J
JABLONSKI lo Pierre Figulus, né à Jablunka d'où il prit son surnom, était sorti de Bohême encore enfant avec Coménius dont plus tard il épousa la fille. Pasteur à Dantzick, il fut consacré év. pour les moraves, k Mieleczyn en 1662. f 1670.
2o Daniel-Ernest, fils du précédent, né 26 nov. 1660 k Nassenhuben, près Dantzick. Après avoir achevé ses études, il visita la Hollande et l'Angleterre, fut pasteur à Magdebourg, recteur à Lissa, prédicateur de la cour à Kônigsberg et k Berlin 1693; enfin conseiller ecclés. et président de l'Académie, f 1741. Il travailla avec Leibnitz et d'autres philos, et théologiens, à concilier les différentes communions: il essaya même d'introduire en Prusse la liturgie anglicane et l'épiscopat. Il fut consacré év. des frères de Pologne et de la Diaspora, 1698, pour assurer la possibilité de la succession apostolique. Au milieu de ses dignités terrestres, iKne faiblit jamais dans son amour pour les frères, et c'est lui qui en 1735 conféra l'ordination épiscopale au charpentier David Nitschmann.
3o Paul-Ernest, fils du précédent, né à Berlin 1693, parcourut l'Europe aux frais de son gouvernement 1714-1717, pour faire des recherches sur la langue et les mss. coptes, et fut nommé prof, de théol. et pasteur de l'égl. réf. de Francfort sur l'Oder, 1721. f 1757. Auteur de nombreux ouvrages latins sur les antiquités grecques et égyptiennes.
JACOB 1° (et les Jacobites). Jacob Baradaï, nommé aussi Zanzale, moine et prêtre au couvent de Phasilta, près Nisibis, appelé à l'évêché d'Édesse 541 par les eutychiens. Les persécutions menaçant la secte d'une entière destruction, les év. monophysites captifs à Constantinople lui décernèrent le titre de patriarche écuménique sans lui assigner de résidence spéciale. Pauvre et misérablement vêtu, bravant la décision du conc. de Chalcédoine et lesédits des empereurs, il parcourut l'Asie mineure et 1* Mésopotamie, prêchant ses doctrines, èncoura-geant les égl., ordonnant des prêtres et des évêques, avec un zèle et un succès qui lui mérita la reconnaissance de tous ses sectateurs, f 578. C'est de lui qu'ils prirent le nom de jaco-bites. Il en existe encore environ 60 mille en Syrie et en Mésopotamie (3 ou 4000 se sont laits catholiques). Sauf une certaine confusion des deux natures, ils sont presque orthodoxes; ils reconnaissent les 3 premiers conciles et, comme l'Egl. grecque, invoquent les saints, vénèrent la Vierge et croient à la transsubstantiation. Ils ont une vingtaine d'èvêques et un patriarche qui porte toujours le nom d'Ignace pour constater qu'il est le vrai successeur des vieux év. d'Antioche, dont Ignace fut le 3*e. Mais tout en s'appelant patr. d'Antioche, il réside au couvent de Saphran, N.-O. de Mossoul, et son coadjuteur, dit primat, au couvent de Saint-Matthieu, dans la môme contrée.
2° V. Jacques.
JACOBEL, ou Jacob de Mies ou de Misa, curé de Saint-Michel, Prague, disciple zélé de Huss et de Jérôme, éloquent, populaire, ne se laissa pas effrayer par le supplice de ses amis. Ses écrits 2 fois condamnés à Constance, demandaient une réforme de l'Église; il appelait le pape un antéchrist et introduisit la Cène sous les deux espèces. Ses partisans, appelés jacobel-lites, se joignirent aux taborites sous Ziska. f en paix à Prague, 9 août 1429.
JACOBI 1° Henri-Fréd., né à Dusseldorf 25 janv. 1743. Destiné au commerce il étudia d'abord à Genève, puis se mit aux affaires dans son pays, et fut successivement revêtu de charges importantes dans l'administration et les finances, nommé conseiller privé à Dusseldorf, et en 1804 conseiller de Bavière et membre de l'Acad. des sciences de Munich qui, en 1807, le nomma son président, f 10 mars 1819. C'est comme philosophe qu'il est surtout connu. Il combattit la prétention de démontrer par la logique ou la raison des faits d'un ordre supérieur, genre de démonstration qui, portant sur le relatif et le conditionnel, doit nécessairement aboutir à l'athéisme et au nihilisme. Il voyait l'organe de la connaissance immédiate, évidente, non dans l'esprit, non dans l'intelligence, mais dans l'instinct, dans la foi, dans ce que Kant appelait plus tard la raison opposée à l'esprit. 11 n'entendait pas par là une foi d'autorité, mais ce besoin intérieur, impérieux, qui n'admet pas la possibilité de l'opinion contraire. Dieu, la Providence, l'immortalité de l'âme, appartenaient selon lui à ces vérités qui s'imposent et ne se prouvent pas. Ses pensées philos, sont éparses dans plusieurs écrits de circonstance, Lettres, etc., sans qu'il les ait coordonnées en un système. V. surtout: Lettres sur Spinosa, sur Hume, sa lettre à Fichte, son roman de Woldemar. etc. OEuvr. compl. Leipzig 1812-4824, 6 vol. — 2° Son fr. Jean-George, 1740-4814, était poète, chanoine d'Halberstadt; il enseigna l'éloquence à Halle et les lettres à Fribourg en Brisgau.
JACOBINS, nom des dominicains q. v; il passa en 1789 à un parti politique violent qui s'était établi dans l'ancien couvent des dominicains, rue Saint-Honoré, à Paris.
JACOBITES, v. Jacob |o.
JACOPO, Passavanti, dominicain de Florence, orateur et écrivain, f 1357; auteur de Lo spec-chio di vera penitenza, en latin et en italien.
JACOPONI de Todi, ou Jacobus de Benedic-tis, jurisconsulte à Todi où il était né. Bouleversé par la mort subite de sa femme 1268, il renonça au monde et entra chez les fr. mineurs, après que par la composition de 2 hymnes sublimes il leur eut donné la preuve qu'il jouissait encore de toutes ses facultés. Il se joignit aux cardinaux qui protestèrent contre l'élection de Boniface VIII, et il fut mis en prison par celui-ci; il ne fut délivré que lorsque le pape à son tour fut fait prisonnier, 7 sept. 1303. Beaucoup de ses poésies sont dirigées contre le pape et les vices de l'Église. Ses Cantiques spirituels sont pleins de l'amour de Dieu et du Sauveur; le plus connu est le Stabat Matei% q. v.
JACQUES, ou Jaques, lo V. Jacob (ces deux noms s'échangent facilement). — 2° J. d'Édesse, savant syrien, né à Indâba près d'Antioche, se fit moine et se livra à l'étude du grec et du syriaque. Nommé év. d'Édesse 651, il donna sa démission quand il vit qu'on ne respectait pas les canons et vécut 20 ans dans les couvents d'Eusébone et de Télède. Il fut réélu pour la fois à cette charge, mais f 708 au moment où il apprit sa nomination. Il trad. plus, livres grecs en syriaque, écrivit des Comment. et une critique des versions syriaques de la Bible. Il en reste quelques fragments.
3<> Jacq. de Nisibis, dit le Grand; év. de Ni-sibis, jouit d'une telle considération qu'on ra -conte de lui des choses miraculeuses. Il était renommé pour sa science, sa piété et son austérité. Il assista au conc. de Nicée, Éphrem le Syrien était son élève. On a de lui 18 Discours et une Lettre en araméen. Venise 1756.
4o Jacques de Sarûg, surnommé Malpanna Ti-belita, c.-à-d. docteur ècuménique, flûte du Saint-Esprit, cithare de l'Église fidèle, né 452 à Kur-tam, sur l'Euphrate; prêtre en 503, év. de Bat-nân, territoire de Sarûg 519. Écrivain et docteur distingué de l'Égl. de Syrie, les jacobites le comptent comme un des leurs, malgré son orthodoxie. On lui attribue, et on lit encore dans les égl. de Syrie. 763 Homélies, écrites en vers de 12 pieds, d'après le rythme qui a pris de lui le nom de jacobite.
5° Jacq. de Voragine, né 1230 à Viraggio, près Gênes, entra 1244 dans l'ordre des fr. prêcheurs, fut nommé provincial pour la Lorabar-die, et 1292 archev. de Gênes, f 1298. Auteur de la Légende dorée, recueil d'histoires merveilleuses empruntées sans choix ni critique aux livres et aux traditions populaires: les aventures les plus incroyables y sont racontées, et ce livre, comme tous les livres d'imagination, a eu longtemps un grand succès.
6° J. de Vitry, prêtre d'Argenteuil, chanoine augustin à Ognies, auteur d'une Vie de sainte Marie d'Ognies. Le pape le chargea de prêcher la croisade contre les albigeois et les sarasins, et lui donna le titre d'év. de Ptolémaïs. Après la perte de Damiette 1225, il revint; fut créé cardinal, nommé év. de Frascate et légat papal en France. Son Hist. orientale est bonne comme description de la Terre sainte, et contient, ainsi que ses Lettres, des détails intéressants sur l'hist. des Ordres en Orient et en Occident.
7o Jacques, moine cistercien, originaire de Hongrie et surnommé de là maître de Hongrie. Il se mit à la tête du mouvement qui éclata en France vers 1250 et qui, fomenté et soutenu surtout par des troupes de paysans et de bergers, est connu sous le nom de Guerre des Pastoureaux. Le prétexte fut d'abord l'appel à une nouvelle croisade; il s'agissait de délivrer saint Louis prisonnier. Mais à côté de cela il y avait la haine des prêtres, des moines et des juifs. Ces hordes ravagèrent la France, pillant partout, et finirent par se faire tailler en pièces dans le Berry, où maître Jacques troiiva la mort 1251. Une nouvelle tentative eut lieu en 1329, avec processions, pillage, assassinats de juifs; mais comme elle en vint à menacer les prêtres et Avignon, elle fut de nouveau combattue et dissipée.
80 Jacques Bonhomme, chef de la Jacquerie 1358, s'appelait Guillaume Caillet. La révolte à laquelle il présida, n'avait, malgré sa ressemblance avec la précédente, aucun caractère religieux.
9o Jacques, ou Jacob de Misa, v. Jacobel.
10° Jacques de JUterbock, un des précurseurs de la Réforme. Né vers 1383, il entra dans le couvent cistercien du Paradis en Pologne, étudia à Cracovie, prit son grade de docteur et devint abbé de son couvent. Mais ne le trouvant pas à la hauteur de son ascétisme, il le quitta pour entrer chez les chartreux d'Erfurt, où il f 1465 étant à la fois prof, et prieur. Dans ses écrits il prouve que la décadence de l'Égl. vient du pouvoir absolu du pape et de la mondanité du clergé, et il insiste sur l'urgente nécessité d'une entière réforme.
11° Jacques de Marchia, franciscain, prêcha à Brescia à Pâques 1462, et soutint que le sang de Christ répandu sur la croix ne retournerait pas à la divinité avant la résurrection, et que par conséquent il ne devait pas être adoré. Le grand inquisiteur Jacques de Brescia s'émut, ainsi que les dominicains, de cette hérésie, et une discussion solennelle eut lieu à Noël 146£ en présence de Pie II, qui ajourna son verdict. Cette oiseuse question ne fut donc pas tranchée.
12° Jacques de Compostelle, v. Compostelle.
Plusieurs rois d'Angleterre ont aussi porté le nom de Jacques, en anglais James; les plus importants pour l'histoire de l'Église sont:
lo Jacques I^r, qui était Jacques VI comme roi d'Ecosse. Né 19 juin 1566, fils de Darnley et de Marie Stuart, il monta sur le trône l'année suivante, par suite de l'abdication forcée de sa mère, et se distingua par ses tendances cathol., son attachement aux formes épiscopales, et ses prétentions à la science théologique. Il tenait énergiquement à l'idée de l'Église nationale, de son unité et de sa soumission absolue à l'autorité royale, ce qui entretint pendant de longues années des troubles dans la protestante et presbytérienne Écosse. La méfiance qu'on avait de lui décida en 1581 l'assemblée des presbytères à publier le premier Covenant national, que le roi fut contraint de signer, bien malgré lui, et qui établissait le régime presbytérien. La cour n'en persista pas inoins à manipuler les èvê-chés, et elle nomma comme archev. de Glasgow le ministre Montgomery, qui n'était que le prête-nom du duc de Lennox, cousin du roi, catholique secret et perdu de débauches. Ce fut le signal d'un soulèvement, à la suite duquel Jacques fut fait prisonnier et enfermé au château de Ruthwen. Relâché après avoir fait de belles promesses, il se vengea en faisant arrêter Melville et en dictant au parlement une série de mesures connues sous le nom d'Actes Noirs, 25 mai 1584, établissant le gouvernement de l'Égl. par les évêques et la suprématie absolue du roi. Cependant son mariage avec Anne, la fille du roi de Danemark, le calma un peu et il donna en 1592 à l'Égl. d'Écosse la Grande charte, qui reconnaissait le presbytérianisme, mais maintenait le droit de patronage et permettait au roi de dissoudre les synodes. Les persécutions n'en continuèrent pas moins, ainsi que les tergiversations, et quand la mort d'Éli-sabeth eut fait monter sur le trône d'Angleterre le roi d'Écosse, 31 mars 1603, un prédicateur, faisant allusion au double nom du roi, qui était Jacques I«r en Angleterre, et Jacques VI en Écosse, put prendre pour texte de son discours Jacques un, six (Jacq. 1, 6). € L'homme double de cœur, etc. » Il fut en effet avec les puritains ce qu'il avait été avec les presbytériens, un mystificateur. Il convoqua, janv. 1604, une conférence à Hampton Court, mais pour notifier aux délégués que l'Égl. de Rome était sa mère, et que les puritains étaient une secte que l'on ne pouvait pas tolérer. Le synode de Linlith-gow 1606 s'opposa aux arrêtés du parlement, et la cour des hauts commissaires, févr. 1610, fut instituée par le roi pour faire réussir devant une nouvelle assemblée la question de l'épisco-pat. Les 5 articles de Perth 1617, confirmant une liturgie et des institutions odieuses, mirent le comble au mécontentement des presbytériens d'Ecosse. Les catholiques aussi, depuis la conspiration des Poudres, 1603, éprouvèrent son mauvais vouloir, et il leur imposa le serment d'allégeance, qui déniait au pape le droit de déposer les rois. Malgré les rapports de famille, et malgré les sollicitations de ses sujets, il refusa d'intervenir en faveur des protestants d'Allemagne et il vit. sans en être ému, son gendre Frédéric V dépouillé de ses États de Bohême par l'emp. d'Autriche 1621. Il maria son fils ainé Charles 1er à Henriette de France, fille de Henri IV, 1625, et f la même année le 8 avril. Touj. amateur de théol., il suivait avec intérêt les discussions, se lit même représenter au synode de Dordrecht, mais n'en agréa pas les conclusions. Il a laissé un Comment, sur l'Apocalypse, des Instructions à son fils Henri (le Dôron Ba-silicon) et un livre intitulé Lois libres et monarchies libres, qui lui ont valu de la part de ses flatteurs le surnom de Salomon de l'Angleterre, et qui ont été publiés k Londres 1619 par l'év. Montacuti.
2° Jacques II d'Angleterre et VII d'Écosse, né 1633, fils de Charles 1er et d'Henriette de France. Élevé à la cour de France, oli il s'était réfugié après les événements de 1648, il en avait adopté les idées catholiques. Il fit les campagnes d'Espagne avec Turenne et revint en Angl. en 1678 avec son frère Charles II. La même année il se fit catholique, mais ne l'avoua publiquement qu'en 1671, et dut renoncer k tous ses titres et fonctions, entre autres à son titre de grand amiral. Les dispositions hostiles du peuple, qui voyait en lui le futur restaurateur du catholicisme et qui essaya de le faire exclure de la succession au trône, l'obligèrent à se réfugier en Hollande 1679. Il revint en 1680, sous son nom de duc d'York, comme commissaire royal et se signala par ses persécutions contre les presbytériens. Rappelé à la cour et nommé membre du Conseil d'Etat, il monta sur le trône en 1685, après la mort de Charles II, et se hâta de rétablir publiquement le culte catholique. Pour affaiblir le parti épiscopal il favorisa les dissidents en Angleterre, tout en continuant de persécuter les covenantaires en Écosse. Il fit mourir Monmouth et Argyle, publia 1687 un Acte d'indulgence qui proclamait la liberté des cultes et qui froissa vivement les épiscopaux sans rallier les presbytériens. Une nouvelle proclamation du même genre, suivie du procès des evêques 1688, n'eut pas un meilleur succès.
L'agitation ne fit que grandir, et lorsque la naissance d'un prince vint menacer l'Angleterre d'une dynastie catholique, les partis évangéliques s'unirent pour appeler k leur aide le gendre du roi, Guillaume d'Orange, qui débarqua le 6 nov. 1688, précipita Jacques du trône et l'envoya en exil. Battu à la Boyne et à la Hogue, malgré les secours de Louis XIV, Jacques passa le reste de ses jours à Saint-Germain, partagé entre les intrigues politiques et les exercices de dévotion, f 16 sept. 1701. On a dit de de lui qu'il avait perdu trois royaumes pour une messe.
JAENICKE, pasteur et prédicateur morave à Berlin, à l'égl. de Bethléhem; fonda en 1800 une école libre pour former des missionnaires, dont la plupart entrèrent au service de sociétés anglaises. Après sa f 1827 cette œuvre fut continuée par la Soc. des Missions de Berlin.
JALAGUIER, Prosper-Fréd., né 21 août 1795 à Quissac, Gard, pasteur à Sancerre 1821, prof, de morale et de dogmatique à Montauban 1833-1864. f 22 mars 1864. Théol. biblique, il a exercé pendant plus d'un quart de siècle une heureuse influence sur les étudiants, non seulement par un enseignement évangélique, mais par le sérieux de la vie et la bonté du cœur. Auteur de plusieurs brochures sur: le Témoignage de Dieu, l'Authenticité du N. T., l'Inspiration du N. T., la Question chrétienne jugée par le bon sens, Du principe chrétien et du ca-thol., Du rationalisme et du protestantisme; enfin: Une vue de la question scripturaire.
JAMES, v. Jacques.
JANOW, Mathias (de), un des précurseurs de la réforme de Huss, mais timide. Il étudia k Paris d'abord, ce qui lui valut le \itre de ma-gister parisiensis, puis à Prague où, sur la recommandation du pape, il fut plus tard nommé chanoine et confesseur k la cathédrale. L'exercice du ministère lui fit comprendre peu à peu que les questions ecclés. sont moins importantes que la communion avec le Sauveur. Il aurait voulu que les laïques communiassent tous les jours, et cela sous les deux espèces, mais il fut obligé de se rétracter, un synode ayant décidé k Prague 1388 qu'une fois par mois suffisait. Il obéit k ses chefs, mais il finit par se persuader qu'une réforme ne serait possible que lorsque l'Égl. aurait d'abord été détruite par l'Antéchrist. Il ne reste que des fragments de son livre Des règles de l'A. et du N. T., et de ses Recherches sur l'essence du christianisme.
JANSÉNIUS, Jansénisme. Né 28 oct. 1585 k Acquoi, près Leerdam, Hollande, Cornélius Jansénius étudia k Louvain et à Paris où il se lia avec Saint-Cyran. Placé d'abord à la tête d'un collège à Bayonne, il retourna 1617 à Louvain comme prof, de théol., fut nommé principal du collège Sainte -Pulchérie, en 1630 prof. d'Écriture sainte à Tnniv., combattit les jésuites, leur interdit l'enseignement de la théol. dans cette ville, et devint év. d'Ypres 1635. f 1638. Sa célébrité ne commença qu'après sa mort par les attaques que les jésuites dirigèrent contre sa mémoire. C'est en 1640 que parut son principal ouvrage: « Augustinus, ou Doctrine de saint Augustin sur la nature humaine, sa santé, ses maladies; remède contre les pélagiens et les massiliens. • L'importance de ce livre est moins dans la réfutation de la doctrine des jésuites, de Molina en particulier, que dans la manière féconde et vivante avec laquelle il présente les doctrines du péché, de la grâce et de la rédemption. A l'instigation des jésuites, il fut interdit par Urbain VIII, dans sa bulle In eminentis, comme la reproduction des erreurs déjà condamnées de Bajus. Mais le jansénisme avait trouvé des adhérents en France, entre autres l'abbé de Saint-Cyran, puis Arnaud, Nicole, Pascal et d'autres savants. L'univ. de Paris présenta au pape sept propositions, comme extraites des écrits de Jansénius; elles furent réduites à cinq, et Innocent X les condamna 1653 dans sa bulle Cum occasions. Alexandre VII fit de même 1656. Les amis de Jansénius refusèrent de se soumettre, niant que les propositions condamnées se trouvassent dans les livres incriminés, ou qu'elles eussent le sens qu'on leur donnait. Le pape ayant exigé leur adhésion à sa bulle, Arnaud publia sa Lettre à une personne de qualité, et Pascal ses Lettres à un provincial. La lutte était engagée, et l'opposition se concentra, hommes et femmes, autour de Port-Royal. Louis XIV aurait voulu réduire les jansénistes par fa violence, mais 4 évêques tenaient pour eux; ils distinguèrent entre le fait et le droit, refusèrent de signer, mais s'engagèrent à un respectueux silence, compromis équivoque imaginé par le roi et accepté par le pape sous le nom de Paix de Clément IX, 1668. La paix fut d'autant plus facile que les év. jansénistes et Arnaud lui-même ayant pris parti pour le pape dans ses luttes avec la royauté, Louis XIV les avait forcés de quitter la France. Et quant à Port-Royal, dont les religieuses refusèrent de signer la bulle Vineam domini, 1705, il fut supprimé et démoli. Il semblait que la lutte fût terminée. Elle se ranima plus vive et plus ardente, quand le père Quesnel, prêtre de l'Oratoire, publia, sous le patronage de l'archev. de Paris, cardinal de Noailles, ses Réflexions morales sur le N. T., livre de pure édification, qui obtint un succès immense, mais qui reproduisait les idées de Jansénius. Clément XI, par sa bulle Unigenitus 1713, en condamna 101 maximes comme jansénistes et hérétiques, et dans le nombre plusieurs qui sont textuellement dans la
Bible, dans Augustin et même dans les décrets du conc. de Trente. Une grande partie du clergé de France refusa de s'y soumettre, quoique le roi l'eût fait enregistrer comme loi du royaume. Les év. demandèrent qu'elle fût soumise à un concile national, mais les constitutionnels on acceptants s'y opposèrent avec énergie, et le clergé se scinda en deux grands partis, celui des Acceptants et celui des Appelants, qui en appelaient au concile. Il fut procédé contre ces derniers avec une extrême rigueur. Plusieurs, entre autres Noailles, se rétractèrent; les autres furent destitués, emprisonnés, bannis; les sacrements de l'Égl. leur furent refusés. Un grand nombre se réfugièrent en Hollande, où ils se sont maintenus jusqu'à ce jour. L'archevêché d'Utrecht. avec les év. de Harlem et de Deventer, se déclara indépendant du pape, tout en maintenant l'union avec l'Égl. catholique. A chaque avènement d'un nouveau pape, ils lui présentent leurs hommages, tout en repoussant sa suprématie, et il y répond en renouvelant leur excommunication. Ils ont en Hollande 27 églises, comprenant environ 6,000 membres. Ils continuèrent aussi de subsister à Paris, et le diacre Pâris fut une de leurs illustrations 1727, mais le nombre en a toujours été très restreint. L'œuvre entreprise par le p. Hyacinthe, quoique moins accentuée quant à la doctrine, a de l'analogie avec le jansénisme.
JANVIER. Parmi les 14 saints de ce nom, le plus célèbre est l'ancien év. de Bénévent qui. avec ses compagnons, fut emprisonné à Pouizo-les sous Dioclétien 305, et martyrisé le 19 sept. Comme il refusait de sacrifier aux idoles, il fat d'abord jeté dans une fournaise ardente, puis livré aux bêtes, mais il n'en reçut aucun dommage. A la fin il eut la tête tranchée. Une femme qui était là recueillit la tête et le sang, qui sont auj. conservés dans une des chapelles de la cathédrale de Naples; le sang dans deux fioles. Quand la tête est rapprochée du sang, celui-ci devient liquide. Ce miracle se fait régulièrement le jour anniversaire de la mort do martyr. Il se fait aussi dans des occasions solennelles. S'il tarde à s'opérer, c'est mauvais signe et l'on peut s'attendre à des malheurs. C'est ce qui faillit arriver lors de l'établissement de la République parthénopéenne 1798; le général Championnet coupa court à tout danger en prévenant Tarchev. que si le miracle n'était pas fait dans un bref délai, il lui brûlerait la cervelle. Lorsque Garibaldi entra dans Naples 1860, le miracle se fit sans hésitation ni retard. On sait que la cire rouge est à la base du mystère et qu'un peu de chaleur la fait fondre; les cierges qui brûlent sur l'autel suffisent pour cette opération.
Les autres saints du même nom. et sainte
Janvière, figurent sur les catalogues comme martyrs, mais sans histoire. Janvier, chanoine de Saint-Symphorien d'Autun, a publié en 1742 un poème latin Ars confabulandi, l'Art de causer, que Delille a utilisé dans son poème de la Conversation.
JAPON. Découvert au 13me siècle par Kubru-quis et Marco Paolo, le Japon fut évangélisé dès 1549 par François Xavier et ses compagnons, qui s'établirent d'abord dans l'île de Kiousiou, et qui obtinrent de tels succès qu'en 1580 ils avaient gagné à leur foi près de 200,000 prosélytes, dont plusieurs princes, et qu'ils purent envoyer à Grégoire XII une députation japonaise pour le saluer. Mais en 1587 l'emp. Taiko-Sama, excité par ses bonzes, irrité par les imprudences des missionnaires et provoqué par l'attitude de ses sujets chrétiens, fit raser les églises et chassa les missionnaires. Ceux-ci feignirent d'obéir, mais en réalité le culte continua de se célébrer en secret, et l'empereur l'ayant découvert, procéda contre les rebelles, d'autant plus rigoureusement que l'action politique du Portugal était à peine dissimulée sous les apparences relig. de l'œuvre 1595 et 1597. C'est alors que périrent les 26 martyrs japonais dont la canonisation a eu lieu en 1862. Le fils de Taiko-Sama aimait les missionnaires et il les toléra jusqu'en 1613, mais informé par les Hollandais que les Portugais menaçaient son royaume, il rouvrit l'ère des persécutions 1614, fit raser les églises, brûler ses sujets chrétiens, déporter à Macao les missionnaires, et bannit à toujours tous les Portugais. L'édit fut exécuté avec la plus grande rigueur, et sous Taiko-Sama II, 1631-1658, les restes du petit troupeau qui continuaient de se défendre avec l'énergie du désespoir, furent anéantis à Nangasaki, grâce au concours des Hollandais. En 1644 tout était fini, et pour prévenir tout retour du christianisme, l'édit de 1638 fut de nouveau confirmé, portant sous le titre de Jésu-mi l'ordre à chacun de fouler aux pieds le crucifix. Les Hollandais à leur tour ayant excité des méfiances, furent relégués à Nangasaki, où ils purent continuer leur commerce et où ils se sont maintenus. L'ouverture des ports du Japon en 1854 a permis aux missionnaires de reprendre leurs travaux; les Américains en ont profité les premiers. Le N. T. vient d'être entièrement trad. en japonais. — v. Kâmpfer 1691, Thunberg 1776, Siebold 1830, et surtout Aimé Humbert, Paris 1865, et Tavlor 1871.
JAQUELOT, Jean, né 16 sept. 1649 à Vassy où son père était pasteur. Il fit de bonnes études et montra du talent pour la prédication. A la révoc. de l'Édit de Nantes, il passa à Heidelberg, puis à La Haye comme pasteur du corps des nobles; enfin en 1702 à Berlin, où il f 1708.
Auteur de plus, écrits philos., apologétiques et d'édification. Il était arminien.
JAQUERIE, v. Jacques 8<>.
JARCHL ou plus ordinairement Raschi, nom composé, suivant la méthode rabbinique, des initiales de son vrai nom: RAbbin SCHelomon, fils d'Izchak. Né 1040 (ou 1030) à Troyes, Champagne, f 1105. Il appartenait à une famille considérée de savants juifs. Sa vie, ornementée de traits légendaires, est peu connue; on sait seulement qu'il parcourut presque toute l'Europe, l'Égypte et une partie de l'Asie, et qu'il rentra, enrichi d'un immense recueil de notes et d'observations, à Troyes où il se consacra à l'enseignement. Beaucoup de jugement, un sens critique et historique très développé, et une vast* érudition le caractérisent comme écrivain. Ses Comment, sur tout l'A. T. renferment, outre l'explication du sens littéral, les explications allégoriques si chères aux anciens. Il a écrit aussi des Comment, sur les différents livres du Talmud, qui font de lui le véritable père de cette étude. Ses ouvrages ont été souvent réimprimés: Naples 1487, Venise 1520; et en latin, trad. d* Breithaupt, 1713-1740.
JAROUSSEAU, Jean, né 1720 à Mainxe, An-goumois, comptait parmi ses ancêtres des pasteurs martyrs. Il étudia à Lausanne, fut consacré par Rabaut et fut nommé 21 sept, 1761 à Saint-Georges de Didonne, avec une paroisse grande comme un diocèse. Il eut pour collègues dans le co'loque de Saintonge, des hommes dévoues comme lui, entre autres Louis Gibert qui fut tué l'année suivante. Le gouverneur de la province, maréchal de Senneterre, avait des dispositions tolérantes et ferma les yeux; mais l* nouveau gouverneur voulut faire du zèle et appliqua les édits. Jarousseau fut blessé dans une assemblée, et pendant sa maladie il conçut l'audacieux projet de se rendre directement auprès de Louis XVI et de plaider la cause des églises. Grâce à Malesherbes il obtint une audience, et pour lui-même la promesse royale qu'il ne serait plus inquiété, pourvu qu'il évitât toute manifestation trop ostensible de son culte; il ne put obtenir davantage, f 18 juin 1819 à Che-naumoine. Sa fidélité a été une bénédiction pour sa famille où sa mémoire est en vénération. Son petit-fils, M. Eug. Pelletan. a raconté l'histoire du Pasteur du désert, dans un livre couronné par l'Acad. franç. qui joint tout l'intérêt d'un roman au sérieux moral d'un livre de pure édification. La maison de Saint-Georges, que la famille possède encore et soigne avec amour, a été appelée par Michelet un temple de l'humanité; le jardin, qui s'est agrandi, est orné d'arbres, de roses et de fleurs rares et précieuses.
JEAN lo pape 523-526. Chargé par Théodo-ric de se rendre à Constantinople pour deman -der le retrait de l'édit de 524 contre les ariens, il fut emprisonné à son retour en récompense de son succès; il parait qu'il avait mal compris ou mal rempli sa mission.
2° Jean II, nommé Mercure, pape 533-535, le premier qui a changé de nom. Contrairement à son prédécesseur Hormisdas, il admit la formule: Une des personnes de la Trinité a été crucifiée. Décret contre la simonie.
3° Jean III, pape 560-574, n'entra en fonctions que 4 mois après son élection, Justinien;»yant tardé à le confirmer.
4° Jean IV, pape 640-642; Dalmate, travailla à soumettre à son autorité Pyrrhus, patr. de Constantinople.
5o Jean V, pape 685-686, passa dans son lit tout le temps de son pontificat.
6° Jean VI, pape 701-705. Les Romains le défendirent contre l'exarque qui voulait le destituer.
7o Jean VII, pape 705-707, n'osa rien décider quand Justinien II lui lit soumettre les canons du conc. de Trulle.
8° Jean VIII, d'abord archidiacre de Rome, élu en 872 en remplacement d'Adrien II, régna 10 ans. Il recouvra quelques-uns des avantages perdus par son prédécesseur. 11 soutint Charles-le-Chauve contre Louis d'Allemagne et donna l'empire au premier « par un bienfait non humain, mais divin: > il reprocha aux év. français de n'avoir pas repoussé Louis les armes à la main, « puisque, dit-il, nous n'avons pas à combattre contre la chair et le sang, mais contre les principautés ! » Attaqué par les Sarrasins, il implora le secours de Charles, mais celui-ci mourut avant d'avoir pu le secourir. Emprisonné par Lambert, duc de Spolète, qui voulait s'emparer de Rome, il s'enfuit en France où Louis - le-Bègue lui fournit les moyens de remonter sur son siège. Pressé de nouveau par les Sarrasins, il eut recours à l'emp. Basile, de Constantinople. Par reconnaissance il offre à Photius de le relever de son excommunication et de le reconnaître comme patr. de Constantinople, s'il veut lui céder la Bulgarie. C'est de la simonie en grand. Photius refuse, il est excommunié. il excommunie. On reproche à Jean VIII d'avoir faibli dans cette circonstance, et de s'être conduit comme une femme; on a même voulu profiter de l'occasion pour chercher dans ce fait une des explications de l'histoire de la papesse Jeanne q. v. Jean accorda aux slaves le droit de célébrer l'office divin dans leur propre langue, permission que Grégoire VII leur retira plus tard. Jean se nomme un vicaire en France et rattache ainsi plus intimèment cette Église à la sienne. Il émancipe les év. de la puissance séculière et se les assujettit; il avait défendu que les nobles s'assissent devant un évêque sans la permission de celui-ci. Il couronna trois souverains, Charles-le-Chauve, Louis-le-Bègue et Charles-le-Gros, et convoqua onze conciles. Il fut assassiné vers la fin de 882.
9° Jean IX, 898-900, rétablit la mémoire du pape Formose, condamnée par ses prédécesseurs, et reconnut comme empereur Lambert de Spolète contre Arnolphe.
10o Jean X, 914-923. II avait vécu dans un commerce impur et criminel avec la Théodora, puis il avait été fait archev. de Ravenne. Mais cet éloignement ne convenait pas aux deux amants. Théodora, désirant le rapprocher d'elle, le fit nommer pape, avec tous les titres de sainteté et d'infaillibilité qui sont les fiefs du pontificat. Dans l'ivresse de sa vie scandaleuse il fut jeté en prison par la Marouzia, et il y mourut.
llo Jean XI, 931-936, fils du pape Serge III et de la Marouzia, élu à 25 ans. Avec lui la papauté a quelque chose d'héréditaire. Son fr. Albéric, aussi fils de la Marouzia, le fait jeter en prison avec sa mère au château Saint-Ange, où il meurt.
12° Jean XII, Octovien-Albéric, fils du précédent Albéric, patrice de Rome et petit-fils de la Marouzia. se fit élire pape à 18 ans, 956. Comme souverain temporel il garda le nom d'Octavien; comme pape il prit celui de Jean, pour distinguer ses deux charges. Inquiété par Bérenger roi d'Italie, puis par Adalbert son fils, il recourut à Othon, emp. d'Allemagne, qu'il couronna, en lui donnant le titre de roi d'Italie, 962. Sous ce malheureux jeune homme le palais pontifical devint un véritable lieu de débauche, prostibulum mereti^icium^ dit un historien catholique. La dissolution, la corruption et les horreurs de tous genres atteignirent sous son règne, à un si haut degré, que des plaintes s'élevèrent de toutes parts. Les femmes n'osaient plus se rendre dans les temples, où leur honneur n'était pas en sûreté. Othon, ayant appris tous ces désordres, crut devoir intervenir. Jean s'excusa de ce qu'il appelait quelques folies de jeunesse, puerile quid. Othon lui pardonna pour la première fois en disant: ce n'est qu'un enfant; avec le temps il se corrigera. Mais les désordres ne faisant qu'augmenter, et le pape s'étant tourné vers Adalbert contre l'empereur, Othon se rendit à Rome. Jean s'enfuit. L'emp. convoqua un concile. Là, des évêques et des cardinaux déclarèrent que Jean avait consacré un prêtre dans une écurie, qu'il avait consacré évêque pour de l'argent un jeune garçon de dix ans, qu'il avait volé l'Église, qu'il avait commis beaucoup d'impuretés, même d'incestes: qu'il avait fait arracher les yeux à son père spirituel Benoit; qu'il avait causé la mort d'un sous-diacre, qu'il avait bu à la santé du diable, et qu'en jouant, ce qui était sa coutume, il avait souvent invoqué Jupiter et d'autres dieux. Le clergé et tous les Romains déclarèrent d'une manière solennelle, que toutes ces accusations étaient véritables. Appelé à se justifier, Jean répondit en menaçant des foudres de l'excommunication. Il fut déposé par le concile et Léon VIII fut nommé à sa place. Mais après le départ d'Othon il réussit à rentrer dans Rome 964, et y exerça d'affreuses vengeances. A l'un il fît couper le nez, à l'autre la main droite, à un troisième la langue, etc. L'emp. dut revenir. Jean était aux environs de Rome, occupé à ses débauches; il fut tué la même année par le mari d'une femme avec laquelle il se trouvait.
13o Jean XIII, 965-972; fils de Jean XII,de nouveau papauté héréditaire. Il imagine le baptême des cloches.
14<> Jean XIV, 983, un des trois papes qui furent élus entre la fuite du pape Boniface VII et son retour. Il était chancelier d'Othon II. Baronins le range parmi les plus fameux brigands. Il fut tué par son collègue revenu de Constantinople, 985.
15° Jean XV, 985, nous sort un peu de ces tristes horreurs, mais il est plein d'orgueil et d'ambition. Arnulf de Reims, de la famille des topet, est accusé d'avoir voulu livrer sa ville aux ennemis de Capet. Celui-ci se plaignit au pape, qui traîna en longueur. Pendant ce temps Capet s'est affermi sur son trône; il convoque un conc, à Reims 991. Des moines prétendent que le jugement d'un évêque n'appartient qu'au pape; ils citent les fausses décrétales. Arnulf d'Orléans les combat avec éloquence et vigueur. H veut le respect au siège de Rome, mais avant tout, le respect pour les conciles. Il tonne contre la suprématie de ces jeunes gens débauchés dont on fait des papes, t A quoi servent les décisions et les lois, si tout est dirigé par la volonté d'un seul? Et des prêtres illustres par leur science et leur piété, doivent-ils être soumis à de tels monstres (taies monstri) 1 L'Antéchrist est assis dans le temple de Dieu, se donnant pour Dieu ! > Le concile fut entraîné par la parole de cet évêque; Arnulf de Reims avoua sa faute et donna sa démission. C'est Gerbert, son successeur, plus tard Sylvestre II, qui a donné les détails de ces discussions. Jean XV condamna ce concile et, avec l'aide de ses moines, en convoqua un autre à Montluçon 995, mais il mourut peu après, 996. La chronologie de ces papes Jean est un peu confuse.
16° Jean XVI, 996, ne fit que passer sur le trône. On croit que c'est sous son règne qu'eut lieu la première canonisation.
- Il y eut aussi un antip. Jean XVI, vers 986?
17° Jean XVII, pape 1003.
18° Jean XVIII, successeur immédiat du précédent, 1004-1009.
19° Jean XIX, 1024-1033, frère de Benoît VIII, élu quoique laïque; son neveu. Théophylacte, presque un enfant, lui succède sous le nom de Benoit IX.
20° Jean XX, 1045-1046, élu concuremment avec Sylvestre III, pendant que Benoît IX prétend encore rester pape. Il dura peu et ne fit rien. Quelques-uns le comptent comme antipape; c'est difficile à démêler.
21° Jean XXI, 1276-1277; Pierre Julien, ou Petrus Hispanus* né à Lisbonne, philos, et médecin distingué, élu pape 1276. Il essaya d'empêcher la guerre d'éclater entre Philippe-le-Hardi et Alphonse de Castille, et tenta mais en vain de leur faire entreprendre une croisade. 11 périt malheureusement à Viterbe, écrasé sous les décombres de son palais. On a de lui des Sum-mulœ logicales.
22° Jean XXII, 1316-1334. Jacques Duèse, de Cahors, élu par le parti français après deux ans d'interrègne. C'est te second pape d'Avignon; homme éclairé, savant en droit et en médecine, comme en théologie. Il favorisa la France, combattit l'élection de Louis de Bavière et l'excommunia à cause de sa lutte avec Frédéric d'Autriche. Les deux monarquess'étant réconciliés, les franciscains rigides, tels que Guill. Occam, embrassent le parti impérial et attaquent violemment l'Égl. romaine et ses prétentions. Le pape s'appuie en Allemagne sur les païens de Brandebourg qu'il emploie contre Louis, mais Louis marche sur l'Italie, se fait couronner, fait destituer le pape pour simonie et nomme à sa place Nicolas V. Jean n'en continue pas moins d'excommunier; il triomphe de son rival qu'il contraint à abdiquer et à lui demander pardon, la corde au cou. Il fait brûler vif l'év. de Cahors, qu'il accuse d'avoir voulu l'empoisonner. Louis en appelle à un conc. général, mais Jean f 1334. Du Pin l'accuse d'hérésie à cause de ses opinions sur l'état de l'âme entre la mort et la résurrection (Antiq. p. 352); mais ce n'est qu'un détail. On a de lui quelques traités de médecine, entre autres le Thésaurus pauperum, qu'on a attribué à tort à Jean XXI. C'est aussi lui qui a publié les Clémentines et les Extravagantes.
23° Jean XXIII, Balthazar Cossa, élu à Bologne 1410, par 16 cardinaux, après la mort d'Alexandre V qu'il avait fait empoisonner; il se trouve en concurrence avec Grégoire XII et Benoît XIII, trois papes qui ont tous les trois leurs partisans, mais qui finiront par être remplacés par Martin V. Cruel, avare, exacteur, corrompu, simoniaque, il réforme un décret de Nicolas 1er. Puis, pressé par l'empreur Sigismond, il convoque à Rome, pour la réforme de l'Église, un conc. où il n'admet que des Italiens et qui ne fut qu'une farce honteuse. Si-gismond veut un conc. écuménique en règle. Le pape, dans un moment de vertige, laisse à l'emp. le choix de lieu, et celui-ci choisit Constance, en dehors de l'influence papale. Jean se maudit de regret et s'écrie en arrivant à Constance: C'est ainsi que le renard se laisse prendre. Ce concile, 1414, fut un des plus nombreux qu'il y eût eu. Outre les grands dignitaires civils et ecclésiastiques, on y compta 1800 prêtres, 348 comédiens et 700 femmes de mauvaise vie. On produisit contre Jean une série d'accusations de péchés mortels, empoisonnements, débauches, incestes, etc., tellement abominables qu'on n'osa pas les lire en public; si connus d'ailleurs que la lecture en était superflue. Sur la demande du concile Jean donne sa démission et s'enfuit le 21 mars 1415 déguisé en garçon d'écurie. Il est repris, jugé, déposé, et jeté en prison à Rudolfszell, près de Constance. Trois ans après Martin V le fait remettre en liberté et le nofnme doven du sacré collège. f 1419.
D'autres personnages de ce nom sont connus dans l'hist. de l'Église. Après les papes, nous mentionnerons:
lo Jean de Giscala, Ben-Lévi, célèbre patriote qui, lors de l'invasion romaine, se mit à la tête de volontaires dévoués et résolus, défendit sa ville de Giscala contre Josèphe, dont il se déliait, et ne cessa de harceler les Romains. Quand il apprit que Jérusalem était assiégée, il courut s'v enfermer avec ses hommes, s'unit aux zé-lates, organisa la résistance la plus désespérée, s'empara du gouvernement malgré les tièdes et les politiques, trop disposés à négocier, lutta contre le parti d'Eléazar et de Simon de Gue-rasa, usa de représailles terribles contre ceux qui refusaient de reconnaître son autorité, et se défendit vaillamment jusqu'à la fin. Emmené à Rome comme prisonnier, il servit d'ornement au triomphe de Titus et mourut dans un cachot. Josèphe, qu'il avait démasqué, le représente comme un homme faux, mais il ne lui ôtera pas l'honneur d'avoir aimé son pays avec passion et d'avoir tout sacrifié pour essayer de le sauver.
2° Jean-le-Presbytre, ou Y Ancien, à qui plusieurs auteurs croient pouvoir attribuer l'Apocalypse; il n'est connu que par un mot de Pa-pias, qui le fait vivre vers 150, et qui le cite comme une autorité, comme ayant connu Jésus personnellement. Il était ancien d'Éphèse. Mais l'ap. Jean vivait aussi à Éphèse, et l'on peut croire que Papias, qui n'avait pas beaucoup de sens critique, a fait une confusion. D'autres pensent au contraire que l'apôtre n'a jamais vécu à Éphèse, et que la tradition sur ce séjour vient d'un malentendu d'Irênée et de Polycrates qui auraient confondu les deux Jean.
3o Jean-le-ScoIastique, né à Sirimis, près d'Antioche, d'abord avocat, puis prêtre, il fat 564 nommé patriarche d'Antioche en remplacement d'Eutyche, destitué par Justinien pour n'avoir pas voulu reconnaître les aphthartodo-cètes. Il écrivit sur la Trinité un traité, auquel J. Philipon répondit. Il provoqua à Antioche la première grande collection de canons, + 577.
4o Jean d'Éphèse, né à Amid; év. monophy-site, très considéré à la cour dè Constantinople. sous Justinien. Chargé par l'empereur de faire un voyage missionnaire, il convertit en Asie 90,000 païens, fit construire 96 églises et fut surnommé le Destructeur des idoles. Il écrivit une histoire en 3 livres, dont le tiers a été trad. du syriaque en 1843 par Cureton, et contient les années 571-585. On y trouve des détails intéressants, fournis par un témoin oculaire.
5° Jean-l'aumônier (Eleèmosynariu*), patr. fa Constantinople, connu par son inépuisable charité. f 616 dans l'île de Chypre, fuyant les persécutions des Perses.
6° Jean Philopon, grammairien d'Alexandrie. Son nom signifie ami du travail et paraît avoir été mérité. Il a beaucoup écrit sur la grammaire, la physique, la philos, et la théologie, et la plupart de ses ouvrages ont un but apologétique. Disciple d'Ammonius et auteur du Trithéisme, il soutient que la nature et l'hypostase sont une seule et même chose; que le corps périssant tout entier par la mort, doit être créé de nouveau pour la résurrection; que le Christ a célébré le 13 Nisan une Pâque mystique. Ses livres sur l'Éternité du monde, la Création, la Résurrection, son Traité de l'Ame, et quelques traductions d'Aristote, ont été publ. à Venise 1534 et 1536.
7° Jean-le-Jeûneur, de Cappadoce, d'une naissance obscure, fut, à cause de sa piété nomn* patr. de Constantinople, 582-595. Comme plusieurs de ses prédécesseurs, il prit le titre de patriarche écuménique, que le pape Grégoire essaya en vain de lui disputer, comme un empiétement sur sa propre souveraineté. Grégoire contesta même la sincérité de son ascétisme. Des règles sur la confession, des instructions pour les confesseurs se trouvent dans les plus anciennes liturgies grecques et portent son nom, mais il n'est pas prouvé qu'il en soit l'auteur.
8o Jean Maron, v. Maronites.
9° Jean, patr. de Thessalonique, prit au 8*e siècle, la défense du culte des images, dans uu écrit qui fut approuvé par le conc. de Nicée 787.
10° Jean de Dara, près Nisibis, év. jacobite de la lr® moitié du 9<ue siècle. On a de lui m traité sur la Résurrection des âmes, un sur la Hiérarchie céleste et ecclésiastique, et un sur le Sacerdoce. Il en a écrit aussi un sur l'Ame.
llo Jean-le-Diacre, moine du Mont Cassin. 9™ siècle, auteur d'une Vie de Grégoire I*r.
Ho Jean, Saxon d'origine. Alfred d'Angleterre le fit venir du continent vers 834 et lui confia la direction de l'école d'Oxford. Devenu abbé du monastère d'Ethelingay, il fut tué à coups de stylet dans une émeute de moines, 895; comme il était très fort il se défendit longtemps. Quelques-uns, à cause de certaines analogies de nom, le confondent à, tort avec Jean Scot Erigène, v. Scot.
13° lean de Gortz, né à Vendière, près Pont-à-Mousson, fut amené à l'étude de l'Écriture sainte par Berner, diacre de Toul. Frappé du manque de discipline dans tous les couvents, même chez les recluses, il se lia avec quelques amis pour vivre saintement. L'év. Adalbert de Mayence mit à leur disposition le monastère délabré de Gortz, dont Jean accepta la direction, avec son ami l'abbé Einald. Vers la fin de sa vie Othon-le-Grand l'envoya en mission auprès d'Ab-derrahman III à Cordoue. Sa vie a été écrite par
14° Jean de Saint-Arnulph, son ami et contemporain, f 984, et compte parmi les documents historiques les plus importants du 10me
siècle.
15o J. Scot, ou Y Écossais, envoyé par Adalbert de Brème à Goltschalk, roi des Vendes, pour l'aider à évangéliser son peuple. Nommé ev. de Magnopolis (Mecklembourg), il fut tué dans un soulèvement des païens contre le christianisme, 1066.
16o et 17o, deux moines dominicains, l'un et l'autre connus sous le nom de Jean-le-Teutoni-que; le premier, célèbre par son éloquence, fut nommé év. de Pressbourg, mais préférant la vie contemplative, il rentra dans son ordre, dont il devint général, et f 1254. Le second, surnommé le Lecteur, écrivit la Somme des confesseurs, pleine de problèmes et de cas de conscience avec leurs solutions, et f 1314.
18o Jean X, de Constantinople. Opposé à l'union des deux Églises proposée au conc. de Lyon 1274, il fut emprisonné par ordre de Michel Paléologue, mais ayant changé d'opinion il fut élu patriarche de Constantinople l'année suivante. L'irritation des orthodoxes le décida à donner sa démission et il se retira dans un couvent. Il f exilé en Bithynie 1298.
19o Jean de Paris, savant dominicain du 13m* siècle, dialecticien si habile qu'on l'avait surnommé pungens-asinum (pique-âne); prof, de théol. à Paris. Dans le conflit entre Philippe-le-Bel et Boniface, il prit parti pour le roi. Il tenait à la doctrine de l'impanation et la défendit avec tant de vigueur qu'une commission d'évêques lui interdit de prêcher et d'enseigner. Le pape attira la cause à lui, mais Jean + 1306 avant que la sentence eût été prononcée On a de lui un traité sur le Pouvoir royal et le pouvoir papal, et un autre sur le Mode d'existence du corps de Christ.
20o Jean Petit, ou Le petit, né à Hesdin, moine franciscain, D' en théol. à Paris, était aux gages de Jean-sans-Peur, duc de Bourgogne, et s'est fait une triste célébrité en cherchant à justifier l'assassinat du duc d'Orléans 1408, sous prétexte que c'est une chose bonne et honorable de tuer un traître et un tyran. Cette doctrine, réfutée par Gerson, fut condamnée comme hérétique par le conc. de Constance, + 1411.
21o Jean de Dieu, v. Frères llo.
22o Jean d'Avila, né entre 1494 et 1500 à Almodovar del Campo, archevêché de Tolède, f 1569. Il étudia d'abord le droit à Salamanque, mais n'y trouvant point de plaisir, il se tourna vers la théol. et l'étudia à Alcala sous Dominique a Soto. Il aurait désiré se rendre aux Indes comme missionnaire, mais son archev. aima mieux en faire un prédicateur itinérant dans son pays. Il se fit une grande réputation et s'attira même les tracasseries du saint-office. Il refusa toutes les offres qui lui furent faites. Malade à Montella pendant 20 ans, il réunit autour de lui de nombreux disciples et leur dicta 2 gros volumes de Lettres.
23o Jean de la Croix, fondateur de l'ordre des carmes déchaussés. Son vrai nom est Jean de Yepes. Né 1542 à Ontiveros, près d'Avila, Cas-tille, il entra à 21 ans, sous le nom de Jean de Saint-Mathias, dans le couvent carmélite de Medina del Campo. Passionné d'ascétisme, il accueillit avec ferveur les appels de sainte Thérèse pour une réforme de l'ordre. La nouvelle congrég. se forma en 1564 et le couvent fut transféré 1570 à Manzera. Il en fut nommé abbé sous le nom de Jean de la Croix. Les succès qu'il obtint lui valurent, avec les colères de son ordre, un long temps de prison, et même, après la f de Thérèse 1582, des persécutions de la part de ceux qui l'avaient suivi dans sa réforme, mais qui la trouvaient trop sévère. Il déposa ses dignités et se retira au couvent d'Ubeda, où il f 1591 par suite de mauvais traitements. Ses écrits unissent l'ardeur du mystique à la dureté du fanatique.
24o Jean, surnommé le Constant, le premier des princes qui signèrent la protestation de Spire 1529, et par conséquent le premier des protestants. Électeur de Saxe 1525-1532; fils d'Ernest, il naquit à Meissen 1468, fit de bonnes études à l'univ. de Grimma, et vint, après la mort de son père, 1486, à la cour de son fr. Frédéric III, dit le Sage, qui l'associa au gouvernement et finit par le nommer co-régent. Il épousa 1500 la fille de Magnus, duc de Mecklembourg. Très bon catholique et fréquentant assidûment l'égl. de Tous les Saints à Wittenberg, il se trouva assister le 31 oct. 1517 à la scène de l'affichage des 95 thèses de Luther, et il se prononça ouvertement pour le moine réformateur. En 4520 il demande que le traité de Luther sur la Foi et les œuvres lui soit dédié. En 1521 il se charge des frais du voyage de Luther à Worms, et le couvre de sa protection, même mis au ban de l'empire, en dépit des menaces de Henri VIII, de Charles-Quint et d'Adrien V. Il prit part à la guerre des paysans, dont Munzer aurait voulu faire une guerre religieuse, et joignant ses forces à celles des ducs Georges et Henri et du landgrave Philippe, il défit les rebelles à Mulhausen le 15 mai 1525. Son fr. le sage Frédéric étant mort dix jours auparavant dans la paix de Dieu, il lui succéda sur le trône électoral, ayant devant lui une ligue d'ennemis aussi puissants que peu scrupuleux. Les impériaux veulent obtenir la mise en vigueur de l'édit de Worms contre Luther et convoquent une diète à Spire pour le 25 juin 1526. Jean et sa suite s'y présentent sans crainte, ayant sur la manche droite de leur habit les lettres brodées: V. D. M. I. M. ( Verbtim Do-mini Manet In jEtemum, 1 Pier. 1, 25). Il revendique avec autant de courage que de modestie ses droits de prince et ses devoirs de chrétien, et ne laisse pas même soupçonner qu'il puisse y être porté atteinte. Au bout d'un mois la diète se sépare sans avoir rien fait, renvoyant à un concile les questions religieuses. En attendant, il réorganise les églises, prie Mélanchthon de composer un manuel des principaux articles de la foi (Libellus visitatorius), et recommande au clergé rassemblé de ne prêcher que la Parole de Dieu. A la diète de Spire de 1529 il est menacé dans sa vie. Ses amis veulent l'empêcher d'y aller. Il y va accompagné seulement de deux pasteurs, sa suite ne devant le rejoindre que plus tard. Le vote de la diète supprime la liberté de conscience. Jean répond au président qui l'interpelle: Dans les affaires de conscience il n'y a pas de majorité. Et le 19 avril 1529 la protestation est signée; le nom de Jean figure en tête. L'année suivante il est à Augsbourg, et c'est lui qui obtient, malgré l'empereur, que la Confession soit lue en allemand et non en latin. Six semaines après paraît la Réfutation, et l'empereur exige que les princes la signent. « Il y va de votre électorat et de votre vie, » dit-il à Jean. Le 19 nov. tous ceux qui rejettent l'autorité du pape sont mis au ban de l'empire. Mais Jean n'a pas fléchi. La ligue de Smalcalde se forme; l'approche du Turc, les intrigues de François I«r, empêchent Charles de pousser les choses trop loin. La paix, ou trêve de Nuremberg 1532, est une solution qui plafl mieux à Jean que la guerre civile ou qu'une alliance avec l'Angleterre, f 16 août 1532 àSchweinitz, assisté de Luther et de Mélanchthon. Charles même le pleura. Jean, marié 2 fois, eut 2 fils et 2 filles.
25° Jean, Joachim II, margrave de Ktistrin, ne 3 août 1513, f 13 janv. 1571; second fils de Joachim 1er, électeur de Brandebourg, de la famille des Hohenzollern, il reçut de bonne heure de sa mère Elisabeth des impressions religieuses évangéliques, en dépit de son père qui destinait ses deux fils à la prêtrise, et qui obligea sa femm? à prendre la fuite lorsqu'il eut connaissance d** ses sentiments. — Le père mort, Jean rejoignit sa mère et se rendit auprès de Luther, à Wittenberg, pour examiner ce qu'il y avait à faire pour propager la réforme. Il parcourut son pays sans rien imposer, se bornant à appeler des prédicateurs évangéliques là où l'on en désirait, et à réprimer les abus les plus criants. Admirablement secondé par sa femme, Catherine d) Brunswick -Wolfenbuttel, il donna touj. dans son château l'exemple d'une vie simple et religieuse, s'occupa consciencieusement de la bonne administration de son pays, et voyageant incognito pour connaître les vrais besoins de se> sujets. Sa charité lui valut le surnom de Pèr«4 des pauvres, tandis que l'excellence de son jugement en matière religieuse et politique le fit appeler l'Œil et le Conseil de l'Allemagne. En 1548 il se prononça nettement contre l'Intérim d'Augsbourg, il n'eut pas à s'en repentir, car tous les petits États de l'Allemagne furent divisés, sauf le sien. Il publia contre l'Intérim un « Petit catéchisme, » parodie satirique du catéchisme de Luther. A l'avènement de Maximi-lien IL 1564, il lui conseilla hardiment de ne pas déguiser ses opinions, mais de se prononcer pour le protestantisme; l'empereur ne prit que des demi-mesures, qui restèrent sans effet. Apprenant tout à coup la mort de son frère Joachim, 3 janv. 1591, Jean en fut si boule versé qu'il mourut dix jours après. Le l«r févr., au milieu d'un grand concours de peuple, il fut enseveli dans l'égl. de Ktistrin, dans un tombeau qu'il s'était fait construire 16 ans auparavant, avec cette inscription: Solus spes mea Christus.
— Quant aux Jean qui ne figurent pas sur cette liste, on les trouvera sous d'autres lettres: v. Bockhold, Buridan, Capistran, Chrysostome. Damascène, Duns Scot, Goch, Maronites, Monte-Corvino, Népomucène, Prêtre-Jean, Salisbury. Sinaïte, Torquemada, Wesel, Wessel, etc.
— Chevaliers de Saint-Jean de Jérusalem, appelés aussi de Rhodes, ou de Malte, et plu* généralement frères hospitaliers. Des marchands d'Amalfi avaient fondé à Jérus. en 1048 on couvent avec un hôpital pour la protection des pèlerins. Lorsque cette ville eut été prise par les croisés 1099, Gérard Tom, ou Tonque, d* Martigues, Provence, organisa cette fondation en ordre religieux, avec l'autorisation de Pascal II, et Raymond-Dupuy, en 1118, comprenant qu'il ne suffisait pas d'héberger, de nourrir et de soigner les pèlerins, mais qu'il fallait encore les défendre contre les infidèles, modifia la constitution première de l'association et en fit un ordre à la fois religieux et militaire 1121, qu'il divisa en 3 classes, les chevaliers, les religieux et les frères servants. Les richesses abondèrent bientôt, et avec elles les rivalités avec l'ordre analogue des Templiers, dont les débris en 1311 se fondirent dans celui de Saint-Jean. Après la prise de Jérus. par Saladin, le siège de l'ordre fut transféré, à Ptolémaïs 1188, puis en Chypre 1291, et enfin dans l'île de Rhodes quand elle fut tombée en leur pouvoir 1309. Ils s'y établirent, en dépit des assauts répétés des Turcs, jusqu'à ce que, après une défense mémorable, Soliman II s'en empara, grâce à la trahison du chancelier de l'ordre, André d'Ama-ral, 1522. Charles-Quint leur céda l'île de Malte, 1530, à condition,qu'ils feraient aux Turcs une guerre sans trêve, ni relâche. Ils se partageaient en 7 (ou 8) langues, ou provinces, dont chacune avait ses chefs, et à leur téte un grand-maître élu par un chapitre formé des délégués des provinces. Leur costume se composait d'une tunique rouge; en temps de paix d'un manteau noir, avec une croix blanche triple à 8 extrémités. Cet ordre a beaucoup perdu de son importance depuis son expulsion de Rhodes. Henri VIII d'Angleterre fut le premier à le supprimer. Lorsque Bonaparte s'empara de Malte 1798, à l'aide d'intelligences entretenues avec le dernier grand-maître, Hompesch, ce dernier donna sa démission, et fut remplacé par Paul Ier, emp. de Russie. L'ordre n'exista dès lors plus guère que de nom. Le siège en fut transporté à Catane, puis à Ferrare, enfin à Rome 1831. L'Autriche en fit un titre honorifique. La Prusse en 1810 en fit une décoration pour la noblesse, mais peu à peu, et surtout depuis 1853, ces nouveaux chevaliers de Saint-Jean se sont donné pour tâche de rappeler la première origine de l'ordre en fondant et en entretenant des établissements de bienfaisance. Ils possèdent plusieurs maisons importantes, entre autres à Beyrout et à Jérusalem.
— Les Jobannites ou disciples de Saint-Jean, nom donné aux partisans de Jean Chrysostome, qui, regardant sa destitution comme injuste, refusèrent de reconnaître son successeur comme patriarche, et se séparèrent de l'Église. Soutenus par Rome, ils trouvèrent de nombreux appuis, et il en résulta des conflits et des luttes souvent sanglantes, jusqu'au moment où Attius fit inscrire le nom de Chrysostome dans le livre des prières publiques et où son corps fut.
par ordre de Théodose II, solennellement ramené et inhumé à Constantinople.
— Feux de la Saint-Jean, ou Ardons. Plusieurs contrées ont conservé l'usage d'allumer des feux en plein air le 24 juin au soir, et de danser autour. Quoiqu'on essaie de justifier cet usage par des passages bibliques, tels que Jean 1, 8. il est évident qu'il vient du paganisme et qu'il se rattache au solstice d'été, ainsi que les rameaux que l'on suspend ailleurs le même jour aux portes des maisons. — On donne aussi le nom de bénédiction de Saint-Jean au vin que l'on boit en souvenir de cet évangé-liste, le jour de sa fête, à cause de la légende d'après laquelle il aurait avalé une coupe de vin empoisonné, sans qu'elle lui fît aucun mal. pour prouver à un païen la divinité de son Évangile.
JEANNE lo papesse 855-857. Son pontificat se place entre ceux de Léon IV et de Benoît III. D'après la tradition une fille de Mayence, enlevée par son amant, se serait rendue d'abord à Athènes, habillée en homme et sous le nom de Jean l'Anglais; elle se serait mise en rapport avec tous les savants grecs et aurait fait de grands progrès. De là elle serait venue à Rome où elle aurait enseigné les belles-lettres. Elle dut à ses talents la couronne pontificale, mais au bout de deux ans elle accoucha dans une procession, près du Colisée, et mourut. Si ce pontificat d'une femme est une fable, comme a tâché de le prouver le protestant Blondel (De Johannâ papessâ), du moins c'est un fait qui a été affirmé sans contradiction pendant 5 siècles par des historiens cathol. romains (Anasthase. Biogr, des év. de Rome), par des secrétaires de papes, des bibliothécaires du Vatican, des pénitentiaires, des évêques, des papes et des saints. Cette histoire est confirmée par des monuments, une statue à Rome; par de nombreux écrivains, et par la curieuse cérémonie de la constatation du sexe des papes à leur avènement. On objecte d'un autre côté que la première mention explicite et authentique de ce fait, date de la fin du 13™® siècle; Martinus Po-lonius, confesseur de la cour papale, est la plus ancienne autorité que l'on puisse invoquer, et il est de plus de 200 ans postérieur à l'histoire elle-même. Le fait que Jean, 1277, prend le titre de Jean XXI, tandis que sans la papesse il aurait dû s'appeler Jean XX, est allégué en faveur de la tradition, mais il y a eu dans l'intervalle tant de papes insignifiants, qu'on est mai placé pour insister sur l'exactitude de leur succession, notamment en ce qui concerne Jean VI, VII, XVII, XVIII et XIX. On a cherché à expliquer l'origine de cette histoire, les uns par la faiblesse que montra Jean VIII vis-à-vis de Photius, faiblesse qui l'aurait fait traiter de femme; les autres par la succession de femmes impures qui gouvernèrent l'Égl. au 10me siècle, et dont l'une, concubine de Jean XII, aurait porté le nom de Jeanne. Quoiqu'il en soit, cette histoire a donné lieu à des discussions fort animées; Spannheim et Des Marets ont essayé de réfuter Blondel.
2° Jeanne d'Arc, née 1410 à Domrémy, Meuse, sur la frontière de l'Alsace et de la Lorraine; iille d'un paysan nommé Jacques d'Arc, elle garda les troupeaux jusqu'à 18 ans. Mais déjà dès sa 13^ année elle était travaillée par des visions et des révélations, et elle finit par se persuader qu'elle était appelée à délivrer la France, conquise et opprimée par les Anglais. Les difficultés ne lui manquèrent pas, non plus que les moqueries. Mais elle n'y lit aucune attention. Les voix lui donnaient pour tâche de délivrer Orléans et de faire sacrer le roi à Reims. A travers mille dangers elle arrive à Chinon, Touraine, auprès de Charles VII, le reconnaît au milieu de ses courtisans, rappelle Dauphin parce qu'il n'est pas encore sacré, et finit par obtenir de lui, non sans peine, le commandement d'une petite troupe. Au bout de 8 jours le siège d'Orléans est levé, 5 mai 1429. Jeanne poursuit les Anglais et bat Talbot à Patay. Elle annonce la reddition de Troyes et arrive enfin sous les murs de Reims. Charles y entre le 16 juillet et il est sacré le 17. Jeanne, que l'armée appelle la Vierge, ou la Pucelle d'Orléans, se tient près du roi, debout pendant la cérémonie, son étendard à la main, estimant que « ayant été à la peine, il avait bien le droit d'être à l'honneur. » Son œuvre était achevée; elle témoigna le désir de retourner à sa famille et à ses « brebis et bétail, » mais l'armée la supplia de rester. Elle céda, pour son malheur, fut blessée au siège ùe Paris, faite prisonnière en défendant Compiègne, vendue aux Anglais par Jean de Luxembourg pour 10,000 livres, et livrée à l'Inquisition comme suspecte de magie et de sortilège. Enfermée dans les cachots de Rouen, elle vit son procès instruit par l'év. Cauchon, de Beauvais, et fut brûlée vive le 31 mai 1431. Charles VII ne fit rien pour la sauver; ce n'est que 25 ans plus tard qu'il s'occupa de réhabiliter sa mémoire: il anoblit sa famille, en stipulant que la noblesse s'y transmettrait par les femmes, et il exempta de toutes tailles à perpétuité Creux et Domrémy où elle était née. — v. Lebrun des Charmettes, Jules Quicherat, Hase, Strass, etc. Schiller, Soumet, Delavigne, Southey, Porchat. Les faits de son histoire étant attestés, non seulement par des historiens, ses contemporains, mais encore et surtout par son procès, Jeanne apparaît comme une héroïne et comme une prophétesse; elle rappelle la Débora de TA. T. Elle n'a pas été canonisée et ne le sera que lorsque l'Égl. rom. saura renier les erreurs de son histoire.
3° Jeanne-la-Folle, fille de Ferdinand-le-Catholique et d'Isabelle; née 1480, mariée 1496 à Philippe, archiduc d'Autriche, mère de Char-les-Quint. Atteinte au cœur par l'abandon de son mari, elle tomba dans un sombre désespoir qui la fit passer pour folle. On l'enferma comme telle et elle resta 50 ans enfermée, jusqu'à sa f 1555. En 1504 elle avait succédé à sa mère comme reine de Castille, et quoique sous tutelle, son nom figura toujours sur les actes publics à côté de celui du régent, soit son père, soit son fils depuis 1516. Sa folie est restée un mystère historique, et l'on penche à croire auj. que la question religieuse n'a pas été étrangère à l'interdit que l'on a fait peser sur elle.
3° Jeanne d'Albret, la mère d'Henri IV, naquit à Paule 7 janv. 1528. Elle était fille d'Henri II, roi de Navarre, et de Marguerite d'Orléans, sœur de François Elle reçut une excellente éducation, digne de ses hautes qualités intellectuelles et morales, et entretint avec Joachim du Bellay une correspondance poétique où l'avantage lui resta souvent. Après un mariage politique avec le duc de Clèves, 15 juillet 1540, qui même fut rompu avant d'avoir été consommé, elle épousa le 20 oct. 1548 Antoine de Bourbon, duc de Vendôme, dont elle eut 5 enfants, Henri, Louis-Charles, qui moururent jeunes; Henri, comte de Viane, qui devint Henri IV; une fille qui mourut au bout de 15 jours, et une autre fille, Catherine, dont Catherine de Médicis voulut être la marraine. Jeanne, élevée par sa mère dans les principes de la Réforme, leur demeura fidèle jusqu'à la fin. C'est le seul reproche que lui adressent ses biographes catholiques, Davila, le P. Anselme, et même Maimbourg, qui l'appelle l'Héroïne de son temps. D'Aubigné la définit t Royne n'ayant de femme que le sexe; l'âme entière aux choses viriles, l'esprit puissant aux grandes affaires, le cœur invincible aux adversités. » Elle devança son temps, eut l'idée claire de ce qui était bien et le voulut avec une persévérance que jamais rien ne put ébranler. Elle avait le génie d'une saine politique, et lorsque tous autour d'elle se laissaient prendre aux avances hypocrites de Charles IX et de sa mère, seule elle ne fut pas leur dupe un instant. Devenue reine de Navarre en 1555 par la mort de son père, elle partagea le pouvoir jusqu'en 1562 avec son faible mari, et devenue libre par sa mort, elle gouverna avec autant de sagesse que de fermeté, laissa la Réforme s'établir autour d'elle, sans qu'elle fût compromise par un aucun acte d'intolérance, et fut également aimée et respectée de tous ses sujets, catholiques et protestants. Mais la cour, le clergé, le pape, l'Espagne, lui suscitèrent par leurs intrigues et leurs perfidies des dangers et des difficultés de tous genres et finirent par fomenter une révolte dans ses États. Elle dut s'enfuir à La Rochelle et s'unit plus étroitement aux huguenots. Elle présenta à l'armée son fils et le jeune prince de Condé, obtint de nombreux succès militaires, grâce à La Noue, Mont-gommery et René de Rohan; rentra en possession de son royaume, réorganisa l'administration, les écoles, le collège d'Orthez; fit traduire en basque et imprimer 1571 le N. T., le catéchisme et la liturgie de Genève, créa un conseil ecclés., et pourvut à ce qu'il y eût touj. à Or-thez des prof, distingués et « 50 escoliers en théologie. » Après la paix de Saint-Germain, elle consentit, mais bien à contre-cœur, au mariage de son fils avec Marguerite de Valois, sœur du roi. Le pape s'y opposant, Catherine leva les difficultés en fabriquant une fausse dispense, et Jeanne partit de Blois le 8 mai pour se rendre à Paris où les noces devaient être célébrées le l«r juin. Mais à peine arrivée à l'hôtel de l'ancien év. de Chartres, Guillart, devenu protestant, elle se sentit, le mercredi soir 4 juin, saisie d'une fièvre ardente, et + le lundi 9 juin 1572 après de cruelles souffrances admirablement supportées. Tout porte à croire qu'elle fut empoisonnée, et l'on ajoute que ce .fut au moyen de gants et de collets parfumés qu'elle avait achetés chez le florentin René, que le peuple appelait l'empoisonneur de la reine. Jeanne n'avait que 44 ans. Son corps, après l'autopsie fut d'abord déposé à Vendôme, puis, selon son désir, transporté à Lescure et inhumé auprès de ses parents.
JERÉMIE II né 1536, élu patr. de Constantinople après la démission de Métrophane 1572, puis renversé 1579 par son prédécesseur qui revint sur sa démission. Réélu après la mort de celui-ci, 1580, il fut calomnié auprès du sultan et relégué dans l'Ile de Rhodes 1584. Le sultan nomma successivement à sa place Pacôme et Théolipte. A son retour Jérémie s'arrangea à prix d'argent avec ses deux concurrents, et comme le patrimoine de l'Égl. était totalement épuisé, il entreprit en 1589 un voyage en Moldavie et en Russie pour se procurer des ressources. A la demande du grand-duc Boris Go-dunow il remit au métropolitain de Kiew le patriarcat de l'Égl. grecque en Russie et consomma ainsi de fait la séparation des deux Églises. On sait que les théol. de Tubingue, Crusius, André*, etc., essayèrent d'entrer en correspondance avec l'Égl. grecque, et lui envoyèrent des traductions de la Conf. d'Augsbourg et du Com-pendium dogmatique de Heerbrand. Jérémie fit bon accueil à leur délégué Gerlach, 1574, mais ces démarches n'eurent pas de suites, f 1594.
JÉRÔME 1® Sophronius-Eusèbe, père de l'Égl., canonisé. Sa biographie se résume en 3 mots: longue vie, grands travaux, petites passions. Né 331 à Stridon, près d'Aquilée, Pannonie, il étudia à Rome les lettres et la philos., voyagea pour s'instruire; visita les Gaules: Trêves où il fut converti; Aquilée, où il se mit à l'hébreu; Antioche, où il entendit Apollinaire et où il fut ordonné prêtre. A cette époque, dit-il, les prêtres laissant là les évangiles et les prophètes, lisaient des comédies. Lui-même fl aimait beaucoup les auteurs païens. A la suite d'un rêve mémorable il jura de renoncer à toute lecture profane. Rufin lui reprocha plus tard de s'être parjuré, mais il faut prendre l'esprit du serinent. D'Antioche il vint à Constantinople, sous Grég. de Naziance, puis à Rome où Damase le fit son secrétaire, 382, et où il acquit une grande influence dans la noblesse, en même temps qu'il se fit nombre d'ennemis par son ascétisme. Il fut l'apologiste convaincu du monachisme. Après la mort de Damase son protecteur, il retourna en Orient avec deux saintes femmes, Paula et sa fille Eustochie. Il se fixa à Bethléhem, d'abord dans une grotte que l'on montre encore, et y composa plusieurs de ses ouvrages. C'est là en particulier qu'il fit cette importante revision de la Bible, de l'ancienne Itala qui par ses soins est devenue la Vulgate, pour laquelle il s'aida des hexaples d'Origènes, de sa connaissance des langues originales et de mss. qu'il avait lus ou copiés. On l'accusa de falsifications parce qu'il avait rétabli le texte original. Il traduisit ensuite la Bible d'après l'hébreu; on cria au blasphème de ce qu'il prétendait mieux comprendre la Bible que les Septante et même que les apôtres. Il s'était formé à Jérusalem une société de savants; Jean de Jérusalem, Rufin, Jérôme en faisaient partie, tous trois origénistes. Quelques occidentaux voyant les écrits d'Origène aussi répandus en parlèrent comme d'une chose fâcheuse. Jérôme, très jaloux de sa réputation d'orthodoxie, se joignit à eux, ainsi qu'à Épiphanes qui condamna ces écrits, en 394. L'amitié d'enfance de Jérôme et de Rufin fut donc brisée. Il y eut réconciliation en 396, mais Rufin ayant traduit à Rome le livre des Principes d'Origène, le plus attaqué, et lui ayant donné pour préface les anciennes louanges de Jérôme, celui-ci, blessé du procédé, rompit entièrement. Il se brouillèrent et écrivirent l'un contre l'autre, dans un style et avec une passion qui ne font pas honneur au caractère de Jérôme. Anastase, plus tard év. de Rome, blâma Rufin. Ses dernières années furent troublées par ces luttes personnelles, et aussi par des incursions de barbares, qui brûlèrent les couvents des environs de Bethléhem et contraignirent Jér. à chercher son salut dans la fuite. Il y revint cependant, et f
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420, âgé de près de 90 ans. Il a émis peu d'idées neuves, mais il a exercé une bonne et durable influence sur l'Égl. par sa science, son travail et sa piété. Sans parler même de sa Vulgate qui, du 5"»« au 16me siècle, a été la lumière brillant au milieu des ténèbres, il a servi l'Église par ses Comment, sur l'A. et le N. T., et il a posé les bases de l'archéologie et de la patristique. Dans ses autres écrits il défend la virginité de Marie, le jeûne, le culte des martyrs et celui des reliques, ce qui l'a fait juger un peu sévèrement par Luther. Ses œuvres ont été publ. par Érasme, Bâle 1516-1520; par Martia-nay, Paris 1693-1706; Vallarsi et Maffei, 1734-1740. — Quant aux ordres qui se rattachent à saint Jérôme, v. Hiéronymites.
2° Jérôme de Prague, né à Prague vers 1360 ou 1370, d'une famille distinguée dont le nom était Faulfisch. Il étudia à Prague, Heidelberg, Cologne, Paris et Oxford; il rapporta de cette dernière ville les idées et quelques livres de Wiclef. Bachelier et maître en théol. il fut appelé 1410 pour l'organisation de l'univ. deCra-covie; il passa ensuite en Hongrie pour un but semblable, et n'échappa qu'à grand'peine aux persécutions du clergé. De retour à Prague il s'attacha à Huss, qu'il aida dans ses travaux, en accentuant encore davantage son opposition aux erreurs de Rome. Quand Huss eut été fait prisonnier, et malgré ses lettres qui l'exhortaient à n'en rien faire, Jérôme partit pour Constance, obtint du concile un sauf-conduit conditionnel (avril 1415), et fut conduit enchaîné chez les franciscains. Gerson, qui l'avait connu à Paris, le traita durement. Un docteur de Heidelberg lui reprocha d'avoir cherché à expliquer la Trinité par l'image de l'eau, de la neige et de la glace. Crnellement lié dans une tour, sans pouvoir lever la tête; nourri de pain et d'eau, dangereusement malade, ébranlé par le supplice de son maître et ami, il se laissa entraîner le 19 juill. à signer une rétractation, mais il regretta aussitôt cet acte de faiblesse et le désavoua publiquement. Son procès fut donc repris, et après un semblant de jugement, après 340 jours de prison, il fut condamné au feu et subit le martyre avec le courage d'un héros chrétien, 30 mai 1416. Il a laissé quelques lettres qui ont été publ. avec celles de Huss.
JÉRUSALEM lo II est admis que Jacques et Siméon, frères du Seigneur, furent les premiers év. de Jérusalem. Leurs successeurs sont peu connus, la ville sainte ayant d'ailleurs bientôt perdu elle-même toute influence ecclésiastique, depuis que la primitive Égl. eut émigré à Pella. Marc fut le premier év. de l'Aelia restaurée, mais l'importance politique de Césarée en lit longtemps la métropole religieuse. C'est à Nicée seulement que l'on donna le titre honorifique de patriarche à l'év. de Jérus. en raison du rôle historique de son église, et c'est le couc. de Chalcédoine 451 qui érigea réellement ce siège épiscopal en patriarchat, ainsi que celui d'Antioche, mais il n'exerça jamais une influence bien marquée. Il prit part aux essais d'union tentés à Florence 1438, mais, comme Alexandrie et Antioche, il s'en retira en 1443r et se montra dès lors toujours, notamment an conc. de 1672, hostile à tout rapprochement avec FOccident. Ses patriarches ont longtemps* résidé à Constantinople; c'est depuis 1845 seulement qu'ils sont revenus à Jérusalem. Pendant les croisades il y eut là un patriarchat latin, 1099-1187, qui, après avoir vainement tente d'être indépendant, dut se soumettre au jou^r de Rome. Une fois la ville prise par Saladin el l'Église dispersée et détruite, les fonctions cessèrent, mais le titre resta quelque temps encore; en 1316 on trouve à Paris comme légat du pape un Pierre, patr. de Jérusalem.
2° Conciles de Jérusalem. Outre celui de Act. 15., et celui de 1672 qui repoussa les ouvertures libérales de Cyrille Lucar, il faut mentionner, quoique n'ayant pas exercé une grande influence, les conc. de 335 et 349 dans les luttes ariennes; celui de 415 contre les pélagiens; celui de 536 contre les sévériens; 634 contre les dyothélètes, et 730 contre les iconoclastes.
3° Les Amis de Jérusalem sont une secte wurtembergeoise, qui a pour principal chef, ou évêque, Hoffmann, q. v. Ils attendent à Jafla et au pied du Carmel le retour du Seigneur, el s'occupent d'ici là à défricher des terres, à les cultiver et à réaliser au milieu des populations musulmanes l'idéal d'une vie, d'une famille et d'une société chrétiennes.
4<> L'évêché protestant de Jérusalem est dû a l'initiative du roi de Prusse Fréd.-Guillaunie IV. qui, en 1841 (2 juin) chargea son conseiller in -time, Bunsen, de s'entendre avec le gouverne -ment anglais pour voir comment il serait possible que les pays protestants de l'Europe et les diverses égl. protestantes fussent officiellement représentées et protégées en Orient. Les négo -dations eurent lieu entre Bunsen d'une part, t-t de l'autre William Howley, archev.de Cantorbéry et l'év. Bloomfield de Londres. Elles furent conduites avec une grande largeur de cœur et d'esprit, et aboutirent à la création d'un èvè-ché, dont le titulaire, sur la proposition des prélats anglais eux-mêmes, serait nommé alternativement par les couronnes de Prusse et d'Angleterre. Le bill présenté à la Chambre des Lords le 30 août, reçut la sanction royale le 5 oct. La dotation de l'évêché fut fixée a 30,000 livres sterling (revenu annuel 1200 L.>; le roi de Prusse en fournit la moitié sur les fonds dont il dispose; l'Angleterre fournit l'autre moitié par une collecte faite en octobre dans toutes les églises. Le premier év., désigné par la reine, fut un juif converti, le Dr Micha'él-Salomon Alexandre, originaire de Posen, sujet prussien, maître à rétablissement de Palestine-Place, et prof, d'hébreu à King's College. Il prêta serinent d'obéissance à la reine et à l'ar-chev. le dim. 7 nov., et s'embarqua le 6 déc. 1841 sur le vapeur la Dévastation, mis à sa disposition par le gouvernement. Il était accompagné de: sa femme, 6 enfants, le Rev. Williams, le Rev. Éwald, originaire de Bamberg, et sa famille; enfin le docteur M. Gowan et son aide. Ils arrivèrent le 21 janvier, et furent bien reçus des autorités turques, ainsi que des év. grecs et arméniens. Le diocèse était immense, comprenant la Syrie, la Chaldée, l'Égypte et l'Abyssinie: mais la paroisse était bien petite, 40 auditeurs, 25 communiants. L'organisation de l'évêché était telle que, sans sacrifier leur individualité religieuse, toutes les autres églises, et en particulier les chrétiens de toutes dénominations pouvaient se joindre à elle, vivre dans sa communion et travailler avec elle. La célébration du culte en allemand par des pasteurs allemands se faisait avec la liturgie allemande et les cantiques allemands. Les candidats allemands étaient consacrés par Tévêque: les catéchumènes, confirmés par lui, sans que cela entraînât leur adhésion au système épisco-pal.On a pu dire que c'était là une chose entièrement nouvelle dans les annales du protestantisme, et si quelques-uns s'en effarouchèrent, d'autres, en plus grand nombre, s'en réjouirent (VerHuell, Gasparin, A. de Mestral, etc.). L'év. Alexandre étant f 1845, le roi de Prusse à qui appartenait la nomination du 2m* èvêque, nomma Samuel Gobât q. v. Le fut le Dr Barclay; depuis sa f 1882, le siège est resté vacant, à la suite de tiraillements survenus. Le nombre des protestants a beaucoup augmenté; il s'élève à plus de mille, sans compter les annexes de Bethléem, Sichem. Nazareth, etc. Il y a aussi plusieurs établissements d'éducation ou de charité, orphelinats, hôpitaux, écoles, bazars, qui relèvent de la mission et font honorer le protestantisme.
5° Jean-Fréd.-Guill. Jérusalem, né à Osna-briick 22 nov. 1709, étudia à Leipzig et à Leyde la philos, et la théol., fut quelque temps pasteur à La Haye, pois précepteur à Gottingue, enfin en 1742 prédicateur de la cour de Brunswick et précepteur du jeune duc. De nombreux bénéfices le récompensèrent de ses peines, et il en fit un bon usage. 11 donna le plan du Collège carolinien et fonda dans son abbaye de Riddags-hausen un séminaire, f 1780. Il a écrit des Lettres sur; la religion de Moïse, des Consid. sur les vérités de la religion» et des sermons, très estimés. La mort de son fils, qui se tua à Wetzlar 1773 dans un accès de mélancolie, a fourni plusieurs circonstances au Werther de Goethe, dont il est le type.
JÉSUATES, ordre religieux laïque, institué à Sienne 1363 par les nobles Jean Colombino et François Mino, pour prendre soin des pauvres et des malades et leur distribuer des remèdes qu'ils fabriquaient eux-mêmes. Urbain VI les autorisa 1367, en leur imposant la règle, un peu modifiée, de saint Benoit, et en les obligeant à résider. L'ordre ne s'étendit guère au delà de l'Italie, et quoique depuis 1606 il se recrutât aussi parmi les prêtres, il déclina rapidement et 'fut supprimé 1668. Son nom lui venait de ce que ses fondateurs invoquaient l'exemple et le nom de Jésus.
JÉSUITES, ordre fondé en 1534 par Ignace de Loyola, et approuvé 1540 par Paul III. Il porte aussi le nom de Compagnie ou Société de Jésus. S'il eut dès l'abord plusieurs objets en vue, les circonstances l'amenèrent presque aussitôt après sa fondation à entrer en lice avec la Réforme, et il se jeta dans la mêlée avec une hardiesse qui ne reculait devant rien et avec un succès qui dépassa même ses espérances. Mais il alla plus loin encore, et il exerça sur sa propre Église une influence telle que les destinées de l'une et de l'autre ne tardèrent pas à s'unir presque indissolublement. Ils avaient débuté modestement à Venise, 1537, en soignant des malades et en prêchant; quelques-uns entrèrent dans les ordres et, sous la direction de Loyola, devinrent prédicateurs itinérants. En 1538, i\ l'instigation de Cnraffa, le fondateur des théa-tins, ils vinrent à Rome, où Paul III les reconnut 1540, mais en fixant leur nombre à 60, limitation qui fut supprimée en 1543. Ignace en fut le premier général, et il développa rapidement la constitution et l'activité de l'ordre, à l'intérieur et au dehors. Les statuts sont calculés pour faire de chacun l'instrument absolument passif de ses supérieurs. Non seulement Ignace a fait de l'obéissance aveugle l'objet d'un vœu spécial, mais encore il travaille à l'inculquer, i\ la faire devenir une habitude, une seconde nature, au moyen d'exercices destinés à assouplir, à dompter ou à briser la volonté. Ces exercices sont une combinaison de méditations relig. graduées, de macérations et de pénitences ascétiques, dont le résultat final exalte l'imagination et ne lui laisse plus entrevoir que le triomphe de l'Église et la gloire de l'ordre. Un noviciat de 2 ans est d'abord imposé à celui qui veut devenir jésuite; après cela il passe élève, ou écolier, et il entre dans un collège où, pendant 6 à 8 ans, on le dresse à une étude méthodique de la philos, et de la théologie, et ce n'est qu'après une nouvelle année d'épreuves qu'il reçoit la consécration et qu'il devient définitivement membre de l'ordre, profès et coadjuteur spirituel. On donne le nom de coadjuteurs temporels à des frères laïques, désignés et choisis pour les travaux manuels et pour des occupations moins relevées. Au-dessus de tous règne le général, nommé à vie, dont le pouvoir n'est limité que par les constitutions et qui ne peut être déposé que par l'assemblée ou congrégation générale. Il a auprès de lui 5 assistants, qui forment son conseil, et un admoniteur, chargé de le surveiller. Puis viennent, dans chaque pays, des provinciaux, chargés chacun d'une province; les supérieurs des maisons de profès. les recteurs des collèges, et les supérieurs et professeurs des résidences. Tous sont élus pour 3 ans. La théorie de l'obéissance passive, empêchant le développement de la conscience individuelle, a été, avec le pélagianisme qui est à la base de tout le système, la grande inspiratrice de la morale jésuitique, dont le nom seul est déjà synonyme d'hypocrisie, de mensonge et de corruption. Aucun membre de l'ordre n'ayant le droit de rien publier sans l'autorisation de ses supérieurs, l'ordre entier est responsable pour les écrits de tous ses membres, et l'on a vu le curieux spectacle d'une approbation donnée en même temps et par les mêmes hommes à des enseignements et à des maximes morales contradictoires: les uns sévères, à l'usage des personnes qui prennent la religion au sérieux; les autres, et c'est le plus grand nombre, d'une indulgence effrayante pour tous les vices, pour tous les crimes commis ou à commettre. Le pro-babilisme, entrevu déjà par Porée 1415, mais repoussé par le conc. de Constance, est le droit de faire taire sa conscience et d'en appeler à des autorités, puis de choisir entre deux autorités, toutes deux respectables, celle que l'on préfère, même celle que, en conscience, on regarde comme la moins sûre. Il y a des nuances à observer; ainsi l'on distinguera: l'aequi-probabi-lisme, c.-à-d. le cas où les deux opinions sont également probables; le probabiliorisme, qui recommande davantage l'opinion la plus probable; le tutiorisme, qui regarde comme plus sûre la décision qui a le plus de chances d'écarter le danger du péché. La morale des jésuites se caractérise encore par la direction de l'intention; on peut voler, calomnier, tuer, pourvu qu'en le faisant on éloigne l'intention coupable, et qu'on s'en tienne à l'intention permise, p. ex. au désir d'être riche pour pouvoir faire du bien, au désir de sauver son honneur et peut-être sa vie. Enfin les réservations mentales, autre système ingénieux inventé par les jésuites, consistent dans le droit d'affirmer une chose fausse, même par serment, pourvu que dans son for intérieur on en pense une autre qui infirme ou modifie celle que l'on paraît affirmer. Pascal, dans ses Provinciales, a flagellé ces turpitudes, mais comme elles sont très commodes, elles ont toujours flatté les masses et pris le dessus de manière à devenir une menace pour les sociétés, et dans tous tes temps les gouvernements ont compris que ce n'était pas avec de simples discours qu'on pouvait espérer de vaincre cette influence malfaisante et qu'en luttant contre elle au nom seulement de la liberté et de la vérité, on se résignerait à n'être que des dupes et des victimes. Quand Ignace mourut, l'ordre comptait déjà 13 provinces, quoique l'Allemagne et la France lui fussent encore à peu près fermés. François Xavier avait commencé sa mission dans les Indes. Mais déjà la méfiance était éveillée. Certaines maximes politiques des jésuites, leur intervention indiscrète dans les affaires des États, leur main entrevue dans plusieurs complots, leur esprit de corps, leur ambition dévorante, leur habileté dans l'art de se procurer de l'argent, leurs agissements, leurs succès même dont ils faisaient un trop grand étalage, tout concourut à soulever contre eux l'opinion, et la république de Venise fut la première à les bannir de son territoire 1606. Mais Henri IV venait de leur accorder une existence légale, pour s'assurer l'appui de l'Espagne et de Rome; on sait comment il en fut récompensé. La guerre de Trente ans leur livra la Bohême et la Silésie. Bientôt ils gagnèrent la Belgique et la Pologne, et y écrasèrent le protestantisme par la violence. La Suède seule leur ferma résolument ses portes 1593. Élisabeth les avait bannis d'Angleterre, ainsi que tous les ordres religieux 1585. Quelques années de triomphe sous Marie Stuart ne servirent qu'à les envelopper d'une manière plus éclatante dans la chute du trône. S'ils ne répugnaient pas aux moyens violents, ils savaient aussi mettre en usage des procédés plus intellectuels, et leurs écoles, leurs collèges, habilement dirigés par des hommes souvent supérieurs, leur assurèrent une clientèle et une influence considérables; des familles protestantes même, et des familles princières, leur confièrent leurs enfants, et s'aperçurent trop tard que si on leur apprenait bien le latin et la discipline, on faussait à la fois leur conscience et leur jugement. Bientôt ils se crurent les maîtres et la prospérité les perdit. Des hommes puissants et ambitieux, comme un Claude Aquaviva, ne se contentèrent plus d'être au service du pape; ils rêvèrent de faire des papes leurs instruments et de se les soumettre. Leurs immenses richesses, leurs factoreries, leurs comptoirs, leurs couvents faisaient d'eux une puissance véritable, en même temps qu'ils favorisaient dans leur sein le luxe et la mollesse. Longtemps ils n'eurent d'adversaires sérieux que les dominicains, et le public ne vit là qu'une querelle de sectes rivales. Mais quand ils s'en prirent à la doctrine, à la mémoire et aux disciples de Jansé-nius, ils rencontrèrent devant eux des hommes de science et de foi qui les démasquèrent et les perdirent dans l'opinion. Les Provinciales leur portèrent un coup fatal et décisif, dont ils ne se sont jamais relevés moralement. De leur côté (es capucins et les franciscains, jaloux de leurs succès dans les missions lointaines, dénoncèrent leur méthode d'accommodation et les supercheries dont ils usaient pour faciliter la conversion des païens au christianisme. Mais ce qui acheva de les perdre, ce fut leur conduite politique. En 1750 ils refusèrent de reconnaître l'autorité du Portugal dans le Paraguay, et le marquis de Pombal obtint de Benoît XIV un décret qui ordonnait la réforme de l'ordre, et lorsqu'en 1759 ils furent compromis dans une tentative d'assassinat contre Joseph I<", ils furent embarqués en masse, conduits à Rome, bannis du pays et leurs biens confisqués. La banqueroute frauduleuse du p. La Valette, préfet apostolique de la Martinique, et les débats qui eurent lieu à cette occasion au parlement, firent supprimer l'ordre en France en 1764. En Espagne ils furent compromis dans une conspiration contre le ministre Aranda, arrêtés et expédiés à Rome avec défense, sous peine de mort, de rentrer dans le royaume. De même à Naples, en Sicile et ailleurs. En vain les gouvernements demandèrent au général, le p. Ricci, quelques changements dans les constitutions de l'ordre; Ricci répondit fièrement: Sint ut sunt, aut non sint. Clément XIII essaya de les défendre dans sa bulle Apostolicum 1765, mais à sa mort Clément XIV fut élu, et il publia le 19 août 1773 sa bulle Dominus ac redemptor noster, qui supprimait les jésuites et fermait leurs collèges. Tous les États catholiques s'empressèrent de publier cette bulle. La schismatique Russie seule offrit un asile aux jésuites, qui purent élire un nouveau générai en 1801, et l'hérétique Frédéric II laissa subsister leurs collèges en Silésie. La réaction qui suivit la révolution de 1789 et qui fut encouragée par l'affaiblissement de l'empire, permit à Pie VII de rétablir les jésuites le 7 août 1814 par sa bulle Sollkitudo omnium, et la Restauration crut trouver en eux des aides pour ramener le calme au milieu des populations ébranlées par tant de guerres et tant de principes nouveaux. Ils rentrèrent donc en France sous le nom de Pères de la foi et commencèrent modestement, comme auxiliaires des évêques et éducateurs de la jeunesse; mais leurs progrès furent si rapides et ils se multiplièrent tellement, que le comte de Montlosier se fit l'organe du mécontentement général; plusieurs ordonnances royales diminuèrent leur sphère d'action, leurs collèges furent fermés 1828, et la révolution de juillet les bannit de nouveau. En 1848 ils revinrent, et l'empire les combla de faveurs en feignant de les ignorer. Ils finirent par dominer le clergé lui-même et prirent une position si aggressive que le gouvernement fut amené à prendre contre leur enseignement des mesures répressives, 1879. La Belgique de même. La Suisse les avait expulsés déjà en 1847 après la guerre du Sonderbund. L'Italie, qui leur fut longtemps favorable, comprit sous Victor-Em-manuel le danger qu'il y avait à les laisser s'emparer de toutes les positions. En Portugal et en Espagne ils arrivèrent avec Don Miguel et Ferdinand VII et repartirent avec eux. Le pape seul leur resta fidèle, si bien enlacé par eux qu'il ne peut rien faire sans leur consentement. Paul III leur avait donné une église qui prit d'eux le nom d'il Gesu; Pie VII et Léon XII appelèrent à Rome leur général, après la mort de Brzozowski, 1820, qui n'avait pas été autorisé à quitter la Russie, et leur confièrent le Collège romain en 1824 et la Propagande en 1826. Lors de sa suppression par Benoît XIV, l'ordre comptait 22,589 membres; il en compte auj. 7,956, soit 3,389 prêtres, 1837 novices et 2730 affiliés, ces chiffres, le dernier surtout, ne pouvant jamais être fixés bien exactement, beaucoup de prêtres et de hïques appartenant à l'ordre en secret, mais non ostensiblement. Nous n'avons rien dit de leur enseignement au point de vue des mœurs; la question est trop délicate; on sait seulement que plusieurs de leurs manuels ont dû être supprimés par les gouvernements, et que celui du p. Gury en particulier renferme des questions et des réponses qui ne peuvent pas être reproduites, même en latin. Les jésuites ont produit outre leurs célèbres casuistes, Mariana, Sanchez, Escobar; des missionnaires zélés, comme Xavier; des pédagogues habiles; des savants, comme Bolland, Sirmond, Porée; des prédicateurs éloquents, comme Bourdaloue.Mais, chose curieuse, ils n'ont jamais réussi dans leurs entreprises politiques, et c'est lorsque leur influence semblait le mieux assise que leurs projets échouaient contre le réveil des souverains ou contre le bon sens des peuples. — V. leur Histoire, par Crétineau-Joly, Paris 1846; par Wolf, Zurich 1789; Spittler, 1817; Huber, trad. par Marchand; Lutteroth, Guettée, Michelet et Quinet, Schulte, Spuller, etc.
JÉSUITESSES. Deux ordres de ce nom. lo l'ufl, fondé par Isabelle de Rosella, de Barcelone. Elle obtint de Paul V un décret qui lui permit de se placer, elle et quelques dames respectables, sous le patronage d'Ignace et d'agir sous sa direction. Mais Ignace réussit à s'en débarrasser et obtint à son tour la bulle Licet de-bitum 1549, qui garantissait^ son ordre qu'il ne serait jamais incommodé par l'accession de religieuses. — 2o Deux Anglaises, Warda et Tuittia, fondèrent en 4534 un ordre de religieuses, ii l'instar de celui de Loyola, faisant vœu de chasteté et d'obéissance, mais sans clôture et préchant dans les églises. Urbain VIII les supprima 1631.
JÉSUS-CHRIST 1° (Ordres de), v. Christ, Eudistes, Porte-Glaives, Frères. 2° Enfant-Jésus (Congrégation des filles de 1'), fondée 1673 à Rome par Anna Moroni de Lucques, pour renseignement gratuit des jeunes filles pauvres. Robe brune avec capuchon blanc.
JETZER, Jean, garçon tailleur de Zurzach, frère laïque chez les dominicains de Berne. Intelligence bornée, que ses chefs eurent l'idée d'exploiter dans leurs luttes avec les franciscains sur la conception de la Vierge 1507. Ils lui apparurent déguisés tantôt en vierge Marie, tantôt en saints, et lui révélèrent que Marie avait été conçue avec le péché originel. Mais quand ils lui imprimèrent les saints stigmates, pour prouver au peuple la réalité de ses visions, il expliqua le mystère à l'autorité, et cette circonstance ajouta au discrédit que les ordres religieux avaient déjà mérité, et favorisa pour sa part le mouvement vers la Réforme.
JEUDI-SAINT, le jeudi de la semaine sainte, dans lequel on admet généralement que le Sauveur célébra la Cène avec ses disciples. Les Allemands l'appellent le Jeudi vert (Grtiner Donnerstag), soit à cause des herbes que l'on mangeait à Pâques, soit à cause du chapitre qu'on lisait en ce jour, Ps. 23, 2., qui parle de frais pâturages.
JEUNE, lo chez les Hébreux, v. Dict. de la Bible. — 2o Chez les musulmans, v. Ramadan. — 3o Chez les chrétiens. Comme expression naturelle de la douleur et de la repentance, le Jeûne a conservé dans l'Égl. son ancienne signification, mais sous l'influence du montanisme et du monachisme, l'idée première s'est altérée, et l'on en est venu à y voir un moyen d'obtenir de Dieu le pardon des péchés. L'Égl. romaine ra peu à peu compris dans ce sens et en a fait une règle dans des cas déterminés. Elle distingue le Jeûne naturel, la privation absolue de toute nourriture avant le sacrement, et pour le prêtre avant la célébration de la messe; et le Jeûne ecclésiastique, ou abstinence relative dans la quantité et la nature des aliments. Il est parfait, quand il exclut certains aliments et ne permet qu'un repas par jour; il est particulier, un demi-jeûne, quand il ne permet qu'un repas avec viande par jour et une collation du soir. Le jeûne parfait est commandé depuis le mercredi des cendres jusqu'au vendredi saint, et aux vigiles des grandes fêtes, comme préparation aux solennités qui s'approchent. Des dispenses peuvent être accordées par l'autorité compétente, évêque ou supérieur, pour des cas d'impossibilité matérielle, de maladie, d'indigence. Elles sont souvent promulguées d'une manière générale, sous certaines réserves, financières ou autres, et le relâchement en est venu au point que, mêm* en carême, le jeûne est réduit aux modestes proportions de la simple abstinence. L'Égl. grecque a également conservé l'obligation du jeûne, mais avec des prescriptions un peu différentes; elle l'observe, et rigoureusement, les mercredis et les vendredis toute l'année; puis 40 jours avant Pâques, 40 avant Nolsl, 15 avant l'Assomption, et 25 après Pentecôte en souvenir du jeûne des apôtres Act. 13, 3. L'Égl. luthérienne n'a aucune prescription sur ce sujet. L'Égl. réformée a quelquefois décrété des jeûnes à l'occasion de grandes calamités, telles que la Saint-Barthélémy, et ces jeûnes se sont reproduits d'année en année et sont devenus une tradition. Des prédications extraordinaires accompagnent souvent les jeûnes officiels et sont presque toujours confiées à des prédicateurs d'élite. Les év. catholiques ont l'habitude d'annoncer chaque année le jeûne dans un mandement spécial, et de faire connaître à cette occasion les adoucissements apportés à la règle du jeûne et les conditions auxquelles on peut se les procurer.
JEWELL, John, év. d > Salisbury. Né 28 mai 1522 à Buden, Devonshire, il fit de 1535-1544 d'excellentes études à Oxford et fut amené à la Réforme par la lecture des écrits de Luther, puis par les leçons de Pierre Martyr 1549. Il visita Francfort, Strasbourg et Zurich, et rentra en Angleterre au moment oti Élisabeth rétablissait les institutions ecclésiastiques d'Édouard. Il fut nommé év. de Salisbury en 1560. Ses scrupules à l'endroit des chanoines et du rituel se dissipa peu à peu. Son attachement à la Réforme tenait à la conviction qu'il avait qu'elle était un simple retour à l'Égl. primitive, "dont l'Égl. cathol. n'était qu'une déformation non justifiée. Il a exposé ce point de vue dans ses écrits contre Cole et Harding et dans sa célèbre Apologie de l'Égl. anglicane, f 21 sept. 1571.
JOACHIM lo D'après le protévangile de Jacques, le mari d'Anne, le père de la vierge Marie, aurait porté ce nom. Aux deux époux, longtemps sans enfant, un ange aurait annoncé la naissance de leur fille. Jules II a fixé sa fête au 10 mars; Pie V la supprima, Grégoire XV la rétablit.
2o Abbé de Flora, Calabre. Né 1130 à Célico, près Cosenza, il renonça à la vie mondaine de la cour de Roger de Sicile, fit un voyage en Terre sainte, se fit ensuite moine et devint prieur et abbé du couvent cistercien de Cambuc-cino. Désireux de suivre ses études, il demanda d'être déchargé de ses fonctions, et se retira dans les solitudes de Flora. Là de nombreux disciples se groupèrent autour de lui, et formèrent sous sa direction la congrég. des Floraciens qui, outre le couvent de Flora ou Floris dont il fut le premier abbé, fonda encore quelques autres monastères. Les statuts de l'ordre furent approuvés par Célestin III, H96. Après deux siècles de prospérité, l'ordre déclina entre les mains d'abbés mondains et tomba tout à fait en 1470; la plupart de ses couvents reprirent la régie de Citeaux. Joachim + 1202, et la légende dit que des miracles se firent sur son tombeau. C'était un homme de mœurs pures et d'un grand esprit. Il passait pour avoir eu des révélations et exerça une grande influence sur le développement moral et littér. de son siècle. Dans son exposition des prophète* et des psaumes, il annonce des temps nouveaux où le sacerdoce des prêtres indignes cessera et sera remplacé par une sacrificature spirituelle. Quelquefois il prophétise lui-même sans prétendre expliquer les prophéties de la Bible. Il distingue dans l'hist. de l'Égl. 3 époques: 1° Selon la chair depuis la création jusqu'à Christ. 2° Entre la chair et l'esprit; depuis Christ jusqu'au moment présent. 3° Selon l'esprit; depuis lui jusqu'à la fin du monde, qui, selon lui, ne devait pas être éloignée. Sa doctrine, que ses disciples désignèrent sous le nom d'Évangile éternel. fut acceptée avec enthousiasme par les franciscains rigides et par les fraticelles. Un franciscain nommé Gerhardt publia 1254 une Introd. à l'Évangile éternel, qui fut poursuivie comme hérétique, et condamnée à Rome et à Paris. Le conc. de Lalran 1215 avait aussi condamné la doctrine de Joachim sur la Trinité comme hérétique, mais une bulle d'Honorius III le réhabilita et ses ouvrages continuent d'être considérés comme orthodoxes. Parmi ses écrits imprimés, on remarque: Liber Concordiœ N. et V. Test. Venise 1519. Expositio Apoealypsis. Comment. in Jeremiam, 1525. in Jesaiam 1517.
3° Joachim I®»1, électeur de Brandebourg 1499-1535, reconnaissait les désordres de l'Église, mais il voulait une réforme par l'Église. Il se montra toujours l'ennemi résolu de Luther, et le rendit responsable même de la guerre des paysans. Il fonda l'univ. de Francfort pour combattre celle de Wittenberg. A Worms et à Augsbourg il fut des plus ardents adversaires de la Réformation, et la violence de ses discours mécontenta jusqu'à l'emp. et aux princes catholiques. Sa femme, ayant communié sous les deux espèces en 1528, ne put se soustraire que par la fuite à ses mauvais traitements. Sur son lit de inort il recommanda à ses fils de protéger la vieille Église.
4° Joachim II, fils du précédent, régna 1535-1571. 11 connaissait Luther depuis 1519, et sous l'influence de sa mère il avait adopté les idées évangéliques. Il introduisit la Réforme dans ses États, avec mesure et sans violence. La Cène y fut célébrée pour la première fois sous les deux espèces en 1539. La même année fut élaborée la Constit. ecclés., qui parut en 1542.
JOCH, Jean-Georges, docteur en théol.; né 1685 à Rotenbourg, il étudia à Iéna, où il professa quelque temps, et fut nommé 1709 surintendant et conseiller du gymnase à Dortmund. Accusé de piétisme, il eut beaucoup à souffrir de la part de ses collègues. Plus tard il fut appelé comme doyen à Erfurt, et en 1726 comme prof, à Wittenberg où sa thèse: Die Heilsame Verzweiflung, souleva contre lui de nouvelles attaques.
JON (DU), v. Junius.
JONAS lo év. d'Orléans 821. Il écrivit à la demande de Louis le-Déb. un traité sur le Culte des images, contre Claude de Turin qui s'en faisait le défenseur. On a encore de lui 3 livres sur l'Institution laïque, où il combat les œuvres extérieures, et un travail sur l'Institution royale, sous forme d'une Lettre à Pépin d'Aquitaine, contenant d'excellents préceptes de gouvernement, livre qui, sous l'influence de Jonas, fut inséré dans les actes du Conc. de Paris 829. f 844.
2° Jonas, le Juste (Jodocus), né à Nordhau-sen 5 juin 1493, étudia à Erfurt, et après avoir pris ses grades de Dr utriusque juru, il passa à l'étude de la théologie. Il s'unit intimement à Luther, l'accompagna à Worms, et fut son collaborateur le plus zélé à Wittenberg comme doyen et comme prof, de théol.; il prit part à la traduction de la Bible et à la rédaction du catéchisme, donna son avis sur les ordonnances ecclésiastiques et se rendit avec Luther à Marbourg. Surtout il traduisit les écrits de Luther et concourut par là à leur diffusion. Appelé en 1541 à Halle comme surintendant, il en fut chassé par la guerre de Smalcalde, fut nommé en 1551 prédicateur de la cour à Cobourg, et enfin 1553 surintendant à Eisfeld, où il f 1555. — Son fils, portant les mêmes noms, fut compromis dans les affaires de Grumbach et exécuté à Copenhague en 1557.
3° Louis Jonas, D' théol., un des disciples les plus distingués de Schleier mâcher. Né 11 févr. 1797 à Neustadt sur l'Oder, il entra en 1812 au collège de Joachimsthal, prit part comme cadet à la guerre contre Napoléon, devint pasteur de Schwerinsbourg, épousa la fille du comte de Schwerin, et fut en 1834 nommé pasteur à Berlin où il ne tarda pas à occuper une position considérable. Il publia les mss. laissés par Schleiermacher; ses Discours et dissertations, sa Dialectique, sa Morale et ses Lettres. Il fonda en 1840 avec quelques amis la Revue mensuelle de l'Égl. unie, organe des tendances ecclés. libérales en Prusse, qui fut remplacée plus tard par la Kirchenzeitung protestante. Ses talents oratoires, non moins que son caractère élevé lui ont fait une réputation méritée, f 19 sept. 1859.
JONATHAN -ben-Uziel, un des auteurs du Thargum. Ce savant rabbin vivait au 1er 0u au 2®* siècle de l'ère chrétienne. Les Talmudistes le font vivre 5 siècles avant Christ, et lui attribuent la trad. des Prophètes en chaldéen, ou araméen.
JORIS, Jean-David, surnommé VErzketzer, ou archi-hérétique. Né en Flandre 1501 ou 1502, il eut une jeunesse agitée; son éducation fat irrégulière. Il s'adonna d'abord à la peinture sur verre, se maria en 1524 et s'établit à Delft. Il poussa jusqu'au fanatisme son zèle pour la réforme, insulta en 1528 une procession, et fut pour ce fait fouetté et banni. Il se joignit aux anabaptistes et jouit d'une grande influence parmi eux. En 1536 il devint chef de secte, se vanta de visions et de révélations, se distingua par son fanatisme, son orgueil et sa lubricité; dans de nombreux écrits il se donna à ses disciples comme l'Emmanuel annoncé par les prophètes, et prêcha un anabaptisme mystique antitrinitaire, rejetant le mariage et justifiant les plus honteux désordres de la chair. Une persécution terrible éclata enfin contre les jo-ristes en Hollande, en Frise et dans le Hols-tein. Lui-même réussit touj. à se soustraire aux recherches, ne cessant de correspondre avec les autorités évangéliques, Lasko, Luther, le landgrave de Hesse, mais repoussé même de ceux qui se rapprochaient le plus de ses idées, tels que Menno. De 1528 à 1544 il mena une vie des plus misérables. Enfin, ayant reçu des secours de ses sectateurs, il se fixa à Bâle sous le nom de Jean de Brugge 1544, s'y maria avec une personne d'une famille considérable et, inconnu même de ses disciples, il entretint une correspondance active avec plusieurs d'entre eux, ainsi qu'avec d'autres exaltés, comme Schwenk-feld et Castellion. Le secret ne fut découvert qu'après sa f 1556, par la trahison d'un serviteur, et par l'aveu de son gendre Blesdyk, dont il s'était séparé depuis longtemps. Son corps, qui avait eu les honneurs d'une sépulture dans l'église de Saint-Léonard fut exhumé et brûlé 1559. Il a laissé 250 écrits et plus de 1000 Lettres. Son principal ouvrage est le Wunderbuch, paru de 1540-1544.
JORNANDÈS, historien goth du 6™ siècle, secrétaire, ou notaire du roi des Alains. se convertit au christianisme, se retira dans un couvent, et devint abbé ou év. de Ravenne. Il travailla avec zèle et succès à la conversion des Goths. f 555. On a de lui deux ouvrages qui sont plutôt des compilations, et dont la valeur historique peut être contestée: l'un c'est une Hist. des Goths, publ. Paris 1558 par Guill. Fournier; tr. en fr. par Maupertuisl703 et par Savagner 1842. L'autre est une Hist. du monde depuis son origine, publ. par Rhenanus, Bâle 1531. Sa tendance est anti-arienne; en politique il cherche à concilier les Goths et les Romains.
JOSEPH H, né 13 mars 1741, fils de François I, de Lorraine, et de Marie-Thérèse, élevé dans les principes de la philos, française. Il fut élu roi des Romains en 1764, et emp. d'Allemagne en 1765 à la mort de son père, mais ne gouverna réellement qu'après la mort de sa mère, 1780. Il prit alors résolument les rênes en mains, et suffisamment instruit par les expériences qu'il avait faites à la cour de Marie-Thérèse, il entreprit les réformes qui lui parurent nécessaires pour brider la hiérarchie et assurer le développement intellectuel et religieux de son peuple. Il fit du gouvernement de l'Égl. un ministère de l'État, introduisit Ieplacet, défendit les appels à Rome, supprima 700 couvents, dont les revenus furent affectés à l'instruction publique; plaça les ordres religieux sous la surveillance des évêques, et créa, en remplacement des séminaires épiscopaux, des séminaires généraux destinés à former des ecclésiastiques, mais entretenus et dirigés par l'État. Le 30 juin 1781 parut l'Édit de tolérance qui garantissait aux protestants comme aux juifs, sous quelques réserves, la pleine liberté de conscience et la jouissance de tous leurs droits civils; l'usage des cloches leur était interdit. Les brefs lancés par le pape contre ces me sures furent inflexiblement repoussés, et lorsque Pie VI se rendit en personne à Vienne 1782, il fut reçu poliment, mais ne put rien obtenir. Cependant quelques-unes de ces réformes ayant touché aux privilèges de la noblesse, d'autres à l'indépendance des provinces, des soulèvements eurent lieu parmi le peuple, notamment en Hongrie et en Belgique, avec l'appui du clergé, et Joseph se vit contraint de retirer, d'abord en Hongrie, puis dans les Pays-Bas, en Tyrol, en Bohême, ses mesures réformatrices, à l'exception de l'Acte de tolérance. Il fit la guerre aux Turcs, de concert avec Catherine de Russie, mais vil ses États envahis par le grand-visir Youssouf-pacha; heureusement le feld-maréchal Laudon reprit l'avantage et força même Belgrade à capituler. La ré vol. française, si menaçante pour sa sœur Marie-Antoinette lui causa une profonde tristesse, f 1790. C'est en 1867 seulement que l'emp. d'Autriche a repris les traditions de vrai libéralisme que Joseph lui avait léguées, et qui ont reçu de lui le nom de joséphisme, ou josé-phinisme; elles se résument dans l'instruction largement répandue parmi le peuple et dans la surveillance des agissements du clergé par l'État, sans intervention dans les affaires religieuses proprement dites.
JOSEPH, François Leclerc du Tremblay, né 1577 à Paris, servit d'abord dans l'armée, puis se fit capucin 1599. Il fit plusieurs missions en province et parvint aux premiers emplois de son ordre. Richelieu le remarqua, lui confia quelques missions délicates dans lesquelles il réussit, et finit par se l'attacher comme son unique confident. Il l'emmena à La Rochelle, le fit entrer au Conseil d'État, lui confia les missions les plus épineuses, et voulut, m$is en vain, le faire nommer cardinal, ce qui n'empêcha pas le peuple de donner au P. Joseph le surnom d'Émi-nence grise. Richelieu le soigna à ses derniers moments, et lorsqu'il f 1638, il s'écria: J'ai perdu mon bras droit.
JOSÈPHE Flavius, historien juif. Né l'an 37 de l'ère chrét., il appartenait à la race sacerdotale par son père Mathias, à la famille des Ma-chabées par sa mère. D'abord pharisien, puis sadducéen, esséen et l'hôte du solitaire Banus, il finit par revenir au parti des pharisiens. Un voyage à Rome lui procura la faveur de l'impér. Poppée. Lors de la dernière guerre des juifs, il fut nommé général pour la Galilée et chargé d'en défendre les forteresses et les montagnes. II prétendit, en dépit des zélotes et de Jean de Gis-cala, tout gagner en gagnant du temps, et dès qu'il eut été vaincu, à Jotapat qui avait résisté à 45 jours de siège, il se rendit aux Romains, alléguant une révélation divine, et Vespasien le combla de faveurs. Il lui fit épouser une fille de Césarée, prisonnière comme lui, mais qui ne tarda pas à l'abandonner. Josèphe épousa ensuite une fille d'Alexandrie, puis une juive de Crète, qui fut la meilleure de ses femmes. Il avait annoncé à Vespasien son élévation à l'empire et s'était ainsi acquis son amitié; il l'accompagna à Rome et s'éteignit en bonne vieillesse vers 103, longtemps après que les défenseurs de son pays furent morts sous la hache ou sur la paille des prisons. Josèphe est une ingrate figure, toute faite d'égoïsme et de dissimulation; il n'aima que lui-même et les Romains, et ii trahit son pays, quoiqu'il n'ait jamais renié ni sa foi, ni sa nationalité. Ses idées religieuses manquent de profondeur et laissent percer un rationalisme sans base ni conviction. Ses ouvrages n2en sont pas moins une source précieuse pour l'hist. et l'archéologie juives. Ses Antiquités judaïques et son Hist. de la Guerre des Juifs, écrites dans un but apologétique et pour donner aux Romains une idée favorable de sa nation, sont des documents importants, et lui ont mérité de la part de saint Jérôme le surnom de Tite-Live de la Grèce. Sa Vie écrite par lui-même, a moins de valeur et n'est en quelque sorte que son apologie personnelle. Ses deux livres Contre Apion, ennemi des juifs, sont une espèce de traité de controverse. Quelques auteurs lui attribuent enfin le 4m« Livre des Ma-chabées et l'Éloge des sept Machabées martyrs. Édition de Haverkamp. Trad. franç. par Arnaud d'Andilly, Amsterdam 1681, et par Glaire, Paris 1846. On regarde généralement comme interpolé le célèbre passage sur Christ. Antiq. XVIII, 3. 3.
JOSÉPHITES, congrégation de prêtres, fondée 1641 par le chirurgien Jaq. Cretenet de Lyon, président d'une société de bienfaisance. Ils s'interdisaient les missions et se consacraient surtout à l'enseignement. On donne aussi ce nom en France aux fr. de Saint-Joseph, qui se proposent le même objet. Plusieurs congrégations de femmes se sont également aussi fondées en France sous ce vocable: lo à Bordeaux 1638 par Marie Delpech de l'Étang, pour l'éducation d'orphelines; 2o au Puy 1650 par le jésuite Médaille, pour le soin des malades; 3° à Clugny 1819, par la mère Javouhey, pour le soin des malades et l'enseignement (travaillent surtout dans la Guinée supérieure); 4° à Lyon 1821, par Ch&tillon, pour la visite des prisonnières; 5o à Albi 1833, par la m. Vialar, pour les malades et l'enseignement.
JOVIEN, Flavius Claudius, né en Pannonie, fut choisi par l'armée comme empereur après la mort de Julien. Il dut conclure la paix avec Sa-por, roi des Perses, et subit des conditions désastreuses, pour sauver les débris d'une armée compromise par son prédécesseur. Ami des chrétiens, il sut les protéger sans persécuter les païens; il accorda à tous la liberté de penser, ce dont le païen Themistius le loua, et s'il y eut quelques vexations, elles furent le fait d'autorités subalternes. Il mourut au bout de 8 mois, comme il allait se faire couronner à Constantinople.
JOVINIEN, Milanais, moine à Rome. Faisant consister toute la vie chrétienne dans une communion réelle avec Dieu, il rejetait comme superflues ou nuisibles les prescriptions de détail de l'Égl., sur les jeûnes, les pénitences, le céli-libat, blâmait la soif du martyre. Condamné par Siricius au conc. de Rome 390, il s'enfuit à Milan, mais là aussi fut excommunié et banni, f 412. Augustin, Ambroise et Jérôme ont écrit contre lui, non sans quelque passion.
JUBILÉS. Les païens avaient leurs Jeux séculaires, et dans tous les temps les hommes ont aimé à solenniser le retour de dates rappelant des événements importants, utiles à méditer. La loi de Moïse avait institué un jubilé après 7 semaines d'années, c.-à-d. tous les 50 ans, Lév. 25, 8-20, et notre siècle célèbre le centenaire de ses grands hommes. La chose est en elle-même si naturelle qu'elle ne peut être critiquée qu'au point de vue de l'abus qu'on en ferait, ou du caractère religieux qu'on voudrait lui imposer. Le nom de Jubilé vient de l'hébreu Jo-bel, son d'une trompette, parce que c'est au son de cet instrument qu'était annoncée, le soir du jour des expiations, l'approche de l'année jubilaire. L'Égl. cathol. a eu l'idée d'instituer aussi des fêtes de ce genre. Boniface VIII, le premier, a décrété 12 févr. 1300 que cette année-là il y aurait remise plénière des péchés à tous ceux qui visiteraient 15 fois l'égl. de Saint-Pierre et 15 fois celle de Saint-Paul à Rome. La fête devait avoir lieu tous les 100 ans. Clément VI décida qu'elle aurait lieu tous les 50 ans, Urbain VI tous les 33, Paul II tous les 25 ans. L'affluence des pèlerins et le bénéfice qu'en retirait le trésor papal contribuèrent à multiplier le nombre des jubilés. L'impossibilité pour un grand nombre de fidèles d'assister à ces solennités fit que le privilège des indulgences fut accordé à toutes les églises de la chrétienté, et dans des conditions semblables, l'année qui suit l'année jubilaire. Le dernier grand jubilé a eu lieu en 1850, mais il a été peu fréquenté. Les égl. protestantes célèbrent aussi le Jubilé de la Réforme, mais sans y attacher aucune idée de contrainte ou de vertu particulière.
JUDÆ, ou Jud, Léon, fils d'un prêtre; né 1482 à Rappoldsweil. Son vrai nom était Kel-ler. Il étudia à Schlettstadt sous Craton, à Bâle sous Wyttenbach; fut successivement diacre à Bâle, curé à Saint-Pilt, Alsace; remplaça son ami Zwingle à Einsiedeln 1518, et fut nommé pasteur à Zurich 1523. Il travailla, de concert avec Zwingle, à introduire dans cette ville la Héforme, à laquelle il avait été gagné par les écrits de Luther et d'Érasme, et se maria en 1523 avec une ancienne religieuse, + 1542, II a publié en lat. et en allem. un Catéchisme, et trad. quelques-uns des ouvrages de Luther et de Zwingle. Il a publ. aussi une trad. latine de la Bible (édition de Froschau 1524-1529) que son ami Bibliander a achevée.
JUDÉO-CHRÉTIENS, les chrétiens convertis d'entre les juifs, avec une tendance à conserver leurs anciennes habitudes et traditions relig., par opposition aux chrétiens convertis d'entre les gentils, ou pagano-chrétiens, que les premiers auraient d'abord voulu soumettre k leurs observances. Le livre des Actes a conservé le récit des luttes engagées à ce snjet.
JUDEX MATOLEUS, né 1528 à Dippolds-walde, district de Meissen, prédicateur à l'égl. d'Ulric, Magdebourg, et un des collaborateurs de Flacius aux Centuries.
JUDICA, nom ecclésiastiq. du dimanche qui précède les Rameaux, cf. Ps. 43, 1.
JUGEMENTS, v. Juridiction, et Visites. -Jugement de Dieu. Lorsque pour la constatation de certains délits la preuve venait à manquer, ou était insuffisante, les anciens ont eu longtemps coutume, non de faire profiter l'accusé du défaut de preuves, mais d'en appeler à l'intervention directe de Dieu. Les Hébreux connaissaient déjà le Jugement de Dieu, mais pour un seul cas, Nomb. 5, 12-31, et il était pour ainsi dire inoffensif, car il fallait un miracle pour punir. L'Église du moyen âge l'a généralisé et l'a rendu cruel, car il faut un miracle pour sauver. C'est ainsi qu'il y a eu le sort, le duel juridique, l'épreuve par le feu. par l'eau, etc. Quelquefois on faisait communier le prévenu dans l'idée que, s'il était coupable, la sainte hostie lui serait fatale. En cas de meurtre on mettait ceux qui étaient soupçonnés en contact avec le cadavre, dans la pensée que celui-ci ferait un mouvement ou une démonstration quelconque à l'approche de l'assassin.
JUIF ERRANT. Dans la légende occidentale, c'est un cordonnier de Jérusalem, nommé Ahasvérus, qui -refusa à Jésus portant sa croix, la permission de s'asseoir un instant devant sa boutique, et le chassa en l'injuriant et le frappant. Jésus le condamna alors à marcher toujours jusqu'au jugement dernier, sans pouvoir jamais ni s'arrêter, ni mourir. Dans la légende orientale, moins dure, c'est Cartaphile, le portier du palais de Pilate; il donna à Jésus un coup de poing, mais se convertit plus tard, fut baptisé par Ananias, et passa le reste de sa vie dans la pénitence, espérant que tôt ou tard il serait pardonné.
JUIFS. L'histoire des juifs depuis la ruine de Jérusalem est dans son ensemble une histoire de souffrances et de persécutions. Antérieurement déjà ils avaient su ce que c'est que l'exil, et ils avaient formé de nombreuses colonies: en Égypte, sous l'administration bienveillante des Ptolémée, avec des synagogues et un temple, et dans un contact facile avec la culture grecque; en Babylonie, en Mésopotamie, et de là à Antioche, puis dans les îles et sur les rivages de la Méditerranée; à Rome depuis les victoires de Pompée. Leurs rapports avec la métropole subsistèrent longtemps, d'abord avec Jérusalem, puis avec Jamnia et Tibériade, mais touj. plus ou moins influencés par la politique des pays o(i ils se trouvaient; les persécutions furent fréquentes à Alexandrie, Cyrène, Rome, et ne revêtirent que trop souvent le caractère de massacres. Cependant la législation romaine leur fut plutôt favorable, au point qu'ils purent acquérir la bourgeoisie et jouir de tous les droits de citoyens. Depuis la ruine de leur patrie, leur situation s'aggrava, bien qu'ils eussent perds toute signification politique. L'accroissement constant de leur population les rendait dangereux, en même temps que la barrière souvent hautaine que leurs mœurs et leur loi mettaient entre eux et les païens, les faisaient haïr ou mépriser. Les emp. chrétiens furent les premiers à restreindre systématiquement leurs droits et à les distinguer des autres peuples, puisqu'ils s'en distinguaient eux-mêmes. Les bons rapports qui s'établirent naturellement entre les juifs opprimés et les ariens, les iconoclastes, les Perses, les musulmans, les compromirent toujours davantage. Cependant ils conservaient leurs synagogues; c'est à Constantinople seulement qu'il leur fut assigné un quartier spécial, en dehors de la ville. L'empire d'occident leur fut plus favorable, et les papes eux-mêmes n'entreprirent rien contre leur culte. C'est des Gaules que partit le premier signal d'intolérance; plusieurs conciles intervinrent contre eux dès 465, jusqu'à ce que Dagobert 629 ne leur laissa plus que l'alternative de se faire baptiser ou de quitter le royaume. Charlemagne et Louis-le-Déb. furent plus politiques et plus humains; ils comprirent que l'élément juif avait sa valeur au point de vue de la richesse, de la culture et dn développement national, mais peu à peu leurs successeurs en vinrent à exploiter à leur propre profit la protection qu'ils accordaient à ces hommes actifs et industrieux, et ils les pressurèrent d'impôts et de contributions forcées. Sans les persécuter ou les molester, on les humilia et on leur imposa un costume, on leur interdit la propriété foncière, on les exclut de certaines charges, fonctions, ou professions; on les parqua dans des quartiers déterminés. Ils n'en trouvaient pas moins le moyen d* devenir riches, et ils excitaient la convoitise. Philippe-Auguste 1182 et ses successeurs les dépouillèrent sous divers prétextes; ils furent bannis, puis rappelés. Charles V 1361 les soumit à un impôt personnel et leur donna un gardien et juge chargé de les protéger, mais aussi de les faire payer. Louis XIV, malgré son zèle convertisseur, les laissa tranquilles dans ces conditions, et Louis XVI supprima l'impôt personnel 'fui pesiit encore sur eux, 1784. La révolution française enfin les émancipa complètement, et dès lors ils sont restés dans le droit commun. Napoléon 1807 leur donna un consistoire par 2000 âmes, avec un consistoire central à Paris. L'Angleterre suivit à peu près la même ligne de conduite. Édouard-le-Confesseur les avait déclarés 1041 propriété de la couronne, les protégeant et les pressurant. Richard-C«mr-de Lion, Jean-sans-Terre, Henri III, Édouard 1er 1275 tirent de même, mais ce dernier eut recours aux | moyens les plus odieux pour se procurer de l'argent, et finit par les chasser du pays 1290. Il j leur fallut attendre le régime de Cromwell pour | obtenir l'autorisation tacite de rentrer en Angleterre. En 1723 le parlement leur accorda le droit de posséder des terres. Ce n'est qu'en 1858 que par une modification de la formule du serment, ils ont été rendus aptes à occuper des fonctions publiques et même à entrer au parlement. En Allemagne, où la tradition les fait arriver presque aussitôt après la ruine de Jérusalem, ils furent, moyennant finance, protégés par les princes, et leur position fut assez tolé-rable jusqu'à l'époque des croisades, mais alors le fanatisme s'en mêla, et il y eut contre eux de nombreux mouvements populaires. Les empereurs ne furent pas toujours assez forts pour les protéger, et un grand nombre émigrèrent en Pologne et en Silésie. Après la Réformation plusieurs juifs considérables jouirent de la faveur des princes, mais dans le peuple la haine et le mépris l'emportèrent longtemps, et comme ces parias n'avaient d'autre métier que la banque et continuaient de s'enrichir, une malveillance jalouse ne cessa de les poursuivre. Le grand électeur eut l'esprit d'accueillir les juifs chassés de l'Autriche, et reconnaissant chez eux une grande intelligence industrielle et commerciale, les rois de Prusse leur accordèrent des franchises et des privilèges. On fut également obligé de rendre hommage à leurs talents et à la supériorité artistique et littéraire de plusieurs d'entre eux, et les préjugés diminuèrent et se dissipèrent en partie. Le parlement de Francfort 1848 a établi leurs droits en théorie, mais le Wurtemberg seul les a sans réserve fait passer dans la pratique. En attendant, ils sont les maîtres par l'argent et par la presse. En Russie leur sort varia souvent; Pierre-le-Grand les toléra, Élisabeth les bannit 1745; Alexandre leur accorda la liberté d'industrie 1805 et 1809, Nicolas restreignit leurs droits. En Pologne, réfugiés depuis plus de mille ans, rarement persécutés, mais toujours tracassés, humiliés, méprisés, ils sont usuriers, cabaretiers, aubergistes, débitants; les seigneurs les écrasent d'exactions, mais leur permettent de se dédommager au double sur leurs tenanciers; le gouvernement s'occupe d'améliorer leur position. En Italie leur sort dépendit des conciles, pui* des papes dont l'attitude varia suivant leur caractère, leurs idées et leurs intérêts, jusqu'à ce que l'Inquisition se chargea d'établir la règle uniforme de la persécution; à Rome ils furent confinés dans le Ghetto. Les villes de commerce leur étaient plus favorables. L'occupation française améliora un moment leur situation. La révolution de 1848 enfin les affranchit entièrement. Très nombreux en Espagne, ils jouirent longtemps de leurs droits civils et de la liberté de conscience, mais depuis la conversion de Reccared, les décrets des conseils prirent force de loi, et à plusieurs reprises depuis 589 ils durent opter entre le baptême et l'exil. Les Maures furent meilleurs pour eux, et la conquête musulmane fut une époque de gloire et de prospérité à tous égards pour les juifs, non seulement parce qu'ils furent assimilés politiquement à tous les autres citoyens et purent revêtir les charges publiques les plus considérables, mais encore parce que la civilisation arabe développa chez eux l'amour des arts et des sciences, et leur permit de fonder ces écoles célèbres de Cordoue, de Grenade, de Lucena, qui brillèrent d'un si vif éclat et qui firent faire de grands progrès à l'étude, non seulement du talmud et de la loi, mais encore des mathématiques, de l'astronomie et de la médecine, et qui ont fourni les savants juifs les plus éminents du moyen âge. Le 14^e siècle mit fin à cet état de choses, et la monarchie chrétienne s'étant mise sous la dépendance de l'inquisition, les juifs et les maures de la Cas-tille furent exposés à d'horribles persécutions qui ne tendaient à rien moins qu'à leur entier anéantissement. A la suite de la conquête de Grenade, plus de 300,000 émigrèrent, sans parler de ceux qui furent brûlés, 2000 dans une seule année. Le Portugal suivit à peu près les exemples de l'Espagne. Dans l'emp. d'Orient les lois de Justinien, qui privaient les juifs de leur état civil, restèrent longtemps en vigueur, et elles furent appliquées d'autant plus sévèrement que, servant dans les armées perses, ou prenant parti, tantôt pour les ariens, tantôt pour les iconoclastes, ils semblaient se montrer les ennemis de l'empire; toutefois ils n'eurent jamais à subir les exactions, ni les persécutions qu'ils ont souffertes en occident. On sait qu'après l'exil de Babylone ils se répandirent dans les montagnes de l'Arménie; de là ils poussèrent à l'est jusqu'en Chine, au Japon, aux Indes. Par la destruction de Jérusalem ils étaient devenus indépendants de leur métropole naturelle; ils n'acceptèrent pas l'autorité de Tibé-riade et fondèrent à Babylone une école qui eut son talmud et son rabbinisme et qui finit par exercer une influence prépondérante sur tous les juifs, jusqu'au schisme des caraïtes, q. v. Dispersés auj. parmi des populations en majorité musulmanes, ils ne jouissent pas de tous leurs droits, ils sont tenus en suspicion, mais moins cependant que les chrétiens: souvent même les autorités leur montrent une certaine bienveillance personnelle. V. Depping, Les juifs dans le moyen âge.
Les missions parmi les juifs ont pris au 19me siècle un élan nouveau et ont obtenu certains succès. Le nombre des missionnaires est de plus de trois cents, en Europe, en Asie et en Afrique, et l'on compte par milliers le nombre des juifs convertis. Les écoles juives fondées en divers lieux sont des pépinières d'où sont sortis des agents bien qualifiés; lies préjugés se dissipent, et les jeunes juifs apprennent à connaître leurs livres saints et à comprendre les prophéties, dont plusieurs semblent annoncer leur rétablissement national, et leur retour, peut-être prochain, dans leur patrie.
JULES 1er lo pape 337-352, né à Rome, dé fendit Athanase contre les ariens; envoya des légats au conc. de Sardique 347. Il fit construira beaucoup d'églises.
2o Jules II, 1503-1513. Julien de la Rovère, neveu de Sixte IV, né à AUbizalla, près Savone, succéda à Pie III qu'il avait fait élire. Homme abominable, mais dans un autre genre qu'Alexandre VI; colère et féroce, disent deux adulateurs de la papauté, il n'avait d'un pontife que le nom et l'habit. Il ne rêve que l'extension du pouvoir de l'Église par ses intrigues et ses machinations. Il reprit la Romagne sur le duc Borgia, et fit la guerre aux Vénitieijs qui avaient enlevé au saint siège plusieurs villes du nord de l'Italie. Il forme avec Louis XII, Ferdinand roi d'Espagne et l'emp. Maximilien, la ligue de Cambrai contre les Vénitiens 1508, et réduit Venise à se soumettre aux conditions les plus désavantageuses. Plus tard, n'ayant plus besoin d? Louis XII il l'excommunie et lui suscite des ennemis. Le roi de France envoie contre lui une armée qui le bat à Bologne et à Ravenne 1511. et convoque à Pise un concile, qui le suspend de ses fonctions 1512. Jules II convoque de son côté un autre concile à Saint-Jean-de-Latran (95 évêques), qui annule les actes du conc. de Pise, met la France en interdit, délie les sujets de Louis XH de leur serment de fidélité et soulève Henri VIII contre la France. Au Latran le général des augustins dit qu'il importe peu de connaître l'étendue du territoire de l'Église, mais plutôt le nombre de saintà qui s'y trouvent. Jules H se fit haïr en Italie par ses guerres continuelles. Il employait beaucoup de Suisses dans ses armées, et s'écria un jour: O saint Suisse, priez pour nous ! D'après l'abbé Fleury, c'est sous son règne que le cardinal dominicain Ca-jetan aurait entrevu le dogme de l'infaillibilité. Le comte de Maistre, et c'est beaucoup dire, trouve que ce pape fut trop guerrier. Il avait commandé son mausolée à Michel-Ange, et favorisa les arts et la Renaissance.
3o Jules UI, 1550-1555. Jean-Marie Giocchi del Monte, élu après deux ou trois mois de division entre les partis français, impérial et italien. Le card. Pôle avait été d'abord désigné, mais l'opposition étant trop violente, on dut y renoncer. Le premier acte d'autorité de Jules III fut de donner le chapeau de cardinal k celui de ses domestiques qui soignait son singe favori, jeune garçon pour qui on l'accuse d'avoir eu un amour peu innocent. Il se brouille avec le roi de France, rouvre le conc. de Trente, interrompu par la mort de Paul III, mais le fait traîner en longueur pour pouvoir faire la guerre à Octave-Farnèse, duc de Plaisance, petit-fils du feu pape; il nomme un jour 14 cardinaux pour raffermir sa majorité douteuse. Il avait en général de l'aversion pour tout ce qui était concile, colloque ou conférence.
hp Jules-l'Africain, v. Julius.
5o Jules Echter de Mespelbrunn, prince-évê-que de Wtlrzbourg, fils d'un conseiller grand-ducal, étudia dans les principales univ. d'Allemagne, de Belgique, de France .et d'Italie, devint docteur en droit, puis chanoine en 1569, doyen du chapitre en 1570, et enfin en 1573 à la mort du prince-évêque, son successeur. Il s'occupa avec zèle de réorganiser son diocèse au point de vue temporel et spirituel, mais fut dur envers les protestants et chassa leurs pasteurs. Il fonda un hôpital et restaura l'université, dont une partie porte encore son nom, et qu'il livra aux jésuites. Il fut Pâme de la ligue de 1609, à la téte de laquelle se plaça son ami Maximilien de Bavière, f 1617.
60 Duc de Brunswick, né 1529; le plus jeune fils du duc Henri; primitivement destiné à l'état ecclésiastique, il succéda à son père, introduisit la Réforme dans son pays, adopta les ordonnances de Chemnitz et Andre'â, et fonda l'univ. de Helmstedt 1576.
7o Jules de Pflug, v. Pflng.
JULIA MAMMÆA, mère de l'emp. Alex. Sévère, 193-235, femme hautaine et ambitieuse; elle soigna l'éducation de son fils, le sauva des roups d'Héliogabale, son cousin, et contribua à lui assurer l'empire. Elle avait reçu à Antioche les enseignements d'Origène, se montra pieuse et bien disposée pour les chrétiens, mais ne fit jamais profession de christianisme. Elle périt dans le même soulèvement militaire que son fils.
JULIANA lo martyre, née en Nicomédie, fut décapitée parce qu'elle ne voulut pas épouser le préteur Éleusius, à moins qu'il ne se fit chrétien. Plusieurs villes disent posséder ses reliques. — 2o religieuse de Liège, qui eut en 1261 une révélation à la suite de laquelle fat instituée la fête du Saint-Sacrement.
JULIANISTES, v. Julien 5o.
JULIE, plusieurs saintes et martyres de ce nom. La plus connue, née à Carthage, fut emmenée esclave en Syrie, puis en Corse, où elle t pour la foi vers 439.
JULIEN lo Flavius Claudius Julianus, né à Constantinople 331, était fils de Jules Constance et neveu de Constantin. Nommé gouverneur des Gaules avec le titre de césar 355, il fixa son séjour à Lutèce. La jalousie de Constance son cousin l'avait longtemps éloigné de la cour; il avait été élevé dans une ferme de Cappadoce et avait été consacré lecteur, comme son fr. Gal-lus. Mais la lecture de la Bible l'ennuyait, tandis qu'il savourait avec délices Homère avec Nicoclès, et il se fit initier aux mystères d'Éleu-sis. Emmené par Constance en Nicomédie, il y trouva des rhéteurs païens, Themistius, Liba-nius, et autres, qu'il mit bien au-dessus des deux Apollinaire. Il avait promis de ne pas les aller entendre, mais il se procura leurs pauvres, mais brillants discours, se décida à entrer en rapports avec eux, visita les philosophes, vit à Éphèse le magicien Maximus faire des miracles et finit par renier Christ, ce qui le fit surnommer l'Apostat. Lorsqu'il partit pour les Gaules, il était fiancé à la sœur de l'empereur. Il fit plusieurs expéditions contre les Germains et les battit 357 à Argentoratum. En 361 il fut proclamé empereur par ses troupes révoltées; il assista la même année au culte chrétien à Vienne en Dauphiné, et peu après il rendit publiques son abjuration et ses doctrines. Le grand Un a émis les astres, qui sont des dieux; mais comme ces dieux sont encore trop loin, on les adore sur la terre dans leurs statues. Le peuple n'y comprenait rien. Il fit destituer les prêtres chrétiens, rappela les év. exilés pour cause de doctrine, afin de ranimer des controverses et de ruiner l'Égl. par des divisions; il fit construire des temples païens aux frais des chrétiens, dont Libanius dut plaider la cause. Favorable aux juifs, il voulut par bravade réédifier leur temple, mais des flammes, dit-on, sortirent de ses fondements. Plutôt bon de caractère, juste, modéré, chaste dans ses mœurs, il savait que les persécutions raniment le zèle, et il recourait plutôt aux moyens détournés, pour combattre le christianisme* mais sans grand succès. Les ariens s'unirent aux orthodoxes dans la lutte contre le paganisme. Athanase fut de nouveau banni. Julien recourait à toutes les ruses; il entourait ses statues de celles des dieux; il interdisait aux chrétiens l'usage des livres païens, « afin que n'ayant d'autre moyen de culture que la Bible, ils deviennent stupides. » Il permettait cependant aux jeunes gens de suivre les rhéteurs païens, et la foi de plusieurs, fut manifestée. II donnait de l'argent aux soldats, s'ils consentaient à jeter un grain d'encens dans l'encensoir, ce qu'il estimait être un acte de paganisme. Mais dans le peuple cela ne rèusssis-sait pas. Les chrétiens d'Alexandrie se révoltèrent; l'émeute fut naturellement réprimée; l'év. Georges fat mis à mort. A Antioche on se moqua des sacrifices de Julien; il avait fait ouvrir une source près de là, dans un bois de Daphné, et il voulut inaugurer un ancien temple, mais il ne parut qu'un seul prêtre et le temple dut être fermé. C'est à Antioche qu'il écrivit ses 3 livres contre le christianisme: une Satire des emp. romains, le Misopogon (ou Ënnemi de la barbe), et un Traité contre les chrétiens, qui fut réfuté par Cyrille d'Alexandrie. Il mourut dans une guerre contre les Perses, blessé mortelle-meut par un soldat chrétien, dit-on, et l'on ajoute qu'il s'écria en mourant: Tu l'emportes, Galiléen ! Sa mort l'empêcha de promulguer les édits qu'il projetait contre les chrétiens. — Œuvres publ. par Spanheim 1696. et par Tourlet, Paris 1821. Vie, par Ad. Naville, Genève 1877.
2<> apôtre et év. du Mans, issu d'une famille noble de Rome, + vers 286.
3° martyr, contemporain du précédent, f à Brivas (Brioude) chez les Arvennes, dans les persécutions de Dioclétien.
4° év. d'Eclanum, Apulie; homme intelligent et savant, très apprécié d'Augustin, ami de son père. D'abord adonné à l'enseignement, il devint ensuite évêque. Mais il était pélagien, et Pun des représentants les plus autorisés de cette doctrine. On possède quelques fragments de ses écrits dans la réfutation qu'en a faite Augustin. Après l'édit impérial de 409, qui bannissait les pélagiens, il se rendit en Orient, mais ne put gagner à ses vues, ni Théod. de Mopsueste, ni aucun évêque. On dit qu'il se rétracta plus tard, mais il ne put rentrer en possession de son évêché. f v. 439.
5° Julien, év. d'Halicarnasse, le chef de cette fraction des monophysites, qui a pris de lui le nom de julianistes, et qui est aussi connue sous le nom d'aphthartodocètes, q. v. Il enseignait que le corps de Christ, même avant sa résurrection, était déjà de nature divine et par conséquent incorruptible. Les plus stricts, appelés actistètes, soutenaient même que ce corps n'avait jamais été créé. Les sévériens étaient leurs adversaires. Lorsque les év. monophysites furent condamnés 519. Julien dut s'enfuir à Alexandrie.
6<> Julien Câsarini. né 1398 à Rome, prof, de droit à Padoue, protonotaire, auditeur de la rote et cardinal. Le pape l'envoya comme légat en Allemagne pour mener la croisade contre les hussites et le chargea de présider le conc. de Bâle. Il s'opposa avec succès, et malgré Eugène IV, Ji la translation du concile à Bologne, mais négocia inutilement avec les hussites. Plus tard il se joignit au parti du pape pour transférer le conc. à Ferrare. Envoyé en Hongrie auprès du roi Ladislas, il le poussa à rompre ses engagements envers Amurat II, et souleva ainsi une guerre dans laquelle l'armée chrétienne fut taillée en pièces à Varna 1444, et lui-même f peu après.
JULIERS. Clève$,Berg et Lamarck, provinces westphaliennes, auj. prussiennes, que Jean III de Clèves réussit à réunir en un seul duché 1521, jusqu'au moment où, son fils Guillaume étant mort sans enfants 1609, s'ouvrit la succession de Juliers. La Réformation s'y établit dans des conditions particulières, favorisée par les rivalités qui existaient entre le duc et l'archev. de Cologne. Jean III était ami d'Érasme, et il prit une position plutôt intermédiaire et modérée que franchement réformatrice; son fils Guillaume IV adhéra personnellement à la religion évangélique en 1541, mais il s'abstint de toute mesure officielle pour amener un changement dans le pays; il laissa faire sa noblesse, qui tenait pour le luthéranisme, et de nombreux réfugiés étant venus des Pays-Bas et d'Angleterre, les réformés finirent par l'emporter et firent triompher leurs vues aux synodes de Wesel 1568, d'Emden 1571, et définitivement au synode général de 1610. L'Égl. protestante s'était donc constituée au milieu d'une population en majorité catholique, avec la protection, mais sans l'intervention de l'État. Celui-ci n»» commença que vers 1770 à s'ingérer un peu dans les affaires de l'Église, et il se réserva la confirmation des pasteurs. Les luthériens et les réformés, généralement évangéliques, mais pa> stricts, vécurent longtemps en bonne harmonie: ils ne se tranchèrent en confessions rivales que lorsque le gouvernement prussien voulut les unir par contrainte, et l'opposition fut assez forte aux synodes de Duisbourg et d'Elberfeld. pour que cette tentative fût momentanément abandonnée.
JUMPERS, ou Sauteurs, secte quaker qui. s'appuyant de 2 Sam. 6, 16., accompagne dévotions de danses et de sauts destinés à provoquer une surexcitation extatique. Elle fut fondée vers 1760 par Harris Rowland et William Williams. Son siège principal est dans If pays de Galles.
JUNG Stilling, v. Stilling.
JUNILIUS; d'Afrique. Cassiodore le cite parmi les auteurs qu'il a consultés comme Introducteurs à l'Écriture sainte. Il a dédié en effet à un év. nommé Primasius un écrit intitulé: Dt partibus divinœ legis, qui est comme une introd aux livres de la Bible. Plusieurs traits semblent le rattacher aux églises d'Orient. II admet dan* le N. T. des antilégomènes. et regarde comm* non canoniques les Chroniques, Esdras, Néhe-mie, Job, Judith, Ester et les Machabées.
JUNIUS Francisons, plus connu sous le nom latin qu'il avait rendu célèbre par de nombreux ouvrages; il s'appelait en réalité François Du Jon, et appartenait à une famille noble du Berry. Né 1545 à Bourges, fils de Denis Du Jon. qui était lieutenant de la maréchaussée, il fut longtemps chétif et malingre, mais n'en fit pv moins de bonnes études. Devenu sceptique par la lecture de Cicérou {De nat. deorum), il fut converti par la lecture de l'Évang. de saint Jean et se consacra an ministère. Il étudia à Genève 1562-1565, et fut nommé pasteur à Anvers à 20 ans. Les circonstances étaient critiques; le peuple brisait les images, le roi d'Espagne menaçait d'établir l'Inquisition, la régente poursuivait les ministres. Du Jon tint bon, courageux et modéré, jusqu'à l'accord conclu avec tiuill. d'Orange. Il passa de là à Limbourg, que la persécution le força d'abandonner. L'électeur palatin Frédéric III l'appela comme pasteur à Schonau, et après qu'il eut été aumônier du prince d'Orange pendant toute la campagne 1568-1373, il l'emvoya à Heidelberg, pour collaborer avec Tremellius à la traduction de l'A. T. En 1578 Jean-Casimir le nomma prof, à Neustadt, puis à Heidelberg. En 1592 il accepta la place de prof, de théol. à Leyde, où il f de la peste, 13 oct. 1602. Plutôt savant que théologien, il était.très apprécié de Grotius et d'André Rivet. Il a laissé une cinquantaine d'écrits, Discours, Études, Commentaires, trad. de la Bible, etc., 2 vol. f°. Sa controverse était ferme, franche, mais chrétienne et charitable.
JURIDICTION, jugements, justice, etc. Toute société d'hommes a besoin d'une organisation et d'une autorité qui décide en cas de conflits, d'irrégularités, ou d'actes portant préjudice à l'association. L'Égl. chrétienne a dû avoir sa juridiction comme les autres, et déjà saint Paul marque la règle à suivre. Lorsqu'il survient des contestations entre frères, au lieu de faire trancher leurs différends par les tribunaux païens, ils doivent les porter devant les saints, c.-à-d. devant les membres de l'Église, même les affaires d'intérêt, 1 Cor. 6, 1-7. Plus tard les evêques attirèrent à eux les causes litigieuses, mais leur intervention ne fut d'abord qu'officieuse et facultative; peu à peu elle s'imposa, d'abord aux ecclésiastiques, puis aux laïques lorsqu'ils avaient à se plaindre d'un ecclésiastique; puis aux personnes dépendantes, misérables, mineurs, veuves, orphelins, etc. A mesure que s'accroissait la puissance de l'Église, l'autorité judiciaire de ses év. prenait plus d'extension, et ils revendiquèrent comme étant de leur domaine la connaissance de toutes les affaires, même civiles, qui pouvaient toucher par un bout aux intérêts religieux, tels que mariages, testaments, funérailles, héritages, serments, propriétés ecclés., etc. Contre cette usurpation de pouvoirs la réaction commença en France sous Philippe-le-Bel, et peu après en Allemagne; les droits de l'État furent rétablis, du moins en partie, et les év. n'eurent plus de compétence pour juger, quant aux personnes, que les ecclésiastiques de leur ressort, et qu^nt aux choses que les cas d'hérésie, d'apostasie, de schisme, de blasphème, de sorcellerie, d'adultère ou d'impureté, que l'État en général ne connaît ou ne punit pas. C'était encore beaucoup, d'autant plus que rien n'était réservé quant aux pénalités, et que l'autorité relig. pouvait édicter des peines qui n'avaient rien de religieux, non seulement l'excommunication, l'interdit, la suspension, mais encore des amendes, la prison et des châtiments corporels. L'évêque était l'autorité suprême dans son diocèse; il n'y avait d'appel qu'auprès du pape. Il pouvait cependant se faire remplacer dans ses fonctions de juge par un vicaire, dit l'official, ou par des délégués pour des affaires de peu d'importance. Comme les appels au pape présentaient souvent des difficultés, qui les rendaient presque illusoires, le conc. de Trente les a remplacés par un appel devant le métropolitain, ou son vicaire général. Les Kgl. protestantes n'ont jamais admis que leurs évêques, leurs synodes ou leurs consistoires eussent une autorité judiciaire dans les affaires de droit commun, ni une compétence pénale dans les questions religieuses: les seules peines qu'elles reconnaissent sont l'avertissement, la censure, la suspension, et la destitution avec ou sans pension de retraite. Quelques exemples isolés de pénalités proprement dites, n'ont été que des actes arbitraires et prouvent qu'il y a eu à l'origine des tâtonnements dans la fixation de la jurisprudence, mais aucune discipline ecclésiastique ne les a consacrés.
On appelle, en termes d'école, Jus circa sacra, les droits que l'autorité civile, quelle que soit sa forme, peut toujours revendiquer dans l'administration d'une société religieuse, quelle qu'en soit la nature. Ils sont difficiles à déterminer, et par leur caractère vague et général, ils prêtent d'une part à l'arbitraire, de l'autre à des réclamations plus ou moins fondées. En réalité ils se résument dans le droit de haute police qui permet à l'État de surveiller tout ce qui se passe sur son territoire, au point de vue de l'ordre intérieur et de la prospérité publique. On distingue ainsi le jus inspectionis, le droit d'inspecter, de constater les faits; le jus cavendi, le droit de s'opposer à tout ce qui pourrait être un empiétement sur les prérogatives de l'État; le recursus ab abusu, le recours comme d'abus, c.-à-d. l'annulation de mesures, discours, arrêtés ecclésiastiques préjudiciables soit pour le pays en général, soit même pour de simples particuliers qui pourraient se trouver lésés. C'est un blâme officiel, un désaveu par l'État, mais quifi'a qu'un effet moral et dont l'autorité ecclés. n'a pas l'habitude de beaucoup se préoccuper. Le placet, c.-à-d. le consentement, l'autorisation donnée par l'État, de publier certaines pièces, mandements, bulles, est également tombé en désuétude dans les pays cathol., et les gouvernements n'en usent qu'avec réserve et dans des circonstances exceptionnelles, pour ne pas voir trop souvent leur autorité méconnue. La plupart des pays protestants étant gouvernés directement par l'Etat, même au point de vue religieux, le jus tirca sacra s'applique à tout et comprend tout, la confirmation des pasteurs, les lois électorales, les élections des conseils et des consistoires, la convocation des synodes, la ratification de leurs décisions, etc. C'est une anomalie, qui tend k prendre fin, mais qui ne s'est maintenue que par les abus du principe contraire, l'Égl. ayant voulu empiéter sur les attributions de l'État; ce n'est cependant guère par là que l'Égl. protestante a péché. Parmi les jura circa sacra que les États d'Allemagne ont le plus revendiqués et pratiqués, le jus refortnandi, le droit d'introduire dans l'Église des réformes devenues nécessaires, est un de ceux qui ont été le moins contestés et dont les populations ont le plus approuvé l'usage.
Jugement de Dieu, v. Jugement.
JURIEU lo pasteur k Chirat en 1599. — 2<> Si-inéon Jurieu, pasteur à Ch&tillon-sur-Loing 1614, président du synode provincial de l'Orléanais, nommé 1618 principal du collège fondé par les enfants de Coligny, f 1632. — Son fils Daniel, né à Châtillon, pasteur à Mer, député 1644 au synode de Charenton; bon prédicateur, a publié quelques sermons et deux traités de controverse. Il avait épousé en premières noces uue fille de Pierre Du Moulin, dont il eut le célèbre
4o Pierre Jurieu, né à Mer 24 déc. 1637, f à Hotterdam 11 janv. 1713. Envoyé à Saumur, il suivit pendant 2 ans le cours de philos, de Drouet, et fut reçu maître ès arts 13 sept. 1656. De là il se rendit à Sedan, où il fit sa théologie et où il publia sa thèse De vitâ Dei. Il visita ensuite les univ. de Hollande et d'Angleterre, fut consacré dans ce dernier pays suivant le rite anglican, dut se soumettre à la reconsécration quand il revint en France, et fut appelé à Mer auprès de son père, qu'il remplaça comme pasteur. Malgré les sollicitations de l'égl. de Rotterdam, qui lui adressa vocation 1666, il resta fidèle à sa paroisse et sauf quelques mois pendant lesquels il (\it prêté à l'égl. de Vitry-le-Fran-çois, il ne put se décider à quitter Mer que lorsqu'il fat nommé prof, d'hébreu et de théol. à Sedan 1674, après 2 thèses soutenues sur la Kabbale et sur le Pouvoir des clefs, qui lui valurent aussi le titre de docteur. Peu de temps après, on le chargea des fonctions de pasteurfet malgré la faiblesse de sa santé, il accepta avec joie ce surcroît d'occupations, suppléant par son ardeur et son zèle à ce qui lui manquait sous le rapport de la force et de la vigueur. Il lit en 1677 un voyage à Paris pour conférer au sujet des opinions de Claude Pajon, et en 1679 une excursion aux eaux d'Aix-la-Chapelle, pour sa femme malade; mais il ne paraît pas s'être permis d'autres congés, et il consacrait tout son temps et ses forces à son enseignement et à sa paroisse, en même temps qu'il défendait la cause de la Réforme par de nombreux écrits d'édification ou de controverse, Il déclina en 1680 un double appel qui lui était adressé de Groningne, mais en 1681, l'académie ayant été supprimée le 9 juillet, et le clergé romain étant exaspéré contre lui, il dut prendre le chemin de l'exil, et il accepta l'appel qui lui vint de Rotterdam, comme professeur, et bientôt après aussi comme pasteur. Il y passa 32 ans, ne cessant d'honorer le nom français et de défendre ses coreligionnaires. Il se distingua surtout dans la controverse, quoiqu'on lui ait reproché et avec quelque raison, trop d'âpreté dans le style et des erreurs de fait dues à la trop grande rapidité de son travail. Il étudiait aussi avec passion les prophéties, et notamment l'Apocalypse qui, dans les tristes circonstances de l'Eglise, lui laissait entrevoir les lueurs d'une prochaine délivrance; il avait même annoncé, d'abord pour 1689, puis pour 1715, la ruine du papisme et la chute de l'Antéchrist. Ce phénomène d'esprits lucides cherchant des dates précises dans les mystères des oracles bibliques, se retrouvai toutes les époques de persécutions religieuses, et Jurieu était si peu isolé dans la manière dont il interprétait les textes, que ceux dont il flattait les espérances firent frapper une médaille en son honneur, avec ces mots: Jurius pro-pheta. Large et tolérant pour les luthériens, auxquels il fit des avances qui furent malheureusement repoussées, il se montra violent contre les catholiques, Bossuet et Maimbourg; contre les jansénistes, Arnauld et Nicole; contre les protestants, Basnage, Jaquelot, Bayle, Sau-rin, etc. Il faut dire que plusieurs de ses adversaires l'avaient provoqué par des violences également injustifiables, Maimbourg par ses grossières calomnies, Bayle par ses sarcasmes; mais Jurieu avait, pour ne pas les suivre dans cette voie, des motifs qu'eux n'avaient pas, son ministère à faire respecter et la vérité à honorer. Il n'en reste pas moins un des champions les plus vigoureux qu'ait eus le protestantisme, et il se montra jusqu'à la fin un défenseur vaillant de ses frères sous la croix, cherchant à intéresser à leur sort la Hollande, le Brandebourg, l'Allemagne et l'Angleterre. Il avait épousé sa cousine germaine, Hélène, fille de Cyrus Du Moulin, et mourut sans enfants. Il a laissé plus de 60 ouvrages; les plus importants sont: le Traité de la dévotion, 22 éditions successives, et en anglais 26; l'Apologie de la morale des Réformés; l'Hist. du calvinisme et celle du papisme mises en parallèle. 2 vol. 4°. Rotterdam 1683; Réflexions sur la cruelle persécution que souffre l'Égl. réf. en France; les Soupirs de la France esclave; Hist. critique des dogmes et des cultes bons et mauvais, qui ont été dans l'Égl. depuis Adam jusqu'à J.-C.; des Sermons, ses Lettres pastorales, etc. Homme de foi, malgré ses défauts, il a été jugé avec une rigueur exagérée par les sceptiques et les indifférents. Voltaire le voue à l'horreur publique, Buhle le traite de fanatique, et les fr. Haag eux-mêmes lui préfèrent de beaucoup Bayle son antagoniste; mais l'Égl. protestante aime à le regarder comme un de ses pasteurs les plus fidèles et les plus dévoués.
JUSTE-LIPSE, v. Lipse.
JUSTIFICATION. La doctrine des égl. évan-fîeliques, fondée sur l'enseignement de saint Paul, Rom. 3, 21. 5. 8. i Cor. 1,30. etc. admet que l'homme pécheur est rendu juste, déclaré juste, justifié, par le fait de sa foi au Sauveur, alors même qu'il n'est pas juste par ses œuvres. C'est une justice imputée; la justice de Jésus passe sur lui, comme ses propres péchés ont passé sur la tête du rédempteur, devenu péché pour nous. Cette doctrine, entrevue déjà dans l'A. T., Hab. 2, 4., enseignée par les pères, prêchée par les saints du moyen âge, puis étouffée par la scolastique et par la doctrine du salut par les œuvres, a été remise en lumière par Luther et est devenue le mot d'ordre de la Réformation. Loin d'exclure les œuvres, elle les provoque, mais n'en fait pas le moyen du salut.
JUSTIN 1° gnostique, de la secte des ophites, tfité par Hippolyte, mais d'ailleurs inconnu.
2° Justin Martyr, ou le Philosophe, né vers l'an 100, à Flavia Neapolis (auj. Naplonse), de parents grecs et païens. Il porte aussi quelquefois le nom de Flavius à cause de son lieu de naissance. Avide d'instruction il rechercha partout la vérité; il commença d'abord par les stoïciens. puis fut péripatéticien, pythagoricien, platonicien. La constance des martyrs, une conversation qu'il eut avec un vieillard, la lecture enfin, furent le moyen de sa conversion. Ce vieillard, dont d'ailleurs on ne sait rien, l'engagea à lire les prophètes, mais sans leur demander de preuves. Justin pouvait avoir 30 ans quand il se convertit. Il visita l'Europe, l'Asie et l'Afrique, prêchant sur son chemin, recommandant la lecture de la Bible, notamment celle des prophètes. C'est surtout à Rome qu'il s'illustra, recevant chez lui tous ceux qui désiraient s'instruire. Tatien fut un de ses disciples. En 138 ou 139 il présenta à Antonin sa grande Apologie, où il justifie les chrétiens du reproche d'athéisme, et proclame en plusieurs passages la doctrine de la Trinité et celle de l'Incarnation; il termine en exposant ce qu'est le culte des chrétiens. En 162 il adressa au sénat de Rome une seconde Apologie, plus résumée. Dans les deux il soutient que le christianisme est la pure et complète manifestation de la vérité, tandis que les systèmes humains n'en présentent que des fragments isolés et obscurs. Il admet cependant dans la jiature humaine un germe de la vérité, quelque chose de semblable au divin Logos, et qui a mis les philos, sur la voie, mais sans leur permettre d'arriver. Dans un 3m« ouvrage, le Dialogue avec Tryphon, il suppose, et peut-être le fait lui-même est-il vrai, que près de partir d'Éphèse, un juif nommé Tryphon l'aborde et entre avec lui en conversation. Les compagnons de Tryphon se moquent de Justin, qui raconte sa conversion, et Justin en profite pour exposer longuement la doctrine de la Trinité et ses vues sur le millénium. Il est probable que ce sont les disputes avec les juifs qui l'engagèrent à écrire cet ouvrage. On croit qu'il subit le martyre, mais les dates varient entre 161 et 168; le jour a été fixé au 13 avril, et par les grecs aji juin. D'autres livres lui sont encore attribués, mais à tort: l'Exhortation aux Grecs, où il combat l'insuffisance de la religion philos., et où l'on trouve des idées opposées au germe mentionné plus haut; le Discours aux Grecs, où sont exposés les défauts de la doctrine païenne; le livre de la Monarchie, ou de l'unité de Dieu: dans sa Lettre à Diognète le judaïsme et le paganisme sont mis sur le même rang; enfin un Traité de la résurrection, qui est bien de son temps. Justin est le plus ancien des pères de l'Église. OEuvr. publ. par dom Maran, Paris 1742; par Otto, Iéna 1842; trad. en fr. par les abbés Chanut et Courcy.
JUSTINE, Flavia-Justina-Augusta, impératrice romaine, fille de Justus, gouverneur du Picenum. D'abord femme du tyran Magnence, elle épousa ensuite Valentinien 368, et après la mort de celui-ci, fit couronner son second fils Valentinien II, s'établit avec lui à Milan, et tenta d'y établir l'arianisme en demandant à Ambroise de lui céder une de ses églises; Ambroise refusa et le peuple se mit de son côté. En 387 elle dut s'enfuir devant l'usurpateur Maxime, f 388.
JUSTINIEN lo empereur d'Orient, célèbre par son long règne 527-565, et par sa réforme des institutions judiciaires. Une commission de jurisconsultes, présidée par Tribonien, revisa et codifia les ordonnances de ses prédécesseurs et en fit le code qui porte son nom. Après le code vinrent le Digeste ou Pandectes, les Institutes et les Novelles, le tout réuni sous le titre de Corpus juris civilis. Il eut la main moins heureuse en religion. Il était contre le monophysitisme, mais dirigé par sa femme Théodora, aussi célèbre par ses débauches que par sa beauté, il ne sut pas voir clair et nomma patriarche le moine monophysite Anthimus, 535, qu'il dut destituer l'année suivante sur les réclamations d'Agapet. Pour assurer l'unité de l'empire, il interdit le paganisme, ferma l'école philos. d'Athènes 529, et ordonna aux hérétiques de rentrer dans l'Église. Pour se concilier les monophysites, il condamna dans ses Trois chapitres les principaux chefs de l'école d'Antioche, et il allait proclamer dogme catholique l'aphthartodocétisme, quand il f 565. Son règne avait brillamment débuté par des victoires sur les Perses et les Ostrogoths; il s'éteignit tristement dans des luttes théol. sans portée. Bélisaire mourut la môme année que son maître.
2° Justinien, ou Giustiniani, v. Laurent.
JUSTUS, Just ou Juste. On compte plusieurs saints de ce nom: un jeune garçon de Complu-tum, près Tolède, qui fut martyrisé sous Dioctétien; un év. de Strasbourg, au 4me siècle; un archev. de Lyon qui assista aux conc. de Valence 374 et d'Aquilée 381, où il combattit les ariens; il quitta son siège pour aller finir en solitaire dans les déserts de l'Égypte. Enfin un moine romain, qui succéda à Augustin dans l'évangélisation de l'Angleterre et f 627 comme archev. de Cantorbéry. — Le couvent de Saint-Just, Estramadure, desservi par des hiérony-mites, est surtout célèbre comme retraite de Charles-Quint.
JUTLAND, v. Schleswig.
JUVENCUS, Caïus Vettius Aquilinus, poète espagnol, d'une famille illustre, embrassa de bonne heure la carrière ecclésiastique. Il vivait vers 330, sous Constantin. Un des premiers poètes chrétiens, il mit en vers, en hexamètres latins, l'hist. évang., suivant le texte de Matthieu. Cette Historia evangelica en 4 livres, a été imprimée à Deventer 1490. Elle est remarquable par la simplicité du style et par la pureté de l'exégèse. On attribue aussi à Juvencus un travail du même genre sur les cinq livres de Moïse et sur Josué; un poème sur les sacrements, mentionné par Jérôme, n'a pas été retrouvé.
JUVENTIN et son ami Maximin, deux capitaines des gardes de Julien-l'Apostat. Ils avaient exprimé pendant un repas, à Antioche, leur opinion sur le triste état des chrétiens, qui, di-saient-ils, « n'auraient pas même d'air pur à respirer, si cela dépendait de nos ennemis. » Cette parole rapportée à l'emp., il les fit jeter en prison, complètement nus. Mais leur cachot fut comme transformé en un temple; les chrétiens accouraient pour s'entretenir avec eux, malgré les défenses expresses de l'empereur. Quand il l'apprit, il donna le choix à ces deux capitaines entre mourir et abjurer; les trouvant inébranlables, il les fit décapiter pendant la nuit, 25 janv. 363.