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GABLER, Jean-Philippe, théol. rationaliste, né à Francfort sur Main 4 juin 1753, étudia à Iena sous Griesbach; successivement prof, de théol. à Altdorf, Francfort sur l'Oder, GOttin-gue, enlin à Iéna où il f 1826. Connu par sa collaboration à l'Hist. primitive d'Eichhorn et à plusieurs Revues de théol. où ses articles de critique et d'exégèse eurent du succès.
GACHE, Raymond, né 1616 à Castres où il fut pasleur 1648, puis à Charenton 1654 jusqu'à sa f déc. 1668; prédicateur de mérite, apprécié par Vinet. A publ. aussi quelques poésies.
GAETAN, v. Théatins.
GAIANIENS, ou Julianistes, apthartodocètes, secte monophysite fondée par Jules d'Halicar-nasse; ils enseignaient l'incorruptibilité du corps de Christ, même avant sa résurrection.
GALÈRE, gendre et corégent de Dioclétien; il fut le principal auteur de la persécution de 303; déjà en 298 il voulait contraindre les soldats chrétiens à sacrifier aux idoles, et c'est lors d'une rencontre avec l'emp. àNicomédie, qu'il le décida à des mesures générales. D'après Lactance il serait mort de la même maladie qu'Antiochus Épiphanes, et Hèrode-Agrippa.
GALFRIED de Monmouth, év. d'Asaph en 1152, dut renoncer à. son diocèse 1175 pour avoir abandonné le pays de Galles pendant des troubles et pour s'être réfugié auprès de Henri II. Il a écrit une Hist. des Bretons et plus, ouvrages d'exégèse et de dogmatique, ainsi que des poésies.
GALL, 1° Nicolas; de son vrai nom Hahn (coq); né à Kôthen 1516; prédicateur à M;ms-feld et à Ratisbonne; après la guerre de Smal-calde il remplaça Cruciger à Wittenberg, combattit l'Intérim avec Flacius, et l'accompagna à Magdebourg, où il devint pasteur 1550, puis surintendant. Plus tard il retourna à Ratisbonne, et se montra toujours un luthérien infatigable dans les discussions osiandriennes et autres, t 1570. — 2o Saint-GaiI, v. Gallus.
GALLANDI, André, abbé de la Congrég. de l'Oratoire à Venise, f 1779; connu par diverses Collections de vieux canons, pères, écrivains ecclés., etc. On trouve dans sa Bibliotheca 380 écrivains des 7 premiers siècles.
GALLICANISME, Église gallicane; système d'indépendance nationale que l'Égl. cathol. de France a longtemps professé vis-à-vis de Rome. Quand les emj). d'Allemagne avaient renoncé à presque tous leurs droits, les souverains de France et d'Angleterre, d'accord avec la majorité de leur clergé, prétendaient rester les maîtres chez eux et ne reconnaître au pape que certains droits qu'ils se réservaient de déterminer eux-mêmes. Cet esprit d'indépendance date déjà de Pépin et de Charlemagne, qui s'occupent sérieusement de réformes religieuses, règlent les affaires du clergé, stimulent les év. et convoquent des conc. nationaux. Louis IX, le roi canonisé, se montra un vrai roi français, indépendant et ferme, en publiant 1269 la lr® Pragmatique Sanction, q. v. Charles VII publiadans le même esprit la seconde à Bourges 1438. Louis XI l'abolit en haine de son père, et aussi sans doute en haine de la liberté. François I** la rétablit en partie, puis l'abandonna par son Concordat avec Léon X. Le clergé enfin, sous Louis XIV, formula et fixa les principes du gallicanisme dans sa célèbre déclaration de 1682, rédigée par Bossuet, portant en substance que: lo le pape n'a aucun pouvoir sur le temporel des princes; 2o le conc. général est supérieur au pape; 3° l'exercice du pouvoir papal doit être réglé ou tempéré par les canons et les usages des égl. particulières; 4o même en matière de foi les décrets des papes ne sont pas indéformables et réclament le consentement de l'Église. Le pape condamna ces 4 articles, mais ils n'en furent pas moins enregistrés par les parlements. Le Concordat et les articles organiques de l'an X (1801) maintinrent les 4 articles, et après le concordat de 1817 le roi demanda au clergé de France d'y adhérer formellement. Les principaux représentants du gallicanisme sont Hinc-mar, Gerson, l'abbé Fleury, Bossuet, Pithou, le card. de la Luzerne, Frayssinous, Guillon, etc. Ses adversaires furent les jésuites et Bellarmin, et depuis le dernier concile, presque tout le clergé contemporain.
GALLIEN, fils et successeur de Valérien, emp. romain 259-268, publia 261 un Édit de tolérance qui, non seulement accordait aux communautés chrétiennes le libre exercice de leur religion, mais encore leur reconnaissait le droit de posséder des immeubles, ce qui équivalait à leur donner le caractère officiel et faisait du christianisme une religion licite.
GALLIFET, v. Sacré Cœur.
GALLIONISME, indifférence pour les choses et les vérités de la religion, ainsi nommée de la conduite du proconsul Gallion, Act. 18, 12.
GALLUS !» emp. romain 251-253, qui cédant à la pression populaire lors d'une peste qui ravageait le pays, ordonna la persécution contre les chrétiens qui refuseraient de sacrifier aux idoles.
2° Gai lus, ou Saint-Gall, Gallun, Gilian, né en Irlande vers 560, d'une famille distinguée, étudia dans le couvent de Bangor, avec Colom-ban dont il fut à la fois le disciple et le compagnon. Ils s'embarquèrent en 585 ou 590 (chro-nol. douteuse) pour évangéliser d'abord les Gaules, les Vosges, l'Alsace, puis en 610 l'Alle-manie, Bade, Zurich, Tuggen, Bregentz. Pendant que Colomban poursuivait sa route en Italie, Gall, tombé malade à Arbon, continuait de prêcher Christ aux idolâtres riverains du lac de Constance. Bientôt il chercha une solitude oii il pût se fixer, et sans crainte des loups ou des ours il s'établit dans une forêt près du Stei-nacb, où un couvent ne tarda pas à s'élever 614. puis une ville, qui prit le nom de son fondateur. Beaucoup de païens se convertirent, entre autres le duc Kunz, ou Gunzo, et l'évêché de Constance étant devenu vacant, Kunz nomma Gallus à ce poste. Mais Gall refusa, soit attachement à sa solitude ou à son œuvre, soit déférence pour Colomban qui lui avait fait promettre de ne pas dire de messe parmi les Allernans aussi longtemps que lui, Colomban, vivrait. Il fit nommer k sa place son disciple Jean, et consacra le reste de sa vie à évangéliser, soit directement, soit par ses nombreux élèves formés dans les divers monastères qu'il avait fondés. Colomban lui rendit le droit de lire la messe. Gall f 16 oct. 627, 640 ou 655, chez son vieil ami Willimar d'Arbon; il avait 95 ans, et fut enterré dans sa cellule. Une foule de légendes ont illustré son nom. Le couvent de Saint-Gall, enrichi par les dons des pèlerins, devint un des établissements les plus florissants pour la propagation du christianisme. Les maisons qui s'élevèrent dans son voisinage furent ceintes de murailles en 953, et leurs habitants entrèrent en lutte avec les abbés pour maintenir leur indépendance, qui, malgré l'appui des empereurs, et quoique la ville fût alliée de la Suisse depuis 1454, ne fut définitive qu'au 17ne siècle. L'abbaye, évacuée en 1805, renferme une belle biblioth., avec plus de mille mss. anciens.
3<> Le moine de Saint-Gall, auteur anonyme des Gestes de Charlemagne, ouvrage* plein de fables ridicules et dédié à Charles-le-Gros. Tout ce qu'on sait de cet écrivain, c'est qu'il était moine de l'abbaye de Saint-Gall.
GANGANELLI, v. Clément XIV.
GANGRA, ancienne capitale de la Paphlago-nie. Il s'y tint entre 362 et 370 un conc. qui repoussa en 20 canons les principes ascétiques exagérés d'Eustache de Sébaste, notamment en ce qui concerne l'interdiction du mariage.
GARASSE, François, né 1585 à Angoulême; prédicateur jésuite, connu par les violences et les personnalités qui abondent dans ses écrits et ses sermons. Envoyé en province, il + 14 juin 1631 à Poitiers, d'une maladie contagieuse contractée pendant qu'il soignait avec dévouement les victimes de l'épidémie. Auteur de plusieurs écrits de controverse de mauvais goût.
GARCIA de Loaysa, général des dominicains, confesseur et conseiller de Charles-Quint, qui le nomma successivement év. d'Orma, 1524, cardinal 1530, arch. de Seguença, puis de Sé-ville, et commissaire général de l'Inquisition. Ses Lettres àCh.-Quint, impr. Berlin 1848. sont importantes pour l'hist. de la Réformation.
GARDIEN, ou Custode, titre que les franciscains et les capucins donnent aux abbés de leurs couvents. Les custodes sont en général nommés pour 3 ans par les membres effectifs de la communauté. En Angleterre on désigne sons ce nom l'administrateur d'un évêché pendant la vacance du siège.
GARDINER, Étienne, né 1483, fils naturel de Woodwill, beau-fr. d'Edouard IV. Doué de connaissances riches et variées, il fut secrétaire sous le card. Wolsey, se concilia la faveur d'Henri VIII par son zèle à faciliter son divorce, fut nommé conseiller du roi 1529 et év. de Winchester 1533. Tout en étant le défenseur énergique des prérogatives royales, il s'opposa à toutes les tentatives de réforme, moins peut-être par conviction que par ambition et esprit d'intrigue. Déjà peu en faveur dans les dernières années d'Henri VIII, il fut déposé et emprisonné sous Édouard. Marie lui rendit son évêché, et il persécuta à outrance les protestants, f 1555.
GARNIER lo Jean, né à Paris 1612, f 16 oct. 1681. Savant jésuite, auteur de plusieurs ouvrages de dogm. historique, notes sur le pélagianis-me, abrégé des controv. nestoriennes et euty-chéennes, édition de Marins Mercator, etc. 2° Julien, né 1670; de l'ordre des maurins depuis 1691; chargé de publier les œuvres de Basile, il ne put en achever que les 2 premiers vol. f 1725. Prudent Maran publia le 3™.
GARVE Ch.-Bernard, né 4 janv. 1763 près de Hanovre; élevé chez les moraves à Zeyst et à Neuwied, puis maître au séminaire de Nies-ky, occupa plus, postes de pasteur, notamment à Berlin 1810-1816. f 1841 à Herrnhut. Auteur d'un grand nombre de cantiques estimés, dont 51 se trouvent dans le recueil de Knapp.
GASC, Esaïe, né 13 mai 1748 à Genève, pas-teur-catéchiste en 1781, s'occupa trop de politique, fut puni de son opposition par 6 ans d'exil, pasteur à Constance, revint en 1789 à Genève, fut nommé syndic pendant les tristes jours de 1793, et vit sa carrière brisée lors de l'annexion à la France. En 1810 il fut appelé comme prof, de théol. à Montauban; ses antécédents radicaux, son caractère peu souple, ses opinions rationalisantes, en le rendant suspect, lui firent une position difficile, et les pasteurs du midi demandèrent son éloignement. Tout s'arrangea par un compromis, + d'apoplexie 28 oct. 1813. Vie par Ch. Dardier.
GASPARIN, Agénor (de), né 12 juill. 1810 à Orange; chef de cabinet à l'agriculture, puis à l'intérieur, sous Louis-Philippe; maître des requêtes, député depuis 1842, mit une parole ardente au service des plus nobles causes, et se distingua au premier rang des défenseurs de la liberté religieuse. Fondateur en 1843 de la Soc. des Intérêts généraux du Protestantisme français. Voyage en Orient 1847. Attaché aux Orléans, il refusa de servir le gouvernement qui renversa Louis-Philippe, et se retira en Suisse, oii il vécut 23 ans, se partageant entre Genève et Vaud. Ce ne fut pas un temps perdu; ses nombreuses publications, ses livres, ses articles, ses conférences qui electrisaient ses auditoires, au cirque, à la salle de la Réformation et ailleurs, exerçaient une action puissante sur l'opinion. Brisé des désastres de la France, il se dévoua aux internés malades. etfS mai 1871. Au synode de Paris, août 1848, il demanda pour l'Égl. une foi déterminée, et ne l'ayant pas obtenue il se retira avec Fréd. Monod et fonda l'Union des églises èvang. Auteur fécond, il a écrit sur les sujets les plus divers. Vie par Théod. Borel.
GASS lo Joachim-Christian, né 26 mai 1766 à Auklam, Poméranie; pasteur à Stettin et à Berlin; prof, de théol. à Breslau depuis 1810 jusqu'à sa+ 19 févr. 1831, auteur de plus, livres d'édification et de prudence pastorale; sa cor-resp. avec Schleiermacher, publ. 1852, est intéressante. 2° Son fils Wilhelm fut prof, de théol. d'abord à Giessen, puis à Heidelberg. Il a écrit sur les deux noms de J.-C. dans le N. T. comme fils de Dieu et fils de l'homme; sur le Platonisme et I'Aristotélisme dans l'Égl. grecque, sur Calixte, et une Hist. de la théol. protestante, 1854-67.
GASSNER, Jean-Joseph, né 20 août 1727 à Branz près Pludenz, frontières de Souabe. Curé depuis 1758 à KIôsterle, près de Coire, il obtint quelques guérisons par la prière en 1773; il se donna dès lors comme chassant les démons et faisant des miracles, et parcourut en cette qualité la Suisse et l'Allemagne. Appelé à Ratisbonne par le prince-évêque, il y occupa quelque temps l'attention publique, jusqu'à ce qu'un ordre impérial le bannit de la ville et lui interdit tout exorcisme. Il f 1779 à Bonndorf où il avait été nommé doyen. On a de lui 2 traités sur la manière de chasser le diable. Il était soutenu par Lavater.
GASTON, v. Antoine 5o.
GAUDENTIUS, ou Gaudence, de Bresce, successeur de l'év. Philastrius, dont il a écrit la vie. Ami d'Ambroise, il se rendit 404 à Con-stantinople avec d'autres évêques, pour intercéder en faveur de Chrysostome. f 427. Il reste de lui 10 discours, impr. à Bresce 1738.
GAUDIORUM Mariœ festum; la fête des joies de Marie, se célébrait autrefois le 27 sept.
GAULE, ancien nom de la contrée, mal limitée d'ailleurs, qui forme auj. le territoire de la France et des Flandres; dans un sens plus restreint, c'était surtout la partie sud-est de celte contrée, la province par excellence; auj. la Provence. Au pluriel, les Gaules comprenaient en outre l'Italie septentrionale, une partie de l'Allemagne, les Iles britanniques et l'Espagne ou Hispanie, en un mot l'Europe occidentale. Les légendes les plus pittoresques ont couru sur l'introduction de l'Évang. dans les Gaules. Sans parler de 2 Tim. 4, 10. où une variante assez accréditée porte Gaule, au lieu de Galatie, une vieille tradition nous montre Lazare, Marthe et Marie, avec deux servantes et deux disciples, jetés dans une barque par les juifs, et poussés miraculeusement sur les côtes de la Provence. Marseille, Aix, Tarascon, d'autres villes, d'autres diocèses réclament de même une origine apostolique; mais ce n'est réellement que vers l'an 177 que l'on peut constater par une lettre d'Irénée, la présence à Vienne et à Lyon de communautés chrétiennes, de persécutions el de martyrs. Puis vers 250, d'après Grégoire de Tours, 7 nouveaux diocèses. V. France.
GAUSSEN. Franç.-Sam.-Robert-Louis né à Genève 25 août 1790, pasteur à Satiguy 1816-1831, prédicateur aussi distingué par la beauté de la forme que par l'élévation de la pensée, un des représentants les plus autorisés de la doctrine orthodoxe, telle qu'elle est contenue dans la 2<™ Conf. helvétique, qu'il fit réimpr. eu 1819 avec Cellérier père. Suspendu et destitué par le Consistoire 30 sept. 1831, pour avoir employé la Bible dans l'enseignement de ses catéchumènes et pour avoir tenu des réunions relig. en dehors des temples, il fonda avec Merle, Galland et plusieurs amis la Soc. évangélique et l'École de théol. dont il fut pendant près de 25 ans un des prof, les plus influents. Mais il brilla surtout comme catéchiste et par le charme avec lequel il savait captiver les enfants. f 18 juin 1863. On a de lui: la Théop-neustie, les Livres canoniq. du N. T., une Dogmalique (autographiée), plus. vol. de sermons, des Leçons sur Daniel, la Genèse, l'Exode, Luc, les Proverbes, etc.
GAUTIER (ou Gauthier, ou Walther) de Saint-Victor, sous-prieur, puis prieur de l'abbaye de ce nom; élève et successeur de Hugo de Saint-Victor, et f 1180. Il avait hérité de ses prédécesseurs leur répugnance pour la sco-lastique, mais non leur piété intime et vivante. Son style est lourd. Dans un curieux traité, écrit vers 1180, sous le titre Les quatre Labyrinthes, il combat certaines opinions d'Abélard, de Gilbert, de P. Lombard et de Pierre de Poitiers. Ses œuvres ne sont qu'en mss.
GAUZBERT, neveu d'Ebbon de Reims, fut envoyé par Ansgar en Suède, pour y continuer l'œuvre de l'évangélisation, mais en 840 la persécution le contraignît d'abandonner son diocèse. Il fut appelé à l'évêché d'OsnabrUek, mais en 858 on le voit exercer encore en Suède avec Ansgar les droits épiscopaux, par l'intermédiaire d'un prêtre son mandataire.
GEBHARD 1° le Saint. Év. de Constance, construisit Petershausen. f 995. Canonisé 1134, il est invoqué par les femmes en mal d'enfant.
2o Truchsess de Waldbourg, archev, de Cologne, né 10 nov. 1547. il fut successivement chanoine à Augsbourg, Stnsbourget Cologne. Son élection au siège archiépiscopal fut combattue par le parti espagnol, qui lui préférait Ernest de Bavière. D'anciennes dispositions pour la réforme, et sou amour pour Agnès de Mansfeld, qu'il finit par épouser 1583, le décidèrent à abjurer, et il travailla activement à répandre dans son diocèse les doctrines évangéliques. Il fut destitué et remplacé par le duc Ernest. Ses efforts pour se maintenir à l'archev. furent inutiles. Il s'enfuit à Delft 1584, chercha en vain 1589 à intéresser les Anglais à sa cause, et f 21 mai 1601 à Strasbourg où il avait obtenu une place comme chanoine de la cathédrale.
GEDDES, Alexandre, prêtre cathol. écossais, né 1737 à Arradowl. Son indépendance d'esprit lui fit quitter sa place de curé 1779, il vécut dès lors à Londres de ses travaux littéraires, comme chapelain <Je l'ambassade, et enfin de leçons particulières. Il a fait une trad. de la Bible, 1792-1797, pour laquelle il s'est servi d'Eichhorn, de Michaelis et d« Paulus; dans la préface il nie nettement l'inspiration.
GEIBEL, Jean, né à Hanau 1er avril 1776, pasteur réf. à Lubeck 1797; défenseur énergique de la vérité contre le rationalisme, prit une part active aux luttes que son fils Charles eut à soutenir en 1830 contre son égl. de Brunswick et en 1832 contre le synode réformé, conflit qui se termina par la retraite imposée à Charles, mais avec conservation de son traitement, f 1853.
GEIGER, François-Tiburce, né 1755 à Har-ting, près Ratisbonne. Élevé par les jésuites et les bénédictins, il entra 1772 dans Tordre des franciscains, étudia à Wurzbourg et occupa plusieurs chaires, jusqu'à ce qu'il fut appelé comme prof, à Lucerne, avec le titre de théologien de la nonciature. 11 travailla activement dans le sens de l'ultramontanisine, et combattit par plusieurs écrits le protestantisme, qu'il ne connaissait et ne comprenait pas. f 1843.
GEILER de Kaisersberg, cél. prédicateur populaire, né à Schalfhousp 16 mars 1445, docteur ès arts à Fribourg, puis doyen de la faculté des arts; il étudia la théol. à Bàle et y fut nommé docteur et prof, en 1476. Il refusa la place de prédicateur à Wurzbourg, et accepta 1478 celle qui lui fut offerte à la cathéd. de de Strasbourg, f 1510. Ses discours se distinguent par la pureté de la langue, un sentiment chrétien vrai, quoique mélangé de mysticisme, et quelques restes de scolastique dans la forme. Il reconnaissait les désordres (le l'Égl. et désirait y remédier, mais tout en la préparant, il était loin de penser à une réforme. Sa prédication était originale, énergique et sérieuse; il prenait souvent ses textes en dehors de la Bible; ainsi il a prêché 1474 sur le Vaisseau des fous, de Séb. Brand, et plus tard sur le Mont des contemplations, de Gerson.
GEISSEL (Jean de). Év. de Spire; en 1841 coadjuteur de l'archev. Droste-Vischering, de Cologne, et son successeur en 45. f 1864.
GÉLASE pape 492-496. confirma les actes de son prédécesseur Félix III contre Acacins: il refusa la communion d'Euphémius, patr. de Constantinople, qui ne voulait pas condamner la mémoire de cet hérésiarque; il combattit les erreurs des eutychéens, et convoqua à Rome, dit-on, un concile 494, où aurait été dressé un prétendu canon des saintes Écritures, dont la première mention ne se trouve que 300 ans plus tard, sous la plume du faussaire Isidore. — Voici comment Gélase entendait l'Eucharistie: « Le sacrement du corps et du sang de Christ est vraiment une chose divine; mais le pain et le vin y demeurent dans leur substance en nature de pain et de vin, et la célébration du saint mystère n'est autre chose assurément qu'une image ou une similitude du sacrifice du corps et du sang de Jésus » (De duabus naturis. Bi-blioth. Patrum. t. VIII, Lyon 1677). C'est aussi la doctrine d'Augustin, Contra Adimant Chap. 12, p. 124, t. VIII. Luther n'aurait pas mieux dit.
2° Gélase II, Jean de Gaëte, né à Gaëte, élu 1118, se trouve, aussitôt après son élection, en présence d'un pape rival, Grégoire VIII, élu sous l'influence de Cencio Frangipani, consul de Rome, qui, de concert avec Henri V, l'oblige à sortir de Rome. Il se retire à Gaëte, d'où il excommunie l'antipape et son parti. Il rentre un instant dans Rome, mais doit s'enfuir de nouveau et se réfugie en France, où il est reçu avec honneur et f dans l'abbaye de Cluny 1119.
GELLERT, Christian-FOrchtegott, ne 1715 à Haynichen, Saxe, fils d'un pasteur, étudia la théol. à Leipzig 1734, mais s'abstint par scrupule de prendre des fonctions pastorales pour lesquelles il ne se sentait pas assez de vocation, et se voua à l'enseignement. Il professa avec succès à Leipzig l'éloquence, la poésie et la philos, morale, et f 1769. Ses talents comme prof, et comme écrivain et sa piété lui assurèrent une influence qui s'étendit bien au delà des limites de l'université, et si les uns s'adressaient à lui à cause de sa générosité, d'autres voyaient en lui un conseiller et presque un confesseur. Ses cantiques spirituels et ses fables appartiennent au domaine public. Il a écrit aussi des leçons de morale, des comédies, des dissert, littéraires, etc. QEuvr. compl. 10 vol. Leipzig 1770. — Son fr. Christlieb était un métallurgiste distingué.
GEMARA, v. Talmud.
GEMBLOUX, latin Geminiacum, ancienne abbaye de bénédictins, près Namur, fondée par Guibert, et longtemps distinguée par sa science. Sa Chronique a été écrite par Sigebert 1030-1112, et continuée par son disciple Anselme; elle est utile à consulter pour 1'époque de Henri IV.
GÉNÉRAL, v. Ordres religieux.
GENESIUS, comédien romain qui, d'après la légende, se convertit pendant qu'il recevait un baptême fictif en jouant sur les planches une comédie blasphématoire; il fut exécuté sous Dioclètien 290. La légende, qui n'a rien d'extraordinaire, ne se concilie cependant pas avec l'histoire.
GENÈVE. Vieille ville qui, avant l'invasion romaine, était déjà l'une des principales cités des Allobroges. César l'incorpora à l'empire, et Rome lui donna, en échange de son indépendance, des institutions municipales. Les Bur-gundes s'en emparèrent au 5me siècle, puis les Goths, puis les Francs. Le christianisme y fut apporté de Lyon, à ce que l'on croit, dès le 2me siècle, et l'on nomme Diogène 381 comme son premier évêque. En 773 Charlemagne accorda l'investiture à l'év., qui possédait déjà le pouvoir politique, en même temps qu'il confirmait les franchises et privilèges des citoyens. Le comte Aymon, 1124, passa à l'évêque les droits qu'il pensait avoir sur Genève, et après des luttes séculaires entre les évêques, les comtes du Genevois, les ducs de Savoie et le peuple de Genève, ce dernier finit par triompher; l'év. Pierre de la Baume dut s'enfuir nuitamment 1534; les ducs avaient déjà abandonné en 1524 leurs prétentions, tout en se réservant de reprendre, quand ils le pourraient, un pouvoir auquel ils n'avaient renoncé qu'en apparence; l'entreprise manquée du 12 déc. 1602, dite l'Escalade, fut sous ce rapport leur dernière et leur plus malheureuse tentative. Après que la Réforme eut fait ses premières conquêtes en Allemagne, en France et dans plus, cantons de la Suisse, elle pénétra aussi à Genève, non sans une violente résistance de l'évêché contre Farel, Saunier, Froment, qui furent à plusieurs reprises menacés d'être jetés au Rhône. Mais le parti de la Réforme grossissait de jour en jour, et si La Baume, le duc de Savoie et le canton de Fri-bourg effrayaient les Conseils de la ville, l'appui de Berne neutralisait en partie cette pression. L'édit de Réformation parut le 27 août 1535. Calvin arriva en juillet 1536, et imprima son cachet à l'Église, à la législation et aux mœurs de la petite cité, qui devint dès lors la capitale d'une grande opinion (Mignet). Bèze fut le digne continuateur de Calvin, et maintint au milieu de beaucoup de difficultés l'unien presque intime de la société relig. et de la société civile, qui donnait l'apparence d'une théocratie à l'organisation ecclés. de la Rome protestante. Malgré ses erreurs, ce fut la grande époque de Genève. Avec le 17me siècle la vie relig. diminue, mais on se cramponne d'autant plus étroitement aux formules théologiques. C'est le siècle du synode de Dordrecht; à Genève l'orthodoxie est représentée par Th. Tronchin et par François Turrettini. Les fils de ces deux hommes, Louis Tronchin et Jean-Alph. Turrettini inaugurent le 18°^ siècle en attaquant le formalisme légal du clergé et le règne des formules dogmatiques; ils comprennent que ce n'est pas la phrase qui fait la vie mais ils semblent croire que la vie se trouvera dans la suppression de la phrase, et cela aussi est un formalisme. Bén. Pic-tet et Ant. Maurice maintiennent plus fidèlement les traditions évang. et ne donnent aucun gage à l'esprit encyclopédiste et voltairien qui exploite à merveille les concessions que Ton fait à la libre pensée et au libre examen. Un article de l'encyclopédie fait des ministres de Genève un éloge perfide en les représentant comme de francs sociniens dont le principe est de ne rien proposer qui heurte l'intelligence. La Compagnie protesta énergiquement contre cette calomnie, mais elle avait mis les apparences contre elle par une série de concessions à l'esprit du siècle, notamment en 1706 dans l'affaire Vial, et surtout le 17 juin 1725 en supprimant tous les symboles et en recommandant sur cette affaire c le silence le plus absolu. » Dans tous les cas la crainte du dogmatisme poussait toujours plus le clergé à négliger, si ce n'est à cacher les vérités mystérieuses du christianisme, c.-à-d. les miracles et la doctrine. Les sermons, ceux même de Vernet, n'ont plus la sève évan-gélique, et ils s'appliquent à racheter par la beauté de la forme la pauvreté du fond. Lullin a encore quelque chose de la doctrine chrétienne, mais ses successeurs, même Laget, s'en tiennent déplus en plus à la simple morale. La vie relig? est en baisse, les temples se vident; à mesure que les pasteurs abandonnent la doctrine, les troupeaux abandonnent les pasteurs. Cependant, sauf quelques rares exceptions, les pasteurs restent la représentation la plus exacte, non seulement de la science et de la gloire, mais encore de la nationalité genevoise. Sous la domination franc., c.-à-d. sous l'épreuve, et sous la restauration, c.-à-d. après la délivrance, le sentiment religieux se réveille à la voix et sous l'influence des Cellérier, des Moulinié, des Martin, des Peschier et des Demellayer. Plus tard la Compagnie des pasteurs s'effraie d'un mouvement qui se produit en dehors d'elle et qui paraît vouloir se développer sous des formes nouvelles. Elle craint le mysticisme, l'esprit morave. les doctrines arrêtées. Après plusieurs demi-mesures, prises depuis 1810, elle se décide à imposer son fameux règlement du 3 mai 1817, confession de foi négative, qui fut l'origine d'une lutte de 20 années. A partir de ce moment les égl. indépendantes et les écoles libres se multiplièrent à Genève. Sur l'hist. de ce réveil, v. les différents écrits de Guers, Malan, Bost, Goltz. Genève, qui paraît être la terre prédestinée des expériences sociales, morales, religieuses et théologiques, après avoir presque adopté en 1847 la séparation de l'Égl. et de l'État, s est jetée dans l'excès contraire en acceptant pendant quelques années la protection et par conséquent la tutelle de l'État pour l'établissement du libéralisme théol. sous sa double forme protestante et catholique. En théorie tous les cultes y sont libres, et l'on compte auj. à c^lé de l'Égl. officielle, des chapelles et des communautés indépendantes , wesleyenne, luthérienne, anglicane, russe, américaine, darbyste, salutiste, etc. Le catholicisme y jouit absolument des mêmes droits que le protestantisme, parfois avec une disposition à en réclamer davantage.
Une église catholique-libérale, nationale ou chrétienne, s'est fondée à Genève en 1873. L'État était sur la défensive depuis qu'en 1864, le curé Mermillod avait été nommé év. d'Hé-bron; mais l'év. de Fribourg ayant (par ordre) déclaré en 1871 qu'il n'était plus l'év. de Genève, et qu'il fallait s'adresser à M. Mermillod pour la repourvue des places vacantes, le gouvernement genevois refusa de se soumettre à cette irrégularité. Il aurait pu persévérer dans son attitude défensive et laisser les vacances se produire et se prolonger jusqu'au moment où l'év. jugerait bon de les repourvoir; il préféra charger les paroisses elles-mêmes d'élire leurs curés. Mais pour cela il fallut remanier toute la loi. Ce qu'on avait fait pour les protestants on le fit pour les catholiques, et en 1873, 19 févr. et 27 août, la nouvelle Égl. était constituée; le 25 oct. 1876 elle se rattachait à l'évêché cathol. chrétien suisse. Elle avait eu le bonheur de rencontrer dans le p. Hyacinthe un orateur puissant et sympathique, et pendant plus, mois la nouvelle Égl. parut réussir; elle comptait aussi quelques prêtres distingués. Mais elle eut le double malheur d'être trop protégée par l'État, et de compter plus d'électeurs que de fidèles. Les cathol. romains se sont constitués en culte dissident; leurs couvents ont été supprimés;, mais, quoi qu'on en ait dit, s'il y a eu des tracasseries, il n'y a pas eu de persécutions.
Quant au Consensus de Genève, de 1554, plus ou moins calqué sur celui de Zurich 1540, il avait été peu à peu modifié, mais il subsistait touj. dans son esprit, et vers 1649 il avait été renouvelé avec une tendance plus calviniste encore que le synode de Dordrecht, ce qui motiva le départ de plus, hommes distingués, amena de nombreux froissements, et justifia la réaction qui se produisit sous Alph. Turrettini, q. v.
GENEVIÈVE 1° en latin Genovefa; la sainte et légendaire patronne de Paris. On croit que c'était une simple bergère, née à Nanterre vers 423, et qui, sur le conseil de saint Germain d'Auxerre, aurait fait vœu de virginité. Après la mort de ses parents, elle vint demeurer à Paris chez sa marraine, où elle vécut dans la plus grande abstinence. A l'approche d'Attila 451, elle rassura les Parisiens effrayés et leur dit qu'ils n'avaient rien à craindre. Une autre fois, pendant une disette, elle leur procura des vivres. Sa piété, sa bienfaisance, la sainteté de sa vie, ses visions même, lui valurent, en dépit de la calomnie, la réputation d'une sainte, qui s'accrut encore par tous les miracles qu'on lui prêta. A sa prière Clovis fit bâtir en l'honneur des saints Pierre et Paul l'église qui plus tard porta le nom de la sainte, et où ses reliques furent déposées, f 3 janv. 512.
2° Geneviève de Brabant, dont la touchante légende a inspiré tant de poésies et de romans, Tieck, Muller, etc. Faussement accusée d'adultère par Golo, elle fut pendant 6 ans nourrie par une biche, ainsi que son enfant, jusqu'au moment où son mari, Siffroy, la retrouva, grâce à la biche providentielle, et reconnut son innocence, 737. Elle fit élever la chapelle de Frauen-kirchen à l'endroit où elle fut retrouvée.
GENGIS-KHAN, célèbre prince mongol, né 1164, f 1227, d'abord chef d'une simple horde, agrandit son héritage par des conquêtes et finit par être le maître de toutes les contrées situées entre la mer Caspienne et Pékin. Il partagea son empire entre ses 4 fils. Inhumain et barbare, suivant les mœurs de son temps, il détruisit Sa-marcande et Boukara, ainsi qu'une foule de riches monuments à Pékin, v. Prêtres-Jean.
GENNADIUS 1° prêtre de Marseille du >e siècle. C'est à tort que quelques-uns l'ont fait év. de Marseille. Il se distingua parmi les défenseurs du semi-pélagianisme par son érudition. f 495. On a de lui un ouvrage sur la foi, De Dogmatibus, et un autre sur les écrivains ecclésiast., De Viris illustribtts. Il n'a pas été traduit. — 2° patr. de Constantinople, s'appelait George, et avait reçu le surnom de Schola-rius; théologien fécond et considérable de l'Égl. grecque. Envoyé au conc. de Florence-Ferrare, il se prononça d'abord pour la réunion des 2 Églises, contre l'opinion du savant Gèmiste Plé-thon. Mais de retour à Constantinople, cédant à l'opinion publique, il se prononça contre l'union, se fit moine et fut nommé patriarche. Il fit remettre au sultan, Mahomet II, une confession de foi, souvent imprimée, écrivit quelques autres ouvrages dogmatiques, donna sa démission, et f 1464. 11 tenait pour Aristote et écrivit contre Pléthon, platonicien.
GÉNOVÉFAINS, chanoines de l'abbave de Sainte-Geneviève, institués probablement par Clovis vers 500, et connus aussi sous le nom de Congrég. de France. Ils subirent, comme tous les ordres et toutes les abbayes, plusieurs réformes: notamment en 1148 par 12 chanoines de Saint-Victor, et en 1614-1626 par le p. Ch. Faure, qui fut nommé supérieur et qui se distinguait par sa piété. L'ordre s'occupait des malades et de l'enseignement; il avait à sa tête un général; plusieurs de ses membres se sont illustrés dans les lettres. Ils avaient pour centre l'édifice dont on a fait depuis la biblioth. Sainte-Geneviève et le collège Henri IV. A la fin du 18me siècle, ils comptaient 107 maisons et plus de 1300 membres; leur église devint pendant la révolution le siège du club des jacobins. — Quant aux femmes, v. Miramion.
GENSÉRIC, roi des Vandales, 2<* fils de Go-dégisile et successeur de Gundéric, son frère, conquit le nord de l'Afrique 429-439, et en persécuta avec rage l'Église, qu'il haïssait comme arien. En 455 il prit Rome et la pilla pendant 15 jours; tout ce que Léon 1er put obtenir, ce fut qu'il ne la détruisît pas. Il emmena même Eudoxie en captivité, f 477.
GENTILIACUM, ou Gentilly, ancienne résidence des rois de France de la l** et de la 2<i* race. Pépin y fit bâtir un château auj. détruit. Propriété de l'évêché de Paris depuis 878. Il s'y tint en 767 une assemblée nationale à laquelle assistèrent des délégués grecs et romains, et où l'on discuta la question des États de l'Égl. en Italie, celle des images, la doctrine arienne sur la Trinité, et diverses autres actualités.
GENTILIS, Jean-Valentin, né à Cosenza, Na-ples, dut quitter son pays à cause de ses opinions, vint à Genève où il se joignit k la colonie des réfugiés italiens et signa 1558 la confession de foi qui condamne les doctrines antitrinitaires. Cependant, soit k Genève même, une première fois, soit en Pologne, où il s'était enfui, et notamment au synode de Pinczow, il s'exprima comme arien et même comme socinien. Arrêté k Genève il se rétracta, réussit k s'enfuir en France, puis en Moravie et à Vienne, et finit par retenir en Suisse. Il fut de nouveau arrêté k Gex, conduit à Berne et condamné pour rupture de ban et à cause de ses attaques contre la Trinité. Il eut la tête tranchée le 9 sept. 1566 et mourut courageusement, victime de son caractère inquiet et de l'intolérance de son temps. — Procès, par H. Fazy.
GENTILLET, Innocent, savant jurisconsulte, né k Vienne, Dauphiné, date inconnue. Après avoir siégé comme conseiller dans la chambre mi-partie du Dauphiné, il fut jusqu'en 1585 président de la même chambre k Grenoble et se rendit probablement de là à Genève, où il avait déjà figuré comme avocat sur les registres du 23 oct. 1572, après la Saint-Barthélemy. Il a publié de nombreux écrits, entre autres une Apol. de la foi réformée 1578, un Disc, contre Machiavel, une Étude sur le conc. de Trente, qui en est la réfutation au point de vue juridique.
GENTILLY, v. Gentiliacum.
GÉNUFLEXION. L'acte de fléchir les genoux était considéré dans l'ancienne Égl. comme le symbole de la plus profonde humiliation, car d'ordinaire on priait debout. Peu à peu cependant l'usage s'en est introduit dans le culte; l'Égl. catholique l'a imposé pour l'eucharistie et en présence du saint sacrement. Plus. Égl. protestantes ont également pris l'habitude de communier à genoux; de même pour la confirmation, pour la consécration, pour une bénédiction spéciale. D'autres n'ont pas cette coutume. Le formalisme consisterait à attacher une importance trop grande à la présence ou à l'absence de cette pratique.
GEORGES lo le saint: patron des chevaliers et de l'Angleterre, doit avoir été un jeune et beau prince de Cappadoce, officier dans l'armée romaine, qui, lors de la persécution dioclé-tienne, donna sa démission et souffrit le martyre, 303- On l'honora de bonne heure, déjà sous Constantin. On en fait un Persée chrétien, qui tua un dragon furieux et délivra ainsi la fille d'un roi qu'il allait dévorer. C'est surtout sous cette forme qu'on le représente, mais comme les actes qui racontent sa vie sont faux, il est à croire qu'il n'a jamais existé, et que sa légende n'est que la reproduction chrétienne de la fable persane de Mithras, la personnification d'Ormuzd, plongeant son glaive dans la gorge d'un taureau qui représente les ténèbres. Plusieurs ordres religieux ont été fondés sous ce nom: en Allemagne et en Italie, mais ils ont peu duré; en Bavière, dès le 12™ siècle, au retour des croisades, renouvelé 1729 par Charles-Albert; enfin en Russie, le grand ordre militaire, institué 1769 par Catherine II, pour des faits d'armes. La décoration est une croix d'or, avec un écusson central figurant saint Georges à cheval terrassant le dragon.
2° G. de Laodicée; clerc d'Alexandrie, excommunié comme arien par l'év. Alexandre. Ses partisans irrités le nommèrent év. de Laodicée. mais il ne put aller aussi loin qu'eux et il forma avec Basile d'Ancyre le parti des Ho-moïousiens, ou semi-ariens. Il gagna l'emp. Constance aux résolutions du conc. d'Ancyre 358, confirmées par 3 autres synodes, où les intrigues de la cour, bien plus que les textes bibliques, proclamèrent le semi-arianisme comme vérité légale.
3<> G. le Syncelle (cellule commune), ainsi nommé parce qu'il partageait la même cellule que Taraise, patr. de Constantinople; historien grec, auteur d'une Chronographie, composée en partie d'après Jules Africain, f vers 800. . 4o G. de Trébizonde, né 1396 en Crète, mais d'une famille originaire de Trébizonde, vint 1420 en Italie, à Venise d'abord, puis à Rome sur la demande d'Eugène. Il enseignait la philosophie d'Aristote et entra en conflit avec Bes-sarion et Pléthon, qui étaient platoniciens, ce qui lui fit perdre la faveur du pape Nicolas. Chargé de quelques traductions du grec en latin, il apporta à ce travail de la négligence, peut-être même une infidélité volontaire, de sorte que malgré toute sa science il ne réussit pas. fà Rome 1486.
5° Georges-le-Barbu, duc de Saxe, l'adversaire de Luther; né 4 août 1471, monta sur le trône 1500, provoqua 1519 la Dispute de Leipzig entre Eck et Luther, çt ne put pardonner à ce dernier la violence de sa polémique. Il persécuta les évangéliques, mais il fut heureux de pouvoir consoler son fils et de se fortifier lui-même sur son lit de mort par les seuls mérites du Sauveur.
6° G. de Polenz, le premier év. protestant.
Né 1478 il fut secrétaire de Jules II, entra dans l'ordre teutonique et fut nommé 1518 év. de Samland. En 1523 il se prononça pour la Réforme, fit venir à KOnigsberg le ci-devant franciscain Brissmann, le prit pour assistant, ordonna en 1524 que le culte serait célébré en langue vulgaire et recommanda la trad. de la Bible de Luther. En 1525, if remit au duc Albert l'administration temporelle du duché et se consacra avec Brissmann à l'œuvre purement spirituelle. Il se maria, et f 1550 après un ministère béni.
7o G.-le-Confesseur, ou le-Pieux, marquis de Brandebourg, fils de Fréd.-le-Vieux. Né 4 mars 1484, il régna de 1525 à 1527 avec son fr. Casimir, puis seul, f 17 déc. 1543. 11 se prononça dès 1524 pour la Réforme, qu'il introduisit dans ses États suivant les articles de Visitation de Mélanchthon de 1528, sur la base des ordonnances de 1526 de son frère. En 1529 il était à Spire, en 1530 à Augsbourg au nombre des princes les plus décidés. Par ses paroles et par ses actes il prêta le plus énergique appui à ses cousins en Brandebourg et à son fr. en Prusse.
8° G. d'Anhalt, né 13 août 1507; chanoine à Mersebourg, étudia à Leipsig, fut déjà ordonné prêtre en 1524. nommé doyen à Magdebourg en 1526. Il étudia soigneusement les Écritures pour se préserver des nouvelles doctrines, et arriva par ce moyen à un résultat contraire; en 1530, comme son cousin Wolfgang, il devint luthérien. Après la f de l'év. de Mersebourg 1544, Maurice de Saxe le nomma coadjuteur, et en 1545 lui conféra la dignité épiscopale, mais sans les charges du temporel. La bataille de Mtlhl-berg le déposséda, et Michel Helding fut nommé à sa place. Il prit part aux conférences relatives à l'Intérim et+ à Dessau 1553.
GÉRARD ou Gerhard lo év. de Toul, 963-994, fonda des écoles et protégea les savants.
2o Le Saint; d'une famille noble de Namur; bâtit en 918 le couvent de Brogne à la suite d'une vision, entra comme moine à Saint-De-nis, introduisit la règle de saint Benoît dans plus, couvents, f 957. Canonisé par Innocent II.
3° Moine vénitien né au commencement du Hme siècle, prédicateur distingué. Pour se rendre au Saint-Sépulcre il passa par la Hongrie, et se décida sur les instances du roi Étienne à s'y fixer pour travailler à la conversion des idolâtres. Il accepta l'évêché d'Ozanad, avec son travail, ses peines et la perspective du martyre. Il obtint quelques succès, mais ses dernières années furent troublées; André, successeur d'Étienne, persécuta les chrétiens, et Gérard fut lapidé avec deux de ses collègues, 1046.
4o Gérard, né 1040 dans l'île de Martigue, sur les côtes de Provence; nommé vers 1080 supérieur d'un hôpital pour les pèlerins à Jérusalem, fondateur en 1100 et grand-maître de Tordre hospitalier de Saint-Jean, f 4421.
5o G. Segarelli, v. Apostoliques (Frères).
6® Jean, né 1582 à Quedlinbourg, élevé sous l'influence d'Arndt, un des théol. les plus remarquables et les plus influents de l'Allemagne au 17roe siècle. Il vint à Wittenberg 1599, étudia d'abord la médecine, puis la théol. à Iéna et à Marbourg. A 24 ans il était Dr théol. et surintendant à Heldbourg. En 1615 il revint à Iéna comme prof., et occupa sans conteste le premier rang parmi les théol. contemporains par ses talents et sa piété. Il possédait la confiance des princes et présidait les conférences des ecclésiastiques saxons, f 1637. Il a écrit plus, ouvrages latins, reposant sur une foi absolue dans la vérité des Ecritures.
7o Paul, né vers 1606, diacre à Berlin 1657, tête peu équilibrée; destitué 1667, pour n'avoir pas voulu s'engager k plus de modération dans ses sermons de controverse contre les réformés. En 1669 il fut nommé archidiacre à Lubben. f 7 janv. 1675. Il avait du talent comme poète et plus, de ses cantiques sonl très populaires; après Luther il est peut-être encore le plus estimé des poètes religieux de l'Allemagne.
80 Philippe-Louis, né à Paris 1737, f 1813, eut une jeunesse orageuse, se convertit, devint prêtre, fut enfermé pendant la révolution; auteur de plusieurs écrits intéressants, entre autres: le Comte de Valmont, ou les Égarements de la Raison, 6 vol. 20 éditions; et l'Esprit du Christianisme, avec ses preuves, etc. 1803.
9° Gérard, v. Lucius.
10o G. Groot, et Gérardiens; v. Groot.
GERBERON, Dom Gabriel, né 1628 k Saint-Calais, Maine, entra 1649 dans la Congrég. de Saint-Maur, qu'il honora par sa science, et vécut à Corbie depuis 1675. Défenseur des droits du pape dans la discussion des régales, il dut fuir pour n'être pas arrêté. A Bruxelles il publia les œuvres de Bajus et écrivit une Hist. du jansénisme en se prononçant sur la prédestination et sur la grâce de Dieu comme il l'avait déjà fait en 1676, dans le sens janséniste. Arrêté 1703 et excommunié, il resta en prison jusqu'en 1710. Sur son lit de f 1711 il rétracta la rétractation qu'il avait été contraint de faire.
GERBERT 1° pape; v. Sylvestre II. 2° Martin, bénédictin, abbé de Saint-Biaise, né 1720 f 1793; auteur de plus, écrits sur l'histoire et la musique d'église. Son couvent ayant été incendié, il le fit reconstruire avec un grand luxe.
GERHOCK, ou Gerock de Reichersberg. adversaire d'Abailard et de la scolastique. Dévoué au parti d'Hildebrand, il se donna pour tâche de réformer le clergé et notamment les chanoines sécularisés par le capitulaire de Louis-le-Déb. Son rigorisme l'exposa à bien des luttes et il dut souvent changer de résidence. Né 1093 à Polling, près Weilheim, il fut chanoine à Augsbourg, coadjuteur de l'év. Cuno de Ratisbonne, prêtre en plusieurs lieux, et finalement doyen de Reichersberg sur l'Inn. f 1169.
GERLACH, Otton (de). Né 1801 à Berlin, il étudia d abord le droit, puis 1820 la théol.; en 1828 il se lit connaître comme privat-docent à Berlin, fut nommé pasteur de Sainte-Élisabeth en 1834, membre du Consistoire, enfin prédicateur de la cour et de la cathédrale; f 1849. Distingué par ses talents non moins que par le caractère pratique de son activité pastorale, cure d'âmes, soin des pauvres, il fit en 1842 un voyage en Angleterre et se développa plus encore dans le même sens sous l'influence de Chalmers. Il exerça également une grande action sur l'Égl. de Prusse, et fit preuve d'indépendance en refusant de marier des divorcés, ce qu'on lui a reproché comme un encouragement à mettre la conviction particulière du pasteur au-dessus de la loi. On a de lui une Bible, avec notes et introductions, des traductions de Baxter, des Œuvres choisies de Luther, etc.
GERMAIN 1° dit d'Auxerre, né dans cette ville 380; nommé év. 418 à la mort d'Amator (il était auparavant gouverneur de la province). Il se rendit 2 fois en Grande-Bretagne pour y combattre le pélagianisme, 428 et 446. Lors de l'invasion des Alains en Armorique, il se rendit au-devant du général païen, et obtint de lui qu'il épargnerait la province, s'il obtenait de la cour impériale le pardon des habitants. Germain se rendit à Ravenne 011 était Valentinien UI; il fut très bien reçu, comblé d'honneurs, et obtint la faveur demandée, mais l'heure de la mort sonna pour lui sur la terre étrangère, f juillet 448.
2° Dit de Paris, né à Autun 496, év. de Paris 554, f 28 mai 576, fondateur de l'égl. de Saint-Germain-des-Prés, fut en grande faveur auprès de Childebert et de Clotaire, excommunia Caribert pour ses débordements, et essaya en vain de réconcilier Sigebert et Chilpéric, désunis par Frédégonde. Il est connu surtout par son zèle pour le rachat des esclaves et par ses efforts contre l'immoralité.
3° Patr. de Constantinople sous l'emp. JeanUI. Lors des luttes entre les papes et les Orientaux, il écrivit à Honorius IU une lettre fort soumise 1223, mais aux cardinaux une autre lettre où il traite Rome de marâtre et attribue à ses exactions la scission des deux Églises.
4° Saint-Germain-en-Laye, ville de Seine-et-Oise, qui doit son origine à un monastère que Robert fit bâtir l'an 1000 dans la forêt de Laye en l'honneur de Saint-Germain de Paris. Elle possède un château célèbre où sont nés Henri II, Charles IX, Marguerite de Navarre, Louis XIV, et où séjourna Jacques II d'Angleterre, qui y est enterré. Une paix y fut signée le 8 août 1570 entre les cathol. et les protestants, et mit fin à la 3""» guerre de religion. Elle garantissait aux réformés l'amnistie, la liberté de conscience, le droit de célébrer leur culte partout où il existait le 1er août, dans les châteaux des seigneurs et dans deux villes de chaque gouvernement. En outre le traité leur confirmait pour 2 ans comme places de sûreté La Rochelle, Montauban, Cognac et La Charité. Deux ans après avait lieu la Saint-Barthélémy.
GERMANIQUE, v. Théologie.
GERMOND. Louis, né 23 avril 1795 à Lova-tens, Vaud; consacré 1819, pasteur à Sainte-Croix et à Yvonand, démissionnaire à la sécession de 1845. Fondateur de l'œuvre des diacon-nesses d'abord à Échallens, puis à Saint-Loup, il y f 1868. Prédicateur éminent, il a peu écrit. Il a laissé 3 fils, Henri qui l'a remplacé à Saint-Loup f 1882; Louis, pasteur et directeur d'une école normale de tilles à Lulry, et Paul, 23 ans missionnaire au sud de l'Afrique.
GERNLER, Luc, né 1625 à Bâle, y fut successivement diacre, puis second et premier pasteur, et enfin antistès, Dr en théol. et prof. Il était strict orthodoxe réformé. Il est avec Bux-torff et Wettstein un des auteurs du Syllabus controversiarum, manuel pour les étudiants. C'est lui qui a rédigé le premier projet du Consensus helvétique, 1671. f 1675.
GÉROCK, v. Gerhock.
GERSEN, Jean, moine bénédictin de Cava-glia, Piémont, un de ceux à qui l'on attribua le livre de l'Imitation, entre 1220 et 1240.
GERSON, Jean Charlier (de), surnommé le Docteur très chrétien; né 14 déc. 1363 à Gerson près de Réthel et Reims; l'aîné de 12 enfants; il fit ses études au collège de Navarre à Paris, fut licencié ès arts 1381, fit sa théol. sous d'Ailly et accompagna 1387 la députation de l'univ. auprès de la cour papale à Avignon, où il put se rendre compte par lui-même de la situation de l'Église. En 1392 il fut nommé Dr en théol., et en 1395 chancelier de l'univ. en remplacement de d'Ailly; en 1408 curé de Saint-Jean en Grève. Sage et courageux dans l'exercice de ces fonctions, il n'hésita pas, lors de l'assassinat du duc d'Orléans, à condamner le duc de Bourgogne qui en était l'auteur, et l'abbé Petit, qui s'en faisait l'apologiste. Ses talents comme politique ecclésiastique se révélèrent surtout à l'occasion du schisme, et des trois conc. de Pise, de Bâle et de Constance. Il se montra le ferme défenseur des maximes et des libertés gallicanes, et combattit avec la même résolution l'hérésie là où il croyait la voir et les désordres de la papauté. Dans ses écrits et dans ses discours il exposa les fautes de l'Église, la démoralisation du clergé, les vices des papes. Il soutenait que les conciles étaient les vrais représentants de l'Égl., que le pape était subordonné au concile, et pour mettre un terme aux divisions qui déchiraient la chrétienté, il demanda et obtint à Constance le renvoi des 2 papes régnants. Il n'y avait pas en lui l'étoffe d'un réformateur; il en avait la bonne volonté, mais ni la foi, ni les idées précises et arrêtées; il voulait bien qu'on lût la Bible, mais moyennant qu'on l'expliquât selon l'Église. Cependant il attaqua fortement la hiérarchie et plusieurs superstitions qui défiguraient le christianisme; il s'opposa à la canonisation de sainte Brigitte; il combattit la casuistique sophistique que les franciscains mirent surtout en avant au sujet du meurtre du duc d'Orléans. 11 fut exilé, et sa conduite à Constance ne servit pas à le réhabiliter; il avait voté la mort de J. Huss, mais dans l'intérêt de la piété il prit le parti des fr. de la Vie commune et se prononça contre la fausse religiosité de moines tels que les flagellants. La haine du duc de Bourgogne lui fermant le retour en France, il resta en Bavière jusqu'à la mort de son ennemi 1419, et se retira ensuite à Lyon, au couvent des célestins, dont son fr. était le prieur. Il y employa les dernières années de sa vie à prier, à écrire et à instruire de petits enfants dans les vérités chrétiennes; « car, disait-il, c'est par eux que la réformation doit commencer. » f *429. Sa tendance était mystique, mais sans rien du panthéisme qui caractérisait le mysticisme allemand: il faisait consister la religion dans la contemplation produisant l'amour et réglant la volonté de l'homme sur la volonté de Dieu. En philos, il était nominaliste, et sa méthode était scolastique. Il a composé de nombreux ouvrages, la plupart d'édification pure, entre autres: les Consolations de la théol., en 4 livres, écrit pendant son exil; Théol. mystique; Sur les intuitions de l'âme appliquées aux choses du ciel; Sur le droit des conc. de suspendre les papes, etc. Plusieurs auteurs, et des plus graves, lui attribuent aussi, mais à tort, le livre de l'Imitation, q. v. — Éloge de Gerson, par Faugère 1838.
GERTRUDE 1<> fille de Pépin de Landen, maire du palais des rois d'Austrasie, et d'IIde-berge. Née 626, elle se consacra à Dieu à 10 ans, fonda le couvent de Nivelle, dont elle fut la première abbesse, et f 659. — 2° sœur de saint Melchtildis; née à Eisleben, se fit religieuse 1294 chez les bénédictines de Rodersdorf et d'Helvelfucht, dont elle devint l'abbesse. f 1334. Elle eut des visions qui la rendirent célèbre, et qu'elle écrivit elle-même en latin sous le titre de Révélations. Les adeptes placent ce livre à côté de ceux de sainte Thérèse. Il a été publié d'abord par le chartreux Lanspergius f 1539, puis trad. en fr. par Mège 1674.
GERVAIS lo fils de Vital et de Valérie, a souffert le martyre, ainsi que son fr. Protais, à la fin du 1er siècle. Complètement inconnus l'un et l'autre, ils apparurent à saint Ambroise pour lui révéler le lieu où ils avaient été enterrés. L'év. de Milan ayant découvert ces restes, les plaça dans la basilique qu'il faisait construire, et qui porte encore auj. son nom. D'autres égl. à Paris, Genève, etc., portent le nom de ce saint, dont elles ont cru posséder quelques débris. — 2° Anglais de naissance, devenu abbé de Beau-vais 1195, et général des prémontrés 1206. f 1228. Auteur de Comment, sur les Petits prophètes et les Psaumes.
GESEMUS lo Juste, né 6 juill. 1601 à Es-beck, étudia à Helmstâdt, fut précepteur àléna, puis pasteur k Brunswick 1629, à Hildesheim 1636, et k Hanovre 1640, f 1673. Il est connu surtout par de beaux cantiques et par un Petit catéchisme qui a été longtemps en usage en Allemagne, quoiqu'on lui ait reproché une tendance cryptocatholique. — 2o Guillaume, né 3 févr. 1785 k Nordhausen, étudia à Helmstâdt et à Gottingue la théol. et la philologie, fut répétiteur et maître à Gottingue et Nordhausen, et depuis 1810 prof, de théol. à Halle; en 1827 il fut nommé conseiller consistorial. f 1842. Il fut avec Wegscheider un des chefs du rationalisme à Halle. Il a surtout rendu des services comme hébraïsant. Sa Grainm. héhr. a eu plus de 20 éditions; son Dict. hebr. allem. 1810 en a eu plus de 6: son Dict. hébr. lat. est très estimé. Ses Études sur la gramm. hébr. et son Comment, sur Ésaïe sont également importants.
GEX (Pays de). Cette petite contrée, située à l'extrémité du département de l'Ain et confinant k la Suisse, fut conquise en 1536 par les Bernois, qui y introduisirent la réforme et y placèrent des pasteurs. Rétrocédée au duc de Savoie en 1567, puis vers la fin du 16™* siècle, possédée par les Genevois, elle devint française en 1601. François de Sales, qui bientôt occupa le siège épiscopal d'Annecy, se hâta d'installer quelques curés dans le pays de Gex, où il réussit k enlever aux protestants leurs 25 églises, que ceux-ci remplacèrent par de nouveaux lieux de culte. Quoiqu'on en ait dit, l'illustre prélat n'obtint guère d'autres succès. Malgré ses efforts et ceux de ses successeurs, la masse de la population, rattachée au faisceau des Égl. réformées de France, et dirigée par des conducteurs spirituels dévoués, demeura fidèle aux croyances evangéliques. La démolition de 23 de leurs temples, acteinique accomplien 1662 parLouis XIV, qui préludait ainsi k la révoc. de l'Édit de Nantes, ne réussit point à ébranler les huguenots du pays de Gex. Un comité secret se constitua même pour prendre en main les intérêts de leurs églises, et rendit de précieux services. En 1685 tombèrent les deux derniers temples, et l'appréhension des dragonnades détermina les deux tiers des habitants k prendre la fuite. Les réformés qui n'émigrèrent pas furent peu à peu reconquis par l'Égl. romaine. Vers la fin du siècle suivant, quelques protestants sont rentrés dans la contrée. Auj. leurs égl. commencent k renaître; v. Fernex, et Hist. des égl. réf. du pays de Gex, par Th. Claparède.
GEYSA, 4me duc de Hongrie, fils du général Toxus exécuté en 955, monta sur le trône 972. Sa femme Sarolta, probablement fille du pieux chef Gylas, s'était convertie après une jeunesse un peu fougueuse, et ils travaillèrent ensemble à la propagation du christianisme. Sous l'influence de l'év. Piligrin, il entretint de bons rapports avec Othon I«r, mais l'avènement d'Othon II changea momentanément la face des affaires. Geysa eut un fils 983, qu'il nomma Waik et qui lui succéda sous le nom d'Étienne. | 997.
GHERLANDI, Giulio, de Sprezzano, dans le Trévisan, était membre d'une congrégation évangélique. Arrêté en 1559 d'abord, puis en 1561, il fut jugé à Venise et condamné à mort le 16 oct. 1562. Il fut noyé; ses dernières paroles furent: Au revoir, par delà!
GIBELINS, et Guelfes, noms des puissants partis qui, après avoir pris naissance en Allemagne, se transportèrent en Italie et la divisèrent du 12me au 14me siècle. Si l'on veut les caractériser d'un mot emprunté à la politique contemporaine, on dira que les guelfes étaient les cléricaux de l'époque, et les gibelins les libéraux ou les représentants de la société civile et laïque. Mais cette définition, vraie dans son ensemble, ne peut l'être dans ses détails; les partis subissent toujours certaines métamorphoses, ils se transforment avec les circonstances, et dans tous les temps on en a vu qui s'étaient organisés au nom de la liberté, la renier pour se maintenir. Les guelfes ont pu avoir le beau rôle, quand les papes luttaient pour la liberté des peuples contre le despotisme des rois et l'aristocratie féodale. A l'origine la lutte entre ces deux partis ne fut qu'une lutte d'ambition entre deux familles, dont les chefs se disputaient la couronne impériale. D'une part Conrad, fils de Fréd. de Hohenstaufen, seigneur de Waiblingen, ou Wiblingen, d'où par corruption est venu le nom de gibelin; de l'autre Henri-le-Superbe, duc de Saxe, neveu de Welf, ou Guelfe II, duc de Bavière. Conrad fut élu 1138, mais les guelfes refusèrent de le reconnaître, et à la bataille de Weinsberg, 1140, les noms des deux familles servirent pour la première fois comme cris de ralliement aux deux armées. Quelques années après, Guelfe III se réconcilia avec Conrad, et la maison renonçait à la lutte; sous Frédéric II Othon, dit l'Enfant, recevait le titre de duc de Brunswick, et les guelfes se sont maintenus jusqu'à nos jours dans les maisons de Brunswick, de Hanovre et d'Angleterre. Mais la paix faite en Allemagne, la division continua longtemps encore en Italie, où les guelfes étaient alliés à la puissante famille d'Esté. Un grand nombre de villes, lasses du joug des empereurs, entre autres Milan et celles de Lombardie, se proclamèrent libres et formèrent une ligue guelfe. Le pape se joignit à elles, pour se venger de l'emp. et de son rôle dans la question des Investitures. Cette ligue provoqua une ligue contraire, par l'initiative de Pavie, qui se déclara fidèle à l'empereur et se mit à la tête des gibelins. La guerre éclata en 1459, pour finir en 1250 par la défaite du parti impérial; mais trop de passions avaient été remuées pour que le calme pût renaître aussitôt, et la lutte continua, quoique sous une moindre échelle, entre des villes ou entre des familles, et c'est là que les circonstances particulières, les intérêts personnels, les jalousies, purent se donner carrière sous le masque de l'intérêt public, an point qu'il n'est pas toujours facile de dire lequel des deux partis servait la grande cause de l'indépendance nationale, quoiqu'elle fût plutôt représentée par les guelfes, et lequel était le plus soucieux de la dignité humaine et de la liberté religieuse, quoiqu'elle fût davantage dans le programme des gibelins. Le même homme, comme Dante, pouvait tour à tour appartenir à l'un et à l'autre parti; et la même ville, comme Florence ou Milan, pouvait voir les deux partis triompher l'un après l'autre; Rome même flotta entre les deux, et Rienzi lui donna un moment une constitution guelfe et démocratique. A la fin ces noms ne furent plus que des drapeaux, et ces puériles rivalités ne cessèrent que devant le danger commun, l'invasion française, 1495.
GICHTEL, Jean-George, né à Ratisbonne 14 mars 1638, étudia d'abord la théol. puis le droit, et s'établit comme avocat successivement à Spire et à Ratisbonne. Essentiellement mystique, nourri de Bœhme, il ne voulut plus connaître d'autre révélation que celle de Dieu en nous, et il s'attira les persécutions du clergé qui le fit emprisonner, bannir, et confisquer ses biens. Il se retira en Hollande, où il essaya de grouper quelques sectateurs, mais ils ne s'entendirent pas. Son désintéressement lui fit refuser des offres brillantes, et il + pauvre et abandonné 1710. Il a écrit Theosophia practica.
GIESELER, Jean-Ch.-Louis, né 3 mars 1795 à Petershagen près Minden; élevé à l'orphelinat de Halle, puis sous-maître; fit la guerre d'indépendance; sous-directeur au gymnase de
Minden 1817; directeur à Clèves 1818, Dr théol. et prof, à Bonn 1819, et à Gôttingue 8 juill. 1831. f 1851. Connu par son importante Hist. ecclés. et par ses recherches historiques puisées aux sources mêmes. Redepenning a publié les tomes V et VI de son Histoire.
GIESSEN, univ. fondée 1607 parle landgrave Louis (un moment transférée à Marbourg 1625), a représenté le luthéranisme pur, par opposition à Marbourg qui était réformé, et s'est fait un nom par la vivacité de sa dispute avec les théol. de Tubingue sur la doctrine de Christ et de son abaissement. Sa faculté cathol. reçut un coup fatal, lorsque l'év. Ketteler fonda à Mayence son séminaire de théol. 1851.
GIFTTHEIL, Louis-Fréd., Souabe qui, dans l'esprit de Breckling, écrivit pour la séparation de l'Égl. et de l'État. Il adressa aussi des exhortations aux princes et aux peuples contre la guerre et l'effusion du sang, f 1661.
GILBERT lo év. de Meaux 995, + 1015; canonisé. — 2° noble auvergnat, qui accompagna Louis-le-Jeune à la croisade de 1146; à son retour il se fit moine, fonda l'abbaye de Neuf-Fontaines, qui depuis porta son nom de Saint-Gilbert, et f 6 juin 1152. — 3<> (ou Guilbert) religieux anglais, né 1083 à Sempringham, Lin-colnshire, fonda l'ordre des gilbertins qui, tout en maintenant une séparation extér. rigoureuse, réunissait les couvents par paires, soumettait les nonnes à la règle de saint Benoît, et les hommes à celle d'Augustin, f 1189. L'institution ne sortit pas des limites de l'Angleterre. — kfi G. de la Porrée, Porretarws; né à Poitiers vers 1070, prof, de philos, et de théol. à Chartres, Paris et Poitiers; enfin év. de Poitiers 1142, f H54. Il s'était mis à la tête des Réalistes contre les Nominaux. Pour éviter toute apparence de sabellianisme, il croyait devoir distinguer la substance même de ta divinité des attributs qui en caractérisent les différentes personnes. Ses adversaires, entre autres Bernard de Clairvaux, l'accusèrent de trithéisme, mais sans pouvoir l'en convaincre. Le pape Eugène se contenta de décider qu'on ne peut séparer Dieu de sa divinité, ni sa personne de sa nature. Le conc. de Reims 1148 condamna quelques-unes de ses propositions; mais Gilbert était un vrai philosophe; il se rétracta pour pouvoir vivre en paix, et ne s'occupa plus que des soins à donner à sa paroisse. Son livre le plus remarqué est intitulé: Des six principes.
GILDAS lo saint, né 494 en Bretagne, + 570 ou 580, fonda près de Vannes le monastère de Rhuis, dont Afcélard fut abbé. — 2° autre saint, écossais, même époque; a laissé des ouvrages de piété. — 3o G. Cormac, moine de Bangor, Galles, né 516; le plus ancien écrivain connu de la Gr. Bretagne; a écrit une Hist. de la ruine de l'Angl., et une Lettre où il voit un châtiment de Dieu dans l'invasion du pays par les Anglo-Saxons, dont il fait un tableau effrayant. — Peut-être que ces trois n'en font qu'un.
GIRALDUS Cambrensis. Silvestre Girald de Cambrie, vieil écrivain anglais, né 1146 à Mai-narpir, près Pembroke, Galles, étudia à Paris jusqu'en 1172 et fut nommé 1175 légat archié-pisc. pour le pays de Galles, et év. de Brechene. En 1184 il était chapelain de Henri II et conseiller du prince Jean. Il prêcha la croix pour Richard Cœur-de-Lion, mais ne se croisa pas lui-même, et fut adjoint au chancelier pour gouverner le pays en l'absence du roi. Nommé év. de Menevia, il ne put obtenir la confirmation royale, et f vers 1220. Il a écrit une Topog. de l'Irlande, un Itinéraire du p. de Galles, un Journal de sa vie (assez prétentieux), un Miroir de l'Égl., où il censure sévèrement les vices des moines, etc.
GIRARD, Jean-Bapt., pédagogue suisse, né 17 déc. 1765 à Fribourg, lit de bonnes études classiques chez les cordeliers de Lucerne, et montra de l'aptitude pour la philos, et les sciences naturelles. Il étudia la théol. à Wurzbourg, mais fut repoussé par la sécheresse des formules de l'école, et se mit à étudier l'Évangile, qui exerça sur lui une grande influence. Ordonné prêtre en 1790 par le prince év. de Wurzbourg, il remplit ses fonctions à Fribourg, et depuis 1799 à Berne, où Stapfer l'avait appelé. Son canton lui confia dès lors la direction de l'école primaire, et par son Cours de langue maternelle, par sa méthode d'enseignement, qui obtint un immense succès, il souleva les méfiances du clergé, et son école lui fut retirée 4 juin 1823. Prof, de philos, à Lucerne jusqu'en 1835. A 70 ans il rentra dans son couvent de Fribourg, retravailla son cours, touj. avec la pensée que la famille et la religion doivent être à la base de l'enseignement. Couronné par l'Acad. franç. 1844, décoré par Cousin, + 6 mars 1850. Statue à Fribourg. Notice, par E. Naville. Vie, par Daguet.
GISLEMAR, moine de Corbie, compagnon d'Ansgar dans sa mission du nord; il resta en Danemark, pendant qu'Ansgar se rendait en Suède.
GLAREANUS, c.-à-d. le Glaronnais; surnom de Henri Loriti, né 1488 à Mollis, Gla-ris. Humaniste comme Érasme, il sympathisa d'abord avec les réformateurs, mais plus par l'intelligence que par un sentiment religieux, et quand la réforme lui parut dépasser les bornes qu'il aurait voulu lui fixer, il se retourna contre elle, se brouilla avec Zwingle, Myconius, QEcolampade, et se retira de Bâle à Fribourg, à Cologne, enfin à Paris où il fonda un pensionnat pour les étudiants, auxquels il expliquait les anciens. Il enseigna aussi les belles-lettres au Collège de France 1526. Retraité 1560, il f à Fribourg 1563. Il a laissé un grand nombre d'ouvrages sur la musique, la géographie, etc.
GLARIS. La Réformation y fut introduite en 1529; chaque paroisse fut laissée libre de choisir entre la confession catholique et la conf. réformée; cette dernière l'emporta dans presque toutes les communes. Grâce au ministère de Zwingle, l'Égl. se rattacha au synode de Zurich; depuis 1621, elle a son synode particulier. Nouv. Constit. ecclés. depuis 1846.
GLASSIUS, Salomon, hébraïsant connu par ses Philologia sacra, Dr théol. à Iéna, surintendant à Gotha, seconda le duc Ernest dans ses efforts pour réformer l'Égl. et l'instruction publique. Né 1593 à Sondershausen, f 1656.
GLOSE, courtes réflexions explicatives, écrites en marge des mss. des saints livres, et qui parfois se sont glissées dans le texte, intentionnellement ou par une distraction du copiste. On donne aussi le nom de Glose à une collection de ces notes marginales, telles que celle de Walfroi de Reichenau. Des notes plus courtes encore, et ne portant que sur un mot, s'intercalaient entre les lignes et sont appelées gloses interlinéaires; ainsi celles d'Anselme de Laon. Les gloses n'étaient pas seulement exégétiques; elles pouvaient être histor. et dogmatiques. Plus tard, dans les mss. de la Bible, les gloses furent mises immédiatement à la suite du texte ou du fragment auquel elles se rapportaient.
GLOSSATEURS. On appelle ainsi tous ceux qui, non seulement pour la Bible et pour les classiques, mais pour les livres de droit canonique et romain, ont interprété les textes au moyen de notes marginales ou interlinéaires, comme l'ont fait, p. ex. les disciples de Gratien à Bologne pour la Ire partie du Corpus juris. Une collection raisonnée de ce genre de gloses fut tentée 1212 par Jean le Teuton, f 1240 comme doyen d'Halberstadt. Son travail, perfectionné 1236 par Barthélémy de Brescia, fut généralement admis comme glose ordinaire. 11 y a de même une glose ordinaire pour les autres parties du Corpus juris; celle de Bernard de Botono, f 1266, pour la collection des décrétais de Grégoire IX; celle de Jean Andreâ, t 1348, pour 1 eLiberSextus et les Clémentines, etc.
GNADENFELD, colonie morave de la Haute-Silésie, fondée 1781. Le séminaire de théol., qui était à Barby depuis 1754, y a été transporté 1818. Plusieurs stations missionnaires de l'Amérique du Nord ont reçu ce même nom, qui signifie champ de grâce.
GNAPHIEUS (de Volder), né à La Haye 1493, recteur en 1522. Persécuté et deux fois emprisonné pour ses convictions évang., il quitta son pays et fut successivement recteur à
Elbing 1536-1543, et à Kônigsberg. Là encore il fut tracassé par le luthéranisme outré de Sta-phylus, puis excommunié 9 juin 1547, et privé de sa place, f Norden 1568.
GNESEN, la plus ancienne ville de la Pologne, doit sa notoriété ecclésiastique aux funérailles d'Adalbert 987. Elle fut détachée de Magdebourg et érigée en archevêché Pan 1000, lors du pèlerinage de l'emp. Othon. L'archev. Henri introduisit le célibat des prêtres dans son diocèse en 1200, et reçut à cette occasion pour lui et ses successeurs le titre de légat-né. Nicolas obtint en 1416 le titre de primat, auquel s'adjoignit plus tard, dans le royaume devenu électif, la qualité d'administrateur du royaume. L'archevêché disparut avec le partage de la Pologne, et le pape réunit le diocèse à celui de Posen par sa bulle De salute anim., tout en lui laissant son chapitre distinct et un év.suffrag.
GNOSTICISME, Gnostiques. Dérivé du mot grec gnôsis, connaissance plus approfondie de l'essence et des rapports intimes des doctrines religieuses, ce nom n'a rien en lui-même qui froisse l'idée chrétienne. Mais ceux qui se le sont attribué, l'ont distrait de son sens naturel, et lui ont donné une signification que l'on doit repousser pour trois motifs. Ils entendaient par là une science des parfaits, qui ne pouvait être comprise que des spirituels, en opposition à la foi d'autorité commandée aux simples et qui ne visait que l'enveloppe symbolique des idées; cette tendance est condamnée par Matt. 5, 3.11, 25. 1 Cor. 1, 19. Ils distinguaient deux sortes de personnes, les spirituels et la multitude. Ils regardaient la révélation comme insuffisante et croyaient pouvoir la compléter ou la redresser, soit par de vieilles traditions dont ils avaient le secret, soit par ce qu'ils appelaient la lumière intérieure. Enfin ils appliquaient leur gnôsis à la connaissance des choses immuables, telles que la substance émanée de Dieu, l'origine du monde, celle du mal, tandis que Paul cherchait en Christ tous les trésors de la sagesse et ne voulait connaître autre chose que Christ crucifié. Le gnost. n'est donc pas un système unique et précis, mais une direction de l'esprit humain; il est antérieur au christianisme, et l'on en retrouve les éléments dans la cabale juive, comme dans la philos, grecque et dans la métaphysique orientale. L'homme a besoin de s'expliquer même ce qui lui échappe; l'école d'Alexandrie, puis le néo-platonisme naquirent de ce besoin, et le christianisme lui-même entra dans cette voie, son caractère pratique ne répondant pas aux nombreuses questions que soulève l'étude de l'infini, et Ton s'habitua peu à peu, même au sein de l'Église, et tout spécialement à Alexandrie, à mettre au-dessus de la foi, bonne pour la masse, la science, la gnôsis, comme un organe mieux fait pour s'assimiler les vérités éternelles. La philos, néo-platonicienne est plutôt la sœur que la mère du gnosticisme, enfanls l'un et l'autre de la philos, orientale. Ce qui caractérise le gnost. chrétien, ce qui le distingue des autres systèmes, c'est qu'il s'empara de la doctrine de la rédemption; sa grande idée est celle de la restauration de l'harmonie détruite de l'univers, le retour d'une création déchue à son état primitif, la réunion du ciel et de la terre, la manifestation d'une vie divine dans l'humanité, idées toutes chrétiennes, mais qui devenaient méconnaissables par les additions dont on les compliquait. En général les gnostiques distinguaient trois natures humaines, ou trois classes d'hommes: les pneumatiques, ou spirituels; les psychiques, ou ceux de la foi moyenne et aveugle; et les hyli-ques, ou purement matériels. Quant à leurs erreurs, il faut distinguer celles qui n'avaient aucun rapport avec le christianisme, et celles qui étaient propres aux gnost. chrétiens. Les premières, communes à tous les gnostiques, étaient de deux sortes: 1° métaphysiques; ils reconnaissaient 2 êtres éternels, Dieu éloigné de tout mal, et la matière, étrangère à Dieu, sinon ennemie; avec une 3™e autorité, le démiurge, créateur du monde, dont l'intervention amène tout le drame de la chute et de la rédemption; 2° morales: ils estimaient que le mal a son principe dans la constitution du corps, dans la satisfaction des convoitises sensuelles. Ils admettaient en général: les Syriens, la doctrine d'Ahriman; les Alexandrins, l'opposition, mais sans hostilité, de la matière à l'esprit; du néant, du kèn&ma, au plêrôma, à la plénitude de la vie divine; l'ombre à côté de la lumière. De Dieu sortent des émanations, ou éons, en plus ou moins grand nombre, qui représentent des vertus, des puissances, et qui vont se perfectionnant sans cesse. A l'échelon inférieur se trouve l'être qui. aveuglé par l'orgueil, jaillissant dans le chaos qui l'avoisine, vivifie la matière morte, et forme ainsi une création, mais défectueuse, en dehors du monde des émanations; c'est Satan. C'est le dualisme oriental que la philos, occidentale a cherché à ramener à l'unité. Dans le monde ainsi créé se trouvent donc les trois éléments, pneumatique, psychique et matériel, entre lesquels les hommes eux-mêmes sont partagés, et dont le second forme le domaine propre du démiurge qui l'a créé, et que plusieurs font le Dieu des juifs.
Si le démiurge a troublé l'harmonie de l'ensemble, l'éon Christ a pour mission de rassembler les éléments divins dispersés dans le monde et de les restaurer dans leur état primitif. Pour cela il doit s'unir à l'homme Jésus et recevoir la communication de la conscience divine, ou gnôsis. Selon les juifs d'Alex, le Dieu souverain gouvernerait le monde au moyen d'anges, dont le chef, un dieu subordonné, un dieu en second, régirait la terre par des lois que lui-môme ne connaîtrait pas; le peuple de la théocratie aurait été remis au démiurge, suivant Deut. 32, 8. 9. Le monde de l'A. T. ne serait que le symbole d'un ordre de choses très supérieur. L'Israël selon la chair, ou les psychiques, ne l'auraient pas compris, et auraient confondu le Dieu souverain avec le créateur du monde; les spirituels au contraire, ou gnosti-ques, auraient contemplé les choses divines. C'est le christianisme qui a dévoilé et réalisé l'idée supérieure de la théocratie. Quant à la morale, les uns reconnaissaient que les choses terrestres venaient de Dieu et lui étaient consacrées; les autres, et notamment ceux qui avaient été d'abord opposés à toutes les religions populaires, comme les Perses, affectaient un profond mépris et une haine décidée pour le monde, et se livraient les uns à un ascétisme exagéré, les autres à toutes leurs convoitises pour braver la matière et montrer combien peu ils se laissaient troubler par elle. Ces résultats opposés expliquent peut-être certaines contradictions apparentes des écrivains ecclésiastiques. Voilà pour les dualistes. Quant aux panthéistes, qui faisaient tout découler de l'être divin et incompréhensible, et qui regardaient tout le reste comme indifférent, soit bien, soit mal, ils se livraient aux plus honteux désordres au milieu de leurs contemplations; v. Porphyr. De abstin. Leur prétention de s'appuyer sur la Bible aboutissait à y chercher des preuves à l'appui de leur système formé d'avance, et ils distinguaient entre les discours de l'homme Jésus et ceux de l'Intelligence suprême qui était en lui. Malgré cela ils ne voulaient pas se séparer de l'Église et ils se plaignaient que des chrétiens rompissent sans motifs la communion avec eux. — On a diversement classé les systèmes gnostiques. Gieseler les divise en alexandrins, avec prédominance du parsisme, ou dualisme. Nèander distingue les judaïsants, comme Cérinthe, Basilides, Valent in, Bardesanes, et les non-judaïsants. Ces derniers à leur tour se partagent en paganisants, comme les ophites, les pseudobasilidiens, les caïnites, les séthites, Carpocrates, et christianisants, comme Saturnin, Tatien, les encratites, Marcion. Baur(1835) distingue ceux qui veulent concilier le christianisme au paganisme et au judaïsme, tels que Basilide, Valentinien, etc. 2<> Ceux qui l'opposent aux deux autres, comme Marcion, et 3° ceux qui, identifiant le christianisme et le judaïsme, les opposent l'un et l'autre au paganisme, comme les Clémentines. V. les diff. art., et Matter, Hist. critique du Gnosticisme, 1843.
GOAR 1° Jacques, savant dominicain, né 1601 à Paris, prof, de philos, à Toul, prieur des dominicains à Chios 1631, vit de près l'Égl. grecque, publia l'Euchologe des Grecs, passa à Rome comme prieur 1640, et s'établit enfin à Paris où il f 1653 vicaire général de son ordre. — io Ermite du 9m« siècle, que la légende fait vivre sous Childebert 1er sur les bords du Rhin, prêchant aux païens et exerçant l'hospitalité. Accusé auprès de l'év. Rusticus de Trêves, il se justifia par des miracles et retourna dans sa cellule. Son corps repose dans la crypte de la cathédrale. Charlemagne donna le couvent de Saint-Goar à l'abbaye de Prîlm. — 3° La ville de Saint-Goar reçut la réformation 1527 parles soins d'Adam Kraft. Prise par les Espagnols 1629-1631,elle fut délivrée par Gustave-Adolphe.
GOBAT, Samuel, né 26 janv. 1799 àCrémine, Jura bernois, entra en 1821 à l'Institut des missions de Bâle, en 1823 à celui de Paris, puis â Londres pour étudier l'arabe, l'éthiopien et l'amharique. Il passa ensuite avec son ami Kug-ler, au service de la Church Missionnary Society qui l'envoya de 1829-1833 à Gondar, Abyssinie, mais son séjour ne produisit pas de résultats apparents, à cause des circonstances défavorables dans lesquelles il se trouvait. Il y revint plus tard, sans beaucoup plus de succès. En 1845, après un repos de quelques années, la Soc. des missions de Londres le nomma directeur de son gymnase missionn. à Malte où il eut à diriger et à surveiller aussi la traduction et l'impression de la Bible en arabe. Enfin en 1846 le roi de Prusse Fréd.-Guill. IV, qui était son ami, l'appela, d'accord avec Bunsen, au siège épiscopal protestant de Jérusalem. Cet immense évêché, le plus grand du monde, comprend F Abyssinie, l'Égvpte, l'Arabie, la Syrie et la Caldée, mais avec un nombre peu considérable de ressortissants. Gobât l'a administré pendant 33 ans avec un tact et une fidélité à toute épreuve, épiscopal quant à son ministère officiel, mais large et libre d'allures dans ses rapports avec tous les chrétiens de Jérusalem. Les patriarches grec et latin l'estimaient, le pacha le consultait volontiers. L'orphelinat syrien, l'hôpital des lépreux et d'autres œuvres d'un caractère général, restent comme un monument de son passage. En 1878 il fit un dernier voyage en Europe et t le dimanche 11 mai 1879 peu après son retour à Jérusalem. Sa femme était la fille du vénérable Zeller de Beuggen. Il a laissé plusieurs enfants qui sont tous au serv ice de Dieu.
GOCH, Jean-Pupper, un des précurseurs de la Réforme. Né à Goch au commencement du 15me siècle, il devint inoineà Malines, et passa en 1451 comme recteur et confesseur au couvent de diaconesses qu'il avait fondé à Tabor. f 1475. Il a écrit, en latin: Des quatre erreurs, et De la liberté chrétienne; sa tendance est franchement biblique et augustinienne, et il a combattu avec vigueur le cathol. romain et le pélagianisme de son époque, v. Ullmann, les Réformateurs avant la Réforme.
GODARD lo ou Gildard, év. de Rouen au 6™ siècle, assista au conc. d'Orléans 511, et déploya un grand zèle dans son diocèse, f vers 525. Enterré à Rouen dans une égl. qui porte encore son nom. Quelques-uns le font frère de saint Médard, mais sans preuves suffisantes.
2o Godard, ou Gothard, saint très peu connu, qui a donné son nom à Tune des plus hautes montagnes de la Suisse. Né vers 960 à Reiten-bach, Bavière; puis moine et abbé du couvent deNieder-Altaich. Sur l'appel d'Henri 11, il réforma plusieurs couvents, Hersfeld, Tegernsee, Kremsmunster, et succéda comme év. à Bernard de Hildesheim, dont il continua les traditions d activité et de piété, f 1038. Déjà de son vivant on lui attribuait des miracles; canonisé 1132.
GODEAU, Antoine, né 1605 à Dreux. Spirituel et tournant bien les vers, il se fit une réputation à l'hôtel Rambouillet et gagna la protection de Richelieu. Il traduisit en vers pour le puissant ministre le Benedicite, ou les Grâces que l'on prononce à table, et pour sa récompense, jouant sur le mot, Richelieu le nomme év. de Grasse. Sa trad. des Psaumes en vers n'a pas grande valeur, mais il a composé d'autres ouvrages plus sérieux, qui valent mieux; son Hist. de l'Église est appréciée, f év. de Vence 1672.
GODEFROI de Bouillon, né 1061 à Bézy, près Nivelle, Flandre; fils d'Eustache de Boulogne, et neveu du duc Godefroi de Lorraine, duc de Bouillon, qui le fit son héritier. Il combattit fort jeune pour Henri IV contre le pape, fit des merveilles à la bataille d'Unstrut 1080 et entra dans Rome les armes à la main. A la suite d'une grave maladie il fit vœu de servir la cause de l'Égl. chrétienne, et il fut l'un des premiers k se croiser à rappel de Pierre 1 ermite. Il vendit son duché de Bouillon, partit 1096 pour la Terre-Sainte, fut bientôt reconnu chef de la Ire croisade, q. v., et arriva à Jérusalem 1099. Nommé protecteur du Saint-Sépulcre, il s'assura par la bataille d'Askelon la possession de la partie méridionale du pays. Proclamé roi de la ville sainte, il se contenta du titre de baron, et laissa au patr., comme à son seigneur légitime, l'autorité, même temporelle, du nouveau royaume. Il donna à ses sujets un code de lois, les Assises de Jérusalem, + 18juill. 1100, eu revenant d'une expédition contre le sultan de Damas; on croit qu'il fut empoisonné. La légende raconte- de lui des faits d'armes extraordinaires. Le Tasse en a fait le héros de sa Jérusalem délivrée.
GODESCALC, v. Gottschalk.
GOERRES, Joseph, né à Coblence 25 janv. 1776, fut dans la première partie de sa vie le représentant inspiré de l'indépendance de son pays, dans la seconde le représentant le plus autorisé du cathol. moderne avec ses prétentions et ses tendances réactionnaires. En 1796, sous l'influence des idées françaises, il publia la Feuille rouge, qui lui valut en 1799 d'être envoyé à Paris, où il put voir de plus près ce que l'Allemagne avait à attendre de la France. De 1814-1816 il rédigea le Mercure du Rhin, qui lui fit perdre sa place de directeur de l'instruction publique à Coblence. Ses études sur la mystique du catholicisme, sur la cathédr. de Cologne, etc., tournèrent ses pensées vers le romantisme religieux du moyen âge, et il espéra qu'il pourrait peut être ainsi réaliser son idéal politique, l'Allemagne sous l'Autriche. Prof, d'hist. à Munich dès 1827, il ne cessa pas d'écrire et de faire écrire, dans un style touj. plus fougueux, jusqu'à sa f 27 janv. 1848. — Son fils Guido (1805 à 1852) continua la publication de ses Feuilles historico-politiques, et y ajouta des Chants de Marie, l'Assaut diabolique, etc.
GOESCHEL, Ch.-Fréd., né 7 oct. 1784 à Lan-gensalza; juriste, auteur d'une Chronique de sa ville natale 1818, conseiller au ministère de la justice, présid. de consistoire à Magdebourg; connu par plusieurs écrits importants sur Dante, contre Strauss, sur l'Accord de la philos, de Hegel avec le christianisme, etc. Sa tendance devint de plus en plus confessionnelle et ecclésiastique; il se prononça énergiquement contre Wislicenus, Uhlich et les Amis des lumières; donna sa démission quand on leur eut accordé l'usage en commun d'un des temples de la ville, et dut quitter Magdebourg devant l'irritation de la population, 1848. Il se retira à Naumbourg, où il f 22 sept. 1862.
GŒTTINGUE. L'auc. principauté de Kalen-berg, dont Gcittingue faisait partie, fut réformée par la femme d'Erich, Élisabeth, fille de Joachim de Brandebourg, qui appela Corvinus comme surintendant. Les États adoptèrent la Réformation 1540, et les ordonnances ecclés. 1542. L'univ. fut fondée 1733 et inaugurée 17 sept. 1757.
GOETZE, Jean Melchior, né 15 oct. 1717 à Halberstadt, élève de Iéna et de Halle, pasteur à Magdebourg, puis à Hambourg; connu surtout par sa controverse avec Lessing, au sujet des Fragments de Wolfenbuttel. Chretien convaincu, il était aussi un savant de premier ordre. f1786.
GOMAR, François, né à Bruges 30janv. 1563, étudia à Strasbourg sous Sturm, puis à Neustadt et à Heidelberg, fut pasteur à Francfort s. M. 1587-1594, puis prof, de théol. à Leyde, à Saumur, 1614, et à Groningue 1618. f 1641. Il est connu par la persévérance avec laquelle il ne cessa de combattre les doctrines de son collègue Arminius, et par le rôle prépondérant qu'il joua au synode de Dordrecht. Ses partisans furent nommés gomaristes. OEuvr. compl. Amsterdam 1645 et 1664.
GONDI, v. Retz.
GONFALONIER, v. Confréries.
GONTHIER, Franr.-Aug.-AIph., né 21 déc. 1773 à Yverdon, étudia la théol. à Lausanne; pasteur à Nimes 1805, puis à Ballaigues et à Saint-Cergues, dans le Jura vaudois. D'une santé délicate, il redescendit dans la plaine, fut 3 ans pasteur à Rolle, en 1821 diacre à Nyon. Peu il peu il c^ssa de prêcher et se contenta (récrire, f 1834. On Fa comparé à Fénelon à cause de sa piété douce et de son éloquence persuasive. Sa théol. était celle du réveil. Auteur de quelques Nouvelles, de Lettres et de Lectures chrét. et d'une Petite biblioth. des Pères de l'Égl. Notice par L. Vulliemin.
GONZAGUE, v. AIoïs.
GONZALO de Berceo, prêtre séculier espagnol 1198-1268. On a conservé de lui 9 poèmes: sur la messe, le jugement dernier, la vierge Marie, la vie de Dominique, etc., que Fon regarde comme ayant une vraie valeur, et comme ayant inauguré la poésie relig. espagnole et frayé la voie à la poésie catholique.
GORDIUS, ou Gordien, capitaine à Césarée; chassé par les persécutions de Dioclétien, il passa quelque temps dans la solitude, ofi il fortifia sa loi. Il profita d'une fête en l'honneur de Mars, qui avait rassemblé beaucoup de monde, pour reprocher à la foule ses goûts idolâtres. Le juge essaya en vain de le faire sacrifier aux idoles; promesses, menaces, rien ne servit; il périt sur le bûcher, en vrai soldat de Jésus-Christ, 3 janv. 306.
GORIUN, contemporain d'Esnik, l'un et l'autre disciples de Mesrope, év. de Georgie. Il fut un de ceux qui furent envoyés d'Arménie à Constantinople pour acheter et trad. des ouvrages grecs. Auteur d'une Vie de Saint-Mesrope; v. de Wette.
GOSSNER, Jean-Evangelista, né à Hausen, près Augsbourg en 1773, étudia à Dillingen sous Sailer et Zimmer, entra au collège d'Ingolstadt 1793, et en sortit 1797 comme chapelain auxiliaire. Il prenait au sérieux les questions de la vie et de la foi chrétiennes, et ses rapports avec Martin Boos ne firent que l'affermir davantage, sans que les persécutions des jésuites réussissent à l'ébranler. Curé de Dirlewang 1804-1811, il vint ensuite à Munich où il vécut d'un petit bénéfice, écrivant et prêchant beaucoup. Déposé 1817 à cause de ses sentiments religieux, il fut en 1819 nommé maître de religion à Dusseldorf. De 1820-1824 il vécut à Pétersbourg où la communauté l'avait appelé comme son pasteur. De là il vint à Leipzig, où il abjura formellement le catholicisme 1826. En 1827 il fut nommé pasteur de Fégl. de Bethléhem à Berlin, f 20 mars 1858. Son influence s'est étendue bien au delà des frontières de sa paroisse et de son pays. Son Catholicisme primitif a été trad. dans presque toutes les langues de l'Europe; il entretenait 140 missionnaires dans les pays païens; il avait formé de nombreuses associations d'hommes et de femmes; son journal L'Abeille (Die Biene) ranimait chaque mois le zèle et la piété de ses lecteurs; son Petit trésor (Schatz Kœ$tlein 1824), et ses Grains d'or (Goldkœrner 1859) se trouvaient dans toutes les maisons pieuses; ses prédications attiraient la foule, et même les grands de la cour. Gossner est un exemple de plus de ces hommes pieux qui ont rêvé la réforme de leur Église et qui ont fini par comprendre qu'ils rêvaient l'impossible.
GOTHS. Peuplade germanique, que l'on rencontre pour la Ire fois sur les bords de la Vis-tu le, ou dans le pays des Boïens, Boiohemum (Bohême? Bavière?); elle s'empara bientôt de la Scandinavie centrale et méridionale, où son nom s'est perpétué sous la double forme de Go thie et de Jutland; elle porla ensuite le nom de Gothons dans ce qui est aujourd'hui la Prusse, puis celui de Gètes sur les rives du Danube. La vraie date et le berceau de cette tribu se perdent naturellement dans les ténèbres d'une époque où il n'y avait pas de géographes pour les constater. Leur histoire ne commence guère qu'au siècle. De la mer Noire et du Danube ils menacèrent de bonne heure Femp. romain. Caracalla les repoussa 215, mais ils renouvelèrent à plus, reprises leurs incursions, soit en Europe, soit en Asie, et les empereurs eurent fort à faire à protéger leurs États. Valérien dut rassembler contre eux toutes ses légions; Claude II les refoula dans la Dacie trajane et reçut pour ses victoires le surnom de Gothique. C'était la vieille lutte de la civilisation contre l'état sauvage; mais il y eut plus encore. De part et d'autre on faisait des prisonniers, et les Goths se trouvaient ainsi en contact direct avec les chrétiens. Philostorge et Sozomène parlent déjà de Goths convertis, et Basile précise davantage en disant que l'Évang. leur fut apporté par un docteur chrétien, prisonnier, nommé Eutyche. Constantin les battit en plusieurs rencontres, puis il fit la paix avec eux et chercha à se les attacher comme alliés, en en prenant 40,000 à sa solde; il s'en servit aussi pour rétablissement de Constantinople, et le fait même de cette noa-velle capitale multiplia les rapports entre les Goths et les chrétiens et détermina de nombreuses conversions, qui réjouissaient Athanase. Des églises se multipliaient parmi ces pépies; un évêqne goth, Théodosë, assistait au conc. de Nicée, et Ghrysostome à la fin du 4®* siècle fait bâtir un temple spécialement destiné au culte en langue gothique. Cyrille de Jérusalem avait déjà constaté, 343, que les Goths avaient des évêques, des prêtres, des moines, des religieuses et des martyrs. Les persécutions sous les emp. ariens, en exilant les pasteurs chrétiens, en avaient fait des missionnaires et avaient ainsi contribué à l'évangélisation des peuples de l'Asie Mineure; l'év. Audius en particulier avait travaillé parmi les Goths. C'est à peu près à ce moment, vers 355, que parut Ulprfiilas; fuyant les persécutions, il vint avec un grand nombre de chrétiens chercher un refuge sur le territoire romain. Athanaric fit des martyrs 370. Son rival, Fritiger, roi des Visigoths, persécuta aussi les chrétiens, mais faiblement et peu soucieux de se brouiller avec Constantinople. Il finit même par se convertir et son peuple le suivit, mais Valens, en traitant avec les délégués visigoths, et en leur donnant des terres en Mésie, exigea qu'ils se fissent ariens; Ulphilas y consentit par faiblesse plus que par conviction. En 380 Théodose conclut un traité de paix avec Athanaric, successeur de Fritiger. Depuis deux siècles, par le fait de leur nombre et de leur extrême dispersion, les Goths, tout en n'étant qu'un peuple, s'étaient partagés en 3 branches distinctes, qui correspondaient d'abord à la position qu'ils occupaient: les Ostrogoths à l'est, ou orient, du Borysthène (Dnieper) au Tanaïs; les Visigoths à l'ouest, du Tibisque au Borysthène, et les Gepides près des sources de la Vis-tule, sur le revers des Carpathes. Poussés par les Ostrogoths qui fuyaient devant les Huns, les Visigoths avaient cherché un refuge sur le territoire romain, mais ces réfugiés ne tardèrent pas à parler en maîtres, et après la défaite de Valens 378 ils conservèrent la Thrace et la Mésie, et firent, sous la conduite d'Alaric, une marche conquérante par le Péloponèse et l'Illy-rie snr Rome et l'Italie méridionale, donnant au paganisme le dernier coup par la destruction de ses temples dont ils s'appropriaient les trésors. Ataulf, frère et successeur d'Alaric, fonde une monarchie passagère dans la Gaule méridionale et en Hispanie, avec Toulouse pour capitale. La question religieuse fait sa faiblesse. Les catholiques supportent impatiemment un joug arien, Clovis exploite cette cause de division^ et la bataille de Vouillé 507 met fin au royaume visigoth des Gaules, qui biendtt transporte son siège en Espagne. Tolède est sa nouvelle capitale et plusieurs conciles s'y réunissent; les év. sont un peu les maîtres; Reccared, fils de Léovigild et d'une mère catholique, convoque un synode, renonce à l'arianisme, se déclare soumis à l'Église; les év. ariens en font autant et l'unité religieuse règne dans tout le royaume. Mais, dans cette monarchie presque élective, la puissance du clergé va croissant; les rois qui se succèdent sont renversés ou rais de côté s'ils essaient de rétablir une certaine discipline, comme Reccasuinthe. ou de limiter au spirituel la compétence des évêques, comme Witiza qui interdit les persécutions des juife et qui s'empara de quelques biens ecclésiastiques. Il en résulta une guerre civile; les fils de Witiza appelèrent à leur aide le calife Musa, et les Arabes mirent fin au royaume visigoth, dont les faibles restes se réfugièrent dans les montagnes des Asturies et de la Galice. Quant aux Ostrogoths, vaincus par les Huns, ils reprirent leur liberté à la mort d'Attila 453 et se fixèrent en Pannonie et en Thrace, continuant de guerroyer sous leurs rois Casimir, Théodemir et Widimir, jusqu'au jour où Théodoric-le-Grand, sous le règne nominal de Zénon, détruisit en Italie le royaume d'Odoacre et fonda le royaume ostrogoth 475. Après 30 années de prospérité la décadence commença, la décomposition fut rapide; Bélisaire fit prisonnier le roi Vitigès 540; en 556 Narsès défit Totilas; les Ostrogoths passèrent en Norique et cessèrent dès lors d'exister comme nation. Sauf quelques tribus évangéli-ques restées en Crimée et auxquelles Chrysos-tome avait envoyé un èvêque, les Ostrogoths étaient ariens comme les Visigoths, et ce fait a contribué peut-être à précipiter leur fin, en poussant les cathol. à s'unir touj. plus intimement avec ceux de Constantinople, tandis que les Goths restaient isolés au milieu de l'empire.
— Version gothique de la Bible, v. Ulphilas.
— On appelle improprement style gothique un genre d'architecture où l'arabe se joint au roman, et où l'ogive qui lui sert de base permet de donner à l'édifice quelque chose de fin et d'élancé. La forme même de l'ogive agit et déteint sur tous les autres détails de l'architecture, frises, piliers, arceaux, fenêtres, rosaces, tours, etc. Les colonnes, en particulier, par la richesse et la variété de leurs formes, ont quelque chose de svelte qui fait oublier leur force pour ne laisser voir que leur élégance; la masse disparaît sous la richesse des ornements. Les plus vieilles égl. gothiques sont Notre-Dame de Trêves 1227 à 1244, et Sainte-Élisabeth de Marbourg 1235. Les plus remarquables sont celles de Cologne, commencée 1218, et de Strasbourg 1275.
GOTHARD, v. Godart.
GOTTSCHALK 1° ou Godescalc, ou Gotescalc, moine saxon, né vers 806, vécut d'abord dans l'abbaye de Fulde, sous la direction de Raban Maur, qu'il supportait impatiemment, et finit par entrer au couvent d'Orbais, près Soissons. Nourri de la lecture de saint Augustin dès sa jeunesse, il fit de la doctrine de la prédestination l'âme de sa vie chrétienne, et reçut le nom de Fulgence à cause de son zèle pour la répandre. En 847, revenant d'un pèlerinage à Rome, il s'arrêta dans une vallée du Piémont chez le comte Eberhardt, gentilhomme de la cour de Lothaire, où il trouva aussi Nothing, év. de Vérone. 11 exposa à ses amis ses vues sur une double prédestination, dépassant peut-être en cela la doctrine d'Augustin qui appelle les uns prœdestinati, les autres seulement presciti; mais déjà avant lui un autre Fulgence 520 et Isidore de Séville 595 avaient employé l'expression de prœdistinatio duplex. Nothing dénonça Gott-schalk à Raban devenu archev. de Mayence, et celui-ci, dans deux lettres très amères, condamna l'hérésie de Gottschalk. L'accusé s'empressa de se rendre à Mayence pour se justifier 848, mais il fut condamné la mêmè année par un concile auquel assistait l'empereur, et il dut comparaître devant son métropolitain, Hinc-mar, comme un moine vagabond qui sème des opinions funestes. Hincmar convoqua un concile à Kiersy-sur-Oise 849, et Gottschalk fut condamné à être battu de verges publiquement et à se rétracter. La première partie de la peine était plus facile à exécuter que la seconde. Il fut jeté dans les prisons du couvent de Haut-villiers et traité avec une extrême rigueur. Hincmar essaya de le ramener en lui envoyant des confessions de foi ambiguës, mais il ne se laissa pas séduire et demeura inébranlable. Il offrit même à ses ennemis de passer par l'épreuve du feu (4 vases d'huile bouillante), mais ils refusèrent, peut-être par crainte. Pendant qu'il était en prison, la controverse soulevée à l'occasion de sa doctrine continuait; plusieurs év. prirent parti, sinon pour lui, au moins contre Hincmar. L'archev. de Lyon, le conc. de Valence 855, furent favorables au prisonnier. Remi flétrit comme t un exemple inouï d'irréligiosité » la flagellation infligée à Gottschalk. Un plaidoyer de Jean Scott fit plus de tort à Hincmar que tous ses adversaires réunis. Le pape évita jusqu'à la fin de se prononcer, mais parut pencher vers les idées de Gottschalk et pour les canons de Valence, confirmés 859 par le conc. de Langres (deux conciles se prononçant pour un schismatique!). Le prisonnier ne s'affligeait ni de ses peines ni de ses souffrances; il craignait seulement que sa honte ne rejaillît snr la vérité. Enfin, après 19 ans de cachot, il tomba sérieusement malade; Hincmar prévenu donna l'ordre de lui refuser la confession et les sacrements, à moins qu'il ne se rétractât, et le martyr mourut sous le poids de ces rigueurs, 30 oct. 868 ou 869. v. Usserius, Weizsâcker, Neander, Kurtz.
2° Gottschalk, prince des Wendes, petit-fils
de Mistewoy, et fils d'Udb. Élevé au couvent de Saint-Michel deLunebourg, il en sortit lorsqu'il apprit que son père avait été assassiné, et il se mit à ravager l'Albingie, 1032. Fait prisonnier par Bernard II de la basse Saxe, il fut converti, fit une profession solennelle de sa foi, sortit de prison 1039 et se rendit auprès de Canut en Angleterre. Étant rentré en possession de ses États, 1043, il s'occupa de les évangéliser, prêcha lui-même, traduisit des livres chrétiens, et finit par être assassiné dans un soulèvement des païens 1066. Sa mort fut le signal d'une insurrection générale et de persécutions qui durèrent jusqu'au moment où son fils Henri 1105-1127, put rétablir de nouveau le royaume obotrite de son père.
GOUDIMEL, Claude, né en Franche-Comté, probablement à Besançon, vers 1510. Sa vie est peu connue. En 1540 il était à Rome où il avait ouvert une école de musique, et il comptait Pa-lestrina parmi ses élèves. Il composa des messes jusqu'en 1558, ce qui prouve qu'il était encore catholique. Plusieurs de ses mss. sont à Rome, dans des bibliothèques. En 1555 il est à Paris où il publie ses Odes d'Horace, mises en musique. On ne sait exactement quand il vint à Genève; c'est en 1562 que parurent pour la première fois ses: Psaumes de David (au nombre de 16) mis en musique en 4 parties en forme de motets, par Goudimel, où l'harmonie était travaillée en style fugué et en contre-point figuré. Le recueil entier des Psaumes parut en 1565 à Paris, et la même année à Genève, mais avec une harmonie plus simple et dans le style familier. C'est vers ce temps qu'il embrassa les doctrines de la réforme. On lui a longtemps attribué la mélodie des psaumes, ou de plusieurs psaumes, mais à tort; lui-même s'en défend: l'harmonie seule lui appartient. II se proposait aussi de mettre en musique le Symbole, quand des intérêts l'obligèrent de se rendre à Besançon; il y tomba malade, et quand il revint à Lyon où il était établi au moins depuis 1570, ce fut pour y être égorgé avec 1500 ou 1800 de ses coreligionnaires, la nuit du 28 au 29 août 1572, victimes attardées de la Saint-Barthélemy.
GOUJON, Jean, le représentant le plus pur du génie français, sculpteur plein de force, de grâce et de délicatesse, qui sut combiner le génie antique avec celui de l'école florentine; celui qui mérita d'être appelé le Phidias français et le Corrège de la sculpture; le savant annotateur d'une traduction de Vitruve, l'auteur de tant de chefs-d'œuvre, de la Fontaine des Innocents, de la tribune des Cariatides, du groupe de Diane; le restaurateur de tant de beaux monuments, à Alençon, Rouen, Paris, château d'Ecouen, château d'Anet, Louvre, Saint-Denis; ce protégé du connétable de Montmorency et d'Henri II, mais non de la reine-mère; cet homme, une des gloires de la France, on ne sait presque rien de lui, ni où ni quand il est né (à Alençon, à Saint-Laurent de Condéel, à Paris? vers 1520?), ni où il a étudié et s'il visita l'Italie, ce qui est peu probable. On sait seulement qu'il fut tué à la Saint-Barthelemy, d'un coup d'arquebuse, pendant qu'il travaillait sur son échafaud à la restauration du vieux Louvre; et cela même quelques-uns veulent le nier auj., sous prétexte que son nom ne figure nulle part sur la liste des morts, comme si à ce moment d'orgie on avait pu se préoccuper beaucoup de faire un catalogue bien exact des victimes. Goujon était l'ami intime de trois autres grands artistes, huguenots comme lui, Cousin, Bullant et Palissy. — Un autre Jean Goujon, ouvrier en laines à Meaux, martyrisé à Senlis, 5 déc. 1562. Un ministre, Isaac Goujon, du Périgord, dut fuir à l'étranger.
GOULARD, ou Goulart, Simon, né à Senlis 20 oct. 1543; théol. distingué, poète de mérite, écrivain remarquable, correct et fécond. Il vint à Genève 25 mars 1566 et fut consacré 20 oct.; le 24 nov. il était nommé à Chancy-Cartigny; en 1571 il était appelé à Genève et reçu bourgeois. II fut, suivant l'ancien usage, prêté à diverses reprises à des égl. de France, momentanément sans prédicateurs, mais touj. k condition qu'il reviendrait. Anvers l'ayant demandé pour pasteur 1580, et Lausanne pour prof, de théol. 1586, le Consistoire le refusa absolument. En 1594 il faillit même aller à Montpellier, mais il finit par céder aux instances de la Compagnie et resta. D'un caractère indépendant il savait blâmer en chaire les actes du gouvernement, et même t le train qu'il voyait en la justice. * Une fois, prêchant à Saint-Gervais, il traita Gabrielle d'Estrées de courtisane, ce qui lui valut, sur la plainte de l'ambassadeur de France, 8 jours de prison et une censure du Consistoire. En 1600 il fut envoyé à la cour de Catherine de Navarre. En 1602 il était à Genève; témoin de l'Escalade, dont il écrivit la relation. En 1603, il fut nommé pasteur de l'égl. de Saint-Pierre; en 1605, prêté 3 mois à Grenoble; en 1607, modérateur de la Compagnie, en remplacement de Bèze, il le fut jusqu'en 1612. Tombé malade 23 janv. 1628, il put recevoir le Consistoire présidé par Dio-dati, et f 3 févr. dans une foi joyeuse et constante. On a de lui des livres d'histoire, des traductions, des poésies, des récits, des discours, des mémoires sur la Ligue, une Hist. du Portugal, une réimpression du Plutarque d'Amyot, une Hist. des martyrs, de Crespin, avec suite; un Trésor d'hist. admirables, etc. Goulard a laissé 3 fils, Simon qui fut pasteur à Amsterdam et arminien, + 1628; Jacques qui a dressé une carte du Lac de Genève, et Jean qui a fait un plan de Genève et écrit Antiq. genevoises;
il a aussi publ. des Extraits de la Chronique du pays de Vaud.
GRAAL, ou Gréal (le Saint-); célèbre vase légendaire, mentionné par Percival, par Wolfram d'Eschenbach et d'autres, comme taillé dans une pierre précieuse, descendu du ciel, et ayant servi de coupe à la dernière cène du Sauveur. Ce vase aurait aussi recueilli l'eau et le sang découlant de son côté, Jean 19, 14. Enfin Joseph d'Arimathée, mis en prison et emmuré, l'aurait merveilleusement conservé avec lui et s'en serait servi pour procurer sa délivrance et faire beaucoup d'autres miracles. Avec ce talisman rien n'était impossible; Joseph put même faire dans une nuit le voyage d'Orient en Angleterre et c'est dans la Grande Bretagne qu'il déposa la précieuse relique. Plus tard elle s'égara; de nombreuses expéditions eurent lieu pour tâcher de la retrouver. Les chevaliers de la Table ronde, entre autres, se donnèrent une peine inouïe pour cela. Une autre légende porte que les Templiers la conservaient avec soin sur le Mont Salvas. L'idée première de cette légende paraît avoir été de relever le mystère de l'eucharistie, et la fable a brodé sur le fait chrétien pour le dénaturer.
GRABE, Jean-Ernest, né 10 juill. 1666 à Kônigsberg. Persuadé de la nécessité de la succession apostolique dans le sacerdoce, il était à Vienne sur le point de passer au catholicisme, quand Spener qui avait connu et réfuté ses idées, lui montra dans l'Égl. anglicane cette succession si désirée. Cela lui suffit; il se rendit en Angleterre, se joignit à l'Église et vécut de travaux littéraires. Outre ses études d'hist. ecclés., il faut noter son édition des LXX d'après le mss. Alex, + 1711.
GRACE, lo On appelle Lettres de grâce les rescrits par lesquels les papes accordent à un pétitionnaire une faveur, une dispense ou un bénéfice. Le droit ecclés. a dû les régulariser: le Conc. de Trente en particulier a interdit les expectances, ou promesses de bénéfices futurs. 2° Moyens de grâces; tous les moyens indiqués de Dieu pour procurer le salut, la paix, la sanctification. Ainsi la prière, l'étude de la Bible, les exercices religieux, les sacrements, etc. L'Église elle-même est considérée par quelques-uns comme un moyen de grâce et comme le canal essentiel, par lequel Dieu révèle et com -munique le salut.
GRADUEL, courte portion de psaume, qui se lit pendant la messe entre l'Évangile etl'Épître, pendant que l'officiant monte les marches de l'autel. On l'appelait anciennement et à tort l'antiphonie. Le graduel est chanté par le chœur et le lutrin.
GRjEBER, François-Fréd., surintendant général de la Westphalie, élevé à ce poste â cause du tact et du zèle avec lequel il avait défendu le caractère presbytérien et les libertés des égl. rhénanes. Né 1784, il avait étudié à Duisburg et à Halle, f 1857.
GRAMMONT, ou Grandmont, v. Étienne 3°.
GRANDE BRETAGNE, v. Angleterre, Écosse, Irlande.
GRANDIER. Urbain, né à Rovère, près Sablé, Maine, élevé chez les jésuites de Bordeaux, curé de Saint-Pierre de Loudun et chanoine de l'église de Sainte-Croix. Prédicateur brillant, homme du monde, un peu léger et libertin, connu par des relations trop intimes avec de belles pénitentes, il se présenta en 1632 pour succéder, comme directeur des consciences, au p. Moussault, dans un couvent d'ursulines établi dans sa paroisse. Il avait pour concurrent un collègue, Mignon, fanatique, jaloux, haineux, qui avait son parti, qui avait appris en confession bien des choses contre Grandier et qui les exploita. Deux partis se formèrent, dans la ville et dans le couvent, et la passion s'en mêla. A ce moment de surexcitation il se produisit parmi les religieuses et leurs pensionnaires des crises hystériques, contagieuses comme toujours, et se rattachant à des préoccupations religieuses, qui ne manquèrent pas d'être considérées comme des possessions. On parla d'abord de fantômes, puis de démons, de diable et d'anté-christ. Mignon mit tout sur le compte de Grandier. Laubardemont, d'accord avec Richelieu, se chargea de l'affaire, qui traînait trop; fit arrêter Grandier 7 nov. 1633, et commença contre lui une instruction, qui serait amusante, si elle n'était pas terrible. On en a conservé la procédure. Des religieuses, qui ne connaissaient pas Grandier, l'accusaient d'avoir fait entrer dans leur corps Asmodée, Astaroth, ou tel autre démon; elles parlaient un latin absurde, et disaient des obscénités. Deux pasteurs protestants, appelés à intervenir, refusèrent, ne voulant pas se commettre dans une affaire odieuse et ridicule. Soumis aux plus terribles tortures, Grandier ne put rien avouer de son commerce avec les diables, et les paternes exhortations du p. Tranquille n'obtinrent rien non plus. Grandier n'en fut pas moins condamné à être brûlé vif, avec son livre sur le célibat des prêtres, et la sentence fut exécutée le même jour, 18 août 1634, v. Aubin, Hist. des diables de Loudun; La Ménardaye, le p. Surin, Figuier, Michelet, la Sorcière, etc.
GRANDPIERRE, Henri, de Neuch&tel, pasteur à Bâle en 1823, directeur de la maison des missions de Paris, pasteur libre à la chapelle Taitbout, entra dans l'Égl. nationale; pasteur et président du Consist. de Paris, décoré, + 1874 à Lausanne. Auteur de plus, volumes d'explications bibliques et de sermons: Tristesse et
Consolation. Guide du fidèle à la Table sacrée, Aspirations chrét., etc. Orateur estimé, il avait donné ses plus belles années à l'Égl. libre, et c'est dans ce milieu qu'il est arrivé à son plus entier développement; mais c'est surtout à son influence comme directeur des missions qu'il doit sa réputation.
GRANVELLE (de) lo Nicolas Perrenot, né 1486 à Ornans, près Besançon, était avocat; membre du parlement à Dôle 1518, il passa au service de Charles-Quint, devint ministre en 1530 après la mort de Gattinara, représenta les intérêts de l'emp. et de la religion aux diètes de Worms el de Ratisbonne, et présenta aux États Tlnterim qu'il avait rédigé. Il assista à l'ouverture du Conc. de Trente et f à la diète d'Augsbourg 1550. 2o Antoine Perrenot, fils du précédent, né à Ornans 20 août 1517, év. d'Ar-ras en 1540. Instruit et orgueilleux, habile et dévoré d'ambition, il eut l'occasion de déployer ses talents diplomatiques aux diètes de Worms et de Ratisbonne où il assistait son père, et il gagna les bonnes grâces de l'emp. qui le nomma garde des sceaux 1544, à 27 ans. Il réussit en 1553 à conclure contre la réforme l'alliance de l'Espagne et de l'Angleterre par le mariage de Philippe II et de Marie-la-Sanglante, mais cette alliance fut rompue par l'avènement d'Élisabeth, et Granvelle se retourna vers la France où le traité de Cateau-Cambrésis 1559 procura à l'Espagne des avantages considérables. Philippe II lui continua la confiance et le bon vouloir de son père; il le donna comme ministre à Marguerite de Parme, gouvernante des Pays-Bas, avec la mission de pousser de toutes ses forces à l'écrasement des hérétiques. Granvelle y travailla si bien et avec un zèle si violent, que Marguerite désapprouvant ses excès finit par demander le rappel du trop cruel et compromettant ministre 1564. Il avait travaillé à faire rouvrir le conc. de Trente, et avait obtenu le chapeau de cardinal. Après quelques années de repos à Besançon, Philippe l'envoya à Naples comme vice-roi 1570, et le nomma en 1575 président de son conseil à Madrid où il + 1586. Il a laissé des Mémoires, qui sont à la bibliothèque de Besançon, et qui ont été publ. à Paris 1839 et suiv., sous le titre de: Papiers du card. Granvelle. Sa réputation eût gagné à ne pas être chargé de tant de missions où il fallait allier la cruauté à la duplicité.
GRAPHEUS, Corneille, né en Flandre 1482, secrétaire de la ville d'Anvers, traduisit 1520 le livre de Goch sur La liberté chrétienne, avec une préface très vive sur l'état de l'Égl. catholique. Emprisonné pour ce fait 1521, il dut se rétracter et perdit son emploi. Il rentra dans la vie privée, vécut de sa plume et f 1558.
GRATIEN lo v. décrets. 2o Emp. d'Occident, né à Sir mi u m 359, succéda à son père 375 et s'occupa avec son jeune fr. Valentinien II de reconstruire l'emp. romain ébranlé. Il repoussa les Allemands et les Goths, éleva sur le trône de Constantinople Théodose, le meilleur de ses généraux et, s'il permit encore le culte païen, il fit cependant quelques pas de plus que ses prédécesseurs. Il renonça le premier au titre et aux ornements pontificaux que les empereurs avaient touj. conservés jusqu'à lui, et fit enlever un autel de la Victoire sur lequel les sénateurs avaient coutume de prêter serment. Enfin il confisqua les terres qui servaient à l'entretien du culte et des prêtres païens. Il se rendit par là odieux aux Romains; Symmachus réclama, mais Ambroise fit une contre-requête et eut le dessus. Gratien travailla à la convocation du 2d conc. de Constantinople, et dans une contestation qui eut lieu à Rome il donna à l'év. le droit de trancher le différend. Ces faveurs à l'Église le perdirent. Son peuple se tourna contre lui, quand Maxime se fut fait proclamer en Gr. Bretagne; il fut battu et tué près de Lyon par Andragathius, lieut. de Maxime, 383. Élève d'Ausone il aimait les lettres.
GRATRY (le père), né 30 mars 1805 à Lille, fils d'un employé à l'intendance militaire, sa mère n'avait que 17 ans quand il naquit. Doué d'une belle intelligence, d'un cœur d'élite et d'une grande force de volonté, il fit de bonnes études à Tours et au collège de Henri IV, traversa une phase d'incrédulité, dont la sécheresse même le ramena à la foi. Il était passionné de mathématiques et sortit de l'école polytechnique officier d'artillerie avec l'épaulette d'or. Mais déjà il avait décidé de se faire prêtre; il se rendit à Strasbourg chez l'abbé Bautain, fit un noviciat d'un an au couvent de Bischenberg, enseigna pendant dix ans au petit séminaire de Strasbourg, et prit en 1842 la direction du coll. Stanislas à Paris. Le 18 août 1852 il ressuscitait l'ancien ordre de l'Oratoire, avec quelques amis, et il se mit à écrire. Sans vivre dans le monde, il le connaissait à fond. Son livre La connaissance de Dieu, fut couronné par l'Acad. Il écrivit aussi La connaiss. de l'âme, la Logique, les Sources, Lettres sur la religion, la Morale et la Loi de l'hist., La crise de la foi, Perrcyve, etc. Reçu 26 mars 1868 à l'Acad. franç. par Vitet. H combattit vivement le dogme de l'infaillibilité « comme si Dieu avait besoin de nos mensonges, > et l'accepta ensuite docilement. Malade, il vint à Montreux, où il f 7 févr. 1872. Grand prédicateur, penseur, écrivain, il a été chrétien par sa vie; il faut être catholique pour comprendre qu'il ait pu soumettre son intelligence et sa conscience à ce qu'il savait être faux.
GRAUL, Charles, né 6 févr. 1814, bon latiniste, directeur de la maison des missions de
Dresde 1842; tendance luthér., plutôt hostile au piétisme, cherchant moins des conversions individuelles que des conversions en masse de peuples ou de tribus. Pour cela il lui fallait surtout des hommes instruits et cultivés, ce qui le décida à transporter sa maison à Leipzig, pour la rapprocher de l'université, 1848. Il fit un voyage aux Indes 1853 à 1855, qui aboutit à un travail sur la philos, des Védas et à une grammaire tamule, mais la maladie le força de donner sa démission 1860; il se retira à Erlangen, où il f 10 nov. 1864.
GRAVAMINA Centum, v. Griefs.
GRECS, Église grecque ou d'Orient. La différence des caractères et des tempéraments qui existe entre l'Orient et l'Occident avait de bonne heure introduit des divergences dans la doctrine et la discipline entre les deux Églises. Mais en y regardant de près, on peut se convaincre que la plupart de ces divergences sont aussi bien la conséquence que la cause du schisme. Déjà le conc. Quini-Sextum avait été nanti des questions de discipline 681. Quant à la doctrine le principal point de controverse était le mode de procession du Saint-Esprit; les grecs reprochaient aux latins d'avoir altéré le dogme en ajoutant au symbole de Nicée les mots filioque. Ils maintenaient que le Saint-Esprit procédait du Père comme principe premier; les latins, à cause de Jean 15, 26., estimaient qu'il procédait aussi du Fils, à quoi les orientaux répondaient qu'il faut distinguer entre la mission et la procession, les uns et les autres attachant à leur formule des conséquences qu'ils regardaient comme importantes, mais qui nous paraissent avoir perdu beaucoup de leur valeur et même de leur signification. C'est l'Égl. des Goths, en Espagne, dont le concile au 6rae siècle ajouta le filioque. Toutefois la cause du schisme fut moins dans le dogme que dans les prétentions romaines. Ignace, patr. de Constantinople, ayant courageusement protesté 857 contre la corruption de la cour de Michel III, fut déposé et remplacé par l'habile et savant, mais laïque Photius. Le schisme éclata; Michel en ayant appelé au pape Nicolas, celui-ci blâma Photius et l'excommunia 860; mais Photius à son tour excommunia Nicolas, et dans un concile composé d'amis fidèles, il contraignit Ignace à signer lui-même sa destitution. Dans un nouveau conc. tenu à Rome, Nicolas excommunia de rechef Photius, et destitua ses propres légats qui n'avaient pas montré à Constantinople la fermeté nécessaire. Il y avait aussi la question bulgare. Les deux Égl. rivales regardaient la Bulgarie comme étant sous leur dépendance. En 867 Photius avait convoqué un concile, où Nicolas avait été excommunié en dépit des efforts des occidentaux, Odon, Ratran, Aeneas, etc. Mais Michel ayant été assassiné, Basile-le-Macédonien lui succéda et rétablit Ignace, qui renoua aussitôt avec Adrien II de Rome. Ignace f 878, et Pho-tius remonta sur le trône patriarcal. Jean VIII déclara qu'il voulait bien, en vertu de son pouvoir pontifical, reconnaître Photius comme patr. légitime, si celui-ci donnait une satisfaction convenable en restituant promptement la Bulgarie « qui, dit-il, fait partie de notre diocèse. t Les lettres du pape furent lues devant un concile 879, mais adoucies dans la forme. Photius, sans s'en inquiéter, condamna les conciles qui avaient eu lieu sous l'influence d'Ignace. Le pape, déçu dans son espoir de ravoir la Bulgarie, excommunia publiquement Photius et ceux qui lui resteraient attachés. Mais en 886, sous Léon-le-Philos., le parti d'Ignace, ayant eu le dessus, rétablit momentanément l'union avec Rome. La lutte recommença vers le milieu du iirae siècle, en 1043, sous Michel Gérularius, q. v., et le schisme fut cette fois définitif. La prise de Constantinople par les croisés 4204, et l'établissement dans cette ville d'un empire latin, qui dura jusqu'en 1261, ne fit qu'envenimer les rapports des deux Églises. Des tentatives d'union se renouvelèrent dès lors assez souvent, mais sans succès; ainsi celles de Pierre Chrysolanus 1110, du conc. de Constantinople 1168, du conc. de Lyon 1274, du conc. de Flo-rence-Ferrare 1438. Ils aboutirent à un rapprochement de quelques théologiens, mais non à celles des Églises. Quelques communautés seulement se rattachèrent à Rome, mais en maintenant le mariage des prêtres, la communion sous les deux espèces, et le cuit*1 en langue vulgaire; elles portent le nom de Grecs-Unis et se trouvent surtout dans l'emp. d'Autriche, en Pologne, en Hongrie, Transylvanie, Galicie, etc. En faisant à d'autres ces mêmes concessions, Rome se serait épargné bien des mécomptes. Des efforts ont été faits aussi, mais sans plus de succès, pour amener une entente entre les grecs et les Egl, de la Réforme. Mélanchthon en 1559, Andreâ et les théologiens de Tubingue en 1373, enfin Cyrille Lucar en 1621, cherchèrent un moyen de rapprochement, mais ils échouèrent n'ayant pas une base commune; les sacrements et l'invocation des saints étaient surtout le grand obstacle. L'Égl. grecque, par un trop grand attachement à la forme, ne pouvait comprendre que la justification par la foi pût servir de base et de principe à une Église; elle ne comprenait pas davantage ce qu'il y avait d'énorme dans la vente des indulgences. Toutefois dans la pratique les rapports des grecs avec les protestants sont assez faciles, soit à cause de leur opposition commune aux prétentions romaines, soit parce qu'il ne se mêle aucun souvenir irritant à l'hist. de leurs relations depuis 3 siècles. La doctrine de l'Égl. grecque orthodoxe est exposée officiellement dans la Déclar. de la foi des Russes, rédigée 1642 par P. Magilas, et adoptée 1672 par le synode de Jérusalem. Elle se résume dans les trois symboles dits des Apôtres, de Nicée et d'Athanase; elle est ainsi rigoureusement orthodoxe sur les dogmes fondamentaux de la Trinité, de la divinité de J.-C., de l'Incarnation et de la Rédemption. Quant à l'autorité doctrinale, elle la met dans les mains de l'Église, c.-à-d. de l'universalité des fidèles. Les sacrements sont des grâces communiquées, et non prêchées, ou symbolisées seulement; la transsubstantiation est prise dans son sens le plus absolu, le plus matériel. Quant au culte, il est surtout extérieur et cérémoniel; la prédication est reléguée à l'arrière-plan; souvent même elle n'existe pas. La hiérarchie ecclés. est très compliquée; le bas clergé doit être marié, mais non le haut clergé, qui se recrute par conséquent surtout dans les monastères. La vie intellectuelle et scientifique n'a fait que décliner depuis Jean Damascène 780; on peut citer cependant QEcumenius, vers l'an 1000, Théophylacte f 1107; Euthyme Zigabenusf 1118, Nicetas Chômâtes f 1216, Nicolas de Méthone, Cyrille Lucar, Pierre Mogilas, métropolitain de Kiew, et quelques autres. La subordination de l'Égl. à l'État est un des traits les plus caractéristiques, sinon les plus glorieux, de l'Égl. grecque, et il en est résulté naturellement des divisions intérieures suivant les pays. Lors de la conquête de Constantinople par les Turcs, certains droits civils ou d'administration passèrent au clergé, et un synode permanent fut adjoint au patriarche. En Russie où le patr. de Moscou représentait depuis 1588 l'autorité spirituelle, Pierre-le-Grand l'a transférée 1702 à un synode nommé par lui, de sorte qu'en fait l'empereur en est devenu le chef réel. La Grèce de même, depuis la déclaration d'indépendance, a rompu ses rapports ecclés. avec le patr. de Constantinople 1827, et c'est un synode nommé par le roi chaque année qui en remplit les fonctions. C'est un césaréopapisme peu déguisé. Le patr. de Constantinople étend sa juridiction sur ceux d'An-tioche, de Jérusalem et d'Alexandrie; ceux-ci nomment leurs év. et leurs archevêques. Depuis les luttes christologiques qui amenèrent la séparation de l'Égl. arménienne et de l'Égl. cophte, et depuis le grand schisme de Photius, la senle secte qui se soit détachée de l'Égl. grecque est celle des grecs-unis. Cependant cette branche considérable de la chrétienté n'a depuis longtemps exercé aucune influence appréciable ni sur la théol., ni sur la vie religieuse de l'Église. Elle est à la fois méconnue et peu connue. Ses rapports avec les États, c.-à-d. avec la politique, lui ont fait une position fausse, qui a entravé son développement spirituel; le clergé est nombreux, mais pauvre, mal payé, souvent peu instruit, sauf les grands dignitaires. Diverses tentatives faites à plus, reprises pour réveiller les pasteurs et les troupeaux se sont brisées contre rattachement aux formes et aux traditions, ou contre la susceptibilité politique de quelques souverains qui craignaient de voir la liberté se dresser derrière le réveil du sentiment religieux. L'irréligion leur a donné le nihilisme, et Ton commence à comprendre que ce danger est pourtant plus grand que celui de la foi.
GRÉGOIRE lo le Thaumaturge, ou faiseur de miracles; il s'appelait Théodore. Né de parents païens à Néo-Césarée, Pont, il devint chrétien à l'âge de 14 ans après avoir perdu son père. Dans un voyage qu'il fit en Palestine, se rendant à Rome, 231, il apprit à connaître Origène à Césarée et s'attacha à lui comme disciple jusqu'en 239. Il se proposait d'embrasser la vie solitaire et de vivre en ermite dans le Pont, mais il fut appelé à l'évéché de Néo-Césarée 244 et il accepta cette tâche comme un devoir. Grâce à son activité, de nombreuses conversions eurent lieu et le paganisme disparut presque entièrement de la province. Persécuté par Décius, il échappa miraculeusement à la mort. La légende s'est emparée de sa personne et lui prête des miracles extraordinaires, jusqu'à en faire un second Moïse, f 264 ou 270. Parmi ses écrits se trouvent un Panégyrique d'Origène et une Conf. de foi, comme résumé de la doctr. chrét., qui lui aurait été dictée en vision par l'ap. Jean, mais qui dans tous les cas porte des traces évidentes d'interpolations, v. Grég. de Nysse, Vie de G.-le-Thaum.
2o Grég. Lousavoritch, c.-à-d. Vllluminateur, ou l'Éclaireur; fondateur de l'Égl. arménienne, et premier patr. de cette Église à Césarée. Né vers 207, selon d'autres en 257, il était fils d'un prince parthe. Élevé comme chrétien à Césarée, il gagna par la fermeté de sa foi le roi Tiri-date d'Arménie, qui se convertit, lui et tout son peuple, et il fut chargé d'organiser l'Église. Au conc. deNicée (est-ce bien le même?) il se fit remplacer par son fils Aristax, à qui dès son retour il remit définitivement ses fonctions, et se retira dans une caverne de la Daranalie, où il mourut. Les méchitaristes ont publ. de lui quelques Homélies, Venise 1737 et 1848.
3o Grégoire de Naziance, dit le Théologien, fils du précédent év. de Naziance, et l'un des pères les plus distingués de l'Égl. grecque. Né vers 330 à Naziance où son père était évêque (et non en 300, comme le dit Papebrook dans les Acta Sanctorum). Sa mère, la pieuse Nonna, l'avait, même avant qu'il fût né, consacré au service de Dieu. Il commença par l'étude des lettres profanes et visita successivement Césarée de Cappadoce, Césarée de Palestine, Alexandrie et Athènes. Comme il se rendait dans cette dernière ville, le vaisseau sur lequel il se trouvait essuya une violente tempête. Il fit vœu, s'il échappait à la mort, de se consacrer à Christ. La tempête s'apaisa, et à la vue de ce prodige, non seulement il se convertit en effet, mais encore, est-il dit, tous les passagers se convertirent.
C'est à Athènes qu'il se lia avec Basile-le-Grand, et il le mit en garde contre les prévenances de Julien, plus tard l'Apostat. Après le départ de Basile, il continua encore pendant un an ses études avec le plus brillant succès, puis revint en 356 à Naziance où il se fit baptiser. Il hésitait depuis longtemps entre la vie active et la vie d'anachorète: il choisit un juste milieu, se distinguant à la fois par son zèle et son austérité. Ses compatriotes le pressaient vivement d'accepter un poste de professeur de rhétorique, mais il refusa et alla rejoindre son ami Basile dans sa solitude, près de l'Iris, où ils se livrèrent à l'étude des Écritures et de quelques pères, et plus spécialement d'Origène. Il retourna ensuite auprès de son père, à Naziance. et se chargea de quelques-unes de ses fonctions; mais pendant une fête de Noël, son père l'ayant par surprise ordonné prêtre, Grégoire s'enfuit, ne se trouvant pas digne d'une charge aussi considérable. Il revint en 362 et fit un discours remarquable pour se justifier d'avoir pris la fuite. — Il fut nommé d'abord év. à Sosima et dès le début se signala par ses talents oratoires, remarquables même à cette époque brillante, aussi bien que par son zèle, sa charité et sa franchise. En 363 il se rendit à Constantinople, où se trouvait son frère Césaire, médecin distingué, très aimé de Julien qui cherchait à le détourner du christianisme. Peu satisfait de cette intimité entre l'empereur païen et son frère, Grégoire exhorta celui-ci à se défier de Julien et réussit à empêcher son abjuration. Après la mort de Julien, malgré la force que ce prince avait rendue à son parti, Grégoire prononça deux discours véhéments contre l'empereur et les païens, toutefois en recommandant aux chrétiens l'indulgence et la tolérance. En 374, à la mort de son père, il exerça comme coadjuteur les fonctions d'év. de Naziance, puis se retira à Séleucie jusqu'en 379. Appelé à Constantinople pour y combattre les ariens et l'emp. Valens, il y alla plein d'appréhensions, effrayé de la responsabilité d'un poste où depuis 40 ans les troubles se succédaient sans interruption. Grâce à ses talents, à son onction et à son zèle, et quoiqu'il n'eût qu'un salon pour lieu de culte, il ramena un grand nombre d'ariens au sein de l'Égl. et fit prédominer la foi du conc. de Nicée. Des difficultés de tous genres l'avaient assailli, mais le succès le récompensa de ses efforts et de son courage. Cependant les intrigues et la calomnie aggravèrent sa position; fatigué et abreuvé de dégoûts, il était décidé k partir et à quitter un poste aussi ingrat. Lorsque le peuple apprit cette résolution, plein de sollicitude et d'amour pour son évêque, il l'entoura pour s'opposer à son départ, et Grégoire à la vue de ses fidèles qui, les larmes aux yeux, le suppliaient de rester, céda k leurs instances. Sa persévérance, pleine de douceur, fut enfin couronnée d'un succès éclatant. Théodose se déclara en sa faveur et ses adversaires furent réduits au silence. Voyant que ceux de sa croyance n'avaient qu'une salle pour lieu de réunion, l'empereur ordonna à l'év. arien Hémophile de céder la place, et Grég. fut conduit en grande pompe à la cathédrale. Aussitôt la paix rétablie 380, Grégoire fut consacré patriarche de Constantinople dans un conseil présidé par Meletius d'Antioche. Dès lors il s'adonna k la prédication, secourant les faibles et les opprimés, disant hautement leurs vérités aux grands de la terre. Mais sa modération et sa tolérance envers les hérétiques lui firent de nouveaux ennemis qui se liguèrent pour le renverser et cherchèrent même k le faire assassiner. En 381 s'assembla à Constantinople le 2d conc. œcuménique. Appelé à le présider, Grégoire refusa. « Je fuis, disait-il, toute réunion d'évêques, car je n'y ai jamais vu régner que l'animosité et l'ambition. Elles enveniment ce qu'elles devraient guérir. » Il dut céder cependant aux sollicitations de son parti; mais de nouvelles tribulations l'attendaient. Le schisme mélétien avait éclaté k Antioche; Grég. proposa de nommer k l'évêché de cette ville Paulin que soutenaient également le savant Jérôme et le pape Damase. Jérôme n'avait eu de repos qu'après avoir fait la connaissance de Grégoire et avoir obtenu son appui. Devant ces divisions Grégoire se retira, traitant les pères du concile de « troupeau de grues; » il voulait abandonner l'épiscopat. Ce fut encore le peuple qui intervint en le suppliant de rester. Mais les év. de Macédoine et surtout ceux d'Egypte envenimèrent le débat. Grégoire offrit de nouveau sa démission; elle fut enfin acceptée cette fois, même par Théodose qui rendit cependant hommage à son dévouement, k son désintéressement et à son intrépidité. Indigné de toutes ces cabales et de l'avidité du sacerdoce, Grég. se retira dans sa patrie, appelant les évêques de son temps des hommes à double face, adulateurs de femmes, lions auprès des petits et rampants auprès des grands, des trafiquants de Christ, insouciants de toute chose hormis du mal. Il exerça encore pendant quelque temps les fonctions d'év. de Naziance, puis se retira définitivement et + 389. Doué de talents hors ligne comme orateur, Grég. de Naziance ne brille pas moins par ses écrits; les caractères distinctifs de son style sont le coloris, l'abondance, la grâce, la facilité; il est remarquable à la fois par son imagination, ses vues philos, et son talent poétique. On a de lui 50 ou 55 Sermons ou discours, parmi lesquels 5 sur la Trinité, et sa prédication d'adieu à son troupeau de Constantinople. Il excelle dans le panégyrique et l'oraison funèbre; il prononça celle de son fr. Césaire, de sa sœur Gorgonie, de son père, de Basile. Puis 243 lettres caractérisées par une sensibilité vive et une riche imagination; plus, poèmes empreints de mélancolie religieuse et des satyres des plus piquantes où il trace un portrait peu flatteur des év. et des conciles de son temps. Citons entre autres son Carmen de se ipso, trad. par Lefranc de Pompi-gnan, où il raconte les vicissitudes de sa vie. J. Planche a fait paraître, Paris 1827, un Choix de poésies et de lettres de saint Grégoire de Naziance, avec trad. franç. H. B.
4° Grégoire de Nysse, fils du rhéteur Basile etd'Emmelie; né vers 335 à Sébaste, Cappa-doce, était frère cadet de Basile-le-Grand. Il épousa Eusebéia qui mourut de bonne heure, et il écrivit plus tard pour le célibat. Il fut successivement lecteur dans l'église, prof, de rhétorique et év. à Nysse 372. Il entra, comme son frère, en lutte avec Valens, qui le força de quitter son siège épiscopal et d'abandonner sa place à un misérable esclave arien. Il vécut quelque temps dans la solitude, et fut réintégré à son poste par Théodose. En 379 il assista au conc. d'Antioche et joua un rôle prépondérant, 381, au conc. œcuménique de Constantinople; le symbole qui y fut adopté est mis sous son nom. f entre 394 et 400. On a de lui un grand nombre d'ouvrages; des Comment, sur l'Écriture sainte, des Oraisons funèbres, entre autres celle de l'impér. Flaccille et de sa fille Pulché-rie, des traités de morale et de dogmatique, une Vie de Grégoire-le-Thaumaturge, des catéchèses et des sermons. Ses œuvres ont eu plusieurs éditions; ses sermons ont été trad. en fr. par Goulu. Il est surtout remarquable par l'abondance, l'imagination et l'élévation. H. B.
5° Grégoire, dit de Tours; né en Auvergne 30 nov. 539, d'une famille sénatoriale qui avait donné à l'Égl. plusieurs évêques. Petit, chétif, mais d'une intelligence supérieure et d'une grande indépendance d'espril. Il s'appelait Georges Florentius, mais prit le nom de Grégoire de son bisaïeul, év. de Langres. Il fit un voyage à Tours, au tombeau de saint Martin, dans l'intérêt de sa santé, revint k peu près guéri à la cour de Sigebert, fut appelé k Tours comme évêque et sacré le 22 août 577. Au conc. de Paris il défendit l'archev. Prétextât de Rouen contre Chilpéric et Frédégonde, et intervint en 585 et 588 entre Gontran et Childebert II pour apaiser leurs querelles. Il fit un voyage à Rome ( ce n'est cependant pas absolument prouvé) 592, et + presque au retour, le 17 nov. 594. Il a écrit: la Gloire des martyrs, 107 chap.; la Gloire des Confesseurs, 112; une Vie des Pères, 20; les Miracles de saint Julien, év. de Brioude, 50; les Miracles de saint Martin de Tours, ceux de saint André. Ces livres légendaires ont fait sa réputation de son temps; mais celui qui l'a conservéexjusqu'à nous, c'est son Hist. ecclésiastique des Francs, d'une composition défectueuse, mais d'un grand mérite de narration. Elle commence en 377 à la mort de saint Martin, et va jusqu'en 591. Le plan en est à la fois civil, laïque et religieux. Réimpr. dans la Collection des Mémoires relatifs à l'Hist. de France, de Guizot.
6° Grégoire d'Utrecht, né vers 707, disciple de Boniface; il avait fait sa connaissance 722, au couvent de Pfalzel, près Trêves, dont sa grand'mère à lui, Aedula, était abbesse. Il fut tellement captivé par les exhortations du missionnaire, qu'il résolut de le suivre; il l'accompagna dans tous ses voyages et ses peines, et après sa mort, quoiqu'il n'eût pas reçu l'ordination, il prit la direction de l'évêché d'Utrecht et s'installa comme abbé dans son célèbre couvent, dont il fit une école florissante d'évangé-listes. Aimé de ses disciples, il travailla longtemps parmi eux avec joie, préparant des ouvriers pour la mission en Angleterre, en Frise, en Thuringe, en Saxe. Quand il sentit sa fin venir, il se fit conduire à l'église devant l'autel, s'agenouilla, pria, communia et f a°ût 776, ou 781.
7<> Grégoire Magisdros, prince arménien, de la race des Arsacides, conseiller, administrateur, général au service des rois d'Arménie, vers 1030; persécuta les sectaires arméniens soumis à sa puissance, pour les contraindre d'embrasser le christianisme, f 1058. Auteur d'un poème en mille vers renfermant TA. et le N. T.
8° Grégoire de Heimburg, juriste allemand, qui s'est fait un nom par son énergique et persévérante résistance aux prétentions papales. Il était secrétaire d'Aeneas Sylvius au conc. de Bàle, mais se sépara de lui quand il fut devenu le pape Pie II. Comme syndic de Nuremberg il fut à la tête de la dèputation des princes allemands qui s'adressèrent 1446 à Eugène IV; il écrivit à cette occasion sa Remontrance, ou Ad-monilio de injustis usurpât, paparum. Au service de Sigismond d'Autriche il travailla contre Pie II à la conférence de Mantoue, et dans le conflit de son maître avec Cusan il conseilla à Sigismond d'en appeler à un concile. Excommunié, puis abandonné par ceux qu'il avait servis, il se retira auprès de Podiebrad en Bohême.
f à Dresde 1472, avec l'absolution de Sixte IV. Ses ouvrages ont été publ. à Francf. 1608 sous le titre: Scripta nervosa justitiœque plena.
9° Grégoire, Henri, connu sous le nom d'abbé Grégoire; né à Vého, près Lunéville 4 déc. 1750; élevé par les jésuites de Nancy; se fit connaître en 1788 par un Essai sur la Régénération des juifs. Cette tendance libérale et tolérante était dans le goût du siècle, et lui valut d'être envoyé aux États généraux pour représenter le clergé de Lorraine. Il présida la séance du 14 juill. 1789 où les députés se déclarèrent eq permanence, et prêta serment le premier à la constitution civile du clergé, qu'il avait concouru à élaborer, 1791, ce qui lui valut l'évêché constitutionnel de Blois. Il demanda l'abolition de la peine de mort, et adhéra par écrit à la mort du roi, n'ayant pas assisté à la séance où elle fut décrétée. Comme évêque il défendit la religion et l'Égl. et remplit activement ses fonctions. En 1794 il fit un discours en faveur de la liberté de conscience et de culte. En 1797 il présida le premier conc. national réclamant la restauration de l'Église; il chercha dans un 2me concile à faire prévaloir ses idées relig. qui se rattachaient d'une part au jansénisme, de l'autre aux traditions de l'Égl. gallicane. Le concordat lui enleva son évêché, mais il fut fait comte et sénateur 1801. Il osa résister à l'empereur. Élu député de l'Isère 1819, il fut exclu de la Chambre comme indigne à cause de son vote contre le roi. Il passa le reste de sa vie dans la retraite et f 28 mai 1831 à Paris. Comme il refusa de rétracter son serment de 1791, l'archev. de Paris lui refusa les sacrements et la sépulture ecclésiastique; un prêtre bienveillant lui donna cependant l'extrême-onction, et 20,000 citoyens l'accompagnèrent au cimetière. Outre ses Mémoires, publ. 1837 par Hipp. Car-not, il a laissé beaucoup d'ouvrages sur des questions ecclés., sur les Arbres de liberté, les Sectes relig., les Confesseurs des rois, le Mariage des prêtres, etc.
Seize papes et deux antipapes ont aussi porté ce nom:
lo Grégoire I«r, dit le Grand, né à Rome vers 540, d'une famille distinguée, f 60fc, revêtit le froc par goût et s'enferma de bonne heure dans un couvent. D'abord préteur et gouverneur impérial, puis diacre à Rome, il vit vendre de jeunes esclaves saxons (angli), dont la beauté le frappa. Ayant appris qu'ils étaient encore païens, il forma le dessein d'aller évangéliser l'Angleterre et supplia Pélage n de l'y envoyer comme missionnaire; mais ce projet n'eut pas de suite, Pélage l'ayant envoyé comme légat à Constantinople, et il ne put se réaliser que lorsque lui-même eut été appelé au pontificat 590. Il envoya alors Augustin et 40 autres moines auprès d'Éthelbert, roi du Kent, époux de Ber-the, française et chrétienne. Il s'occupa aussi de l'évangélisation des Goths ariens. Vraiment grand de caractère, il fonda de nombreux couvents et fit observer une discipline sévère par le clergé; il prenait soin des pauvres, leur distribuant des dons en abondance et ne voulant rien recevoir lui-même. Il faut, écrivait-il à un évêque, renoncer à certains usages qui sont onéreux aux églises, afin qu'elles ne soient point obligées d'envoyer de l'argent à celle de Rome, de laquelle elles devraient plutôt en recevoir. Nous vous défendons de nous rien donner à l'avenir. — Jean-le-Jeûneur, de Constantinople ayant pris en 588 le titre d'év. universel, Grégoire écrivit à l'emp. Maurice une lettre où, tout en réservant les droits supérieurs de Rome et la succession de saint Pierre, il proteste contre l'usurpation blasphématoire d'un titre qui ne saurait appartenir à personne: Je déclare positivement et librement que quiconque s'appelle évêque univ., ou veut qu'on lui donne un pareil titre, a l'orgueil et le caractère de l'anté-christ, dont il est le précurseur (Epist. Lib. I, ep. 30). Ailleurs il combat la simonie: J'ai appris cette nouvelle terrible, qu'on vend des places ecclés. pour de l'argent. C'est une véritable peste! Il s'opposa aussi à une adoration superstitieuse des images, en opposition avec Pélage son prédécesseur; il fit la guerre aux livres païens et passe pour avoir détruit des monuments idolâtres. Sa doctrine sur la grâce était pure. Job, dit-il, ne se fiait point aux mérites de sa justice, mais il se tournait vers la seule espérance de ses prières... Dieu les a sauvés sans qu'ils eussent aucun mérite... La félicité des saints est une grâce et ne s'acquiert point par des mérites. — Il s'occupa avec zèle et succès de la conversion des Lombards qui venaient d'envahir le nord de l'Italie, et envoya à Agi-lulf leur roi la célèbre couronne d'or avec un anneau de fer, quia traversé les siècles jusqu'à nos jours. Il réussit à faire avec eux une paix honorable 595, grâce à l'intervention de la pieuse Théodolinde, femme d'Agilulf après avoir été la femme d'Antharis. Il eut aussi à correspondre avec la trop fameuse Brunehaut à l'occasion des scandales du clergé franc. Grégoire était habituellement souffrant, entre autres de la poitrine; souvent alité; mais il ne cessa de lutter avec courage contre ce mal, pendant les 13 l/« ans de son pontificat. Il exerça une grande et bonne influence sur son epoque. C'est à lui qu'on doit en musique le Rit grégorien. Il a laissé de nombreux ouvrages, Paris 1705, 4 vol. folio; et Lettres choisies,par H. Gondrin.
2° Grégoire II, romain, 715-731, successeur de Constantin, envoie des ambassadeurs à
Charles Martel 726, et paraît traiter avec lui de prince à prince, sans souci de son pouvoir spirituel. Il convoque 729 un conc. contre les iconoclastes, et envoie Boniface prêcher l'Évangile en Allemagne.
3<> Grégoire III, prêtre syrien, élu par le peuple pendant les funérailles de Grégoire II 731-741. Il appelle Charles Martel à son secours contre les Lombards. 11 continua la lutte contre les iconoclastes, mais sans réussir. Sa charité le fit surnommer l'ami des pauvres.
4o Grégoire IV, fils d'un patricien de Rome, 827-844, ne fut consacré qu'avec l'approbation des envoyés impériaux. Cependant il prit parti pour la rebellion des fils de Louis-le-Déb. Ayant menacé d'excommunication l'emp. et ses évêques, ceux-ci répondirent: Qu'il vienne excommuniant, il s'en retournera excommunié. Ola sentait déjà de loin les libertés gallicanes. C'est sous son règne que Paschase Radbert imagina le dogme de la transsubstantiation, aussitôt combattu comme une monstrueuse innovation par Raban Maur, Ratram, Agobard de Lyon, Claude de Turin, Druthmar, etc.
5<> Grégoire V, Brunon, neveu de l'emp. Othon III, élu 996, fait destituer Gerbert et rend l'archevêché de Reims au traître Arnulf. Il fait chasser de Rome l'antipape Jean XVI, 997 et met à l'interdit Robert, roi de France, qui a épousé Berthe, sa cousine au 4me degré, et qui refuse de s'en séparer. Robert excommunié n'a plus autour de lui que deux domestiques fidèles, qui jettent au feu tous les plats dont il a mangé, pour ne pas être compris dans son interdit. A la fin il cède, renvoie Berthe, et épouse Constance 998. Grégoire f 999.
6° Grég. VI, antip., v. Léon IX et Benoit VIII.
7° Grég. VI, Jean Gratien, acheta de Benoît IX sa papauté 1044, éloigna à force d'or les autres antipapes, et ne se fit pardonner ces actes de simonie que par le bon usage qu'il essaya de faire du pouvoir, en mettant fin par une bonne administration et par un bon exemple aux horreurs que présentait le pontificat. Des cardinaux ambitieux et l'emp. Henri III, dit le Noir, l'entravèrent dans ses tentatives, et de découragement il donna sa démission 1046.
8° Grégoire VII; Hildebrand, né vers 1013, fils d'un charpentier de Soana (Toscane), fut le partisan et l'ami de Grégoire VI, qu'il regarda toujours comme le seul pape légitime, à l'époque où il y avait trois papes. Il était entré comme moine bénédictin à l'abbaye de Cluny, et c'est lors d'une mission à Rome qu'il fit la connaissance de Gratien. Après la mort de Clément Il et de Damase II, plusieurs princes et évêques réunis à Worms ayant élu Bruno, év. de Toul, Hildebrand l'arrêta à son passage à Cluny, et lui fit déposer son titre et ses vêtements pontificaux, sous prétexte que son élection, faite par des laïques, n'était pas régulière. Bruno dut aller demander à Rome le droit de s'appeler Léon IX, et Hildebrand, déjà sous-diacre, reçut de ses mains le cardinalat. Son influence alla croissant sous les papes qui suivirent et à l'élection desquels il ne fut pas étranger. C'est lui qui, malgré l'empereur, fit nommer sous le nom de Victor II, Guebhard qui avait refusé du secours à Léon. Il confirma Étienne IX nommé en son absence. A Benoît X, nommé par le parti épiscopal, il opposa et fit prévaloir Nicolas II (Gérard de Florence), puis Alexandre II (Anselme), et ce n'est qu'après avoir connu, aimé, patronné ou fait élire huit papes, qu'il se décida à ceindre enfin lui-même cette tiare pour laquelle il avait tant travaillé, 1073. De lui date le système de la papauté, tel qu'il s'est maintenu avec peu de variations jusqu'à nos jours: système de domination séculière, au nom de l'Église; système de pou voir temporel et d'oppression des consciences, au nom de la foi. Les puissances civiles sont mises en régie, les libertés de tous genres sont confisquées, les droits de l'homme sont anéantis, le clergé lui-même n'est plus qu'une machine à obéir, et l'on peut presque dire que la papauté a détruit l'humanité. Pape tout d'une pièce, Grégoire a pu être de bonne foi. Dans leur course au pouvoir, les uns étaient mus par l'ambition, les autres par le désir de faire du bien à l'Égl. et par l'Eglise; Hildebrand l'était peut-être par les deux choses à la fois. Dans tous les cas il était convaincu de la justice de sa cause. Seulement il partait d'une première idée fausse, la théocratie papale, qui l'entraîna dans bien des erreurs, lui fit faire bien des actions blâmables et, en consolidant la cause des papes, ébranla celle du christianisme. Tantôt prompt, tantôt lent, tantôt il était inflexible, tantôt il sacrifiait même la vérité à l'idée qui le dominait, comme il fit à l'égard de Béranger, soit lorsque, à propos de la transsubstantiation qu'il n'aimait pas, il voulut se contenter des paroles sacramentelles sans entrer dans la question du comment; soit au contraire lorsque, effrayé par les menaces des évêques, il exigea que son ami Béranger signât une confession qu'il ne croyait pas. A peine sur le trône il mit en avant des prétentions sur les royaumes d'occident, considérant les uns comme des propriétés immédiates de saint Pierre, les autres comme lui étant tributaires. C'est dans ce sens qu'il écrivit en 4073 aux princes d'Espagne, en 1074 aux rois de Saxe et de Hongrie. La France, dit-il, lui devait un tribut annuel, et la Gr.-Bretagne, sa servante et vassale, lui devait les arrérages du denier de saint Pierre, et ses hommages. Guillaume-le-Conquérant lui paya le premier, mais refusa nettement les seconds, déclarant qu'il ne tenait son empire que de Dieu et de son épée. Grég. comprenait d'ailleurs très bien qu'il ne suffit pas d'afficher des prétentions, et il commença résolument une triple campagne contre la simonie, le mariage des prêtres et le droit d'investiture des princes. Il fut puissamment aidé dans ses luttes par l'appui de Ma-thilde, fille de Boniface, duc de Toscane, avec laquelle il entretenait les relations les plus intimes et qui l'institua son unique héritier. Dans un conc. tenu à Rome 4074, il interdit les égl. aux ecclésiastiques mariés et défendit au peuple d'assister au culte célébré par eux. Grande rumeur parmi les prêtres et évêques; émeutes dans le peuple; les légats du pape parcourent le pays, enlevant partout aux ecclésiastiques leurs femmes qu'ils traitent de concubines. La violence lui assure la victoire; il a suivi la méthode de Mahomet. En 4075 nouveau concile, à Rome encore. 11 voulut séparer entièrement l'Égl. de l'État, ou tout an moins se subordonner ce dernier. Jusqu'alors les souverains possédaient le droit de conférer les dignités cléricales, en présentant à leurs élus la crosse et l'anneau. Ils en avaient parfois abusé en trafiquant des bénéfices ecclésiastiques. Grégoire déclara qu'à l'avenir l'Égl. seule aurait le droit d'investiture, et il excommunia d'un coup les laïques investisseurs et les ecclésiastiques investis. II excommunia entre autres cinq conseillers d'Henri IV, comme convaincus de simonie, et menaça de la même peine Philippe, roi de France. Henri IV, homme faible, déréglé, mal élevé, fier d'avoir vaincu les Saxons 4075, voulut prendre la défense de ses conseillers; il reconnut son tort d'avoir facilité le commerce des charges ecclésiastiques, mais il refusa toute concession quant au droit d'investiture. Grégoire le somma de comparaître à Rome devant un concile; sa lettre commençait par: Bénédiction au roi Henri, s'il se montre (ils obéissant de l'Église, etc. Henri, après l'avoir déposé dans un conc. convoqué à Worms, lui répondit, 4076: Henri, roi par la pieuse volonté de Dieu, à Hildebrand qui n'est plus pape, mais un faux monarque, moine apostat, l'antéchrist s'élevant dans le temple de Dieu, etc. Henri fut solennellement excommunié la même année; l'émotion fut grande en Allemagne et s'il avait su saisir avec courage le moment favorable, s'il n'eût pas laissé passer la première indignation, il eût pu résister. Mais il traîna en longueur; le nombre de ses adversaires et de ses nobles mécontents s'accrut; deux partis se dessinent, et ses partisans eux-mêmes décident en octobre de la même année que s'il n'est pas rétabli dans la communion de l'Égl. avant la diète d'Augsbourg qui doit se réunir l'année suivante, ils se choisiront un autre empereur. Force lui est d'aller chercher le pardon du pape. Il part, traverse les Alpes par l'hiver le plus rigoureux, arrive en février 1077 à Ca-nossa où Grégoire résidait auprès de Mathilde. Grégoire le laisse passer et pleurer trois jours dans sa cour, en haillons, pieds nus, foulant la neige, et ce n'est qu'après cette grande humiliation que le saint-père finit par lui donner l'absolution, en stipulant qu'il ne gouvernera pas jusqu'à la prochaine diète. En attendant, quelques princes allemands ont choisi un autre empereur, Rodolphe de Souabe. Mais les év. et les princes italiens, les Lombards entre autres, outrés et indignés de la conduite de Grég., reviennent à Henri en stipulant qu'il n'acceptera pas les conditions que le pape lui a imposées. Ce parti s'accroît bientôt. Grégoire prendra le parti du plus fort et apprenant qu'Henri a perdu une bataille, il prononce de nouveau son excommunication et sa déchéance, et le « condamne à n'être jamais victorieux. » Henri, coutumier de la chose et sachant ce que coûte un pardon de Grégoire, réunit plusieurs conciles, à Bruxelles, Mayence, etc., qui condamnent Grégoire comme coupable de parjure et disciple de Béranger, et nomment à sa place, sous le nom de Clément III, Guibert, év. bavarois, 1080. Rodolphe ayant été vaincu et tué, le parti d'Henri augmente encore; il marche sur l'Italie, défait en trois rencontres les troupes de Mathilde, assiège trois fois Rome et s'en empare 1084. Grégoire a peur et se réconcilie avec le vaillant Robert Guiscard, duc de Calabre, qu'il avait excommunié en 1074. Il tient encore dans le château Saint-Ange où il s'est réfugié; Guiscard réussit à faire lever le siège de cette forteresse et il ramène Grégoire en triomphe dans Rome. Mais comme il s'était aliéné le cœur des Romains, l'impétueux pontife ne se croit plus en sûreté dans sa capitale et il se fait conduire à Salerne, où il f 25 mai 1083, en disant: J'ai aimé la justice et j'ai haï l'iniquité, c'est pourquoi je meurs en exil. Selon d'autres il aurait exprimé le regret d'avoir, à l'instigation du diable, allumé la discorde et la guerre. Il peut très bien avoir dit les deux choses, suivant les moments et à des points de vue différents. Il avait conciencieusement soustrait la papauté à la domination des puissances temporelles, et il laissait l'Europe plongée dans les plus cruelles calamités. Une simple pierre noire, avec son nom Hildebrand, marque depuis huit siècles le lieu où il repose, — On a de lui des Lettres, un recueil de maximes intitulé Dictatu* papœ, qui renferme toute sa politique et le germe de la future infaillibilité; et un Comment, sur les Psaumes pénitentiaux. Hist. par Voigt, de Halle, Weimar 1815; trad. par Jager, de Nancy, 1839.
9° Grégoire VIII, antip.. v. Calixte 2°.
10° Grégoire VIII; Albert de Spinacchia, successeur d'Urbain HI, élu 1187, ne règne que
2 mois. Troisième croisade.
Ho Grégoire IX; Ugolino de Conti, cardinal et év. d'Ostie, élu 1227, succ. d'Honoré III, veut exiger de Frédéric II l'accomplissement de la promesse qu'il a faite à son prédécesseur, de partir en croisade. Fréd., prétextant la peste, refuse de partir; il est excommunié 1228. Grégoire lui suscite des ennemis en Italie, une fois qu'il s'est enfin décidé de partir, et Frédéric, qui s'est couronné roi de Jérusalem, marche contre lui et le contraint de quitter Rome en fugitif. Grég. f 1241, âgé de cent ans, plein de haine, et sans avoir pu se venger ni réunir un conc. écuménique. Il avait fulminé 1231 une bulle d'extermination contre les malheureux vaudois du Piémont. On lui doit la clochette de la messe 1127. Il a réuni un certain nombre de décisions papales sous le nom de Décrétales de Grégoire IX, qui sont une des principales parties du Corps de droit canonique.
12° Grégoire X; Thibaut Visconti, archidiacre de Liège, élu 1271, après un interrègne de
3 ans, pendant lequel les cardinaux n'avaient pu s'entendre, f 1276. Il pi-end, à Lyon, des mesures pour qu'à l'avenir ces fâcheux interrègnes ne se renouvellent plus; les cardinaux seront pris par la famine; enfermés pendant la durée de l'élection, ils verront leurs rations diminuer dès le 3m* jour à un degré alarmant. Les cardinaux surent se soustraire cependant à ce qu'il y avait de trop vigoureux dans cette mesure. Il tint à Lyon un conc. général, 1272. auquel assistèrent les ambassadeurs de presque tous les princes d'Europe et de quelques-uns d'Asie; on s'y occupa de la réunion des Égl. grecque et latine, d'envoyer des secours en Orient, et de fixer quelques règles de discipline, entre autres, comme on l'a vu, d'accélérer les élections. — Rodolphe IV de Habsbourg, ami des papes, est élu empereur 1273.
13° Grégoire XI; Pierre de Rogier, de Limoges, né 1332. Neveu de Clément VI, il est élu pape à Avignon à 36 ans, succédant 1370 à Urbain V. Il essaie en vain de gouverner au moyen de bulles d'excommunication; les villes florentines n'en font pas de cas. Pour ne pas perdre ses possessions italiennes, il résolut, malgré bien des dangers et malgré les sollicitations de la France, de retourner à Rome, et il y f l'année suivante 1378. Rome ne comptait plus alors que 17000 habitants. C'était l'époque de Wicleff. C'était aussi celle de sainte Brigitte, Catherine de Sienne, et autres illuminées.
14° Grégoire XII; Angelo Corrario, d'une des premières familles de Venise, év. de cette ville, élu 1406 après la mort d'Innocent VII, comme pape d'Italie, pendant qne Benoît XIII continue d'être le pape de France. Il accepte un rendez-vous à Savone avec son co-pape pour arranger ce déplorable conflit, mais ils ne s'y rendent ni l'un ni l'autre. Les partisans des deux papes, lassés de tant d'intrigues, d'ambition et de mauvaise foi, se réunissent à Livourne, commencent par abandonner Grégoire, que les cardinaux déclarent hérétique, et méditent d'en faire autant de Benoît. Le conc. de Pise 1409 établit le principe que les conciles sont au-dessus des papes et qu'ils peuvent, non seulement les destituer, mais aussi régler et limiter leur puissance; puis on destitue solennellement les deux titulaires comme hérétiques, schismatiques et parjures, et on élit à leur place Alexandre V. Grégoire conserva cependant le titre de doyen des cardinaux, f 1417, âgé de 91 ans.
15° Grégoire XIII; Hugue Buoncompagnoni, versé dans la jurisprudence, prof, de droit très distingué à Bologne, sa patrie, élu 1572. Il protégea les pères de l'Oratoire. C'est à lui qu'échut le triste honneur de faire célébrer à Rome des fêtes solennelles et de faire frapper une médaille à l'occasion des massacres de la Saint-Barthé-lemy, l'année même de son avènement. Il envoya aussi des troupes et de l'argent à Henri III contre les réformés, secours que dès lors la France a rendus à Rome avec usure. Il aimait les arts et embellit Rome de plus, édifices. On lui doit surtout le calendrier actuel, qui est adopté auj. dans presque toute l'Europe, et qui est connu sous le nom de calendrier grégorien, f 1585 à 83 ans.
16° Grégoire XIV; Nicolas Sfondrato, élu 1590, ne régna que 10 mois; il n'est guère connu que par l'excommunication qu'il lança contre Henri IV, et par les secours de toute nature qu'il envoya aux ligueurs contre les réformés.
17® Grégoire XV; Alessandro Ludovisio, archev. de Bologne, sa patrie, puis cardinal, élu pape 1621, à l'âge de 67 ans. Plus doux, mais aussi injuste que ses prédécesseurs envers les réformés; il fonda le collège de la Propagande, érigea l'évêché de Paris en archevêché métropolitain, fournit des secours à l'empereur contre les protestants, canonisa Ignace de Loyola, et reçut l'abjuration du duc de Lesdiguières qui lui avait promis de se faire catholique s'il devenait pape, f 1623, pleuré des pauvres.
18° Grégoire XVI; Mauro Capellari, né à Bellune, près Venise, 18 sept. 176K, élu 1831, f 2 juin 1846. Ancien capucin, camaldule, préfet de la propagande; homme d'esprit, il cherche à maintenir intacte sa puissance, et ne demande ni ne commande presque rien, pour ne pas s'exposer à des refus ou à des conflits dont l'issue pourrait ne pas lui être favorable. Son règne fût marqué par de nombreux soulèvements contre le pouvoir temporel de la curie, à Bologne 1831 et 1832, à Rimini 1845. Il lui fallut, pour vaincre, l'intervention armée de l'Autriche et de la France; il punit les révoltés avec la plus grande rigueur, mais il n'en fut pas moins rudement éprouvé dans son administration intér. et dans ses finances. Son encyclique de 1832 avait déclaré la guerre à toutes les idées modernes, et grâce à son énergie, grâce aussi aux talents du card. Lambruschini, il obtint des succès en Allemagne, prépara le rétablissement de la hiérarchie en Angleterre, maintint sa position en France et en Espagne, et n'échoua pleinement qu'en Russie, contre l'emp. Nicolas.
GRÉGORIEN (Chant). De tout temps l'Égl. a chanté, et dès l'époque apostolique on en trouve le précepte et des exemples. Mais aussi chaque époque a eu des goûts et des besoins divers. Ambroise de Milan avait introduit un chant mélodique, et toute l'Église chantait. Une • réaction, qui se faisait déjà sentir au temps de Jérôme, se produisit plus entièrement sous Grégoire I*r. Soit besoin d'unité, et pour introduire dans toutes les égl. le même rite et le même chant; soit pour relever l'importance du chant en le faisant l'apanage des prêtres seuls; soit enfin qu'il estimât les mélodies trop mondaines et qu'il voulut réduire la musique d'église autant que possible à n'être qu'une harmonie, il ressuscita les vieilles psalmodies qui ne savent pour ainsi dire pas ce que c'est que la mesure. et qui, soit en majeur, soit en mineur, ne connaissent qu'un nombre de notes très restreint. Ce fut le plain-chant, le chant plane, égal, uni, qui pendant 12 siècles a servi de base au chant cathol., mais sans que l'on puisse dire exactement ce qu'il était à l'origine, et par conséquent sans que l'on puisse se prononcer sur sa valeur absolue. Après avoir réglé le tonal, c.-à-d. les 8 tons, 4 authentiques et 4 plagaux, du chant d'église, Grégoire fit un recueil de chants liturgiques, mélodies grecques et latines, mystères de Cérès Éleusine, hymnes d'Ambroise, et quand cet Anttphonarius Cento fut complet, il le lit sceller au maître-autel de la cathédrale, avec défense d'y rien changer. Il fonda 2 écoles, l'une près de Saint-Pierre, l'autre près du La-tran, destinées à former des chantres capables, et il ne craignit pas d'y enseigner en personne. On lui attribue aussi l'honneur d'avoir remplacé dans la notation les anciennes lettres de l'alphabet par les neumes, ou notes romaines, espèce de virgules, de points, ou de traits, que l'on mettait au-dessus du texte; il est cependant probable qu'il les a empruntés aux Romains. Malgré les précautions qu'avait prises Grég. pour assurer la durée de son œuvre, et quoique le moine Augustin l'eût popularisée en Gaule et en Gr. Bretagne, il était dians la nature des choses qu'elle subit l'influence du temps et des circonstances. L'incertitude de la notation, la monotonie du chant, le caprice d'un chantre habile ou vaniteux, tout concourait à modifier la musique dans son texte par l'addition d'un chant figuré. Le désordre était si grand à l'époque de Charlemagneque, par deux fois, il dut faire venir de Rome deux chantres pour corriger le chant français: la fois Théodore et Bénédict, l'un à Soissons, l'autre à Metz; la fois, 3 ans plus tard, deux chantres munis d'antiphonaires officiels. L'un d'eux, nommé Romain, tomba malade à Saint-Gall et s'y arrêta; c'est de lui que la ville a hérité le précieux exemplaire qu'elle conserve dans sa bibliothèque.
GRELLET, Étienne (de), né à Limoges 2 févr. 1773, d'une famille riche et noble. Son père faisait partie de la maison de Louis XVI. Il émigra à la révolution, vint à Coblence, prit part à plusieurs batailles, et finit par se rendre en Amérique, où il fut converti, se fit quaker, se maria, et se consacra à l'évangélisation et à la défense de toutes les causes philanthropiques. 11 fit entre autres 4 voyages en Europe, visitant les rois et les archev., et cherchant à tourner leurs pensées vers le bien, f 16 nov. 1855.
GRENIER, nom de 3 frères, gentilshommes verriers, de Gabre, comté de Foix, les sieurs de Commet, Sarradon et Lourmade, qui, arrêtés par des soldats et des chiens de boucher, et suspects d'avoir voulu délivrer le pasteur Ro-chette, furent condamnés à mort par le parlement de Toulouse, malgré l'intervention de Rabaut et de Voltaire; Rousseau refusa d'intervenir. Le pasteur fut pendu, les 3 gentilshommes eurent la tête tranchée, 18 févr. 1762. On leur avait offert d'abjurer pour sauver leur vie, ils moururent courageusement. Plusieurs complaintes rappellent leur martyre. Le nom de Grenier est encore auj. porté avec honneur par plus, familles protestantes, notamment par un pasteur. Celui de Riquet de Bonrepos, le procureur-général a disparu; sa campagne même de Bonrepos a passé entre les mains de la famille prot. des Courtois de Toulouse.
GRETSER, Jacob, né 1650 à Markdorf, près Constance, jésuite en 1677, prof, de théol. k Ingolstadt, f 1725. Auteur de près de 150 ouvrages de philos, et de théol.; un des plus savants hommes de son temps, il dut surtout sa réputation k des controverses contre les protestants, et fut délégué 1701 k la confér. de Ratisbonne. Humble et pieux autant que savant.
GREY, Jane, née 1537, décapitée 12 févr. 1554, k 17 ans par ordre de Marie-la-Sanglante. Elle n'avait fait que passer sur le trône et malgré elle, son beau-père le chancelier Dudley ayant intrigué pour faire exclure las deux sœurs d'Édouard VI et pour assurer sa succession à
Jane, qui venait d'épouser son fils Guilford. Elle ne céda qu'avec larmes k la force, mais vaincue par Marie, elle périt comme elle l'avait prévu; elle marcha à l'échafaud, sa Bible à la main et récitant le Ps. 51. Savante et humble chrétienne, elle brille dans l'hist. de la réforme par sa grâce autant que par ses malheurs. Tableau par P. Delaroche.
GRIBALDO, Matteo, piémontais, jurisconsulte à Padoue; membre de la communauté italienne de Genève, 1554, combattit le dogme de la Trinité, nia l'identité d'essence du Père et du Fils, dut s'enfuir, trouva k Tubingue une place de prof., mais proscrit de nouveau, vint à Berne, et finit par se rétracter, au moins en apparence, pour éviter de plus grands maux.
GRIEFS (Les cent). Centum gravamina. Les empiétements des papes et du clergé sur le pouvoir des rois et des peuples et sur la vie civile, avaient soulevé un mécontentement général et un besoin de réforme que les conc. de Bâle et de Constance n'avaient qu'imparfaitement satisfait. Ce mécontentement trouva sous Maximi-lien son expression officielle dans l'énumération des Cent griefs de la nation allemande, et la nécessité d'y faire droit compta parmi les négociations qui donnèrent l'empire k Charles-Quint. Il en fut de nouveau question à la diète de Spire. La Réformation d'un côté, le développement de l'indépendance nationale, et enfin le conc. de Trente lui-même, ont satisfait en quelque mesure à la plupart de ces réclamatiens.
GRIESBACH, Jean-Jacques, né 4 janv. 1743 à Butzbach, Hesse, étudia d'abord à Francfort où son père était pasteur, puis k Tubingue, Leipzig et Halle, où il prit ses degrés et où il fut nommé prof, en 1773; de là il vint à léna en 1775, fut nommé conseiller ecclésiastiq. et f 24 mars 1812. Très bien doué comme talent, science et caractère, très actif, il comptait d'illustres amis, entre autres Schiller. Stimulé par Semler, il se consacra surtout à l'étude et à la critique du texte. Il généralisa, peut-être un peu arbitrairement, ses observations sur les récen-sions, ou familles de mss., et accentua trop la différence entre les occidentaux et les orientaux. Ses recherches et ses nombreux voyages aboutirent à la célèbre édition du N. T., qui porte son nom; la Ire parut en 1774; elles se sont dès lors multipliées, et malgré des découvertes plus modernes, elles conservent encore leur valeur. Griesbach a aussi écrit: Symboke criticœ. 1793, Comment. criticus, 1794, etc.
GROENLAND, contrée reculée du continent américain, dont elle est cependant séparée par une mer intérieure et des détroits. Son nom. qui signifie pays verts, lui fut donné à cause des pâturages qu'il possédait anciennement, et non à cause de la couleur vert d'eau de ses habitants, comme le dit Adam de Brème. Découvert 982 par l'islandais Erich Raude (le rouge), le Gr. fut évangélisé dès 986 par de nombreux colons qui s'y établirent. Leif, fils d'Erich, fut envoyé 999 en Norwège auprès d'Olaf Trygwesen, et il en revint l'année suivante, chrétien et baptisé, accompagné de quelques missionnaires; il prêcha lui-même aux Esquimaux en plus de 50 endroits et bâtit plusieurs églises. Adalbert de Brème y envoya 1055 Albert pour év., et Victor H, en 1057, confirma cette extension du diocèse de Hambourg. En 1122 le diocèse fut rendu indépendant. Mais dès ce moment aussi les relations s'affaiblissent avec la Norwège, pour cesser ensuite presque entièrement jusqu'aux premières années du 18™e siècle. C'est en 1721 que le norwégien Égede entreprit de nouveau l'évangélisation de ce pays profondément déchu, et il n'y retrouva ni la nature verdoyante des temps anciens, ni aucun vestige de la race islandaise qui l'avait peuplée, ni aucun reste des égl. chrétiennes qui y avaient été fondées, soit que la mort noire, soit que des invasions d'Esquimaux eussent détruit les descendants de la race nordmane, séparés de leur terre d'origine par le refroidissement graduel de ces contrées. Dès lors ce sont les fr. moraves qui se sont chargés surtout de cette mission. Stach etBœh-misch s'embarquèrent 10 avril 1733 à Copenhague avec les bénédictions de la famille royale. En 1839 on comptait environ 1800 membres de l'Égl. répartis dans 4 stations.
GROOT, Gerhard (de), né oct. 1340 à Deven-ter (Hollande), fils de Werner Groot, consul de la ville. Prof, à Cologne, puis prêtre et chanoine à Utrecht et à Aix-la-Chapelle, il vivait d'une vie facile et mondaine lorsque, réveillé par les avertissements d'un chrétien fidèle, il se convertit et renonça aux avantages d'une belle fortune et d'une position élevée, pour se consacrer aux travaux plus humbles de son ministère. Après 3 années passées dans la retraite d'un couvent, il se présenta au peuple comme prédicateur. Puis, ayant fait la connaissance de Ruysbrook et de sa mystique, il fonda, de concert aveo son ami Florence Radewyn, une espèce d'ordre, ou d'institut, connu sous le nom de Frères de la vie commune, qui devait concilier les besoins de la vie contemplative avec les exigences laborieuses de la vie pratique. Ils portaient un capuchon gris, ce qui les fit surnommer KugeUwrren par le peuple. C'est à De-venter, en 1376, et avec l'approbation du pape, qu'il ouvrit sa maison qui, plus tard, fut transférée à Windesheim. Le noyau principal se composait de chanoines réguliers, auxquels s'adjoignirent des frères, vivant ensemble sans faire de vœux et mettant en commun leurs biens, sous la direction d'un chef ou président choisi par eux-mêmes. Ils consacraient leur temps à la prière, à des exercices d'édification et à la reproduction de bons manuscrits. L'ordre se propagea rapidement, surtout dans les Pays-Bas, et par son influence, par ses travaux littéraires et scientifiques, par son caractère populaire et vraiment religieux, il peut être regardé comme ayant concouru à préparer la réformation. Une des maisons les plus importantes de l'ordre fut celle du Mont-Sainte-Agnès, près Zwoll. Les fr. de la vie commune ont donné aux lettres des hommes tels que Hermann Busth, Agricola, Erasme; ils ont donné à la religion Thomas à Kempis, Gerlach, Petersen, Jean Wes-sel. De pareils noms font l'éloge de l'esprit qui a dirigé l'institution. Groot a organisé aussi des associations de femmes dans des conditions semblables. Il gouverna lui-même la première maison qu'il avait fondée à Deventer, et il \ resta jusqu'à sa f 20 août 1384. Auteur de plusieurs livres de piété et d'un travail sur les Fr. de la vie commune.
GROPPER, Jean, né 1502 à Soest. Dr théol. et chanoine à Cologne, puis doyen â Bonn et ensuite à Cologne. Savant et bien disposé, il se montra quelque temps favorable à la Réforme et seconda l'archev. Hermann; il rédigea même l'Intérim de Ratisbonne pour une conférence qui eut lieu 1541 entre Eck et Pflug d'un côté, Bucer et Pistorius de l'autre. Mais quand il comprit que les évangéliques ne rentreraieut plus dans l'Égl. de Rome, il se tourna contre eux; contre Bucer d'abord, qu'il avait fait venir à Bonn en 1541 et qu'il combattit dans son Anti-didagma; puis contre l'archev. Hermann. Il assista au conc. de Trente et publia en 1550 son Grand catéchisme. Ses services lui avaient mérité le chapeau de cardinal, mais il le refusa. Il f subitement 12 mars 1558 dans un voyage d'affaires k Rome.
GROSSE-TÈTE. Robert Capiton, surnommé en anglais Great-Head; né vers 1175 dans le comté de Lincoln; ami et contemporain de Roger Bacon; étudia à Cambridge, Oxford et Paris, enseigna avec succès dans plus, universités, commenta Aristote, et fut nommé év. de Lincoln 1235. Hostile aux deux grands ordres qui venaient de se fonder, il les serra d'assez près pour qu'ils dussent implorer l'intervention d'Innocent IV, et celui-ci, qui était à Lyon, obligea le vieil év. à faire le voyage et à se présenter devant lui. Grosse-tête profita de l'occasion pour faire entendre au pape et à sa cour d'amè-res, mais excellentes vérités, sur la fidélité aux engagements pris, et sur la puissance de l'argent, car, gagné par l'argent des moines, Innocent leur avait donné raison. De retour dans son diocèse, Grosse-tête entra de nouveau en lutte avec le pape au sujet d'un riche canonicat devenu vacant dans la cathédrale de Lincoln, et auquel le pape prétendit nommer de son autorité privée un jeune garçon qui était son neveu. L'év. s'y opposa avec énergie et n'hésita pas à qualifier d'horrible scandale le procédé du pape. Innocent, furieux contre ce « vieux radoteur, » parlait de le dénoncer au roi d'Angleterre. Il voulait même lancer contre lui une sentence d'excommunication; mais ses cardinaux l'en empêchèrent, car, lui dirent-ils, « il est plus saint que nous. • L'év. f vers la fin de la même année 1253, en paisible possession de son diocèse, ce qui fut une grande joie pour Innocent, qui d'ailleurs le suivit quelques mois plus tard. Les écrits de Grosse-tête prouvent une grande spiritualité et la foi au salut gratuit. II signait modestement: Robert, par la permission divine, le pauvre ministre de l'égl. de Lincoln.
GROTIUS, Hugues, ou Hugo de Groot, né 10 avril 1383 à Delft; un des hommes les plus universels des temps modernes. A 8 ans il composait des vers latins; à 16 il publiait un travail sur Marcien Capella, et d'autres travaux de philologie. Il étudia à Leyde les lettres, la philos., la théol. et le droit, et il devait se faire une place honorable dans toutes ces branches. A 15 ans il accompagnait à la cour de France l'ambassadeur Barnevelt, et se faisait remarquer par Henri IV. A son retour il publiait des poésies latines et des ouvrages d'érudition sur Sé-nèque-Ie-Tragique, Lucain, Aratus; une Anthologie grecque, des fragments de trag. et de comédies grecques, trad. en vers latins; en même temps il pratiquait le barreau à La Haye. En 1601 il était nommé historien des États de Hollande, et commençait les Annales de son pays, qui ne parurent qu'après sa mort. En 1607 il fut nommé avocat fiscal des provinces de Zélande et de Hollande; en 1613 conseiller pensionnaire de Rotterdam et membre des États-de Hollande; bientôt après, membre des États généraux. Mais ayant pris parti pour Barnevelt contre Maurice, il fut condamné comme républicain et arminien à une prison perpétuelle, et ses biens furent confisqués, 1619. Sa femme réussit au bout de 2 ans à le faire évader dans une caisse de livres. Il vint en France, où Louis XIII lui fit une pension. Après la mort de Maurice, il crut pouvoir rentrer dans son pays, mais il fut de nouveau proscrit, et passa en Suède où Christine, sur la recommandation d'Oxenstiern, lui fit un brillant accueil et le nomma son ambassadeur en France, fonctions qu'il remplit de 1635 à 1645. Ayant demandé et obtenu son rappel, il voulut revenir en Suède, mais une tempête l'assaillit dans la Baltique; il débarqua près de Dantsick, se fit transporter malade à Rostock, et f 28 août 1645. Il est le créateur du droit naturel et le père du droit des gens. Comme juriste et publiciste on lui doit un traité sur la Liberté des mers, et son immortel Droit de la guerre et de la paix. Comme historien, ses Annales de Hollande, et une Hist. des Goths, des Vandales et des Lombards. Comme théol., son livre De la vérité de la relig. chrét. fait époque dans l'apologétique, ses Annotations sont importantes pour l'exégèse gram-mat. et historique. Enfin sa correspondance est aussi riche qu'elle est étendue. Son tombeau est à Delft. La Hollande a célébré le 3me centenaire de sa naissance. QEuvr. compl. Amsterd. 1679. Vie, par Brandt en hollandais, Luden en allemand, Burigny en français.
GRUBENHEINER, Jamnici; sobriquet donné aux fr. moraves lorsque, persécutés sous Rocky-zane, ils devaient se cacher dans les fondrières et les cavernes des montagnes (habitants des fosses).
GRYNIEUS lo Simon, né 1493 à Vehringen, Souabe, abandonna sa place de recteur à Ofen, pour obéir à ses convictions évangéliques, et se rendit à Wittenberg auprès de Mélanchthon. Prof, de grec et de latin à Heidelberg 1524-1529; puis à Bâle, où il devint aussi Dr et prof, de théol. f 1541, de la peste. Ses connaissances variées et son activité lui assignent une place honorable parmi les hommes de la réforme. Outre des trad. de Plutarque. d'Aristote et de Chrysostome, on lui doit la découverte des 5 derniers livres qui nous restent deTite-Live; il les trouva au couvent de Laurisheim, près Worms, 1531. Il a publ. un recueil des voyagas modernes, sous le titre de Novus orbis. Il propagea la réf. en Souabe, surtout à Tubingue dont il réforma l'univ. en 1534; concourut au préavis des théol. allemands touchant le divorce de Henri VIII et de Catherine, travailla à la rédaction de la Conf. helvétique, et prit part au colloque de Worms 1540.
2o Jean-Jacques, né 1540 à Berne, étudia à Bâle et à Tubingue, fut prof, de théol. à Bâle, antistès depuis 1586. Jean-Casimir l'employa pour reconstituer l'univ. de Heidelberg et pour introduire dans l'Égl. le dogme protestant. Quoique aveugle depuis 1582, il continua jusqu'à la fin de prêcher et d'enseigner, + 1587.
GUALBERT, Jean, abbé et fondateur de l'ordre de Vallombreuse, vivait au 11™® siècle. Né vers 999 il passa sa jeunesse dans le désordre et le libertinage; mais devenu sérieux il renonça au monde, quitta son château de Pistoie, devint moine à l'abbaye de San Miniato, et alla en 1038-1060 fonder dans l'Apennin, à Vallombreuse, diocès de Fiesoli, un nouveau couvent, suivant la règle stricte de saint Benoît. Il est le premier qui ait eu l'idée de recevoir dans l'ordre des frères lais, faisant les mêmes vœux que les moines, mais soumis à une discipline moins rigoureuse et s'occupant surtout des choses temporelles. Gualbert f 1093 et fut canonisé 100 ans après à cause de ses vertus et de sa foi. Son ordre fut approuvé par le pape 1070; il s'est maintenu jusqu'à ce jour. Le costume, d'abord gris, puis brun minime, est noir depuis sa fusion avec les sylvestrins 1662. Un ordre du même genre fut fondé pour les femmes au 13mc siècle, par la sainte Humilité f 1310.
GUASTALLINES, v. Angéliques.
GUÉBARD, v. Gebhard.
GUÈBRES, nom persan qui signifie infidèles, et que les mahométans donnent à tous ceux qui n'étant pas musulmans, ne sont ni juifs, ni chrétiens, particulièrement aux adorateurs du feu.
GUELFES, v. Gibelins.
GUEMARA, mot chaldéen qui signifie: ce qui est dit, par opposition à la Mishna, qui était la tradition écrite. La Guemara est le comment, de la Mishna, et il y en a deux: celle de Ba-bylone, qui est due au rabbin Asche + 427, et qui fut achevée vers l'an 500; et celle de Jérusalem, qui devrait être appelée plutôt de Tibé-riade, et que l'on croit avoir été écrite par un des chefs principaux de cette célèbre école, le rabbin Jochanan, sans toutefois pouvoir fixer l'époque où il a vécu; Buxtorf le place vers l'an 230, Ganz vers 270; Maïmonides, Abarbanel, Élie le Lévite, vers 370, date qui paraît la plus probable.
GUERIGKE, H.-Ern.-Ferd., né 1803, prof, à Halle depuis 1829, pasteur d'une Égl. luthér. indépendante, assez étroit en dogmatique, mais vraiment libéral en politique, s'opposa en Allemagne à la politique de conquêtes et d'annexions, f 1878. Auteur d'une Hist. ecclés. très estimée, d'une Symbolique chrét., d'une Archéol. ecclés., d'Introd. auN. T. et rédacteur, avec Rudelbach et Delitzsch, d'une Revue de théol. luthér.
GUÉRIX, Eugénie (de), née 1805, f 31 mai 1848, est surtout connue par son Journal et les Lettres qu'elle écrivit en vue de son frère Maurice (4 août 1810, f juillet 1839). Orphelins de bonne heure, ces deux âmes d'élite cherchent l'idéal; Eugénie le trouve dans la foi chrétienne, dans la religion, dans ce que le catholicisme a de vraiment catholique, dans le mysticisme de Fénelon. Maurice oscille du doute à l'incrédulité, puis au panthéisme, et ne revient à une foi de sentiment que sous l'influence de sa sœur, de sa jeune épouse et de sa maladie. Ce sont deux nobles natures servies par un noble talent, et cependant il y a dans leurs Lettres et dans leur vie quelque chose qui énerve; il y manque la vigueur de la foi.
GUERRE. Une question controversée depuis l'établissement du christianisme, est celle du devoir des chrétiens quant au service militaire. La réponse dépend surtout de l'idée qu'on se fait de l'État, de sa responsabilité et de ses droits sur le citoyen. Il est évident que la guerre est une mauvaise chose, que le triomphe de la force ne constitue pas un droit, que le meurtre collectif ne prouve rien. Mais la question n'est pas là, car l'État par le seul fait de son existence, doit pouvoir défendre ses frontières et ses sujets, c.-à-d. avoir une force armée. Il s'agit plutôt, blâmant la guerre, de savoir si malgré cela le chrétien peut s'en faire une carrière, ou s'il peut se laisser contraindre par l'État à devenir soldat. Les fidèles de l'Égl. primitive s'y refusaient en général, moins à cause de certains textes de l'Évangile, ou parce que le service se trouvait parfois lié à des cérémonies païennes, que parce qu'ils méconnaissaient les véritables conditions de l'État, et parce qu'ils croyaient devoir se désintéresser entièrement des choses de ce monde. Tertullien leur donne raison, mais ce divorce entre le chrétien et le citoyen est si peu naturel que l'on voit de bonne heure des chrétiens dans les armées des empereurs. On connaît la Légion sacrée. Augustin soutient le devoir des chrétiens d'obéir à l'autorité sur ce point, quand ils en sont requis, et l'Égl. a dès lors peu varié. Quelques sectes seules au moyen âge, et plus tard les Mennonites et les Quakers, se sont prononcés énergiquement contre tout service militaire. En Allemagne et en France les autorités se trouvent parfois en présence d'un refus absolu, mais évidemment consciencieux. Dans ce cas des gens d'esprit trouvent toujours moyen de tourner la difficulté pour éviter un scandale. Quant au service militaire des ecclés. et des séminaristes, l'Égl. cathol. l'a toujours regardé comme incompatible avec leur caractère et avec leurs fonctions, quoique plus. év. et même des papes, comme Jules II, ne se soient fait aucun scrupule de ceindre l'épée et de partir en guerre. Les croisades n'étaient pas autre chose que des expéditions militaires, et des prêtres y jouaient leur rôle. Il n'y a donc pas de raisons de fond pour que les ecclés. soient absolument dispensés du service militaire qui, en tout cas, est une bonne école d'ordre et de discipline; mais il y aura toujours des raisons de convenance à ce qu'on en laisse un nombre suffisant pour l'exercice de leur ministère, et à ce que ceux-là qui seront enrôlés soient, autant que possible, employés à des services compatibles avec leurs fonctions habituelles. Toutes ces questions sont susceptibles d'être tranchées de diverses manières, suivant le tempérament, le caractère et la conscience de chacun. Le fait que des chrétiens éminents, tels que Havelock, Outram, et tant d'autres ont été soldats, prouve au moins qu'on ne peut condamner d'une manière absolue ceux qui par patriotisme, par goût, ou par besoin, s'engagent dans cette carrière.
GUIBERT, antipape; v. Clément 4°.
GUIDO 1° ou Gui, en latin Vitus, q. v.
2° Gui d'Arezze, ou YAritin, né vers 995 à Arezzo, Toscane; musicien consommé, fut longtemps moine au couvent de Pomposa, duché de Ferrare, qu'il dut quitter pour se soustraire aux tracasseries de son supérieur et homonyme, l'abbé Guido. L'év. d'Arezzo le protégea. Le pape Jean XIX le fit venir, admira sa méthode, et le combla de biens. Dès lors, les uns disent que les moines de Pomposa le rappelèrent; d'autres qu'il entra au couvent de Sainte-Croix d'Avellana, près d'Arezzo, et qu'il en devint l'abbé, après un voyage de quelques mois fait à Brème sur la demande de l'archev. Hermann. Guido f 4050. Son principal ouvrage est le Micrologus, petit traité des règles de l'art musical. Il est surtout célèbre par sa méthode de solfège, par le système de notation qu'il inventa ou perfectionna, et par les clefs qu'il mit en tête des lignes, v. l'abbé Gerbert, Fétis, etMarcillac.
3° Guido de Brès, v. Guy.
4° Guido de Joinville, fondateur d'un hôpital à Châlons, le remit à une association relig. qui, après s'être acquis une maison à Paris 4294, fut autorisée par Boniface VIII, 1300, prit le nom d'Hospitaliers et adopta la règle de saint Benoît .
GUILBERT. v. Gilbert.
GUILLAUME 4<> de Saint-Amour, Franche-Comté; né vers 4200, devint Dr de Sorbonne et chanoine de Beauvais. Il livra une guerre acharnée aux ordres mendiants, dominicains et franciscains, qui voulaient s'imposer à Paris, non seulement comme professeurs, mais comme directeurs des consciences et ayant cure d'âmes. Protégés par Alexandre IV, ils se remuaient beaucoup pour en venir à leurs fins. Guill. les combattait dans ses sermons et dans ses leçons, leur déniant toute existence légale en vertu du conc. de Latran 4245, qui avait interdit la création de nouveaux ordres; critiquant amèrement la mendicité; refusant à ces mendiants le droit d'invoquer en leur faveur des passages oomme Luc 40, 7. qui ne regardent que les ecclés. réguliers, seuls autorisés à prêcher; leur reprochant comme une impertinence de se glisser dans son domaine et d'empiéter sur ses droits et ses devoirs. Dénoncé à l'év. de Paris, il ne fut pas poursuivi, parce qu'il n'avait attaqué personne en particulier. Mais son livre Les Périls des derniers temps 4256, ayant été soumis au pape, il fut condamné, ce qui concourut beaucoup à son succès. Les ordres avaient des défenseurs à foison, et des amis comme Thomas d'Aquin; il leur fut facile de venir à bout d'un simple chanoine. Guill. fut déposé et se retira à Saint-Amour; mais la mort d'Alexandre lui permit de rentrer à Paris 4263, et il y enseigna, sans être inquiété, jusqu'à sa f 4272.
2° Guillaume de Champeaux, v. Champeaux.
3° Guillaume, né en Aquitaine, nommé comte de Toulouse et duc d'Aquitaine par Charlemagne, en récompense de ses heureuses expéditions contre les Sarasins en Languedoc, se retira du monde 808, et fonda dans la vallée de Gellone, près Lodève, le monastère qui reçut de lui le nom de Saint-Guilhem du Désert, f 842, et canonisé.
4° Guill. de Dijon, né 964 d'une famille souabe considérable, et filleul d'Othon I«r et d'Adélaïde, entra comme oblat à l'âge de 7 ans dans un couvent des environs de Vercelli, étudia à Vercelli et à Pavie et rentra dans son cloître. Il refusa le serment de fidélité à son évêque. lorsqu'il s'agit de l'ordonner diacre, et se rendit avec l'abbé Majolus à Clugny, où il se fit consacrer et où il entreprit l'œuvre difficile de la réforme des couvents. Ayant accompli la réf. du couvent de saint Benignus à Dijon, il y resta comme abbé et fit sentir de là sa salutaire influence sur plus de 40 couvents, en France et à l'étranger, notamment dans le dioc. d'Ivrée où il passa 2 ans. Il fit entendre de sérieuses vérités aux rois Henri et Robert, ainsi qu'aux papes. Il fit 2 fois le voyage de Rome, 995 et 998. f 4034. Outre la discipline, il s'est occupé d'améliorer l'instruction dans les écoles des couvents.
5<> Guill. de Malavalle, ou Maie val, gentilhomme français, militaire, dont la vie offre beaucoup d'incertitudes, quoiqu'elle ait été écrite par son disciple Albert et par l'év. Théo-bald de Grossato; mais ces deux biogr. ne nous sont parvenues que tronquées et en mauvais état. On sait, mais sans date précise, qu'il eut une jeunesse licencieuse; qu'après sa conversion il fit un pèlerinage à Saint-Jacques de Com-postelle, et un autre à Jérusalem; qu'après son retour, 1153, il se fixa dans une caverne de la vallée de Malavalle, près de Sienne; que plus, personnes se réunirent à lui pour vivre dans la sainteté (v. Guillelmites) et qu'il f 10 fév. 1157.
6° G. de Bourges, de la famille des comtes de Nevers; chanoine à Soissons et à Paris, entra dans l'ordre de Citeaux, et vivait dans la retraite quand il fut appelé malgré lui à l'archev. de Bourges 1201. Pieux et tolérant, f 10 janv. 1209.
7° Guill. ou William Somerset de Malmes-bury; hist. anglais du 12me siècle; né 1096 dans le Somerset,, étudia à Oxford. Son père était normand, sa mère saxonne. De l'ordre des bénédictins, il entra au couvent de Malmesbury, où il remplit les fonctions de bibliothécaire et de chantre, ayant refusé d'être abbé, f peu après 1143. Il a beaucoup écrit: une Hist. des rois d'Angl. jusqu'à Henri 1er, 449-1127; avec une suite 1127-1143; une Hist. des pontifes anglais, etc. Consciencieux et sûr; excellent latin.
8° Guill. de Tyr, né en Syrie vers 1140, passa sa jeunesse à Antioche ou à Jérusalem. Destiné à l'état ecclés. il vint achever ses études en Italie et à Paris, vers 1160. A son retour il fut très bien reçu par Amaury, qui le nomma archidiacre de Tyr 1167, et qui l'envoya la même année auprès de l'emp. Manuel, pour négocier une alliance contre l'Égypte. Ayant eu des difficultés avec son archev. il se rendit à Rome 1168; fut en 1169 nommé précepteur du jeune prince Baudouin, qui, à son avènement au trône, le nomma chancelier et en 1174 archev. de Tyr. Il assista au 3me conc. de Latran, passa ensuite quelques mois à la cour de Manuel, et revint par Antioche où il porta des instructions de l'empereur. Dès lors son histoire est incertaine. Une version le fait mourir à Rome vers 1184, empoisonné par son archev. le patriarche Héraclius, de Jérusalem, dont il poursuivait la destitution; une autre version porte qu'en 1188 il était légat de Grégoire VIII lors de la rencontre de Philippe-Auguste et de Richard d'Angleterre. Il a écrit en latin une Hist. des croisades, extrêmement appréciée, que l'on possède encore, et qui prouve autant de science que de talent et de sagacité critique. Un autre livre: les Princes de l'Orient, est perdu.
9o G. d'Occam, v. Occam.
10° G. de Newbury, dit le Petit; écrivain anglais, né 1136 à Bridlington, près York; chanoine de Fabbaye des Augustins de Newbury, où il avait été élevé. Auteur d'une Hist. de Guillaume-le-Conquérant et de son temps, 1066 à 1197, qui passe pour une des œuvres les plus remarquables du moyen âge. Il a aussi écrit des Homélies, et une Expl. du Gant, des cantiques.
H° G. de Nangis, moine bénédictin de Saint-Denis, vers 1300; auteur d'une Chronique qui va de la création jusqu'à l'an 1300; il est cependant douteux que la Ire partie soit de lui. Ses travaux sur Louis IX, Philippe le Hardi, Robert, sont très appréciés.
12° Guillaume III, v. Nassau et Orange.
GUILLELMITES, ou Guillemins, congrégation relig. fondée par Guillaume de Malavalle vers 1153. Ils allaient nu-pieds et mendiaient; cependant Grégoire IX leur permit de porter des souliers. Innocent IX régla par une bulle le mode d'élection du prieur général. Alexandre IV ayant fondu tous les ordres d'ermites dans celui des augustins, les guillemins obtinrent de conserver leur indépendance, mais au prix de nombreux sacrifices en hommes et en couvents. En 1256 ils avaient un monastère à Montrouge; en 1298 ils vinrent à Paris et comptaient des maisons en Allemagne, Pays-Bas et Italie. Leur costume leur avait fait donner le nom de blancs-manteaux. La réforme des petits-augustins naquit 1594 dans leur maison de Bourges. Ils disparaissent au 18roe siècle.
GUIZOT, François-Pierre-Guillaume, né à Nîmes le 4 oct. 1787, fils d'un avocat exécuté 8 avril 1794, et petit-fils d'un pasteur du désert, fit ses études classiques à Genève, son droit à Paris, vécut de sa plume quelques années, fut précepteur chez Stapfer, q. v., et inaugura sa carrière politique comme secrétaire de l'abbé de Montesquiou, ministre de l'intérieur. Aussi grand par le talent que par le caractère, il a forcé l'estime et l'admiration, sinon la sympathie de tous ceux qui l'ont connu, et si l'austérité de ses manières imposait le respect, il avait dans l'intimité un charme de séduction qui lui gagnait les plus prévenus. Penseur, philos., professeur, publiciste, historien, homme d'État, ambassadeur, député, ministre, il a brillé partout au premier rang, et s'il a fait des fautes, c'est parce qu'il n'a pas réussi qu'on a pu les lui reprocher. Sa vie publique, que nous n'avons pas à rappeler ici, se caractérise par la recherche constante de l'ordre dans la liberté; il haïssait les excès d'une révolution qui l'avait fait orphelin de bonne heure, mais il resta libéral sous la Restauration, et c'est encore au nom de ses principes qu'il fit en 1815 le célèbre voyage de Gand. Marié en 1812 à Pauline de Meulan, il en épousait la nièce, Élisa Dillon. en 1828. Veuf de nouveau en 1833, il vit sa vieille mère s'asseoir à son foyer et lui reconstituer une maison. C'est comme ministre de l'Instr. publ. qu'il a rendu à son pays les plus précieux services. Tombé du pouvoir en 1848,
11 n'a cessé d'aimer la France et de la servir selon ses moyens, en attirant sa pensée vers les choses élevées. Membre de l'Acad. franç. depuis 1836, c'est lui qui dut recevoir le P. La-cordaire, 24 janv. 1861, et le présenter à Napoléon. Protestant de cœur et croyant, Guizot s'intéressa touj. aux œuvres et aux sociétés relig. qu'il présida souvent, et si parfois il parut donner des gages aux catholiques et aux philosophes, il n'alla pas plus loin, et resta fidèle aux convictions de sa jeunesse. C'est lui qui obtint de M. Thiers la convocation du synode de 1872, et il se plut à rappeler à cette assemblée, que 70 ans auparavant, il avait lu la Bible dans le Désert comme proposant, f Val Richer.
12 sept. 1874.
GUNDULF, chef obscur d'une secte du moyen âge, qui rejetait l'Égl. extérieure, le clergé et les sacrements, prétendait ne vouloir reconnaître que la loi de Christ, et condamnait le mariage. Il doit avoir vécu dans le nord de la France. Ses disciples discutèrent avec l'év. Gerhard à un synode, 1035, et finirent par être arrêtés.
GUSTAVE-ADOLPHE, roi de Suède 1611-1632, le 6«« de la dynastie des Wasa. Né 1594, il s'illustra par ses victoires sur les Danois et les Moscovites, et contraignit les Polonais, à la suite de deux grandes victoires, à lui céder toutes les places fortes de la Livonie et de la Prusse polonaise. Le chancelier Oxenstierna était à la téte de son conseil, tout formé d'hommes éminents. Son dévouement à la cause évangélique et ses succès militaires le désignaient aux protestants de l'Europe, comme le souverain le plus capable de les défendre contre les princes cathol. qui. depuis 1619, sous la direction fatale de Ferdinand III, travaillaient avec acharnement à détruire l'hérésie. La ligue avait vaincu l'électeur palatin Frédéric Y; Tilly et Wallenstein avaient écrasé le roi danois Christian IV et l'avaient contraint à signer l'humiliante paix de Lubeck, 1629. En dix ans la cause protestante avait subi tous les revers et toutes les humiliations. Elle semblait perdue. Gustave-Adolphe paraît alors, et fait alliance avec les princes évang. de l'Allemagne, auxquels il avait déjà rendu service en 1628 en défendant Stralsund contre Wallenstein. Brandebourg et la Saxe ne se décident que difficilement à se joindre à l'union protestante. Pendant les négociations Magdebourg succombe. Enfin l'union est conclue, et Richelieu, qui persécute les huguenots en France, promet au jeune roi de Suède 1,200,000 fr. par an de subside, pour aider les protestants d'Allemagne et pour détruire la maison impér. des Habsbourg. Gustave-Ad. s'embarque en 1630, par l'hiver le plus rigoureux, traverse la Poméranie, le Brandebourg, la Silésie; et ce roi de neige, comme Ferdinand l'appelle, fond sur l'armée impériale, remporte une brillante victoire à Leipzig en 1631, une seconde au passage de la Leck, où Tilly est mortellement blessé, 1632, et se prépare à marcher sur la capitale. Ferdinand épouvanté rappelle Wallenstein, et les deux rivaux se rencontrent à Lutzen, 6 nov. 1632. Gustave-Adolphe est vainqueur, mais il périt presque au commencement de l'action, laissant le commandement au duc Bernard de Saxe-Weimar. Le matin même il venait de composer le cantique, si populaire en Allemagne: Verzage nicht, du Hauflein kkin. Oxenstiern son chancelier et ses ministres continuèrent son œuvre, mais au point de vue politique surtout. Si en 1634 ses conquêtes furent en partie compromises, ce qu'il avait fait pour le protestantisme demeura. Il n'avait pas eu la prétention de l'établir par la force; il avait voulu seulement empêcher la force de l'anéantir, et le protestantisme allemand conserve religieusement sa mémoire comme celle de son libérateur aux mauvais jours. Au second jubilé centenaire de sa mort, le 6 nov. 1832, une Société s'est fondée sous son nom
à Leipzig et à Dresde, pour venir en aide aux communautés souffrantes et aux protestants dis- « persés; le Dr Grossmann de Leipzig en fut le fondateur et resta son président aussi longtemps qu'il vécut. Dix ans plus tard, elle vit se rattacher à elle une autre société du même genre, qui s'était formée à Darmstadt sous les auspices du surintendant Zimmermann. Cette fusion eut lieu en sept. 1842 à Leipzig, et fut confirmée à l'assemblée générale de Francfort 1843. Leipzig fut désigné comme le siège central de la Société de Gustave-Adolphe, qui a pris dès lors une importance considérable et qui a rendu aux Égl. des services signalés. Chaque État a son comité central, qui correspond à son tour avec les comités sectionnaires des principales villes de son ressort. Chaque année la Société se réunit en assemblée générale, tantôt dans une ville, tantôt dans une autre, désignée d'avance. Les dons qu'elle reçoit se répartissent en subsides aux égl. pauvres, en proportion de leurs besoins, et chaque année aussi une somme exceptionnellement forte est affectée à une égl. spéciale qui se recommande par sa position ou par des besoins extraordinaires, construction d'un temple, d'une école, d'un presbytère, etc. En 1867 la Soc. Gustave-Adolphe comptait 1,117 sections régulières, 270 associations de femmes, et 10 d'étudiants. Une somme de 500 mille fr. avait été répartie entre 800 églises.
GUTZLAFF, Charles-F.-A., missionnaire en Chine. Né à Pyritz, Poméranie, 1803, il étudia à Berlin sous Jâneke et partit en 1826 pour l'île de Sumatra; il travailla ensuite quelque temps dans le royaume de Siam. Un riche marine lui permit de se vouer à la prédication de l'Evangile en Chine sans dépendre d'aucune société. Son extrême aptitude à apprendre la langue et à adopter le genre de vie du pays, et plus tard sa position comme interprète du gouvernement anglais, lui permirent de pénétrer sans difficulté dans l'intérieur du pays, et d'y faire plusieurs voyages et d'abondantes distributions de Bibles et de traités. L'emp. de Chine le nomma mandarin de 3me classe. Dans le but de travaillera l'évangélisation de la Chine par les Chinois eux-mêmes, Gutzlaff y fonda une vaste association composée de prédicateurs indigènes. Cette institution ne produisit pas tous les fruits qu'on en attendait. Un voyage qu'il fit en Europe en 1849 contribua beaucoup à réveiller le zèle en faveur de cette portion de l'œuvre des missions. Il mourut peu après son retour en Chine en 1851. C'était un homme d'une grande foi et d'une grande puissance; il a beaucoup semé; l'avenir seul dira si son ministère a laissé des fruits durables.
GUY de Brès, ou Guido, le fondateur de l'Égl. évangélique belge; né à Mons 1540. D'abord peintre sur verre, puis ecclésiastique. Poursuivi à cause de son attachement à l'Evangile, il se rendit à Londres, où sa foi se fortifia au sein de l'Égl. des étrangers. Plus tard il vint à Lausanne et à Genève, où il fit un petit séjour. C'est de là qu'il partit comme évangéliste et prédicateur itinérant, parcourant la Belgique et fondant partout de petites églises, jusqu'à ce que, après la prise de Valenciennes 1567, il fut arrêté dans sa fuite et condamné au supplice de la corde. En 1562 il avait fait parvenir à Philippe II sa Conf. de foi. C'est celle qui fut reprise par les synodes d'Emden et de Dordrecht, et qui est devenue la conf. de l'Église belge.
GUYON (M®®), née Jeanne-Marie Bouvier de la Mothe; née à Montargis 13 avril 1648. Son père était maître des requêtes. Élevée chez les ursulines, et se nourrissant des écrits de François de Sales et de Mme de Chantai, son caractère déjà porté au mysticisme acheva de se développer dans cette direction. Elle voulait se faire religieuse, mais sa famille s'y opposa et la maria malgré elle. Ce mariage ne fut pas heureux. Restée veuve à 28 ans, 1676, avec plus, enfants, elle se mit sous la direction de l'ab-besse Granger, puis sous celle du mystique Ber-tot. Après la mort de celui-ci, elle se lia intimement avec le p. Lacombe, supérieur des bar-nabi tes de Thonon, que l'év. de Genève lui donna comme directeur spirituel. Son séjour au couvent de Gex lui étant devenu impossible, et des visions enthousiastes lui ayant confié une mission divine, elle commença en 1681 et continua pendant 5 ans à mener une vie errante, visitant le Piémont, le Dauphiné, d'autres provinces encore, prêchant partout sa doctrine, réduisant toute la religion à l'amour pur de Dieu et à la mortification de la chair, et concluant à la passivité complète de l'âme, au quié-tisme. Elle finit par revenir à Paris où elle se fit de nombreux partisans, entre autres Fénelon et Mme de Maintenon. Mais la doctrine de Molinos, qui avait beaucoup d'analogie avec la sienne, ayant été condamnée par le pape 1687, elle fut naturellement compromise et comprise dans la même disgrâce, enfermée dans un couvent, puis à Vincennes. Les rapports qu'elle entretenait avec Fénelon, au moment même où ce dernier était en butte aux attaques de Bos-suet, furent cause qu'elle fut indirectement impliquée dans les mêmes recherches, et à la suite de conférences présidées par Bossuet, elle fut condamnée à se rétracter et à passer dix ans à la Bastille, 1695-1705. Après sa libération elle fut internée à Diziers près Blois, où elle passa le reste de ses jours, ne s'occupant que de bonnes œuvres, f ® juin 1717. Elle n'a pas écrit moins de 39 volumes. Ses principaux ouvrages sont: le Moyen court et très facile pour l'oraison; le Cant. des cantiq. selon le sens mystique; les Torrents spirituels, les Vers mystiques, etc. Ses opuscules ont été publ. Cologne 1704. On a aussi sa Vie, écrite par elle-même, mais dont l'authenticité n'est pas établie. L'influence de MGuyon a été peut-être plus grande à l'étranger qu'en France. Arnold, Ter-steegen, la Bible de Berlebourg lui ont donné dans l'Égl. réf. d'Allemagne une popularité passagère, qui malheureusement n'a pas toujours été sans quelques excès.
GYROVAGI, espèce de circoncellions, qui ne voulant rien de la vie de cénobites, s'arrangeaient, en mendiant, pour vivre aux dépens des établissements monastiques. Les conciles essayèrent en vain de porter remède aux désordres de cette vie vagabonde; l'introduction stricte de la règle de saint Benoît put seule y mettre un terme.