D
DACH, Simon, né à Memel 29 juili. 1605, t 15 avril 1659, commença ses études à Wittenberg, puis à Magdebourg; il fit sa philologie et sa théol. à Konigsberg, oii de grade en grade il finit par devenir prof, de poésie. Connu surtout comme poète, il a écrit Anne de Tharau, et des Odes: l'Aigle, la Rose, etc. Mais ses chants d'église sont supérieurs à ses autres compositions; plusieurs lui ont été inspirés par les circonstances; il traite souvent de la mort et de l'espérance. La biblioth. de Breslau possède de lui 6 cahiers ou volumes mss. de poésies inédites. Il faisait partie du cercle poétique de Kônigsberg, avec Mylius, Roberthin, Thilo, Albert, etc.
DACHÉRY, ou d'Achèry, Jean-Luc, né 1609 à Saint-Quentin, entra chez les bénédictins, et en 1632 dans la congrég. de Saint-Maur. Nomme bibliothécaire à l'abbaye de Saint-Germain des Prés, il rechercha et publia avec le plus grand soin les documents et les mss. relatifs à l'hist. ecclésiastique et rendit ainsi de vrais services à la science, + 1685. Il a fourni à Mabillon les matériaux pour ses Acta Sanctorwn. Son principal ouvrage est le Spicilegiumvet. Scriptorum, 14 vol. 4<>. Il faut noter aussi l'Ép. de Barna-bas, les Œuvres de Lanfranc, la Règle des Solitaires, etc.
DACOSTA, Isaac, 1798-1860, juif converti, l'émule de Bilderdyk, l'un des plus grands poètes de la Hollande, fut aussi l'un des champions les plus ardents et les plus convaincus de la foi évangélique. Il a donné à Amsterdam, où il vivait, de nombreuses conférences bibliques; mais ses ouvrages de théol. n'ont pas eu le même succès que ses poésies. Il faut mentionner cependant ses Considér. sur l'esprit du temps 1823, et son volume: Israël et les nations.
DAILLÉ, Jean (en latin Dallœus), né à Cbt-tellerault 6 janv. 1594, f à Paris 1670. Il perdit ses parents de bonne heure, fit ses études à Saint-Maixent, Poitiers, Chàtellerault, et venait d'entrer en théol. à Saumur, quand Du Plessis-Mornay lui confia l'éducation de ses deux petits-fils Fontenay-Husson. En 1619 il visita avec ^ux l'Italie, perdit l'un d'eux, Philippe-Samson, à Bologne, et ne réussit à soustraire son corps à l'Inquisition qu'en l'expédiant en France comme ballot de marchandises. Il vit à Venise Sarpi et Asselineau, parcourut ensuite la Suisse, l'Allemagne, la Hollande et l'Angleterre, et revint en France, fin de 1621, pour y reprendre ses études. Reçu ministre en 1623, il fut d'abord chapelain de Du Plessis à La Forêt sur Sèvre, puis successivement pasteur à Saumur 1625, et à Paris depuis 1626; il y resta 44 ans. Il assista au synode d'Alençon en 1637, et présida en 1639 celui de Loudun, le dernier qui fut autorisé par le gouvernement. Marié à Saumur en 1625, il perdit sa femme en 1631; leur unique enfant, Jean-Adrien (ou Horace), fut consacré m 1653, appelé comme pasteur à La Rochelle, puis en 1658 à Charenton où il fut pendant 12 ans le collègue de son père; il f à Zurich 1690, \ictirne de la Révocation. La fin de la vie de Daillé fut paisible et sans épisode. D'nn caractère facile, mais qui n'excluait pas la fermeté, habituellement gai, ouvert, plein d'entrain, il était instruit et éloquent. Il a écrit 724 sermons; on en a 20 volumes. Ses principaux ouvrages sont: un Traité de l'emploi des Pères, que Bayle qualifie de chef-d'œuvre; une Apologie pour les égl. réformées; un travail sur les Traditions des Latins quant aux cérémonies de leur culte; une Apologie des synodes d'Alençon et de Charenton, où il défend contre les calvinistes rigides ces deux synodes qui avaient refusé de condamner Amyraut, et où il se prononce en faveur de la grâce universelle; un grand nombre d'écrits de circonstance, discours, méditations, etc. Son style est doux et gracieux, mais manque d'élan. Daillé était l'ami de Con-rart, et Balzac l'appelle un grand docteur. — Deux autres Daillé sont nommés comme ayant fondé l'un l'égl. de Vevey, l'autre celle de Boston; d'ailleurs inconnus.
DAISENBERGER, v. Ober-Ammergau.
DALBERG (de), Charles-Théodore-Antoine-Marie, comte de l'empire, né 8 févr. 1744 à Hernsheim près Worms, chanoine, gouverneur d'Erfurt 1772, s'occupa très soigneusement des écoles, et en général de tout ce qui pouvait servir an développement et au progrès, même en dehors de sa sphère d'action directe. Coadjuteur dejtfayence 1787, év. de Constance 1788, il fut ordonné archev. de Tarse, il se proposait l'organisation d'une Égl. cathol. nationale allemande, et fit préparer différents travaux dans ce sens. En 1789 il abandonna Constance aux soins de son coadjuteur, le célèbre Wessenberg. En 1$02 il devint électeur de Mayence, archev. deRatisbonne et d'Aschaffenbourg et archichan-celier de l'empire. Il présida les dernières diètes d'Allemagne, résista d'abord aux envahissements de Napoléon, se soumit ensuite à ce qu'il ne pouvait empêcher, se rallia à la France, assista au couronnement, donna l'idée de la con-féd. du Rhin, dont il devint le président, 1806; fut nommé grand-duc de Francfort, avec Ha-nau et Fulda pour annexes, 1810, et désigna pour son successeur éventuel Eugène Beauhar-nais. Après le désastre de Leipzig il resta fidèle à Napoléon, résigna ses pouvoirs administratifs et ne garda que son évêché de Ratisbonne, où il se retira et f 10 févr. 1817. Quelque jugement qu'on porte sur sa politique, ce fut un grand caractère, plein de zèle et de désintéressement, et une noble intelligence. Le meilleur de ses ouvrages est intitulé: Méditation sur l'Univers; il a eu de nombreuses éditions. — Son neveu, Emmeric de Dalberg, 1773-1833, se fit naturaliser Français; il fut membre du gouvernement provisoire après la chute de Napoléon, et accompagna Talleyrand au congrès de Vienne. Il passe pour avoir collaboré à l'Hist. de la Restauration, de Capefigue.
DALMAT1QUE, pièce de vêtement à manches, que les diacres romains portent les jours de grandes fêtes, par-dessus l'aube et l'étole. Elle est faite d'étoffes précieuses; d'ordinaire blanche et bordée de pourpre. On la fait remonter au 4me siècle.
DAMASCÈNE, Jean, ou Jean de Damas; moine grec né à Damas, d'où il tire son nom, vers 676, f entre 754 et 787. La légende s'est tellement emparée de lui que son histoire en est devenue très incertaine. Fils d'un fonctionnaire nommé Sergius, il fut instruit dans toutes les sciences • par le moine italien Cosmas, et quoique chrétien il fut nommé gouverneur de Damas par les califes. Mais compromis dans une intrigue, il perdit les bonnes grâces de Léon Isaurien, pour avoir écrit en faveur du culte des images, et il se retira au couvent de Marsaba, ou Saint-Saba, près de Jérusalem, où il fut ordonné prêtre. Un lion, dit la légende, lui céda sa caverne. Il se consacra dans sa cellule aux études de théol. et devint le saint Thomas de l'Égl. grecque. Il travailla dans toute la Syrie, et jusqu'à Constanti-nople, à combattre les iconoclastes, ainsi que les jacobites, les sarrasins, les manichéens, les nestoriens et les monothélètes. Il écrivit aussi des traités sur la Trinité, le Jeûne, les (huit) Péchés capitaux, des Hymnes, des Odes; des Commentaires, en grande partie extraits de Chrysostome, avec abus des allégories; une espèce de roman chrétien, Barlaam et Josaphat. où l'on voit un roi indien converti par l'ermite Barlaam, etc. Son principal ouvrage est: la Source de la connaissance; il se compose de trois livres distincts: lo la Dialectique, en 68 chapitres, principes de philos., d'après Aris-tote et Platon. 2° Des Hérésies, leur exposé, en 103 articles, les 80 premiers d'après Épiphanes; 3° Exposition de la foi orthodoxe, en 100 fragments, d'après les conciles et les pères. Ses Œuvres ont été publ. k Paris 1712, grec-latin, par Lequien, avec la collaboration de Léon Alla-tius; réimpr. Vérone 1748.
DAMASE I, né en Portugal, élu 366 en remplacement de Libère, et en concurrence avec Ursicin, protégea saint Jérôme et le fit son secrétaire. Il veilla à la conservation des mœurs et au maintien de la discipline ecclésiastique. Valentinien lui donna le droit de trancher les différents entre évêques. Il convoqua plusieurs conciles contre les ariens; en 381 conc. de Constantinople, qui confirme celui de Nicée; 150 évêques, dont i de l'occident. Le culte des saints commence à poindre. Il anathématisa Ursace, Valens, Auxence, Apollinaire, Vital et Timo-thee, hérétiques ou schismatiques. f 384. Sa vie et ses écrits sont impr., Paris 1672. — 2° Da-mase II, allemand, év. de Brixen, Tyrol, élu 1048, ne fut pape que 23 jours, f à Palestrina.
DAMIANISSINES, v. Clarissines.
DAMIEN 1° patr. d'Alexandrie, f 601, enseignait que les hypostases de la Trinité ne sont pas Dieu par elles-mêmes, et (pie leur réunion seule fait la divinité. Ses partisans reçurent les noms de damianites, de angélites (d'Angelium, lieu de leur réunion), ou de tétradites(4 dieux). — 2° V. Cosmas. — 3° Damien. ou Damiani, Pierre, né à Ravenne vers 988 ou 1007, garda les pourceaux dans sa jeunesse, mais recueilli par un de ses frères, archidiacre de Ravenne, il profita si bien des leçons qui lui furent données qu'il put à son tour se livrer à l'enseignement et qu'il y trouva honneurs et richesses. Cependant il quitta le monde et se retira au couvent de Font-Avellana, Ombrie, dont il fut bientôt nommé abbé, 1041. L'austérité de sa vie et sa sévérité envers les autres le firent considérer lîomme un saint. Il écrivit contre les débordements du clergé son Livre de Gomorrhe 1051, qui lui valut l'attention et l'attachement de Hil-debrand. Étienne IX (ou X) le fit cardinal-év. d'Ostie, et l'employa à diverses missions pour préparer le peuple et les moines k la guerre que les papes devaient incessamment ouvrir contre les empereurs en faveur du pouvoir temporel de la cour de Rome. Damien joua un grand rôle au conc. de Latran 1059, et réussit k faire pisser le décret interdisant aux fidèles d'entendre la messe d'un prêtre marié. N'ayant pas réussi à son gré dans une mission dont il avait été chargé par le pape à Milan, il renonça à la pourpre et rentra dans son couvent comme simple religieux. Il n'en continua pas moins de rendre d'importants services à la papauté; il assura l'élection d'Alexandre II contre Honoré II, et comme confesseur d'Agnès, il décida Henri IV à reprendre Berthe sa femme 1069. Il fut le précurseur énergique et l'heureux champion de la hiérarchie dans la lutte qui éclata entre Grégoire VII et Henri IV et qui aboutit à Canossa. Mais, même au milieu des cours, il vécut toujours dans une extrême pauvreté. Œuvres, 4 vol. fl>, publ. par (iajetan, Rome 1606; réimpr. à Paris et k Venise.
DANEAU, Lambert, né 1530 à Beaugency,f à Castres 15 nov. 1595; étudia d'abord le droit à Orléans sous Anne Dubourg, puis la théol. à Genève 1560. Il fut nommé pasteur a Gien, puis à Vandœuvres près Genève 1572, en même temps que prof, de théologie; il passa ensuite comme prof, à Leyde, mais compromis dans des intrigues politiques, il s'enfuit k Gand 1582, fut appelé comme pasteui k Orthez, et enfin comme pasteur et prof, à Castres. Savant et intelligent, plus universel que profond, calviniste rigide, il a publié un grand nombre d'ouvrages, qui furent appréciés, mais qui n'ont plus beaucoup de valeur auj. sur les Hérésies, l'Antéchrist, les Sorciers, la Physique chrétienne, les Jeux de hazard, etc. Les principaux sont, outre ses Commentaires, son Éthique, fondée sur le Décalogue: le premier il sépara la dogmatique de la morale; ses Lieux communs, avec une préface de Bèze; sa Politique chrétienne; son examen du livre de Chemnitz sur les deux natures en Christ, etc. Marié deux fois, il n'eut qu'un fils, Josias, qui lui succéda comme pasteur de Castres. — Vie et Œuvres, par P. de Félice.
DANEMARK. Après une tentative infructueuse de Willibrord 699 pour établir le christianisme dans ce pays, dont les limites n'étaient d'ailleurs pas nettement déterminées, puisqu'il comprenait la Norwège et une partie de la Suède, l'archev. Ebbo de Reims reprit cette tâche sous Louis-le-Déb. et k la demande du roi Harald Klak, qui se fit baptiser en 826 avec beaucoup de ses gens. Anschar continua l'œuvre avec autant de succès que de zèle. Mais le parti païen reprit le dessus sous Eric III, qui ravagea les églises, détruisit les couvents, et inaugura une ère d* persécutions et de pillage qui dura près d'un siècle et atteignit les contrées du Rhin, les Pays-Bas, les côtes de France et l'Angleterre, 880. On attendait la fin du monde. Le vieux Gorm, qui lui succéda 883, se montra aussi le cruel ennemi des chrétiens, mais vaincu par Henri 934, il dut acheter la paix en permettant à l'archev. Unnis, de Brème, de relever les temples et d'envoyer dans le pays des missionnaires. Son fils Harald-Blaatand (dent bleue), qui régna de 941-995, favorisa le christianisme; il releva les évêchés de Schleswig, Ribe et Aarhuns, et en fonda un nouveau à Odensée, mais lui-même ne se convertit que dans un âge avancé, et il refusa d'imposer le christianisme comme religion officielle. Après sa f 996, son fds Svend, ou Suénon, re-nouvella les persécutions, mais avec des alternatives motivées par sa politique. En mourant il recommanda à son fils, le grand Canut, de ne pas suivre ses traces, et c'est en effet de ce dernier que date l'établissement définitif du christ, en Danemark; l'île de Bornholm fut gagnée la dernière, 1060. La situation était curieuse; l'Égl. danoise était desservie par des ecclésiastiques anglais, et soumise à la juridiction d'un allemand, l'archev. de Brème. Cette anomalie cessa en 1104 par la création de l'archev. de Lund, avec Ascer pour titulaire. Son successeur Absalon, sous Waldemar I«r, fixa la Constitution de l'Église; Canut, dit le Saint, fixa sa position sociale et détermina ses attributions temporelles en donnant aux év. le titre de ducs, le droit des dîmes et la juridiction ecclésiastique; le clergé ne tarda pas à s'emparer de toute l'autorité civile, ce qui amena de fréquents conflits avec la couronne. Christophe II, 1320, puis l'union de Calmar 1397, régularisèrent la situation en faisant la part du clergé, en le rendant plus ou moins indépendant de Rome, et en assurant les droits du souverain, qui alors régnait sur les trois royaumes scandinaves. Les bénéfices ecclés. devinrent le partage des nobles. La Réformation trouva en Danemark un terrain bien préparé; Christian II la favorisa 1521 en faisant traduire la Bible; la noblesse, ies diètes, plusieurs prédicateurs et supérieurs de couvents se prononcèrent dans le sens de Luther, d'Érasme ou de Carlstadt; Copenhague, Wibourg et Malmoë proclamèrent l'Évangile; la diète d'Odensée 1527 permit le mariage des prêtres, enleva aux év. leur juridiction et vota la liberté religieuse jusqu'au prochain concile. Le mouvement s'accentua sous Christian III, 4534, et fut définitivement consacré par la diète d'Odensée 1539. Le 14 nov. 1660, sous Frédéric III, le roi fut déclaré chef absolu de l'Égl., avec l'Augustana et les deux catéchismes de Luther pour bases. Les réformés furent cependant reconnus, ou du moins tolérés en 1747; les catholiques et les juifs en 1814, les baptistes en 1842. La constitution de 1848 proclama fentière liberté de conscience; le roi seul est obligé d'être luthérien. L'œuvre des missions a toujours été populaire en Danemark; depuis 1710, une Société s'occupe du Groenland, de Tranquebar, des côtes de Guinée et des Indes occidentales, mais avec une attache officielle qui l'a souvent paralysée. Une autre Société travaille depuis 1850 à l'évangélisation de la Chine. Une Soc. biblique fondée en 1811 s'occupe de répandre la Bible dans les colonies. La mission intérieure prospère. Les baptistes et les méthodistes ont plusieurs églises; les catholiques en ont une à Copenhague; les mormons ont aussi fait des recrues. La diète ecclés., ou Kirchentag, désirerait unir en une seule les égl. des trois royaumes scandinaves.
DANIEL lo Stylite, le successeur immédiat de Siméon, q. v., né 410 à Maratha, près Sa-mosate, il vécut plusieurs années à Constantinople sur une magnifique colonne, dans la contemplation; il reçut à diverses reprises la visite de Léon I©', et ne descendit un jour de son établissement que pour faire entendre à l'emp. Basilique des censures et des menaces au sujet des mesures qu'il avait prises contre le conc. de Chalcédoine en faveur des monophysites 476. On lui attribue des miracles, des guérisons et des prophéties. Il avait été abbé de son couvent, s'était rendu en pèlerinage en Palestine, et c'est là qu'une vision l'aurait dirigé sur Constantinople. f 490- — Moine à Malmes-bury, puis év. de Winchester 705; envoya Boniface en Allemagne, avec une lettre pour tous les chrétiens, évêques et rois, que l'on possède encore. De retour en 721 d'un voyage à Rome, il donna à Bède les matériaux de son histoire de Wessex, et devenu aveugle, se retira dans son couvent, + 745. — 3° Gabriel, jésuite, dit le père Daniel, né à Rouen 1649, f 1728, auteur d'une Hist. de France, 3 vol. fol. 1713, plusieurs fois réimpr., entre autres par Griffet, longue et ennuyeuse, mais exacte; d'un Voyage du monde de Descartes, où il combat le système des tourbillons, 1690; et d'un Entretien de Cléandre et d'Eudoxe sur les Provinciales 1694, où il essaie de défendre les jésuites contre Pascal. — 4° Hermann-Adel-berg, né à Kiithen 18 nov. 1812, prof, à Halle, auteur de quelques ouvrages de géographie, et de travaux liturgiq. appréciés: Thésaurus hyrn-nologicus, Codex liturg. etc.
DANNHAUER. Conrad, né 1603 en Brisgau, prof, et pasteur à la cathédrale de Strasbourg, f 7 nov. 1666. Luthérien zélé, un des maîtres de Spener, il lui inocula son hostilité contre le calvinisme. Auteur de plus, écrits de controverse, d'une Dogmatique intitulée Hodosophia, d'un livre de la Conscience, de la Theol. casualis, et d'un travail catéchétique en 10 forts vol. in-4».
DANOVIUS, Ernest-Jacob, né 12 mars 1741 près de Dantzig, prof, de théol. à Iéna 1768, se noya dans un accès de mélancolie en 1782. Ami de Semler et d'Ernesti, il s'éloignait sur plusieurs points de la doctrine reçue. Il aurait voulu l'union avec les réformés; il se rapprochait d'eux pour la prédestination, mais pas pour la christologie. Auteur d'une Institutio theol dogmat. et de quelques petits ouvrages; a traduit les sermons de Roustan.
DANSEURS. De même que l'islamisme a ses dévots tourneurs et hurleurs, le catholicisme du moyen âge, avec ses tendances matérialistes, avec son culte sensualiste, avait enfanté la curieuse secte des danseurs, chorisantes, dansato-res, triptidiantes. On les voit apparaître vers 1374 sur les bords du Rhin, à Metz, Liège, Cologne, Utrecht, gens des deux sexes, des classes inférieures, se mettant tout à coup à danser en pleine rue, pénétrant dans les égl. et poussant des cris extatiques jusqu'à tomber sur le sol à moitié morts. Souvent saisis de maux d'entrailles, ils se faisaient guérir à coups de poings par ceux qui les entouraient, ou bien ils se serraient le ventre avec des cordes pour calmer la douleur. Cette affection était épidémique, lorsqu'elle se produisait, et il en résultait des excès de tous genres; à Cologne ils étaient plus de 500; ils se réunissaient la nuit, et plus de cent jeunes filles en revinrent enceintes. Ils se nommaient les disciples de Saint-Jean, mais sans être d'accord sur le patron dont ils prétendaient relever. Le clergé finit par intervenir, d'abord par des exorcismes, puis par des procédés plus efficaces. On retrouve encore de ces danseurs à Strasbourg en 1418; on essaya de les guérir en les transportant, pour y entendre la messe, dans Tégl. de Saint-Vit, d'où est venu le nom de danse de Saint-Vit pour désigner une affection physique qui n'a d'ailleurs rien de commun avec la folie chorégraphique du moyen âge.
DANTE Alighieri, né à Florence 12 mai 1265 d'un père guelfe, qu'il perdit de bonne heure. Il fut élevé par Brunetto Latini, qui le fit instruire dans toutes les sciences connues de son temps. A l'âge de 9 ans il vit dans une réunion de famille la jeune Persinari, Béatrice, dont l'amour le suivit toute sa vie, bien que par déférence pour les siens elle eût épousé le chevalier di Bardi; elle f 1290. Il compta parmi ses amis le peintre Giotto,Cavalcante, Arnolfo le jumeau de Cimabué, Casella, etc. Il étudia à Bologne, puis à Padoue; entra dans l'armée comme guelfe et battit les gibelins à Campaldino 1289, puis entra dans le parti des gibelins et servit son pays dans la magistrature; il fut pendant 2 mois l'un des prieurs, ou consuls de Florence, après avoir rempli avec succès plusieurs missions politiques. La division s'étant mise dans son parti, il se range du côté des blancs contre les noirs, qui l'emportent; il est accusé de malversations dans l'exercice de la justice et dans l'administration des finances, et condamné d'abord à l'exil, 17 janv. 1302, puis au bûcher le 10 mars suivant. Quoique Gemma, sa fem-ma, l6t de la famille des Donali, ses biens furent confisqués, et elle dut quitter sa maison avec ses enfants, Pierre, Jacopo et Béatrice, et fut obligée de travailler de ses mains pour vivre. Le poète exilé erra de ville en ville, à. Sienne, à Vérone, plongé dans la misère. Il vint à Paris 1307, passa brillamment son examen de docteur, mais n'en reçut pas le titre parce qu'il n'avait pas de quoi payer son diplôme; il revint en Italie, et après de longues souffrances et d'inutiles démarches pour sa réhabilitation, tantôt dans les couvents, tantôt dans les palais, il prit son dernier repos à Ravenne, chez Guido Novello, seigneur de Polenta, où il f 27 juin 1321. Contemporain des plus grands événements du moyen âge, il a vu la dernière croisade, la chute des Hohenstaufen, le commencement du schisme d'Avignon. Déjà célèbre comme poète, prosateur, philos, et homme d'État, par ses poésies lyriques, son Traité de l'éloquence, son Banquet, son livre de la Monarchie, sa Vita nuova (histoire de sa jeunesse)9 ses églogues virgiliennes, il mit le sceau à sa gloire par l'œuvre de son exil, la Divine Comédie, œuvre amère d'un rhapsode proscrit, un des chefs-d'œuvre de l'esprit humain, non moins grandiose par ses clartés que par ses obscurités calculées L'homme de génie, méconnu des uns, redouté des autres, poursuivi par les enfants dans les rues, s'en va partout cherchant la paix. Sous la conduite de Virgile, dans l'Enfer et le Purgatoire, il rencontre ceux qu'il accuse d'être les auteurs de ses maux, les méchants, ses ennemis, les ennemis de son pays,, le clergé dans son chef et dans ses membres. Dans le Paradis, conduit cette fois par Béatrice, il trouve dans l'amour de Dieu la paix et le salut. Partout les tendances et les idées de son époque sont incarnées dans des personnalités contemporaines, et comme un grand nombre sont inconnues, les allusions qui les concernent font de ce livre une énigme perpétuelle. Aussi des chaires spéciales furent-elles fondées peu après sa mort, à Pise, à Bologne, à Florence, pour expliquer et commenter son œuvre; un religieux l'expliquait même en 1430 dans la cathédrale de Florence, et Michel*Ange s'en est inspiré dans son Jugement dernier. II reposé à Ravenne. Sa légende commença aussitôt après sa mort. La république de Florence fit remettre, par Boccace, dix florins d'or à sa fille Béatrice, religieuse au couvent d'Oliva. Les éditions et les commentaires de la Divine Comédie sont innombrables: v. Colomb de Batines, Bibliogr. Dantesca, 1845; Baumgarten-Crusius, Ozanaiu, Hegel, Artaud, Villemain, Tommasco, etc. On a pu se demander si Dante n'était pas un des précurseurs de la Réforme; on n'a jamais tranché la question de savoir s'il est mort catholique-romain ou hérétique, mais il a été enterré dans. Tégl. des franciscains, revêtu de la robe des cénobites, et il lui fut fait de splendides funérailles. Florence se repentit trop tard de l'avoir exilé; il manque à l'égl. de Santa-Croce, où dorment Michel-Ange, Machiavel, Galilée et Alfieri.
DANTZICK, Gedanum Dantiscum, ville connue déjà au 10me siècle, évangélisée par Adal-bert. La réformation y fut prêchée par Jacq. Knade 1518 et par le franciscain Alexandre, mais des troubles politiques l'empêchèrent de s'établir, jusqu'en 1529 où Pancrace Klemme, soutenu par les conseils de la ville, réussit à la faire proclamer dans des conditions plus favorables.
DARBY, J.-Nelson, né 18 nov. 1800, d'une bonne famille d'Irlande, fut d'abord avocat, puis étudia la théol. contre le gré de son père et devint pasteur. La doctrine de la succession apostolique porta en lui des fruits négatifs, c.-à-d. qu'ayant conçu des doutes sur la régularité de cette succession et par conséquent sur la validité de sa propre consécration, et ne voyant aucun moyen de prouver historiquement le fait d'une transmission non interrompue des dons apostoliques, quand en réalité ces dons n'existaient plus, il se jeta dans un autre extrême et prétendit que l'Egl. et toutes ses charges ou ministères avaient cessé d'exister. L'apostasie de l'Égl. avait commencé de bonne heure; tout dans ses institutions, culte, organisation, sacrements, avait été satanisé; il ne restait plus que des chrétiens isolés, égrenés, dont le seul devoir était de se réunir pour s'édifier mutuellement, en faisant servir au bien de tous les dons de quelques-uns. Il y avait déjà depuis quelques années à Plymouth un petit noyau de fidèles qui, mécontents de l'Égl. anglicane, ne s'étaient cependant réunis à aucune autre Église; ils voyaient partout des lacunes ou des erreurs, et à force de tâtonnements, ne trouvant la perfection nulle part, ils s'étaient décidés à se grouper entre eux, sans aucune espèce d'organisation, sous le modeste titre de frères de Plymouth. Ses principaux chefs étaient Newton, Harris et Tregelles. Des assemblées du même genre se formèrent en bien des lieux, Dublin, Londres, etc., et quand Darby arriva, il obtint par son caractère et par la précision de ses idées une influence telle que son nom servit à désigner la secte; on dit le darbysme, les darbistes, appellation qui n'a rien de dédaigneux et qui a J'avantage d'être plus claire et plus exacte que celle de frères, qui peut s'app'iquer à tous les chrétiens. En 1838 Darby résolut d'annoncer sa doctrine sur le continent; il vint à Paris, à Genève, à Lausanne, et réussit dans les villes et dans les campagnes à former de petites congrégations, recrutées surtout parmi les dissidents iatigués des luttes ecclésiastiques. La simplicité de son système, ses explications bibliques, ses vues sur la prophétie, la piété sincère de plusieurs, et peut-être aussi le relief légitime qu'il donnait aux fidèles bien doués pour l'édification, lui procurèrent de nombreux adhérents. Malheureusement il arriva ce qui arrive touj. dans ces morcellements de l'Église, c'est que les petits troupeaux continuèrent de s'émietter sous l'influence d'un individualisme sans bornes* et que, dans la même ville, à Plymouth, à Bristol et ailleurs, les frères se divisèrent en trois partis distincts et hostiles, sous les noms de Darby, de Newton et de Béthesda (lieu de réunion à Bristol), qui s'excommunièrent les uns les autres. Malgré le zèle infatigable de Darby, qui n'a pas craint, à l'âge de 70 ans, d'aller prêcher sa doctrine jusqu'en Australie, la secte a subi une sorte d'arrêt, mais ses fondateurs auront toujours le mérite d'avoir réveillé l'attention des chrétiens sur quelques doctrines trop longtemps négligées, sur la Formation de l'Église, le Ministère, le Sacerdoce universel, l'Attente actuelle de l'Égl. et les prophéties qui l'établissent. La littérature darbyste est assez nombreuse, mais d'une lecture difficile, soit à cause du style, soit à cause des idées; il faut noter cependant l'Apocalypse de Rossier, le Témoignage de Recordon, et plusieurs commentaires sur l'A. T. traduits de l'anglais. Parmi les réponses ou réfutations, très nombreusses aussi, indiquons Herzog, Guers, Merle, Godet, Duplan, Krllger. f 29 avril 1882 à Bourne-mouth, Hampshire.
DATAIRE, Datarius, président de la commission des bulles, chargé ipr la curie romaine d'y mettre la date et de les expédier. Si c'est un cardinal, il porte le titre de prodataire. L'office s'appelle Daterie.
DAUB, Charles, né à Cassel le 20 mars 1765, prof, à Marbourg, Hanau, puis 1795 à Heidel-berg, où il f 1836 d'apoplexie pendant une de ses leçons. Successivement disciple de Kant, de Schelling et de Hegel, il chercha à donner au sentiment religieux une base scientifique. Auteur de plusieurs ouvrages de théol., entre autres Judas Iscarioth 1816, où il étudie l'origine du mal; Theologumena 1806, etc.
DAUT, Jean-Maximilien, né à Niederroden à la fin du 17me siècle; se rendit à Francfort comme garçon cordonnier, et publia sous le titre de Helle Donner-Stimme (Voix de tonnerre) un livre chiliaste et mystique plein de reproches contre l'Égl, et le clergé. Banni, il trouva à Schwarzenau, puis à Ulm, de nombreux adhérents. Il rentra plus tard dans l'Église.
DAVID lo patron du pays de Galles, né vers 458 ou 480, f 544, fils d'un prince du Cardigan; il prêcha l'Évang. dans le sud de la Gr. -Bretagne, fonda 12 couvents et fut évêq. de Ménévia, qui prit de lui le nom de Saint-David.
2° Philos, arménien du 6m« siècle, parent et disciple de Moïse de Khoren, recueillit un grand nombre de mss. en Asie Mineure, étudia à Athènes et a commenté Aristote, Porphyre, etc.
3° David de Dinant, auteur d'un écrit intitulé Quaternuli qui fut condamné au conc. de Paris 1209. Il nommait Dieu la matière première par laquelle tout existe. Connu seulement par le grand Albert et Thomas d'Aquin.
4° David d'Augsbourg, né entre 1210 et 1220, f le 15 nov. 1271, prof, de théol. au couvent des carmes à Ratisbonne, et depuis 1243 à Augsbourg; écrivain ascétique, bon latiniste, auteur de plusieurs traités allemands qui ont eu de la réputation.
5° Christian David, l'un des hommes les plus marquants de l'unité des Fr., né 31 déc. 1690 à Senftleben, Moravie; cathol. zélé, sujet autrichien, charpentier de profession; fut éveillé dans sa conscience par la vue des persécutions, fut remué par le chant des cantiques évangéliques, se convertit à Berlin, fut persécuté à son tour et s'enrôla contre Charles XII; il assista au siège de Stralsund. En 1717 il revint à Gôr-litz, où il fit la connaissance de chrétiens distingués, Schâffer, Schwedler, etc. Il s'y maria et commença dès lors sa vie de missionnaire. C'est lui qui engagea ses amis à émigrer, et qui négocia avec Zinzendorf leur établissement à Herrnhut 1721. Il ne cessa d'exercer une grande influence sur la communauté. Après un mouvement séparatiste provoqué par Krttger, il élabora avec Zinzendorf les statuts qui devaient servir de règle à l'élise 1727, fut envoyé comme délégué des frères dans les provinces de la Baltique, et, après plusieurs voyages missionnaires, dont trois au Groenland, 1733, 1747 et 1749, il revint à Herrnhut où il f le 3 févr. 1751. Il a composé un grand nombre de cantiques d'un style très élevé, des Lettres et une Notice sur Herrnhut.
DAVIDIS, François; recteur, puis prédicateur de la cour à Klausenbourg. D'abord luthérien, ensuite calviniste, enfin unitaire. Il soutenait que Jésus n'étanl qu'un homme, il ne fallait pas l'adorer. Condamné par le synode de Torda, 1568, et vainement sollicité par Socin lui-même, il finit par être jeté en prison (à l'instigation de Socin?); il y languit plusieurs années et y f 1579 dans un âge avancé.
DÉBRECZIN, ville de Hongrie, sur la Theiss. Le synode de 1567 condamna les antitrinitaires dans une Brève confession de foi, et dans ses Articles de la parole de Dieu, qui furent reconnus comme l'autorité de l'Égl. de Hongrie, et qui renfermaient aussi la 2* conf. de foi helvétique.
DÉCIUS 1° Caïus Quintus Messius, surnommé par le sénat Trajanus et Optimus, né d'une famille obscure en Pannonie, avait été envoyé en Mésie comme gouverneur par Philippe l'Arabe 249, quand ses soldats le contraignirent d'accepter la dignité impériale; d'ailleurs il tua lui-même Philippe qui lui livra bataille près de Vérone. Son règne de 2 ans est célèbre par les cruelles persécutions qu'il ordonna contre les chrétiens, et dans lesquelles souffrirent le martyre Cyprien, Origènes, les sept jeunes gens d'Éphèse et des milliers d'autres. On a cru l'excuser en disant qne ces persécutions lui furent dictées, non par l'intolérance ou la cruauté, mais par la raison d'État et par la politique; il voulait rétablir l'unité de l'empire, compromise, pensait-il, par le christianisme. De cette manière on pourrait aussi réhabiliter Louis XJY. Il fut tué 251 en combattant contre les Goths. — 2° Nicolas Décius, moine à Stetterburg, puis prof, à Brunswick et pasteur à Stettin; auteur de plusieurs beaux cantiques, f 1529. — 3° Philippe Décius, canoniste italien; né 1454 à Milan; prof, à Sienne, Padoue et Pise; auditeur de la Rote. C'est sur son avis que Louis XII convoqua le concile de Pise 1511, le pape s'ètant absolument refusé à toute réforme. Après la défaite des Français il partit avec eux, fut prof, à Bourges, membre du parlement de Grenoble, et recouvra sa position à Pise 1515. f 1535 à Sienne. Il avait été précepteur de Léon X.
DÉCRET 1° de Gratien. On désigne sous ce nom une Compilation de textes des Écritures, canons des apôtres et des conciles, extraits des pères et des livres pontificaux, décrets des papes, recueillis et commentés vers 1150 par un célèbre canoniste, Gratien, né à Chiusi, Toscane, f 1161, camaldule ou bénédictin du couvent de Saint-Félix, Bologne, et qui, sans reconnaissance officielle d'aucune sorte, a rapidement acquis une grande autorité dans l'Église. On l'appelle aussi Concordia canonum discor-dantium, parce qu'il cherche à concilier les textes en apparence ou en réalité contradictoires. Impr. Strasbourg 1471, réimpr. 1572 par ordre de Grégoire XIII.
2<> L'év. Ivo, de Chartres, fils de Hugo d'Au-teuil, né vers 1040, d'abord chanoine à Nesle, puis abbé à Saint-Quentin; f 1115, canonisé 1570, connu par l'énergie de sa résistance à Philippe au sujet de son divorce, est plus connu encore par sa double collection de canons, le Décret en 17 livres, publié à Louvain 1561, et la Pannormia en 8 livres, Bâle 1439. Le Décret cependant est contesté.
DÉCRÉTALES. L'Église s'occupa de bonne heure de collationner les canons et les décrets de l'autorité ecclésiastique, conciles et autres. Sans parler des Constitutions apostoliques dont l'authenticité n'est plus défendue par personne, la plus ancienne mention d'un recueil de ce genre se trouve dans le conc. de Chalcédoine, où sont reproduites les résolutions des conc. de Nicée, Antioche, Ancyre, Césarée et Gangres. Le patr. Photius en fit faire une collection à l'usage de l'Égl. orientale 883, qui fut plus tard complétée et commentée par Balsamon. En occident la première fut faite au 6me siècle par Denys-le Petit; elle devint un code ecclésiastique et trouva des imitateurs et des continuateurs. L'Espagne eut sa collection particulière, à laquelle on donna le nom d'Isidore, quoique ce dernier, év. de Séville, n'y ait pris aucune part. Elle était plus étendue que celle de Denys et contenait un plus grand nombre de lettres de papes, et plus de canons de conciles, surtout espagnols. Elle se répandit hors d'Espagne, notamment en France où, augmentée d'autres documents, elle jouit d'un grand crédit. Ces recueils traitent naturellement des questions les plus diverses, relatives à l'administration de l'Église, mais avec une tendance touj. plus prononcée à relever l'autorité du clergé au détriment du pouvoir civil. Tout à coup, dans la lre moitié du 9®e siècle, apparaît une collection de nouveaux canons dont personne encore n'avait entendu parler. C'est Benoît-le-Lévite, l'auteur du second recueil des capitulaires, qui la mentionne le premier et cherche à lui donner de l'autorité. Comme c'est surtout dans les diocèses de Trêves et de Mayence qu'on la rencontre d'abord, il est probable que ce fût là son berceau, et que le collectionneur Benoît en fut, sinon l'auteur unique, au moins l'éditeur responsable. Ces Fausses décrétales, induement publiées sous le nom d'Isidore, comme celles qui avaient acquis dans l'Égl. une si légitime considération, contiennent, dans le latin du 9m« siècle, une quantité de pièces évidemment fausses, qui trahissent la fraude et la supercherie. Ainsi les papes du 2rae et du siècle se servent de la traduction de saint Jérôme, qui ne parut qu'au 4™; ils font allusion à des faits ou à des écrits du 6rae et du 7me siècles, qu'ils ne pouvaient pas connaître, etc. Après une préface faussement attribuée aussi à Isidore et des correspondances inauthentiques entre Aurèle, Jérôme et Damase, la collection donne 60 lettres, également apocryphes, des plus anciens évêques de Rome, depuis Clément jusqu'à Mel-chiade; un écrit sur la primitive Église et sur le conc. de Nicée; la fameuse donation de Constantin; des décrets de conc. grecs, africains, gaulois, espagnols. Le but de l'auteur, qui a peut-être cru bien faire dans l'intérêt de la religion, est l'exaltation du clergé. Il y tend par de fausses citations, et il cherche à établir ces trois principes: 1<> L'Église est indépendante de la juridiction civile; le clergé est une caste; un évêque ne peut être condamné que par 72 évêques; l'accuser, c'est accuser Dieu; les ev. sont les protecteurs du peuple. 2° La puissance des métropolitains est inférieure à celle des primats; elle est bornée à cause de leurs trop grands rapports avec le gouvernement. 3° L'Égl. romaine lire son autorité immédiatement de J.-C., et c'est d'elle seule, par le pape, que les év. doivent attendre la leur. Quant à la date où parut ce recueil de fausses pièces, elle se détermine à peu près par le fait qu'il contient un décret du conc. de Paris 829, et qu'il est déjà cité comme autorité au conc. d'Aix-la-Chapelle 836; sa publication se placerait donc dans l'intervalle; mais il y a toujours à se méfier des interpolations postérieures. En 845, Benoît en cite des fragments; en 853 les amis d'Ebbon l'invoquent comme autorité; Nicolas I s'en sert 865 dans la lutte d'Hincmar contre Rothade. C'est donc à peu près vers ce temps qu'il faut placer les Fausses décrétales; elles étaient écrites en faveur des évêques, et ceux-ci n'y regardèrent pas de trop près quant à l'authenticité; les uns n'y virent que la vieille collection d'Isidore, les autres n'en examinèrent peut-être pas même le contenu. Il fallut la Réforme pour démasquer la fraude. Calvin le premier la pressentit et la dévoila; les Centuries de Magde-bourg en dévoilèrent la fausseté. Peu de théologiens prirent parti pour ces décrets supposés. Augustin, archev. de Sarragosse, Bellarmin, Baronius les abandonnèrent. Blondel donna le coup de mort à leur solidité. —V. Liber 3°.
DÉFENSEUR de l'Eglise, v. Avocat. — Il y a aussi, et surtout il y avait auprès des cours matrimoniales ecclésiastiques, des Def. malri-monii, chargés de prononcer sur les cas de nullité en fait de mariage. Ils pouvaient agir sur la demande des parties, et même d'office et contre elles, et annuler ainsi légalement un mariage qu'ils n'estimaient pas valable. C'étaient une sorte de procureurs généraux, poursuivant au nom de l'Égl. les infractions à ses lois. Avec l'état civil cette institution n'a plus de raison d'être.
DÉGRADATION, cérémonie par laquelle en cas de crime, ou pour des raisons graves, un ecclésiastique était solennellement dépouillé de ses titres et attributions, avant d'être livré au bras séculier. Elle ne pouvait être pratiquée que par un évêque avec l'assistance de trois autres. Auj. elle peut être faite par un simple vote du chapitre sans autre formalité. Dans la dégradation officielle le condamné était successivement dépouillé de tous ses vêtements et ornements ecclésiastiques, l'onction sacrée lui était retirée par un acte symbolique, et sa tonsure disparaissait sous les ciseaux.
DEI GRATIA (par la grâce de Dieu), formule d'humilité, destinée aussi à relever la grandeur de leurs fonctions, que les évêques joignaient à leur titre au moyen âge. Félix II, 356, l'emploie en s'adressant à Cunibert de Cologne. Plus tard, quand, à l'exemple de Pépin, les princes adoptèrent la même formule, moins par humilité sans doute que pour affirmer leurs droits et leur indépendance, les év. y renoncèrent peu à peu et finirent par la remplacer, environ vers 1250, par ces mots: Divind et apos-tolicœ sedis gratiâ, ou une phrase analogue.
DÉISME. Système philos, plutôt que religieux. Il reconnaît un Dieu quelconque sans révélation, ou bien il réduit la révélation, s'il conserve le mot, au développement et aux progrès de la raison humaine; tantôt il soutient une prétendue religion naturelle, qu'il considère comme ayant existé de tout temps, et qui exclut les autres; tantôt il s'en tient à la simple possibilité de découvertes illimitées encore à venir et pleinement suffisantes, par la seule raison. Il nie le Dieu actif, vivant, agissant sur le monde, et il en fait une pure abstraction, une concession de l'esprit. L'idée de l'univers ^t la foi religieuse sont une seule et même chose. Le théisme, qui lui ressemble par certains points et notamment comme le contraire de l'athéisme, s'en distingue par une affirmation plus nette de l'action de Dieu sur le monde et de ses rapports avec la Création; il admet une révélation, une source première d'où s'est répandue la connaissance de Dieu, un livre, des prophéties, les miracles même. Il reçoit la foi en Dieu, tandis que le déisme ne croit qu'au Dieu qu'il crée lui-même. Le théisme peut être une religion; le judaïsme, qui portait en lui-même le germe d'un développement ultérieur, était théiste; de même l'ancien sabéisme, et auj. l'islamisme. Quant au déisme, conception sans principe et sans conséquence, tronc sans racine et sans fruit, il n'a de signification que par l'influence négative qu'il a exercée sur le développement du dogme chrétien. Réduisant les faits évang. à d'ingénieuses allégories et la doctrine à la morale, il est devenu le père de ce qu'on appelle le rationalisme vulgaire, acceptant tout, prêchant sur tout, mais expliquant tout à son point de vue restreint, et ne conservant du chrislianisme que les mots et l'apparence, si même il les conserve. Préparé par l'empirisme de Bacon et de Locke, il a tout ramené aux idées de Dieu, de vertu et de récompense, idées communes, admises comme axiô-mes par toutes les religions, acceptées par Voltaire dans ses bons moments, plus encore par Rousseau, et traduites dans la vie des peuples en 1793 par la proclamation de l'Être suprême, et de l'immortalité de l'âme. C'est en Angleterre surtout, aux 17®e et 18"* siècles, que le déisme s'est le plus sérieusement affirmé comme école, mais comme une école dont les disciples vont toujours plus loin que le maître. Ses principaux représentants ont été Ed. Herbert t 1648, auteur de deux écrits: La Vérité, et La Religion des Gentils; Ch. Blount + 1693; John Toland f 1722, auteur du Christianisme non mystérieux; Ant. Collins + 1729, auteur d'un Disc, sur la Libre pensée, et d'un Disc, sur les bases et les raisons de la relig. chrét.; Matt. Tindal, + 1733, auteur de: Le Christianisme aussi vieux que la création, etc. L'influence de l'école de Hobbes et de Hume donna an déisme anglais un caractère plus critique et plus sceptique que celui du rationalisme allemand qui se traîna plus d'une fois terre à terre. L'avènement du méthodisme wesleyen mit fin au crédit longtemps incontesté du déisme anglais. V. Chal-mers, Preuves du Christ; Lechler, Hist. du Déisme anglais; Rémusat, Hist. de la philos, en Angl., etc.
DELESSERT, famille protestante distinguée, originaire du C. de Vaud. Un de ses membres s'établit à Lyon vers 1718. Là naquit Étienne 30 août 1735, qui se fixa à Paris, fonda la Caisse d'escompte, épousa Mlle Boy de la Tour à qui Rousseau dédia ses lettres sur la Botanique, et f 18 juin 1816. 11 laissa 3 fils: Benjamin, 7 fois dépulé, 1773-1847,financier et philanthrope; Gabriel, 1786-1858, général et préfet de police; François, né 2 avril 1780, f 15 oct. 1868, député de 1831 à 1848, membre du Con-sist. de Paris pendant 53 ans, membre de l'Institut, président de la Caisse d'épargne, collectionneur plein de goût, généreux, et s'intéressant à toutes les œuvres philanthropiques et religieuses.
DÉMÉTRIUS. Outre les hommes de ce nom, dont la place est dans leDict. de la Bible, l'histoire ecclés. mentionne un év. d'Alexandrie 189, d'abord vigneron, que l'év. Jean, à la suite d'une apparition d'ange, aurait nommé son successeur après que Démétrius, par l'épreuve du feu, aurait constaté sa virginité et celle de sa femme. C'est lui qui appela Origènes à la place de catéchiste, et lui fit faire un voyage de mission en Arabie; mais celui-ci s'étant fait ordonner prêtre pendant un voyage en Palestine par les év. du pays, Démétrius prit la chose en mal, comme contraire aux usages de l'Église, et l'excommunia 232.
DÉMIURGE, v. Gnosticisme.
DENK, Jean. Né en Bavière, correcteur d'imprimerie à Bâle 1521, il suivit les leçons d'GEcolampade, fut nommé en 1523 recteur de l'école de Sebald à Nuremberg, où il fit la connaissance de Mllnzer. Banni pour ses opinions anabaptistes, il se fit encore bannir d'Augsbourg, puis de Strasbourg, travailla dans le Palatinat, et revint à Bâle où il f de la peste 1528. Sa doétrîne était un mélange de mysticisme et de raison; il regardait le péché comme une folie; il croyait à la voix intérieure, et n'attachait qu'une importance moindre à la Bible et aux sàfcrements. Il niait la préexistence de Christ, insistait sur la communion des saints et admettait le rétablissement final.
DÉNONCIATION èvangèlique. Les paroles Matt. 18, 15-17 ont été exploitées dans l'Égl. pour étendre la juridiction ecclésiastique et papale à toutes les questions d'intérêt temporel, où le plaignant estimerait que son frère a péché contre lui. Innocent III invoqua ce texte 1204 pour régler le difTérend entre Philippe de France et Jean d'Angleterre. Toutefois, et malgré l'appui des Décrétâtes, cet énorme empiétement sur la compétence des tribunaux civils, n'a pas obtenu la sanction de la pluralité des canonistes.
DENTIÈRE, Marie, abbesse d'un couvent dans les Flandres, renvoyée à cause de ses opinions religieuses, accentuées peut-être par un caractère difficile, trouva un asile provisoire chez la reine de Navarre, et épousa, croit-on, d'abord un nommé Robert, ancien curé de Tournay, dont elle eut 5 enfants, puis en secondes noces le réformateur Froment, qu elle no rendit pas heureux. Elle a écrit une « Épistre très utile, » adressée à la reine de Navarre, où elle prouve par des citations bibliques que la femme a autant de droits que l'homme « d'es-crire chose sainte et bonne. » Il est probable aussi qu'on lui doit la Chronique du Marchand de Genève, qui raconte en 21 pages, dans un style vif et leste La Guerre et la Deslivrance de la ville de Genesve (réimpr. 1881 avec notes, par Alb. Rilliet). Ce livre fait la contrepartie de la Chronique de Jeanne de Jussie.
DENYS. Outre l'Aréopagite, qu'une légende faitév. de Saint-Denis, l'hist. ecclés. mentionne plusieurs hommes de ce nom. 1° L'év. de Co-rinthe, 170, dont Eusèbe a conservé quelques fragments, lettres, circulaires aux égl. etc. — 2° Denys d'Alexandrie, dit le Grand; ami et disciple d'Origène, il poussa très loin la méthode alexandrine, étridiant les auteurs païens et les hérétiqiles. Il cite la parole, apocryphe, de Jésus: que le chrétien doit mener une vie de changeur. Directeur de l'école des catéchètes 233, nommé évéque 248. Pendant la persécution de Dècius, des paysans amis l'enlevèrent de force et malgré lui et l'emmenèrent en Lybie jusqu'en 251. Sous Valérien il fut de nouveau exilé en Lybie 257, revint à Alexandrie 260 et 126V II intervint dans les controverses contre Novatien et Paul de Samosate et écrivit contre le chiliasme. Dans sa lutte contre les sabelliens il distingua trop les trois personnes de la Trinité et refusa d'employer le mot de homo'ousios en parlant du Fils, ne le trouvant pas dans la Bible. Devenu suspect il se justifia et constata par deux écrits sa communauté de foi avec l'Église. Il n'admettait pas l'identité de Jean l'Évangéliste avèc celui de l'Apocalypse. Il ne reste que des fragments de lui, conservés par Eusèbe. — 3° Denys de Calabre, anachorète, nommé pape 259 après un an d'interrègne. On a 3 lettres de lui, une sur le baptême des hérétiques, dans l'esprit de son prédécesseur Étienne; une, dans un sens contraire, sur la Trinité, adressée aux év. d'Égypte (l'Éternité du Fils dans le Père); et une à l'égl. de Césa-rée, Cappadoce, pour la consoler dans l'épreuve. — 4° Apôtre des Gaules, si légendaire que son existence même n'est pas certaine; il est simplement nommé par Grégoire de Tours. On le fait arriver de Rome vers 250; il fonda plus, églises; il aurait souffert le martyr avec Rustique et Éleuthères, sous Valérien, 272, et quelques-uns ajoutent que c'est lui qui aurait porté sa tête entre ses mains après sa décollation. Son supplice aurait eu lieu à Paris, Saint-Denis, ou Montmartre (mon* martyrum). — 5° Denys, surnommé Le Petit, soit à cause de sa taille, soit par modestie, Scythe d'origine, vint à Rome vers 500, fut nommé abbé d'un monastère, fit un Recueil de canons apostoliques, Décrétâtes, etc.; traduisit en latin plusieurs ouvrages grecs, tels que Pacôme; écrivit sur la discipline ecclés., et f 540 ou 556. Il est surtout connu par ses travaux de chronologie; c'est lui qui a introduit l'ère actuelle, dite dyo-nisienne, d'après laquelle on compte les années depuis la naissance de Christ (ab incarnaliotie), qu'il fait tomber sur l'an 754 de Rome, avec une erreur probable de 4 ans; c'est l'an 750 qu'admettent auj. les chronologistes.
DÉPOSITION, acte par lequel un ecclésiastique était déchu de ses fonctions et quelquefois de son titre; v. Dégradation.
DÉPOUILLES. On appelle ainsi dans TÉgl. ce qu'un ecclés. laisse de biens en mourant, peu ou beaucoup; de bonne heure l'usage s'introduisit tout naturellement de considérer comme acquise à l'église cette propriété du défunt; on créa ce qu'on appelait le droit aux dépouilles, jus spolii vel exuviarum, véritable spoliation déguisée. C'était d'abord en faveur des pauvres que s'exerçait cette confiscation; puis on en étendit tes bienfaits à l'entretien de l'église. Le 3me concile de Carthage 397 régla la chose, et ne permit aux clercs de disposer par testament que de ce qu'ils avaient reçu par voie d'héritage ou comme don personnel; le reste revenait de droit à l'église. Le code Jus-tinien reproduisit une disposition semblable. Mais la cupidité sut rendre illusoires ces ordonnances, et les abus se multiplièrent au point que des clercs se précipitaient sur ce que pouvait laisser un de leurs confrères, mort, ou près dè mourir, et se l'appropriaient sans pudeur. De nombreux conciles durent intervenir, Chal-cédoine 451, Taracco 516, Paris 615. Grégoire de Tours signale à cet égard des faits scandaleux; un év. de Marseille fut complètement dépouillé par son entourage, môme avant d'avoir expiré. Un capitulaire de Charles-le-Chauye et surtout la centralisation croissante de l'Égl. contribuèrent à réprimer ces excès, mais ce qui fut plus efficace encore, ce fut l'intervention du pouvoir temporel, qui revendiqua pour son propre compte et comme faisant partie de sa régale, les biens laissés par un ecclésiastique sans qu'il en eût disposé d'une manière formelle. Les seigneurs, grands et petits, abusèrent à leur tour de cette façon de s'enrichir, et l'Égl. protesta dans plusieurs conciles, Clermont 1095, Latran 1139. Les empereurs depuis Frédéric 1er renoncèrent en apparence à leur droit, mais ils ne cessèrent réellement pas de l'exercer quand ils le purent; les princes, les évêques, les abbés, les chapitres, les papes en firent autant de leur côté, et pendant plusieurs siècles, en dépit des lois et des décrets, ce fut à qui mettrait la main sur les héritages abandonnés; les familles seules semblaient n'avoir aucun droit. Innocent IV fut repoussé dans ses prétentions par le roi d'Angleterre 1246, mais Clement V fut plus heureux dans ses négociations avec le duc d'Anjou, à qui il abandonna une part des bénéfices. Toutefois Charles VI reprit ses droits 1385, et dès lors la France n'a plus permis qu'il y fût porté atteinte; Louis XI repoussa ènergiquement les tentatives de Pie II 1464. C'est surtout depuis le conc. de Constance que le droit de tester a été généralement rendu ou reconnu aux ecclésiastiques de tous ordres, avec la seule réserve qu'ils léguassent aussi quelque chose à l'Église. On sait, toutefois que les papes ont souvent trouvé moyen d'hériter de leurs cardinaux, mais cela relève du code civil et criminel plutôt que d'une institution régulière.
DERVICHES, du persan dervis, pauvre; religieux musulmans, qui rappellent les moines du catholicisme, avec cette différence qu'ils ne font pas de vœux éternels, quoiqu'ils soient censés vivre dans la tempérance et la chasteté. Les uns pratiquent la vie commune dans des monastères; les autres vivent isolés et se livrent à la contemplation; d'autres voyagent, prêchent ou enseignent. Plusieurs mendient, et pour mériter les aumônes qu'ils réclament, ils font des tours d'adresse et amusent les fidèles. L'institution date des premiers temps de l'Islam, et comme elle est dans la nature des choses, son introduction a été facile. Les derviches se divisent en un certain nombre d'ordres différents. Leur principal couvent est à Koniéh, Ca-ramanie; ils en ont un beau à Damas.
DESCARTES (latin Cartesius), René, célèbre philos., homme universel, adversaire décidé d'Aristote. NéàLahaye, Touraine, 1596; caractère réfléchi, inquiet, mécontent dès l'enfance; toujours à la recherche de quelque chose. L'étude ne lui suffisant pas, il se jeta dans les plaisirs; ce fut pire encore. Il embrassa la carrière des armes et servit sous Maurice de Nassau et sous le duc de Bavière, mais il n'y trouva que le vide. Il se mit à voyager, visita l'Italie, l'Allemagne et la Hollande, et après avoir partout appris quelque chose et partout observé, il prit la résolution de tout oublier et de reconstruire pour son propre compte tout l'édifice de la science. Il partit de son célèbre enthymême: Je pense, donc je suis, qui a donné lieu a tant d'interprétations différentes; et c'est de cette idée qu'il est arrivé à l'idée de Dieu. Les idées sont innées, mais elles correspondent à une réalité. Le doute c'est l'imperfection, mais il suppose la perfection, et l'être qui seul réalise cet idéal, c'est Dieu, En dehors de Dieu il y a l'univers, c.-à-d. l'esprit et la matière, deux substances distinctes qu'on ne peut nier, quoiqu'on ne puisse expliquer leur action réciproque; de là une tendance au dualisme, qui s'est accentuée davantage encore chez quelques-uns de ses disciples. C'est en Hollande surtout qu'il travailla et qu'il publia ses principaux ouvrages, notamment son Disc, sur la Méthode 1637. C'est aussi là qu'il rencontra ses plus redoutables adversaires, à la tête desquels était Voétius d'Utrecht, qui alla jusqu'à l'accuser d'athéisme 1643. L'étude de ses livres fut interdite en Hollande, en Suisse et dans plusieurs parties de l'Allemagne, en sorte qu'elie a exercé peu d'influence sur la théol. protestante. Il a écrit sur une foule d'autres sujets étrangers à la théol., sur la physique, les mathématiques, l'astronomie, etc. Très estimé dans le monde savant, respecté de ses adversaires, recherché par plusieurs têtes couronnées, pensionné de Maza-rin, il accepta l'invitation de Christine de Suède et arriva à Stockholm vers la fin de 1649, mais l'hiver lui fut fatal et peu de mois après il succombait à la rigueur du climat, f 1650- Ses restes furent ramenés en France 1667 et déposés avec honneur, mais sans oraison funèbre, dans l'égl. de Sainte-Geneviève (auj. Panthéon). Port-Royal a suivi sa méthode, sans accepter son système; on peut en dire autant de Féue-lon, de Bossuet et de Bayle, qui furent cartésiens par l'esprit, tout en aboutissant à des conclusions différentes. Vie par Baillet 1691, Éloge par Thomas 1761, Œuvres réimpr. par Cousin, Paris 1824-1826.
DESCENTE de Christ aux enfers. Cet article dn symbole, qu'on a cherché à justifier par Rom. 10, 7. Act. 2, 31. Eph. 4, 8-10 et surtout pari Pier. 3, 19. ne s'est introduit que lentement dans l'Église. Il apparut pour la Ire fois an 4me siècle dans le symbole d'Aquilée, et ne fut généralement admis qu'au 7me. H signifiait qn'entre sa mort et sa résurrection le Seigneur était descendu dans le séjour des morts. On y ajouta l'idée qu'il était allé pour délivrer les bons juifs et les païens vertueux; c'est encore en ce sens que l'entend l'Égl. grecque. Plus tard, avec les nouveaux dogmes du purgatoire et des limbes, l'Égl. romaine entendit que Jésus avait été dans ces sombres régions pour délivrer ceux qui y étaient retenus par la puissance du démon. L'Égl. réformée n'y vit qu'une mention de la mort en général, avec ses angoisses et ses terreurs. L'Égl. luthérienne y vit une descente triomphante, Jésus se montrant aux morts comme vainqueur de la mort, et aux damnés comme leur juge victorieux; tandis que d'autres y voyaient au contraire le dernier degré de l'abaissement, la dernière étape de l'œuvre expiatoire. Schleiermacher ne voit qu'un mythe dans le passage de Pierre; d'autres y cherchent un sens figuré. Plusieurs enfin croient que Jésus n'est pas descendu seulement aux enfers, aux lieux inférieurs, mais réellement en enfer, pour souffrir les tourments en lieu et place des rachetés (Formule de Concorde). Pour quelques-uns le passage de Pierre laisserait entrevoir les perspectives d'un rétablissement final. Toutes ces questions eschatologiques restent bien obscures.
DÉSERT (Église du), nom que l'on donna à l'Église réformée de France, après que la révocation de l'Édit de Nantes eut réduit les prolestants à ne plus se réunir que la nuit ou dans des lieux écartés; v. Camisards, etc.
DES MARETS, v. Marets.
DESSERVANT, nom que les Articles organiques du 8 avril 1802, rédigés en application da Concordat de 1801, donnent aux prêtres nommés directement par les év. pour aider les rurés chargés de paroisses trop populeuses ou trop disséminées. La loi ne stipulait qu'un seul curé par canton, payé par l'État, mais elle prévoyait que cela ne pouvait suffire, et elle antorisait l'évêque à nommer autant de desservants, succursalistes ou vicaires, que les besoins l'exigeraient. Payés indirectement par les communes ou par l'État, qui met des fonds à la disposition de l'évêque, ils sont révocables par ce dernier qui peut les envoyer où il veut et n'a de comptes à rendre à personne. Cet état d'infériorité et de dépendance du bas-clergé, qui n'a qu'un recours illusoire auprès du synode provincial, soulève de grandes objections et présente de nombreux inconvénients, parmi lesquels on cite l'abus qui a été fait des mandats fictifs, l'évêque recevant des allocations pour plus de desservants qu'il n'en emploie.
DESUBAS, v. Majal.
DÉTERMINISME et Indêterminisme. Il est difficile, pour ne pas dire impossible, de préciser exactement les rapports qui existent entre la volonté de Dieu et celle de l'homme, la souveraineté absolue de l'un étant aussi évidente pour l'esprit que la liberté de l'autre est évidente pour la conscience. Les théol. de tous les temps se sont heurtés à ce problème, et ils n'ont pu donner une solution quelconque sans sacrifier l'un ou l'autre des deux termes. Si l'on admet que la volonté soit le produit direct et spontané de la liberté morale de l'homme, c'est de Fin-déterminisme. Le déterminisme admet au contraire que la volonté, ou ce que l'on nomme ainsi, est le résultat inconscient, mais nécessaire et fatal, et comme la simple résultante de causes extérieures et étrangères, telles que le tempérament, l'éducation, les circonstances, en sorte que l'homme ne serait plus réellement libre. Luther et Schleiermacher sont déterministes dans un esprit religieux, en ce sens que Dieu est bien Fauteur de tous les mouvements de notre volonté; mais Augustin et Calvin vont plus loin, et donnant à leur pensée une forme dogmatique, ils ont accentué dans la doctrine de la prédestination l'expression la plus tranchante du déterminisme. Et plus on formule d'une manière mécanique la nature des rapports de Dieu avec l'homme, plus aussi l'on se rapproche du fatalisme musulman, qui aboutit à faire de l'homme une machine inerte et sans volonté. Les philos, ont rivalisé avec les théologiens pour expliquer ce mystère et, chose étrange, ceux qui repoussent le plus en religion la prédestination, semblent l'admettre en philosophie et dans la pratique, soit, comme Leihnitz, au nom de l'harmonie générale qui ne saurait être troublée par la liberté de l'individu; soit, comme les panthéistes, parce que l'individu n'est qu'une manifestation de l'ensemble; soit, comme les matérialistes, parce qu'ils estiment que la volonté n'est que la traduction des modifications de la matière, du sang ou du cerveau, diversement influencés. L'homme sage fera bien d'ajourner à plus tard la conciliation de ces deux vérités aujourd'hui inconciliables, et de s'en tenir dans la pratique à ce que sa conscience lui dit de sa liberté et de sa responsabilité morale.
DEUSDEDIT, v. Dieudonné.
DEUTÉROCANONIQUE (canonique de second ordre), nom donné par les catholiques aux Apocryphes de FA. T. Quelques critiques protestants désignent aussi sous ce nom les livres du N. T. qui, selon eux, n'ont pas pour auteur un apôtre, ainsi l'Ép. aux Hébreux.
DEUTSCHMANN, Jean, né 1625, f 12 août 1706, prof, à Wittenberg 1662, gendre de Ca-lov; essaya de prouver que la théologie d'Adam (Th. paradisiaca) était la même que celle de la Formule de concorde. Adversaire de Calixte II et de Spener, il leur trouva 263 hérésies.
DEVAY, ou plutôt Matthias Biro, le réformateur de la Hongrie. Né à Déva, Transylvanie, au commencement du 16m« siècle, il étudia à Cracovie, reçut les ordres et se fit moine. Sous l'influence des idées de la Réform. il se rendit à Wittenberg 1529 et devint le commensal de Luther. Nommé pasteur à Ofen 1531, il déploya une grande activité, si bien qu'il fut arrêté, conduit à Vienne pour être examiné par l'év. Faber, et par deux fois jeté en prison 1532-1534. La protection du comte Nadasdy le fil élargir et il reprit son ministère comme pasteur et doyen à Debreczin. Lors de l'invasion des Turcs il dut s'enfuir, 1541, vint à Bâle où il avait déjà vu Grynâus en 1537, puis à Zurich, où il adopta les idées zwingliennes, et c'est à son influence qu'il faut attribuer le caractère spécial de la réf. en Hongrie. Il retourna dans son pays où il f, on ne sait à quelle époque, en tout cas avant 1547. Il a trad. le N. T. 1531, et composé plusieurs ouvrages élémentaires de religion, étude du Décalogue, du Symbole, de Notre Père, etc. Son livre Le sommeil des saints eut un très grand succès.
DÉVOLUTION (droit de). Lorsque le titulaire ou l'ayant droit d'un bénéfice ecclés. n'entre pas en jouissance, ou n'y pourvoit pas dans un délai déterminé, son supérieur immédiat a le droit, de par les décrets des deux Latran 1179 et 1215, d'y pourvoir à sa place ex jure devo-luto. D'après le concordat de Vienne 1418, le droit de nomination à un évêché passait au pape et non à l'archev., si l'év. présenté n'avait pas été élu suivant les règles canoniques. En revanche, si le supérieur en question laisse passer 3 mois sans faire usige de son droit, ce droit fait retour au titulaire ex jure postlimini. D'une manière générale le droit de dévolution consiste dans le droit donné au supérieur d'aviser pour le mieux lorsque, pour divers motifs, l'intéressé direct néglige des démarches qui lui incombent.
DE WETTE, v. Wette.
DEXTER, Flavius Lucius, fils de l'év. Pacian, de Barcelone. Jérôme le compte au nombre de ses amis, et lui attribue un livre intitulé Omni-modum historia. Le jésuite La Higuera prétendit en avoir découvert le mss. à Fulda et le fit imprimer, mais la fraude fut bientôt dévoilée.
DEZA, successeur de Torquemada comme grand inquisiteur, fit brûler 2592 suspects d'hérésie; 896 furent en outre brûlés en effigie et 34,952 personnes condamnées à des peines graves ou infamantes.
DIACRES, Diaconesses, Diaconie. Indépendamment des diacres, dont l'institution est racontée Act. 6, et dont le service était essentiellement matériel, l'Église eut de bonne heure une catégorie d'ecclésiastiques subalternes chargés d'assister le prêtre dans la distribution de la Cène et de veiller à l'entretien des vaisseaux sacrés et à l'ordre du service. Ils sont mentionnés dans ce sens par Justin. Plus tard leurs attributions s'étendirent, ils eurent le soin des pauvres, et on les rangea parmi les membres du clergé, mais sous la juridiction immédiate de l'évêque. Ils appartenaient aux ordres majeurs, et furen! soumis au célibat comme les autres, quand celte règle prévalut. Ils sont considérés comme les aides des prêtres, et on leur confie souvent la prédication. Ils reçoivent la consécration de l'év. par l'imposition des mains, mais sans onction d'huile. L'Égl. luthérienne a conservé cette institution, de même que l'Égl. anglicane; elles ont aussi des sous-diacres et des archidiacres. Dans l'Égl. réformée on rattache ces fonctions à l'institution apostolique, et les diacres sont surtout appelés à rendre des services d'un ordre temporel; parfois ils siègent comme anciens dans les conseils de l'Église. — Quant aux diaconesses, mentionnées seulement Rom. 16, 2., il n'en est plus question depuis les conc. d'Orange 441 et d'Épaone 507, sauf dans l'Égl. grecque où elles se sout conservées jusqu'au 12«*e siècle. — Ce qu'on appelle auj. diaconesses, ce sont des dames qui, après une éducation spéciale, se consacrent soit au soiu des malades, soit à l'enseignement. L'idée avait déjà reçu un commencement d'exécution sous les La Mark à Sedan, vers 1620. Le malheur des temps l'empêcha de se développer. Auj. il existe plusieurs maisons-mères sur le continent; la plus ancienne est celle de Kaisers-werth, fondée en 1836 par le pasteur Fliedner f 1864; elle ne compte pas moins de 110 stations dans diverses parties du monde; quelques-unes sont splendides, en Syrie, Égypte, etc. D'autres maisons existent encore, et parmi les plus anciennes il faut nommer Paris 1841. S iint-Loup 1842, Strasbourg 1842, Dresde 1844, etc. — On donne le nom de diaconat tantôt à un conseil de diacres, tantôt à une dépendance de l'église, destinée à recevoir les ustensiles, vêtements, livres de culte; tantôt enfin chez les grecs, au manuel qui indique les fonctions des diacres.
DIASPORA, mot grec qui signifie dispersion, ou les dispersés, et qui est employé dans ce sens Jean 7, 35. Jacq. 1, 1. 1 Pier. 1, 1. pour désigner les juifs demeurant hors de Jérusalem et disséminés dans l'empire. Les Fr. moraves l'ont adopté pour désigner de même ceux de Jeuirs membres qui vivent éloignés des centres et dispersés dans le monde. Il s'emploie par extension, dans les Égl. évangéliques, en parlant des protestants disséminés parmi les populations catholiques.
DIAZ, Jean, né à Cuença, Cas tille, étudia à Paris, où il se convertit au protestantisme, 1540; vint à Genève avec Budé et Crespin, chaudement recommandé à Calvin; passa de là à Strasbourg, où Bucer se l'adjoignit pour l'accompagner à la diète de Ratisbonne, déc. 1545. L'avocat du pape, Malvenda, lit tous ses efforts pour le ramener au catholicisme, et n'ayant pas roussi, il excita Alphonse, fr. aîné de Jean, à le faire assassiner. Celui-ci partit de Rome avec un bourreau solide, qui d'un seul coup de hache assomma Jean à Neubourg, sur le Danube, la nuit du 27 mars 1546. Les deux assassins furent arrêtes à Augsbourg, et ils allaient être jugés quand l'emp. et le pape évoquèrent la cause à Rome, sous prétexte que le fratricide était un ecclésiastique. Les assassins furent acquittés, presque avec des éloges, mais Alphonse finit par se pendre à Trente 1551. Portrait par Bèze, dans ses Icônes.
DICTATUS GREGORII, livre sur le gouvernement de l'Egl. et le droit ecclésiastique, faussement attribué à Grégoire VII.
DIDEROT, Denis, fils d'un coutelier, né à Langres 1713, f 1784. Destiné à l'état ecclésiastique et élève des jésuites, il préféra plus tard l'étude du droit, et finit par suivre son goût pour la littérature et les sciences. Après quelques trad. de l'anglais, il publia ses Pensées philos., fonda un Dictionn. universel de médecine; écrivit quelques drames et quelques romans, composa sur commande des Sermons pour vivre, et fut avec d'Alembert le fondateur et le principal auteur de l'Encyclopédie. Athée et matérialiste, il mit son enthousiasme et son imagination au service de ses négations. Sa fille, de Vandeuil, a écrit des Mémoires sur sa vie.
DIDYME, le jumeau, surnom de Thomas, a été aussi le nom ou le surnom de plusieurs hommes: 1° Y Aveugle, né 308 à Alexandrie, f 395, fut malgré sa cécité l'un des plus grands savants de son temps, et pendant 50 ans le directeur des catéchistes d'Alexandrie. Ennemi des ariens, il fut condamné comme hérétique au 2d conc. de Nicée, pour n'avoir pas pris parti contre Origène. Presque tous ses écrits sont perdus; on a cependant encore son livre Du Saint-Esprit, trad. par Jérôme, un travail sur la Trinité, un traité contre les manichéens. — 2° Gabriel, né 1487 à Joachimsthal, Bohême, ermite 1502, prêtre 1513, se convertit à la réforme et prêcha à Zwickau. Un des premiers à Wiitenberg il travailla à la suppression de la messe, et en 1521, au couvent des Augustins, il demanda que les portes en fussent ouvertes. Successivement pasteur à Altenbourg et à Tor-gau, il eut des difficultés à cause de son caractère inquiet et de ses relations trop intimes avec Carlstadt et More, fut déposé par Maurice de Saxe 1549, pour avoir refusé l'Intérim, et f 1553 dans la misère.
DIEPENBROCK, Melchior (comte de), né à Bocholt 6 janv. 1798. Élève de l'école militaire de Bonn, il fit la campagne de 1814, fut renvoyé du service pour cause d'insubordination, rencontra Sailer en 1817, qui le décida à faire ses études au séminaire de Mayence et l'appela auprès de lui à Ratisbonne 1521. Consacré prêtre en 1823, chanoine en 1830, vicaire-général en 1842, Diepenbrock fut nommé prince-évêque de Breslau en 1845, cardinal en 1850, f 1853. De l'école de Sailer, à la fois mystique et pratique, il se prononça contre le dogme de l'Immaculée conception. On a de lui quelques Traités et des Sermons.
DIES FIXA. Quand une fête mobile tombe sur un autre jour de fête, ce dernier, si on ne peut le faire coïncider avec le premier, est ajourné à un jour autre, qui prend le nom de die* fixa, jour fixé.
DIES IRÆ, séquence, ou final de la messe pour la Toussaint et la fête des morts. Ce chant date du 13">e siècle et était déjà en usage dans l'Égl. au 14me. On l'attribue à Thomas de Cé-lano, vers 1230; d'autres cependant l'attribuent à Bonaventure, Grégoire4e-Grand, saint Bernard ou au cardinal Ursins. Il a été souvent traduit ou imité.
DIETHER, d'Issenbourg, év. de Mayence, 1459-1482, fonda l'université de cette ville.
DIETRICH, Veit, né 1506 à Nuremberg, étudia à Wittenberg, fut de 1527 à 1535 le secrétaire de Luther qui l'emmena avec lui à Co-bourg et à Augsbourg; fut nommé pasteur à Nuremberg, eut des difficultés avec Osiander, parce qu'il voulait l'absolution collective et qu'il avait renoncé à l'élévation de l'hostie; refusa de se soumettre à l'Intérim d'Augsbourg, et son conseil ayant été contraint d'y adhérer, il était sur le point de donner sa démission, quand il f 1549. Outre plusieurs travaux et explications bibliques, il a publié un Guide à l'usage des pasteurs de campagne, qui a longtemps servi et dont on se sert encore dans quelques districts de Bavière.
DIEU (Louis de), v. Jean.
DIEUDONNÉ, deux papes de ce nom, l'un et l'autre presque inconnus: lo Deus-dedit 615-618, fils d'un sous-diacre; la légende lui attribue la guérison de plusieurs lépreux. Deux décrétâtes inauthentiques sont placées sous son nom: Tune sur le mariage entre parrains, l'autre sur l'élection des papes. — 2° A deo datas, ou Déodat 672-676; ardent défenseur des deux volontés en Christ.
DIGNITÉ, terme à peu près synonyme de prélature, se dit de charges ecclèsiast. importantes, ayant une juridiction spéciale ou un caractère permanent, avec droit à certains honneurs et même à des privilèges civils. Les papes ont les dignités pontificales; les cardinaux, les nonces et les abbés mittrés ont des dignités secondaires; les doyens de chapitres, qui n'ont pas de juridiction, n'ont que des dignités honoraires.
DILLER, Jean-Michel; prévôt du couvent des carmes à Spire, prêchait l'Évangile dès 1529, mais sans quitter son poste; son conseil était avec lui contre l'évêque. Il dut s'enfuir en 1548 quand l'emp. vint à Spire, et se réfugia en Suisse; il trouva une place à Bâle; mais appelé en 1552 à Neubourg, Bavière, puis à Heidelberg, il travailla à la réforme avec Brenz, et fut chargé sous Frédéric III de plusieurs missions importantes, à Worms 1557, Poissy 1561, Maulbronn 1564. f 1570.
DIMANCHE. V. les Actes du congrès pour la santific. du Dimanche. Genève 1877.
DIMANCHE (Écoles du). On comprend sous ce nom des institutions et des organisations assez différentes. Charles Borromée avait fondé comme œuvre de bienfaisance, des écoles où l'on enseignait le dimanche les premiers éléments à des enfants qui ne pouvaient suivre l'école pendant les jours ouvrables. En Allemagne, depuis l'époque de la Réformation, on réunit les enfants le dimanche pour leur donner une instruction adaptée à leur âge. Ailleurs ce sont des répétitions intéressantes du travail fait pendant la semaine; l'abbé Felbiger de Sagan, Silésie, avait établi en 1774 des classes de ce genre en Autriche et dans l'Allemagne catholique. Mais l'œuvre immense qui porte aujourd'hui le nom d'Éc. du Dimanche remonte à un imprimeur de Glocester, nommé Robert Raikes, qui en 1782 eut le premier l'idée de réunir ainsi quelques enfants pour les entretenir de leur salut et leur faire connaître la Bible. Le succès fut presque immédiat; en 1791 toute l'Angleterre et presque tout le nord de l'Amérique étaient couverts d'écoles du dimanche, et elles se répandirent de là sur Brème, Hambourg, la Hollande, la France, la Suisse; partout où il y avait quelque vie religieuse, l'école devint une annexe de l'église et sa meilleure pépinière. Des laïques pieux, hommes et femmes, se consacrent à cette tâche sous la direction du pasteur, et les magistrats les plus haut placés, des présidents des États-Unis ou de la Chambre des Lords n'ont pas regardé comme indigne d'eux d'être moniteurs dans ces écoles et d'avoir un groupe d'élèves à surveiller, à interroger et à faire réciter. Quelques-unes de ces écoles sont fort nombreuses et demandent par conséquent un plus grand nombre de moniteurs et de monitrices, et quand les travaux dans les groupes sont terminés, le président les réunit pour récapituler la leçon et leur adresser quelques exhortations pratiques. Plusieurs systèmes sont employés. Il y a déjà, même en français, toute une littérature et des journaux pour les écoles. Lausanne et Paris en sont les principaux centres.
DIMES, ou décimes. Les redevances que les Hébreux devaient payer à leurs prêtres et lévi-les passèrent bientôt et assez naturellement dans l'Égl. chrétienne; pas dès l'abord cependant, puisque la distinction entre laïques et ecclésiastiques n'existait pas, et que plusieurs apôtres tenaient à honneur de gagner leur vie, mais aussitôt que les égl. constituées comprirent que leur devoir était de subvenir aux besoins de leurs conducteurs. Les dons volontaires étaient dans la nature des choses; ils se traduisirent en dîmes par souvenir et par la tradition de l'A. T. C'est dans les Gaules qu'apparaissent à cet égard les premières prescriptions positives; le conc. de Tours 567 les recommande, celui de Mâcon 585 les ordonne sous peine d'excommunication; les pénitenciaux dès cette époque mentionnent comme un péché la fraude sur les dîmes. Les fermiers d'une terre appartenant à l'Égl. devaient lui payer la double dîme, sans détriment du cens dû à l'État. Pépin et surtout Charlemagne firent payer rigoureusement ce tribut dû à l'Église, et l'imposèrent même aux peuples vaincus; de là de fréquents soulèvements, parce que ces peuples le jugeaient déshonorant. A la longue la dîme perdit son caractère ecclésiastique; elle ne fut plus qu'une redevance, un bénéfice, une rente qui pouvait passer entre les mains d'un seigneur ou d'un laïque quelconque. Les abus se multiplièrent au point que le 3®* conc. de Latran 1179. voulant y porter remède, n'osa pas toucher aux droits acquis, et se borna à stipuler qu'à l'avenir les dîmes ne pourraient plus être usurpées par des laïques. Prélevées d'ordinaire par les évêques, elles passèrent ensuite dans les mains des prêtres, qui devaient en présence de témoins en faire trois parts, rune pour leur entretien, l'autre pour l'église, l'autre pour les pauvres. Lors de la réforme les anabaptistes de la Suisse en prêchèrent l'abolition, mais ceux d'Allemagne maintinrent le principe que les paroisses doivent à leurs pasteurs un entretien convenable. Luther approuvait aussi la dlme, mais il voulait qu'elle fût remise au gouvernement chargé de pourvoir à tous les frais du culte. La révol. française la supprima définitivement, tantôt avec, tantôt sans indemnité. Le moyen âge avait déjà permis, dans certaines circonstances, le rachat de la dîme pour une somme déterminée.
— La Dime de Saladin est l'impôt que préleva Clément III en 1188, pour faire face aux frais de la 3me croisade, contre Saladin. Il demanda de tout prêtre ayant un bénéfice, et qui ne prendrait pas part à l'expédition, la dîme de son revenu d'une année.
DIMINUTION de bénéfice (en latinderninutio). Toute obligation nouvelle, ou servitude, mise à la charge d'un bénéfice, lui ôte nalurellement de sa valeur, le déprécie, le diminue. L'équité demande que des changements de ce genre n'aient lieu que lors de la vacance d'un bénéfice ou d'accord avec les intéressés.
DIMISSORIALE, attestation qu'un prêtre donne à un paroissien pour l'autoriser à s'adresser au prêtre d'une autre paroisse pour l'accomplissement d'un acte religieux, mariage, baptême, etc. Cette pièce ne peut être refusée, si d'ailleurs la question financière est liquidée. Les prêtres ont également besoin d'une dimis-sorialede leur èvêque, s'ils veulent fonctionner, *>t surtout s'ils veulent être consacrés dans un autre diocèse. Le conc. de Trente a des prescriptions sur la matière.
DINTER, Gustave-Frédéric, né à Borna 29 févr. 1760, pasteur à Dresde, puis à Kônigs-berg, prof, de théol. f 1831. S'occupa beaucoup d'éducation d'après les principes de Lancaster et de Pestalozzi; il eut un moment une grande popularité, mais est auj. tombé dans l'oubli. Rationaliste, mais* animé de sentiments religieux, il a publié une Bible pour les écoles qui a soulevé de nombreuses objections.
DIOCÈSE, district, ou circonscription sur laquelle s'étend l'autorité d'un èvêque. Le fait que primitivement l'év. avait seul le droit de baptiser, prouve que le diocèse et la paroisse n'étaient qu'une seule et même chose, et que c'est l'accroissement du nombre des fidèles qui seul, en obligeant d'augmenter le nombre des pasteurs, a donné un certain relief, mais pas plus d'autorité, au pasteur de l'église-mère. De là aussi les nombreux évêchés de l'Italie et de Htàent, qui se sont formés à une époque où Tépiscopat n'était pas essentiellement un des degrés de la hiérarchie. Dans les Gaules et en Allemagne ils représentaient davantage l'administration ecclésiastique, et les diocèses sont aussi beaucoup plus étendus. La création d'un évêché est un droit réservé du pape, mais la sanction de l'État est nécessaire pour fixer la circonscription. Les constitutions diocésaines, ou statuts qui règlent l'administration de chaque diocèse, devraient être élaborés par les synodes diocésains, mais comme ceux-ci ne fonctionnent presque plus, c'est l'év. qui y pourvoit par des lettres pastorales et des ordonnances, sous sa propre responsabilité et sans qu'il soit besoin de la ratification du pape.
DIOCLÉTIEN, C.-Valerius-Jovius-Aurelius, né 245 à Dioclès, près Salone, Dalmatie, était fils d'un affranchi et servit comme simple soldat. Après le meurtre de l'emp. Nuniérien et de son fils Car us 284, il tua de sa propre main Aper le meurtrier et fut proclamé empereur par les soldats à Nicomédie. Il s'adjoignit Maximien comme auguste en occident, Galère et Constance Chlore comme césars, c.-à-d. comme héritiers éventuels, 292, et s'appliqua à consolider l'empire qui s'en allait. Il protegea d'abord les chrétiens par politique; mais son gendre Galère, homme sans principes, le persuada que les chrétiens nuisaient à l'unité de l'empire et il commença à les persécuter en privant de leurs places ceux de ses employés, officiers et autres, qui refuseraient de sacrifier aux dieux. En 303, sous la même influence, il commença cette persécution cruelle qui dura dix ans; elle éclata le 23 févr., jour d'une fête païenne. Le lendemain un édit ordonna la destruction de tous les exemplaires de la Bible. Plusieurs chrétiens fléchirent; ils furent appelés traditores (livreurs) et excommuniés. Les magistrats des provinces furent peu rigoureux, et Mensurius, év. de Carthage, livra, au lieu de la Bible, les livres des hérétiques. Un second édit condamna les ecclésiastiques à la prison; un 3me les condamna à sacrifier ou à mourir; un 4m® étendit cette mesure à tous les chrétiens. Hiéroclès, gouverneur de la Bithynie, attisait ce zèle persécuteur, et bientôt on crut le christianisme détruit. Mais l'occident fut ménagé par Const. Chlore, et en 306 par Maxence. Un édit de Galère, malade, 311, mit fin aux persécutions en occident; elles continuèrent en Italie jusqu'à la défaite de Maxence 312, et en orient jusqu'à la paix de Licinius avec Constantin 314. Dioclé-tien malade avait dû abdiquer 305 devant les menaces de Galère. Il se retira à Salone où il vécut d'une vie tranquille et champêtre; il prétendait n'avoir commencé à vivre que depuis son abdication, et refusa les offres qui lui furent faites de reprendre la couronne, f 313; le bruit courut qu'il s'était empoisonné.
DIODATI lo Charles, né 1511, baptisé par Paul III et tenu sur les fonts baptismaux par Charles-Quint. Réfugié italien à Genève. — 2° Jean né à Genève 3 juin 1576, fils du précédent. Il fait de très bonnes études à Genève où il est docteur en théologie à 19 ans, et prof, d'hébreu à 21. En 1600 il épouse Madeleine Burlamaqui. En 1603 il publie sa célèbre Bible italienne, fidèle, claire, élégante, encore auj. généralement employée en Italie. S'intéressant beaucoup à Venise qui devenait un centre de réforme, il s'y rend en 1605 à la demande d'Henry Wotton, ambassadeur d'Angleterre, et trouve des aides en Fra Paolo Sarpi et Fra Ful-gentio, qui y entretenaient une certaine animo-sitè vis-à-vis des papes. II y retourna fin 1608, et fut encore consacré cette même année à Genève (4 nov.) Une lettre de Diodati au pasteur Durand à Paris, interceptée par le confesseur d'Henri IV, faillit gâter son œuvre; la mort de ce roi la compromit tout à fait, et Diodati dut se borner à des correspondances avec ses amis de Venise. En 1611 envoyé en France pour demander un secours financier aux réformés (Genève craignait une attaque de la Savoie), il fut bien reçu partout, et Marie de Médicis lui accorda sa protection. Le 21 nov. 1618 délégué avec Théod. Tronchin au synode de Dordrecht, il prit vigoureusement le parti des gomaristes et contribua à leur victoire. Il avait été en rapport avec Du Plessis-Mornay, Wotton, Casaubon, et d'autres illustrations de son époque. Son influence à Genève comme à l'étranger était grande; sa parole sinon très châtiée était énergique et véhémente. Il parlait mieux l'italien. Il écrivit encore une traduction française de l'Histoire du concile de Trente par Paolo Sarpi (1620), une Bible française (1644) avec' de nombreuses annotations; une Traduction italienne, en vers, des Psaumes, 1608, des Glossœ in sanctd Biblid 1644; annotations in Bibhd 1607, plus une foule de brochures, traités et dissertations en latin. Ses dernières années furent troublées par des démêlés avec les conseillers et les syndics. Il f respecté et regretté le 3 oct. 1649. Vie par E. de Budé.
DIODORE, év. de Tarse, né à Antioche, reçut à Athènes une culture classique. Appelé comme ancien dans sa ville natale, il distingua dans la lutte contre les ariens, prit soin de l'Égl. pendant l'exil de l'ét. Meletius, jusqu'à ce qu'il dut s'enfuir lui-même 372. Nommé év. de Tarse 378, il assista au conc. de Constantinople 381, f 394. Sa piété et ses nombreux écrits lui attirèrent l'estime de ses contemporains. Ses ennemis lui reprochèrent d'avoir approuvé le manque de patole de Flavien lors de la succession de Meletius. Cyrille suspecté son orthodoxie, et plusieurs voient en lui le vrai père du nesto-rianisme, parce qu'il n'admettait en Jésus qu'une unité morale et non substantielle des deux naturel. Il ne reste que des fragments épars de1 jses livres. Il eut pour disciples les deux hommes les plus considérables de l'école d'Antioche, Théodore de Mopsueste et Chrysostome.
DIOGNÈTE. La lettre à Diognète est considérée comme un des plus beaux monuments de l'antiquité chrétienne. Un païen d'un rang considérable demande à un ami de lui exposer ce qu'est le christianisme, et celui-ci lui répond; après avoir d'abord fait la caractéristique du paganisme et du judaïsme (qu'il met un peu trop sur le même rang). On a longtemps attribué cette lettre à Justin Martyr, mais quoique plusieurs idées soient dignes de lui, d'autres sont étrangères ou même contraires à sa théol., et ce n'est pas son style. Elle doit avoir été écrite entre 120 et 150. Bunsen regarde les 2 dernier chap. comme inauthentiques.
DIPPEL, Jean Conrad, né à Fraftkenstein 1673, étudia à Giessen, enseigna la philos., donna à Strasbourg des leçons d'astrologie, combattit le piétisme de Spener, et fit des extravagances, dansa, se battit, joua, pour prouver qu'il n'était pas orthodoxe. Plus tard il devint mystique et séparatiste exalté, toujours exagéré et plein d'orgueil. Il ne put tenir ni à Berlin, ni en Hollande, ni à Altona, ni à Stockholm, se fit arrêter plusieurs fois, et 'f 1734 dans l'Asile des enthousiastes à Berleburg. Ses écrits théol. portent le cachet de son caractère, notamment: L'orthodoxie des orthodoxes, le papistrte des protestants, elc. Il a rendu plus de services comme chimiste; on lui doit le bleu de Prusse et l'huile animale qui porte son nom.
DIPTYCHES, registre ou liste de noms de personnes, vivantes ou décédées, pour lesquelles le prêtre doit prier en disant la messe, chez les gréfcs et les arméniens. Cet usage n'existe plus chez les latins; le prêtre se borne à faire une pau&e pendant laquelle il est censé prier, ainsi que les assistants, pour ceux qui lui sont recommandés.
DISCIPLINE lo L'Égl. a désigné sous le nom d'Arcana disciplina, discipline secrète, depuis lei jours de' Tertullien jusqu'au 8ra« siècle environ, certains actes ou objets de culte, considérés comme mystérieux et que, pour des motifs de prudence, ou de vénération, elle tenait à déréber à la vue et à la connaissance des profanes; ainsi les sacrements du baptême et de la Cène, l'huile sainte, l'eau lustrale et même la prière du Seigneur. Le scrupule était poussé si loin qu'on évitait toute allusion à ces mystères symboliques, en présence des non-baptisés. On ignore l'origine de cette grande réserve; peut-être se rattache-t-elle aux traditions juives, peut-être faut-il la chercher simplement dans les persécutions et dans les conditions du caté-chuménat. Le juif ou le païen qui demandait à être reçu dans l'Égl. n'était pas admis sans une espèce de stage préliminaire qui, en assurant son instruction, devait aussi fournir la preuve de sa sincérité dans ces temps de trouble où l'espionnage était à craindre. De là deux classes de chrétiens, ceux qui étaient baptisés et ' ceux qui ne Tétaient pas, les premiers étant seul* initiés à tous les mystères de la doctrine et du culte. Tous assistaient indistinctement à la prière, à la prédication, au culte public; mais lorsque arrivait le moment de la communion, les catéchumènes étaient congédiés. La dogmatique romaine attache une grande importance au fait de cette discipline secrète, parce qu'elle lui sert à établir au moins la possibilité de l'origine apostolique de certains dogmes et pratiques, tels que l'invocation des saints, la transsubstantiation, le culte des images, dont les Pères ne disent rien, parce que, dit l'Église, il leur était interdit d'en entretenir le public. Y. sur ce sujet Rothe, De discipliné, arcani 1841, Credner 1&16.
La discipline ecclésiastique repose sur le droit que possède toute société de faire respecter ses principes, ses statuts et ses règlements. Elle se distingua du châtiment en ce qu'elle n'a pas d'autre objet que de réserver ses droits et son existence, et d'inviter le défaillant à rentrer en lui-même et à réfléchir. Dans l'Égl. catholique elle a pris cependant peu à peu le caractère d'une pénalité, à mesure que, confondant le spirituel et le temporel, l'Égl. a usurpé l'autorité civile et s'est arrogé le droit de punir et de statuer sur certains délits. À Genève et dans plusieurs autres Églises réformées le même pbènomène s'est présenté à cause de la confusion des deux pouvoirs, et parce que l'État avait pris un caractère religieux. Le vrai système:d'une dise, ecclés. purement morale, et cependant effective, se trouve dans l'ancienne Égl. réformée et dans toutes les Églises indépendantes de l'État. Là s'appliquent les prescriptions de Matt. 18, 15-17. dans les divers degrés de l'exhortation, de la censure et de l'expulsion. Mais le relâchement général Ta fait tomber en désuétude dans la plupart d£s Égl. réformées. Il en est de même pour l'Égl. luthérienne, où elle n'a jamais été bien comprise, parce que, là, la direction de la paroisse étant entre les mains, non d'un conseil ou d'un synode, mais des ecclésiastiques seuls, ou des princes, la peine spirituelle prenait aussitôt le caractère d'un châtiment temporel. Il y avait contradiction par la nature même des choses et par la force de la situation. La discipline suppose que l'Égl. a des droits SUr l'individu, <pi'elle peut à son gré l'admettre ou le repousser; mais quand l'individu est incorporé de force à l'ÊgHse, par le baptême ou par la loi, il ne peut plus être question de l'exclure par mesure disciplinaire, car souvent on lui accorderait par là précisément ce que l'on veut empêcher, le droit de se séparer. D'ailleurs on apprit d'autant plus à se passer de la discipline ecclésiastique, à mesure que la compétence de l'État devenait plus grànde, qu'elle n'avait sefrvi pendant longtemps qu'à suppléer ën fait à l'absence d'une législation positive quant à certains crimes et délits. Àuj. là où elle subsiste encore en droit; elle n'est plus guèï-e que nominale et ne s'exerôe qu'en cas de scandale grave. Après avoir pratiqué l'excommunication personnelle, l'Église réformée a fini par se contenter d'excommunier en général les pécheurs scandaleux; puis elle les a simplement déclarés indignes de commnnier; elle se borne maintenant à les conjurer de s'abstenir. Les égl. dissidentes elles-mêmes se sont radoucies sur ce point, et l'on peut dire que, sauf des cas exceptionnels, la discipline ne consiste plus que dans l'exhortation du pasteur et dans des observations fraternelles adressées à des membres de l'Égl. qui se dérangent ou qui causent du scandale. Le clergé catholique allemand a essayé de donner à l'excommunication un caractère, tantôt infamant, tantôt pénal, mais il a été poursuivi au civil par les intéressés, et il a dû renoncer à cet empiétement sur la juridiction temporelle.
3» On appelle délits disciplinaires les négligences, abus ou excès de pouvoir des ecclésiastiques dans l'exercice de leurs fonctions. Ils relèvent, chez les catholiques, de l'ordinaire; chez les protestants, du consistoire, et en seconde instance, du synode. Ils sont punis soit par une censure, soit par une peine proprement dite, qui peut être une amende, les arrêts, la suspension, la révocation ou la dégradation. Les Égl. protestantes ne connaissent que la censure, la suspension à temps et la destitution; encore, pour ces deux dernières peines, faut-il la sanction de l'État.
4° Le livre de la Discipline est, pour l'Égl. d'Écosse, le recueil et code de lois qui fut élaboré en 1560 par Knox, Jean Row et d'autres ecclés. pour la constitution et la discipline de l'Église; il fut ratifié en janv. 1561, sans être cependant généralement reconnu. On s'occupa de le reviser, et en 1578 parut le second livre de la Discipline, qui fut définitivement adopté par l'Assemblée, ratifié par le parlement, et n'a cessé d'être dès lors la règle de l'Égl. d'Écosse. Il repose sur l'indépendance complète de l'Égl. quant à la doctrine et à l'administration.
5° Petit instrument de flagellation, fouet de cordelettes ou des petites chaînes, à l'usage des religieux; il Sert à mortifier la chair ou à expier des péchés.
DISCRÉTION (âge de). De même que pour certains actes civils, l'État demande un minimum d'âge, l'Égl. en demande un pour les actes religieux, polir la! tonsure, la prêtrise, l'épiscopat. Nul ne peut être ordonné prêtre avant 25 «ns; on peut obtenir un bénéfice déjà à 14. Pour prononcer des vœux effectifs, l'État exige la pleine majorité. Pour le changement de religion il se contente de 14 ans, ce qu'on appelle l'âge de discrétion, parce qu'on suppose qu'à cet âge un enfant sait ce qu'il fait. Pour la confirmation les Égl. protestantes ont adopté l'âge minimum de 14 ans; les catholiques descendent beaucoup au-dessous et peuvent aller jusqu'à 7.
DISIBOD, saint irlandais, qui prêcha l'Évangile sur la Nahe. près Bingen, et y fonda un couvent, vers 545, ou entre 670 et 690. Ce couvent passa 1108 aux bénédictins, et 1159 aux cisterciens. Sécularisé lors de la Réforme.
DISPENSES, autorisations provisoires ou personnelles de s'affranchir de certaines obligations; elles ne peuvent porter que sur des faits disciplinaires, et sont depuis Innocent III l'apanage exclusif des papes, par l'intermédiaire des dataires ou des pénitentiaires. En cas d'urgence les év. peuvent cependant accorder certaines dispenses prévues par les canons. Pour remédier aux nombreux et scandaleux abus qui avaient été signalés, le conc. de Trente décida que les dispenses ne pourraient être données que pour des raisons graves et sérieuses, et gratis, ce qui n'excluait pas les témoignages spontanés de reconnaissance. Ces dispenses sont nombreuses dans l'Église catholique, puisqu'elles portent sur la nourriture et qu'elles vont jusqu'à relever un prêtre de ses vœux et lui permettre de se marier; se réduisent chez les protestants à de simples dispenses d'âge pour la confirmation ou la consécration.
DISSENTERS, nom qu'on donne en anglais à tous ceux qui n'appartiennent pas à l'Egl. nationale; ainsi en Angleterre à tous ceux qui ne sont pas épiscopaux, en Écosse à ceux qui ne sont pas presbytériens; la logique voudrait qu'en Irlande il désignât ceux qui ne sont pas catholiques.
DISSIDENTS, ceux qui se séparent; c'est à peu près l'équivalent du mot anglais dissenters. Il désigne en religion ceux qui se sont séparés de l'Égl. nationale, soit par principe et refusant toute intervention, protection et immixtion de PÉtat; soit pour motifs de doctrine, quand l'établissement officiel ne professe plus la foi évangélique; soit enfin par besoins religieux, quand la vie chrétienne s'est alanguie et qu'elle a été remplacée par le formalisme, l'orthodoxie morte et l'indifférence. La Suisse romande a été, sur le continent, l'un des centres principaux de la dissidence dans le sens restreint du mot, et de nombreuses brochures et volumes ont été publiés en sa faveur depuis une cinquantaine d'années. La discipline intérieure, assez stricte d'abord, s'est sensiblement relâchée ou radoucie. En Pologne le nom de dissidents fut donné à tous ceux qui n'étaient pas restés catholiques.
Leurs droits furent fixés par le conc. national de Petrikau 1555; ils furent étendus et leur égalité de droits avec les catholiques fut consacrée en 1573 par la Paix des dissidents, qui cependant ne fut jamais bien observée. Ils furent à plus, reprises persécutés, notamment en 1717 et 1733, ce qui amena l'intervention tour à tour de la Russie et de la Prusse, et finalement le partage de la Pologne, dont la responsabilité retombe ainsi sur les persécuteurs.
DIVORCE. L'Évangile ne l'autorise que dans le c»sd'adultère, le mariage étant rompu parce fait même. L'Égl. chrétienne ne peut sous ce rapport aller plus loin que son maître, et elle ne peut sanctionner le divorce dans d'autres conditions. Mais la question n'eh reste pas moins complexe et difficile dans la société moderne qui, malgré son nom de chrétienté et malgré l'influence du christianisme sur sa législation, compte une si petite minorité de chrétiens. Du moment où le mariage est devenu un acte relevant de l'état civil et que l'État a cessé d'être nécessairement religieux et chrétien, peut-il encore, et surtout vis-à-vis de ses ressortissants qui déclarent n'être pas ou n'être plus chrétiens, invoquer la loi chrétienne dans ses lois et ses ordonnances? Évidemment il y aurait contradiction. Cependant plusieurs pays acceptent cette inconséquence, à cause du bien moral qui en résulte pour la famille et la religion. Mais d'un autre côté les rapports des époux peuvent devenir par leurs vices personnels on par incompatibilité d'humeur, si mauvais ou si dangereux, que plusieurs législations ont adopté comme moyen terme la séparation de corps et de biens, demi-mesure qui n'est plus le mariage, qui n'est pas encore le divorce, et qui ne satisfait ni les intérêts, ni le devoir. Pour les chrétiens la question est tranchée à cause des principes et par la vie nouvelle; mais pour la société civile elle doit se trancher, et l'on n'a pas le droit d'imposer à ceux qui ne croient pas un joug et une discipline qu'ils ne sauraient supporter. S'il y a des dangers à prévoir, c'est à la législation d'aviser en stipulant ses conditions et des délais convenables, au besoin même des pénalités pour des demandes de divorce non justifiées.
DITHMAR, Dietmar ou Thitmar, né25juilL 976, fils du comte de Wallbeck; chanoine de Saint-Maurice 989, év de Meraebourg 1009, t 1 déc. 1018; auteur d'une chronique d'Allemagne 988-1018, importante surtout pour l'hist. d'Henri H et pour celle des contrées slaves situées au delà de l'Elbe. Publiée partiellement par Lappenberg. Laurent, Leibnitz et Wagner.
DITHMARSIÉ, petit district du Holstein, longtemps rattaché comme république à l'archev. de Brème. La réformation y fut combattue par les paysans soulevés par le dominicain Augustin Forneborch. Le pasteur Nicolas Boje fut misérablement assassiné 1524, mais ce meurtre provoqua une réaction et en 1532 la doctrine luthérienne fut adoptée comme religion de l'État.
DOBER lo Martin, né en Souabe 1703, ami du comte Zinzendorf, descendait de parents pieux, qui avaient quitté la Bohême pour cause de religion. Potier de son état. Il arriva à Herrnhut en 1724, fit de solides études, entra dans renseignement, passa en 1736 un bon examen devant le Consistoire de Copenhague, composa de beaux cantiques, fut un puissant prédicateur en 17.40 et 1741; depuis 1744 en Angleterre et en Wetteravie; resta jusqu'à la lin un témoin et un aide fidèle dans l'œuvre de Dieu.
2° Léonard, hernoute, désireux d'évangéliser les nègres de Saint-Thomas, Antilles, même au risque de devenir esclave, partit en août 1732, après beaucoup de difficultés, et s'embarqua à Copenhague le 8 oct. avec Nitschmann. Ce dernier dut le quitter l'année suivante. Lui-même gagna sa vie, d'abord comme maître d'hôtel chez le gouverneur, puis comme intendant chez un planteur, tout en évangélisant. Il fut relevé de ses fonctions par l'arrivée de 3 frères, Leupold, Schenk et Miksch, et rentra à Herrnhut, 5 févr. 1735, où il était rappelé comme ancien à la place de Linner. Il put suffire quelques années à ses fonctions, mais lorsqu'il s'y ajouta la surveillance de toutes les égl. et des stations missionnaires, il donna sa démission, 1741, f 1766.
DOBRIN, v. Frères 6<>.
DOCÈTES, Docétisme. On comprend sous ce nom tous les systèmes qui, maintenant la divinité de J.-C., ont plus ou moins réduit son humanité jusqu'à n'en laisser subsister que l'apparence. C'est ce que signifie en grec le nom même de docètes. Ainsi l'homme Jésus n'aurait souffert et ne serait mort qu'en apparence. Le docétisme était la contrepartie de l'ébionitisrne; procédant de Philon, il devait aboutir au gnos-ticisme. Les simoniens, Basilides, Bardesanes, Valentinien, étaient docètes, et le système conduisait forcément au dualisme. Bien que l'Égl. t'ait condamné et positivement rejeté, le docétisme a tonjours eu des représentants conscients ou inconscients, entre autres parmi les pauli-ciens et les albigeois, parce qu'il répond à certains besoins de la conscience et de l'exégèse, mais il est contraire à la doctrine chrét. de la rédemption.
DOCTEUR en théologie. C'est le grade le plus ^levé que puissent décerner les facultés de théologie. Un peu déprécié par l'abus qui en a été fait, il était autrefois très recherché et jouissait de plusieurs droits et privilèges, mais il devait être régulièrement obtenu et réellement mérité. Auj. c'est surtout un titre honorifique, décerné pour services rendus à l'Égl.; dans plusieurs facultés on l'exige comme condition de l'enseignement supérieur. Le recteur en délivre les diplômes en séance solennelle; une barette ou bonnet en était autrefois l'insigne extérieur. Parmi les scolastiques les plus Célèbres, Thomas d'Aquin avait reçu le titre de docteur Angélique; Gerson de Très-chrétien; Wesel était docteur des Controverses; Occam était le docteur Invincible, Haies était Irréfragable, Tauler Illuminé, Bernard de Clairvaux Melliflue, Bacon Admirable, Albert-le-Grand Sublime, Duns Scot Subtile, etc.
DOCTRINE (Frères de la) chrétienne; deux ordres de ce nom, voués l'un et l'autre à l'enseignement du catéchisme aux classes pauvres. 1° Congrég. religieuse fondée en Italie 1562 par Marc de Sadis Cusano; elle comprenait des laïques et des ecclésiastiques, César de Bus, à Avignon, fit quelque chose de semblable 1592. Après avoir commencé parles écoles, ils eurent des collèges et des établissements florissants. Bellarmin rédigea pour eux un catéchisme. 2° En France les fr. des écoles chrét.. plus connus sous* le nom d'Ignorantins, sont des religieux non ecclésiastiques, dont l'origine remonte à J.-B. de la Salle, chanoine de Reims 1680. Approuvé par Benoît XIII, 1724, cet ordre a pris une très grande extension et a survécu à la suppression des ordres religieux. Un moment il a menacé d'envahir toutes les écoles de France et de remplacer les maîtres laïques. Il enseigne surtout bien la calligraphie et la discipline, mais il comprime l'esprit d'initiative. Plusieurs de ses membres se sont fait par leurs mœurs ou leur brutalité une triste célébrité. Les ignoran-tins portent le tricorne et une robe de bure noire avec le rabat blanc.
DODDRIDGE. Philippe, né à Londres 26 juin 1702, f à Lisbonne 1751, fils d'un pasteur non-conformiste, fut lui-même pasteur indépendant à Market-Harborough 1722, puis à Northamp-ton 1729 où il fonda un séminaire de théologie. Prédicateur distingué, docteur et bon écrivain, il a laissé plusieurs ouvrages qui se lisent encore, des Sermons pour l'enfance et la jeunesse, un Cours de lectures et surtout: Naissance et progrès de la vraie piété dans l'âme, trad. par Vernède, Bâle 1754.
DODWELL, Henri, né à Dublin 1641, prof, d'hist. à Oxford 1688, se fit destituer parce qu'il refusa de prêter serment à Guillaume III, et se retira à Shotterbrook. Il avait étudié la philologie et la chronol.; quoique laïque il se livra aussi avec ardeur aux sciences ecclésiastiques, écrivit sur Irénée et Cyprien, et s'engagea dans de longues controverses avec Clarke, Norris,
Burnet, Baxter, à cause de ses vues paradoxales suç l'immortalité da l?âme et le pardon des péchés. Il plaçaiV sous Trpjsn la rédaction des 4 Évangiles. Sop fils Henri attaqua le christiaiiis-m^^arpme nop fondé en preuves 1743; son second fi |s, William (1709-1788), archidiacre de Berk, a publié divers ouvrages d'apologétique, entre autres une réponse 4 son frère.
DOEDERLEIN, Jean-Christophe, auteur de plpsieurs Comment, sur Ésaïe, le Cantique, les Prpverbes, et d'une Institution de la théol. chrét; né 20 jan\. 1745 à Windsheim, Fran-conie; il fut prof.de théol. k Altdorf 1772, puis à, léna 1782. f 1792. Tendance orthodoxe, exégèse claire et serrée.
DOELLINGER, Jean-Joseph-Ignace, né à Bamberg le 20 févr. 1799; prof, d'hist. ecclés. à Munich; un des représentants les plus autorisés du catholicisme libéral. A écrit sur; Les Mariages mixtes 1838, la Réformation 1846-1848, Luther 1851, Hippolyte et Calliste 1853, le Christianisme et l'Eglise 1860, l'Égl. et les églises 1861; Paganisme et judaïsme, etc. Il est docteur en théol., président de l'Acad. royale des sciences, et conservateur des collections scientifiq.de la Bavière.
DOGMES, Dogmatique. Le mot grec dogma signifiait dans l'origine une opinion, ce que* l'on croit, et s'employait même en philosophie. Il a pris peu à peu un sens plus précis et mieux déterminé, avec le double caractère d'une vérité reîig. ou morale révélée de Dieu, et d'une vérité faisant règle pour un certain ensemble d'adhérents. C'est le mot que la plupart de nos versions traduisent par ordonnances Act. 16, 4. Éph. 2, 15. Col. 2, 14. Josèphe appelle le contenu des livres hébreux les dogmes de Dieu, et Origène désigne les apôtres et les évangélistes comme les maîtres (professeurs) du dogme. L'idée du dogme est entièrement objective. Elle suppose une Église chargée de le formuler, de l'enseigner et de le sauvegarder; elle suppose m même temps une science théol. ayant pour mission de préciser en termes scientifiques les idées relig. de la communauté. Le christianisme se compose de faits et de maximes dont le Christ est à la fois le sujet, le centre, l'auteur et l'objet; on ne peut ni les changer, ni les modifier; mais on peut les préciser, les grouper et en tirer les conséquences. Ce travail de systématisation et de coordination est l'œuvre de la Dogmatique, science qui n'a rien à inventer, qui par conséquent doit aboutir au même résultat dans tous les temps, et qui doit se borner à exposer la vérité chrétienne et à la démontrer d'après la Bible ou d'après la tradition, suivant le principe fondamental admis par chaque église. C'est cette foi collective qui est l'objet des sym-boleft et qui devient un point de ralliement pour un corps visible de croyants. La Bible n'ayant pas de système proprement dit, le principe de classification des dogmes dépend du pomt de vue et des habitudes d'esprit des théologiens; il a quelcjue chose de forcément arbitraire, et l'on a distingué tour à tour, et même simultanément, la méthode scolastique, qui comprend l'analyse et la synthèse; la môth. fédérale, d'après les alliances oui économies; la môth. comparative, ou historico-biblique, où l'on compare sur certains points la Bible avec les écrivains profanes; la méth. des causes, ou philosophique; la méth. critique, ou philologique. — Si le dogme est immuable par lui-même, la manière dont il a été compris et exposé ne l'est pas. Les successeurs immédiats des apôtres, pas plus que les apôtres eux-mêmes, n'ont pensé à réduire en un corps de doctrines les vérités qu'ils annonçaient au monde et qui les exposaient aux railleries et aux. persécutions. C'est seulement quand la théol. chrétienne fut mise en contact avec la philos, platonicienne, qu'elle revêtit; un caractère spéculatif, dont Origène, Grégoire de Nysse, puis Augustin, furent les premiers représentants. Après eux vint Jean, Damascène, moins apologète, moins préoccupé des luttes religieuses, et plus essentiellement théorique et dogmatique; il ne se préoccupe que d'exposer et d'affirmer le dogme. Au moyen âge la scolastique s'efforce, à l'aide de la philos. d'Aristote, de prouver l'accord de la théol. avec la raison; avec Anselme de Cantorbéry cette tentative est sur le point de réussir, mais elle est menacée par Abélard, et finalement, après P. Lombard, Haies, Thomas d'Aquin, Duns Scott, Hugo et Richard de Saint-Victor, elle roule dans le scepticisme avec le comment. d'Occam sur le Livre des sentences. La Réformatiou relève la dogma^ tique et la délivre de ses entraves en la rame* nant à sa source, c.-à-d. à la Bible. C'est dès lors seulement qu'il y a, en dehors de la philos, une dogmatique chrétienne vraiment digne de ce nom. Mélanchthon dans ses Lieux communs et Calvin dans son Institution, en sont les plus illustres représentants, et leurs successeurs ont été nombreux dans toutes les Égl., faisant préf valoir tour à tour le point de vue objectif ou le côté subjectif de la doctrine, mettant l'accent les uns sur la Bible, les autres sur la raison, quelques-uns essayant de la conciliation. L'étude de ces différents systèmes s'appelle l'Hist. de la dogmatique; c'est l'histoire des méthodes. Ce qu'on appelle Hist. des dogmes en diffère en ce qu'elle montre à chaque époque l'état de la pensée chrétienne, le développement relatif et parfois l'altération de certaines doctrines sous des influences extér. ou intérieures; science toute nouvelle, puisque au moyen âge le dogme était considéré comme absolu, et que tout ce qui s'en écartait était purement et simplement traité d'hérésie et sommairement condamné comme tel. L'essai d'Abélard, Sic et non, est la meilleure preuve que la discussion du dogme étajt impossible; et si l'Égl. romaine s'est crue ,en droit d'ajouter de nouvelles doctrines à ses symboles, elle a toujours eu soin de prétendre qu'elle se bornait à développer sans innover, et qu'avec une formule différente elle ne faisait que rendre plus claires des doctrines anciennes; ainsi pour l'Immaculée Conception, l'Infaillibilité du pape, etc. — v. l'Hist. de la Théol. protest., en particulier en Allemagne, par Borner, trad. par M. A. Paumier; Hase, Hist. des Dogmes; Dogmatique chrét., de Martensen, trad. par Ducros.
DOLCINO, fils d'un prêtre marié du Milanais, devint, après le supplice de Segarelli 1300, le chef des fr. apostoliques auxquels il appartenait depuis 1291. Il distinguait dans l'Égl. 4 périodes: 1° une avant Christ; 2° l'Égl. pauvre et persécutée, mais saine et pure; 3° l'Égl. pure encore, mais devenue riche par l'entrée des païens; 4° l'Égl. riche, mais pleine de méphan-ceté, le mauvais esprit faisant toujours plus de progrès. Les fr. apost. devaient présider à la dernière période et ramener l'âge d'or. Chassé du Tyrol, Dolcino vint en Lombardie et s'annonça comme prophète; il passa ensuite en Dalmatie, puis revint en 1304; des partisans se joignirent à lui par milliers. Ils s'établirent $ur une montagne de l'évêché de Novare. Pour échapper à la famine, ils firent des excursions jusque dans les villes. Vaincu enfin à Zebello prèsVerceil, il fut pris et brûlé le 1er juin 1307 (ou 1309) ainsi que la noble Margarita qui l'accompagnait. Il avait annoncé pour 1303 ou 1304 le règne du Saint-Esprit avec les apôtres, comme dernière époque de l'Église. La secte ne périt pas avec ses chefs, v. Al. Lombard, Les Pauli-qens.
DOLET, Étienne, savant humaniste; littérateur et imprimeur français, né 1509 à Orléans, brûlé à Paris 3 août 1546. Il étudia à Paris et à Padoue, fut pendant un an secrétaire du Du Bellay à Venise, vint vers 1530 achever ses études à Toulouse, souleva la ville par la manière dont il résista au parlement, fut incarcéré d'abord, puis banni, et s'établit à Lyon comme imprimeur, avec privilège de François I«r. Accusé à tort d'athéisme, il était plutôt sceptique; ses presses étaient au service de quiconque les demandait, et il imprima plusieurs ouvrages au moins suspects. Il fut accusé de faire gras le vendredi et d'aller plus souvent au prêche qu'à la messe. Son orgueil et son caractère impétueux lui firent de nombreux ennemis, et ceux-ci, après l'avoir fait arrêter plusieurs fois, réussirent à le Caire condamner à mort. On assure qu'en se rendant au bûcher, et yoyj^t Ja foule émue il dit:
Non dolet ipse Dolet, sed pia tprba, dolpt.
Il a laissé 0e nombreux écrits en prose et en vers, latins et français, d'un style facile et souvent élégant; ils ne disent rien de ses opinions relig., car s'il attaque violemment les luthériens, il n'est pas moins acéré contre les abus de son Église. Les principaux sont un Commentaire de la langue latine en 2 vol., une Étude sur les locutions latines, un Traité sur l'art de traduire, un travail sur Cicéron (contre Érasme), son second Enfer (son second emprisonnement) dédié à François Ier, des études sur Platon et Térence, une Exhortation à la lecture des sainctes Lettres (préface à un livre de Le Fèvre d'Étaples), un poème didactique, Genethiacum, traité d'éducation à l'usage de son jeune fils Claude, etc.
DOMINICAINS. Ordre célèbre des frères prêcheurs, d'après la règle de saint Augustin, fondé en 1215 à Toulouse par saint Dominique et reconnu la même année, non sans peine, par Innocent III, au conc. de Latran, comme upe société de chanoines réguliers; Honorius III y ajouta 1216 la mission de prêcher et de convertir les hérétiques. En 1220 ils obtinrent le privilège d'être considérés comme un ordre meji-diant. Ils se donnèrent une constitution, un général, des provinciaux, des définiteurs et des prieurs. En 1230 ils avaient déjà assez d'influence pour s'être fait donner une chaire de théol. à Paris, où leurs empietements trouvèrent une forte opposition, notamment de la part de Guill. de Saint-Amour. Enfin les fonctions in-quisitoriales qui leur furent confiées 1233, leur assurèrent une puissance terrible, qui en fit un objet de terreur pour les pays où ils réussirent à s'implanter. Ils produisirent un grand nombre d'hommes célèbres parmi les scolastiques, Thomas d'Aquin, Albert-le-Grand, Cajetan, Dominique Soto, et fournirent à TÉgl. plus de 800 évêques, 150 archev., 60 cardinaux, 4 papes, etc. L'ordre fut longtemps en rivalité avec les franciscains, notamment sur la question de l'Immaculée Conception de la Vierge, que ces derniers commençaient à préparer. Supprimés 1789 en France, où ils n'existent qu'à l'état d'exception (Lacordaire, etc.), les dominicains, dont le siège est à Rome, n'ont plus guère dé couvents qu'en Autriche-Hongrie, en Italie, en Espagne et en Amérique; les jésuites les ont remplacés, mais en employant d'autres armes. Leur costume est blanc avec capuchon noir et manteau noir. On les appelait aussi jacobins à Paris, parce que leur premier couvent fut bâti dans la rue Saint-Jacques. — Dominique avait également fondé 1206 à ProuiUe, près Carcas-sonne, un monastère de religieuses dominicaines, qui compta parmi ses prieures des dames de ia plus haute naissance, des Bourbon et des Lorraine, et qui fut supprimé en 1789. — Les tertiaires des deux sexes, 1422, avaient pour tâche spéciale de combattre les hérétiques.
DOMINICI, Bernard, né à Metz 1517, prêtre en 1535, converti momentanément à la réforme, fut regagné par le cardinal de Lorraine et tourna toute son éloquence contre les protestants. Il en fut récompensé par le titre de prédicateur de la cathédrale à Metz 1549, et fut nommé en 1570 général de son ordre.
DOMINIQUE 1° fondateur de Tordre des dominicains, né 1170 à Calervoga, ou à Calahorra, Vieille-Castille, d'une famille distinguée, que quelques-uns croient être celle des Ousman. Jeune prêtre il se distingua par sa piété, son ascétisme et ses talents de prédicateur; il fut d'abord prof, de théol. à Palencia, puis chanoine à Osma où il se fit remarquer par son zèle missionnaire contre les Maures et les hérétiques. En 1204 il accompagna à Paris l'év. d'Osma, Diego, chargé d'une négociation auprès de la cour de France. A leur retour par le Languedoc et le midi, frappé de la nécessité d'avoir des ouvriers qui recommandassent l'Égl. par la simplicité de leur vie et l'ardeur de leur foi, il fonda 1206 à Prouille une société de religieuses, à laquelle ne tarda pas à se joindre une réunion d'hommes choisis, comme l'avait demandé Innocent III, parmi les plus propres à la prédication et à la confession. Il suivit comme aumônier la croisade de Simon de Montfort contre les albigeois, et tout en professant qu'on ne devait employer contre les hérétiques d'autres armes que la prière, la persuasion et l'exemple, il accepta la charge d'inquisiteur qui lui valut de cruels et sanglants triomphes. L'ordre des frères prêcheurs qu'il avait fondé à Toulouse, prit de lui le nom de dominicains. De là il vint à Rome où Honorius III le nomma Maître du sacré palais, avec charge d'avoir au Vatican une école spirituelle et de choisir les prédicateurs. Il s'occupa surtout dès lors de réorganiser son ordre, d'en nommer les fonctionnaires et d'en multiplier les couvents en Italie, en France et en Espagne, f à Bologne 1221; canonisé 1234 par Grégoire IX. Vie par Lacordaire 1841.
2° Dominique YEncuirateè (Loricatus), disciple de Damiens, doit son surnom à ce que, au lieu d'un simple cilice de crin, il en portait sur la peau un de mailles de fer. 11 ne l'ôtait que pour se flageller, suivant la règle, et au lieu de réciter les Psaumes pendant cette opération, il se bornait à prier de cœur, ce qui lui permettait d'aller plus vite et de multiplier le nombre des coups. Il vivait de pain et d'eau, au milieu des déserts des Apennins, f vers 1060.
DOMINIS, Antonio (de), né 1556 à Arbe. Dalmatie; élève des jésuites, prof, d'éloquence.
év. de Segni, archev. de Spalatro; se fit protestant, passa en Angleterre 1516, écrivit contre le pape son De republicd christianâ, reçut de Jaques I«r de riches bénéfices, puis se refit catholique, s'enfuit en cachette, revint à Rome où il abjura publiquement; mais pour être plus sûr de lui, on l'enferma au château Saint-Ange, où il f 1624. on ne dit pas de quoi. Il passe pour avoir le premier trouvé l'explication de Parc-en-ciel, De radiis in vitris, Venise 1611. Descartes n'a fait que perfectionner sa théorie.
DOMITIEN, né en 51, fils de Vespasien et fr. de Titus, monta sur le trône en 81, et après un commencement juste et libéral, se jeta dans la carrière du crime et s'illustra par des infamies et des cruautés qui ne respectèrent ni l'âge, ni le sexe, ni le rang. Il fit mettre à mort des sénateurs pour s'emparer de leurs biens, séduisit sa nièce, menaça sa femme, proscrivit les littérateurs et les philosophes, se fit élever des autels comme à un dieu, fit mourir Flavius Clemens son cousin, exila Flavia Domitilla, et organisa contre les chrétiens une sanglante persécution, sous prétexte que quelques païens s'étaient convertis au judaïsme. 11 exila saint Jean à Patmos, et d'après Eusèbe un grand nombre de chrétiens furent martyrisés. Il fit venir de Judée des parents de Jésus, qu'on lui avait dénoncés comme suspects et dangereux pour le trône, mais ayant vu leurs mains calleuses, il fut rassuré et les renvoya dédaigneusement. f 96 assassiné par ordre de Domitia Longina, sa femme, qui craignait pour elle-même.
DONAT i° toute personne qui, sans faire de vœux, se donne, elle et tout ce qu'elle possède, à un couvent, pour y demeurer et se séparer du monde. Les donats remontent à l'abbé Guillaume, dit le Bienheureux, 1069-1091. — 2° V. Donatus.
DONATION de Constantin. L'Égl. de Rome prétend que cet empereur donna au pape Sylvestre la campagne des environs de Rome, qui aurait été le premier noyau des États de l'Église. Cette affirmation ne repose que sur un passage du faux Isidore, dont personne auj. n'ose plus défendre l'authenticité. La fausseté de la légende a été démontrée par Laureut Val la. La seule chose vraie, c'est quen 321 Constantin permit à la paroisse de Rome de recevoir des dons et la jouissance de biens-fonds situés sur son territoire. Quand Charlemagne confirma et augmenta la donation faite au saint-siège par Pépin, Adrien l'appela un nouveau Constantin très chrétien.
DONATUS et Donatistes, schismaliques de l'Égl. d'Afrique, rigoureux observateurs de la discipline, et représentants de la dissidence dans ce qu'elle a de dur et d'excessif. Ils se donnaient comme l'Égl. des purs, condamnaient d'une façon irrémissible ceux qui étaient tombés, ceux qui avaient livré les Écritures pendant les persécutions, et refusaient de reconnaître comme valables des cérémonies ou actes religieux accomplis par des prêtres qui avaient démérité. Ils représentaient la réaction contre les mesures un peu molles et relâchées de la généralité du clergé. Ce schisme éclata à l'occasion de Mensurius, év. de Carthage, qui pensa tout concilier en livrant, au lieu de la Bible, des livres hérétiques dont on n'eut pas l'idée de vérifier le contenu; il s'opposait également a une adoration superstitieuse des confesseurs de la foi, retenus dans les prisons. Accusé à Ceuta 305 par Secundus de Tigisis, primat des Égl. de Numidie, il échappa à toute censure; l'affaire fut étouffée, trop d'autres évêques étant dans le même cas. Mandé plus tard à Rome, il se justifia pleinement, mais f au retour, 311. Son parti se hâta de le remplacer par un homme du même bord, Cécilien, qui avait été consacré par l'év. Félix d'Aptunga, suspect d'avoir été un traditeur, Le parti des rigoureux déclara cette élection non valable, et choisit à sa place Majorin, puis celui-ci étant mort, Donatus, év. des Cases-Noires, Numidie, 314. Melchiade de Rome, appelé comme arbitre par Cécilien, donna tort à Donatus; les partisans de celui-ci eu appelèrent à l'empereur païen, qui se prononça également contre eux, les traita de rebelles et bannit les év. récalcitrants, 316. Un autre évêque du même nom, et pareillement rigide, lui succéda, et s'allia avec les circoncel-lions; la guerre civile ravagea le nord de l'Afrique. Constantin, après leur avoir envoye un comte (cornes) pour les rallier à l'Égl., chercha k les gagner par ses libéralités, puis il crut devoir recourir à la force et un grand nombre subirent le martyre. En 347 Paul et Macaire, commissaires impér., recommencèrent leurs largesses, mais les év. et le peuple exaspérés reprirent les armes, parcourant le pays comme des chevaliers errants, protégeant les débiteurs contre leurs créanciers et se livrant à toutes sortes d'excès. Les donatistes purs finirent eux-mêmes par appeler l'État à leur secours, en séparant leur cause de celle de leurs fanatiques amis. Ils recouvrèrent la liberté sous Julien et firent remettre à neuf leurs temples, comme ayant été souillés par les orthodoxes. A la tête de leurs adversaires il faut nommer Augustin (Contra partem Donati); cependant il s'opposa à l'emploi des mesures de rigueur contre eux et obtint même d'Honorius le dégrèvement des impôts qui pesaient sur leurs év. et leurs lieux de culte. Vaincus au concile de Carthage 411, où ils avaieut espéré avoir la majorité, ils continuèrent de se constituer à part, mais après leur alliance momentanée avec les circoncel-lions, leur nombre alla en diminuant; il s'en trouvait cependant encore quelques-uns vers 600, lors de l'invasion des Vandales, qui persécutèrent sans distinction orthodoxes et schis-matiques.
DONS spirituels, ou CHARISMES, 1 Cor. 12, 4. sq. C'est le nom que le N. T. donne à certaines facultés, ou dons naturels, qui. sanctifiés et développés par le Saint-Esprit, sont mis au service de Dieu et de l'Église. Ces dons sont de tous les temps; ce qu'ils eurent de miraculeux à l'époque apostolique, et parfois à d'autres moments de l'histoire, doit être considéré non comme un caractère inhérent à ces dons eux-mêmes, mais comme le produit spécial des circonstances et comme une manifestation particulière de la puissance de Dieu en un temps difficile et en présence de dangers exceptionnels. Si l'on ne voit que le côté miraculeux, on pourrait dire d'une manière générale que les dons ont cessé, mais ce serait ne les comprendre que par le petit coté; ils subsisteront jusqu'à la fin pour l'édification de l'Église, et ils seront d'autant plus grands et puissants que l'Égl. elle-même sera plus vivante. En temps de ferveur Dieu suscitera les uns pour être docteurs, les autres évangélistes, pour enseigner, instruire, exhorter, distribuer, présider. Dans des temps de tiédeur et de relâchement, les dons seront remplacés par des fonctions; c'est moins que le don, mais c'est plus que rien, et en l'absence du souffle de l'Esprit il vaut encore mieux avoir des prières lues et des serinons travaillés, que des improvisations sans vie et sans esprit.
DONUS, deux papes de ce nom, l'un de 676-678, l'autre 974, mort après quelques mois; tous deux à peu près inconnus.
DORDRECHT (ou Dort), la plus vieille ville de la Hollande, fondée 994 sur une île de la Meuse, à 15 kil. de Rotterdam; patrie des deux De Witt et de D. Vossius. Elle est surtout connue par le synode qui s'y tint du 13 nov. 1618 au 9 mai 1619. Convoqué par les États-Géné-raux de Hollande pour combattre l'arminianismc, il invita à ses séances les théol. les plus éminents de l'Angl terre, de l'Allemagne, de la Suisse et de Genève, désireux de profiter de leurs lumières. Les Remontrants, appelés à se justifier, chargèrent Épiscopius de présenter l'apologie de leur doctrine, mais ils furent repoussés le 14 janv. comme menteurs el publiquement censurés. Le synode, contrairement aux vues des théol. anglais et allemands, formula dans le sens le plus déterministe la doctrine de l'élection de grâce, adopta le Catéch. de Heidelberg comme livre symbolique, décida une nouvelle traduction de la Bible et prit quelques autres résolutions d'organisation intérieure. Ses résolutions, qui ne furént adoptées en Allemagne que sous toutes réserves en ce qui regardait l'arminianisme, marquent le premier pas du protestantisme réformé dans la voie de l'absolutisme confessionnel, et tout en respectant ce qu'il y a eu de fidèle et de consciencieux dans la fermeté des théol. de Dordrecht, on peut regretter que leur raideur ait fermé la porte aux essais de conciliation. Actes du Synode, Dordrecht 1620. Les mêmes, par les Remontrants, Harderwy 1620.
DORMANTS (Les sept). Une légende grecque, rapportée d'abord par Grégoire de Tours, puis enjolivée par la tradition, dit que pendant la persécution de Décius sept frères d'Éphèse (dont les noms varient) se réfugièrent dans une caverne et qu'ils y furent murés vivants par les païens 231. Ils y dormirent deux siècles et ne se réveillèrent qu'en 408, ou même 447 sous Théodose II. L'un d'eux se rendit de nuit à la ville pour acheter du pain, croyant n'avoir dormi qu'une nuit. L'év. et l'empereur accoururent pour constater le miracle, mais au même moment les 7 frères tombèrent morts. Un des narrateurs dit que Dieu fit ce miracle pour convaincre de l'immortalité de l'âme un év. qui en doutait. Le Coran a une légende semblable, d'après laquelle les 7 frères et leur chien seraient devenus les patrons delà marine turque. Y aurait-il une allusion aux Pléiades ?
DORNER, Isaac-Auguste, théol. contemporain, auteur de nombreux écrits, entre autres d'une Hist. de la théol. prot., est né à Neuhau-sen ob Eck, Wurtemberg, le 20 juin 1809, et a été successivement prof, à Tubingue, Kiel, Kônigsberg, Bonn, Gotlingue; finalement membre du Consistoire supérieur et prof, à Beriin, depuis le ministère de Bethmann-Hollweg. Retraité. Son fils, docteur en théol. est prof, au séminaire de Wittenberg.
DOROTHÉE 1° vierge deCappadoce, martyre sous Maximin 311, fut dépouillée de ses biens et bannie. 2° Sainte de Prusse, vécut après son mariage 1394 dans une cellule de Marienwerder; elle faillit être canonisée 1404, mais la chose n'eut pas de suite, parce qu'il paraît qu'elle avait dit du mal de l'ordre teutonique. 3° Ev. de Tyr, martyrisé 362, auteur d'un livre sur la vie et la mort des apôtres. 4° Disciple du moine Jean le prophète, maître de Dosithée, et chef d'un monastère près de Gaza; a laissé des Lettres et des Sermons.
DOSITHÉE 1° ou Dusis, rabbin juif très instruit du 1er siècle, qui passait pour magicien; il mit contre lui les pharisiens à cause de la manière rigoureuse dont il interprétait les Écritures. H se fit un parti d'une trentaine de disciples parmi les samaritains, et en vint jusqu'à se faire passer pour le Messie. Il menait une vie austère et observait strictement la loi. Ses ennemis lui reprochèrent d'avoir falsifié le Pentateuque. Chassé et persécuté il sp retira dans une caverne près de Jérusalem, où il mourut pour avoir trop jeûné. Il avait encore quelques disciples au 4m« siècle. 2° Dosithée, d'après une tradition, serait le nom du sacrificateur envoyé par Sanchérib à Samarie, 2 Rois 17, 27-28. 3<> Lévite qui apporta de Jérusalem en Égypte une édition grecque, embellie, du livre d'Ester. 4° Disciple de Dorothée, canonisé. 5° Général juif sous Philométor.
DOXOLOGIE, parole ou formule de louange à l'honneur de Dieu. La plus ancienne est celle des anges Luc 2, 14. qui fut longtemps introduite dans le service liturgique, et souvent développée par des additions de circonstance. L'Égl. grecque la chante entre le Kyrié et la lecture de la Bible tous les dimanches et jour? de fête. L'Égl. luthérienne l'avait d'abord conservée; elle l'a ensuite remplacée par l'hymne: A Dieu seul dans les cieux soit honneur. On appelle petite doxologie celle de la Trinité: Gloire au Père, au Fils et à l'Esprit saint aux siècles des siècles, dans laquelle on a introduit, à cause de l'arianisme, les mots: « tel qu'il était au commencement, et maintenant, et toujours, aux siècles, etc. > La doxologie qui termine l'oraison dominicale est évidemment un appendice dû à l'usage liturgique de ce formulaire (Godet): elle n'est dans aucun mss. de Luc et manque dans les plus anciens de Matthieu.
DOYEN, président d'un chapitre; on dit ainsi le cardinal doyen. Les curés doyens de campagne portent le nom d'archiprêtres; les présidents s'appellent en Allemagne surintendants; en Angleterre ils ont conservé le titre de doyens. En France on le réserve pour les curés d'un chef-lieu de canton et pour les prof, qui président une faculté. L'âge, l'ancienneté ou l'élection peuvent le conférer; c'est tantôt un honneur, tantôt une fonction.
DRABICIUS, Nicolas, né 1585 en Moravie, prédicateur de l'Égl. des frères en 1616, banni 1629, s'établit en Hongrie comme marchand de drap. En 1638 il crut avoir reçu de Dieu des révélations. Comenius les fit imprimer 1657, mais comme l'une d'elles annonçait la fin de l'empire d'Autriche, Drabicius fut arrêté et exécuté 1672 à Pressburg pour crime de haute-trahison.
DRACONITÈS, Jean, surnommé aussi Carl-stadt, de son lieu de naissance; Drack était sou vrai nom. Né 1494 il prit part à la réception de Luther comme chanoine et maître à Erfurt 1521, perdit par là son emploi, passa quelque temps à Wittenberg, et fut nommé pasteur à Milenberg 1523, puis à Waltershausen. Prédicateur et prof, à Marbourg 1534, il donna sa démission en 1547, redevint prof, de théol. à Rostook 4551, et fat contraint parlés luthériens rigides de renoncer à sa surintendance, 1560. Il se retira à Wittenberg où il + 1566. On a de lui sa Pentaple, ou Bible en cinq langues (hébr., cald., grec, latin et allem.) qui n'est pas achevée et divers comment, sur la Genèse, les Psaumes, Abdias et Daniel.
DRjESEKE, Jean-Henri-Bernard, né à Brunswick 1774; étudia à Helmstâdt, fut pasteur à Môlln 1798, à Brème 1814, et enfin surintendant et év. à Magdebourg 1832. Démissionnaire en 1843, f 1849. Un des plus puissants orateurs de la chaire allemande, il ne s'inféoda à aucun parti et chercha à mettre en relief tout ce qui dans l'Évangile s'adresse directement au cœur et à la conscience. Il fut attaqué par les Amis des Lumières, qui avaient cru pouvoir compter sur lui, et se joignit à la protestation des partisans de Schleiermacher contre la Gazette Évang. de Hengstenberg 1845.
DRAGONADES. Moyen de conversion employé par le gouvernement de Louis XIV, pour obliger les protestants à faire profession de catholicisme. Le procédé était aussi ingénieux que cruel. On logeait un certain nombre dragons chez ceux que l'on voulait persuader, et ils les pressuraient, les tourmentaient, les molestaient, vivant à leur dépens, jusqu'à ce qu'ils fussent suffisamment convaincus des mérites et de la beauté de la religion romaine. Ce fut une des spécialités du règne du grand roi.
DRAMES spirituels, ou Mystères. Sans parler des ressources que pouvaient offrir à l'art dramatique les faits et les idées de l'histoire et de la vérité chrétienne, tels qu'ils furent exploités entre autres par Roswitha, le culte chrétien donna directement naissance à toute une littérature dramatique; c'est surtout au moyen âge qu'elle fleurit. Le culte cathol. est lui-même me représentation sans cesse renouvelée du mystère de la rédemption. Dans les jours de grandes fêtes on ajoutait au culte ordinaire des scènes tirées de l'histoire biblique, tantôt l'hist. d'Adam et d'Ève, le Paradis, la Tentation où un grand serpent de carton s'enroulait autour d'un arbre, la chute; tantôt l'histoire de Tobie; plus souvent la naissance J.-C. avec les quatre animaux de rigueur, le coq chantant: Ckriàtus est: le bœuf mugissant: Ubi: la chèvre ou4a brebis bêlant: Bethléhem, et l'âne concluant: Ea, Eamus ! Souvent c'était l'entrée de de Jésus à Jérusalem, où l'âne jouait encore son rôle; ou les scènes de la Passion, avec des soldats romains, habillés et armés à la gauloise. Des chœurs et des antiphonies, chantés ou récités par des prêtres, donnaient l'explication des tableaux. Peu* k peu toute cette mimique passa des mains du clergé dans celles des laïques. Innocent III, 1210, défendit aux prêtres de figurer à ces représentations, au moins dans les églises, car au 45** siècle on les voit encore parader avec letirs élèves ou leurs confréries dans ce genre de spectacles, qui étaient fort populaires, et les planches ou tréteaux s'élèvent sur les places publiques, adossés aux églises qui leur servent de coulisses et de vestiaires. Les foules accourent. On peut leur faire connaître, suivant les dispositions des auteurs et des acteurs, les grands faits évangéliques ou les désordres du clergé: le drame est une bonne occasion pour tout dire, et la Fête des ânes, celle des Fous, celle des Diacres-saoûls, paraissent avoir été bien plus une critique qu'un moyen d'édification. La transition du drame religieux au drame mondain fut rapide et naturelle; ce dernier finit par régner presque seul. Au moment de la Réform. le drame biblique reprit quelque faveur et refoula, du moins pour un temps, les imitations des comédies grecques et latines. En 1807 on conservait encore à Valenciennes l'habitude de représenter le mystère de la Passion; il n'en reste plus auj. que la solennité décennale d'Oberammergau, q. v.
DRESDE, ville de 80,000 habitants, dont la grandeur date du siècle dernier. Célèbre par ses belles galeries, par la victoire de Napoléon et par la mort de Moreau 1813. Deux synodes y furent tenus 1562 et 1571, dans lesquels les théol. de la cour de Saxe formulèrent dans un esprit philippiste, le Consensus de Dresde, sans toutefois mettre trop en saillie l'opposition au luthéranisme, qui se manifesta plus tard. L'ubiquité en est exclue.
DREXEL, Jérémie, ne à Augsbourg 1581; jésuite et chapelain de Maximilien I«r depuis 1615, f 1638. Le peuple le considérait comme un saint. Ses ouvrages d'édification furent appréciés même des protestants; souv. réimprimés.
DROGON, fils naturel de Charlemagne, archev. de Metz; les év. de la Gaule franque refusèrent, 844, de le reconnaître comme vicaire de Serge II, qui lui en avait donné le diplôme. Il introduisit dans son diocèse le chant grégorien. Il se noya 855 à Luxeuil, en péchant dans un étang.
DROIT aux dépouilles, v. Dépouilles. Droit de l'Étole, v. Étole.
DROSTE - VISCHERING, Clément-Auguste, comte (de), archev. de Cologne, le représentant le plus actif de l'ultramontanisme en Prusse et en Allemagne. Né à Vorhelm, près Munster, 22 janv. 1773; vicaire-général 1805, administrateur du diocèse 1807, il agit toujours dans l'idée de l'indépendance absolue de l'Eglise, il interdit la fréquentation de l'univ. de Bonn et prit contre les mariages mixtes les mesures les plus autoritaires, 1817. Déposé en 1820 à la suite de ses conflits avec l'État, il fut nouimé archev. de Cologne 1835 sur sa déclaration qu'il respecterait quant aux mariages mixtes une convention conclue par l'État avec son prédécesseur; mais une fois nommé il déclara ne reconnaître que le bref du pape du 25 mars 1830, et il fut interné à Min-den d'abord 1837, puis à Munster. Il fut rendu à la liberté 1841, mais à la condition de prendre pour coadjuteur l'archev. de Spire, Geissel, et de lui abandonner l'administration de son diocèse. Il lit un voyage à Rome 1844, et f 1845.
DRUSES, peuplade de Syrie, qui habite les régions du Liban et de l'Antiliban, au nord du pachalik d'Acre; ils sont presque partout mêlés aux Maronites, quoique ennemis les uns des autres. Leur nombre est de 80 à 120,000 environ; la statistique orientale ne permet pas une appréciation plus exacte. Ils sont censés relever du pacha d'Égypte, mais en réalité ils sont à peu près indépendants. Leur ville principale est Déir-el-Kammar, où réside aussi leur chef, ou hakem. Leur religion, mélange d'islamisme, de judaïsme et de lambeaux de christianisme, est peu connue; ils en font plus ou moins mystère, et prétendent, par une interprétation allégorique, la trouver dans le Coran. Ils honorent, comme une incarnation de Dieu, et comme la dernière, le calife fatimite Hakem Biamrillahi, 995-1020, qui fut assassiné par sa sœur en secret, et qu'ils assurent n'être pas mort. Ils voient en Hainsa-ben-Ahmed le fondateur de leur culte, le premier médiateur, l'intelligence de Dieu, qui seul peut révéler la vérité. Avant lui déjà ils avaient eu pour chef Mohamed-Darasi, ou Dursi, un des premiers apôtres de Hakem, qui conduisit en Syrie ses partisans persécutés en Égypte; c'est de lui probablement que dérive leur nom. Ils croient au Dieu unique; la vérité et l'obéissance apprennent à le connaître; par une sorte de métempsycose, l'homme atteint aux degrés supérieurs. Leur culte est simple; les profanes n'y sont pas admis; il y figure un veau d'or dont le rôle n'est pas bien connu (v. Sylv. de Sacy, Exposé de la relig. des Druses). Peuplade énergique et belliqueuse, ils se sont rendus célèbres par le massacre des chrétiens en 1860.
DRUSIUS, Jean, savant exégète et orientaliste, né à Oudenarde, Flandre, 28 juin 1550. Son vrai nom était Van den Driesche. II suivit à Londres son père proscrit pour cause de religion 1564, étudia à Cambridge (l'hébreu sous Chevalier), fut nommé prof, à Oxford 1572, rentra dans son pays après l'édit de pacification de Gand 1576, et devint prof, de langues orientales, d'abord à Leyde 1577, puis à Franeker 1585, où il f 12 févr. 1616. Il avait été chargé en 1600, par les États-généraux, de faire des Annotations sur l'A. T. Ce travail, à peu près achevé, fut publié après sa mort par Amama, et a paru dans les Critici sacri. Vie par son gendre Abel Curiander 1616.
DRUTHMAR, Chrétien; moine à l'abbaye de Corbie, puis à Stabio près Liège, vers 840. Auteur d'un Commentaire sur saint Matthieu, assez bon au point de vue grammatical et historique. Dans l'édition de Secer, Haguenau 1530. le passage sur la Cène est expliqué dans un sens tout protestant; les catholiques ont découvert un autre mss. qui donne une variante conforme à leur exégèse.
DUALISME, système philos, ou religieux qui, remontant à l'origine des choses, admet deux principes contraires, l'un et l'autre éternels, p. ex. le bien et le mal, l'esprit et la matière, l'idéal et le réel. Ce système est essentiellement païen; on le trouve chez les Perses sous les noms d'Ormuzd et d'Ahriman, et quoique le christianisme ne reconnaisse qu'un seul Dieu, créateur, éternel, par qui toutes choses subsistent, le dualisme s'est fait jour à plus d'une reprise dans le développement du dogme chrétien, non seulement d'une manière grossière eî matérielle, comme chez les gnostiques et les manichéens, mais d'une façon plus subtile dans les discussions d'Augustin et de Pélage, à l'occasion de l'origine du mal, dans les élucubra-tions des sectes spiritualistes et antinomienne> du moyen âge, et dans la conception du diable, telle que l'admettent et l'Égl. catholique et même beaucoup de théol. protestants.
DUBOIS, Guill., né 1656. fils d'un apothicaire de Brives-la-Gaillarde, d'abord domestique du principal du collège de Saint-Michel, Paris, profita de sa position pour étudier, fit des progrès rapides, obtint la faveur de Louis XIV. devint précepteur de celui qui fut plus tard le régent, flatta ses vices, entra dans les ordres pour faire oublier son origine, et se lança dans la diplomatie, où ses succès qui furent nombreux, furent récompensés par des charges politiques et religieuses. Homme sans principes et sans moralité, il fut nommé archev. de Cambrai, cardinal, et premier ministre du régent, f 10 août 1723 d'un abcès.
DUBOSC lo Jean, sieur d'Esmendreville, avocat, conseiller au parlement de Rouen, exécuté 1er nov. 1562, son corps partagé en 4 quartiers et pendu à 4 potences aux avenues de la ville, pour avoir défendu Rouen contre les triumvirs. Neuf autres furent condamnés avec lui.
2° Pierre, né 21 févr. 1623 à Bayeux, le plus éloquent des prédicateurs réformés du 17®« siècle; instruit, philosophe, d'un extérieur agréable. Nommé pasteur à Caen en 1646, il fut à pluà-reprises sollicité de venir à Paris. Turenne et Laforce insistèrent auprès de lui pour cela, et de son côté l'archev. de Paris se rendit exprès vers le roi pour s'opposer k cette nomination, comme s'il craignait un rival pour Bourdaloue et Bossuet. Accusé de s'être servi de termes injurieux en parlant de la confession, Dubosc fut exilé à Châlons 1664. Souvent envoyé auprès dn roi par les Églises, il fut en 1668 chargé de demander le maintien des chambres de Pédit, el Louis XIV déclara n'avoir jamais « ouï bien parler. » Chassé 1685 par la Révoc. de l èdit de Nantes, il fut appelé comme pasteur à Rotterdam où il f 2 janv. 1692. OEuvr. et Notice par Legendre. v. Vinet. Il est connu aussi sous le nom de Thomines.
DUBOURG, Anne, né 1521 k Riom, Auvergne, d'une famille distinguée, diacre et sous-diacre, puis prof, de droit à Orléans, membre du parlement 1557, s'était converti au protestantisme et se rattachait k Pégl. secrète de Paris. Il demanda pour ses coreligionnaires au moins la tolérance et un traitement plus doux, mais encourut pour cela la défaveur de Henri II et la haine du card. de Lorraine. Ce dernier le dénonça k la chambre ardente et ne négligea rien pour hâter sa condamnation. En vain les frères de Dubourg intercédèrent, en vain Dubourg lui-même exposa l'illégalité de son arrestation et la violation des lois en sa personne; en vain il fit ressortir ce qu'il y a d'étrange k condamner « ceux qui invoquent au milieu des flammes le nom de J.-Chr.; » l'amant de Diane de Poitiers le fit arrêter séance tenante par le capitaine de Montgommery (le même qui le tua un mois plus tard par accident). Dubourg, dans sa prison où il passa 4 mois, écrivit non pour se défendre, mais pour défendre la vérité, une profession de foi qui est un beau monument de sa vie religieuse. Distrait de ses juges naturels et remis entre les mains d'un tribunal ecclésiastique, sa condamnation n'était plus qu'une affaire de forme; dégradé d'abord de ses ordres, il fut 21 déc. 1559 condamné k être pendu, son corps brûlé et ses biens confisqués. La sentence fut exécutée le surlendemain 23, le cardinal de Lorraine ayant insisté pour que tout se fit rapidement, car il savait que des députés du comte palatin étaient en route pour demander au roi Henri de lui céder ce jeune et noble savant, comme prof, de droit à Heidelberg. La fin courageuse de Dubourg et les paroles qu'il adressa au peuple avant son supplice, produisirent une vive impression dans toute la France et provoquèrent indirectement la conjuration d'Am-boise. Ses deux frères, Claude et Gabriel, étaient protestants comme lui; un fils de ce dernier, Georges, a même joué un rôle dans les assemblées politiques, comme commissaire de Henri IV, et dans les synodes nationaux de Gap et de Saint-Maxent.
DUCANGE, v. Dufresne.
DU CHEYLA, v. Chayla.
DUCHOBORZES, secte dualiste et mystique de l'Égl. russe. Ils rejettent les sacrements et la prêtrise, et regardent le corps terrestre comme une des conséquences de la chute de Pâme; la rédemption doit ramener les choses k leur état primitif. Persécutés par Catherine II à leur origine, vers 1780, ils obtinrent d'Alexandre I«r un édit de tolérance. Leurs principales colonies sont dans la Tauride.
DUDITH, André, né à Ofen 1533; év. de Tinninie, conseiller secret à la chancellerie de Vienne, il assista au conc. de Trente, où il prononça 5 discours. En 1565 il renonça à toutes ses charges, pour épouser nne demoiselle de la cour, polonaise, Regina Shass, qu'il aimait. Son portrait fut brûlé k Rome, et lui-même excommunié. Maximilien et Rodolphe lui confièrent encore quelques missions politiques, mais il se retira des affaires pour se consacrer aux études 1579 et f à Breslau 1589. Il a écrit sur le mariage et d'autres travaux historiq. Vie parStief, 1756.
DUEL. C'est du droit germanique que le duel a passé dans les mœurs de l'Europe chrétienne; c'était encore la vengeance, mais régularisée et à armes égales, succédant au guet-apens et k l'assassinat. A quelques égards c'est donc un progrès sur l'état sauvage et sur la vendetta. Mais ce n'en est pas moins un acte coupable, puisqu'il remet aux chances du hasard, de la force ou de l'adresse, la solution d'une question de droit et la réparation d'une injustice; et par ce qu'il a de chevaleresque il est insensé, puisqu'il expose le provocateur k un nouveau dommage qui s'ajoute k l'ancien, comme unique satisfaction. Le christianisme l'a toujours condamné; dans l'Égl. catholique il entraine l'excommunication immédiate, dont Dieu seul peut relever le coupable. Si, avec les mœurs relâchées et avec la législation imparfaite de notre civilisation, le duel peut quelquefois s'expliquer ou plaider les circonstances atténuantes, il ne peut jamais se justifier.
DU FRESNE, ou Du Fresne, lo Charles, seigneur du Cange, ou Ducange, né à Amiens 10 déc. 1610, f à Paris 23 oct. 1688, célèbre historien et glossateur, était trésorier de France à Amiens, mais quitta sa place pour pouvoir se livrer entièrement k ses études 1668. On a de lui son Glossarium, 2 vol. fo, indispensable pour l'étude de la basse latinité; un Glossaire semblable pouf le grec; une Hist. du moyen âge, des études sur l'hist. de France, et une Hist. de Constantinople sous les emp. français. — 2o Samuel, natif de Normandie, suspendu de la Cène 1616 à cause de ses vues sur le jugement dernier; appelé comme pasteur à Viane 1620, déposé de nouveau en 1637 par le synode du Haut-Languedoc, à cause de sa chute (sains autre explication);.réhabilité à Charenton 1645 et envoyé comme pasteur à Issoire. — Un réfugié de ce nom, aussi d'Issoire, avait été reçu bourgeois de Genève, 3 oct. 1582.
DU GUET, Jacques-Joseph, né à Montbrison 9 déc. 1649, f à Paris 25 oct. 1733, était entré dans la congrég. de l'Oratoire, 1667, mais ayant refusé de souscrire à la bulle Unigenitus, il en fut expulsé 1686. Attaché aux principes du jansénisme, personnellement lié avec Quesnel et Arnaud, il passa en Hollande, puis revint à Troyes et à Paris, où il consacra ses dernières années à des travaux littéraires de morale, d'hist. et d'exégèse. Les principaux sont: un Traité sur les devoirs d'un évéque 1710, Traité des scrupules 1717, Lettres sur divers sujets de morale et de piété 1718; Institution d'un prince (pour le duc de Savoie) 1739 \ Confér. ecclésias-tiques 1742. On a publié 1764 l'Esprit de M. Duguet. V. aussi Gonthier, Choix de Lettr. chrét., t. 3.
DU JON, François, v. Junius.
DU MOULIN, Du Moliou De Molin, en latin Molinœust famille considérable de l'Ile de France, dont deux branches qui embrassèrent la réforme, descendaient de Denis du Moulin, archev. de Toulouse 1447 et de Marie de Cour-tenay.
A. Branche de Migneaux. Elle était alliée à la famille d'Anne de Boleyn. Son représentant le plus illustre fut le célèbre jurisconsulte Charles Du Moulin qui, né à Paris 1500, fit de brillantes études de droit, fut reçu avocat en 1522, dut renoncer à plaider à cause d'un bégaiement insurmontable et se borna à la consultation. Il rendit un grand service à Henri III par son Comment, sur l'Édit des petites dates, en prouvant que le roi avait le droit d'empêcher qu'on envoyât de l'argent à Rome. Mais comme il était protestant, le roi se crut dispensé de toute reconnaissance et laissa piller la maison de son défenseur à 4 reprises différentes. Persécuté par la cour de Rome il dut s'enfuir en Allemagne et professa le droit avec distinction à Tubingue; il visita aussi Genève, Neuchâtel, Bâle et Strasbourg, demeura quelque temps à Montbéliard, revint à Paris, et après de nouveaux voyages et de nouvelles persécutions, y t 27 déc. 1566. Il avait été marié 2 fois, et ^vait qu 3 enfants, Charles (sieur d'Al-lone .par sa mère), ,qui f hydropique 1570; IjOuîs, f de la peste à Orléans 1562, et Anne, qui fut assassinée 1572. Homme plein de talent, d'instruction, d'un caractère entier, mais vaniteux. La liste de ses ouvrages dépasse le chiffre de 50; la plupart ont trait au droit français; quelques-uns se rapportent aux difficultés qu'il eut à plus d'une reprise avec les ministres réformés, B. Branche de Lorme-Grenier. l^Joachim Du Moulin, dont on ignore le degré de parenté avec le précédent, épousa Jeanne de Houville, dont il eut un fils. 2° Joachim, qui devint protestant, pasteur à Orléans, président de plusieurs synodes provinciaux 1605, 1610. Il se retira 1615, après 56 ans de ministère, et f peu après à Saumur. Il avait eu de sa première femme, Françoise Gabet, douairière Du Plessis. plusieurs enfants, dont le plus distingué fut 3o Pierre Du Moulin, né 18 oct. 1568 au château de Buhy. Sauvé de la Saint-Barthélémy par une servante, il étudia à Sedan, Cambridge. Leyde; fut nommé prof, de philos, à Leyde 1592, pasteur à Charenton 1599. La princesse Catherine de Bar se l'attacha un moment comme chapelain, quand elle se rendit en Lorraine 1609. Il desservit Charenton 21 ans, au milieu de tous les dangers; fut appelé en Angleterre par le roi Jaques 1615, pour travailler à l'union des diverses égl. protestantes; fut député par les égl. au synode de Dordrecht, mais Louis XIII lui ayant défendu de s'y rendre, il s'y fit représenter par un mémoire très accentué contre l'arminianisme; présida 1620 le synode d'Alais où il fit sanctionner les décisions de Dordrecht; Craignant d'être arrêté sur une dénonciation de Buckingham, il s'enfuit à Sedan où, après deux voyages à Londres et une tentative inutile pour rentrer à Paris, il fut nommé pasteur et prof, de théol. et où il f 10 mars 1658, âgé de 90 ans. D'une grande vivacité d'esprit, travailleur infatigable, savant, plein de zèle et d'ardeur, cal* viniste convaincu, mais d unenature impérieuse et violente, son tempérament le poussait à la polémique, et il passa une partie de sa vie à combattre non seulement les catholiques, mais encore beaucoup de protestants, tels que Gro-tius. qu'il avait eu comme élève à Leyde, Tile-nus, Amyraut. Il a publié plus de 80 ouvrages, grands ou petits, et ne s'est pas toujours tenu dans les bornes de la modération; le synode d'Alençon 1637 mit un terme à ce que cette polémique entre protestants avait de pénible et de dangereux. Ses principaux écrits sont: la Nouveauté du Papisme 1627, l'Anatomie de la Messe 1636, l'Anatomie de l'Armianisme 1619. la Défense de la Tel. réformée 1617, le Bouclier de la foi 1618, De Monarchid temporali pont, romani 1614, dix Décades de sermons 1648-1654, etc. Marié 1599 avec Marie de Colignon, il en eut 3 fils, Pierre, Louis et Cyrua; ce dernier fut nommé pasteur de Châteaudun 1637, et sa fille Suzanne épousa Basnage. Pierre* docteur des univers, de Leyde, Oxford et Cambridge, fol nommé chapelain de Charles II 1660, puis prébendaire de Cantorbéry, où il f 20 oct. 1684. Louis, né en France, fut presbytérien, se voua à la médecine, fut nommé pàr Cromwell prof, d'hist. à Oxford, et, destitué à la Restauration, se retira à Westminster où f 20 oct. 1683; i) a publié une vingtaine d'ouvrages sur divers sujets, hist., controverse, discipliné, etc.
DUNIN, Martin (de), archev. de Gnesen-Po-sen en 1831. Né en Pologne H now 1774, élève du Collège germanique, il se montra intraitable sur la question des droits de l'Église. Par sa Lettre pastorale du 27 févr. 1838, il interdit quant aux màriagés mixtes l'indulgence pratique dont on avait usé jusqu'alors; condamné pour ce fait il fut déposé et interné à Berlin. Étant retourné à Posen sans autorisation, il fut enfermé dans la forteresse de Kol-berg. Il promit quelques adoucissements à sa circulaire et fut rétabli dans ses fonctions 1840. f 1842. Par sa fermeté, en présence des hésitations du pouvoir temporel, il a, comme Droste, ajouté au prestige dés principes romains.
DUNS Scot, Jean; le Docteur subtil; né 1266 ou 1275, à Dunston, Écosse, ou à Dunstance, Northumberland, d'où ses deux noms, entra dans l'ordre des franciscains-cordeliers, enseigna avec éclat à Oxford, à Paris 1301, et Cologne, où il f 1308, jeune encore. Il a énormément écrit; ses œuvres compl. publ. à Lyon par Wadding, 1639, forment 12 vol. f*. C'était un des plus habiles disputeurs de son temps, ce qui lui valut son sumôm. Il s'opposa en philos. àThomas d'Aquin et aux dominicains, et défendit contre ces derniers l'Immaculée Conception de Marie. Contre Thomas il défendit le libre arbitre et plaça le centre de la religion non dans la contiaissànèe de Dieu, mais dans la volonté, faisant ainsi de la foi une chose pratique et non desimpie spéculation. A ce point de vue la volonté de Dieu aurait quelque chose d'arbitraire; ce que Dieu veut est bon, ce qu'il ne veut pas est mauvais, et l'Égl. a le droit, comme dépositaire de la révélation, de décider ce qui est péché et ce qui ne l'est pas. Ses idées sur Tlndividuation (ou Hœccéité) furent fort goûtées et lui attirèrent un grand nombre de disciples. Il élevait les qualités individuelles au rang d'es-seftces distinctes, de sorte que chacun était composé de 2 parties, l'une générale, appartenant à tous, l'autre spéciale, distincte, n'appartenant qu'à lui et pouvant être envisagée en elle-même (entité). Il était réaliste, et l'école, attentive à ces débats, se partagea en deux camjps, les thomistes et les scotistes, ces derniers abusant outre mesure des distinctions et des subtilités.
DUNSTAN, saint anglais, né 925 près du couvent de Glastonbury, dont il devint plus tard abbé, introduisit dans son couvent la règle de saint Benoît, et jouit d'une grande autorité sous les règnes d'Athelstan, Edmond et Edred. Banni par Edwy, ou Hedwig (955-971), pour avoir maintenu les lois de Rome sur le mariage, il fut rappelé par son successeur Edgar-le-Pacifique et nommé d'abord év. de Worcester et de Londres, puis 959 archev. de Cantorbéry, enfin légat de Jean XII pour réformer les couvents en Angleterre. Il les soumit à la règle de saint Benoît, et y introduisit, non sans peine, le célibat. A la mort d'Edgar 975, les moines se soulevèrent contre lui, mais la diète de Calne mit fin aux troubles, f 19 mai 988. L'invasion da -noise renversa ce qu'il avait fait pour l'État et pour l'Église.
DUPANLOUP. Félix-Antoine-Philibert, né 3 janv. 18Q2 à Saint-Félix, Savoie; prof, en Sorbonne 1841, rédacteur de l'Ami de la Religion, év. d'Orléans depuis 1849; décoré 1850, membre de l'Acad. française 1854; assiste au concile de 1870 comme opposant d'abord, puis comme adhérent; sénateur inamovible en 1873; auteur <fun nombre considérable d'écrits sur la religion, l'éducation, oraisons funèbres, etc. Un des fauteurs les plus en vue, de la crise dite de l'Ordre moral 1873.
DUPERRON, Jacques-Davy, né 1556 à Orbe, Vaud, de parents protestants, fit de bonnes études, devint lecteur de Henri III, se fit catholique, entra dans les ordres, rendit quelques services à Henri IV lors de son abjuration, et fut nomm$ par lui év. d'Évreux. Envoyé à Rome, il réussit à faire lever l'interdit qui pesait sur la France. A son retour il fit à Fontainebleau 1600 deux conférences contre le calvinisme défendu pàr Du Plessis-Mornay et d'Aubigné, et reçut comme récompense le chapeau de cardinal 1604; en 1606 il fut nommé grand-aumônier de France et archev. de Sens, pour avoir réconcilié le pape avec les Vénitiens. Comme membre de la congrég.De auxiliis il se prononça en faveur de Rome dans les discussions molinistes, et combattit à la diète de 1614 les principes gallicans, f 1618. Peu délicat sur les moyens de réussir, il avait du goût en littérature et parlait facilement. Il a laissé plusieurs ouvrages de controverse, et d'autres relatifs à ses négociations diplomatiques. 3 vol. f° Paris 1622.
DUPIN, Louis-Ellies, né à Paris 1657 d'une famille noble de Normandie, prof, de philos.au collège de France, auteur de la Biblioth. nouvelle des auteurs ecclésiastiques, 58 vçl. publiés de 1686 à 1704. Son indépendance de cœur et de caractère et la franchise de sa critique sur iyi si grand nombre de sujets et d'auteurs, lui suscitèrent beaucoup d'ennuis de la part des théol., et notamment de Bossuet. En outre s'étant prononcé contre la bulle Unigenitus, il fut privé de sa chaire et relégué à Châtellerault. Ses relations avec les jansénistes et sa correspondance avec l'archev. de Cantorbéry pour essayer d'un rapprochement entre les Égl. grecque, latine et anglicane, lui attirèrent de nouvelles contrariétés. f 1719. On a de lui une Hist. de l'Égl. en abrégé, une Biblioth. des historiens, un travail sur l'Antique discipline de l'Égl. et plusieurs réimpressions.
DU PLESSIS-MORNAY, ou plus exactement Philippe de Mornay, seigneur Du Plessis-Marly, né 5 nov. 1549 à Buhy, dans le Vexin français, d'une ancienne famille du Berry. Son père était catholique et le fit élever par un catholique fervent, le destinant à l'état ecclésiastique; mais sa mère, Françoise Du Bec-Crespin, penchait pour la réforme et l'embrassa ouvertement après la mort de son mari 1559. Elle rappela Philippe, auquel deux oncles, le doyen de M auvais et l'év. de Nantes, réservaient de riches bénéfices, et elle lui apprit, comme il ses 3 frères et à ses 2 soeurs, à prier « à la mode de Genève. » Plus tard la lecture du N. T. (édition catholique) le décida en faveur du protestantisme, auquel il consacra dès lors ses talents, son influence et sa vie tout entière. Ses études finies, il voyagea, vit h Suisse, Heidelberg, Francfort, l'Italie, Venise, Padoue, Rome, la Hongrie, les Pays-Bas, l'Angleterre, passa l'hiver de 1571-1572 à Cologne, où il débuta dans la controverse par un traité contre Ximénès, et dans la politique par une Adresse aux insurgés des Pays-Bas. Il rêva l'abaissement de la puissance espagnole, et le vieux Coligny frappé de son travail se proposait de l'envoyer en mission auprès du prince d'Orange, quand la Saint-Marthélemy coupa court à ce projet. Mornay échappa à grand'peine au massacre et réussit à gagner l'Angleterre. La Noue le décida à revenir en France et même à prendre part à l'affaire de Saint-Germain, quoique Mornay désapprouvât qu'on mêlât les intérêts de l'Égl. avec celles du duc d'Alençon. Il épousa à Sedan Mlle de la Borde, veuve du seigneur de Feuquières, 3 janv. 1576, mais dut aussitôt se remettre en campagne, vit le roi de Navarre qui le fit entrer dans son conseil, et fut chargé par lui d'une mission auprès des princes protestants d'Angleterre, d'Ecosse, de Hollande et d'Allemagne. A son retour, au bout de 2 ans, Henri IV déclara ne plus vouloir se séparer de lui, et Mornay fut à partir de ce moment et jusqu'à l'abjuration du roi l'âme de son conseil; guerrier habile, profond politique, bon administrateur, écrivain infatigable, il lui rendit tous les services, même les plus intimes, qu'un roi pouvait attendre du plus fidèle et du plus distingué de ses serviteurs. Il fut tour à tour ambassadeur en Angleterre, surintendant général de la Navarre, gouverner de Saumur; il réussit à enlever aux ligueurs le vieux cardinal de Bourbon qu'ils voulaient faire roi; en 1592 il traita avec Mayenne; et comme les ligueurs mettaient pour première condition de la paix la conversion du roi, Henri IV ayant promis d'étudier la question et de se faire instruire, Mornay, qui était de bonne foi, prit la chose au sérieux et organisa tout pour une conférence ou pour un concile où les deux parties seraient entendues, ne doutant nullement que le Béarnais n'attachât son nom à une réforme fondamentale de l'Égl. de France. Mais Henri s'était joué de lui; il abjura à Saint-Denis 15 juill. 1593 après une instruction d'une demi-journee, et si ce fut le coup de mort pour la ligue, ce fut également un coup de foudre pour le protestantisme, qui ne pouvait croire ni à cette lâcheté, ni à cette trahison. Les rudes observations de Mornay amenèrent sa disgrâce, mais n'altérèrent pas sa fidélité au roi, et ne refroidirent en rien son zèle pour les intérêts de l'Église. Après avoir obtenu de l'assemblée de Sainte-Foy l'institution d'un conseil général 1594, il finit par obtenir du roi 30 avril 1598 le célèbre Édit de Nantes. La publication que Du Pl. fit la même année de son Institution de l'Eucharistie déchaîna contre lui tous ses ennemis, la Sorbonne, les prédicateurs de Paris, le pape, le roi lui-même qui rompit définitivement avec son conseiller, et provoqua en avril 1600 la conférence de Fontainebleau, où Mornay eut le tort de comparaître contre Du Perron dans les conditions défavorables qui lui étaient faites. On l'accusait d'avoir falsifié 500 passages, et on lui remit seulement à minuit la liste des 62 sur lesquels il devait se justifier; on lui remit en même temps les livres dont il avait besoin, mais qu'on fit reprendre à 6 h. du matin, et à la conférence on se servit d'autres éditions pour achever de le dérouter. Le roi fut complice de ces manœuvres, la conférence n'aboutit pas, Mornay tomba gravement malade, et le médecin le contraignit de repartir pour Saumur. Il perdit 1605 son fils unique, tué à l'attaque de Guel-dre; bientôt après, sa femme, 15 mai 1606, qui fit une fin édifiante, recommandant à son mari de ne pas se relâcher de ses soins à l'Église par le deuil de sa mort. Le roi le rappela à Paris pour divers règlements, et le reçut bien, n'ayant plus à ménager le pape. Ils ne se revirent plus. Henri IV ayant été assassiné le 14 mai 1610, Mornay le pleura sincèrement, mais il avait prévu la catastrophe; il connaissait les jésuites, et il avait pris d'avance les mesures nécessaires pour l'intérêt des Églises. Il présida l'assemblée de Saumur, où fut renouvelée la députation générale. Le duc de Bouillon, qui avait brigué la présidence, irrité de son échec, desservit l'assemblée auprès de la reine-mère et lui suscita de nombreuses difficultés. Dépouillé par ruse de son gouvernement de Saumur, que Louis XIII s'engagea cependant à lui rendre dans les 3 mois, rçais sans tenir sa parole, Mornay refusa le bâton de maréchal et 100,000 écus qu'on lui promit pour donner sa démission, 1620, et se retira dans son château de La Forêt-sur-Sèvre, où il f 11 nov. 1623. De son mariage avec Charlotte Àrbaleste il avait eu 6 enfants, entre autres Marthe, qui épousa Jean de Jaucourt; Philippe déjà mentionné, et Anne, qui épousa en secondes noces Jacques-Nompar de Caumont, duc de La Force. Du Plessis-Mornay reste, avec Coligny, une des plus nobles figures du protestantisme français, aussi distingué par le cœur que par l'esprit, par le génie que par le désintéressement; aussi fidèle à son pays et à son roi qu'à son Dieu et à l'Église. Son influence fut considérable pendant près d'un demi-siècle; elle porta même ombrage à Sully, et si quelques pasteurs rappelèrent un jour, en riant, le pape des protestants, à cause du rôle prépondérant qu'il jouait dans leurs assemblées, ce titre lui est resté comme souvenir d'une influence légitime et presque illimitée. Parmi plus de 30 ouvrages qu'il a laissés, nous mentionnerons, outre ceux qui ont déjà été cités: Son Traité de la relig. chrét., un de ses meilleurs écrits, et différentes réponses relatives à la conférence de Fontainebleau; ses Mémoires, correspondances, etc., son Testament; diverses Méditations; le Mystère d'iniquité, où Mornay trouva dans les lettres numerales de paVLo Y VICe-Deo, le chiffre de la bête 666, livre condamné par le parlement comme exécrable; Traité de l'Égl.; discours et mémoires politiques, etc. Jja Biblioth. de la Sorbonne possède 11 vol. de ses Mémoires.
DURÆUS, Jean, ou Dury, né 1596 à Édin-bourg, fils d'un pasteur presbytérien, accepta 1625 le poste de pasteur de réfugiés anglais à Elbing, sous la domination suédoise. Il chercha, avec l'agrément d'Abbot, archev. de Cantorbéry, à réunir les diverses fractions de lfÉgl. protestante, et fit dans ce but plusieurs voyages en Allemagne, Suède et Danemark. Après s'être joint aux épiscopaux 1634, il passa de nouveau aux presbytériens, entreprit sous le patronage de Cromwell un nouveau voyage sur le continent 1654-1657, mais le protecteur étant mort, il quitta définitivement l'Angl. et se fixa à Cassel, où il travailla, mais en vain, à l'union des luthériens et des réformés, f 1680.
DURAND 1° Guillaume, surnommé de Saint-Pourçain, bourg d'Auvergne, où il naquit; dominicain, devenu célèbre par son enseignement seolastique à Paris ét à Avignon. Il est le premier nominaliste qui, partant de l'idée que l'homme ne peut de lui-même connaître la loi divine, en tira une conclusion en faveur de l'autorité absolue de l'Égl., ce qui lui valut le titre de doctor resolutissimus. Maître du sacré palais, év. d'Annecy 1318, de Meaux 1326, il fut mandé à Rome pour un Traité sur l'état des âmes après la mort, que Jean XXII crut dirigé contre lui, mais le roi de France détourna le coup. Auteur de Comment, sur P. Lombard, et de quelques écrits sur la juridiction ecclésiast. f vers 1333.
2<> Beaucoup de pasteurs français de ce nom: un pasteur de Sedan 1622; un pasteur de Berg-holtz, appelé à Baireuth, 1691; un Jacques de Durand, ministre à Bristol 1713; un Audibert, pasteur à Saint-Jean-d'Angély, qui apostasia 1685 pour une place et une pension, et n'obtint ni l'une ni l'autre; François, ministre de l'Égl. franç. de Cantorbéry 1767; Jacques-François, né 1727 à Sémalé, près d'Alençon, qui vint à Lausanne 1754, s'y convertit, fut consacré 1760, et s'y fit une grande réputation comme prof., prédicateur et littérateur, f avril 1814; Durand, past. àSommières, fàNeuchâtel, avril 1695; son fils Daniel, né 1681 à Saint-Pargoire, Languedoc, fit ses études à Bâle, fut attaché comme chapelain à un régiment de réfugiés que la Hollande envoyait en Espagne. Après de grands dangers il put s'échapper, vint à Genève, puis à Rotterdam où il se lia avec Bayle, et enfin, en Angleterre, où il fut pasteur d'abord de Saint-Martin's Lane, puis de l'égl. de Sa-voye; il a laissé plus, sermons, une Vie de Vanini, un livre estimé sur La religion des mahométans, une Histoire du 16me siècle, etc.
3° V. Villegagnon.
4° Pierre D. né 12 sept. 1700, collaborateur d'Ant. Court, pasteur du désert, pendu 22 avril 1732 à Montpellier. — Sa sœur Marie D. enfermée à 15 ans dans la Tour de Constance pour le crime de son fr., y passa 38 ans et ne fut délivrée qu'en 1768, avec ses compagnes; elle retourna dans son village, mais sa cabane était en ruine; les arbres de son verger étaient coupés.
DUSIS, probablement le même que Dosi-thée 1°, q. v.
DUTOIT-MEMBRINI, Jean-Philippe, célèbre mystique vaudois, né à Moudon 1721, consacré en 1747, mais d'une constitution délicate qui ne lui permit pas d'accepter les fonctions pastorales; une maladie de poitrine le décida même 1759 à renoncer complètement au ministère. Les écrits de M™« Guyon le portèrent au mysticisme, et il se fit un système religieux auquel sa piété sincère ét vivante gagna quelques disciples. Il donna aussi quelques cours comme prof, f 1793. Il a écrit Philos, divine par Keleph ben Nathan 1793, ét Philos, chrétienne 1800.
DU VERGIER de Hauranne, v. Saint-Cyran.
DWIGHT, Timothée, théol. et prédicateur américain trè9 populaire. Né dans le Massachu-sets 14 mai 1752, f Après avoir été chapelain de régiment, puis pasteur congrégationa-liste, il fut nommé directeur du collège de Yale. — Son petit-fils, portant les mêmes noms, remplit auj. les mêmes fonctions dans la même église.