale n'a pas retiré la coupe aux fidèles. — La messe doit être célébrée à jeftn par le prêtre, ses assistants et les communiants, par conséquent le matin. Un prêtre ne peut en din* qu'une par jour, sauf des exceptions justifiées et autorisées. On distingue plusieurs sortes fa messes: publique, basse, solennelle, chantée,sèche, nautique (sur les vaisseaux); pour les morts, etc.; elles varient un peu et même beaucoup suivant les circonstances, en luxe, en longueur, en beauté, et dans le choix des prières et des lectures, mais le canon et la communion sont l'acte fondamental, qui ne varie pas. Les fidèles sont tenus d'assister au moins à une messe chaque dimanche. Les messes privées sont celles qui se lisent à un autel particulier, dans une chapelle, un jour ouvrable, ou sans communiant.

 

MESTREZAT lo Jean, né 1592 à Genève, fils d'un conseiller d'État, étudia à Saumur, fiit consacré par Du Moulin 27 août 1614, et fut aussitôt appelé par l'Égl. de Paris au poste de Charenton, qu'il occupa 42 ans. Il épousa eu juin 1624 Catherine de Malapert, veuve de J. Bellette et en eut 2 enfants. D'un caractère ferme, très instruit, orateur éminent, modeste et modéré, il exerça une grande influence. Provoqué par les jésuites, il leur tint tête en plusieurs rencontres, une fois contre Véron, une autre fois contre Regourd en présence d'Anne d'Autriche, plusieurs fois contre l'abbé de Retz. Il fut député à plusieurs synodes nationaux, présida celui de Charenton 1631, parla pour le rapprochement des luthériens et des réformés et pour le relèvement des études, et lit décider que les « séminaires et pépinières » do l'Église seraient conservés à tout prix, f à Paris 2 mai 1657. Il a laissé un grand nombre d'ouvrages plutôt profonds et bien raisonnés, que bien écrits; la plupart sont dos sermons; il y a aussi quelques traités de controverse (le Hibou des jésuites), des dissertations sur la Communion, la Justification, l'Église et une Exposition de l'Ép. aux Hébreux, Genève 1855.

2o Philippe, que l'on fait à tort iïls du procèdent, fut prof, de théol. à Genève, et représenta avec Tronchin la tendance libérale de l'école de Saumur contre le calvinisme strict de F. Turrettini. f 2 févr. 1690.

 

METAPHRASTE (Siméon le), rédacteur et compilateur d'une collection de vies et légendes des saints, recueillies dans les églises et les couvents, sans discernement ni critique; il accepte les fables les plus ridicules et il les reproduit avec une liberté pleine d'imagination, les embellissant à sa manière, ce qui lui a valu son surnom. D après Allatius il aurait été au commencement du 10me siècle protosecrétaire de Léon VHe-Philosophe, et de son fils Constantin VII; en 902 il aurait accoinpagué une ambassade auprès des Arabes de Crète, et c'est à son passage à Paros qu'il aurait été amené à ridée d'écrire son livre. Oudin le place au 12'"* siècle et n'en fait qn'un personnage avec Siméon le logothète, ou l'historien à qui on doit l'ifyn-tome canonum. Il paraît cependant que ce sont deux écrivains distincts. La collection du Mé-taphraste contient 122 vies, dont les principales ont été insérées dans le recueil des bollandistes. Allatius et Cave ont cherché à déterminer ce qui appartient en propre à cet auteur; quant à plusieurs lettres, poésies, discours, etc., il est difficile de dire auquel des deux Siméon il faut les attribuer.

 

MÉTATRON, celui qui veille, est le nom que la théol. rabbinique donne à l'ange gardien d'Israël, celui qui marchait à la tête du peuple dans le désert, l'ange de la face, qui porte aussi le nom de Michel. Il correspond à la Sche-china, à la nuée dont s'enveloppe la majesté divine,

 

METH, Ézéchiel, fanatique du 17me siècle, fils d'un maître d'école de Langensalza, et neveu de Stiefel, q. v. Le mépris de la Bible, du ministère et des sacrements, le rêve d'une Église idéale et du paradis sur la terre, caractérisaient ces enthousiastes. Ils occasionnèrent des soulèvements tumultueux à Langensalza, Erfurt et ailleurs. Il entra comme chimiste chez le comte Haas Louis de Gleichen, dont la femme passa bientôt à ses idées. Après beaucoup de persécutions, et surtout après la mort de son oncle 1627, il se convertit à Erfurt 1628. f 26 oct. 1640.

 

MÉTHODISTES, secie anglaise, appelee aussi we$leyen$, du nom de Wesley, son fondateur, q. v. Jean et Ch. Wesley, Whitefield et quelques autres jeunes étudiants d'Oxford, pénétrés d'un vif sentiment religieux et déplorant le formalisme, l'indifférence et le dogmatisme mort qui régnaient dans l'Église officielle d'Angleterre, se réunirent pour s'affermir dans la foi et vivifier leur piété par des prières, des conversations édifiantes et la pratique des bonnes œuvres, visites de malades, etc. A cela rien d'officiel, surtout aucune idée de se séparer de l'Égl. établie. En 1735 les deux Wesley se rendirent comme missionnaires en Georgie, ou ils entrèrent en relations avec les moraves et se lièrent intimement avec eux, mais n'ayant pas trouvé le champ d'activité qu'ils désiraient, ils revinrent à Londres en 1738, et fondèrent à Fetter-Lane, avec les moraves, une société d'édification mutuelle. Wesley était tourmenté dans sa conscience; il lui semblait qu'il n'avait pas la foi, il la demandait à Dieu avec instances, et c'est le 2i mai 1738 qu'il dit avoir enfin été converti, subitement, par un acte de Tesprit de Dieu. Un voyage à Herrnhut, la même année, le fortifia dans ses sentiments, mais lui prouva aussi qu'il y avait entre lui et les moraves d assez graves divergences. A son retour à Londres il y trouva Whitefield, qui revenait de la Geor-git\ Ils commencèrent ensemble des tournées missionnaires, qui firent une immense impression, en même temps qu'elles leur attirèrent des haines, des railleries et des persécutions. Bien loin de préparer un schisme, ils cherchèrent à gagner à eux les évêques, mais c'est chez ces hauts dignitaires qu'ils rencontrèrent la plus opiniâtre résistance, jusqu'à être menacés d'excommunication. En 1739 Whitefield commença ses prédications aux mineurs de Kingswood, pendant que Wesley prêchait en plein air à Bristol et à Londres, souvent devant 20,000 auditeurs. Ces prédications libres leur ayant été interdites, Wesley ouvrit en niai 1739 à Bristol sa première chapelle. L'association de Fetter-Lane fut dissoute en 1740,1a marche tranquille des hernhoutes ne s'accordant pas avec l'impétuosité des nouveaux apôtres et avec leur fiévreuse activité, et ceux-ci se constituèrent en United Society; ce fut la première association méthodiste. Whitefield et Wesley se séparèrent aussi, mais sans cesser d'être amis, le premier représentant le calvinisme strict et la prédestination, le second penchant plutôt vers l'armi-nianisme. Un pas important dans le développement du méthodisme fut l'emploi des laïques comme prédicateurs. Wesley ne s'y décida que difficilement, et sous l'influence de sa mère.

Parmi les prédicateurs improvisés, en général pauvres et sans culture, mais animés d'une foi ardente, il y avait certainement un choix à faire, mais tels quels ils contribuèrent pour beaucoup à répandre le méthodisme, quoique leur manque d'études théol. constituât un danger au point de vue d'un trop grand subjecti-visme religieux. Une première conférence générale, tenue à Londres en 1744, posa les bases de l'organisation de la Société, toutefois sans se séparer encore de l'Égl. établie. 11 s'agissait surtout de réagir contre le formalisme et l'indifférence, contre le dogme de la régénération baptismale et contre l'exagération de la notion d'église. Les United Societies établirent une discipline intérieure, destinée à favoriser le développement de la vie chrétienne, en instituant des classes, dans chaque église, c.-à-d. des groupes de 10 à 12 personnes, se réunissant une fois par semaine sous la direction d'un surveillant, ponr se communiquer leurs expériences, leurs tentations, leur état spirituel. Plusieurs églises réunies formèrent un circuit. Outre les prédicateurs locaux (le plus souvent des laïques pieux et bien doués), des prédicateurs itinérants turent chargés de visiter régulièrement les diverses communautés, et l'un d'entre eux fut désigné comme assistant ou surintendant. On en comptait déjà plus de 40 en 1744. La Société tout entière, églises et pasteurs, relève de la Conférence, qui se réunit une fois par année, et qui jusqu'à ces derniers temps était exclusivement formée d'ecclésiastiques. Le chiffre de ses membres fut fixé à cent par la Deed of déclaration de 1784, qui est en quelque sorte la charte constitutive du méthodisme. La conférence, comme autorité centrale, décide de toutes les questions de dogme et de discipline. On a reproché aux wesleyens d'avoir eu recours à des moyens extérieurs et artificiels pour convertir ou vivifier les âmes; mais tout le monde en fait à peu près autant; on cherche à agir sur toutes les facultés et même sur les habitudes de ceux que l'on veut convaincre. Des prédications journalières, des réunions intimes, des agapes trimestrielles (empruntées aux moraves), des nuits de prières, des jours de jeûne, le renouvellement annuel de l'alliance, des chants nombreux, comptent parmi les moyens qu'ils employaient, et l'on voit que ces moyens ne sont pas bien extraordinaires. Ils sont cependant ce qu'il y a d'un peu spécial dans ce qu'on a appelé leur méthode> et c'est de là qu'est né le nom de méthodistes. Les progrès de la Société avaient été rapides; grâce au zèle de ses agents elle avait obtenu de brillants succès dans les contrées les plus déchues de l'Angleterre; en 1747 elle comptait déjà en Irlande, et en 1751 en Écosse de nombreuses congrégations. Les persécutions, qui allèrent jusqu'à démolir leurs chapelles, à maltraiter les prédicateurs, à menacer même leur vie, ne fit naturellement que les exciter davantage. L'opposition des évêques et du clergé poussa Wesley plus loin qu'il ne s'était proposé d'aller, et pour avoir des prédicateurs régulièrement consacrés, qui pussent distribuer la Cène, il s'adressa 1766 à un èvêque grec accidentellement en passage. Il croyait encore un peu à la succession apostolique dans toutes les Égl. chrétiennes, ou du moins à sa nécessité pour l'ordination et la communion. Plus tard, au moment de la guerre avec l'Amérique, ayant besoin d'un grand nombre de pasteurs missionnaires, et comprenant mieux qu'il n'avait fait que le pasteur et l'évêquen'étaient qu'une même charge dans l'Égl. primitive, il se décida à consacrer lui-même deux de ses évangélistes, et nomma surintendant, èvêque ou surveillant de la mission 1784. Thomas Coke, né 1754, qui avait été jusque-là son aide. Ce fut une rupture complète avec l'Égl. officielle. L'année suivante il consacra encore 3 pasteurs en Écosse. En même temps ses adhérents choisirent pour leurs réunions les mêmes heures que celles du culte anglican, ils adoptèrent d'autres chants, une autre liturgie, et pour bien accentuer la séparation, Wesley invoqua en sa faveur, pour lui et ses disciples, l'Acte de tolérance de 1689, fait spécialement pour les sectes séparées de l'Égl. établie. C'est à partir de ce moment 1785 que le méthodisme peut être compté comme une secte, ou une Église à part. On ne saurait nier les services qu'il a rendus, ni l'influence qu'il a exercée, soit en opposant l'idée de la vie nouvelle à celle de l'orthodoxie, soit en maintenant la doctrine évangélique contre les prétentions du rationalisme, soit en s'occupant avec amour et avec zèle des classes inférieures trop longtemps dédaignées, soit en luttant énergiquement contre la traite des nègres et pour l'abolition de l'esclavage, soit en travaillant au soulagement matériel et au relèvement moral des malheureux, par un ensemble d'oeuvres qui ont été le point de départ de la mission intérieure; soit enfin par leurs traités, leurs hymnes et leurs cantiques. Le mouvement méthodiste en Amérique, commencé par les deux Wesley en Geor-gie, fut surtout continué par Whitefield dans les 6 voyages missionnaires qu'il y fit entre 1738 et 1770; mais la première congrégation régulière s'ouvrit sous l'influence directe de Wesley, à New-York 1766, et fut fondée par un prédicateur laïque de ses disciples. De nombreuses communautés suivirent, en Pensylvanie, Mary-land, etc., mais sans rapports les unes avec les autres, jusqu'à ce que, après la guerre d'indépendance 1784, Wesley leur envoya, comme on l'a vu, le Dr Coke comme surintendant pour les organiser et les réunir en une seule Église, ce qui eut lieu la même année dans l'assemblée des prédicateurs laïques de Baltimore. La plupart des méthodistes américains ont conservé l'organisation épiscopale et le titre d'évêque, équivalent à celui de surintendant; Coke fut le premier qui le prit, d'accord avec Wesley et La Fléchère. Ils ont aussi adopté certaines formes ou procédés imaginés par Whitefield pour agir sur la sensibilité nerveuse et sur l'homme extérieur: les camp-meetings, ou réunions en plein champ, les protracted-meetings, ou réunions qui durent plusieurs jours, les bancs d'angoisse pour les auditeurs travaillés et ébranlés, et ils ont obtenu ainsi des réveils, revivais, et des conversions. Sans doute ces résultats n'ont pas toujours duré; c'est un inconvénient qui se rencontre avec toutes les méthodes et dans toutes les églises. Wesley leur donna aussi une liturgie, ou Gommon prayer book revisé, et réduisit à 25 les 39 articles de la Conf. de foi anglicane, mais la liberté du culte et la spontanéité de la prière l'emportèrent en général et ôtèrent une partie de leur importance à ces essais partiels de réforme. Au point de vue de la doctrine, les wesleyens rejettent le dogme de la prédestination comme conduisant à l'antinomianisme, et ils enseignent, ce qu'on leur reproche surtout, que le chrétien, par le travail de la sanctification, peut arriver à la perfection, en vertu de 1 Jean 3, 9. Matt. 5, 48. Il est probable qu'il règne sur cette question, comme sur tant d'autre9, un malentendu résultant de définitions défectueuses et entretenu par obstination de la part de quel-ques-uns, par amour de la discussion et par exagération de la part de ses adversaires. Le nombre des méthodistes est d'environ 24 millions, en comptant les élèves des écoles, soit; aux États-Unis, l'Égl. méthodiste épiscopale, 1,800,000; l'Égl. méth. épisc. du sud 843,000; l'Égl. méth. africaine 400,000; l'Égl. m. protestante, 114,000. En Angleterre, Irlande, etc., 507,598 membres, avec 27,000 pasteurs et prédicateurs locaux. Au Canada on distingue: l'Égl. méth. canadienne, l'Égl. méth. épiscopale, les méthodistes primitifs et les chrétiens bibliques, qui viennent de s'unir en un,seul corps ecclésiastique, avec un total de 170 mille membres effectifs. Les missions wesleyennes sont nombreuses et florissantes; les plus anciennes sont celles des Indes occidentales, de l'Océanie, du Cap et de la Côte d'Or, — v. Cook. Rostan, surtout Matt. Lelièvre, John Wesley, sa Vie et son œuvre, nouv. éd. Paris 1883, M. Edm. Schérer appelle le méthodisme « un mouvement religieux qui a changé la face de l'Angleterre, » et M. Ch. de Rémusat, qui l'appelle une renaissance de la Réformation* lui attribue une influence indirecte beaucoup plus considérable que ne le seraient les effets immédiats de la prédication de ses pasteurs et de ses missionnaires.

 

MÉTHODIUS lo surnommé Eubulius, successivement év. d'Olympe, de Patara en Lycie el de Tyr; on sait peu de chose de sa vie; Eusèbe et Socrate le désignent comme un adversaire décidé d'Origène, dont il combat la doctrine sur la résurrection et la préexistence de l'âme. Exilé par les intrigues des ariens, il subit le martyre sous Maximin 312. Épiphane nous a conservé quelques fragments de ses écrits sur la Résurrection et sur la Création. On a encore de lui un Éloge de la virginité en forme de dialogue, et un poème de 10,000 vers contre Porphyre. Il a écrit un Traité sur le libre arbitre, mais celui qu'on possède sous son nom n'est pas de lui, non plus que 2 homélies, une Révélation et une Chronique.

2° Méthodius, ou Mèthud, v. Cyrille, et Bulgares.

 

MÉTROPHAiNES Critopoulos, théol. grec, né à Bérée, élevé dans un des cotivents du mont Athos, fut nommé fort jeune hiéromonaque (secrétaire-chancelier) de Cyrille Lucar. Celui-ci l'envoya compléter ses études à Oxford, auprès de l'archev. Abbot, 1616, puis en 1621 jusqu'en 1626, dans les univ. évangélique»de l'Allemagne. Après avoir enseigné le grec à Venise quelques années, il fut à son retour nommé patr. d'Alexandrie, f après 1640. Pendant son séjour à Helmstâdt 1625, il avait écrit un Exposé de la doctr. de l'Égl. grecque et de ses principales coutumes, qui fut trad. en latin par Hornejus, Helmstâdt 1661; la tendance générale en est évançélique.

 

METROPOLITAIN, archevêque ayant comme suffragants plusieurs évêques sous ses ordres. Une église métropolitaine est la cathédrale d'un archevêché.

 

METZ, Divodurum, l'ancien chef-lieu des Médiomatrices, a eu très anciennement des évêques, dont la légende raconte qu'ils ont obtenu par leurs prières des résultats merveilleux lors des invasions des Germains et des Huns. Leur histoire a été écrite vers 783 ou 791, sur l'ordre de Charlemagne, par Paul le diacre, mais elle est défectueuse. Parmi ces évêques on remarque saint Arnulph, 614, que l'on croit être la souche de la maison carlovingienne; Chro-degang, qui imposa à son clergé une règle imitée de celle de saint Benoît et le soumit à la vie commune; Angilram 768-791, chapelain de Charlemagne, à qui l'on attribue les capitulaires qui portent son nom; Drogo 823-835, le S^e fils de Charlemagne qui s'occupa du chant sacré et fonda l'école de Metz. L'évêché relevait de Trêves, et continua d'en dépendre, même après les traités de Cambrai 1656 et de Westphalie 1648. Quant à la Réformation, v. Lorraine.

 

METZ, Christian, v. Inspirés.

 

MEXIQUE. Aussitôt après la conquête de ce pays par Cortez, les congrég. cathol. entreprirent la conversion des Indiens. Ce furent d'abord les franciscains 1522, puis les dominicains 1526, en 1572 les jésuites. Comme dans toute l'Amérique espagnole, il ne fut question naturellement que d'une conversion extérieure et les vieilles idoles furent plus d'une fois utilisées pour le nouveau culte, dont l'éclat rehaussé d'or, de pierreries et de riches tapis, était calculé pour frapper les imaginations. Un clergé sans instruction, souvent sans mœurs, mais dévoré d'avarice et d'ambition, n'eut bientôt plus d'autre souci que d'opprimer et d'exploiter les pauvres propriétaires du pays; le mal s'aggrava par les ambitions rivales des différents ordres, ainsi que par la jalousie qui ne cessa d'exister entre le clergé régulier et le clergé seculier. Les bons évêques, tels que Pa-lafox, furent une exception, et leurs récils donnent une triste idée de l'état de la religion dans les provinces qui leur étaient soumises; la perception d'énormes impôts était le plus clair de l'administration ecclésiastique. L'organisation actuelle date du bref papal de 1851; elle comprend un archevêché et onze évêchés, ainsi que d# nombreux couvents. Le pape s'étant prononcé en 1826 contre la révolution et contre l'indépendance du Mexique qui venait de secouer le joug espagnol, les relations avec la curie romaine furent entièrement interrompues et ne se renouèrent qu'en 1837. Dès lors, et dans toutes les révolutions qui suivirent, l'intérêt du clergé joua un rôle capital; il s'agissait pour les uns de lui arracher sa puissance, pour lui de la défendre et de la conserver. Jusqu'en 1861 il possédait près de la moitié de la propriété foncière, et ses revenus étaient de 50 °/o plus considérables que tous ceux du gouvernement réunis. À cette époque le triomphe du parti libéral changea la situation. Le président Juarez sécularisa les biens ecclésiastiques, supprima les couvents et proclama pour tous la liberté de conscience qui jusqu'alors n'existait que pour les étrangers seuls. Les évêques récalcitrants furent exilés. Une église cathol. nationale se fonda sous la direction d'un évêque libéral, et compta bientôt des martyrs. Plusieurs missions protestantes ouvrirent aussi des églises, et le fanatisme local, attisé par des prêtres, amena des démolitions de temples, des assassinats et des exécutions de pasteurs et d'êvangé-listes. La parti clérical conservait encore une grande puissance. Il avait à sa tête l'archev. Al-monte, qui réussit à organiser la fameuse campagne du Mexique de 1861-1862, avec l'empire éphémère de Maximilien. Le clergé abandonna le malheureux empereur dès qu'il vit que celui-ci ne voulait pas être un instrument docile entre ses mains pour lui rendre ses propriétés et ses privilèges. Dès lors, et surtout depuis le congrès de 1873 qui décréta l'expulsion des jésuites et confirma les mesures de Juarès, le protestantisme a recommencé son œuvre; il compte auj. 60 paroisses, avec 40 pasteurs et évangé-listes, et un évêque à Mexico.

 

MEYER lo Henri-Aug.-Guill. né à Gotha

10 janv. 1800, étudia à Iéna, et fut, après plusieurs autres postes, appelé comme conseiller ecclésiastique, premier pasteur et surintendant à Hanovre 1848. Démissionnaire en 1865 pour cause de santé, il se retira à Gôttingue et se livra à des travaux littéraires. Il fut membre de plusieurs commissions importantes, entre autres de la conférence de Halle chargée de reviser la version de Luther. Son principal ouvrage est un Comment, critique et exégétique du N. T., commencé en 1832. Il a publié aussi en 1829 une édition des Livres symboliques de l'Égl. luthérienne.

2<> Jean-Frédéric (de), né à Francfort 12 sept. 1772, étudia à Gottingue le droit, la philos, et l'histoire, à Leipzig les beaux-arts, et remplit plusieurs fonctions civiles et administratives, jusqu'au moment où l'invasion française mit lin à ses travaux 1802. Il se rendit alors de Mannheim à Francfort s/M., et il y fut successivement nommé conseiller administratif, juge, sénateur, syndic, premier bourgmestre et député à la diète. Erlangen en 1821 le nomma docteur en théol. f 1849. Il était arrivé par ses propres recherches du rationalisme au christianisme positif. Ses principaux travaux sont une version revisée de Luther, avec Notes explicatives, encore très appréciée et digne de l'être, 1819, 1823, 1855; des Explications bibliques 1812, une Étude sur le monde des esprits 1810, la Clé de l'Apocalypse 1833, et surtout ses Lettres sur les Vérités supérieures dans leurs rapports avec le magnétisme, 1818-1832, 11 livraisons.

11 a aussi fait une Étude sur la Jetzira, ou la Cabale juive.

 

MEYFART, on Mayfart, Jean-Matthieu, né à Iéna 1590, fils d'un pasteur de la Thuringe. Après avoir commencé à Gotha, il étudia à Iéna et à Wittenberg la philos., l'histoire et la théologie 1611. Nommé en 1616 prof, au Casimi-rianum de Cobourg, il passa en 1533 à Erfurt, d'abord comme prof, de théol., puis comme recteur, pasteur et doyen, f 1642. Il a écrit en latin quelques ouvrages de controverse et de polémique, contre les jésuites et contre les sophistes; et en allemand plusieurs études sur les Derniers temps: la Dernière trompette, la So-dome infernale, la Jérusalem céleste, etc. On lui sait gré d'avoir un des premiers élevé h voix contre les procès de sorcellerie, dont il a dénoncé l'infamie et les abus. Il s'est occupé enfin d'une réforme dans les études universitaires, et du relèvement de la vie religieuse dans l'Égl. et chez les pasteurs. S'il n'a pas exercé une influence bien durable, il a cependant frayé la voie aux travaux et à l'action de Spener.

 

MEZZOFANTE, Gaspard-Joseph, né à Bologne 17 sept. 1774, fils d'un pauvre ébéniste, put étudier, grâces aux bontés de Rospighi, supérieur des pères de l'oratoire, et fut ordonné prêtre 1797. Son remarquable talent pour les langues se révéla à l'hôpital de Bologne, lorsqu'il eut à s'occuper des soldats blessés ou malades de diverses nationalités. Il apprenait plus ou moins leur langue en les soignant, et finit par savoir, dit-on, 62 langues et même les dialectes de plusieurs d'entre elles. Nommé en 1804 prof, de grec et de latin à l'univ. de Bologne, il perdit sa place parce qu'il refusa de prêter serment k Napoléon, mais il fut rétabli par Pie VII, nommé bibliothécaire de l'université, et plusieurs fois recteur. Grégoire XVI l'appela à Home, et le fit successivement prélat domestique, chanoine de Saint-Pierre, et en 1838 car dinal; en cette qualité il fut membre des congrégations de la propagande, de l'index, des rites. de l'examen des évêques, et préfet de la rongrég. des études (ministre de l'instruction publique), f mars 1849. Remarquable par la pureté de ses mœurs et par sa facilité pour les langues, il n'était ni un savant ni même un linguiste dans le sens scientifique du mot. Il n'a laissé aucun écrit.

 

MICHAELIS 1° Jean-Henri, né 26 juill. 1668 a Klettenberg, comté de Hohenstein, voué d'abord au commerce, se tourna ensuite vers la théol. et la philos, et s'adonna spécialement k l'étude des langues orientales. Il professa d'abord l'hébreu à Leipzig, puis à Halle le grec, le chai-déen, l'hébreu, le syriaque et l'arabe. En 1698 il se rendit à Francfort pour y étudier l'éthiopien sous la direction de Ludolf et fut nommé prof, de grec dans cette université. Rappelé à Halle comme inspecteur de la biblioth., il fut également nommé prof, de théol., doyen et directeur du séminaire, + 1738. 11 avait fondé avec Francke le collège théol. oriental, plus important au point de vue des langues qu'au point de vue théol. proprement dit. Sa tendance était opposée à celle de Spener, plus sobrement religieuse, critique plutôt que mystique. Il a publié un travail sur les accents hébreux, un Comment. sur Ésaïe, une étude sur l'Ecclés., une Bible hébr. annotée, etc.

2o Chrétien-Bénédict, son neveu, né k Elrich, Hohenstein, 26 janv. 1680, théol. et orientaliste, bon exégète, prof, à Halle, f 20 fév. 1762. Auteur d'un traité sur les variantes du N. T.

3o Jean-David, fils du précédent, le plus célèbre de la famille. Né à Halle 27 févr. 1717, il étudia dans la maison des orphelins, visita l'Angleterre et la Hollande, et fut nommé prof, de philos, k Gottingue en 1745; en 1750 il fut chargé des langues orientales. En 1751 il fonda avec son ami, le grand Haller, l'Acad. des sciences dont il fut bientôt le directeur. De 1753 à 1770 il rédigea la Revue scientifique publiée par cette Société, et la Biblioth. orientale et exégétique. Depuis 1761 il fut le directeur, non salarié, du séminaire philosophique. Nommé conseiller impérial en 1785, conseiller intime du ministre de la justice, il f 22 août 1791. Savant distingué il a travaillé à expliquer l'hébreu par les analogies des autres langues orientales et il a rendu d'éminents services à l'interprétation des Écritures. Sa piété s'est ressentie jusqu'à la fin de la bonne influence de Halle. Comme théol. il sert de transition entre l'orthodoxie et le rationalisme, mais tourne quelquefois au vulgaire. Ses principaux ouvrages sont: sa Gramm. chaldéenne, le Droit mosaïque (trad. librement par Cellérier), l'Introduction au N. T. (trad. en français par Chenevière), l'Introd. à l'A. T., inachevée, et quelques travaux philosophiques.

4° Jean-Daniel, son fils, prof, à GOttingue, attaché à l'orthodoxie, mais plutôt intellectuellement que par le cœur. Il lui manquait une conviction vivante, et la manière dont il défendit le christianisme, en s'arrêtant à une foule de petites difficultés, le compromettait plus qu'il ne le servait.

 

MICHEL lo v. Cérularius. 2<> v. Scot. 3® emp. d'Orient, sous la régence de sa mèreThéodora, qui négligea son éducation. Livré à tous les vices et mal entouré, dès qu'il fut majeur il éloi -gna de la cour les meilleurs conseillers, et fit enfermer dans un couvent 857 ses 3 sœurs et sa mère, qui f 867.

 

MICHËLADE (la), soulèvement populaire qui eut lieu à Nîmes le 30 sept. 1567, jour de la Saint-Michel, et où les huguenots, furieux des persécutions qu'ils avaient souffertes, se vengèrent en massacrant les principaux chefs du parti catholique. D'après Ménard il y eut 80 victimes, parmi lesquelles figurent le consul Gui Rochette; Jean Quatrebar, prieur des augustins; le vicaire général Jean de Pabéran, etc. L'év. Bernard d'Elbène échappa. Les religion-naires ne frappèrent que leurs ennemis, et ne touchèrent ni aux femmes, ni aux cathol. inoffensifs. Le Consistoire intervint énergiquement, mais en vain; il était débordé. 11 n'en fut pas moins compromis. Le parlement de Toulouse condamna plus de cent personnes à mort par contumace; 4 périrent sur l'échafaud.

 

MICHEL-ANGE, Buonarotti, né 1474 au château de Caprèse, Toscane; f 1563. Ce puissant génie, fils d'un habile sculpteur, fut placé comme apprenti chez Dominique et Ghirlan-dajo, et les quitta à 15 ans les ayant déjà dépassés, Laurent de Médicis se fit son protecteur et lui assigna un logement dans son palais. Quand le protecteur mourut, l'artiste avait sa réputation faite; son Bacchus était un chef-d'œuvre que Raphaël attribuait, à cause de sa perfection, à Phidias ou à Praxitèle. Serviable et bon pour les petits, M.-A. ne sut jamais fléchir devant les grands, bien qu'il ait en quelque sorte passé sa vie à leur service. Il a eu l'occasion de voir bien des papes, et malgré son respect pour leur autorité, il a touj. traité avec eux d'égal à égal, jaloux de ses droits d'artiste et de sa dignité d'homme libre. Le belliqueux Jules II, le somptueux et gros Léon X, le belge Adrien VI qui n'entendait rien aux beaux-arts, Clément VII, Paul IV et Pie IV l'ont vu à l'œuvre; tous ils ont cru pouvoir lui donner des ordres, mais ils n'en ont rien obtenu que ce qu'il voulait bien leur accorder. C'est surtout avec Jules II que ces rapports de l'artiste furent caractéristiques. C'est lui qui l'avait appelé et fixé à Rome; il le faisait travailler, mais ne lui payait pas même le marbre qu'il faisait venir de Carrare. Un jour le sculpteur lui ayant demandé une audieuce, et le pape en colère la lui ayant refusée, Michel-Ange partit brusquement pour Florence et n'en revint qu'après que Jules eut envoyé courriers sur courriers, brefs, promesses, menaces; encore fallut-il que le pape fît la moitié du chemin et vînt jusqu'à Bologne à la rencontre de celui qu'il avait offensé. Jules II avait commandé à Michel-Ange un tombeau somptueux; cette idée fut abandonnée après que le sculpteur eut fait seulement l'une des 40 statues qui devaient lui servir d'ornement; mais cette statue c'est le Moïse.

C'est à la cour de Jules II, que Michel-Ange apprit à mépriser l'humanité, dont il voyait de près les faiblesses, les bassesses et les tromperies. Le cardinal Bramante, désirant pousser un jeune parent qu'il avait (Raphaël), et jaloux de la gloire du sculpteur florentin, conseilla à Jules II de faire peindre par Michel-Ange les voûtes de la chapelle de Sixte IV. C'était briser sa carrière; Bramante le pensait, du moins; il savait que Michel-Ange était sculpteur et architecte et qu'il ne s'était plus occupé de peinture depuis son apprentissage; il savait, en outre, que la peinture d'une voûte est toujours une œuvre difficile. Mais le génie de Buonarotti l'inspira, et ce qui était une épreuve devint pour lui l'occasion du plus éclatant triomphe. En vain, l'on multiplia sous ses pas toutes les difficultés; les échafaudages étaient mal faits; les couleurs n'étaient pas solides, le mortier moisissait. Michel-Ange résolut de tout recommencer et de tout faire par lui-même, menuiserie, chaux, couleurs, etc. Il y travailla nuit et jour, tombant parfois de sommeil et s'assoupissant sur ses échafauds, jusqu'à ce qu'au bout de vingt mois, la première partie de son œuvre étant terminée, Jules II voulut à toute force la présenter à la foule. Ce fut un immense succès. La second** partie de la voûte fut achevée en 1512; le tout avait pris quatre ans. Jules II trouvait qu'il manquait un peu d'or a ces figures. « Ce sont des saints que j'ai voulu peindre, > lui répondit ironiquement Michel-Ange.

La seule énumération des œuvres de ce grand maître prend 39 pages du livre de M. Charles Clément, et Michelet en consacre plus de cent a l'examen des fresques du Jugement dernier, dont la pensée mystérieuse, mais certainement douloureuse, n'a pas encore trouvé son interprète.

Michel-Ange vécut toujours solitaire; il eut sans doute beaucoup d'amis, mais ses affections les plus vives s'étaient, après la mort de son père, concentrées sur le fidèle Urbino qui 1* servait depuis le siège de Florence. Quand il le perdit, 1556, il put écrire en toute sincérité: « La majeure partie de moi-même Ta déjà suivi, » et, plus tard: « Je n'ai plus aucune idée qui ne soit empreinte de la mort. »

Il ne connut jamais l'amour dans le sens vulgaire de ce mot. Une fois, en 1538 il aima; il avait 63 ans; celle qu'il aimait, c'était la belle Vittoria Colonna, âgée de 48 ans et veuve depuis 13 ans; il lui donna toute son âme, sans cesser un instant d'être artiste; c'est pour elle qu'il fit la Descente de croix, Christ et la Samaritaine, et le Crucifiement. Cet attachement dura neuf années. Vittoria f 1547. Michel-Ange avait 73 ans quand il la perdit; il était fou de douleur; il lui baisa la main et regretta jusqu'à la fin de n'avoir pas osé l'embrasser sur le front.

Cependant, sa carrière était loin d'être finie; il lui restait à terminer Saint-Pierre avant de mourir; il avait 80 ans quand il fit les plans de la merveilleuse coupole qui le domine, et il dut. comme dans sa jeunesse, lutter contre des intrigues sans cesse renaissantes qui menaçaient de lui enlever sa gloire et son travail. « Vous n'avez qu'à donner de l'argent et à écarter les fripons, dit-il brusquement au cardinal Marcello qui l'accablait d'observations; quant à la bâtisse, c'est mon affaire. » Saintement jaloux de Brunelleschi, l'architecte de Sainte-Marie-des-Fleurs, de Florence, il devait le dépasser en hardiesse et n'en resta pas moins son ardent admirateur; il était trop grand pour être jaloux. A la fois architecte, sculpteur, ingénieur, diplomate, militaire, peintre et poète, il plane dans le ciel de la Renaissance comme un aigle solitaire. unissant dans sa personne toutes lesgran-deurs et tous les contrastes, frère de Dante et disciple de Savonarole. Il avait trop d'élévation dans l'âme ponr n'être pas profondément religieux; mais on se demande quelle était sa religion. Il n'a fait aucun acte qui permette de le classer; au moment où il vivait, en Italie surtout, les questions se posaient, mais n'étaient pas résolues; la transition était dans les esprits comme dans les faits; il y avait un travail des intelligences, et plus que personne Michel-Ange était homme à vivre de sa vie propre. De même que Vittoria ne voulait entendre que t la voix puissante de Jésus, et ne brûler que de l'amour céleste, » lui-même, dans ses poésies et dans ses lettres, ne tient pas un autre langage que celui des hommes de la Réforme. Il pleure son frère, « mort sans les secours religieux que l'Église ordonne; mais il a eu une bonne contrition et cela suffit pour son salut. » Il pleure son père, mais il n'est pas question du purgatoire: « La grâce divine, le sacrifice de J.-C. peuvent seuls obtenir le salut. » • Je t'appelle, Seigneur, je t'invoque toi seul. » « La foi est le don par excellence. » Des déclarations semblables abondent dans ses Rimes, et le placent incontestablement au nombre de ceux qui ont subi l'influence réformatrice du 16m« siècle. Ses mœurs, sa vie, son caractère témoignent de sa foi positive; il travaillait la Bible à la main. Les papes, qu'il met en enfer dans son Jugement dernier, prouvent d'un autre côté qu'il ne se faisait aucune illusion sur leur sainteté; peut-être les avait-il vus de trop près.

 

MIDDLETON, Conyers, théol. anglais, né 1683 à Richmond, étudia et devint docteur à Cambridge, et en 1723 bibliothécaire, f 1760. II appartenait à la tendance libérale, nia la présence des dons miraculeux dans l'Église, eut avec l'év. Warburton, de Glocester, une discussion qui n'aboutit pas, et détourna Bentley de publier son édition critique du N. T. Il a publié des Lettres sur Rome; Libres recherches sur le don des miracles; Examen d'un discours de Sherlock sur les prophéties, et une Vie de Cicéron, très estimée.

 

MIDRASCH, auplur. Midraschim, de l'hébreu darasch. chercher, pénétrer; commentaires libres et allégoriques des livres de la Bible. C'était un des 4 modes d'interprétation de l'Écriture employés simultanément dans la synagogue au temps d'Esdras; on distinguait les Halachoth, règles, ordonnances, et les Hagadoth, ou traditions, plus fantaisistes, plus goûtées, mais quelquefois exagérées et ne faisant pas autorité. Dans le sens le plus général on appelle Midraschim les livres de cette catégorie écrits jusqu'au tt®e siècle; dans un seus plus restreint, ceux des au 5»e siècle, v. Franck, la Kabbala.

 

MIES, Jacques (de), v. Jacobel.

 

MILÈVE. ville de Numidie, où se sont tenus deux conciles: l'un en 402 (le 7°* africain), qui fixa le rang des évêques d'après la date de leur ordination; les Actes en sont conservés; le second, plus important, en 416, auquel assista Augustin, et qui, sous l'influence du conc. de Carthage, condamna le pélagianisme qu'avait admis le synode de Diospolis 415, et demanda à Innocent 1er d'approuver ses décrets. Son opposition à la doctrine pélagienne s'appuie sur l'Écriture et spécialement sur la 6ne demande de l'Oraison dominicale et sur la doctrine du baptême. Sa lettre circulaire est conservée dans les recueils de Mansi et de Hardouin, mais les 27 canons que lui attribue la collection du faux Isidore appartiennent à d'autres conciles.

 

MILICZ, ou Militsch, Jean, un des précurseurs de Jean Huss, d'une famille noble de Moravie, homme savant, pieux et zélé. La date de sa naissance est inconnue. Il étudia à Prague la théol. et le droit. En 1350 il est chanoine et archidiacre. En 1360 il est vice-chancelier de l'emp. Charles IV et l'accompagne dans ses voyages. Mais bientôt il renonce à ses dignités mondaines pour se consacrer à son ministère. Prédicateur de l'égl. du château, ou se moque d'abord de son accent, mais il finit par attirer la foule et doit souvent prêcher jusqu'à 3 fois par jour, tant en tchèque qu'en allemand. Il attaque les vices du clergé et les désordres de l'Église; il annonce l'arrivée prochaine de l'Antéchrist et va jusqu'à désigner sous ce nom l'empereur présent à ce sermon. Il ne ménage personne et ne craint rien. A sa voix trois cents femmes de mauvaise vie qui vivaient en commun se convertissent, et leur maison de péché devient l'église de Marie-Madelaine; il déclare publiquement qu'il aime mieux ces pécheresses repentantes que tant d'autres qui vivent dans les couvents sous le nom de nonnes. Il fonda à Prague une école de théol. pour l'étude de la Bible. Ses nombreux ennemis réussissent à le faire jeter en prison, mais Tarchev. doit le relâcher à cause du peuple. Il se rend à Rome 1367 où il pense trouver Urbain V, mais l'inquisition le fait arrêter; le pape, arrivant d'Avignon 1368 lui rend la liberté, le traite avec bienveillance et le renvoie à Prague parfaitement disculpé. Dénoncé de nouveau en 1369 par les ordres mendiants, qui lui reprochent des exagérations, il est condamné par une bulle de Grégoire XI; il en appelle, et après avoir prêché en Silésie. en Moravie et en Pologne, il se rend à Avignon, où il est d'abord bien reçu par le pape. Mais avant que son procès soit achevé, il f 29 juin 1374.11 avait évangélisé le diocèse de Gnesen. Son élève le plus distingué fut Matthias de Janow, ou Janowski. Il a laissé 2 recueils de Sermons, un Libellus de Anti-ehristo, et un traité sur la Croix et les troubles de l'Église.

 

MILL. Jean, né 16io, Dr théol. à Oxford, f 23 juin 1707, connu surtout par son édition critique du N. T. grec, avec introductions, notes et variantes, dont il compte 30.000. niais très peu d'importantes. C'est presque le premier essai un p*m sûr d'une étude critique du N. T. Il était recteur d'Edmunds College, Oxford.

 

MILNER lo Joseph, né à Leeds 2 janv. 1744, fut envoyé à Cambridge par quelques amis, après la mort de son père, étudia la philologie et la théol., et fut nomméàHulh d'abord comme directeur du collège latin et prédicateur du soir, puis comme premier pasteur, + 15 nov. 1797. Vers 1770 il tourna au méthodisme, dont il embrassa les principes, tout en restant membre de l'Égl. établie, et il ne cessa de compter parmi r s hommes les plus décidés du parti évangélique. C'est dans ce sens qu'il publia quelques petits écrits; mais son principal ouvrage est son Hist. de l'Église, qu'il ne put continuer que jusqu'à la Réformation et qui fut poursuivie par son frère. Il divise l'histoire par siècles, ce qui n'est pas toujours heureux, et donne à la partie biographique une grande importance, aux dépens du développement des dogmes, de la discipline et de la constitution ecclésiastique. Il a surtout en vue l'édification.

2» I-aac, son frère, né 11 janv. 1730. Interrompu dans ses études par la mort de son père, il fut mis en apprentissage dans une fabrique de tissus, mais son frère ayant été placé à Hull, il put recommencer ses travaux, et en donnant des leçons comme sous-maître, il se prépara pour l'université. En 1788 il fut nommé président de Queens College: en 1793 prof, de mathématiques, en 1798 de sciences naturelles. En même temps il avait poursuivi ses études de théol. jusqu'au doctorat. En 1791 il fut élu doyen du chapitre de Carliste et prêcha souvent dans la cathédrale. Il défendit énergiqueinent les Sociétés bibliques contre les attaques du Dr Marsh. Il partageait les vues et les principes de son frère. Après la mort de celui-ci il publia les vol. 4 et 5 de son Hist. de l'Égl. allant jusqu'à la diète d'Augsbourg. Il espérait achever cet ouvrage, mais il f 1820. Trad. en français. Il a aussi laissé des Sermons, et une Vie de son fr. Joseph.

 

MILTIADE 1° écrivain chrétien, qui doit avoir vécu sous Marc-Aurèle et sous Commode. Il combattit les montanistes, les païens et les juifs. Eusèbe et Jérôme le mentionnent avec éloge, mais ses écrits sont perdus.

2° Miltiade ou Melchiade, pape 311-314. Africain d'origine. Combattit les donatistes et rétablit Cécilien, év. d> Carthage. C'est sous son pontificat mais en dehors de son influence.

que Constantin se déclara chrétien: Constantin fit don à l'Égl. de Rome du palais de Latraii. Miltiade interdit les jeûnes du jeudi et du dimanche comme un reste de paganisme. Deux traditions, l'une qui le fait martyr, l'autre qui lui reproche d'avoir livré les saints livres pendant les persécutions, sont apocryphes. Vip par saint Bernard; on n'en connaît qu'un exemplaire, à la biblioth. de Cambridge.

 

MILTITZ, Charles (de), d'une famille noble de Saxe, chambellan du pape, notaire apostolique, fut envoyé en Allemagne comme nonce en

1518 pour essayer d'aplanir le différend avec Luther. Il s'y prit très habilement, et obtint du moine en révolte une lettre au pape, lettre d'humiliation, Altenburg 1519, et la rédaction d'un écrit (Leçons sur quelques articles, févr. 15191, dans lequel il exprimait tout son respect pour l'Égl. romaine et s'engageait à s'abstenir d* toute attaque ultérieure, à condilion que ses adversaires en fissent autant. Miltitz se prononça si rudement contre Tetzel et son commerce d'indulgences, que celui-ci en tomba malade et mourut. L'intervention agressive du Dr Eck ranima les hostilités; Luther se vit dégagé de l'engagement qu'il avait pris; les conférences de Liebenwerda et de Lichtenberg,

1519 et 1520, échouèrent, Luther ayant appris à se méfier de la « finesse italienne. » Il se décida cependant à tenter encore une fois les voies de la conciliation, et sous l'influence de Miltitz il adressa au pape son Sermon ou Discours sur la liberté d'un homme chrétien. Eck y répondit en publiant la bulle d'excommunication. Miltitz n'avait plus rien à faire; de Rome il revint en Allemagne où il possédait des canonicats à Mayence, Trêves et Meissen, et f 1529.

 

MILTON, John, né à Londres 9 déc. 1608, était fils d'un notaire. Étudiant à Cambridge 1625-1632, il se distinguait par sa force de caractère et son indépendance d'esprit. Ne pouvant se résoudre à prêter le serment dit de religion, ni se soumettre au système épiscopal, il renonça à la carrière ecclés. à laquelle il avait été d'abord destiné et se retira dans une propriété que son père possédait dans le comte de Buckingham. Il se fit connaître par un certain nombre d'hymnes, en latin et en anglais, qui préparèrent sa réputation, et à l'âge de 30 ans il visita la France, la Suisse et l'Italie, reçu partout comme un hôte distingué. Dès son retour, en 1640, il se jeta dans le parti de la révolution, qu'il servit surtout comme écrivain, réclamant tout à la fois les libertés politiques et religieuses. Il écrivit contre le système épis-copal 1641, sur le Mariage et le Divorce, l'Education, la Liberté de la presse (Areopagetiea) que déjà Cromwell menaçait. Secrétaire du Protecteur. il conserva toute son indépendance. En 1649 il essaya de justifier l'exécution de Charles 1er, et publia divers autres écrits dans le sens de la révolution, ainsi l'Iconoclaste, le briseur d'images, en réponse à VIcon Basilikè, le portrail du roi, qu'on attribue au roi lui-même; il écrivit encore Deux défenses du peuple anglais. En 1652 il devint aveugle et sans espoir de guérison. Il se consacra dés lors presque complètement à la littérature, fut arrêté comme régicide au retour des Stuarts, mais délivré au bout de 2 mois par l'influence de Davenant, et se retira dans la solitude où il vécut pauvre et oublié. C'est là qu'il composa, le dictant à sa femme et à ses filles, son Paradis perdu, ce chef (Fœuvre de la langue anglaise, qu'un libraire lui paya 30 livres 1665 et qui ne devint célèbre que 20 ans plus tard. En 1671 il publia le Paradis reconquis, inférieur au précédent. On a encore de lui une Logique, une Hist. d'Angleterre, un Dictionn. latin, un Traité de la vraie religion, etc. f 8 nov. 1674. Ses œuvres, louées par Addison, ont été maintes fois réimpr. et sont trad. dans presque toutes les langues; en français par Saint-Maur, L. Racine, Château-hriand, Leroy, Dellile, etc. Trois fois marié, il ne fut pas heureux en ménage, et de ses 4 filles Débora fut la seule qui le comprit et charma sa solitude.

 

MINIMES, v. François 2°.

 

MINORITES, ou Mineurs, v. François lo.

 

MINUTIUS, Marcus-Félix, avocat' à Rome, né en Afrique vers le commencement du 3me siècle, après Marc-Aurèle et Tertullien; connu par son Apologie du Christianisme intitulée Octavius. Se promenant au bord de la mer av^c deux amis, le chrétien Octavius Januarius et le païen Cecilius Natalis, il assiste à la discussion qu'ils ont entamée sur la religion. Cecilius doute de la certitude en matière religieuse, fait valoir *es raisons en faveur du paganisme et reproduit los arguments de son temps contre la religion chrétienne. Octavius le réfute, et ils finissent par prendre Minutins pour arbitre. Cecilius convaincu cède et s'écrie: Nous sommes tous deux victorieux. On ne possède de ce traité qu'un seul mss., qui fut donné par Léon X à François 1er. Faustus Sabaeus l'a publié 1543 comme le 8me livre d'Arnobe Adr. Hœreses, parce qu'il se trouvait à la suite sur le même mss.; c'est F. Baudouin qui a constaté l'erreur, Heidelberg 1560.

 

MIRAMION, Marie Bonneau (de Rubelle Beau-harnais, dame de), née à Paris 1629, + 1696, fonda vers 1630 un refuge pour les femmes débauchées qu'on y enfermait, et la maison de Sainte-Pélagie pour celles qui s'y retiraient volontairement. En 1661 elle fonda une société de

12 jeunes filles, dite la Sainte-Famille, pour soigner les malades et instruire la jeunesse. En 1663 cette association se réunit à une autre semblable, formée en 1636 par Mad. Blosset, suivant la règle des génovéfains. Les deux réunies prirent le nom de miramionnes, et laissèrent leur nom à un port de Paris, celui du Mail. Cet ordre philanthropique possède encore quelques maisons.

 

MIRANDOLE, Jean Pic (comte de La), 3e fils de Jean-François, né 1463, comptait déjà à dix ans parmi les plus grands orateurs et poètes de son temps. Laissant là les intérêts mondains, il se voua tout entier à l'étude. A 14 ans il étudiait à Bologne le droit canon. Toujours plus attiré par la philos, et la théol., il visita pendant 7 ans les principales univ. de France et d'Italie, et s'adonna spécialement à l'étude de la Cabale, que Ficin enseignait à Florence; il étudia aussi pour cela l'hébreu et le chaldéen. A 23 ans il vint à Rome annonçant qu'il soutiendrait une thèse De omni re scibili et publia une série de 900 propositions relatives à la théol., à la philos, et aux mathématiques; mais les opposants, au lieu d'entrer en lice, dénoncèrent 13 de ces propositions comme hérétiques et les firent condamner par Innocent VIII. Cela coupait court à la discussion. Il partit pour la France, après avoir adressé au pape un mémoire justificatif. Rappelé à Rome pour donner de plus amples explications, il reçut en route l'avis de s'arrêter quelque temps à Florence, oti il trouva des protecteurs à la cour de Laurent de Médicis. et fut reçu membre de l'acad. platonicienne. Bientôt, reconnaissant l'impossibilité d'arriver à tout connaître, et désespéré de se sentir si faible, il se tourna complètement vers la religion, renonça à sa part d'héritage, distribua ses biens aux pauvres, et se décida d'entrer dans un couvent dès qu'il aurait achevé les travaux qu'il avait commencés. Il f 1494, à peine âgé de 31 ans. Ses 900 thèses forment un vol. fol* sous le titre de: Conclusions philos., cabalistiques et théol. Rome 1486. On a encore do lui son Apologie, des Disputationes contre l'astrologie divinatrice; des Lettres, son Heptaplus, qui est une explication du récit mosaïque do la création; un Essai sur Dieu, De Ente et Uno, où il cherche à concilier les philos. d'Aristote et de Platon, etc. Vie, par son neveu Jean-François de la Mirandole f 1533, dont les œuvres ont été publ. à Bâle 1573, sons le titre de: Pici utriusque Opéra.

 

MISCHNA(de l'hébr. shana, répéter), portion du Talmud qui reproduit les proscriptions orales que Moïse donna aux anciens sur la montagne, à côté de la loi écrite, et auxquelles le N. T. fait allusion sous le nom de Traditions des anciens. Elle est considérée presque à l'égal de la loi et comme venant directement de Dieu. On avait essayé à diverses reprises, et avec plus ou moins de bonheur, de rassembler par écrit ces nombreux renseignements et prescriptions, lorsque vers l'an 220 le grand rabbin Juda-le-Saint les recueillit et leur donna leur forme définitive, en laquelle ils nous sont parvenus. La Mischna renferme en 6 chapitres et 63 traités, des directions sur lo les semailles, l'agriculture et la part des prêtres; 2o le sabbat et les fêtes; 3o les femmes, le mariage et les vœux; 4o les droits de propriété, le code civil et le code pénal; 5° les prêtres, les sacrifices, etc.; 6° le pur et l'impur. De même que la Mischna était sortie de l'étude de la loi, la Mischna travaillée dans les écoles des rabbins donna naissance à la Guemara, q. v. Écrite en hébreu, elle a été trad. en latin et en allemand. Amsterdam 1698-1703, 6 vol. fol. Onolzbach (Anspach) 1760-1762. 3 vol. grand 4o.

 

MISERERE (aie pitié), chant d'église, d'après les Ps. 51 et 57, employé surtout dans la semaine sainte ou dans les temps d'épreuve et d'humiliation. Outre la mélodie grégorienne, il a été l'objet de plusieurs compositions musicales, dont la plus célèbre est celle de Gregorio Allegri (f 1640), qui se chante à Rome toutes les années la semaine sainte par les choristes de la chapelle papale.

 

MISÉRICORDE (Fr. de la), v. Frères llo.

 

MISERICORDIAS DOMINI, nom ecclésiastique du 2<* dimanche après Pâques, ainsi nommé des premières paroles de l'antiphonie de l'introït, Ps. 89, 1.

 

MISHNA, v. Mischna.

 

MISSEL, ou livre de messe; il renferme le rituel à l'usage des prêtres, les chants et les prières, soit générales, soit spéciales, pour les différentes circonstances, fêtes, dates de l'année, etc. A côté du missel romain, plusieurs Églises ont eu longtemps leurs missels particuliers, mais ils tendent de plus en plus à disparaître dans la grande uniformité du culte.

 

MISSI DOMLNICI (envoyés seigneuriaux). C'étaient, sous les carlovingiens, les délégués spéciaux que le roi envoyait chaque année, revêtus de pleins pouvoirs, pour inspecter dans les provinces les comtes, les ducs, les évêques; pour surveiller leur administration, et pour juger les cas d'appel réservés ou non. Les capi-tulaires déterminent leur compétence, mais elle était si étendue qu'elle touchait à l'arbitraire et qu'ils étaient extrêmement redoutés. Cette institution baissa peu à peu, à mesure que grandit la puissance des seigneurs.

 

MISSION (prêtres de la), nom qu'on donne dans l'Égl. cathol. aux prêtres qui se forment dans divers instituts, avec le but spécial de se consacrer à la mission, soit intérieure, soit étrangère. On distingue ceux qui appartiennent à des ordres religieux proprement dits, tels que les barnabites, les rédemptoristes, les jésuites, les théatins, et ceux qui relèvent de congrégations spéciales, commes celles de l'Oratoire, de Saint-Vincent de Paule, du Saint-Sacrement, de Jésus et Marie, ou des Eudistes; du Saint-Esprit, les séminaristes de Saint-Nicolas de Chardonnet, etc. Les prêtres de la mission de France, organisés par l'abbé Legris-Du val, supprimés en 1830. puis rétablis, travaillent surtout contre le protestantisme.

 

MISSIONS. On range sous ce titre général toutes les œuvres qui ont pour objet l'avancement du règne de Dieu, la propagation de l'Évangile, la conversion des incrédules et des infidèles, le réveil de la piété et l'affermissement des faibles. Le nombre en est aussi considérable que leur mode d'action est varié. On distiugue:

lo La mission intérieure. Chez les catholiques on appelle de ce nom tout particulièrement une série d'appels à la pénitence, une suite de prédications énergiques et vigoureuses faites dan* une paroisse, pour secouer les tièdes et les indifférents en leur montrant à grands traits les dangers du péché et les avantages de la foi, en opposant aux erreurs de la Réforme les beautés du catholicisme, en glorifiant l'Église, en engageant les hommes à se confesser et en les enrôlant, si possible, en confréries. Ces missious. rehaussées par les pompes exceptionnelles du culte, sont ordinairement organisées par l'év. du diocèse. Parmi les orateurs qui ont su faire vibrer avec le plus de talent la fibre populaire, on a remarqué surtout les jésuites, les rédemptoristes et les capucins; leur éloquence n'est pas touj. sérieuse, ni bien profonde, et la plupart de ces discours ne supporteraient pas l'impression ni pour le fond ni pour la forme; ils fourmillent d'anecdotes et de mots pittoresques; ils font de l'effet, au moins pour le moment, mais il est rare qu'ils touchent le cœur et qu'ils produisent une repentance véritable. Ils ont cependant l'avantage d'introduire un élément nouveau dans le culte catholique, et un prédicateur pieux et vraiment évangélique peut en profiter pour faire du bien. Souvent ces missions se terminent par l'octroi d'indulgences pour ceux qui y assistent et par l'érection d'une croix comme-inorative.

2° Dans l'Église protestante, où la prédication est plus régulière et le cuite public mieux organisé au point de vue de l'enseignement, le besoin d'une mission intérieure ne s'est pas fait sentir aussitôt. Ce n'est que peu à peu, lorsque la vie religieuse s est relâchée, quand la doctrine elle-même a été abandonnée ou faussée, quand les paroisses se sont refroidies ou endormies, que l'on a compris la nécessité de réagir du dehors et par des moyens nouveaux conti* le relâchement produit par une orthodoxie inorte ou par l'abandon de la foi. Presque au même moment les chrétiens d'Allemagne, d'Angleterre, de France, de Suède et de Suisse sentirent qu'il ne suffisait pas d'entretenir des stations missionnaires à l'étranger, et qu'il y avait également un travail à faire au sein de la chrétienté elle-même. Aussitôt, et en Allemagne depuis le Kirchentag de 1848, de nombreuses associations se formèrent, se rattachant directement ou indirectement à la Mission intérieure et se classant sous les chefs principaux que voici: lo Établissements pour le soulagement des pauvres et des malades: Kaiserswerth, Strasbourg, Saint-Loup, les Diaconesses de Paris, les œuvres du Dr Fliedner, etc. 2° Sociétés pour le relèvement de l'enfance malheureuse, vicieuse et abandonnée, orphelinats, asiles, écoles déguenillées, maisons d'éducation, de discipline; colonies agricoles, etc. Ainsi la Rauhehaus du Dr Wichern à Hambourg, Sérix, Dombresson, La Force, Sainte-Foy, etc. 3<> Associations pour la visite des pauvres et des malades à domicile: Amélie Sieveking, etc. 4° Associations et réunions en vue d'un but social, philanthropique, moral et religieux: Unions chrétiennes de jeunes gens, sociétés de tempérance, salles du dimanche, sociétés du dimanche, Soc. de Gustave-Adolphe, etc. 5<> Publications religieuses, traités, bibliothèques populaires, lectures, conférences, etc. Ces diverses œuvres, quelquefois réunies et centralisées, le plus souvent indépendantes les unes des autres, toujours tonnes, ne peuvent être rangées dans une catégorie de la mission intérieure que si elles ont un caractère réellement religieux et confessionnel, qui seul les distingue d'autres établissements de philanthropie ou d'utilité publique également respectables. La fondation de ces œuvres est un des devoirs de l'Égl. chrétienne dans son ensemble, mais souvent, surtout quand l'Eglise oublie ou méconnaît sa tâche, ce sont des individus isolés qui en prennent l'initiative. En France et dans les pays de langue française, le mot de mission intérieure s'emploie surtout dans un sens restreint pour désigner soit l'évangélisation des protestants disséminés, la desserte provisoire des paroisses sans pasteurs, soit dans les villes la recherche et l'évangélisation de ceux qui n'ont aucune espèce de culte ni de religion.

Les missions étrangères. L'évangélisation du monde, commandée par Jésus-Christ à ses disciples, Matt. 28, 19. se fit d'abord par les apôtres, par les églises; nous en avons les premiers récits dans le livre des Actes. Mais depuis leurs disciples immédiats, et jusqu'aux jours de Constantin, on ne voit pas qu'aucune organisation régulière ait présidé à cette grande œuvre de la propagation de la foi. Si l'Évangile, touj.

persécuté, gagna de proche en proche, ce fut surtout par suite des rapports commerciaux, par les marchands, les corps de métiers, les voyageurs, les prisonniers, les soldats. C'est notamment ainsi que furent évangélisées les Gaules, l'Espagne, l'Afrique, la Bretagne, les pays du Danube. Une fois que Constantin eut fait du christianisme la religion de l'État, il fut facile de l'imposer aux masses, et l'Égl. ne se fit aucun scrupule d'en appeler au bras séculier pour seconder ses efforts en vue de la conversion des païens; de même qu'il n'y avait qu'un empire, il ne fallait qu'une religion: un roi, une foi. Cette idée fatale produisit sans doute quelques bons fruits, qu'on ne doit pas méconnaître; mais elle eut le grand tort d'introduire dans l'Égl. les procédés, les mœurs, les usages, les formes du paganisme et de préparer une décadence qui ne pouvait tarder. Charlemagne, Othon et d'autres travaillèrent consciencieusement à convertir les Saxons, les Vendes et les peuples du nord au moyen de mesures militaires, dont les effets étaient immédiats, mais ne pouvaient durer. L'ordre des bénédictins obtint des résultats meilleurs. Par sa science et son activité, il fut le vrai missionnaire du 6me et du 7me siècle; ses couvents étaient non seulement des foyers de lumière, mais des écoles de missions, et il en sortit en grand nombre des hommes qui consacrèrent leur vie à prêcher l'Évang. dans les contrées barbares et païennes. Les prémontrés suivirent et travaillèrent parmi les Slaves et jusqu'en Silésie. Au 13ra<* siècle parurent les franciscains, qui dès 1214 envoyèrent leurs missionnaires chez les musulmans des côtes de l'Afrique et en Mongolie. En même temps les dominicains s'employaient à la conversion des juifs et des maures en Espagne. Aux uns et aux autres la découverte de l'Amérique offrit un nouveau champ de travail et ils s'y jetèrent avec une ardeur qu'on peut appeler féroce.

A. Ces missions, déjà catholiques depuis le 13m« siècle, le devinrent plus exclusivement encore lorsque les jésuites se présentèrent à leur tour dans l'arène; mais il ne s'agissait plus tant de porter l'Évangile aux païens et de leur prêcher le christianisme que de leur imposer le catholicisme et de les rattacher au siège de Rome. Ils eurent des missionnaires zélés et distingués, mais qui travaillèrent avec trop de précipitation et se préoccupèrent trop exclusivement de conquêtes matérielles et de succès extérieurs. L'Inde, la Chine, le Japon, l'Éthiopie, le Paraguay parurent un moment gagnés par ces hommes pleins de dévouement et d'activité, mais leur œuvre manquait d'une base solide; ils avaient baptisé des milliers de païens sans s'inquiéter de savoir s'ils croyaient à l'Évangile, si même ils le connaissaient. Les rivalités des différents ordres, leur cupidité, leur ambition, leur rapacilé lirent le reste. Beaucoup d'autres ordres entrèrent dans le champ des missions à la suite des jésuites; lazaristes, ré-ilemptoristes, capucins, augustins, carmélites se distinguèrent tour à tour par le même zèle, les mêmes procédés et les mêmes succès passagers, immédiatement compromis par un mélange de politique et de mercantilisme. Rome comprit que dans l'intérêt des missions il convenait d'assurer l'unité de l'œuvre en lui donnant une direction centrale, et Grégoire XV, ou plutôt son neveu le cardinal Ludovisi, fonda en 1622 la congrég. de la Propagande qui dès lors se chargea seule du gouvernement du monde non catholique. C'est elle qui tixe le champ d'une mission et qui désigne les hommes appelés à le travailler sous la conduite d'un préfet apostolique; quand l'œuvre paraît s'affermir, on la place sous la direction d'un vicaire apostolique, revêtu de tous les pouvoirs et souvent du titre honorifique d'un évêque, avec la faculté de faire pour le culte et pour la discipline telles concessions locales qui pourraient être réclamées. Enfin, si l'Église est suffisamment nombreuse, elle linit par être constituée en évêché régulier et par être rattachée à l'organisme hiérarchique. Au point de vue de la propagande, les pays hérétiques et schismatiques sont traités sur le même pied que les pays païens. La Propagande compte comme séminaires missionnaires, outre ses propres collèges qu'elle a fondés à Rome, et les collèges de certains ordres, minorités, capucins, observants, quelques grands instituts créés à l'étranger; le plus considérable est celui de Picpus, fondé à Paris en 1805 dans la rue de ce nom, et reconnu par le pape en 1817. Il est entretenu, comme les autres, par des dons volontaires que recueillent des sociétés spécialement organisées pour cela, notamment la Société de Lyon pour la propagation de la foi, créée en 1822; l'association de Louis en Bavière, celle de Leopold en Autriche, etc.

B. Missions protestante*. Avant de songer à l'évangèlisation des païens, le protestantisme dut attendre d'en avoir fini avec les luttes qui éclatèrent à son berceau et présidèrent à son développement. L'établissement de quelques colonies au delà des mers fut pour la Hollande, le Danemark, l'Angleterre, l'Allemagne, et même un peu la France, l'occasiou d'y envoyer des chapelains coloniaux, et plusieurs de ceux-ci, mis en contact avec les indigènes, indiens ou nègres, en profitèrent pour leur annoncer l'Évangile et furent amenés même à se consacrer tout entiers à cette œuvre, mais comme simples individus isolés et par pur dévouement; ainsi John Eliiot 1603-1690, la famille Mayhew 1642-1803, les deux Brainerd 1743-1747, le comte Ernest de Wells, etc. La première mission organise»* date de la fin du 17'«e siècle et prit naissant on Angleterre. Cromwell avait eu déjà l'idée de fonder une propagande, à l'instar des jésuites, pour l'évangèlisation du monde entier, mais il avait dû y renoncer. Après la chute des Stuart il y eut un réveil de la vie religieuse, et par conséquent un sentiment plus \if des devoirs de la chrétienté envers les païens. En même temps le nombre des colonies anglaises augmentait, et leurs rapports avec les peuples idolâtres devenaient de plus en plus fréquents et plus réguliers. Une première société se forma en 1698 pour l'avancement de la connaissance chrétienne (for promoting Christian Knowledge): elle était destinée surtout à l'œuvre intérieure. En 1701 Guillaume III autorisa la fondation d'une société, issue de la précédente, pour la propagation de l'évang. dans les autres parties du monde, qui fut la première société des missions proprement dite et le point de départ de toutes celles qui se formèrent plus tard sur h même base de l'activité libre. En 1714 nouvelle fondation, organisée par Frédéric IV pour la mission des Indes orientales commencee en 1705 par Ziogenbalg; c'est un collège missionnaire à Copenhague; Égédé en Groenland, Wesl en Laponie travaillèrent sous sa direction. C'est aussi là que Zinzendorf conçut l'idée de la mission aux Indes occidentales, qui débuta 1732 par l'envoi de Nitschmann et Dober. Les mor* ves regardent la mission comme un des devoirs de l'Égl. et en font un département de son activité; c'est la conférence qui en règle les détails, d'accord avec les associations volontaires qui lui fournissent les subsides nécessaires. Il en est de même de l'Égl. d'Écosse, de l'Égl presbytérienne officielle aussi bien que de l'Égl. libre, ainsi que de l'Égl. méthodiste. Depuis le commencement de ce siècle il s'est formé en Angleterre, en Amérique, en Allemagne, dans presque tous les pays protestants, en Suisse, en France même, une quantité de sociétés missionnaires, qui ont pour ainsi dire couvert le monde de leurs stations, sans parler des hommes nombreux et dévoués qui se sont consacrés à cette œuvre par leur propre initiative* Marsdeo, Gutzlaff, Groves, Livingstone, etc. Divers principes ont présidé à l'organisation des missions, suivant qu'elles relevaient des puissances eur<> péennes ou qu'elles étaient indépendantes; suivant aussi les systèmes religieux des égl. et des missionnaires. C'est ainsi qu'à Ceylan le gouvernement hollandais, pour s'assurer un appm contre les entreprises portugaises, accordait des droits politiques aux indigènes baptisés. Pour un motif analogue, c.-à-d. pour maintenir intacte sa prépondérance, la Compagnie angl. des Indes orientales a contrecarré de toutes ses forces les travaux des missionnaires et a tout fait pour empêcher la conversion des indigènes, jusqu'au moment où succombant sous le poids de ses fautes, elle a vu éclore la formidable insurrection qui l'a balayée et qui a fait passer son pouvoir à la reine d'Angleterre devenue impératrice des Indes. A Geylan le nombre des chrétiens diminua quand l'île passa sous la domination britannique, parce que les droits civils cessèrent d'être attachés à la qualité de baptisés, et dans la plupart des colonies hollandaises l'œuvre de l evangélisation dut être reprise à nouveau. Les protestants tirent la même expérience qu'avaient faite les catholiques, et ils comprirent que les conversions en masse, qui font de l'effet dans un rapport, ne représentent que rarement un succès réel et sérieux. On avait cru d'abord pouvoir aller de la civilisation à l'Évangile; on a iini par voir que c'est la marche inverse qui est la vraie, et que c'est l'Évangile qui civilise. Les sectes les plus étroites, les églises les plus fermées, les wesleyens, les mo-raves, les baptistes, les dissidents en général, ceux que l'on désigne plus spécialement sous le nom de piétistes, ont eu les missions les plus prospères, et il est à remarquer que s'ils ont envoyé des docteurs et des ministres, ils ont envoyé aussi des ouvriers chretiens, menuisiers, cordonniers, serruriers ou autres, qui honoraient l'Évangile par leur vie, en même temps qu'ils se rendaient utiles par leur industrie. Un grand nombre de ces derniers ne recevaient aucun salaire et subvenaient à leurs besoins par leur travail. C'était en particulier le cas des ouvriers envoyés par Gossner de Berlin, et par la maison de Chrishona près de Bâle. L'œuvre des missions a été attaquée très vivement par plusieurs, et même par des théologiens, soit comme inutile, soit comme mal conçue et mal dirigée. Mais leurs objections tombent surtout sur les missions patronnées par les États, ou poursuivies par des églises dans un esprit trop formaliste. Les rivalités des États, qui voyaient dans la religion des colonies ou des comptoirs un moyen d'intluence, ont plusieurs fois entravé le travail des missionnaires, p. ex. à Taïti et à Madagascar, et l'irréligion des blancs, boërs, colons, marchands ou marins, a compromis sou-\ent une œuvre en pleine prospérité. V. Hist. ' des Missions, de Barth, trad. par Descombaz; Journal des Missions de Paris; id. de Neuchà-tel; le Mutions-Magazin de Bâle, etc. La mission chez les juifs date à peu près de la même époque que celle chez les païens; les moraves et la maison de Halle ont commencé; en 1728 s'ouvrit à Halle llnstitut juif de Callenberg pour Finstruction de missionnaires, qui furent envoyés surtout dans l'est de l'Europe el en orient. Le terrain était difficile et les résultats furent peu satisfaisants. En 1809 une nouvelle société se forma à Londres pour le même objet; elle publia des traités et des N. T. en hébreu, ouvrit des écoles et envoya de nombreux agents missionnaires. D'autres sociétés, en Hollande, en Allemagne, en Suisse, travaillèrent à la même œuvre, non sans succès. — Prêtres de la Mission, v. Lazaristes.

Une statistique de l'œuvre des missions, des 75 ou 80 sociétés qui s'en occupent, des stations, du nombre des missionnaires, des succès obtenus, des indigènes convertis, est à peu près impossible, et formerait un volume; il en est de même de la bibliographie du sujet. Bornons-nous à quelques indications sur les sociétés de la France et de la Suisse. La Soc. de Paris, fondée en 1824, et dirigée successivement par MM. Galland, Grandpierre et Casalis. compte auj. environ 16 stations, 20 missionnaires. 2600 communiants et plus de 3000 élèves dans ses écoles du sud de l'Afrique, au pays des Bas-soutos; elle compte entreprendre prochainement une mission au nord du Zambèze. Elle a en outre 2 missionn. au Sénégal, et 4 à Taïti. Son budget annuel dépasse 220,000 fr. La Soc. de Bàle, qui date de 1815, a 62 missionn. aux Indes et en Chine, 2 en Perse, et plus de 600 catéchistes. Son budget atteint près d'un million. Une modeste société fondée à Lausanne vers 1870 par l'Égl. libre, et dirigée auj. par l'union des'égl. libres de la Suisse romande, a commencé une mission au sud de l'Afrique, au nord du Transvaal, dans les Spelunken, et après quelques années de pénibles épreuves, elle est entrée dans une voie de prospérité relative.

 

MITRE, ornement de tête et coiffure des évêques; simple bandeau ou turban chez les anciens, elle s'est compliquée au lime siècle de deux cornes, qui représentent les deux testaments, et elle constitue auj. l'un des signes caractéristiques de la dignité épiscopale. Le chapeau rouge des cardinaux date d'Innocent IV, 1245.

 

MODESTE lo patr. de Jérusalem 616-626, qui releva en 614 l'égl. du Saint-Sépulcre, détruite par les Perses sous Chosroës II. — 2° prêtre envoyé par l'év. Virgile de Salzbourg, pour évangéliser la Carinthie, à la demande du duc Chettomar. Il f au bout de peu de temps, vers 784, et ses compagnons retournèrent à Salzbourg. On l'honore comme l'apôtre de la Carinthie.

 

MOEHLER, Jean-Adam, un des théol. catholiques les plus savants et les plus sérieux de notre temps. Né 6 mai 1796 à Igersheim, près Mergentheim, Wurtemberg, il était lils de l'aubergiste et maire du village. Il étudia la philos. et la théol. à Ellwangen et à Tubingue.

Ordonné prêtre en 1819, il remplit pendant un an les fonctions de vicaire, puis fut nommé prof, suppléant, et en 1828 prof, titulaire de théol. k Tubingue, pour l'enseignement de l'hist. ecclésiastique, de la patristique et du droit canon. Après avoir refusé plusieurs appels, k Fribourg, Breslau et Bonn, il accepta en 1836 une vocation qui lui fut adressée de Munich, mais sa santé ne lui permit pas d'y faire un long séjour. Le roi, pour reconnaître ses services, le nomma doyen du chapitre de Wtirz-bourg; il f 12 avril 1838, peu de semaines après y être arrivé. Il a écrit: L'unité de l'Église, principe du catholicisme, 1825; Atha-nase-le-Grand, ou l'Égl. au temps des luttes ariennes, 1827; un traité sur le Célibat des prêtres, qu'il regarde comme la condition absolue de l'indépendance de l'Église, et plusieurs ouvrages publiés après sa mort par Dtfllinger. Son principal travail, celui qui a fait sa réputation, est sa Symbolique, ou Exposé des différences dogmatiques des cathol. et des protestants, d'après les documents officiels de leur foi, Mayence 1832, souvent réimprimé. Il oppose la Réformation (qu'il admet justifiable sur certains points) à un catholicisme idéalisé; il regarde le protestantisme comme un immense erreur, et s'attache à le réfuter. Son livre obtint un tel succès que les catholiques en vinrent k croire que le protestantisme succomberait à ce coup fatal. Un grand nombre de théol. lui répondirent: Baur, Marheineeke, Nitzsch, etc.

 

MŒRL, Marie (de), jeune et pieuse visionnaire du Tyrol, née en 1811, toujours maladive, qui vers la fin de 1833 présenta sur son front, ses mains et ses pieds, les stigmates du Sauveur, saignant le jeudi et le vendredi. Les pèlerins accoururent en foule pour la voir. Elle se retira au couvent des franciscaines de Kal-tern, où elle f 1868.

 

MOERLIN lo Joachim, né 1514 à Wittenberg où son père, qui fut plus tard pasteur en Fran-conie, enseignait la métaphysique. Il étudia la théol. k Marbourg, Constance et Wittenberg. Pieux et bien doué, mais d'un caractère inquiet et violent, il se fit renvoyer de plusieurs paroisses où l'avait appelé la faveur des princes, An-stadt, GOttingue, Kônigsberg, Brunswick, etc. Aussi rigoureux sur la discipline que raide sur la doctrine, luthérien fougueux, il combattit avec dureté sur divers points Osiander, Flacius et leurs adhérents. Il finit par être nommé év. de Samland, où il f 1571. Outre ses ouvrages de controverse, il a écrit un catéchisme, une étude sur la Vocation pastorale, et quelques traités d'édification.

2o Maximilien son frère, né 1516, élève de Luther et de Mélanchthon, desservit également plusieurs paroisses et se montra partout ardent luthérien. Il fit échouer le colloque de Worms 1557, et soutint en 1560 une dispute publique à Heidelberg, contre Boquin, lorsque le prince électeur Frédéric, du Palatinat, décida d'introduire dans ses États la confession réformée. Il combattit Flacius et fit proscrire ses partisan?. Renvoyé lui-même en 1569, il fut rappelé à Cobourg en 1572. f 1584. Auteur d'un travail sur la résurrection de Lazare, de Notes sur des extraits d'Eusèbe, et d'un Écrit de consolation relatif aux petits enfants qui n'ont pu recevoir le baptême.

 

MOFFAT, Robert, né 1795 en Écosse, d'abord mousse, puis jardinier, se rendit à Manchester pour y travailler de son état, non sans avoir promis à sa mère de lire la Bible matin et soir. Une séance missionnaire du rév. W. Roby décida de son avenir. La même année 1816, et presque sans autre préparation, il fut envoyé au sud de l'Afrique, plutôt comme aide. Par ses talents naturels et par son énergie, il s'appropria le hollandais, le namaquois et le sé-chuana, convertit le chef Africaner et exerça sur Moselekatsi une salutaire influence. Il s'établit ensuite à Kuruman, ou Latakou 1821, où il passa une cinquantaine d'années. Mettant la main k tout, il était l'homme qu'il fallait au milieu de cette peuplade. Les miss, français y trouvèrent l'hospitalité avant d'aller à Motito. C'était pour tous un ami fidèle et un bon conseiller. Il a traduit la Bible en séchuana. Beau-père des miss. Frédoux et Livingstone, qui l'ont précédé dans la tombe, il n'a quitté son poste qu'après plus de 50 années, et de retour en Angleterre il a continué de servir la cause des missions, f 1883 à 88 ans. Il a écrit l'hist. des 23 premières années de son séjour en Afrique; trad. par Horace Monod.

 

MÔGILAS, Pierre, métropolitain de Kiew, t 1647; auteur d'une conf. orthodoxe de la foi de l'Égl. catholique et apostolique d'Orient, c.-à-d. de l'Égl. grecque et russe. Cet ouvrage fut provoqué par les empiétements de l'Egl. latine dans la petite Russie et par la publication d'un catéchisme romain en polonais. Soumis d'abord à une conférence d'évêques réunis à Iassy, ce travail fut en partie remanié, puis approuvé. Pierre-le-Grand l'adopta comme conf. de l'Égl. russe, cependant il n'a jamais été reconnu officiellement comme livre symbolique. 11 se divise en trois parties, qui correspondent aux vertus théologales, et se termine par l'explication du symbole, de l'Oraison dominicale et des Dix commandements. Écrit sous forme de questionnaire, il maintient le chiffre sept des sacrements et la doctrine de la transsubstantiation. Il ne fait pas de controverse, et se borne à affirmer que la doctrine grecque est celle de l'Égl. primitive et des pères. Écrit d'abord en grec vulgaire, l'ouvrage parut à Amsterdam en 1662 et 1672, et fut trad. en russe en 1695, puis en allemand en 1727. On attribue aussi à Mogilas une liturgie grecque publ. en 1629.

 

MOLNES, v. Monachisme.

 

MOÏSE Chorenensis, surnommé le père des poètes ou des savants; théol. arménien du 5«*e siècle, neveu de Mesrob; né vers 370 à Khoren, il étudia 7 ans à Alexandrie, peut-être sous Cyrille, visita Rome, Athènes et Constantinople, et ne retourna qu'après la mort de son oncle en Arménie, où il fut nommé év. de Pakrévant. Pendant l'oppression des Perses et les persécutions des chrétiens, il se retira dans la solitude, f vers 487, plus que centenaire. Il a composé un grand nombre d'ouvrages, des hymnes, un Manuel de géographie, un Traité de rhétorique, des traductions, etc.; le principal est son Hist. des Arméniens, écrite vers 481 à la demande du prince Sahak, et qui va jusqu'à l'an 441.

 

MOLAI, ou Mole, v. Templiers.

 

MOLANUS (van der Meulen) lo théol. ca-thol. flamand, né à Lille 1533, prof, et doyen à Louvain, f 1585; auteur d'un traité sur le Culte des images et d'une dissertation sur la foi due aux hérétiques.

2° Gérard-Walter, théol. luthérien, né 23 oct. 1633 à Hameln, étudia sous Calixte à Helmstâdt, fut successivement prof, de mathématiques et de théol. à Rinteln, président du consistoire à Hanovre en 1674, et depuis 1677 abbé de Lokkum, avec la surintendance des égl. du duché de Lunebourg et du Hanovre; f 1722. II est connu par les efforts qu'il fit pour maintenir la paix entre les réformés et les luthériens, et surtout par la tentative qu'il fit, à la suggestion de l'év. Spinola, d'amener un rapprochement entre les protestants et les catholiques, 1683. Leibnitz le mit en rapports avec Bossuet. Ces négociations durèrent quelques années et donnèrent naissance à plusieurs pro jets et à divers écrits, mais elles furent complètement abandonnées en 1705. Les concessions qu'il avait faites, et l'aménité de sa controverse avaient fait courir le bruit qu'il penchait vers le catholicisme; il s'en défendit 1698 dans ses Nugœ venales. V. ses écrits dans les Œuvres de Bossuet, éd. Migue.

 

MOLINA, Louis, né 1535 à Cuenza, Nouvelle-Cas tille, entra à 18 ans dans l'ordre des jésuites et se distingua comme prof, de théol à Evora, Portugal, f 1600 à Madrid, On a de lui un Comment, sur la somme de saint Thomas, un Traité du droit et de la justice, et (son principal ouvrage) Liberi arbitrii Concordia, dans lequel il cherche à concilier la doctrine du libre arbitre avec celles de la grâce, de la providence, de la prescience, de la prédestination et de la réprobation, Lisbonne 1588, Anvers 1595, éd.

considérablement augmentée. Il a une tendance au semi-pélagianisme. Outre la science simple et la science libre, il admet en Dieu une science moyenne (média), par laquelle Dieu prévoit ce que chaque homme fera, usant de sa liberté et dans des circonstances déterminées. Il sait ainsi d'avance quels sont ceux qui feront usage de sa grâce et il la leur accorde pour leur salut parce qu'il sait qu'ils en profiteront. Les dominicains l'attaquèrent, ouvrirent à Valladolid une dispute publique qui n'aboutit pas, et dénoncèrent le livre à l'inquisition. Les jésuites prirent parti pour Molina. Clément VIII et Paul V évoquèrent la cause et ne se prononcèrent pas. Les jansénistes ravivèrent le débat que les papes avaient déclaré clos. Le système de Molina fut enseigné dans les écoles des jésuites, et plus tard modifié par Suarès et Vasquez sous le nom de con-gruisme.

 

MOLINOS, Michel (de), né le 21 déc. 1640? à Patalina, près Saragosse, prêtre et docteur en théol.; il se rendit à Rome vers 1669 ou 1670, et s'y fixa. Il acquit bientôt par sa piété une grande réputation comme directeur des consciences et fut admis dans l'intimité de plusieurs cardinaux; il jouit même de la faveur toute particulière d'Innocent XI. En 1675 il publia en italien un livre, le Guide spirituel, qui fut aussitôt trad. en plusieurs langues et qui obtint un tel succès qu'un jésuite, Paul Segnéri, ayant voulu le réfuter dans sa Concordia, faillit payer de sa vie son audace dans laquelle on ne vit que l'animosité d'un envieux. Molinos enseignait le quiétisme. Selon lui le but le plus élevé que puisse se proposer la piété, c'est le repos en Dieu, et l'on ne peut y arriver que par la vie contemplative et par la soumission complète de sa volonté à la volonté de Dieu. Pour cela les moyens à employer sont la prière, l'obéissance, la fréquente communion et la mortification intérieure. Tous les autres actes sont relégués à l'arrière-plan, même la prière en paroles qui peut distraire de la véritable prière en esprit. Le jésuitisme trouva dans ces propositions un principe diamétralement opposé au sien; il y trouva une attaque directe et riposta avec violence. L'écrit de Segnéri provoqua une enquête de la part de l'inquisition, mais Molinos fut libéré. Là-dessus les jésuites, par l'organe du p. La Chaise, intriguèrent auprès de Louis XIV et le décidèrent à faire au pape des représentations sur les dangers que le quiétisme faisait courir à l'Église. Le pape soumit de nouveau l'affaire à l'inquisition, et en 1685 Molinos fut arrêté et emprisonné, ainsi que son ami Pe-trucci. Sa correspondance fut saisie, plus de 2000 lettres furent examinées, et en moins de 2 ans, 200 personnes compromises furent enveloppées dans le même procès. Le 28 août 1667 le tribunal condamnait la doctrine de Molinos en général, et en particulier 68 propositions extraites de son Guide. Une bulle d'Innocent confirma cette sentence le 19 novembre. Molinos se soumit, et alla même jusqu'à se rétracter, ce qui s'explique par la nature quiétiste de son mysticisme. Il échappa ainsi au bûcher et vit sa peine commuée en celle d'une détention perpétuelle. Le pieux vieillard f dans sa prison 28 déc. 1697; en dépit de sa rétractation le nom d'hérétique fut inscrit sur son monument. La peur qu'on avait du quiétisme moliniste était si grande que, même avant sa condamnation, l'inquisition avait envoyé aux princes et aux évêques une circulaire pour les mettre en garde contre son invasion, avec l'indication de 19 propositions par lesquelles il était facile de constater sa présence. Le pape lui-même, non comme pape, mais comme simple particulier, comme Odescalchi (curieuse distinction), avait dû soumettre son orthodoxie aux délégués de l'inquisition. Les actes du procès ne furent jamais publiés. Quant aux 68 assertions condamnées, elles ne sont pas toutes dans Molinos, mais on a cru pouvoir les déduire de quelques-unes de ses maximes. Il est évident que certaines phrases peuvent donner lieu à de graves abus, et que le quiétisme présente des dangers; ainsi lorsqu'il dit qu'il ne faut pas s'arrêter trop longtemps à discuter si l'on fait bien ou mal. Mais il y a un sens moral qui donne à cette phrase sa vraie signification, et les jésuites n'ont pas le droit de se montrer si susceptibles sur les phrases à double entente. La pureté et la sainteté de la vie de Molinos le mettent d'ailleurs au-dessus de tout soupçon. Le quiétisme ne survécut pas longtemps à la condamnation qui avait frappé Molinos; il disparut bientôt des couvents de l'Italie où il avait pénétré, et le nuage qui menaçait les jésuites se dissipa. Le Guide a été trad. en latin et publié à Leipzig 1687 par Franke. v. aussi Pascal et Arnauld.

 

MOLLER, Henri, plus connu sous le nom de Henri de Ztitphen, du lieu de sa naissance, né 1488 en Hollande, d'une famille originaire d'Allemagne. Il entra à 16 ans dans l'ordre des au-gustins, visita en 1515 Wittenberg où Luther le distingua; en 1516 il fut nommé prieur du couvent de son ordre à Dordrecht. Ses tentatives de réforme échouèrent, et il dut quitter son couvent. Sous-prieur à Anvers, il échoua de même, et revint à Wittenberg pour y continuer ses études. Les progrès de la Réforme le ramenèrent en Hollande, où il déploya une grande activité. Arrêté par l'inquisition, il fut délivré par le peuple; se rendit à Brème, où l'autorité le pria de prêcher l'Évangile et où il fonda une église. Spreng étant venu d'Anvers, et Timann d'Amsterdam, pour continuer son œuvre, il accepta, malgré ses amis, l'appel qui lui fut adressé par le pasteur Nicolas Boje de Meldorf, pays des Dithmarses (Holstein). Les dominicains, après avoir inutilement essayé de le faire interdire, soulevèrent les paysans contre lui, et dans la nuit du 10 décembre il fut arrêté. Le lendemain un semblant de tribunal improvisé le condamna au feu comme hérétique, et une troupe avinée le traîna au bûcher en lui faisant subir en route mille mauvais traitements. Son martyre causa une vive sensation. Luther écrivit aux Brêmois une lettre de consolation; Mélanchthon célébra en vers sa mémoire. En 1830 un monument loi a été élevé au cimetière de Meldorf.

 

MOLLIO, Jean (di Montalcino), entra forl jeune chez les fr. mineurs et, comme Vergerio, laissa là les docteurs scolastiques pour se mettre à étudier la Bible. Prof, à Brescia, Milan, Pavie, et en 1533 à Bologne, il enseigna la théol. biblique et la justification par la foi, et il le fit avec tant de succès qu'il fut dénoncé à l'inquisition. Acquitté, mais avec défense d'exposer en public ses vues particulières, il ne tint pas compte de cette recommandation et fut obligé de quitter Bologne. Il se retira à Naples où il entra en relations avec Valdès. Vermigli et Ochino, qui achevèrent de l'éclairer, et il se prononça ouvertement pour la Réforme. Quand la persécution de 1542 fit fuir ses amis, il réussit à se cacher quelque temps, mais il finit par être arrêté pendant qu'il prêchait, et après une dure captivité dans les cachots de Rome, il fut pendu et brûlé, avec son ami Tisserando, le 5 sept. 1553, sur le campo de' Fiori.

MOMIER, expression grossière et de mauvais goût, employée pour la première fois à Genève et dans la Suisse romande, vers 1817, pour désigner les chrétiens évangéliques au mépris ou aux voies de fait de leurs compatriotes. Leurs exercices religieux étaient taxés de mômeries. Le mot lui-même viendrait, suivant les uns, de Momus, le dieu des facéties; selon d'autres, il se rattacherait au mot mahomier qui se trouve dans quelques écrivains du 15me siècle comme appellation injurieuse des renégats.

 

MONACHISME, Vie monacale. Dans les premiers temps de l'établissement du christianisme, la lutte et le martyre pouvaient suffire aux âmes ardentes qui brûlaient de se distinguer au service de leur maître. Mais même alors il y avait déjà des natures plus tranquilles, pénétrée* d'idées païennes sur la sainteté contemplative, qui confondaient le monde et le mal, la vie dn siècle et le péché, et qui pour mieux affirmer leur piété renonçaient à toutes les jouissances terrestres comme illégitimes, à la richesse, à la vie de famille, à l'étude. Il y en avait même, et il y en a toujours eu, qui, sans vie religieuse, ayant peu de besoins et peu d'ambition, n'ai* mant pas le travail, choisissaient volontiers nne carrière qui offrait un certain caractère de respectabilité, qui leur garantissait à peu près le nécessaire, ce qui les dispensait de toute occupation. Logeant où ils pouvaient, faisant ce qu'ils voulaient, circulant comme il leur plaisait, ils vivaient tantôt seuls, tantôt groupés selon leurs sympathies, tour à tour dans les déserts ou dans les villes. Quand les persécutions eurent cessé et que le christianisme eut refoulé le paganisme, un grand nombre de ceux qui brûlaient de se dévouer, n'ayant plus à combattre, crurent ne pouvoir mieux travailler à leur sanctification et à l'édification de l'Église qu'en renonçant au monde et à ses joies et en s'iinposant des privations volontaires. Le nombre des moines augmenta. Paul de Thèbes, vers 250, est le premier solitaire connu; Pacôme, vers 330, passe pour avoir fondé dans l'île de Tabennœ la première association de moines, le premier monastère ou couvent. Ce genre d'associations, tout à fait conforme au génie grec oriental, se répandit rapidement, et les prosélytes ne lui manquèrent pas; il y en eut de toute espèce, de bons et de mauvais. Leur influence ne fut pas grande, et c'est seulement dans la controverse des images qu'ils commencèrent à jouer un rôle, parce que celte question d'un ordre extérieur et matériel était tout à fait dans leurs goûts et qu'elle était à la portée de leur théologie. Les égarements de ce genre de vie ne tardèrent pas à se faire sentir; on eut les messaliens, les eu-chytes, les hésychastes du mont Athos; on eut les excès ascétiques des acémètes, des stylites et d'autres; on eut des circoncellions. Athanase importa en Occident le cénôbitisme oriental, qui fut bientôt un des facteurs les plus importants du développement du christianisme dans ces contrées, et qui au milieu de peuples encore païens créa autant de postes missionnaires qu'il fonda de couvents. Ces maisons étaient de véritables communes chrétiennes semées parmi les païens, foyers de lumières et boulevards de la foi, accaparant même l'autorité ecclésiastique jusqu'au moment où l'Égl. de Rome jugea bon de la revendiquer pour ses prêtres et ses évêques. Par les services qu'ils avaient rendus, les moines étaient devenus une corporation plus puissante que celle des prêtres dont la force principale consistait surtout dans le fait de leur ordination. Presque tous laïques d'abord, les moines se rapprochèrent peu à peu de l'état ecclésiastique par les privilèges qu'ils surent acquérir, de prêcher et de confesser, en même temps que les prêtres se rapprochèrent de la vie monacale par l'introduction du célibat et par leur constitution en chapitres. Mais le triomphe du monachisme fut son affranchissement successif de l'autorité des évêques, les couvents et leurs abbés ne relevant plus directement que du pape. Depuis qu'ils eurent obtenu le droit de prêcher et de confesser, ils l'emportèrent dans les paroisses, et par leurs missions ils reléguèrent au second rang les prêtres titulaires. Ce qui disposait les papes à étendre leurs prérogatives, c'est qu'ils trouvaient en eux des auxiliaires plus dévoués et plus actifs dans leurs luttes contre les princes temporels, que dans le clergé séculier trop enclin à prendre parti pour le roi ou pour l'empereur dont il dépendait. — Si dans le principe chacun pouvait se faire er-înile ou moine pour son propre compte, s'impo-sant à lui-même son mode de vivre, il était facile de prévoir les désordres qui ne manqueraient pas d'en résulter. Aussi l'on comprit de bonne heure le besoin de régler ces existences d'un nouveau genre que le christianisme n'avait pas prévues. Pacôme déjà crut devoir fixer par quelques règles, plutôt morales, ce qui regardait la direction du couvent, la surveillance et les occupations de ses membres. Basile, surnommé le père des moines, alla plus loin, et dans ses Regulœ (que Combéfis lui conteste, mais que Garnier lui attribue), il détermina ce qui concernait la vie extérieure, le vêtement, la nourriture, l'obéissance, l'emploi du temps des moines. C'est aussi lui, croit-on, qui posa le principe des trois grands vœux qui sont à la base de toute vie monacale: pauvreté, chasteté, obéissance. Cette règle de Basile fut généralement adoptée dans tout l'Orient, et gouverne encore les moines grecs, les nestoriens, les melchites, sans parler des basiliens de la Sicile et de l'Amérique. Elle put suffire aussi longtemps que le monachisme resta confiné en Orient; elle pouvait même recevoir, et reçut en effet quelques développements dans le sens d'une plus grande spiritualité; du temps de saint Jérôme la liberté resta grande, et Ton vit en Palestine, en Syrie et en Égypte des moines vivres religieusement, par groupes de 2 ou 3, sans qu'ils fussent liés par aucune règle précise, ainsi les sarabaïtes. Mais quand la vie conventuelle eut passé en Occident, on sentit vite la nécessité d'une organisation déterminée et d'une législation spéciale pour des hommès qui étaient sortis du monde sans cependant appartenir au clergé. Au lieu de se répandre de tous côtés et sans mesure, en gaspillant ses forces, on comprit qu'il fallait rattacher la vie ascétique à un centre commun, autorisé, l'Église, et à un ensemble de formes et de moyens d'actions, c.-à-d. à la vie commune. Ce ne fut pas chose facile, car la vie de couvent, avec ses privations matérielles, son recueillement, son isolement, son travail régulier, ne pouvait convenir aux premiers ascètes, un peu fanatiques, ni même à leurs successeurs immédiats. Un grand nombre d'entre eux, tels que les circoncellions, aimaient mieux courir le pays. Malgré les décrets de plusieurs synodes, le but ne fut guère atteint que vers l'an 800. On attribue à Cassien, fondateur d'un couvent à Marseille et auteur de 12 livres sur les Institutions des cénobites, la première organisation régulière de la vie conventuelle en Occident; mais ses règles sont encore tout imprégnées des traditions orientales, parfois puériles, souvent cruelles et contre nature. Toutefois les règles variaient d'un couvent à un autre; elles n'avaient encore rien de fixe, et quelquefois il suffisait du changement de l'abbé pour que la règle changeât dans un même couvent. L'unité n'existait pas, et n'était pas nécessaire. Avec Benoît de Nursie cet état de choses, qui commençait à présenter des inconvénients, cessa d'exister. Benoît mit fin à l'arbitraire et imposa à ses moines un ensemble de règles qu'ils durent accepter. Conciliant sur certains détails, simple et complet, son travail est sévère pour les choses essentielles, chasteté, sobriété, silence, humilité, soumission aux supérieurs. Il fut regardé omme un modèle, et grâce au besoin d'unité qui se faisait sentir dans l'Église, grâce à l'appui des papes, notamment des deux Grégoire, grâce à l'influence de Boniface, il était généralement adopté vers 800, comme la règle de saint Benoit. Cela n'empêcha pas Eupippius, Equitius, Cé-saire d'Arles, Colomban et d'autres, de proposer aussi pour leur entourage des règlements locaux, justifiés peut-être par des circonstances spéciales, mais dès le 12me siècle toute divergence a disparu. Notons aussi la règle de Fructuose, exigeant l'obéissance aveugle et une ponctualité mécanique, cette dernière qualité entre autres pour les familles assez nombreuses qui s'étaient réfugiées dans les cloîtres, notamment en Espagne, afin de se soustraire aux impôts et aux prestations militaires. On désigne sous le nom de Règle de saint Augustin une organisation non moins appréciée que celle de saint Benoit, et qui fut extraite de deux discours d'Augustin aux prêtres de son diocèse et de ses lettres aux religieuses d'Hippone. Sans avoir de caractère officiel, elle régissait déjà de son temps beaucoup d'ecclésiastiques et les distinguait du clergé séculier. Chrodegang de Metz vers 760 organisa son clergé sur des principes analogues, et Innocent IV au 13®e siècle institua une série de congrégations en leur donnant la règle de saint Augustin. Aujourd'hui c'est, avec quelques modifications, la même règle qui gouverne les pré-montrés, les augustins, les servîtes, les dominicains, les jésuites, les ursulines, les sœurs de la Miséricorde, celles de l'Annonciade, les salé-siennes, etc. Les franciscains ont un caractère beaucoup plus ascétique et insistent davantage sur la pauvreté et l'humilité, ainsi que sur les devoirs de la cure d'âme, de la prédication et du soin des malades. Comme on peut le penser, le relâchement des mœurs (et peut-être aussi le besoin de se faire une individualité distincte) exerça son influence sur l'application des règles et en provoqua soit l'adoucissement, soit an contraire l'observation rigoureuse; il en résulta même que certains ordres se divisèrent et qu'il y eut les stricts et les relâchés. C'est à partir du 10m® siècle, le monachisme étant bien constitué, qu'on voit apparaître surtout la création de nouveaux ordres, tous tendant à la perfection et cherchant à la réaliser par l'accomplissement de certains devoirs, parmi lesquels le renoncement au monde occupait la première place. En 910 c'est l'ordre de Cluny, en 1073 celui de Grammont, en 1018 les camaldules, en 1086 les chartreux, en 1096 l'ordre de Fontévrault, en 1098 les cisterciens, en 1118 les carmélites, sans parler des ordres militaires, tels que les chevaliers de Malte, les templiers, l'ordre teutonique, et de plusieurs sous-ordres moins importants. Mais à partir du 13m*siècle l'institution monacale prit une toute nouvelle importance par l'avènement des ordres dits mendiants, les franciscains et les dominicains, se jetant dans le monde, non plus pour réfléchir et prier, mais pour agir, pauvres et infatigables, et pour faire rentrer dans les esprits l'idée de l'Église comme institut religieux, quand depuis longtemps on ne voyait plus en elle qu'un instrument politique entre les mains des princes. Les dominicains, défenseurs de la foi, fondèrent l'inquisition; les franciscains communiquèrent au peuple le mysticisme de la foi et de la vie chrétienne telle qu'ils la comprenaient, et par la création des tertiaires ils mirent la piété monastique à la portée de tous les membres de l'Église. Fidèles serviteurs du saint-siège ils n'en contribuèrent pas moins à ébranler les bases du système ro* main, soit en faisant consister la piété dans la vie plutôt que dans les formes, soit en opposant leurs vertus simples et modestes au faste luxueux, à l'ignorance et à l'ambition des dignitaires de l'Église. Mais à leur tour ils se compromirent par leurs rivalités et leurs querelles intestines, non moins que par l'acharnement avec lequel ils proscrivirent tout ce qui pouvait être un développement de l'intelligence ou un progrès scientifique. Le mépris dans lequel ils étaient tombés au moment de la Réformation, avait déteint sur l'Église elle-même. Le conc. de Trente maintint les couvents, mais les réorganisa et les soumit à l'autorité épisco-pale, ce qui acheva de leur ôter le peu d'auréole qui leur restait. C'est à ce moment qu'apparurent les jésuites, résumant en eux-mêmes tout l'ancien monachisme, accaparant la cure d'âme, la prédication, l'enseignement à tous les degrés, la défense de la foi, les missions étrangères, et se chargeant par une morale à eux, tantôt sévère, tantôt relâchée, d'être les confesseurs des peuples et des princes. La plupart des congré-gâtions qui furent fondées dès lors se distinguent par leur caractère pratique ou philanthropique, les pères de l'Oratoire 1564, les ignorantins 1724, les frères et les sœurs de charité 1545 et 1633; les rédemptoristes missionnaires 1752, et c'est ce côté pratique qui a remis en honneur certains ordres et permis le rétablissement de leurs maisons, Mais il semble que l'institution ne puisse pas vivre de sa vie propre; il lui faut de la richesse, de l'influence; de là aux manœuvres et aux intrigues politiques il n'y a qu'un pas, et presque partout les couvents l'ont franchi. Notre siècle accepte de moins en moins le mélange du temporel et du spirituel; la sécularisation des couvents est devenue une des nécessités du temps présent; il y eut une époque où ils sauvèrent la société, aujourd'hui ils ne peuvent que compromettre la religion et la civilisation.

 

MONARCHIENS. L'hist. des dogmes comprend quelquefois sous cette désignation générale tous ceux qui, pour maintenir intacte la doctrine de l'unité de Dieu, s'éloignent de la doctrine de l'Église en ce qui concerne la personne de Jésus-Christ, aussi bien ceux qui nient sa divinité que ceux qui voient en lui le Père lui-même sous une forme et dans une manifestation différente. Les premiers regardent Jésus comme un homme que Dieu a revêtu de sa puissance; on les appelle à cause de cela Monar-chiens dynamiques; ainsi Théodote, Artémon, Béryll de Bostra, Paul de Samosate. Les autres ne voient aucune différence hypostatique entre le Père et le Fils; on les appelle hypostatiques, ou aussi patripassiens, puisque d'après eux le Père serait mort sur la croix; ainsi Praxeas, Noetus, Épigone, Cléomène, Sabellius.

 

MONGOLES. Ce peuple immense, qui forme à lui seul une des races principales du genre humain, et qui occupe une partie de la Chine, de l'Indoustan, de la Perse, de la Tartarie, du Turkestan et de l'Asie russe, se distingue par son teint jaunâtre, ses pommettes saillantes, son œil vif mais oblique, son nez large et aplati, son intelligence et sa férocité. Presque inconnu à l'Occident pendant des siècles, il se révéla tout à coup sous Gengiskan par les hordes qu'il déversa sur l'Europe et par la rapidité de ses conquêtes. C'est de ce moment aussi que datent ses rapports avec l'Égl. chrétienne, bien que des nestoriens en grand nombre habitassent depuis longtemps quelques points de son territoire. Gengiskan laissa l'empire à ses 4 fils, dont le plus puissant était Oktaï; un autre, Zagataï, faisait profession de christianisme et doit avoir élevé à Samarcande un temple dédié à saint Jean. Les Mongoles dans leur ensemble adoraient la nature sous la forme de fétiches et de grossières idoles; leurs prêtres, ou shamans passaient pour sorciers, enchanteurs et prophètes; mais ils n'étaient nullement fanatiques et toléraient toutes les religions des peuples vaincus. Les nestoriens qui habitaient au milieu d'eux ne paraissent pas avoir exercé sur eux aucune influence durable, et ce que l'on a pris quelquefois comme un rudiment de culte chrétien n'a guère été que le fait d'une concession ou d'une accommodation passagère. L'Occident a cherché à plusieurs reprises à les évangéliser. Déjà en 1237 le moine dominicain Philippe parle à Grégoire IX des nombreux chrétiens qu'il a vus en Mongolie: mais il a plutôt en vue les nestoriens et les ja-cobites. En 1245, sur la demande du fils d'Ok-taï, Kashouk f 1249, Innocent lui envoie une double mission, l'une de 4 dominicains sous la conduite d'Anselin, qui froisse l'orgueil du féroce général Batou, neveu d'Oktaï, et ne peut arriver jusqu'au khan; l'autre, de 3 franciscains, dirigée par Jean de Piano Carpine, disciple immédiat de François d'Assise, qui fut bien re<;u du khan; celui-ci f 1249, et eut pour successeur son cousin Mangu, ou Mandschou, favorablement disposé en faveur des chrétiens, mais surtout des nestoriens. C'était l'époque des croisades. Les Occidentaux et les Mongoles avaient un égal intérêt à s'unir contre l'ennemi commun, les musulmans. Louis IX envoya en 1248 le dominicain André de Lonjumeau, et 5 ans après le franciscain Guill. de Rubruquis auprès de Mandschou. L'accueil fut bienveillant, mais le voyage ne réussit pas plus que les précédents: le khan provoqua une discussion entre les chrétiens, les musulmans et les idolâtres, sans que personne se convertît, et Rubruquis revint à Rome raconter son insuccès. Les rapports avec l'Occident n'en continuèrent pas moins, surtout depuis que les Mongoles eurent fondé un nouvel empire sur les ruines du califat de Bagdad détruit en 1258; cet empire mongole-perse avait le même ennemi que la chrétienté, les sultans d'Égypte, et cette circonstance fut favorable à l'action des missionnaires. Les franciscains et les dominicains en profitèrent pour élever, sous la protection des khans d'Abaka f 1282, de Tangador f 1284, d'Argon + 1291, des couvents et des églises. Marco Paolo en parle avec une grande satisfaction. Cependant il ressort, même de son récit, que les églises qui se groupèrent autour des envoyés de Rome se composaient de chrétiens schismatiques, nestoriens ou jacobites, bien plus que de Mongoles, et que ces derniers étaient plutôt disposés, s'ils changeaient, à passer à l'Islam. En tout cas, même sans parler des persécutions qui eurent lieu sous certains princes, le christianisme n'eut jamais en Mongolie qu'nne situation precaire, et il ne dut ses succès apparents ou momentanés qu'à des considérations politiques, aussi bien en Perse et sur les bords de la mer Caspienne que sur le Don et le Volga. Il réussit un peu mieux en Chine, grâce à l'activité du pieux et savant franciscain Jean de Monte Corvino, qui, parti en 1288, travailla pendant 44 ans à la propagation de l'Évang. dans ces contrées, fonda deux églises à Khan-Baliéh (Kambalu, Pékin), éleva plusieurs couvents, fit traduire quelques livres chrétiens, groupa autour de lui de nombreux missionnaires, et f 1332 archev. de Kambalu. Il eut pour successeurs, après un intervalle de 8 années, les uns disent le franciscain Jean de Marignoles, les autres l'év. Nicolas; on sait d'eux peu de chose; ils continuèrent de jouir de la faveur des princes, mais n'en convertirent probablement aucun. Comme chrétiens, les nestoriens étaient à la fois plus anciens dans le pays, plus nombreux, et leurs églises plus florissantes. Et quand il se faisait un changement un peu considérable dans les sentiments de la cour ou du peuple, c'était généralement dans le sens du lamaïsme. La dynastie des Mings, représentée par Timour-Begh (Tamerlan) mit fin 1368 à l'empire mongole, et dans sa haine de l'étranger extermina tout ce qui portait le nom de chrétien. C'est dans notre siècle seulement que de nouvelles tentatives ont été faites pour porter l'Évangile dans les différents pays qui composaient autrefois la Mongolie, depuis le Caucase jusqu'en Chine.

 

MONGUS, Pierre, v. Monophysitisme.

 

MONHEIM, Jean, né 1509 près d'Elberfeld, fut converti pendant un voyage de commerce qu'il faisait pour aider ses parents. Il étudia à Munster et à Cologne, et se distingua surtout comme pédagogue. Recteur à Essen, puis à l'école du chapitre de Cologne, il fut appelé en la même qualité à l'école nouvellement fondée de Dusseldorf, où sa réputation attira jusqu'à 2000 étudiants. Il attachait une grande importance à l'enseignement religieux de la jeunesse, et il écrivit k cette intention plusieurs manuels, entre autres un Catéchisme • in quo Christianœ religionis elementa sincere simpliciterque expli-rantur, » 1560 (réimpr. par Sack, Bonn 1847). Ami d'Érasme, ennemi de la scolastique monacale, il était cependant resté catholique, mais son catéchisme trahissait avec une très grande liberté d'esprit des tendances calvinistes. Dénoncé par les jésuites, il allait être l'objet de mesures disciplinaires de la part du duc Guillaume, de Clèves, qui flottait entre l'Évangile et Rome, quand il f 9 sept. 1564. Son travail donna lieu à de nombreux écrits, attaques et réponses. Il avait publié

aussi d'autres ouvrages, sur le Symbole, le Dé-calogue, etc.

 

MONITA Sécréta, les Instructions secrètes, recueil de directions données pour leur gouverne particulière, et à des hommes de choix seulement, par les chefs de l'ordre des jésuites, sur la manière dont ils doivent se conduire suivant les pays où ils veulent s'établir, et suivant les personnes auxquelles ils ont affaire, pour rfiieux capter leur confiance et s'assurer leur clientèle. On y trouve des passages de toute force et un luxe étrange de précautions pour s'assurer le secret. Ce livre, appelé aussi Monita aurea (Conseils d'or) et qui n'était naturellement pas destiné à la publicité, ni même à une grande circulation, a été découvert au 17®« siècle pendant la guerre de Trente ans. On en a trouvé au moins 5 exemplaires, parfaitement conformes. Deux autres exemplaires ont été découverts encore il y a quelques années. On en attribue l'idéeet la première exécution au général Aqua-viva. Les jésuites en ont dès l'abord nié l'authenticité, car tout mauvais cas est niable. La crudité presque cynique de certains aveux ferait douter en effet de la possibilité que des religieux aient pu écrire ces choses, mais la lecture de l'ensemble amène à la conclusion que s'ils n'ont pas écrit le livre, ils l'ont inspiré; c'est peut-être une satire rédigée après coup par un membre de la Société, qui la connaissait bien et qui l'aura quittée parce qu'il était indigné de ses principes et de sa façon d'agir et de servir Dieu. Mais le fait que ce mystérieux document s'est trouvé dans les collèges et les maisons des jésuites plaide en faveur de son au- j thenticité.

 

MONIQUE, la mère de saint Augustin; née 332 en Afrique, de parents chrétiens. Contrainte d'épouser un païen, Patricius, de Tagaste en Numidie, elle eut le bonheur de le convertir à l'Évangile. Elle est célèbre par l'influence que sa piété exerça sur le développement intellectuel et religieux du plus grand des pères de l'Égl. latine, f 387 à Ostie, dans un voyage en Italie, qu'elle avait entrepris avec son autre fils Navigius. On la fête le 4 mai.

 

MONOD, Plusieurs prédicateurs français de ce nom. Les plus connus sont: 1° Jean, né à Genève 5 sept. 1765; d'abord pasteur à Copenhague, il fut appelé en cette même qualité à Paris en 1808. Il avait épousé 12 janv. 1793 Louise de Coninck, dont il eut douze enfants; quatre se consacrèrent au ministère, Frédéric, Guillaume, Adolphe et Horace, tous distingués à divers titres; les autres, médecins ou négociants, ont également bien mérité de l'Église. Ses petits et arrière-petits enfants ont fourni au pays et à l'Église des docteurs, des administra* teurs, des magistrats, des avocats et de nombreux pasteurs, qui honorent sa mémoire, + 23 avril 1856. Son fils aîné

2° Frédério-Joël-Jean-Gérard, né 17 mai 1794 à Monnaz, Vaud, étudia à Genève, et fat appelé à Paris d'abord comme suffragant, puis comme pasteur 1819-1849. Le synode de 1848 ayant refusé d'adopter une Confession de foi, même très modérée, pour éviter un schisme dans TÉglise, Monod se retira avec Gasparin et quelques autres et donna sa démission. Il fonda une égl. réformée évangélique et groupa autour de lui une trentaine d'autres églises indépendantes de l'État, mais toutes peu considérables, ne subsistant que de contributions volontaires et se réunissant en synode tous les deux ans. Plus remarquable par son caractère et par sa piété que par ses talents, il s'intéressa toute sa vie d'une manière active aux œuvres qui avaient pour objet l'avancement du règne de Dieu et se montra l'énergique défenseur de la foi chrétienne dans les Archives du christianisme qu'il avait fondées en 1818 et qu'il rédigea jusqu'à sa f 30 déc. 1863. II a donné à l'Égl. un prof, de théol., 3 fils et un gendre pasteurs.

3° Adolphe, nè à Copenhague 21 janv. 1802, lit ses premières études à Paris où son père venait d'arriver, et les poursuivit ensuite à Genève jusqu'en 1824. Ayant fait un voyage en Italie en 1825, il vint à Naples et groupa en communauté les protestants qu'il y trouva et dont il fut le pasteur jusqu'en 1827. Appelé à Lyon, il y fut apprécié pour son éloquence, mais ayant protesté contre la profanation de la Cène dans quelques sermons d'une grande énergie; il fut poursuivi par le Consistoire et destitué en 1832. Il ouvrit une chapelle indépendante à laquelle se rattachèrent de nombreux adhérents. En 1836 il fut nommé à Montauban professeur d'hébreu, puis prof, d'homilétique et d'éloquence sacrée, et continua, quand il en avait le loisir de visiter et d'édifier les églises. En 1847 il fut appelé à Paris comme pasteur, prit une part active au synode de 1848, mais refusa de se séparer, et après un ministère laborieux et béni, f 6 avril 1856 à la suite d'une longue et douloureuse maladie. Prédicateur accompli, l'un des plus illustres de la chaire française, il était en même temps un théologien distingué, un chrétien modeste et un homme d'une foi vivante. Outre plusieurs volumes de Sermons, on a de lui Lucile, traité d'apologétique, couronné et souvent réimprimé. Ses amis ont publié après sa mort ses Adieux, suite de courtes méditations prononcées de son lit pendant sa maladie, avec portrait; et une Explic. de TÉpître aux Éphésiens. Un fils et deux gendres pasteurs.

4o Horace, né 20 janv. 1814, past. àMarseille, a publié 7 volumes de sermons estimés, plus. |

trad. de l'anglais, entre autres Hannah, Dernier jour de la Passion; Comment, de Hodges sur les Romains; Madagascar; Moffat, 23 ans chez les Bassoutos, etc. 4 fils pasteurs, f 17 juill. 1881.

 

MONOGRAMME du Christ, c.-à-d. son nom écrit d'un seul caractère. On en connaît de plusieurs formes; la plus ancienne, antérieure à Constantin et grecque d'origine, est composée des lettres qui commencent en grec le nom du Christ, X et P (Ch et R); elle figurait sur le la-barum, et se rencontre sur divers monuments, tombeaux, monnaies, inscriptions, etc. D'autres, que l'on rencontre également sur des monuments et dans des manuscrits, reproduisent le nom de Jésus-Christ dans la combinaison des lettres 1C, XC; enfin chez les grecs on trouve IH, et chez les latins, surtout depuis la fin du moyen âge IHS, qui est le Jésus des grecs, mais dont les latins ont fait Jésus Hominum Salva-for; Bernardin de Sienne le présentait à l'adoration de ses auditeurs. Les jésuites en ont fait leur sceau depuis 1541 en terminant l'H en forme de croix.

 

MONOPHYSITISME, doctrine qui maintient l'idée d'une seule nature en Christ, contrairement à celle de Nestorius qui insistait sur la distinction des deux natures. Les ardents mo-nophysites de l'Égypte avaient trouvé, mais à tort, que le conc. de Chalcédoine favorisait la tendance nestorienne. Proclus f 454 avait été remplacé par Proterius, dont la violence dans le sens du conc. de Chalcédoine aigrit le parti opposé. Les monophys. avaient 2 chefs: le prêtre Timothée Aelurus (le chat) et le diacre Pierre Mongus (l'enroué ou le bègue). Léon I** étant monté sur le trône 454, les monoph. élurent Aelurus patr. d'Alexandrie, et Proterius perdit la vie dans une émeute. Les deux partis s'adressèrent à Léon, qui consulta les églises. Les év. de Pamphilie, entre autres, répondirent conformément à la doctrine de Chalcédoine, ajoutant que ces définitions étaient seulement pour les évêques, et que pour le peuple il devait lui suffire de savoir qu'il y a 2 natures # dans un seul Christ. Aelurus fut exilé, et remplacé par le pieux moine Timothée Salophacio-lus 460. En 475 Zénon, emp. d'Orient, fut attaqué par Basiliscus. Ce dernier, pour se concilier les inonoph. publia une encyclique en lenr faveur et l'imposa à tous par la force. Aelurus fut donc rétabli, mais 477 Zénon victorieux ramena la paix. Salophaciolus remonta sur son siège, mais mourut bientôt, il fut remplacé par Jean. Les monoph. élurent Mongus. Ce dernier par son habileté auprès d'Acacius et et auprès de l'empereur, suggéra une formule de concorde très astucieuse, YHènotikon, oix rien n'était formulé, qui déplut à la fois aux chalcédoniens et aux monophysites stricts qui

se séparèrent de Mongus et se trouvèrent ainsi sans chef, sans téte, d'où ils reçurent le nom d'Acéphales. Anastase 1er, homme modéré, succéda à Zénon, 491-518; il voulut imposer l'Hé-notikon comme loi, mais il pencha lui-même touj. plus vers le monophysitisme. Jean s'était enfai à Rome, où les monoph. étaient comme excommuniés. Pierre Fulio (le Foulon, ou le Tanneur), moine de Constantinople, nommé évêque. puis exilé, puis rétabli, ranima la querelle, + 488. Xenaïas (Philoxène) d'Hiérapolis, et Severus, moine, puis patr. d'Antioche, en faveur auprès d'Anastase, voulurent introduire dans toutes les églises, en s'autorisant de Es. 6, 3, le « Dieu crucifié pour nous, » que Fullo avait déjà introduit dans Sainte-Sophie; cela provoqua de grands troubles; il y eut du sang versé; un moine partisan de cette addition fut tué et sa téte promenée par la ville. Anastase se présenta à la foule, sans ornements royaux et lui dit: Je consens à déposer ma couronne, mais tous ne peuvent pas régner. La fureur du peuple se calma et Timothée fut proclamé patriarche. Après un certain intervalle les disputes recommencèrent, et les monoph. eux-mêmes se divisèrent; il y eut les phthartolâtres, ou sévériens, qui soutenaient que le corps de Christ avant sa résurrection était corruptible, et les aphthartodocètes, disciples de Julien, qui soutenaient qu'il avait touj. été incorruptible. Puis vinrent les antistètes et les ktistolàtres, qui eux-mêmes se divisèrent à l'infini, chacun suivant son idée et la subtilité de son imagination. L'emp. Justinien s'opposa au monophysitisme, probablement sans le comprendre et, sous l'influence de sa femme Théodora, il nomma patr. de Constantinople le moine monoph. Anthime, mais pour le destituer et le remplacer par Mennas 536 après qu'Agapet, envoyé par Théodoric, ei/t dévoilé son hérésie. Un concile convoqué la même année à Constantinople, condamna le monophysitisme. Ascidas, favori de l'emp., protégeait les opinions monoph., mais un nouveau concile les condamna; Ascidas signa, mais résolut de se venger. Il exploita l'idée fixe de l'empereur, de ramener l'unité dans l'Égl., et il lui suggéra son fameux décret des Trois chapitres, 544, qui ne remédia à rien. Devenu vieux, Justinien pour effacer ses péchés, se déclara pour l'aphthartodocé-tisme, et le patr. de Constantinople fut destitué et exilé. Le monoph. s'établit partout où l'emp. ne dominait pas. II se divisa en trois branches principales qui, suivant les pays formèrent les égl. jacobites, coptes et arméniennes.

 

MONOTESSARON, titre souvent employé pour désigner ce qu'on appelle plus ordinairement une Harmonie des 4 évangiles; il signifie en grec: les 4 en un, ou la réunion des 4.

 

MONOTHÉISME, doctrine d'un seul Dieu par opposition au polythéisme qui en admet plu-sieurs. Si l'homme avant la chute ne connaissait que le seul vrai Dieu, il a perdu par le péché le bénéfice de la vérité révélée, et lorsque, dans l'œuvre de son relèvement et de son développement religieux, il a voulu remonter à l'an* teur des choses, il a été frappé de la variété de l'univers bien plus que de son unité. Les puissances invisibles se sont personnifiées pour loi dans chaque groupe de phénomènes apparents et visibles; les pays, les peuples, les fleuves, les montagnes, les éléments, les fléaux lui sont apparus comme autant de manifestations distinctes de dieux différents, sans qu'il fût capable de les faire converger vers une cause unique. Cependant à mesure qu'il réfléchissait, il voyait croître les invraisemblances, les difficultés et les impossibilités; le besoin d'unité condamnait en lui la croyance à tant de dieux qui se heurtaient et se contrecarraient, aucun n'étant tout puissant puisqu'ils se neutralisaient les uns les autres. Déjà l'Inde cherchait à résumer en Brahma toutes ses divinités, mais elle tombait dans le panthéisme. La Grèce et l'ancienne Rome comprenaient l'incohérence de leur mythologie et plaçaient au-dessus de leurs dieux rivaux et ennemis un dieu aveugle qui les dominait tous, le Destin, le Fatum. Mais cet essai de monothéisme péchait par la base, puisqu'il maintenait sur le Parnasse ou dans les enfers tous les autres dieux; il ébranlait les vieilles croyances sans pouvoir accréditer la foi nouvelle. L'expérience des siècles semble dire que l'esprit humain est incapable de s'élever par lui-même à la notion du Dieu unique. Le peuple juif est dans l'antiquité le seul qui ait été monothéiste, et il l'a été déjà dans la personne de son fondateur, Abraham, qui reconnaissait l'Éternel comme le protecteur de sa famille et de sa maison; mais pour les siens c'est encore une foi obscure et Rachel tient à emporter ses dieux domestiques. Ce n'est qu'avec Moïse et depuis la promulgation de la loi en Sinaï, que le monothéisme devient véritablement un domine national et qu'il pénètre officiellement dans la conscience du peuple. Et malgré cela encore, les rechutes et les retours à l'idolâtrie sont fréquents, l'idée même d'un Dieu protecteur spécial d'Israël pouvant conduire à l'idée d'un Dieu pour chaque nation, et par conséquent au polythéisme, Ex. 19, 4. 22, 20. Jug. 11, 24. L'uni-versalisme chrétien pouvait seul fonder logiquement la foi au Dieu unique, en faisant de Dieu le père de tous les hommes et de tous les peuples, en en dégagant l'idée de tout anthropomorphisme comme de tout particularisme. Le gnosticisme s'est quelquefois exprimé de manière à favoriser la conception polythéiste.

et si les trinitaires n'y prennent pas garde, ils risquent d'accréditer la même erreur en exagérant la distinction des personnes. Plus le mo-noth. est conséquent, plus il aboutit en morale à des idées justes; la conscience morale repose sur l'idée de l'ordre dans le gouvernement du monde, et cet ordre lui-même suppose l'unité dans le commandement et la direction. Mais l'Écriture a soin aussi de rappeler que la foi au seul Dieu ne suffit pas pour sauver les hommes; les hébreux, les musulmans, les déistes, les démons eux-mêmes sont monothéistes, Jacq. 2, 19.; il faut encore que l'homme soit réconcilié avec Dieu, et c'est l'œuvre que Jésus-Christ est venu accomplir; nul ne vient au Père que par Lui.

 

MONOTHÉLISME (plus exactement Mono-thèlétùme), doctrine supposant qu'il n'y a en Jésus-Christ qu'une seule volonté, par opposition au dyothélisme qui en admet deux. La doctrine d'Eutyche avait été condamnée: l'Église avait repoussé le monophysitisme et déclaré qu'il y avait en Christ non pas une nature complexe, mais deux natures distinctes. Les sectateurs secrets de la doctrine condamnée essayèrent de se rabattre sur un détail et, tout en confessant accepter les deux natures, puisqu'il le fallait, ils soutinrent qu'il n'y avait dans le Sauveur qu'une seule volonté, la volonté divine. L'emp. grec Héraclius, qui sentait parfaitement que la question monophysite n'avait pas été tranchée par les décrets des conciles, désirait concilier les orthodoxes et leurs adversaires par une formule qui satisfit les uns et les autres. En 622, dans une guerre contre les Perses, quelques évêques monoph. lui insinuèrent que toute la question controversée revenait à savoir s'il y a en Christ une volonté, ou deux volontés. Sergius, patr. de Constantinople, consulté par l'emp., lui répondit que la foi à une seule manifestation de la volonté divine en Christ, n'était pas contraire à l'Écriture. En 633 les deux partis convinrent d'un compromis, qui ne fit qu'augmenter la confusion. Sophronius, patr. de Jérusalem, s'y opposa avec énergie et se montra le cruel adversaire du mo-nothélisme. Le pape Honorius se rangea du côté de Sergius, en demandant cependant que l'on ne ranimât pas des querelles stériles. Sophronius n'en tint aucun compte et publia contre le monoth. son discours d'inauguration. Peu après, Jérusalem fut prise et le patriarche resta sans patriarcat. Cependant la dispute était engagée; Héraclius voulut l'étouffer et publia son édit Ecthésis (Exposé de la foi) composé par Sergius, où il interdisait toute détermination dogmatique. Jean IV de Rome se rangea du côté des dyothélètes, ainsi que le fameux moine Maxime, qui dut fuir Constantinople, mais continua d'agiter l'Orient. Un conc. africain condamna le monothélisme. Théodore, successeur de Jean IV, excommunia 646 Paul, patr. de Constantinople. L'emp. Constant II intervint à son tour par son Typos (type de la foi), où il ordonnait le silence le plus absolu sur ce sujet. Les moines répondirent par une requête, déclarant que si l'on ne se décidait pas sur cette question, c'était faire de Christ un être sans énergie et sans volonté, pour ainsi dire sans âme. En 649, Martin I«r, de Rome, se joignit aux dyothélètes, et convoqua le premier conc. de Latran, dans lequel les édits impériaux furent anathématisés, et deux volontés reconnues en Christ, distinctes, mais les mêmes. Constant envoya d'abord en Italie l'exarque Olympius avec des pleins-pouvoirs, mais peu de bonne volonté, pour s'opposer à Martin. Olympius mourut sur le champ de bataille, en rebellion; l'emp. envoya à sa place Calliope avec une armée, 653. Martin était malade; il se réfugia dans le temple, où le peuple aurait pu le défendre, mais il aima mieux céder; il se rendit avec dignité. Calliope le fit enlever par ruse et le transporta par mer à Constantinople, où il fut honteusement maltraité et emprisonné, f 655 en Chersonèse. Maxime eut un sort plus douloureux encore; il fut mutilé et martyrisé. Constantin Pogonat, fatigué de ces misérables disputes, résolut d'y mettre un. terme et de rétablir la paix. Il comprit qu'un nouvel édit ne remédierait à rien, et pensa qu'un nouveau concile vaudrait mieux. Il demanda à Agathon, év. de Rome, d'envoyer des députés à Constantinople; Agathon le fit et remit à ses délégués des lettres dans le sens des deux volontés. Le concile, 6®e écuménique, s'ouvrit en 680 dans une salle du palais impérial, in trullo (de là son nom de trullianum)« sous la présidence de Georges, patr. de Constantinople, qui finit par se ranger au dyothélisme, ainsi que la plupart des évêques orientaux. Macaire, patr. d'Antioche, persista seul et fut destitué. Le conc. se passa avec beaucoup d'ordre et de tranquillité; les monoth. purent se défendre avec une pleine liberté. A la fin ils furent anathématisés, y compris le pape Honorius défunt, et les papes suivants durent reproduire cette excommunication d'un des leurs, ce qui met les théologiens ca-thol. dans un grand embarras. Le monoth. était officiellement condamné; l'emp. Bardanes 711 essaya un moment de le relever par la violence, mais il + 713. Le monoth. fut conservé chez les maronites dans les contrées du Liban jusqu'au temps des croisades au 12m® siècle; il y avait été introduit dans la moitié du 7me siècle par l'abbé syrien Jean Maron.

 

MONTALEMBERT (Charles - Forbes, comte de), pair de France. Né en 1810 à Londres, f 12 mars 1870 à Paris. Catholique fervent et convaincu, il fut en même temps libéral et le défenseur ardent de la liberté de conscience. Caractère noble et chevaleresque, il eut l'honneur de ne pas être logique et de suivre l'impulsion de son cœur et de sa conscience, même lorsque sa religion lui commandait d'autres allures, et il chercha jusqu'à la fin à concilier le catholicisme avec la liberté. Partant du point de vue religieux, il combattit en 1840 la loi d'instruction publique présentée par M. Villemain, et il prit parti pour les jésuites. Membre de l'Acad. depuis 1851. Il a regretté, comme son ami Lacordaire, la convocation du concile et blâmé son mode de votation et les résultats auxquels il a abouti. Auteur de plusieurs ouvrages: Hist. de sainte Elisabeth de Hongrie, 1836; Du vandalisme et du catholicisme dans les arts 1840; Les moines d'Occident, 5 vol. 1860-1862. On a aussi de lui de nombreux discours, des articles de revues, des Études sur l'Espagne, etc.

 

MONTANISME, secte orientale fondée par Montanus qui parut vers 170 à Artaban et à Pe-puza sur les frontières de la Phrygie et de la Mysie. Ses parents étaient païens. A peine converti il commença à se faire connaître, et se mit en avant, avec deux prophétesses, Priscilla et Maximilla, qui prétendaient, comme lui, avoir reçu des révélations immédiates. L'apparition du montanisme s'explique: par le peuple chez qui il prit naissance, les Phrygiens enthousiastes, dont les prêtres, ceux de Cybèle et ceux de Bacchus, étaient fréquemment dans l'extase; par le caractère mélancolique de Montanus; enfin par les circonstances de l'époque, 1 es guerres, les persécutions, la lutte du gnosti-cisme et de l'Église. Montanus ayant reçu quelques rayons de la vérité, son vieil homme et sa nature phrygienne mêlèrent leurs ténèbres à cette lumière naissante; il se laissa entraîner par son imagination orgueilleuse et eut des extases. Il se croyait alors l'organe d'un esprit supérieur, parlait des « langues étrangères, » et voulait être regardé comme celui à qui le Para-clet était communiqué. Quant aux doctrines principales des montanistes: en théorie ils admettaient que l'Égl. doit se développer sans cesse et graduellement sous le rapport de la morale, de la discipline et de la vie, par des manifestations extraordinaires du Paraclet; ils enseignaient en même temps la nécessité de la continuation des dons extraordinaires, surtout des prophéties. En pratique ils condamnaient les secondes noces, ils défendaient la fuite dans les persécutions, recommandaient le jeûne (carême) à l'époque des souffrances de Christ. Ils avaient quelques rapports avec les novatiens. Quant au millénium ils l'exagéraient et l'annonçaient comme très prochain. Priscilla et Maximilla sont, avec Montanus, les seuls membres de la secte qui aient revendiqué le don de prophétie, mais d'autres ont eu aussi des dons, que Gieseler assimile aux phénomènes du magnétisme animal ou du somnambulisme. On leur reproche un orgueil excessif; ils s'appelaient les spirituels, par opposition aux autres chrétiens, psychiques ou charnels. Ils eurent de nombreux adversaires, surtout en Orient. Claude Apollinaire les combattit; plusieurs égl. d'Asie les excommunièrent. Mais ces adversaires tombèrent eux-mêmes dans des excès, en rejetant le règne de mille ans, l'Apocalypse et l'Évang. de Jean. Ces écarts procurèrent des amis aux montanistes, Rome ne se déclara pas contre eux et accepta ce qu'il y avait de juste dans leurs vues. Les égl. de Lyon et de Vienne écrivirent en leur faveur. Un évêque de Rome, probablement Éleuthère, eut même la pensée d'entrer en communion ecclésiastique avec les montanistes, quand Praxéas vint à Rome 192 et changea ces dispositions bienveillantes. Alors commença la lutte. Tertullien écrivit contre Praxéas, Celui-ci et Caïus en répondant commirent d'énormes erreurs. Les égl. d'Afrique restèrent plutôt bien disposées, et ne virent dans les exagérations du montanisme qu'une exubérance de vie. On a voulu même expliquer l'étrange sommeil de Félicitas et de Perpetua pendant leur supplice, en disant qu'elles étaient montanistes. La secte se maintint jusqu'au 6me siècle, sous les différents noms de kataphrygiens, d'après le pays de son origine: quintilliens, priscil-liens, etc. Leur plus grand tort a été d'exagérer des vérités; quant au chiliasme, il ne leur appartenait pas plus qu'à d'autres sectes.

 

MONTANUS 1° chef des montanistes, q. v. 11 f probablement sous Caracalla, vers 212. — 2<> Benoit, aussi nommé Arias. Né 1527 en Es-tramadure, il entra dans l'ordre de SaintJacques et accompagna l'év. de Séville au conc. de Trente. A son retour il se retira dans le couvent d'Aracena, mais Philippe II l'en fit sortir, et, à cause de ses vastes connaissances dans les langues, lui confia la publication de la Bible polyglotte d'Anvers 1568-1572. Mais ayant, contrairement à l'év. de Léon de Castro, défendu le texte hébreu comme préférable à la Vulgate, et décidé de joindre les Targums à son édition, Montanus dut se rendre à Rome pour se justifier du reproche d'avoir falsifié le texte biblique et de pencher vers le judaïsme. Acquitté, il refusa un évêché, se retira dans son couvent, et fut nommé bibliothécaire de l'Escurial. f 1598 à Séville.

 

MONTAUBAN, chef-lieu du Tarn-et-Garonne, évêché, cathédrale du 8™ siècle, a joué un certain rôle pendant les guerres de religion. Fondée en 1114 par le comte Alph. de Toulouse, au pied du mont Alban, elle embrassa la Réforme en 1558 et fut longtemps une des places de sûreté des huguenots. Assiégée sans succès par Montluc 1580, elle fut prise enfin par Richelieu 1629. qui la traita durement et en fit raser les fortifications. Elle eut aussi beaucoup à souffrir des dragonades. Son école de théol., qui datait de la Réformation et qui avait été supprimée, fut rétablie 1809 par Napoléon; c'était la seule faculté pour les théologiens de l'Église réformée (Strasbourg était plus spécialement pour les luthériens, toutefois sans exclu-sisme). Parmi les professeurs qui l'ont illustrée, on nomme Daniel Encontre, Combes d'Ounous, Frossard, Bonnard, Gasc, G. de Félice, Ad. Mo-nod, Jalaguier.

 

MONTBÉLIARD, comté de la haute Alsace, placé d'abord sous la suzeraineté du Wurtemberg, et annexé à la France depuis 1796. La Réformation y «fut prêchée par un disciple de Luther, Jean Gailing, et de 1524-1525 par Fa-rel, sous la protection d'Ulrich de Wurtemberg; elle ne s'y établit définitivement qu'en 1535, sous le duc Georges, et conformément k la Conf. de foi helvétique. Son premier pasteur fut Toussaint, un ami de Farel. Les ordonnances de 1560 y introduisirent le rite luthérien. Le Colloque de Montbéliard, qui se tint du 20 au 29 mars 1586 fut provoqué par le refus des pasteurs luthériens de donner la Cène aux réfugiés français qui étaient calvinistes. Ceux-ci demandèrent au comte Frédéric de Montbéliard, cousin du duc Louis de Wurtemberg, de faire examiner la question dans une conférence. Andréa et Luc Osiander de Tubingue représentèrent le luthéranisme, Bèze et Musculus de Berne l'idée réformée. On discuta sur la Cène, la personne de Christ, le baptême et la prédestination. Le colloque fut relativement tranquille, mais n'aboutit pas, grâce surtout à la raideur d'Andréa, qui déclara même en terminant que, s'il consentait k donner la main k Bèze, c'était seulement comme homme et non comme frère. Andréa publia à son point de vue le procès-verbal de ces séances, 1587; Bèze y répondit la même année. Quoique le comte eût pris le parti d'Andréa, il autorisa les pasteurs luthériens à donner la Cène aux réfugiés. C'est à la suite de la Conférence que se produisit entre Musculus et Hu-ber, k Berne, le conflit qui se termina par le colloque du 15 avril 1588 et la démission de Huber.

 

MONT-CASSIN, montagne de la Terre de Labour, ancienne Campanie, à 80 kil. N.-O. de Naples; escarpée, isolée, enveloppée d'une ceinture d'autres montagnes; à l'ouest elle domine de fertiles plaines, k l'est de sombres et profondes vallées. Elle est célèbre par le séjour qu'y fit Benoit de Nursie, et par le monastère qu'il y éleva et qui fut pendant des siècles un foyer de lumières et un lieu de pèlerinage. Construit d'abord par les moines eux-mêmes et dans des conditions modestes, ce couvent fut détruit par les Lombards et ses habitants se réfugièrent k Rome où ils fondèrent un nouveau couvent près du Quirinal. En 720 Pétronax de Brescia obtint de Grégoire II l'autorisation de reconstruire le couvent du Mont-Cassin, et les papes qui suivirent lui accordèrent de nombreux privilèges. Mais les Sarrasins le détruisirent de nouveau 884, et il ne fut rétabli que par l'abbé Aligerne, qui remit en vigueur la règle et la discipline. Après de nombreuses vicissitudes, chutes et relèvements, détruit par un tremblement de terre 1340, il fut rétabli par Jules II qui lui affilia la congrég. de sainte Justine. Il a servi de retraite à de nombreux princes, souverains, papes et savants, k saint Grégoire, k Cassiodore. Auj. encore, et récemment restauré k l'occasion du 14»® centenaire de saint Benoît, il renferme d'immenses richesses, une importante bibliothèque, de beaux tableaux et, dit on, les corps de Benoît et de sa sœur Scho-lastique. On montre aussi près de là la retraite de l'Albanette, où Loyola doit avoir composé la règle des jésuites.

 

MONTE CORVINO, Jean (de), ainsi nommé de la ville d'Apulie où il était né. Franciscain, il se consacra dès sa jeunesse à l'œuvre des missions. Il avait été envoyé par Michel Paléo-logue à Grégoire X, après avoir fait un voyage en Mongolie, vers 1280. Le grand khan Kublaï, de Péking, avait fait demander par Marco Paolo qu'on lui envoyât des missionnaires. Deux premières missions avaient échoué. Nicolas IV décida d'y envoyer Jean avec quelques collaborateurs 1288; il n'arriva à destination qu'en 1295, ayant passé trois ans en Perse et un an aux Indes, toujours préchant et baptisant. Arrivé à Kambalou, il y bâtit un temple avec 3 cloches, baptisa plus de 6000 personnes, organisa des cultes pour les enfants, composa pour eux des cantiques et un bréviaire, ou catéchisme, et déploya le plus grand zèle pour la propagation de l'Évangile. Malheureusement il entra en lutte avec les nestoriens; ils ne comprirent ni les uns ni les autres que la Chine était un assez grand pays pour qu'il y eût place pour tous, et au lieu de s'unir, ils perdirent leurs forces à se combattre. Il traduisit en tartare le N. T. et les Psaumes, fonda une maison de missions, fut nommé légat du pape et archev. de Kambalou, obtint de Clément V l'envoi de 7 moines franciscains, qui furent ses évêques suffragants, et f 1332, après 44 ans d'un ministère fidèle et béni dans la Mongolie.

 

MONTFAUCON, Bernard (de), cél. bénédictin maurin, né 1655 d'une famille noble, au château de Soulages, Languedoc; il reçut une éducation soignée, servit sous Turenne 1672, mais ayant perdu son père et sa mère en peu de temps, il renonça au monde et se retira au couvent de la Daunade à Toulouse, où il prit l'habit de saint Benoit. Ses travaux d'érudition attirèrent sur lui l'attention de ses supérieurs; il fut en 1687 envoyé à Paris, où il se lia avec Ducange, et prit part à la publication des pères grecs. Il étudia ensuite les langues orientales, visita de 1698 à 1700 les principales bibliothèques de l'Italie, et fut fort bien accueilli par le pape Innocent XII. Il déclina les nombreuses offres qui lui furent faites, et revint à Paris pour s'y consacrer entièrement à ses études. En 1719 il fut reçu à l'Acad. des Inscriptions, et f 1741, respecté de tous à cause de sa science et de ses vertus. Son premier ouvrage fut un Analecta (morceaux choisis) de divers auteurs grecs encore inédits, 1688, puis vinrent les Œuvres d'Athanase, avec trad. latine et biographie 1698; la Collection des pères et écrivains grecs 1707, avec quelques fragments dTEusèbe de Césarée et la Topographie chrétienne du moine Cosmas Indicopleustes: les Hexaples d'Origènes, avec notes, variantes et l'histoire des traductions grecques de la Bible, 1713; Chrysostome, avec trad. latine et biographie, 1718, la meilleure qui existe et l'un des plus remarquables travaux des maurins, etc. En dehors de la théol. il a écrit aussi des ouvrages considérables sur l'antiquité; ainsi son Diarium italicum, notices sur les anciens monuments, 1702; la Paléographie grecque; la Nouvelle biblioth. des manuscrits; l'Antiquité expliquée et représentée en figures; les Monuments de la monarchie française, etc. Tous ces in-folios ont contribué à fonder la réputation de l'érudition bénédictine.

 

MONTMARTRE, ou Mont des Martyrs, faubourg au nord de Paris, ainsi nommé, dit-on, parce que saint Denis et ses trois amis y auraient été martyrisés. Selon d'autres, ce nom lui viendrait d'un temple de Mars.

 

MONTPELLIENS, nom d'une secte qui prit naissance à Montpellier en 1723, et qui s'appelait elle-même la nouvelle Sion. On lui attribue des orgies nocturnes commises sous le masque de la religion; ce sont ses ennemis qui l'en accusent. Persécutée, elle disparut bientôt.

 

MONTPELLIER, vieille cité romaine, qu'une légende fait évangéliser par Simon-le-Pharisien, mais qui en réalité n'a eu d'évêque et d'église qu'au 6®« siècle. Le protestantisme y pénétra en 1559, mais dès 1554 il avait eu déjà ses martyrs brûlés et des enfants enlevés à leurs parents. Une grande partie de la ville passa à la Réforme, et l'opposition du comte de Villars, de Joyeuse, même de Dampville n'empêcha pas les religionnaires de se réunir en plein jour et d'avoir leurs églises. Après les persécutions, qui risquèrent d'amener une révolte, le gouvernement eut recours aux tracasseries, aux manœuvres, aux interdictions professionnelles, jusqu'au moment où le grand coup fut porte par la Révocation. On comptait encore 10,000 protestants en 1682; 6000 abjurèrent par ordre ou pour se sauver, mais longtemps les curés se plaignirent de ce qu'ils étaient « mal convertis. • Le culte du désert fut célébré sans interruption de 1685 à 1789, et le Languedoc ne compta pas moins de 6 synodes généraux et 71 provinciaux. De nombreux martyrs y furent exécutés, depuis Brousson 1698, jusqu'à Bénè-zet 1752. Les premiers pasteurs de l'Église s? relevant de ses ruines furent Bastide 1770, Ra-baud-Pommier 1772, et Saussine 1791. La loi de germinal an X ne donna qu'un pasteur a Montpellier, Honoré Michel, f 1861, dès lors le nombre en a été successivement augmenté; il est auj. de cinq. Les noms de Grawitz et de Lissignol sont restés populaires au milieu de plusieurs autres.

 

MONTS de piété. Ces institutions, qui avaient pour but d'avancer de l'argent aux pauvres contre une garantie suffisante et sans intérêt, furent imaginées par le minorité Barnabas de Pérouse 1464, et sanctionnées par Paul III. L'intention était bonne, mais les abus survinrent. Auj. ce n'est plus qu'une industrie toute séculière, qui peut rendre des services, si elle est bien dirigée, mais qui a servi souvent à ruiner des familles par les nombreuses facilités qu'elle offre à l'emprunt.

 

MOPSUESTE, v. Théodore 4<>.

 

MORATA, Olympia-Fulvia, fille du poète italien F. Peregrinus, une des femmes les plus savantes du 16me siècle. Née 1526 à Ferrare. elle apprit de bonne heure le grec et le latin dans la société de son père et de ses amis, et fut admise dans le cercle littéraire de Renée de Ferrare comme compagne de la princesse Anna. Vivement affectée par la mort de son père, elle se tourna vers l'Évangile et se convertit à la Réforme 1548-1550. Elle suivit en Allemagne son mari, le Dr Andréas Gunthler, d'abord a Augsbourg, puis à Schweinfurt, où ils s'occupèrent paisiblement de littérature. Miraculeusement échappés au carnage de Schweinfurt. 1553, ils vinrent à Heidelberg où Gunthler avait été nommé professeur de médecine; elle y f 26 oct. 1555, d'une maladie de poitrine et regrettant son beau pays; son mari et son frère ne lui survécurent que peu de jours. Célius Sec. Curione a publié ses poésies grecques et latines. 1558. Vie par Jules Bonnet, 1850.

 

MORAVES, v. Moravie.

 

MORAVIE, contrée montagneuse du centre de l'Europe^primitivement habitée par lesQua-des et les Marcomans, puis par les Rugiens, les Hérules et les Slaves; elle appartient auj. à l'Autriche. Ses villes principales sont Brûnn, Olmtltz, Troppau et Teschen. Son histoire relig. est intimement unie à son hist. politique. C'est de Passau qu'elle fut évangélisée, par le moine Urolf, 820-826, et vers 850 elle comptait déjà 2 ducs chrétiens et 4 évêques. Le duc Rastislav, 863, pour se soustraire à l'influence trop grande des princes allemands, qui appartenaient à l'Église latine, demanda à Constantinople des missionnaires, et l'emp. Michel leur envoya Cyrille et Méthodius, qui ne tardèrent pas, en apportant au peuple la Bible dans sa langue, à obtenir de grands succès. Consacré archev. de Moravie, lors de son second voyage à Rome 871, Méthodius releva à Morsbourg l'ancien archevêché de Sirinium et le détacha de celui de Salz-bourg. Mais son successeur, Wiching, poussa le duc Swatopluk à adopter les formes latines du culte, ce qui fut d'autant plus facile que la Moravie elle-même subissait de plus en plus l'ascendant de l'Allemagne. L'archevêché morave disparut, ainsi que celui de Bohême, et ils furent réunis à celui de Ratisbonne d'abord, puis à celui de Prague, enfin à cçlui d'OlmUtz 1073. A partir de 1080 la Moravie et la Bohême furent complètement latinisées; le mariage des prêtres, la langue vulgaire dans le culte, l'usage de la coupe, furent successivement interdits. Mais la résistance augmenta à mesure que la réaction se faisait sentir plus durement. Husset Jérôme de Prague trouvèrent en Bohême leurs partisans les plus dévoués, que les Compactata de Bâle et les lettres des princes encouragèrent encore. Les frères de Bohême, comme les vaudois à Ful-neck, jouirent en Moravie d'une certaine protection, jusqu'au moment oti le roi Podiebrad rouvrit l'ère des persécutions, 1458-1471. Lors de la Réforme il se forma en Bohême, en Moravie en Pologne un certain nombre de communautés, luthériennes, réformées et même anabaptistes, dont les destinées furent longtemps communes. Ferdinand II sévit tout d'abord contre les anabaptistes, mais peu à peu il procéda à l'extirpation totale du protestantisme dans ses États, 1620-1627; les frères de Moravie durent s'enfuir, ainsi que leurs pasteurs, entre autres Pévêque Amos Comenius. Ce fut pour près d'un siècle la fin de l'église des Frères. Mais de ses débris se forma vers 1722 la petite communauté des hernoutes, aussi appelés Frères moraves, ou Fr. de Bohême et de Moravie; elle obtint de s'installer sur un domaine du comte de Zinzendorf, et commença dès 1727 son travail d'organisation, qui fut pénible et assez long. v. Bost, Hist. des Fr. de Boh. et de Moravie. C'est dans l'œuvre des missions et dans l'enseignement de la jeunesse qu'ils ont obtenu le plus de succès.

Ils ont réalisé, comme discipline intérieure, Yecclesiola in eccletiâ, la petite Église dans la grande, restant attachés à l'Église du pays partout où ils le peuvent, c.-à-d. où l'Évangile est fidèlement prêché, mais conservant leur indépendance et leur organisation propre. Moins militants, mais non moins actifs que les wes-leyens, ils ont éveillé moins de susceptibilités et soulevé moins d'hostilités. Quant aux réformés et aux luthériens qui étaient restés en Moravie, les cruelles persécutions de Ferdinand II et de l'év. Ladislaw d'OlmUtz les décimèrent; cependant il en restait encore quelques milliers, lorsque parut en 1781 l'Édit de tolérance de Joseph II. Aujourd'hui ils vivent en pauvre état, mais ils sont à peu près libres, et si ce n'était l'extrême misère à laquelle il sont réduits, et leurs pasteurs avec eux, on pourrait dire que l'Autriche leur a accordé la pleine liberté de conscience; seulement il faut que le monde chrétien leur fournisse les moyens de vivre.

 

MORE, v. Morus.

 

MORÉLY, Jean-Baptiste, ou Morelly, Morel, en latin Morelius, né à Paris, réfugié à Genève pour cause de religion, entra en conflit avec Calvin relativement à la constitution de l'Église, qu'il aurait voulu voir plus démocratique. Il écrivit son Traité de la discipline et police chrétienne, qu'il fit imprimer à Lyon 1561, sans l'avoir d'abord soumis à la censure. Le livre est bien raisonné de fond et modéré de forme, mais le moment de sa publication était inopportun; le livre fut condamné au synode d'Orléans, et l'auteur excommunié 1562. Mo-rély en appela à Genève 1563, à Paris 1565, à La Rochelle 1571, à Nîmes 1572, et fut condamné chaque fois. En 1566 il est auprès de Jeanne d'Albret, précepteur de son fils, mais il perd cette place sur des plaintes venues de Genève. Dès lors il disparaît: on suppose que c'est le même Joannes Morelius que l'on trouve en Angleterre en 1589, déjà vieux, et auteur de quelques traités de controverse: De ecclesiâ ab Antichtàto liberanda, De Cœnd, Ex-tirpatio Antichrùti, 1594, etc.

 

MORGAN lo Thomas, déiste anglais. Après avoir desservi comme pasteur non-conformiste l'égl. de Marlborougb, il perdit sa place à cause de ses doctrines ariennes 1726; il s'établit ensuite comme médecin auprès des quakers de Bristol; enfin à Londres comme homme de lettres. f 1743. Son principal ouvrage est intitulé Le Philosophe moraliste; le 1^ volume 1737 est l'exposé, sous forme de dialogues, de ses idées philos, et religieuses; les deux suivants 1739 et 1740 en sont la défense et appartiennent à la polémique. Il voit dans le christianisme une révélation divine, mais à condition qu'on en écarte tout surnaturel, qui n'est qu'un • levain des éléments juifs qui s'y trouvent encore. t Le mosaïsme n'est pour lui qu'un degré religieux très inférieur, et la loi n'est qu'un assemblage arbitraire et tyrannique d'observances et de commandements. Son système rappelle ceux des gnostiques, et notamment de Marcion. Malgré son peu de valeur il souleva une vive opposition, qui eut pour conséquence une étude plus sérieuse de l'A. T.

2° Morgan, l'ami des deux Wesley et le fondateur du club méthodiste d'Oxford. Il ruina sa santé par des austérités exagérées et f 1732.

 

MORGANATIQUE, v. Mariage.

 

MORIN Simon, espèce de fanatique, né à Richemont et qui finit par s'établir à Paris. Emprisonné trois fois, en 1640,1644 et 1648. pour fausse doctrine, il se rétracta deux fois, mais «'tant retombé, il fut accusé officiellement par Jean Desmarets de Saint-Sorlin et condamné 1663 à être brûlé; ses adhérents furent envoyés aux galères. Il se disait le Fils de l'homme, une incarnation de Christ. Selon lui le règne de la loi avait duré jusqu'à la venue du Sauveur; puis était venu le règne de la grâce; avec lui-même enfin commençait le règne du Saint-Es-prit. L'Égl. romaine n'était autre que l'Antéchrist. Sa morale était plus étrange encore; il affirmait que les actions les plus impures ne peuvent souiller l'âme, et que même elles sont utiles parce qu'elles humilient l'orgueil humain.

2° Jean, né 1591 à Blois, de parents protestants; il étudia à Leyde, et fatigué des luttes auxquelles il assista entre les arminiens et les gomaristes, il se laissa convertir par le cardinal Duperron; il entra 1618 dans la Congrég. des oratoriens. Ses connaissances et ses écrits lui firent une telle réputation qu'Urbain VIII l'appela à Rome pour l'aider dans sa tentative de réunir l'Égl. grecque à l'Égl. latine. Rappelé par Richelieu, il reprit son activité littéraire, f 1659. On a de lui: Hist. de la délivrance de l'Égl. chrét. par Constantin, et de la souveraineté temporelle donnée à l'Égl. rom. par les rois de France, 1630; une étude sur les LXX et sur le Pentateuque samaritain, où il essaie de montrer leur accord, et leur supériorité sur le texte reçu; réimpr. plus complètement après sa mort, un vol. f°, 1669; un travail sur la Discipline dans l'administration du sacrement de la pénitence, 1651, et un traité sur les Ordinations dans l'Égl. 1655. Richard Simon a écrit sa Vie en tête de ses Antiq. ecclesiœ, 1682.

 

MORLNS, peuplade de la Gaule septentrionale, avoisinant la Belgique; son territoire répondait au nord de l'Artois et à la Flandre. Villes principales: Thérouanne etCassel (nord). Contrée évangélisée par Amand, Orner, etc. au siècle.

 

MORISQUES, nom que l'on donnait eu Es-pagne aux Maures qui s'étaient laissé baptiser pour éviter l'exil.

 

MORITZ, v. Maurice.

 

MORLIN, v. Mœrlin.

 

MORMONS, dits aussi les Saints des derniers jours, secte religieuse de l'Amérique du nord, fondée 1827 par Joë Smith, q. v. Voici la légende de son origine. Smith eut en 1827 une vision qui lui dévoila les erreurs de toutes les sectes et le désigna lui-môme comme l'organe d'une nouvelle révélation. Sur l'ordre d'un ange il alla creuser la terre à un certain endroit, et il y trouva enfouies les Tables de la révélation (le livre des mormons); il y trouva aussi les lunettes de l'Urim et Thummim, qui lui permirent de déchiffrer et de traduire les Tables. Elles portaient en substance, qu'un juif de Jérusalem, nommé Léhi, sous le règne de Sédécias, émigra vers l'est avec sa famille; après avoir traversé le désert ils arrivèrent au bord de la mer et passèrent en Amérique. Les tribus issues de ses 4 fils s'appelèrent Néphites, du nom du plus jeune, et finirent par peupler tout le pays. Les néphites s'appelaient déjà chrétiens avanl l'apparition du christianisme. Jésus se montra à eux après sa résurrection et leur prêcha l'Évangile. Ils se convertirent et menèrent, sous la conduite d'un patriarche, une vie chrétienne; mais à la longue ils se divisèrent et tombèrent dans toutes sortes de désordres, si bien que la tribu des Lama ni tes, d'où descendent auj. les Indiens, les extermina. C'est alors que les derniers prophètes reçurent l'ordre d'écrire l'histoire du peuple infidèle. Ce fut Mormon qui l'écrivit; son fils Moroni l'acheva. L'histoire est écrite en caractères égyptiens, sur des plaques, ou tables, et enterrées pour être retrouvées seulement aux derniers jours et par Jo? Smith qui est spécialement désigné pour cela dans l'oracle. Après la légende voici l'histoire: Le livre mormon a été écrit en 1812 par Salomon Spaulding, pasteur presbytérien à New-Salem, dans l'Ohio, f 1816. C'est le développement romanesque et imaginaire d'une tradition sans preuve qui fait descendre les Indiens d'Amérique des juifs exilés à Babylone. Il remit son mss. à un éditeur de Pittsburg, Patter-son, qui le mit de côté, peut-être en attendant un moment favorable pour l'imprimer. Un jour ce manuscrit disparut. Mais un autre imprimeur, Sidney Rigdon, aussi un ancien prédicateur, avait réussi à s'en procurer une copie, et cette copie tomba entre les mains de Jo? Smith, qui résolut d'en tirer parti. Il le retravailla, le mit à son point de vue, et d'accord avec Rigdon et son ami Cowdry, aidé par la générosité d'un riche campagnard de leurs fidèles, Martin Harris, il le fit imprimer en le donnant comme la traduction des tablettes d'or de Moroni, qui lui auraient été révélées et expliquées par un ange. Les imposteurs s'établirent d'abord, 30juin 1830, à La Fayette, New-York, au nombre d'une trentaine. Mal vus du public, ils se rendirent en 1831 à Kirtland, dans l'Ohio, où Smith prétendit avoir reçu le don de prophétie et de révélation, et où il continua l'œuvre d'organisation de sa communauté, supprimant tout ce qui rappelait le presbytérianisme et rétablissant les emplois bibliques. La nouvelle secte fit de rapides progrès, grâce à l'aplomb avec lequel Smith débitait ses prophéties, et grâce à l'activité de ses missionnaires. Elle dut, à la suite d'une vision, se transporter dans le comté de Jackson, Missouri, mais le peuple les prit pour des brigands et les chassa. Ils passèrent dans l'IHinois, où ils fondèrent la ville de Nauvoo, où Smith joignit à ses fonctions religieuses celles de maire et de commandant des milices. Mais l'organisation de la communauté, sa prétention d'être la maîtresse du pays en qualité t d'héritière des gentils, » et surtout l'introduction de la polygamie que Smith pratiqua d'abord, qu'il recommanda à ses fidèles, et qu'il voulut rendre générale, soulevèrent le peuple qui jeta le prophète en prison et l'assassina, ainsi que son frère Hiram, 27 juin 1844. Il fut remplacé par Brigham Young comme chef des mormons. Chassés de Nauvoo, ils se rendirent en 1847 sur les bords du Lac Salé, près des monts Nevada, sur les frontières des États-Unis, où ils fondèrent l'Utah, ou Déseret, qui fut reconnu comme un territoire par le gouvernement des États-Unis, et dont Young fut nommé gouverneur, réunissant de nouveau en sa personne les pouvoirs civils et religieux. En dépit des difficultés que lui suscita à plusieurs reprises le gouvernement américain, la ville mormone prit un rapide développement, et grâce à l'arrivée de nombreux colons attirés d'Amérique et d'Europe, elle atteignit en peu de temps le chiffre de 80,000 habitants. Mais le gouvernement des Etats-Unis, par diverses lois, par l'envoi d'un nouveau gouverneur et de nouveaux fonctionnaires, appuyés par 2500 soldats, a coupé court aux progrès de la polygamie; de nouveaux colons, non mormons, se sont établis dans l'Utah; le chemin du Pacifique les a réunis au monde civilisé, et la mort de Br. Young 1877 leur a porté un coup fatal. Quant aux doctrines de cette secte, qui prétend conserver encore le titre de chrétienne, c'est un bizarre mélange de matérialisme, de sensualisme et d'extravagances religieuses empruntées à diverses dénominations chrétiennes des États-Unis. Le mormonisme prétend à la fois restaurer le vrai christianisme et en être l'accomplissement définitif, le dernier mot. Il en a gardé l'idée de la rédemption et du règne de Dieu, mais il en rejette la morale. Il continue d'appeler la Bible l'Écriture Sainte, mais Smith affirme que le texte en est complètement altéré, et il l'a rétabli dans son intégrité avec l'arbitraire le plus capricieux. Tout le système repose en réalité sur le don de prophétie que s'attribue le chef, et que d'autres peuvent revendiquer également sous prétexte de visions, de songes, d'inspiration, etc. Les miracles tiennent de la magie, et la foi se réduit à une soumission absolue à la nouv. Église et à un dévouement sans réserve à ses intérêts. C'est une démocratie sociale, où le temporel et le spirituel sont presque identifiés, et par la multiplicité des charges l'individu est relié à l'ensemble de la manière la plus étroite. Il y a le président ou voyant qui exerce l'autorité la plus absolue, malgré deux assistants qui lui sont adjoints. Puis viennent les 12 apôtres et les 70 disciples, qui représentent les deux chambres, et qui forment le Congrès en se réunissant. Douze grands sacrificateurs, conseil d'État ou tribunal suprême, décident dans les cas douteux ou difficiles. Le clergé est divisé en deux classes: les prêtres selon l'ordre de Melchisédec; ils sont présidés par le Voyant, qui a les clefs des bénédictions célestes et qui est en communication directe avec Dieu le Père et avec Christ; et les prêtres selon l'ordre d'Aaron, présidés par l'Ange, et qui remplissent les offices ordinaires du culte. Le clergé a sa hiérarchie: souverains sacrificateurs, patriarches, évêques, anciens, prêtres, diacres et catéchistes. Le culte est riche en cérémonies, empruntées soit au judaïsme, soit aux mystère* d'autres religions; il consiste surtout en prières, chants, discours, bénédiction, baptême et cène, et se termine quelquefois par des cris tumultueux ou par de joyeuses manifestations. Les langues et les allocutions sont permises à tous et ne portent pas nécessairement sur des sujets religieux. Il y a aussi des cérémonies spéciales pour les réceptions de membres et pour les consécrations. Parmi leurs particularités il faut noter le baptême pour les morts, qui peut assurer aux morts leur réception dans l'Église, et l'idée que les femmes ne peuvent avoir part à la rédemption qu'autant qu'elles sont unies a un saint, ce qui favorise et rend nécessaire la polygamie. Ils sont chiliastes, croient au rétablissement des juifs dans leur patrie et au prochain règne de mille ans. Leurs idées sur la vie future sont vagues, mais matérielles. On ne peut guère parler de leur système religieux, attendu que leurs révélations ont précisément pour objet de le modifier suivant les besoins du moment. Ce qui frappe les yeux, ce sont leurs travaux agricoles, le développement de leur cité, le nombre de leurs établissements d'utilité publique, université, écoles, ateliers, théâtre, et autres créations, qui réclament les forces de tous et qui doivent servir à tous. Cette prospérité extérieure a fait illusion à beaucoup de personnes et a séduit même des visiteurs étrangers à la secte, mais comme leur moralité n'a d'autre règle que le bien matériel de la communauté, quoiqu'ils fassent profession d'admettre le décalogue, ils s'abandonnent à des désordres révoltants, qui leur ont valu la haine et le mépris des Américains, et plus d'une fois l'intervention fédérale. — Sur leurs principes, v. Doctrines and Covenants9 Nauvoo 1846, parRig-don, qui fut excommunié plus tard, et différents articles de journaux. Les mormons les plus connus, outre Smith et Young, sont Rigdon, P. Wittmer, l'allemand Phelps qui a publié leur premier journal, l'apôtre Orson Pratl, etc. Ils ont recruté des adhérents en Suède, Danemark, Angleterre, peu en Suisse malgré leurs efforts. V. Gunnison, Mrs. White, Dixon, Guers, etc.

 

MORNAY, v. Du Plessis-Mornay.

 

MORON, ou Morone (Jean de), Un des prélats romains les plus distingués de l'âge de la Réformation. Né 1509 à Milan, fils du chancelier comte Girolarno de M., il étudia à Padoue; év. de Modène en 1536; Paul III l'envoie comme nonce auprès de Ferdinand, et le délègue aux colloques de Spire et de Worms. ainsi qu'à la diète de Spire. Nommé cardinal en 1542, et de retour dans son diocèse, ses vues se sont élargies par son séjour en Allemagne; il tolère l'égl. évang. fondée à Modène par Ricci, favorise la diffusion du livre Le bienfait de la mort de Christ, et prêche lui-même la justification par la foi: mais il n'en maintient pas moins sa soumission au pape. Légat de Bologne en 1544, il renonce 1548 à ces fonctions et à son évêché de Modéne, pour prendre celui de Novare. En 1555 il est nonce du pape à Augsbourg. En 1557 Paul IV le fait enfermer ati château Saint-Ange comme suspect d'hérésie, ainsi que le cardinal Polus et l'év. Foscarari de Modène; mais Pie IV lui rend la liberté et sa faveur, 1559; il l'envoie comme légat auprès de Ferdinand 1562, et en 1563 en cette même qualité au conc. de Trente, qu'il présida jusqu'à la fin. En récompense de ses services il fut nommé doyen du sacré collège. Il remplit encore plusieurs missions diplomatiques, et f 1 déc. 1580 comme cardinal-év. d'Ostie. On a de lui quelques lettres et des discours.

 

MORONI, v. Mormons.

 

MORRISON, Robert, fils d'un cordonnier. Né 1782 à Morpeth, Northumberland, il entra 1807 au service de la Soc. biblique britannique comme missionnaire et fut envoyé à Macao. Comme l'entrée du pays était sévèrement interdite aux étrangers, surtout aux chrétiens, il passa plusieurs années dans la retraite à Canton, ne s'occupant que de l'étude du chinois, et se préparant comme interprète de la factorerie anglaise de Macao à l'œuvre qu'il devait accomplir. En 1816 il accompagna en cette même qualité lord Amhorst à Pékin, et enfin en 1823, après lô années d'études, il revint en Angleterre, avec une collection d'environ 10,000 volumes chinois. En 1826 il repartit pour la Chine, où il ne cessa de travailler avec fruit à l'œuvre de la mission jusqu'à sa f l«r août 1834. Avec sa parfaite connaissance de la langue chinoise, il avait trad. la Bible 1819, aidé de son fidèle Leang-Afa. Il a publié aussi une Gramm. chinoise, Serampore 1815; un Vocabulaire en 6 vol., Macao 1815-1822, et un grand nombre de traités pour l'impression desquels il avait établi à Canton une imprimerie spéciale, qui devait servir plus tard de centre à l'activité missionnaire. Il a aussi fondé l'institut anglo-chinois de Malacca 1818, et un hôpital à Macao. Le fruit immédiat de son ministère fut un petit troupeau de Chinois convertis, qu'il évangélisait et édifiait sans réveiller l'attention des autorités.

 

MORTS. Le mystère de la mort, son inévitable certitude, l'incertitude du moment, l'état des âmes au delà du tombeau, tous ces sujets qui s'imposent à l'attention et qui fascinent quand on les considère de près, ont joué un rôle dans l'Église, soit en frappant l'imagination, soit en éveillant les consciences, soit en favorisant la superstition. Voici quelques-uns des points par lesquels ces questions appartiennent à l'hist. ecclésiastique.

La nécromancie, ou conjuration des morts, leur évocation, repose sur la foi à l'immortalité de l'âme. Connue des Perses, des Grecs, des Romains; pratiquée à Héraclée, à Trézène, au lac d'Averne, elle n'était pas inconnue des Hébreux, comme on le voit par la pythonisse d'En-dor, et par les défenses mêmes de la loi, 1 Sam. 28, 7. Deut. 18, 11. Lév. 20, 27. On en trouve des traces jusque dans Ésaïe 8, 19. 29, 4. L'Égl. chrétienne l'a touj. condamnée comme diabolique, ce qui n'a pas empêché quelques esprits rêveurs d'y ajouter foi en quelque degré, Para-celse, Bôhme, Agrippa, puis au siècle dernier Cagliostro; de nos jours enfin les spirites.

La danse des morts. essai fantastique d'allé-goriser la mort dans ses rapports avec toutes les classes d'hommes; riches, pauvres, bons, mauvais, vieux ou jeunes, elle les entraîne tous au sépulcre en dansant une ronde infernale. Elle est représentée tantôt comme un faucheur, tantôt comme un cultivateur qui se sert de sang pour engrais, tantôt comme un squelette, tantôt comme un cadavre enveloppé d'un linceul. Elle est quelquefois seule avec sa victime; d*au-tres fois elle danse avec de nombreux personnages, rappelant les pestes qui ravagèrent l'Europe vers le 14»* siècle. C'est surtout en Allemagne et en France que cette idée devint populaire et inspira les artistes, peintres, poètes et sculpteurs. Le moyen Age aimait à la reproduire sur les murs de ses cimetières, et celui des Innocents à Paris en renferme une des plus anciennes que l'on connaisse; les vers et les bas-reliefs datent d'à peu près 1424. Dans l'origine il y avait un quatrain pour chaque personnage, et les mss. se chargèrent d'illustrer le texte; chaque peintre avait naturellement sa manière, et les fresques offrent de grandes variétés. Ce genre passa ensuite en Espagne, aux Pays-Bas. en Italie, on Angleterre. L'un des tableaux les plus célèbres est celui de Holbein, qui a été reproduit nombre de fois par la gravure, et qui a donné lieu à beaucoup d'imitations; il compte jusqu'à 58 figures. Plus récemment Kaulbach a fait aussi une Danse des morts accommodée au goût et aux préoccupations modernes. Le nom français de Danse macabre, dériverait selon les uns (Ducange) de Danse des Maccibées et serait une allusion au martyre de la mère et de ses 7 enfants raconté 2 Maccab.; d'autres voient dans Macabre le nom de celui qui en a eu le premier l'idée; quelaues-uns le font venir du grec ma-rarios (bienheureux); tout cela est bien forcé. Peut-être faut-il le dériver de l'arabe magbarah (hébr. kèbèr), cimetière.

La communion des morts. Plusieurs décrets des conciles de Carthage 397, Constantinople fi92, Auxerre 578 ou 590, montrent qu'en quelques endroits on avait l'habitude de mettre le pain de la communion dans la bouche des morts, s'ils n'avaient pas communié au commencement de leur maladie ou immédiatement avant leur mort.

La confrérie de la mort, association qui date de Boniface; elle se composait d'hommes appartenant à diverses églises ou couvents, qui s'engageaient les uns vis-à-vis des autres à faire dire des messes dans toutes les chapelles de leur ressort pour hâter leur sortie du purgatoire. Des princes et seigneurs étaient admis par faveur particulière à en faire partie.

Les enterreurs de morts, ou fossoyeurs, étaient censés appartenir au clergé inférieur. Ils étaient fort nombreux dans les villes. Théodose IJ, en 418, réduisit leur nombre à Constantinople à 950! Avec les parabolans ils formaient un chiffre respectable, tout à la dévotion des évêques et prêts à servir leurs caprices ou leur ambition. On ne les connaissait pas avant l'apparition du christianisme, et ils ne tardèrent pas à redevenir une fonction purement civile.

On appelle Extrait mortuaire une attestation copiée du registre paroissial, certifiant le décès d'une personne, et indiquant ses noms, son âge, sa condition, sa religion, la date de sa mort et celle de son inhumation, le tout scellé et signé par l'autorité ecclésiastique compétente. Ce document a cessé d'avoir de la valeur là où les registres sont tenus par les officiers de l'état civil. Il se délivre sur demande et moyennant finance.

Mortuaire ymortuarium) se dit quelquefois aussi en style ecclésiastique, de la redevance due à l'Église sur la succession des ecclésiastiques, depuis que ceux-ci ont recouvré le droit de disposer de leurs biens par testament.

La Fête des morts, ou des Trépassés, pieux souvenir consacré à la mémoire de ceux qui ne sont plus, 2 novembre, rappelle les Expiations funèbres que les païens célébraient pour les mânes de leurs ancêtres et qui sont encore en Chine une fête religieuse.

 

MORUS. ou More lo Thomas, chancelier d'Angleterre, né 1480 à Londres, fils d'un juge du Banc de la reine, il fit ses premières études auprès du cardinal Morton et à Oxford. Plus tard il se tourna vers le droit, tout en continuant la rhétorique et la littérature classique. Il entra en relations avec Érasme, qui l'engagea à cultiver la satire dans le genre de Lucien. Son début fut un coup de maître; il publia 1516 un livre remarquable par l'élégance de la forme non moins que par la profondeur des pensées, et qui fut aussitôt trad. dans presque toutes les langues de l'Europe, l'Eutopie (De optimo rei-publicœ statu, deque nova insuld Eutopia). C'est un ouvrage allégorique dans le genre de la République de Platon, et une critique de la Constitution anglaise. L'auteur a découvert dans l'Océan pacifique une île, l'Eutopie, et il y voit régner la liberté religieuse, l'égalité des droits et des devoirs, la communauté des biens, etc. C'était très avancé pour son temps et, dans tous les cas, un singulier mélange de faux et de vrai. Le juriste n'en continua pas moins ses études de droit. iNommé membre de la Chambre des communes 1503, il se distingua par une opposition courageuse qui le rendit très populaire; mais devant l'hostilité de la cour il se retira dans le couvent des chartreux à Londres, où il passa 4 ans; il visita ensuite les univ. de Louvain et de Paris. De retour il fut nommé sous-shérif, puis juge de paix à Londres, et enfin, après avoir servi Henri VIII dans plusieurs négociations avec la France et les Pays-Bas, il fut appelé en 1529 aux fonctions de grand-chance-lier, en remplacement de Wolsey disgracié. Il remplit cette charge pendant 2 ans avec zèle et désintéressement; mais catholique ardent, après avoir persécuté les hérétiques, il refusa d'entrer dans la voie nouvelle inaugurée par le souverain et résigna les sceaux, 1532. L'irritation d'Henri VIII s'accrut par le refus de Morns d'approuver son divorce. Accusé de complicité dans la conjuration de la religieuse de Kent, il réussit à prouver son innocence, mais comme il refusa de se prêter à l'acte de succession de 1534, qui supposait l'illégitimité du premier mariage du roi, il fut enfermé à la Tour. L'année suivante, appelé ainsi que l'évêque Fisherà prêter le serment de suprématie qui faisait du roi le chef de l'Église, il refusa de nouveau, refus qui fut interprété comme un acte de haute trahison, et il eut la tête tranchée, 6 juill. 1535. Cet assassinat judiciaire était pour Henri VIII une nécessité politique, inspirée par la crainte de trouver sur son chemin l'instrument d'une redoutable réaction contre l'affranchissment du pays vis-à-vis de la tutelle romaine; il n'en pèse pas moins sur la mémoire du roi.

2° Samuel-Fréd.-Nathanaël, théol. luthérien, né 1736 à Laubau, Lusace, étudia à Leipzig et finit par s'y établir. D'abord précepteur, puis magistrat, il fut nommé en 1771 prof, de grec et de latin, en 1780 éphore des boursiers, en 1782 successeur d'Ernestî comme prof, de théol., enfin chanoine de Meissen et membre du Consistoire, f 4 nov. 1792. Ses nombreux ouvrages d'exégèse n'ont eu qu'une valeur passagère; son Epitome theol. christianœ, fort apprécié en son temps, a eu plusieurs éditions; mais ce qu'il a fait de mieux c'est son Développement des principes herméneutiques d'Ernesti, Hermeneutica, 2 vol. 1797.

 

MOSCHUS, Jean, moine du 6m* siècle, vécut sous Tibère H et sous Maurice. Né probablement en Palestine, il fut prêtre à Jérusalem, et demeura quelque temps sur les bords du Jourdain et dans la laure de Saint-Saba. Fuyant les malheurs de la guerre des Perses, il parcourut l'Égypte et les îles de la Grèce et f vers 620 à Rome. C'est dans cette ville qu'il écrivit et adressa à son ami et disciple Sophronius, qui fut plus tard patr. de Jérusalem, son Verger spirituel, ou récit de ce qu'il avait rencontré d'édifiant dans ses voyages et dans ses visites aux différents couvents. Il manque de critique, et raconte sans broncher toutes les histoires d'anges, de visions, de miracles qu'il a recueillies; mais il n'en est pas moins intéressant à consulter pour l'hist. des hérésies et de la vie monacale de son temps. Il a écrit aussi la vie de quelques saints qu'il a connus.

 

MOSELLANUS, v. Schade.

 

MOSER lo Marie, née 23 oct. 1550, fille du bailli Valentin Moser, perdit sa mère à 9 ans, épousa à 26 ans le pasteur Jean André, et le perdit en 1601. Elle vécut dès lors avec une stricte économie, instruisant elle-même ses sept enfants. Sa vie entière était consacrée à la bienfaisance et à l'évangélisation. En 1607 la duchesse Sibylle du Wurtemberg en fit son amie, et lui laissa à sa mort 1614 une pension viagère. Elle f après sept jours de maladie, 25 janv. 1631 à 8 h. du soir après avoir pris la cène, ayant conservé ses facultés et son activité jusqu'au dernier moment.

2° Moser, Jean-Jacques, auteur de plus de 1200 cantiques allemands, qui honorent le chrétien encore plus que le poète; né à Stuttgart 18 janv. 1701, il publia à 19 ans son premier ouvrage et enseigna le droit à Tubingue. Appelé à Vienne 1721 il fut sollicité de se faire catholique, mais refusa et revint 1727 dans son pays, où il remplit successivement plusieurs charges et missions, soit à Stuttgart même et à Tubingue, soit à Francfort sur l'Oder et dans la Hesse. Par la position loyale qu'il prit lors des démêlés du duc et des petits princes, il s'attira la colère du duc qui le fit jeter en prison sans jugement 1759; il n'en sortit qu'en 1764, fut réintégré dans sa charge et f 30 sept. 1785. Il a publié plus de 500 vol., presque tous relatifs au droit public en Allemagne, et il est considéré comme le créateur de la science du droit germanique.

3° Son fils Frédéric-Charles, né 18 déc. 1723. f 10 sept. 1798, a écrit sur les mêmes matières des ouvrages très estimés, et s'est montré à tous égards le digne fils de son père.

 

MOSHEIM lo Jean-Laurent (de), savant luthérien, né à Lubeck 1694, fils, disait-on, d'un laquais de la cour, devenu plus tard lieutenant, mais en réalité fils naturel du duc Ernest-Léo-pold de Holstein-Plo'én, neveu de sa protectrice la duchesse de Brunswick. Il se distingua de bonne heure, dès 1716, par ses qualités d'écrivain, notamment par des pensées détachées sur la poésie; en 1718 il était maître; en 1719 il donnait un cours à Kiel sur la logique et la métaphysique; en 1723 il était appelé comme prof, de théol. à Helmstâdt, et pour l'y fixer plus sûrement on y ajoutait la charge et les revenus d'abbé de Marienthal et de Michaelstein, une place au consistoire et l'inspection de toutes les écoles du duché. Il refusa plusieurs appels qui lui furent adressés, de Leipzig, Dantzig, Hol-stein et Finlande. Enfin en 1747, à la demande de l'électeur de Hanovre, il accepta la place de prof, de théol. et de chancelier de l'univ. àGôt-tingue, où il f 1755. Versé dans la connaissance de la littérature classique, il savait parfaitement l'anglais, le français et l'italien, el avait cultivé presque toutes les branches de la théologie. A la science il joignait un style élégant et pur et s'élevait souvent jusqu'à l'éloquence. En religion il avait pris une position intermédiaire entre l'orthodoxie, le rationalisme et le piétisme, et cherchait à faire accepter par les esprits cultivés les vérités positives de la révélation. Comme prédicateur il a exercé de l'influence par la recherche et la beauté de la forme. Comme historien il s'est appliqué à être impartial, quoiqu'il ait été mal inspiré dans le mode de division qu'il avait adopté pour chaque siècle (événements heureux et év. malheureux); il avait un don particulier pour exposer l'hist. des dogmes. Il a laissé de nombreux ouvrages; les principaux sont des Sermons 1725, un Abrégé d'hist. ecclésiastique, latin 1726, allemand 1769; une Morale de l'Écriture 1735 1745, en 4 vol., qui obtint un immense succès et fut continuée par Miller; Études sur le christianisme avant Constantin; une trad. de VIntellec-tuai System de Cudworth, avec notes, et une foule de dissertations spéciales sur les sujets les plus divers, en particulier sur les rapports du platonisme avec le christianisme.

2° Mosheim, Ruprecht (de), d'une famille de Styrie, doyen du chapitre de Passau en 1522, auteur d'un écrit: De monarchid et renascentid christianœ fidei. Esprit bizarre et bien intentionné, voyant des erreurs dans toutes les sectes, trouvant le papisme, le luthéranisme, le zwinglianisme et l'anabaptisme également antichrétiens, il rêva de les purifier et de les réunir en une seule Église par le retour à Christ. Au colloque de Haguenau 1539 il discuta avec Osiander et Venatorius du côté évangélique, avec Nausea et Cochlâus du côté catholique. Ces derniers le convainquirent d'hérésie pour avoir attaqué la conduite du clergé, la mutilation du sacrement et le trafic des choses saintes; il fut jeté en prison et f 1544.

 

MOTET (motetto, un petit mot). On appelait primitivement ainsi un cantique spirituel à plusieurs voix, d'un caractère plus libre que le choral et n'appartenant pas à l'office liturgique. C'était d'ordinaire un texte de la Bible plus ou moins développé et arrangé pour un ou deux chœurs. Connu déjà avant Palestrina, qui ne le dédaigna point, il atteignit sa plus grande perfection avec Séb. Bach et Braun.

 

MOVERS, François-Ch., théol. catholique, né 1806 à Koesfeld, Westphalie, prof, de théol. à Breslau, f 28 sept. 1856. Connu surtout par trois ouvrages estimés sur les Phéniciens, leurs antiquités et leur religion, utiles à consulter pour les études bibliques.

 

MOZARABES (faux arabes, arabes mélangés, étrangers, inanthentiques); nom que les Arabes et les Maures d'Espagne donnaient aux chrétiens qui habitaient au milieu d'eux et auxquels ils avaient laissé le libre exercice de leur culte. Leur position les avait rendus assez indépendants vis-à-vis de Rome, pour qu'ils eussent une liturgie distincte. Cette liturgie mozarabi-que, que quelques-uns font remonter à Isidore de Séville, est probablement plus ancienne encore et offre plusieurs points de ressemblance avec la liturgie gallicane et avec celle de l'Égl.

d'Orient. C'est le concile de Tolède 633 tjui l'adopta pour l'Espagne, Jean X918 et Alexandre II 1064 la reconnurent; le cardinal Ximé-nès fonda môme à Tolède une chapelle pour le culte mozarabique, fit imprimer en 1500 pour la première fois cette liturgie, et deux ans après, le bréviaire qui en dépend. Elle se distingue des lit. romaines par 6 Dimanches de l'A vent, 2 jours de fête pour l'Annonciation, chaque jour une introduction différente au service de la messe, et surtout par un système de périco-pes plus complet, comprenant chaque fois une lecture des prophètes, une des apôtres et une des évangiles, faisant autant que possible un ensemble. Quant aux fêtes qui n'existaient pas à l'origine, il y a été pourvu plus tard. Le chant aussi, qui porte le nom (Veugénien d'après son créateur, l'archev. Eugène de Tolède, se distingue du chant grégorien par plus de mélodie et une plus grande place donnée au chant figuré.

 

MOHAMMED, v. Mahomet.

 

MUHLER, Henri (de), né 4 nov. 1812, fils de l'ancien ministre de la justice en Prusse, s'intéressa de bonne heure à toutes les questions de droit ecclésiastique, et publia en 1846 une Hist. de la Constitution ecclés. du Brandebourg, qui lui marqua dans l'Église une place distinguée. En 1848 il fut nommé membre et secrétaire du Comité du Kirchentag. et presque en même temps assesseur à la direction des cultes, de Berlin. En 1858, membre du Consistoire supérieur et du Conseil ecclésiastique, il montra combien il prenait à cœur les intérêts de l'Église, en s'adjoignant des hommes comme Wichern. Enfin 12 mars 1862 il fut nommé ministre des cultes. Défenseur ardent de l'Égl. officielle nationale, et en même temps de la foi évangélique, il mettait la vie religieuse au-dessus de tout et favorisa par son exemple toutes les tentatives entreprises dans ce but. On a pu lui reprocher des inconséquences, et peut-être trop d'indulgence pour le système catholique, mais ce qui lui a fait surtout des ennemis, c'est qu'il voulait que les choses de la religion fussent dirigées par des hommes religieux. Il f à Potsdam 10 mai 1874. Sa femme, Adelaïde de Gossler, était remarquablement douée et l'a peut-être trop laissé voir. On a de Mtlhler quelques cantiques.

 

MULLENS, Joseph, né 1820, missionnaire aux Indes depuis 1843, gendre de Lacroix 1845, revint en Angleterre en 1866, fut nommé secrétaire de la Soc. des missions, visita en 1870 l'Amérique, en 1873 Madagascar, accompagna en avril 1879 dans le district d'Ujiji deux jeunes missionnaires envoyés de Londres, et f d'une péritonite aiguë 10 juillet 1879 à Mpoua-poua entre Zanzibar et Ujiji.

 

MULLER lo Henri, né à Lubeck 18 oct. 1631, étbdia à Rostock et à Greifswald, fat pastenr à Rostock, prof, de grec, puis de théol., et surintendant. f 13 sept. 1675. Très orthodoxe, il était de l'école d'Arndt et cherchait dans le christianisme une source de vie religieuse et non de sèches formules. Il a publié des sermons, beaucoup de livres d'édification, une théorie de la prédication, une Harmonie chro-nol. de TA. et du N. T. etc.

2° Jean-Georges, frère du cél. historien, né 1759 à Schaffhouse; il étudia à Zurich et à Gôl-tingue, et devint docteur en théol.; mais sa santé ne lui permit pas de prendre la charge d'une paroisse. Il enseigna dès 1794 dans le collège de sa ville natale le grec, l'hébreu, puis l'encyclopédie et la méthodologie. Pendant la révolution il fut représentant du peuple, et membre du Petit Conseil, mais en 1809 il renonça à ses fonctions civiles et politiques, pour continuer son enseignement jusqu'à sa f 1819. Ses nombreux écrits ont presque tous un caractère apologétique. L'influence de son frère aîné, et celle de Herder dont il fut l'hôte et l'ami, ont donné à sa théol. une tendance pratique et humaine qui s'allie à une foi vivante à la révélation.

3o Pierre-Érasme, né 29 mai 1776 à Copenhague, étudia la théol. et la philos, dans plusieurs universités; prof, de théol. à Copenhague 1801; évêque de Seeland 1830; t 1834. Il a publié une Apologétique, une Morale et une Théol. chrétienne; une étude sur les Symboles, et plusieurs ouvrages sur les antiquités Scandinaves.

4° Adam-Henri, né' à Berlin 30 juin 1779, vint à Gottingue pour y étudier la théol., mais il y renonça pour se livrer à la philos, et au droit. Il retourna à Berlin en 1800, passa de là à Vienne 1805 où il se fit catholique; il rêvait la restauration du moyen âge; son idéal était l'État fondé sur la religion, ce qui le fit appeler un romantique parmi les politiques. En 1813 il entra au service de l'Autriche, prit part aux conférences de Carlsbad, fut anobli en 1826 et nommé conseiller aulique. f 1829.

5° Julius, un des théol. les plus considérables de notre temps. Né à Brieg 18 avril 1801, il étudia à Breslau, Gottingue et Berlin, d'abord le droit, puis la théologie. Pasteur en 1825 à Schœnbrunn et Rosen, il fut successivement prof, de théol. à Gottingue, Marbourg et Halle. Il enseigna la morale et la dogmatique dans une direction conciliatrice. Son principal ouvrage a pour sujet la Doctrine du péché. En 1846 à la Confér. de Berlin il lut un rapport dans le sens de l'Union, dont il fut toujours le représentant convaincu. En 1850 il fonda avec Néander et Nitzsch une Revue de la science et de la Vie chrétienne. Ses sermons ont pour titre: La Vie chrétienne. Il a publié aussi de nombreux articles dans les Studien und Kritiken. f 1878.

 

MUNIER, David, né 1798 à Genève, consacré en 1819, suffragant au Havre, lit un séjour à Paris, où il vit Cousin, entendit Talma et se lia avec la famille Monod. De retour à Genève il épousa Mlle Romilly, femme d'esprit et de cœur, portraitiste distinguée. Nommé pasteur à Chêne en 1825, prof, de théol. en 1826, recteur de 1832 à 1837, il fut chargé spécialement de la direction des étudiants français et se consacra à eux avec une bonté toute paternelle qui, malgré une certaine rudesse de formes, lui gagnait les cœurs et lui valut en 1865, à la demande de 168 pasteurs français, la croix d'honneur. Quoiqu'il lût ses sermons, Munier était un orateur de premier ordre; il n'improvisait pas facilement, à moins qu'il ne fût entraîné par son sujet. Sa taille élevée et bien prise, sa physionomie mobile et caractéristique, sa voix sonore et vibrante, ses yeux sympathiques, son geste expressif et correct, tout concourait à rehausser l'éclat de son éloquence. Il a longtemps exercé sur l'Église, l'Académie et même sur les Conseils du pays une influence incontestée. En religion il fut jusqu'en 1847 un des chefs du parti dit libéral, mais touj. en coquetterie personnelle avec les hommes du réveil, dont il n'a jamais méconnu la valeur. Quand le libéralisme versa dans la négation pure, il s'en sépara avec éclat, et se joignit à l'Union nationale évangélique. Fondateur de plusieurs œuvres religieuses (Protestants disséminés, etc.), il fut aussi, avec Bartholony, l'un des fondateurs du Conservatoire de musique. Travailleur infatigable, habile organisateur, on peut dire que pendant bien des années il fut mêlé à tout ce qui se faisait à Genève et, peut-être, qu'il embrassa trop de choses. Il n'a laissé que quelques sermons, des articles de journaux et des brochures de circonstance. Sa fin fut le digne couronnement d'une vie consacrée au service du Maître. Atteint d'une fluxion de poitrine à l'issue des conférences pastorales de Lausanne, il put revenir dans sa famille, mais bientôt le délire s'empara de lui, délire tout religieux, qui le transportait dans le monde des esprits. Il ne savait plus qu'une chose, c'est qu'il était chrétien et pasteur. Et quand, au matin, il entendit rouler la voiture du docteur, il murmura: C'est le chariot d'Élie, qui vient me prendre. Ce fut sa tin. 19 oct. 1872.

 

MUNOZ, antipape, v. Clément VIII.

 

MUNSCHER, Guill., né 11 mars 1766 à Her$-feld, dont son père était métropolitain. Il lf» remplaça, vint ensuite à Marbourg comme prof, de théol. et fut nommé membre du Consistoire et inspecteur réformé dans la Hesse. f 28 juill. 1814. Auteur d'un Abrégé d'Hist. ecclés.. il a étudié l'Hist. des dogmes au point de vue rationaliste, et a rendu surtout des services en relevant dans les campagnes l'instruction primaire; il a même fondé à Marbourg un séminaire pour les régents de campagne. Ses fils l'ont suivi dans cette voie. Son petit-fils. Dr théol., a publié dans la Revue de Schenkel un bon travail sur les Principes de la Réformation.

 

MUNSTER. Dérivé du latin monasterium, monastère, ce mot désignait d'abord une abbaye, puis l'église de l'abbaye, et il finit sous différentes formes (Moutier, Monetier, Montreux?) par devenir un nom propre. Il servit entre autres à désigner vers 1090 une ville des États prussiens, qui s'appelait alors Mimigardevorde, et qui avait déjà été constituée en évéché sous Charlemagne, avec Luidger pour premier évêque. Sa circonscription diocésaine fut modifiée à diverses reprises par les événements politiques, notamment à l'époque de la Réformation. Le belliqueux évêque Bernard de Galen 1651-1678 enleva à la ville tous ses droits et privilèges pour la soumettre à l'autorité épiscopale, mais cela dura peu. Parmi les prélats qui ont illustré, de différentes manières, cette ville auj. tout à fait prussienne, il faut compter Franç.-Fréd. de Furstenberg, 1729-1810, qui fonda des gymnases et agrandit l'univ., avec l'appui du cercle Gallitzin, des Katerkamp, des Droste-Vis-chering, des Overberg, etc. Le triomphe des anabaptistes 1532-1535 forme l'épisode le plus tragique de l'histoire de cette ville. La Réformation avait pénétré à Munster dès 1524, et grâce à l'heureuse influence du prédicateur hes-sois Bernard Rottmann, les évangéliques en étaient venus en 1529 à pouvoir prêcher dans 6 églises. En 1532 arrivèrent de Hollande les anabaptistes proscrits; ils avaient pour chef Bernard Knipperdolling, bourgeois de Munster, Jean Matthiesende Harlem, et Bockhold q. v.; Rottmann, après les avoir d'abord combattus, finit par se joindre à eux. Les élections communales de 1534 leur donnèrent la majorité; Knipperdolling fut élu bourgmestre; tous les non-croyants furent bannis de la ville, février 1534; la communauté des biens fut proclamée, ainsi que la polygamie, et l'anarchie régna en souveraine. Le prophète Matthiesen tomba dans une sortie. Bockhold lui succéda, et il fallut l'arrivée de Philippe de Hesse pour venir à bout de cette forteresse, qui soutint le siège près d'un an et qui ne succomba que devant la trahison. Rottmann périt sur le champ de bataille; Boc-kold et ses amis Knipperdolling et Krechting furent pris, mis à mort de la manière la plus cruelle, et leurs cadavres exposés dans des cages sur la tour de l'église Saint-Lambert. Le culte cathol. fut rétabli, mais il fallut tout le zèle des évêques, aidés des jésuites, pour extirper entièrement le protestantisme de Munster, 1588.

 

MUNSTER, Sébastien, né 1489 à Ingeiheim. élève de Pellican à Heidelberg, le suivit à Tubingue, où il entra dans l'ordre des franciscains. Avantageusement connu par la publication d'un Dictionn. et d'une Grammaire hébr., et d'une Gramm. chaldéenne, la première qui eût paru, il embrassa la foi réformée 1529, enseigna la théol. à Heidelberg et fut bientôt appelé à Bâle. Par modestie il refusa le grade de docteur, se fil dispenser de l'enseignement théol. et se borna à enseigner les mathématiques et la philologie. Il f de la peste 23 mai 1552. Son épitaphe l'appelle l'Esdras et le Strabon de l'Allemagne. Il a écrit en effet une Cosmographie estimée, et en théol. une trad. de l'A. T. en latin, une Bible hébr. avec les commentaires rabbiniques, un Comment, sur saint Matthieu, un sur l'ép. aux Hébreux, et des traductions de Jossiphon, d'Élie le Lévite, de Ptolémée, etc.

 

MUNTER lo Balthasar, né 1735, prof, à léna 1757, chapelain à Gotha et surintendant à Tonna 1763, fut nommé prédicateur à Copenhague 1765, et f 1793. Auteur de nombreux cantiques, il est connu surtout par la conversion du comte de Struensee et parce que c'est lui qui le prépara à la mort.

2° Son fils Fréd.-Christian-Ch.-Henri, né 1761 à Gotha, étudia à Copenhague et à Gôttingue, et fit un fructueux voyage en Italie, d'où il rapporta le livre des Statuts des Templiers, publ. 1794, et un exemplaire de la trad. copte de Daniel, avec de nombreuses impressions de voyage, notamment sur la Sicile. Nommé 1788 prof, de Ihéol. à Copenhague, il se fit bientôt par ses travaux une réputation européenne et ftit reçu membre d'un grand nombre de sociétés savantes. Il s'occupa aussi avec zèle du Collège missionnaire et de l'Asile des orphelins. Évêque de Seeland depuis 1808, il f 9 avril 1830. Ses principaux ouvrages sont un Manuel de dogmatique, une Hist. ecclés. du Danemark et de la Norwège, une Étude sur la religion des Carthaginois, un travail sur les signes et représentations symboliques des premiers chrétiens, etc. Il collabora aussi à la revision de la version danoise du N. T.. ordonnée sur sa demande par le roi Frédéric VI.

 

MUNZER, ou Muntzer, Thomas, né 1490 à Stollberg dans le Hartz (ou à Zwickau?) Il étudia probablement à Leipzig la théol., devint maître ès arts, instituteur à Brunswick, confesseur des bernardines au couvent de Beutiz près Weissenfels, prédicateur de l'égl. Sainte-Marie à Zwickau, ne s'arrêtant jamais longtemps au même endroit. Là il entra en rapports avec un tisserand exalté, Nicolas Storch, et il se mit â lui débiter comme siennes des idées empruntées à des passages mal compris de Joachim de Flore, de Suson, de Tauler, sur la communion immédiate de l'homme avec Dieu, se manifestant par des visions, des songes, des révélations, indépendamment de l'Ecriture sainte. Partant de ces soi-disant expériences de la < lumière intérieure, • il en vint à demander un changement radical de toutes les relations et institutions, et à prêcher la réforme non seulement dans le domaine religieux, mais encore dans le domaine politique et civil. Forcé de quitter Zwickau à la suite d'une émeute provoquée par une altercation qu'il eut avec son prophète Egranus, il se rendit à Prague, puis à Wittenberg où il se lia avec Carlstadt; fut en 1523 nommé pasteur à Alstedt, où il essaya d'introduire ses idées, une messe catholique allemande, et où il chercha par de nombreux petits écrits à se faire des partisans pour la suppression du papisme et en général de toute espèce d'autorité. Il organisa ses amis en société secrète. Une image miraculeuse de la Vierge à MUhlderbach ayant été détruite, il en fut rendu responsable et dut s'enfuir. Il se retira à Mulhausen, Franconie, dont il fit dès lors son quartier général; s'unit a l'ex-moine cistercien Henri Pfeiffer, publia contre Luther une foule de violentes brochures, attaquant la Parole écrite, le baptême d'eau, tout ce qui n'était que forme. Pour se créer des alliances au dehors, il visita Nuremberg et la Suisse, vit QEcolampade à Bâle, s'aboucha avec les anabaptistes suisses tels que Balthasar Hub-meier, et avec les paysans mécontents de la Souabe. De retour à MUhlhausen en 1525, ilen lit chasser les ecclésiastiques, se fit nommer pasteur à leur place, groupa autour de lui 30,000 fanatiques, fit élire un nouveau conseil, détruisit et pilla les couvents, sema la révolte dans toute la Thuringe, et commit tant de désordres, menaçant juqu'au comte de Mansfeld, (jue les princes voisins, Philippe de Hesse, Georges de Saxe et Henri de Brunswick se décidèrent à s'en débarrasser. La rencontre eut lieu près de Frankenhausen; les paysans fanatisés furent battus; MUnzer fut découvert dans une cachette et exécuté 1525. Il ne mourut pas en brave; par crainte de la mort il demanda la communion d'après le rite catholique, et il était si ému qu'il ne put pas seulement réciter le Credo.

 

MUPHT1, ou Mufti, fonction qui, chez les mahométans, correspond à celle de scribe dans le N. T. C'est l'homme qui expose, et explique la loi, c.-à-d. le Coran. Le grand-muphti, ou Sheikh-ul-Islam, chef des élus, a la direction supérieure du culte et de la loi. Comme rang il vient immédiatement après le grand-vizir. Il est nommé par le souverain, qui peut aussi le destituer.

 

MUBALT, Béat-Louis (de), né à Berne 1665, de la famille locarnaise des Muralto, quitta de bonne heure la carrière militaire, épousa 1699 Marguerite de Watteville, se sépara de l'Égl. officielle à cause de la sécheresse du dogmatisme régnant, et fut banni 15 févr. 1701. Il se retira à Colombier, Neuchàtel, où il resta jusqu'à sa f 20 nov. 1749. Littérateur, moraliste, mystique, il a laissé quelques ouvrages estimés: Lettres sur les Anglais et les Français, les Voyages, l'Esprit fort, l'Instinct divin recommandé aux hommes, et surtout ses Lettres fanatiques où l'illuminisme le dispute au rationalisme. Voltaire et Sainte-Beuve en parlent avec éloge.

 

MURATORI, Louis-Antoine, né 21 oct. 1672 à Vignola, duché de Modène, fut élevé d'abord au collège des jésuites, puis à l'université. Célèbre de bonne heure par son érudition, il fat à

22 ans nommé conservateur de la biblioth. am-brosienne, de Milan. Avant de quitter Modène

11 prit ses titres de docteur en droit, et reçut k Milan les ordres sacrés. 11 commença bientôt la publication de vieux manuscrits, latins et grecs, Ànecdota latina, Anecd. grœca, etc. Rappelé à Modène par les instances du duc 1700, il fut nommé bibliothécaire-conservateur des archives de la ville, et doyen de l'égl. Sainte-Maria de Pomposa, bénéfice qu'il conserva jusqu'à sa f

23 janv. 1750. 11 a énormément écrit, sans parler même des collections qu'il a réunies. Ses principaux travaux sont les Annales d'Italie, en

12 vol.; son Recueil des sources pour l'hist. de l'Italie, sous le titre de: Rerum italic. $cript€*re$ prœcipui ab anno 500 ad 1500; les Antiquités italiennes du moyen âge, avec 75 dissertations critiques et historiques, parmi lesquelles le canon qui porte son nom; v. plus bas. Il chercha, dans une série de lettres et sous le pseudonyme de Lamindo Britanio, à stimuler le zèle scientifique et l'amour des études en fondant une espèce de République des Lettres, mais il ne réussit pas complètement. Sa théologie avait de la largeur, comme on le voit par ses traités: De la modération dans les affaires de la religion 1714, et des dangers de la superstition 1740, où il combat la doctrine de limmac. conception. Attaqué par les jésuites, il leur répondit avec vivacité sous le nom de Ferdinand Valdesius. mais il se les concilia en écrivant l'histoire de leur mission au Paraguay. Ses efforts constants pour démontrer que le catholicisme n'était pas hostile à l'esprit moderne (tendance qui parut surtout 1747 dans son traité Délia regolata dt-vozioni, par L. Britanio), le firent suspecter d'hérésie, et il ne fallut rien moins pour y échapper que la protection de Benoît XIV et celle de Ganganelli. — On désigne sous le nom de Canon de Muratori un fragment trouvé par lui dans un mss. de la Biblioth. de Milan, et publié dans ses Antiquités itaJ. 3*® vol. Ce fragment est important, parce qu'il se donne comme ayant été écrit peu de temps après le Pasteur d'Hermas, c.-à-d. vers le milieu du 2m« siècle, et parce qu'il énumère quels étaient à cette date les livres du N. T. reconnus comme authentiques; on y trouve entre autres l'Apocalypse, 13 Épîtres de Paul, 2 de Jean; l'Évang. de Luc est appelé le 3®«, ce qui suppose les deux premiers. Mais ce qui ôte de la valeur à ce document, c'est qu'il est anonyme; on ne connaît pas l'autorité que pouvait avoir son auteur, et la date elle-même n'est pas sûre. En outre il est écrit en mauvais latin; le texte en est corrompu, et plusieurs phrases sont inintelligibles. Quelques auteurs pensent que ce texte latin n'est que la traduction d'un original grec.

 

MURILLO, Bartholomé, peintre de Vierges et d'anges-enfants, est né à Séville en 1613 ou 1617, d'un père chirurgien, c.-à-d. barbier. Il fit longtemps des images pour les foires, fut présenté par Vélasquez à Olivarès, puis recommandé au roi. De retour à Séville en 1645, il se mit à travailler pour les couvents, et raconta en 11 toiles l'hist. de l'ordre séraphique pour les moines de Saint-François; en 1652 unelmm. conception; en 1656 un saint Antoine, saint Isidore et saint Léandre, et fonda à Séville une académie de peinture, dans le but « d'élever l'homme et de glorifier Dieu. » f 3 avril 1682. Profondément religieux il a mérité le surnom de peintre du ciel. Un monument lui a été élevé en 1858. Il a fait des tableaux par centaines, entre autres plus de 20 Imm. conceptions, dont la plus célèbre, de 1678, a été achetée pour le Louvre 613,000 fr. Son talent est mystique, vaporeux et profond. Il a aussi travaillé le genre et le paysage.

 

MURNER, Thomas, né 1475 près de Strasbourg, f vers 1537, probablement à Heidelberg. En 1499 il entrait dans l'ordre des franciscains. Il se fait recevoir à Paris maître ès arts, à Cra-covie bachelier, en 1519 docteur en théologie. En 1524 il quitte le cloître pour se joindre aux chanoines réguliers. Il voyage beaucoup et va jusqu'en Italie, à Bologne et à Venise. Esprit satirique, mais déréglé, il attaque les vices de son temps, surtout ceux des moines et du clergé, dans une série de brochures piquantes et humoristiques. Il traduisit de Luther la Captivité de Babylone et la lettre à Henri VIII, mais ne s'en montra pas moins l'adversaire de la Réforme. Il a raconté aussi, mais à sa manière, l'hist. du Colloque de Baden, 1526, auquel il avait assisté.

 

MURRAY, jeune chanoine écossais qui dans une assemblée du clergé des deux royaumes tenue en 1176 s'opposa avec force aux prétentions de l'archev. d'York. Celui-ci réclamait la suprématie ecclésiastique sur tout le royaume. L'assemblée entraînée par l'éloquence de Murray en appelle à Rome. Une bulle pontificale déclara l'Ecosse indépendante de toute autorité ecclésiastique, autre que celle du pape et de son légat.

 

MUSAEUS, ou Musée, lo Jean, théol. luthérien, né 7 févr. 1613 à Langenwiesen, Schwartz-bourg, où son père était pasteur; il étudia à Erfurt et Iéna, et fut nommé prof, d'hist. 1642, et de théol. 1646, à Iéna, f 1681. Il compte avec Gerhadt et Calixte parmi les théol. les plus éminents et les plus instruits de son époque. Il a publié de nombreux écrits sur la dogmatique, Distinguant la religion et la théologie, il a toujours défendu les droits de la liberté dans les recherches scientifiques, et s'est opposé, avec les théol. de Iéna, aux prétentions de Calov qui voulait leur faire signer le Consensus repe-titus. Ayant consenti, ainsi que l'université, à déclarer, pour plaire au duc, qu'il n'approuvait pas toute espèce de syncrétisme, il précisa sa position 1680 dans une adresse à Calov, à laquelle celui-ci répondit avec violence.

2o Pierre, fr. du précédent, né 1620, f 1671. Professeur de philos, et de théol. à Rinteln depuis 1648, plus tard à Helmstâdt et à Kiel; partageant les vues conciliantes de son frère, il prit part avec son collègue Henschen au colloque de Cassel 1661, où il fut reconnu que les divergences entre luthériens et calvinistes n'étaient pas de nature à les empêcher de fraterniser. Les orthodoxes stricts lui en voulurent. Par la suite il se montra un peu moins favorable au syncrétisme.

 

MUSAPH, prières qui dans le culte juif du sabbat et des jours de fêtes, remplacent auj. les sacrifices ordonnés par la loi ancienne, comme les prières du matin et du soir remplacent les anciens sacrifices mosaïques.

 

MUSCULUS lo André, de son vrai nom Meu-sel, né 1514 à Schneeberg, Saxe, étudia à Leipzig. Frappé par la lecture des écrits des réformateurs, il se convertit à la foi évangélique, vint en 1538 à Wittenberg où il s'attacha à Luther, dont il resta l'ami toute sa vie. A la recommandation d'Agricola, il se rendit à Francfort sur l'Oder, où il fut successivement chapelain de l'égl. des franciscains, prédicateur de la cour et professeur. Plein d'énergie et de conviction, il avait la parole rude et parfois vulgaire; il se montra trop passionné dans les luttes qu'il eut à soutenir, soit avec les magistrats à propos des biens ecclésiastiques, soit avec ses collègues, et notamment avec Prœto-rius, dont les vues modérées se rapprochaient davantage de la tendance de Mélanchthon. Il soutenait entre autres que la loi est utile pour amener à la repentance quand on n'a pas la foi, mais qu'elle n'a plus de valeur pour le croyant.

2° Wolfgang, en allemand Mtisslin, ou Meuss-lin, un des théol. réformés les plus considérables du 16*** siècle, avec Calvin et Vermigli. Né à Dieuse, Lorraine, 8 sept. 1497, de parents pauvres, il fréquenta les écoles de l'Alsace et finit, à cause de sa belle voix, par être reçu dans un couvent de bénédictins près de Lixheim; il y étudia d'abord la musique et la littérature et se mit ensuite à la théologie. Amené à la Réforme par les écrits de Luther, il quitta son couvent en 1527, épousa la nièce de son abbé, avec laquelle il vécut si pauvrement à Strasbourg, qu'il fut obligé de travailler de ses mains pour se procurer le nécessaire. Enfin après avoir été quelque temps diacre de la cathédrale, il fut appelé à Augsbourg comme prédicateur. Dans cette nouvelle position il déploya tant de zèle et d'activité que la ville presque entière fut bientôt gagnée à la Réforme et qu'en 1537 il put prêcher à la cathédrale. La proclamation de l'Intérim, contre lequel il protesta, le décida en 1548 à résigner ses fonctions. Il se retira à Zurich, où il corrigea les épreuves chez son éditeur, et en 1549 il fut nommé prof, de théol. à Berne, où il f 30 août 1563, après avoir refusé de nombreux appels à l'étranger. Il avait assisté aux colloques de Wittenberg 1536, Worms 1540 et Ratisbonne 1541, mais sans réussir à y faire prévaloir une tendance pacificatrice. Ses vues sur les points essentiels étaient celles des théologiens de Strasbourg; plus tard elles s'accentuèrent dans le sens réformé. Il a publié des Lieux communs, souvent réimprimés, et de nombreux comment, sur des livres de la Bible. — Six de ses fils furent prédicateurs réformés; son dernier descenilant connu est David Mtisslin f 1821, dont les sermons ont de la réputation.

 

MUSIQUE d'église, v. Hymnes.

 

MUTIEN, Rufus Conrad (proprement Muth ou Mudt), né 1471 à Hombourg, Hesse, d'une famille distinguée, étudia à De venter et à Er-furt. Devenu maître ès arts en 1492, il visita l'Italie, se fit recevoir docteur en droit canon à Bologne et revint en Allemagne 1502. Placé d'abord à la cour de Hesse, il quitta bientôt 'cette position pour un petit canonicat à Gotha, où il ne tarda pas à devenir le centre d'un grand mouvement humaniste. Il se lia spécialement avec le cistercien Henri Urbain et avec Georges Spalatin, et il continua d'entretenir des relations littéraires avec son ancien condisciple Érasme. Hostile aux institutions ecclésiastiques, assez indifférent au christianisme historique, dont il croyait pouvoir garder l'esprit sans en accepter la lettre, il salua avec joie l'apparition de Luther, mais ne se joignit pas à la Réforme, dont il ne comprenait pas le principe moral, et où il crut entrevoir le danger d'un retour à la barbarie). Il en revint finalement aux pratiques scrupuleuses de l'Église, se retira de tout pour vivre dans la retraite et dans la pauvreté, et f 1526. Plusieurs de ses lettres sont à la biblioth. de Francfort; quelques-unes ont été publiées.

 

MUTONIS, Jean, moine jacobin, de Grasse, Provence, vint à Genève après sa conversion, fut envoyé à Nîmes comme pasteur 1561, mais se fit renvoyer à cause de ses rapports désagréables avec son collègue Mauget. Chargé par les protestants du Languedoc de porter leurs plaintes auprès du roi, il le fit avec courage. Mais Dam ville le fit arrêter et pendre sans procès près de Bagnols, 14 févr. 1564, pour plaiiv à la dame de Montfrin (de Lers). Mutonis mourant ajourna cette dame dans l'an devant Dieu; elle mourut en effet peu après, frappée de la foudre à Nîmes.

 

MYCONIUS lo (Geisshtisler) Oswald, né 1488 à Lucerne, étudia sous Rubellus à Rottweil el à Berne, sous Érasme à Bâle 1510. Il aimait l'enseignement et fut successivement maîtiv d'école à Zurich 1516 et à Lucerne 1519. Renvoyé de là à cause de ses relations avec Zwingle et avec les évangéliques, il fut appelé au couvent d'Einsiedeln où il ne fit que passer, et de nouveau à Zurich, où il devint le collaborateur de Zwingle, et où le Conseil, en lui confiant la direction de l'école, le chargea aussi de donner pendant la semaine des leçons bibliques. Après la bataille de Cappel 1531, il fut appelé à B&le comme diacre de l'égl. Saint-Alban, puis prof, à l'université, et à la mort d'OEcolampade, son successeur et antistès, chargé de diriger le mouvement de la Réforme. Il présida à la publication de la Ire Confession de Bâle, et se rallia dans l'intérêt de l'union, à la 2^6, dite Conf helvétique 1536. Sa largeur et son esprit de tolérance, notamment vis-à-vis de la doctrine luthérienne de la Cène, le rendirent suspecl auxzwingliens rigoureux. II donna sa démission de professeur en 1541, n'ayant pas voulu accepter le titre de docteur, f de la peste 14 oct. 1552. On a de lui plusieurs Comment, et un* notice sur la Vie et la mort de Zwingle.

2° (Mekum) Frédéric, né 26 déc. 1491 à Lieh-tenfels, Franconie. Élevé à l'école d'Annaberg. il demanda en 1510 à Tetzel une indulgence gratuite, étant trop pauvre pour la payer; elle lui fut refusée. Dans l'intérêt de son salut, il entra alors chez les franciscains, passa d'Anua-berg à Leipzig, puis 1512 à Weimar, étudiant avec soin les scolastiques, et fut ordonné prêtre en 1516. Les thèses de Luther l'amenèrent à la Réforme, mais il fut retenu 7 ans au couvent, dans une dure captivité. Il réussit enfin à s'échapper et s'enfuit à Nuremberg 1524. Il fût aussitôt nommé prédicateur à Zwickau, puis a Gotha. Son activité était prodigieuse. C'était au plos fort de la guerre des paysans. Non seulement il introduisit et organisa la Réforme, mais encore il fonda le célèbre Gymnase de Gotha, et remplit d'importantes missions au dehors, visites d'églises et d'écoles, négociations, colloques, etc. En 1527 il accompagne à Dusseldorf le prince héritier; en 1538 il fit partie de la députation envoyée par le duc en Angleterre dans l'intérêt de la Réforme. Après la mort du duc Georges-le-Barbu, il concourut avec Cruci-ger, Pfeffinger et Balthasar, à établir la Réforme dans les duchés saxons, notamment à Leipzig, 1539. Il était très lié avec Luther et Mélanchthon, qui le tenaient en grande estime, f 7 avril 1546. On a de lui une Hist. de la Réformation, publ. 1715 à Gotha par Sal. Cyprien, et fort appréciée.

 

MYLIUS lo Georges, théol. luthérien rigide, né à Augsbourg 1548, nommé pasteur à Augsbourg 1571, surintendant et directeur du collège; il dut abandonner sa position parce qu'il se refusait à l'introduction du calendrier grégorien . Il fut très bien reçu à Ulm, mais appelé 1585 à Wittenberg comme prof, de théol. il s'y rendit et y resta jusqu'à sa f 28 mai 1603, sauf un court intervalle pendant lequel, la tendance philippine de Christian ayant prévalu, il se retira à Iéna. Il a laissé quelques Comment, et ouvrages dogmatiques.

2° Georges, pasteur à Brandebourg, près Kô-nigsberg, + 1640; auteur de poésies et de cantiques estimés.

 

MYSTÈRES, mot dérivé du grec mu-étn, fermer (la bouche, les yeux); il désigne les choses cachées, soit à l'intelligence en général, soit à certaines personnes ou classes d'hommes, par opposition à d'autres. Il se prend dans 3 sens différents:

lo Les mystères de la religion sont les vérités qui par leur nature même dépassent les bornes et la portée de notre intelligence: l'éternité dans le temps, l'infini dans l'espace, Dieu, sa nature, sa toute-présence, nos rapports avec lui, son amour qui est appelé le mystère de la piété; le mal, l'origine du mal, les problèmes relatifs à la liberté humaine, etc.

2° Chez les anciens peuples et dans les anciennes religions, il y a toujours eu, à côté des cérémonies publiques du culte, des cérémonies secrètes destinées seulement aux initiés (aux raystes), et qui avaient pour but de leur faire comprendre, sous une forme dramatique et souvent effrayante, soit la grandeur de la divinité dont on célébrait la fête, soit le contraste de la vie et de la mort, soit encore l'importance de telle ou de telle tradition relative au culte. La plupart de ces mystères se terminaient en orgies. Les plus célèbres sont ceux d'Éleusis et de Samothrace chez les Grecs, de Bacchus chez les

Romains, d'Isis en Égypte, de Brahma aux Indes. Les gnostiques ont essayé de les faire passer dans le christianisme.

3° Au moyen âge on a donné le nom de mystères à des représentations dramatiques religieuses, qui devaient être à la fois un divertissement et un enseignement populaire, à une époque où l'imprimerie n'existait pas et où la prédication était rare et médiocre. Le culte catholique est en général l'image symbolisée de la rédemption, mais pour le comprendre il faut savoir la langue et avoir la clé des symboles. Peu de personnes en étaient capables pendant l'épaisse nuit qui sépare les temps de Charlemagne de ceux de la Renaissance. Le clergé, pour populariser les faits bibliques, les mit en vers, les découpa en actions et en scènes, et les représenta dans des solennités qui attiraient les foules de bien des lieues à la ronde; on a compté quelquefois jusqu'à 50.000 spectateurs. Une estrade de planches, dressée devant l'église, servait de théâtre; l'église elle-même était le foyer; les décors étaient primitifs; les rôles étaient joués par des prêtres; Dieu, s'il avait à intervenir, n'était représenté que par une voix, et ne paraissait pas. Le sujet du drame variait suivant la circonstance; à Noël on jouait la Nativité; pendant la semaine sainte, la Passion, ou quelques-uns de ses épisodes. En d'autres temps on jouait d'autres scènes bibliques, le paradis, la chute, etc. La pièce était presque toujours en vers, et quelquefois assez longue; on en cite dont la représentation durait plusieurs jours; les récitatifs alternaient avec les chœurs et les antiphonies. Il est évident que c'était un moyen d'instruction religieuse pour des populations incultes, mais il est clair aussi que ce moyen était imparfait et laissait beaucoup à désirer. Les tableaux vivants et les dialogues ne respectaient pas toujours l'histoire, ni la couleur locale, et malgré le sérieux qu'on y mettait, certaines scènes prêtaient à rire. Peu à peu le clergé demanda le concours des laïques, et finalement ce fut sur ces derniers seuls que retomba toute la charge. Ils en usèrent plus librement et se permirent des additions, des changements, parfois des facéties, qui altérèrent le caractère primitif du mystère. En 1250 Innocent III interdit aux prêtres de prendre part à ces représentations, du moins en public, car on voit encore au 15®« siècle des ecclésiastiques jouer des scènes avec leurs élèves. Le carnaval eut des sujets de drame spéciaux, et généralement gais et humoristiques; ils servirent de transition entre le mystère et la comédie proprement dite qui, lors de la Réforme, après avoir commencé par des imitations du grec et du latin, ne tarda pas à s'émanciper pour vivre de sa vie propre. Les mystères, tout en devenant pins rares, ont continué en certains lieux jusqu'à la fin du siècle. On en a encore joué un à Valenciennes en 1807. Le seul que Ton connaisse aujourd'hui est celui de la Passion, qui se joue tous les dix ans à Oberammer-gau, q. v.

 

MYSTIQUE, mysticisme. On désigne habituel-ment ainsi, non la recherche de la dévotion, mais cette disposition naturelle à certaines âmes et à certaines intelligences, à se rapprocher de Dieu directement, en dehors de toute révélation et de toute forme de culte. L'âme a un tel sentiment de ses rapports intimes avec Dieu, qu'elle n'éprouve alors aucun besoin de directions; sa lumière intérieure lui suffit; elle voit Dieu, elle s'entretient avec Lui, elle s'absorbe en Lui et II résume tout, dogme et morale. Dans cet état l'âme perd de vue la distinction entre sa personnalité et celle de Dieu; l'idée même de la personnalité s'efface, et un panthéisme inconscient risque de remplacer la notion de Dieu. D'un autre côté, comme le mystique attache la plus grande importance à ses émotions, à ses impressions, à ses expériences personnelles, la raison perd tous ses droits sur lui, et il devient facilement le jouet de son imagination; de là à la vision, à l'enthousiasme, il n'y a qu'un pas; il verra des mystères partout et il s'attachera aux rêveries extraordinaires. Il sera tout prêt à devenir un fanatique, ne connaissant plus ni la chair, ni le sang, ni le temps, ni l'histoire. Ce détachement complet des choses terrestres se traduira par une complète indifférence pour tout, pour l'Église comme pour la patrie ou pour la famille, et aboutira au quiétisme, avec une morale généralement assez sévère et une tendance à l'ascétisme. Cependant le contraire peut se produire aussi, car, sous prétexte que la chair n'est rien et que les chose? extérieures n'ont pas d'importance, on a vu des mystiques se laisser aller à beaucoup de désordres pour éviter les troubles de la lutte, en affirmant que ces débauches momentanées de la matière n'altéraient en aucune façon la sérénité de leur vie spirituelle intérieure. On a parfois confondu le mysticisme avec le piétisme; tous les deux en effet mettent la doctrine au-dessus de la question morale, et tous les deux professent pour les formes ecclésiastiques une indifférence, au moins relative; mais tandis que le mysticisme part de l'idée de la communion naturelle entre Dieu et l'homme, le piétisme dans presque toutes ses manifestations suppose au contraire que l'homme est rejeté de Dieu par nature et qu'il doit chercher à s'en rapprocher par la foi et la pratique des bonnes œuvres. Le mysticisme n'appartient pas au christianisme exclusivement; il est partout la réaction naturelle contre le dogmatisme ou contre un formalisme exagéré. Les esséens et les thérapeutes étaient des mystiques protestant contre le ritua-lisme des pharisiens; la cabale est une sorte de mysticisme. La religion de Boudha et l'islam ont également leurs mystiques. Chez les chrétiens, les anciens moines, les solitaires de TÉgypte, ceux du mont Athos; les montanistes, les euchites, les cathares; plus tard les franciscains, ont représenté cette disposition de l'esprit. Amaury de Chartres, David de Dinant, l'abbé Joachim de Flores lui ont donné au moyen âge une puissante impulsion. Depuis la Réformation le catholicisme a eu encore ses Mo linos, Fénelon, M»e Guyon, Silesius, tandis que le protestantisme, sans parler des anabaptistes et des disciples de Schwenkfeld dont il a tenu à séparer sa cause, a eu ses moraves, ses quakers, les labadistes, Pierre Poiret, Jane Leade, Bôhme, Jung Stilling, etc. — On appelle aussi mystique en théologie, par opposition soit à la scolastique orthodoxe, soit à la philos, spéculative, l'école inaugurée par Guill. de Cham-peaux sur les principes du faux Denys FAréo-pagite, et qui a eu pour principaux représentants Hugues et Gautier de Saint-Victor, Richard, Bonaventure. Gerson chercha à la concilier avec la scolastique. Elle prétendait, avec saint Bernard, être dans la pleine tradition de l'Église, Sa tendance se résumait dans ces deux pensées: s'élever à Dieu, c'est descendre en soi-même; et: On ne connaît réellement Dieu que dans la mesure où on l'aime. L'Allemagne du moyen âge a eu son école, préparée par Ruprecht de Deutz, fondée par le dominicain Eckhard, illustrée par Tauler et Suson; elle a produit vers la fin du 44me siècle la Théologie germanique, publiée pour la première fois par Luther, et qu'on a attribuée à tort àTauler. Très spéculative, elle est en même temps pratique et s'est rendue populaire par la prédication. Patronnée par les Amis de Dieu et les Fr. de la vie commune, elle est enthousiaste chez Ruysbrook et ascétique chez Thomas a Kempis. Par son opposition à la scolastique et par la part qu'elle fait à l'individualisme religieux, elle a préparé la Réformation. Le père de la mystique allemande moderne est Bôhme. Le mysticisme catholique moderne (Fénelon, Bourignon) est plus ascétique et édifiant que spéculatif. La nouvelle théologie, en appuyant sur la nécessité de Christ vivant en nous, s'est identifié l'idée principale du mysticisme.

 

MYTHES, narrations merveilleuses, traditions héroïques et fantaisistes, qui se distinguent de la légende et de la fable par leur caractère religieux et par leur signification symbolique apparente ou cachée. Toutes les religions humaines ont eu leurs mythes, empruntés tantôt à la nature, tantôt à l'histoire, et destinés à servir d'enveloppes à leurs doctrines. L'idée de Dieu, comme puissance suprême, y apparaît toujours, quoique sous une forme indistincte et voilée. Depuis que la foi à la Révélation a été ébranlée, la théol. chrétienne s'est demandé s'il n'y aurait pas dans la Bible beaucoup de mythes. Herder a commencé en voyant un mythe dans les premiers chapitres de la Genèse, la création, le paradis et la chute. Strauss a poussé le système jusqu'à ses extrêmes limites en l'appliquant à la vie de Jésus qui ne serait qu'un ensemble de récits poétiques, inspirés par les prophéties et composés dans l'esprit de l'A. T., sans intention de tromper. D'autres,* sans aller aussi loin, tout en admettant comme historiques la plupart des faits de la vie de Jésus, pensent que quelques-uns ont été embellis par l'enthousiasme oriental, et que les écrivains ont donné la forme du mythe aux récits relatifs à son enfance, peut-être même à sa résurrection. C'est dans ce sens que Nitzsch a pu dire que ces histoires sont vraies, sans être réelles et que des vérités divines nous sont présentées sous une forme humaine. Ce procédé d'interprétation touche de bien près à la négation des faits et ne peut être employé qu'avec une grande réserve.

 

MYTHOLOGIE, étude des mythes. C'est, dans un sens restreint, l'énumération des dieux et des déesses d'une religion, l'histoire de leurs faits et gestes, et l'étude de leur littérature. Dans un sens plus étendu et plus élevé, c'est l'interprétation et la systématisation des symboles fournis par les mythes d'une religion. Aucun peuple n'étant sans Dieu, chacun a vu se développer ses idées religieuses et morales d'après les circonstances de son histoire. On trouve chez tous quelques rayons épars de la lumière primitive, et l'étude des religions comparées montre comment toutes ont pu concourir à frayer le chemin au christianisme et à en faire un jour la religion du monde entier, v. Creuzer 1810. 0. Muller 1825.