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BAADER, François, né 27 mars 1765 à Munich, étudia la médecine et la minéralogie, visita l'Angleterre 1792 à 1796, et fut à son retour nommé conseiller des mines en Bavière, puis président du conseil jusqu'en 1820; en 1826 prof, de philos, et de théol. spéculative à Munich. Il avait été appelé en 1822 à Péters-bourg, mais cette affaire n'eut pas de suites, f 23 mars 1841. Un des premiers philos, de l'Allemagne, B. était spiritualiste, catholique et mystique. Il avait étudié Rousseau, dont le déisme lui avait paru insuffisant; puis Kant, qu'il trouvait trop subjectif. Il leur préféra saint Martin, Bœhme, Paracelse, Thomas d'Aquin, Jacobi, Schelling, mais il ne s'attacha exclusivement à aucun. Il n'admettait pas qu'il y eût contradiction entre la nature et la foi; il voit dans l'homme l'intermédiaire entre le créateur et la création, mais l'homme ayant péché, c'est Jésus-Christ qui l'a remplacé comme intermédiaire. Il n'aimait ni Luther, ni le protestantisme; mais il ne regardait pas la papauté comme essentielle dans le catholicisme; il combattit les prétentions romaines et les indulgences, demandait la communion sous les deux espèces, et sympathisait avec l'Église grecque. En politique il était conservateur, mais éclairé; il demanda aux monarques alliés la reconstitution de la Pologne libre, et voyait une union possible et désirable entre la politique et la religion. OEuvr. compl. publ. par Hoffmann, 16 vol. Leipsig 1851-1860.

 

BAANES, v. Pauliciens.

 

BÀBYLAS, év. d'Antioche vers 237, f 231 en prison, par suite des mauvais traitements qu'il aurait snbis sons Décius. Chrysostôme raconte qu'il refusa l'entrée de l'église à un empereur, il ne dit pas lequel, à cause de ses crimes, et que le monarque, ému de cette courageuse fidélité, se convertit. Aucun autre historien ne mentionne ce fait.

 

BACCANARI, ou plutôt Paccanari, Tyrolien des environs de Trente, fils de parents pauvres, qui, après avoir essayé de plusieurs métiers, soldat, commerçant, montreur de curiosités, entreprit de relever sous une autre forme et Mus un autre nom l'ordre des jésuites supprimé en 1773. Il s'aboucha avec Pie VI à Florence, obtint pour lui et ses 12 compagnons les privilèges dont il avait besoin, se rendit 1799 à Rome pour protéger les élèves de la Propagande, dont la république française venait de fermer le collège et fut emprisonné au château Saint-Ange. Remis en liberté il se rendit à Vienne pour tâcher de fusionner sa société avec celle du Cœur de Jésus, mais l'œuvre périclita; la discorde s'y mit, les couvents refusèrent l'obéissance à Baccanari, et en 1814 les membres survivants, quittant le nom de baccanaris-tes, ou de pères de la foi, se firent recetoir tout simplement dans l'ordre des jésuites qui venait d'être rétabli.

 

BACH, Jean-Sébastien, né 21 mars 1685 à Eisenach, d'une famille qui avait dû quitter la Hongrie pour cause de religion, et qui, dans l'espace de 2 siècles, a fourni plus de 200 musiciens distingués, peut être considéré comme un des pères de la musique sacrée moderne. Orphelin de bonne heure il fut élevé par un oncle qui l'initia aux principes de l'orgue et du clavecin. Il fut successivement organiste, chantre et maître de chapelle à Arnstadt, Mulhouse, Weimar, Anhalt-Côthen et Leipsig. f 30 juill. 1730, aveugle et après une douloureuse maladie. Marié 2 fois il eut 20 enfants, dont 11 fils, tous excellents musiciens. Il a énormément écrit, et dans presque tous les genres; il a rajeuni le style fugué, et l'a même appliqué au choral; il a beaucoup de mélodie, mais elle se penl presque dans l'ensemble harmonique. Ses principales œuvres sont une composition pour lafête commémorative de la Confession d'Augsbourg 1730, ses deux Passions, l'une sur saint Jean, l'autre sur saint Mathieu, ses Hymnes et Cantates, et ses Messes dont l'une en si mineur est peut-être son chef-d'œuvre. Célèbre de son vivant, au point que les souverains se disputaient ses visites, il fut un moment presque oublié après sa mort, et c'est en partie à Mozart, et à une visite que celui-ci fit à Leipsig en 1789, que sont dues la découverte de ses grandes compositions d'église et la renommée dont il jouit aujourd'hui comme chef d'école.

 

BACON lo Roger Bacon, né 1214 à Ilchester, Sommerset, f 1294, l'une des plus grandes lumières du moyen âge. Après avoir étudié à Oxford et à Paris, il fut frappé du vice fondamental de l'étude des sciences et entreprit de réagir en leur donnant pour base l'observation et l'expérience. Il se livra au travail avec ardeur, acquit bientôt une instruction supérieure dans tous les domaines, mathématiques, physique, optique, géographie, grammaire, astronomie, chronologie, histoire, logique, médecine, métaphysique, théologie. Il ne reculait devant aucun idéal à poursuivre, et dans les questions religieuses il peut être considéré déjà comme un des précurseurs de la Réforme par la place qu'il donnait à la Bible et par sa méthode d'interprétation. Son génie, aidé de son travail et de ses études, lui fit faire d'étonnantes décou -vertes; dès 1267 il avait demandé la réforme dn calendrier. On lui attribue aussi la découverte de la poudre, des verres à grossir, du télescope, de la pompe à air, d'une substance combustible analogue au phosphore. Il avait compris la puissance de la vapeur et entrevu des vaisseaux et des voitures marchant avec la plus grande rapidité sans hommes ni bêtes pour les traîner. Il n'aimait pas Aristote, dont il ne connaissait d'ailleurs que des éditions fort mauvaises: « Si je le pouvais, disait-il, je ferais brûler tous ces livres. » Par ses critiques sur le texte altéré de la Vulgate, il provoqua la revision qui en fut faite par Hugo de Saint-Chair. Il paya cependant son tribut aux erreurs de son temps; il croyait à l'alchimie et à l'astrologie, à l'influence des astres et de leurs conjonctions. L'histoire de ce grand génie fut ce qu'elle devait être dans un siècle de ténèbres. Moine, il appartenait à l'ordre des franciscains, et sa science prodigieuse le fit surnommer le Docteur admirable. Mais il s'était fait des envieux par sa gloire, et des ennemis par ses protestations contre le relâchement des mœurs du clergé, On l'accusa, injustement, de sorcellerie; il fut condamné et passa de nombreuses années en prison. Clément IV qui l'avait en grande estime lui rendit la liberté, mais après la mort de ce pape il fut de nouveau arrêté, et enfermé à Paris dans la prison du couvent des franciscains, où il passa de nouveau 10 années, sans que Nicolas IV daignât entendre ses requêtes. Il fallut l'intervention de quelques nobles pour le délivrer; il se hâta de quitter la France et termina ses dernières années à Oxford. Son prin -cipal ouvrage est VOpus Majus qu'il composa et adressa à Clément IV pour lui exposer toute sa doctrine et se justifier ainsi des imputations calomnieuses dont on avait essayé de le noircir.

II le refondit sous le titre d'Opus Minus, puis une troisième fois sous celui d'Opus Tertium. Ses autres ouvrages, sur le Secret de la nature, la Vieillesse, le Miroir d'alchimie, l'Éloge de l'Écriture sainte, ont moins de valeur.

2° François Bacon, grand chancelier d'Angleterre, baron de Vérulam et vicomte de Saint-Alban, n'appartient qu'indirectement à l'hist. ecclésiastique. Né 1561, f 1626, il se fit remarquer de bonne heure par la précocité de son génie, entra dans la diplomatie où il fournit une courte mais brillante carrière, s'attacha malheureusement au sort de Jacques I et de Buckingham, dont il favorisa les folles prodigalités, fut condamné par le parlement et vécut dès lors dans la retraite, se consacrant tout entier à ses études philosophiques et littéraires. Il était frappé comme son homonyme, de la méthode déplorable employée pour l'étude des sciences physiques et naturelles, et il travailla k substituer l'observation aux inductions syl-logistiques, les choses aux mots et les réalités aux divagations. Il fut ainsi le réformateur de la philosophie expérimentale. Ses principales idées sont exposées dans son Novum Organum 1620, De dignitate et augmentis scientiarum 1605, Sylva sylvarum 1627, etc. dont l'ensemble devait former un vaste ouvrage, resté inachevé, nommé Instauratio magna. Il existe en français plusieurs éditions et traductions de ses œuvres, par Lassalle, Bouillet, Lorquet, J. de Maistre, etc.

 

BADE, ou Baden, grand duché de l'empire d'Allemagne, dont les limites actuelles sont nettement déterminées, mais qui anciennement, par suite d'alliances, de mariages, de morcellement et d'annexions, variait en étendue, se limitant au simple margraviat de Bade, ou s'étendant de Constance à Strasbourg, de la vallée du Neckar au Palatinat. D'une manière générale, c'est le pays des anciens Allemani, évangélisé vers les 7™e et 8me siècles par Frido-lin, Trudprat et Pirmin. Les Zâhringen y élevèrent au 13me siècle la cathédrale de Fribourg. Les universités de Heidelberg 1386 et de Fribourg 1456 exercèrent une grande influence sur la culture intellectuelle du pays. Tauler et Suso le réveillèrent par leurs puissantes prédications et le préparèrent à la Réforme. Jérôme de Prague enseignait 1406 à Heidelberg avec une franchise qui préludait à son rôle de réformateur-martyr, et bientôt l'on voit apparaître les noms de Reuchlin, d'Agricola, Capiton, Mélanchthon, Bucer, etc. Luther se fit entendre en avril 1518, et dès 1520 la Réforme pouvait être regardée comme accomplie. Les évêques de Spire, Wttrz-bourg et Mayence firent naturellement ce qu'ils purent pour l'entraver; 2000 volumes évangéli-ques furent brûlés à Fribourg par la main du bourreau, mais à Constance la population résista, même aux ordres de l'empereur; elle abolit le célibat des prêtres et renvoya son évêque en 1525, pendant qu'à Fribourg on noyait froidement le pa&teur Spengler parce qu'il prêchait l'Évangile. Plusieurs villes de Bade se joignirent en 1529 à la protestation de la diète de Spire, et renouvelèrent leurs démarches à Augs-bourg 1530. La moitié du pays avait embrassé la Réforme; les persécutions de 1548-55 rédui-sèrent ce nombre de près d'un tiers; puis vinrent les disputes confessionnelles entre les luthériens et la réforme helvétique. Enfin le rationalisme officiellement enseigné par le vieux Paulus acheva l'œuvre, et le protestantisme n'eut plus que le bruit de vivre. Une conférence eut lieu en 1821 sons les auspices du grand-duc Louis, qui réunit les deux confessions en une seule par un Acte d'union en plusieurs articles. Quelques professeurs, Umbreit, Ullmann, Ro-the; quelques pasteurs, Mann, Frômmel, Bey-schlag, Plitt, maintinrent dans l'Église le flambeau de la foi évangélique, tandis que d'autres, du dehors, essayèrent d'en ranimer l'éclat en s'organisant en sociétés évangéliques ou de mission intérieure.

 

BADEN (Colloque de). Assemblée ecclésiastique, convoquée à Baden (Argovie), par les cantons catholiques pour mettre fin par une discussion publique aux hésitations que les premières tentatives de réforme entretenaient dans les esprits. Zurich n'y parut point, il était tout décidé; les 12 autres cantons y étaient représentés. Les délibérations s'ouvrirent le 21 mai 1526 en présence des 4 évêques suisses et d'une nombreuse et brillante assemblée. Fa-ber, le docteur Eck, et Murner de Lucerne, furent les principaux orateurs du parti catholique; Œcolampade, du côté réformé, porta presque seul tout le poids de la discussion. Haller de Berne y fut envoyé, non pour discuter, mais pour rendre compte de ce qui s'y serait passé. Le nombre des combattants et certains détails de mise en scène assurèrent la victoire des catholiques; les adhésions lui arrivaient de toutes parts et dans les moments les plus critiques. Les Articles de Bade parurent donc être la condamnation de la Réforme; cependant ils ne réussirent pas à prévaloir contre l'opinion, et bientôt Berne déclara ne pas les reconnaître. En outre le caractère équivoque de la publication qui en fut faite, la préface et les commentaires dont ils furent accompagnés, ne tardèrent pas à leur enlever tout crédit, et plusieurs, à Berne comme à Bâle, déclarèrent ne pouvoir tenir aucun compte des Actes imprimés, aussi longtemps qu'ils n'auraient pas pu les confronter avec l'original.

 

BADER, Augustin, anabaptiste fanatique du 16®« siècle, originaire d'Augsbourg, qui se croyait le roi du règne de mille ans, 1529. Il se fit faire une couronne, un scepire et une épée, et s'établit dans les environs d'Ulm. Il fut exécuté 1530, quand on aurait dû simplement renfermer comme fou. Dans quelques notices il est appelé Weber.

 

BADUEL, Claude, né à Nîmes, humaniste distingué, protégé par Marguerite de Valois, visita Paris, Louvain, Wittenberg et Strasbourg, fut nommé recteur du collège des Arts à Rimes, 1540, mais soupçonné de luthéranisme, il dut s'enfuir et vint à Genève 1551, où il travailla avec R. Estienne, fut reçu bourgeois, pasteur à Russin et Vandœuvres, et enfin prof, de philos, et mathématiq. f 1561. Auteur d'une vingtaine d'écrits et dissert, latins. — Son fils Paul fut pasteur à Bergerac.

 

BAGNOUENS, v. Cathares.

 

BAHRDT, Ch.-Fréd., né 1741, théologien érudit, mais superficiel et sans convictions, étudia à Leipzig sous Crusius, dont l'orthodoxie dépassait la Bible et tous les symboles; il fit l'orthodoxe avec lui et fut nommé catéchète, puis suppléant de son père qui était prof, de dogmatique. II ne manquait pas d'une certaine faconde, et pendant quelque temps il eut des auditeurs; mais il eut aussi des aventures, et menacé d'une recherche en paternité, il donna sa démission 1768, et se lança en plein dans le rationalisme le plus grossier. Il occupa successivement plusieurs places à Erfurt, Giessen, Marschlins (Grisons, Suisse), Durckheim, etc. Mais renvoyé de partout à cause de son caractère, de ses extravagances, de ses doctrines ou de ses mœurs, il finit par se fixer à Halle 1779, où Se m 1er lui fit obtenir une pension de 200 ècus, à condition qu'il se tînt tranquille. Mais tout alla de mal en pis. Non content de faire de la littérature et des conférences, sur Tacite, Ju-vénal, la métaphysique et la morale, il ouvrit une taverne dans la banlieue de Halle, et après avoir enseigné la morale le matin, il allait le soir tenir le cabaret avec sa servante (sa femme, dont il était séparé, vivait toujours). Cela dura dix ans; il finit par être compromis dans une bande d'escrocs, écrivit une comédie contre le roi (rÉdit de religion), fut mis en prison, et peu d^ temps après avoir été relâché, f 1792 d'une konteuse maladie. Ses principaux ouvrages sont: un Essai de dogmat. bibliq., Nouv. révélation de Dieu, Profession de foi, Almanach des hérétiques, enfin une Autobiographie, mélange de mensonge et de cynisme. Tholuck lui a consacré quelques pages.

 

BAIUS, v. Bay (de).

 

BALDAQUIN (de Baldak, un des noms de la ville de Babylone au moyen âge); étoffe précieuse pour tapis ou vêtements. On désignait ainsi 1° le ciel dont on recouvrait le trône du maître-autel dans les grandes solennités, pour le préserver de la poussière; 2<> le ciel ou dais portatif dont on se sert dans les processions, pour honorer le sacrement et le protéger contre les intempéries de l'air ou contre le soleil.

 

BALDE 1û ou BaUli, savant italien, abbé de Guastalla, né 1553, f 1617, connu par ses travaux sur les sciences, et par un poème sur la navigation.

2° Jean-Jacques B., l'Horace de son temps, né à Ensisheim, près Colmar 1603. Fils de parents pauvres, il fut élevé à Ingolstadt, où il étudia le droit et obtint de brillants succès. Ayant en vain cherché à toucher le cœur d'une jeune boulangère, il fut surpris, pendant qu'il lui donnait une dernière sérénade, par le son des cloches d'un couvent voisin. Une pensée le frappa: Voilà des hommes qui se lèvent la nuit pour chanter les louanges de Dieu, et moi je perds mes nuits à rechercher l'amour d'une pauvre créature mortelle ! Assez chanté comme ça, brisons la mandoline! Et il entra dans l'ordre des jésuites le 1er juillet 1624. Il ne tarda pas à se faire une grande réputation, d'abord comme professeur à Ingolstadt, puis comme prédicateur de la cour à Munich 1638-1648. Mais éprouvé dans sa santé, il dut chercher un climat plus doux, se rendit à Landshut et à Am-berg, où il essaya plusieurs fois de remonter en chaire; enfin à Neubourg, sur le Danube, où il passa ses 14 dernières années, et où il s'éteignit doucement le 9 août 1668, aimé et regretté de tous, même des protestants, qu'il avait aimés comme il aimait tous les hommes, enfants du même Père. C'est par ses poésies latines qu'il est surtout connu, et des juges compétents l'apprécient à l'égal d'Horace, avec plus de cœur et de profondeur. Il a fait des Odes, des Élégies, une Tragédie (la fille de Jephthé), des Éloges, des Satyres; il a chanté Wallenstein et Tilly, et critiqué les fautes politiques de la guerre de Trente ans. Son principal ouvrage, en vers élégiaques, Urania Victrix (le triomphe de l'amour divin sur les vanités humaines) 1663, lui valut une médaille d'or d'Alexandre VII à qui il l'avait dédié. Ses poésies allemandes, moins appréciées, sont aussi loin de valoir celles de Paul Gerhard.

 

BALE, longtemps ville impériale, jusqu'au moment, 1501, où elle fut réunie à la Suisse* Elle est surtout célèbre dans l'histoire ecclésiastique par le Concile qui s'y réunit du 27 août 1431 au 7 mai 1449. Le conc. de Constance, cédant à la pression de l'opinion publique et des empereurs, avait par un décret, nommé Fréquent, tranché la question de l'autorité suprême des conciles et décidé leur périodicité. Ce double vote, dirigé surtout contre les abus de la

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papauté, était plus dangereux encore qu'une réforme aux yeux de la curie romaine, qui fit tout pour le rendre illusoire. Elle trouva moyen de dissoudre le concile de Sienne avant qu'il eût commencé ses travaux, mais de toutes parts on réclama: les cours et les universités demandèrent que le concile eût lieu, et l'on ajouta cette fois qu'il devait se réunir dans une ville libre, hors de l'Italie, en dehors de l'influence du pape. L'indomptable soulèvement de la Bohême décida Martin V à ne pas résister plus longtemps, et peu avant sa mort il convoqua un concile écuménique à Bâle. Les évêques de la chrétienté hésitaient devant cette convocation, ne sachant s'ils devaient la prendre au sérieux. Il fallut qu'Eugène IV la renouvelât, et Julien Cesarini, cardinal saint Ange, qui tenait à une réforme, mais qui voulait aussi ramener les Hussites à l'unité de l'Église, fut chargé de l'organisation du concile. Les évêques n'arrivaient que lentement; ils se méfiaient; mais à mesure qu'ils virent s'installer à Bâle des notabilités romaines, et surtout Sigismond s'y faire représenter, ils comprirent que la chose devenait sérieuse et ils affluèrent des contrées les plus éloignées de l'Europe. Au commencement, tout alla bien, et si bien qu'Eugène envoya le 17 déc. une bulle à Cesarini pour l'engager à dissoudre le concile sous n'importe quel prétexte. Mais cette bulle se heurta contre les scrupules du cardinal, contre l'opposition du roi et contre la volonté bien arrêtée du concile lui-même, qui déclara n'être que la suite de celui de Constance, et chargé de poursuivre son œuvre. Il cita même le pape à comparaître et lui fit des conditions assez dures. Le concile avait heureusement évité le grand écueil du vote par nations, qui avait entravé les délibérations de Constance, mais il s'était compliqué d'un autre mode de discussion qui embarrassait singulièrement la marche des affaires. Il s'était partagé en quatre sections, ou délégations formées des différentes classes de dignitaires, l'une s'occupant des choses de la foi, l'autre de la réforme, une autre de la paix, la dernière des affaires courantes. Pour qu'une résolution fût valable, il fallait qu'elle fût adoptée par trois sections au moins, et proclamée en assemblée générale. Les juristes, les moines et les prélats français étaient les orateurs les plus hardis. Mais Cesarini l'emportait sur tous par la science, l'éloquence, la grâce et le désir sincère de travailler au bien de l'Église. Le pape continuait d'agir en dessous contre le concile, quoiqu'il l'eût de nouveau reconnu par une bulle du 12 oct. 1433. Le 4 janv. 1433 Procope, la terreur de la chrétienté, Rocky-zane, Episcopius et d'autres délégués de la Bohême étaient arrivés, chargés par leur pays de réclamer certaines réformes. On leur accorda quatre points principaux (Compactata), entre autres la Cène sous les deux espèces et le culte en langue vulgaire. Mais le désir de s'entendre avait amené Cesarini d'une part et Rockyzane de l'autre à se servir d'expressions vagues que, des deux côtés, l'on ne trouva pas assez précises. Les taborites protestèrent contre cet accord fallacieux, Eugène en parla avec dédain, et ses successeurs refusèrent de le ratifier. — En 1435 le concile s'occupa de réformes de détail sur les annates, les taxes, les bénéfices, les réserves des papes quant à la nomination des chanoines; autant de mesures qui blessaient la curie dans ses revenus. Mais on ne toucha pas aux questions plus graves de la moralité du clergé, des désordres monacaux, des fêtes ridicules qui se célébraient dans les églises, etc. A partir de ce moment la guerre est déclarée entre le concile et la curie atteinte dans ses moyens d'existence; le pape multiplie ses déclarations, ses menaces et ses intrigues. Cesarini lui-même et quelques hommes modérés trouvent que le concile a été trop loin. Une circonstance favorable se présente pour tourner les difficultés en déplaçant le centre des préoccupations. Les grecs s'adres-sent au pape et au concile avec le vœu que les deux Églises d'orient et d'occident arrivent à s'entendre. Ce serait une belle chose; mais les deux partis voudraient en avoir l'honneur, le concile en examinant la question, le pape en la faisant décider en Italie dans un concile spécial présidé par lui. Le 6 et le 7 mars 1437 les discussions sont montées à un tel degré de violence qu'on n'entend plus les orateurs; on en vient aux voies de fait, et les bourgeois de Bâle doivent intervenir en armes pour empêcher qu'il y ait du sang répandu. La majorité déclare alors que le concile est dissous; Cesarini quitte Bâle avec ses amis; la minorité demeure, ayant à sa tête Louis d'Allemand, cardinal-archev. d'Arles. Le pap3 appelle cette minorité une bande de Satan; le concile le déclare hérétique, le dépose solennellement 7 juillet 1439 et nomme à sa place Félix V, Amédée duc de Savoie. La Pragmatique Sanction 1438 reconnaît les décrets de Bâle comme concile écuménique, mais ne va pas jusqu'à reconnaître le nouveau pape. Il y a de l'hésitation chez les puissances. Eugène compromet sa cause par des excès de pouvoir; ses finances sont en mauvais état; il finit cependant par l'emporter, Félix n'étant pas qualifié pour lui opposer une sérieuse concurrence. Eugène f 14 févr. 1447, et ses cardinaux lui donnent pour successeur Nicolas V. Le 25 juin 1448 le concile de Bâle décide sa translation à Lausanne, où Félix résidait depuis longtemps. Puis Félix fatigué de sa papauté contestée, ayant donné sa démission à la sollicitation du roi de France, le concile, également fatigué d'une latte sans objet, reporte ses voix sur Nicolas qui a été élu à Rome et se dissout après ce dernier acte d'un semblant d'autorité. Ainsi finit cette assemblée, qui avait donné d'abord de si belles espérances; elle servit du moins à faire comprendre toujours mieux la nécessité d'une réforme, et l'impossibilité de l'obtenir par les voies régulières.

— Les origines du christianisme à Bâle sont peu connues. C'est en 616 qu'on voit mentionné un premier évêque, Ragnacaire; un premier concile s'y réunit en 1061. L'université fut fondée par Pie II. La réforme n'y pénétra et ne s'y établit que lentement, sous l'influence d'OEco-lampade, Capiton, Hèdion, Pellican; Farel y prêcha en 1524, Calvin en 1536. En janvier 1529 les Conseils de la ville furent renouvelés, et 3000 protestants contre 800 catholiques décidèrent l'introduction de la Réforme. La confession de foi, rédigée par Myconius, porte quelquefois le nom de Première Conf. helvétique; elle est modérée, plutôt zwinglienne, et fut adoptée par Mulhouse. Un grand nombre de réfugiés français, entre autres plusieurs membres de la famille de Coligny, s'étant établis à Bàle, une église française y fut fondée, qui subsiste encore. Parmi les proscrits italiens on cite les noms des Curione et des Socin.

 

BALLERINI, deux frères de Vérone, nés: Pierre le 7 septembre 1698, f 1769, Jérôme le 29 janv. 1702, élevés par les jésuites, distingués par leurs travaux ecclésiastiques, historiques, théologiques et en droit canon. Ils se complétaient l'un l'autre et leurs discussions, souvent vives, aboutissaient toujours à une entente commune. Pierre fut dès 1748 attaché comme conseiller à l'ambassade de Venise, et Benoît XIV le combla de faveurs. Ils ont publié les discours de Zénon, les œuvres de Léon-le-Grand, un traité sur les pouvoirs réciproques des papes et des conciles, et beaucoup d'autres ouvrages, dont quelques-uns sont anonymes.

 

BALSAMON, Théodore, un des canonistes les plus connus de l'Égl. grecque, diacre à Sainte-Sophie de Constantinople, élevé 1193 au patriar-chat d'Antioche, f à la fin du 12^® siècle. Il a écrit de nombreux ouvrages sur les règlements ecclésiastiques et s'est appliqué à prouver que ce sont les Basiliques, q. v. et non la Compilation de Justinien, qui font loi et autorité chez les grecs.

 

BALUE, Jean (La), ministre d'État sous Louis XI, né en Poitou 1421, f en Italie 1491, réussit par ses intrigues à faire abolir la Pragmatique Sanction,contre les intérêtsdu royaume; reçut le chapeau de cardinal en récompense de ses bons offices; correspondit avec les ducs de Berry et de Bourgogne, leur livrant les secrets de l'Etat; fut découvert 1469 et enfermé 11 ans dans une cage de fer, et n'obtint enfin sa liberté qu'à la sollicitation du pape. A Rome il fut comblé d'honneurs et nommé légat a latere en France 1484, mais cette mission dura peu, le légat ayant été mal reçu.

 

BALUZE, Etienne, né à Tulle 24 nov. 1630, t Paris 28 juin 1718. Élevé pour l'étude du droit, il avait plus de goût pour les recherches historiques, et il s'y consacra dès qu'il le put, dès sa 20me année jusqu'à sa mort, s'occupant de rassembler les documents, d'en rétablir le texte authentique, de les comparer et de les publier. Son premier ouvrage, Antifrizonius, contre Frizon et ses erreurs historiques, 1652, lui fit une grande réputation. En fait de caractère ecclésiastique, il n'alla que jusqu'à la tonsure. Il eut le bonheur de trouver un Mécène en Pierre de Marca, archevêq. de Paris 1656/62. Le chancelier Le Tellier l'attacha comme chanoine à son fils l'archev. de Reims. Colbert en fit son bibliothécaire 1667-1700, et mit à sa disposition l'une des plus riches collections de livres qui existassent. Professeur de droit-canon au Collège de France depuis 1670, il en fut nommé le directeur en 1707; mais ayant fait pour le cardinal de Bouillon une Hist. généalogique de la maison d'Auvergne, dont quelques passages semblaient favoriser les prétentions des Bouillon pour ce comté, il tomba en disgrâce; Louis XIV le priva de sa chaire et de son traitement et l'exila de Paris sans aucune forme de procès ou de jugement. Il ne put revenir qu'au bout de 5 ans, après le traité d'Utrecht 1713, son innocence ayant été pleinement reconnue. Il travailla encore pendant 5 ans et fut enterré à Saint-Sulpice. — Ses principaux ouvrages sont: Les Capitulaires des rois francs, 2 vol. f° 1677, réimpr. 1780 avec des notes et additions par Chiniac; une Nouv. collect. des conciles, 1683, 1 vol. fol.; une Vie des papes d'Avignon, 1693, et des Mélanges, 7 vol. 8<>, 1678-1715. Au moment de sa mort il venait d'achever une édition des Œuvres de Cyprien. Il a publié aussi plusieurs écrits de Marc, dont il avait été le collaborateur, entre autres des Dissertations sur les libertés de l'Égl. gallicane. Le nombre de ses écrits s'élève à 45; celui de ses réimpressions à plus de 115.

 

BAN, proclamation, bannum nuptiale. C'est Innocent III qui a le premier fixé, au 4m® concile de Latran 1215, et c'est le concile de Trente qui a établi comme règle générale, que les noms des époux devaient être proclamés publiquement du haut de la chaire 3 dimanches consécutifs. L'usage en était plus ancien; il avait primitivement pour but de recommander les fiancés aux prières des fidèles; plus tard il servit à consacrer la publicité des promesses et à mettre les intéressés en mesure d'intervenir et, s'il y avait lien, de s'opposer à des alliances de mineurs ou autres, interdites par l'Église ou par l'État. Avec l'introduction du mariage civil, les publications en chaire ont perdu presque toute signification et ne sont plus réclamées par les autorités, alors même qu'elles ont eu lieu. Les législations varient d'un pays à l'autre sur la publicité à donner aux fiançailles avant qu'il soit procédé au mariage; elles varient également sur la nature des dispenses à accorder.

Le mol Ban s'emploie aussi dans le sens d'excommunication et dans celui de bannissement.

 

BAPTISTÈRES. Jusqu'à l'avènement de Constantin on baptisait où et quand on pouvait, toujours par immersion. Mais peu à peu l'usage s'introduisit de donner à celte cérémonie une grande solennité et de réserver près des églises, puisque les catéchumènes ne pouvaient pas entrer dans les églises avant d'avoir été baptisés, des locaux spéciaux à cette destination. C'étaient dans le principe des chapelles, reliées par une galerie couverte à l'égl. proprement dite: L'év. ayant seul le droit de baptiser, comme aujourd'hui celui de confirmer, il n'y avait dans le diocèse qu'une seule église baptismale, comme il n'y a qu'une seule cathédrale. Les baptêmes se faisaient en masse les veilles de Pâques, de Pentecôte, et plus tard, de Noël. La forme du bâtiment était indiquée par sa destination; il fallait un réservoir d'eau, une piscine (du latin piscis, poisson, nom symbolique du Christ) avec un espace circulaire suffisant pour les parents et les amis du néophyte. La rotonde était ainsi naturellement indiquée comme forme, et elle avait en outre cet avantage que beaucoup de temples romains étant construits sur ce modèle, ils pouvaient être facilement aménagés pour servir de baptistères. Plus tard, par goût ou pour d'autres motifs, on choisit la forme polygonale et surtout octogone, que le cardinal Ch. Borromée regardait comme la plus parfaite de toutes, en allusion aux octaves des fêtes chrétiennes. Les principaux ornements des baptistères étaient, outre le poisson déjà nommé, une colombe d'or ou d'argent, symbole du T5aint-Esprit; un cerf altéré (Ps. 42,*1), des tableaux ou des reliefs représentant Jean-Baptiste, le baptême du Sauveur, Philippe et l'eunuque de Candace, etc. Le bassin devait être en pierre, parce que J.-C. n'est pas seulement l'eau qui vivifie, il est aussi le rocher, etc. Quand, aux 5me et ô"3© siècles, on décida de baptiser aussi les petits enfants, il fallut renoncer à bien des règles gênantes et à des prescriptions trop rigoureuses, à l'immersion, aux dates réservées, au baptême par l'évêque; les conciles résistèrent longtemps à ces innovations, mais à la lin la nécessité l'emporta, et les immenses baptistères des premiers temps (sous Damase un enfant s'y noya et son corps ne fut retrouvé qu'au bout d'une heure, Baron, Annal.) furent remplacés par de simples bassins, qui conservèrent la forme antique, ronde ou octogone, et qui furent placés d'ordinaire à l'entrée des églises pour rappeler que c'est par le baptême qu'on entre dans le royaume des cieux. Ils sont souvent fermés d'un couvercle en forme de coupole, soit à cause de la poussière, soit en vue de l'usage profane ou superstitieux qu'on en pourrait faire. L'eau lustrale, chez les catholiques du moins, ne doit pas être puisée avec la main, mais au moyen d'un goupillon, presque toujours en argent. La plupart de ces formes sont ignorées des protestants, qui n'ont conservé du baptême que sa signification primitive.

 

BAPTISTES, secte chrétienne prolestante qui se caractérise, comme son nom l'indique, par ses vues particulières sur le baptême. S'en tenant aux textes du N.-T. et à la tradition des cinq premiers siècles, elle estime qu'il n'y a de vrai baptême que celui qui a lieu par immersion, et que le baptême ne peut être administré qu'aux croyants, par conséquent pas aux enfants. De tout temps il y a eu des docteurs soutenant ces vues, mais c'est seulement vers 1521, avec les anabaptistes, que le baptisme a pris corps comme doctrine positive, et si la secte fut détruite 1535 à cause de ses excès, quelques survivants, honnêtes, doux et laborieux, échappèrent et s'établirent en Hollande et en Angleterre, où ils réussirent à subsister, malgré les persécutions. En 1518 on trouve déjà une église baptiste organisée en Angleterre, mais c'est surtout depuis l'Acte de tolérance qu'ils se multiplièrent. Ils s'établirent aussi en Amérique et y prospérèrent. La plupart sont calvinistes stricts; ce sont les plus vivants et les plus zélés; les autres sont arminiens, et quelques-uns ariens et même sociniens. Les baptistes stricts, en particulier, comptent 6 séminaires dans le Royaume-Uni, et plus de cent mille communiants, formant 1300 églises; ils ont eu des hommes distingués, Robert Hall, le missionn. Carey, Baptist Noël, Spurgeon, etc. Aux États-Unis, partagés en plusieurs branches, ils sont plus de 3 millions et comptent plus de 8,001) congrégations. Chaque église est absolument indépendante, mais elles s'associent en général pour l'œuvre missionnaire, à laquelle elles s'intéressent vivement, et qui a obtenu de brillants succès, notamment aux Indes et dans les Antilles. Il y a quelques églises baptistes sur le continent, en Suède, Allemagne, Danemark, Suisse, France, etc.; mais trop d'autres questions graves préoccupent les esprits, pour que la question spéciale du baptisme ait jamais réussi à produire un grand mouvement, v. BainL Bennet, Roger Williams.

 

BARBARA, ou Barbe, vierge d'une grande beauté, convertie au christianisme, chercha à convertir son père, Dioscore, mais celui-ci la dénonça, et comme les supplices les plus cruels ne réussirent pas à l'ébranler, il lui trancha lui-même la tête, et mourut ensuite frappé de la foudre. Baronius place cette histoire en Nico-médie, sous Maximin 235-38; Assemani la place à Héliopolis en Égyj^e, sous Galerius 306. On ajoute que Henri Stock, à Gorkum en Hollande, à. moitié consumé par les flammes, ayant invoqué sainte Barbara, vécut encore assez pour pouvoir recevoir le saint sacrement. Les catholiq. l'invoquent contre l'orage, la foudre et le feu. Elle est patronne des artilleurs. Sa fête est le 4 déc.

 

BARBEROUSSE. v. Frédéric.

 

BARBEYRAC, Jean, d'une famille noble de Béziers, fils du pasteur Antoine B. réfugié à Lausanne. Né à Béziers 15 mars 1674, il réussit à grand'peine à rejoindre à Lausanne sa famille exilée, étudia à Lausanne, Genève et Francfort-s.-O., fut nommé en 1697 prof, au collège des Réfugiés à Berlin, et renonça à la théol. pour suivre le droit et les lettres. En 1710 il fut appelé à Lausanne comme prof, d'histoire et de droit,et de 1714 à 1717 recteur de l'Académie. Il passa de là à Groningue, ayant refusé de signer la Formule du Consensus, et f 3 mars 1744, ayant perdu sa femme et sa fille unique. Il était membre de l'Acad. de Berlin. Il a laissé de nombreux ouvrages, presque tous d'érudition, entre autres des traductions de PufFendorf et de Grotius, une trad. du livre latin de Noodt sur la Liberté de conscience, un Traité de la morale des Pères de l'Église.

 

BARCLAY lo William, né à Aberdeen, grand ami de Marie Stuart, légiste cathol., vécut en France et écrivit contre la Ligue et contre les théories démocratiques qu'elle émettait avec l'approbation du pape. Bellarmin lui répondit, f 1609.

2° Robert, d'une vieille famille écossaise, fils d'un officier qui s'était distingué dans les guerres d'Allemagne et de Suède. Né à Édin-bourg 1648 il fut envoyé pour son éducation à Paris, où le frère de sa mère le convertit au catholicisme. Le père, qui appartenait à la Société des Amis, le rappela aussitôt, et après une longue résistance, fréquentant les assemblées des quakers, Robert fut gagné à leur doctrine et devint l'un de leurs représentants les plus convaincus. H voyagea en Angleterre, en Hollande et en Allemagne, cherchant à faire des prosélytes, + 1690. Son principal ouvrage est l'Apologie de la véritable théol. chrétienne, telle que la professent ceux que par dérision on appelle Quakers (latin), dédiée à Charles H, Amsterdam 1676. Il a le mérite de présenter sous une forme systématique le spiritualisme mystique de la secte. Son ami G. Penn publia en 1692 ses œuvres complètes.

 

BAR-COCHBA, ou Bar-Cocab, fils de l'étoile, chef juif de l'insurrection qui éclata vers 131 après C. sous Adrien, en Palestine, et qui se termina malheureusement par sa défaite et sa f 135. Il se faisait passer pour le Messie, fit quelques semblants de miracles, s'imposa par la terreur aux juifs et aux chrétiens, séduisit le célèbre rabbin Akiba, prétendit être né le jour de la destruction du temple, revendiqua pour lui la prophétie de Balaam Nomb. 24, 17., réalisa la prophétie de Marc 13, 21. 22., et après avoir attiré sur son peuple de nouveaux malheurs, il mérita d'être appelé par dérision Bar-Cosiba, fils du mensonge.

 

BARDES ANES, v. Valentin, et Gnosticisme.

 

BARI (Synode de), convoqué par Urbain II 1098; 183 évêques sont présents, dont Anselme de Cantorbéry, qui expose ses vues sur la Procession du Saint-Esprit; le roi Guillaume-le-Roux est presque excommunié.

 

BARLA AM1° v. Hésychastes. 2° moine de l'ordre de saint Basile, né à Séminara, Calabre, vers 1300,t vers 1348. Étant allé en Grèce, il embrassa la religion grecque et fut en grande faveur auprès de l'empereur Andronique-le-Jeune qui lui confia plusieurs missions et le chargea de travailler à l'union des deux Églises. Mais ayant eu le malheur d'attaquer les moines du Mont-Athos qui croyaient que la lumière du Mont Tabor était la gloire incréée de Dieu, il dut repartir pour l'Italie et rentra dans le giron du catholicisme. Clément VI le nomma év. de Gé-race. Il a laissé une Biblioth. des Pères, 6 livres d'Arithmétiq. algébrique, 2 livres sur la Morale des stoïciens et un traité Contre la primauté du pape.

 

BARLETTA, prédicateur dominicain du 15™ siècle. Il s'appelait Gabriel, mais prit peu à peu le nom de Barletta, sa ville natale. Il se fit une grande réputation, vers 1480, surtout dans le nord de l'Italie, par la vérité, la profondeur et l'originalité de ses discours, autant pour le fond que pour la forme. Il avait brisé le moule scolastique et recherchait dans la prédication le naturel, sans reculer devant le satirique, le comique et même le grotesque. On disait proverbialement que t celui qui ne sait pas barlet-ter, ne sait pas prêcher. » Patriote, il pleurait sur la grandeur éclipsée de l'Italie. Dominicain, il a combattu le dogme de l'Immaculée conception. Ses sermons, presque tous sur des sujets moraux, ont eu plus de 20 éditions.

 

BARNABAS. L'épître connue sous le nom de cet apôtre, retrouvée seulement en 1645, moitié en grec, moitié en latin, appartient incontestablement à l'école d'Alexandrie, peut-être à un disciple de ce nom; mais, malgré le témoignage de Clément qui la cite comme étant de l'apôtre, malgré sa présence en entier dans le mss. du Sinaï, elle renferme une opposition trop vive contre le judaïsme et contient trop d'erreurs sur les cérémonies du culte pour qu'on puisse l'attribuer au compagnon de Paul, au lévite de l'Ile de Chypre. Si elle était authentique, il faudrait admettre qu'elle a été interpolée et que seuls les chap. i à 6, 13, 14 et 17 sont de l'apôtre. C'est l'opinion de Schenkel, mais même dans cette hypothèse les difficultés subsistent. Elle jouit longtemps d'un grand crédit dans l'Église.

 

BARNABITES. Ordre religieux fondé à Milan à l'époque des guerres de François te* et de Charles-Quint contre l'immoralité croissante des armées, contre les idées nouvelles apportées par les soldats allemands et à l'occasion d'une épidémie grave qui éclata dans la ville et frappa le tiers de la population. Fondée par Antoine-Ma-rie-Zacharie, l'association fut autorisée par Clément VII, 1533, et reconnue avec privilèges par Paul III, 1535, sous le nom de congrégation de saint Paul. Ils reçurent le nom de barnabites de l'église dédiée à Barnabas, qui fut mise à leur disposition. Ils s'occupaient des missions, d'enseignement et de prédication. Ils se répandirent rapidement au dehors et fondèrent de grands collèges dans la plupart des pays de l'Europe. Aujourd'hui on ne les trouve plus guère qu'en Autriche, en Espagne et en Italie. Leur centre est à Rome. — Déjà sous Grégoire XI, 1370-78, un ordre de barnabites s'était formé, qu'Eugène IV avait reconnu comme association 1441; Ch. Borromée opéra leur fusion avec les barnabites de Milan, et Paul V 1606 confirma cette réunion. — Quant aux religieuses barnabites, v. Angéliques.

 

BARNES, Robert, docteur en théol., s'attira la défaveur d'Henri VIII par ses tendances luthériennes, abjura des lèvres pour sortir de prison, se déclara de nouveau pour la Réforme et s'enfuit à Wittenberg 1530. Le roi s'étant à son tour prononcé contre le pape, Barnes revint, fut nommé chapelain de la cour 1535, servit d'intermédiaire pour le mariage d'Henri avec Anne de Clèves, et fut condamné comme hérétique par le parlement, à la demande du roi qui voulut se venger sur le négociateur de la lassitude que lui causait sa 5© ou 6° épouse, f 1540 sur l'échafaud. Il a laissé quelques écrits, entre autres une Vie des pontifes romains.

 

BARNEVELDT, Jean-Olden, né à Amers-foort 1549; grand pensionnaire de Hollande, magistrat intègre, négociateur habile, eut la gloire de conclure avec l'Espagne 1609 le traité qui assurait l'indépendance de son pays. Jaloux des libertés de la république il s'opposa aux entreprises ambitieuses de Maurice de Nassau, et se vit en butte aux attaques les plus violentes. Dénoncé comme hérétique au synode de Dordrecht, il fut condamné comme arminien; cela, et l'absurde accusation d'avoir voulu livrer la Hollande aux Espagnols, suffit pour le faire condamner à mort. Il fut exécuté 13 mai 1619 et subit avec fermeté l'injuste supplice; il mourait pour la liberté.

 

BARON ou Baronius, César, né 31 oct. 1538, à Sora, roy. de Naples, peut être considéré comme un des pères de l'histoire ecclésiastique catholique. Il étudia le droit et la théologie, vint à Rome avec son père 1557, en un moment de réaction politique et religieuse, se fît recevoir membre de la congrégation de l'Oratoire, dont il devint le général en 1593, s'adonna pour son instruction et son édification à la lecture des biographies chrétiennes et des ouvrages d'histoire ecclésiastique et finit par entreprendre le recueil auquel il a donné son nom. Il mit 30 ans à réunir ses matériaux. Pendant ce temps, chargé d'écrire une Histoire de l'Église en réponse aux Centuries de Magde-bourg, il fut plus d'une fois arraché à ses paisibles travaux par les honneurs que lui imposait la curie romaine dont il était la gloire. Il fut successivement nommé protonotaire du siège apostolique, confesseur de Clément VIII, cardinal 15 juin 1596, bibliothécaire, membre de la congrégation des rites et de la typographie du Vatican. Deux fois, après la mort de Clément VIII et après celle de Léon XI, il fut sur le point d'être nommé pape; les Espagnols firent échouer son élection, à cause de son écrit sur la Monarchie de Sicile. Il reprit joyeusement ses travaux littéraires, dormant 4 h. par jour, ne mangeant que ce qu'il faut pour vivre et f le 30 juin 1607, succombant sous le poids de ses occupations multipliées. Ses Annales eo clésiastiques, qui vont de l'an 1 à l'an 1198, sont moins une histoire qu'une chronique, une compilation et un ensemble de documents officiels; sauf quelques erreurs de chronologie et de critique, c'est un répertoire unique en son genre et que doivent consulter tous ceux qui veulent écrire l'histoire. Baronius ne fait pas de controverse directe; il s'en rapporte aux faits, qui lui semblent suffisants dès qu'ils sont établis par l'autorité de l'Église. Son ouvrage a été continué par Rainaldi et Laderchi. Anvers 1610,12 vol. f* (Le t. XI, où se trouve le traité sur la monarchie de Sicile, fut interdit par Philippe HI dans toute l'étendue de ses États). Lucques. 42 vol. fo 1738-1757.

 

BARSUMAS lo évêq. deNisibis, v. Nestoriens. — 2° archimandrite de Syrie, chef du parti eu-tychéen parmi les moines de Syrie, l'un des souliens les plus violents de Dioscore au concile des brigands d'Éphèse 449. f 458. Les jacobites lui prêtent plusieurs miracles.

 

BARTH, Chrétien-Gottlob, né 1799 à Stuttgart, étudia la théol. à Tubingue; pasteur à Mœtlingen, et depuis 1838 à Calw; auteur de plus de trente ouvrages populaires chrétiens, Hist. bibl. des missions, Journal pour la jeunesse, Géogr. bibl., Poésies, etc. Un des plus ardents soutiens de l'œuvre des missions et d'une Société de traités, f 1862. Chrétien èvangélique, il était aussi théosophe, publia des extraits de Bengel et d'OEtinger et croyait au rétablissement final.

 

BARTHÉLEMITES 1<> Moines arméniens de l'ordre de saint Basile, accueillis à, Gènes 1307, où ils se bâtirent une église qu'ils consacrèrent à saint Barthélémy. Clément V leur permit de célébrer leur culte d'après leur rite. Ils fondèrent plusieurs couvents en Italie et prospérèrent quelque temps. Mais leur nombre étant Venu à diminuer notablement, Innocent X les supprima 1560.

Clercs séculiers vivant en commun, ils tiraient leur nom de Barthélémy Holzhauser, né 1613 à Langenau, consacré prêtre 1639, puis chanoine à Salzbourg, où il fonda un ordre, ou espèce de séminaire, dont la réputation fut bientôt si solidement établie que l'év. de Coire 1644 ordonna à ses doyens de s'y faire affilier; <joe les évéques de Ratisbonne, Osnabrtlck et Mayence, 1653-1654, ne voulurent d'autres prêtres que ceux qui y avaient été élevés; que la Hongrie, l'Espagne, ta Pologne y recrutèrent également leur clergé. Le nonce à Cologne appelait les règles de Holzhauser « la moelle des canons. » Les services rendus par cet ordre lui valurent la protection de Léopold et d'Innocent XL Holzhauser f 1658, doyen et curé à Bingen. Son œuvre tenait à sa personnalité et périclita rapidement après lui; en 1795 l'ordre avait cessé d'exister.

 

BARTHÉLÉMY 1<> Apôtre. — 2o de Bresce, prof, de droit canon à Bologne, connu surtout par ses Comment, sur le décret de Gratien 1236, et par quelques autres écrits sur le droit. — 3° Barth. de Las Casas, v. Casas. — 4° l'abbé J.-J. Barthélémy, auteur du voyage du j. Ana-charsis, 1716-1795, savant dans les langues orientales, s'est peu occupé de théologie. — 5* Barthélémy des Martyrs, célèbre év. portugais, l'un des hommes les plus pieux et les plus considérés de son temps et de son Église. Né 1514 à Lisbonne, baptisé dans l'église N. D. des Martyrs, d'où lui vient son nom. Il entra à 14 ans dans l'ordre des dominicains, fut précepteur de don Antonio, neveu du roi Jean III, fut nommé archev. de Braga 1559, se montra zélé partisan d'une réforme, soit au conc. de Trente, soit dans son diocèse; fonda un séminaire de prêtres, réunit un concile provincial 1566, ouvrit des hospices pour les malades et pour les pauvres, déploya le plus grand dévouement pendant la peste et la famine 1567-1575, et obtint de Grégoire XIII la permission de se démettre de, tous ses honneurs et fonctions 1582. Il se retira dans le couvent de Viana, et

I 1590 en odeur de sainteté. Il a laissé plusieurs commentaires, un catéchisme, un Com-pendium de la vie spirituelle, les Devoirs des év. de Rome, 1727. 2 vol. f* éd. d'Inguimbert.

 

BARTHÉLÉMY (Massacre de la Saint-). Cette exécution collective des réformés de France, précédée par les exécutions d'Amboise, par le massacre de Vassy, par la tentative contre Co-ligny, peut-être par la mort de Jeanne d'Albret et par d'autres essais criminels, fut décidée par la cour de France sous les auspices de Catherine de Médicis et de Charles IX. Elle commença dans la nuit du samedi au dimanche 24 août 1572, jour de la fête de saint Barthélémy. Parmi les complices de ce massacre se trouvaient les ducs d'Anjou et de Nevers, Henri d'Angou-lême, le maréchal de Tavannes, René de Bira-gue, Albert de Gondi, le duc de Guise, etc. Les assassins avaient pour signe de ralliement une écharpe au bras gauche et une croix blanche au chapeau. La plupart des chefs de la réforme avaient été attirés et retenus à Paris sous prétexte des noces du prince de Béarn avec la sœur du roi, Marguerite. Plusieurs d'entre eux se méfiaient des faveurs dont ils étaient comblés: les catholiques au contraire s'en irritaient; le légat du pape s'en plaignit ouvertement, et le roi dut le calmer en lui disant: • S'il m'était permis de m'expliquer davantage sur tout ce que je sais ! Dans peu le succès obligera le pape à louer mes desseins, ma piété et mon zèle ardent pour la religion. • Les massacres commencèrent dans presque toute la France le dimanche au point du jour,à Paris dès 2 h. du matin. Les têtes les plus illustres tombèrent dans cette affreuse boucherie. Coligny, Téligni, Pardail-lan, Piles, Caumont de la Force, Jean Goujon, Ramus, La Rochefoucault, Soubise, Brion, La Place, etc. Ces égorgements se prolongèrent pendant 8 jours à Paris et dans la province. Pé-réfixe, archev. de Paris, compte qu'il n'y eut pas moins de cent mille personnes ainsi assassinées; à Paris même, plus de 4000; les plus notables furent exhibés au gibet de Montfaucon,

II y en aurait eu davantage encore si plusieurs commandants de province n'eussent refusé d'obéir, les uns sous prétexte qu'ils ne pouvaient croire que ce fussent les ordres du roi, d'autres alléguant qu'ils avaient sous leurs ordres des soldats, mais point de bourreaux. II est difficile de fixer exactement le nombre des victimes; les uns le réduisent à 60,000, les au-très le portent à plus de 200,000; évidemment on n'a pas osé faire la statistique de cette monstruosité inouïe dans l'histoire. Le roi de Navarre et le prince de Condé furent épargnés, comme princes du sang, ce que Philippe II regretta beaucoup. La nouvelle de ces horreurs se répandit rapidement. En France on frappa des médailles d'or et d'argent en l'honneur du roi. A Rome la joie tint du délire; on chanta des Te Deum, on tira le canon du château Saint-Ange, on alluma des feux de joie, on multiplia les glorieuses inscriptions, on frappa une médaille à l'effigie du pape, avec un ange frappant les protestants, et ces mots: Hugonotorum Strages 1572. — Une foule de questions critiques, historiques et politiques se rattachent à ce lugubre événement, une des hontes de la France et de la monarchie, qui trouva une expiation partielle dans les massacres de 1791 et de 1793. Les explications des écrivains catholiques ne réussiront jamais ni à pallier le crime, ni en atténuer les fatales conséquences. V. Qui-net, Michelet, Mignet, Soldan, de Félice, Coque-rel, Crottet, Bulletin du Prot. fir. 1856 et 1873.

 

BARTON, Élisabeth, dite la Sainte, ou la Vierge de Kent, jeune fanatique, ou visionnaire, qui parut en Angleterre au commencement de la réformation. Née vers 1500 dans le comté de Kent, elle entra comme religieuse au couvent du Saint-Sépulcre, à Cantorbéry, et passa de bonne heure pour avoir des révélations. Son confesseur, Richard Masters, l'exploita; elle fit des miracles et la chapelle d'Aldington devint un lieu de pèlerinage. Elle reçut de Marie-Madeleine une lettre en caractères d'or, et quand il fut question du divorce d'Henri VIII, elle s'avisa de prédire qu'il perdrait sa couronne et qu'il mourrait dans l'espace de 7 mois. L'év. Jean Fisher et le chancelier Thomas Morus furent ses dupes; ce dernier cependant finit par voir clair, mais ils n'en périrent pas moins l'un et l'autre, après que Henri VIII irrité de ces intrigues catholiques eut fait arrêter, juger et condamner à mort la nonne avec ses sectateurs, Masters, etc. avril 1534. Elle avoua la supercherie et en rejeta la faute sur ses savants complices, qui avaient abusé de son état maladif pour lui dicter des paroles, qu'ils mettaient sur le compte du Saint-Esprit.

 

BASILE lo le Grand, d'une ancienne famille chrétienne distinguée, né 329 à Césarée en Cappadoce; un des plus remarquables des pères de l'Égl. grecque. Son éducation fut confiée à un de ses parents, partisan de Grégoire Thaumaturge. Plus tard son père se chargea pendant quelque temps de son instruction, puis l'envoya successivement étudier à Césarée et à Constantinople. Ce fut dans cette dernière ville qu'il entra en relation avec le païen Libanius, qui professait pour lui la plus haute admiration. En 351, à Athènes, il reprit ses études, encore sous la dire tion de professeurs païens. Il y commença une liaison, qui dura toute sa vie, avec le célèbre Grégoire de Naziance. Il s'y lia également avec le prince Julien (plus tard J. l'Apostat) qui se prit pour lui d'une vive affection. En 356, de retour à Césarée. il se distingua comme professeur et avocat. Ce n'est qu'alors, sur les instances de sa sœur, qu'il se fit baptiser; il vendit tous ses biens et renonça au monde pour se donner à Christ. Il se retira, avec son ami Grégoire, dans une solitude sur les bords de l'Iris, Pont, et s'y livra avec lui à l'étude des saintes Écritures. Grégoire, d'un esprit plus actif et plus ardent que Basile, n'y resta pas longtemps. Basile, une fois seul, organisa la communauté monastique qui s'était groupée autour de lui dans sa propriété de la Basiliade, que Grégoire appelle une petite ville, et les règles qu'il établit servirent de modèle à presque tous les monastères de l'orient. Son éloquence attira des centaines et des milliers de chrétiens dans le silence des cloîtres. Mais il n'était pas au bout de sa carrière active. Il se mit à visiter les couvents de Syrie, de Mésopotamie et d'Égypte. Puis en 362, Eusèbe év. de Césarée, ayant besoin d'un homme éloquent et instruit, appela Basile auprès de lui, l'ordonna prêtre et le chargea de la prédication. Il y obtint de tels succès qu'Eu -sèbe jaloux lui suscita des embarras qui l'obligèrent à s'éloigner. Basile était depuis trois ans dans sa retraite auprès de Grégoire de Naziance, lorsque des dissensions s'élevèrent à Césarée; pour les apaiser on ne crut pouvoir mieux faire que de rappeler Basile. Celui-ci réussit par sa délicatesse et sa prudence à ramener la paix, et ce ne fut pas le seul service qu'il rendit. Lors d'une famine terrible, il plaida avec tant d'éloquence la cause des pauvres, que les plus riches s'empressèrent de leur venir en aide. Aussi, en 370, à la mort de l'évêque, ce fut Basile qu'on choisit pour le remplacer. Il avait contre lui plusieurs évêques du voisinage, mais il l'emporta, gr&ce à Grégoire de Naziance et à son père. Dès lors il se donna tout entier aux soins de son troupeau; l'exhorter, l'instruire, visiter les malades et les affligés, prêcher, fonder des institutions pour les malheureux, telles étaient ses occupations. Comme Ambroise de Milan et d'autres, Basile s'astreignit à un genre de vie sévère, pour pouvoir d'autant mieux venir en aide aux indigents. Et au rebours de tant d'évêques contemporains qui méritaient si bien le mot de son ami Grégoire de Naziance: « Lions auprès des petits, rampants auprès des grands, » Basile, si compatissant envers ceux qui souffraient, résistait courageusement aux injustices des puissants de la terre. C'est ainsi qu'il ne se fit nul souci de l'hostilité des évêques qui s'étaient opposés à sa nomination à Césarée; c'est ainsi qu'il résista au gouverneur de la ville, lequel, voulant épouser une femme, l'avait arrachée de force au temple où elle avait cherché un refuge contre ses obsessions. Le peuple, admirant le courage de son évêque, voulait massacrer le gouverneur, et l'aurait fait, sans l'intervention de Basile. Celui-ci eut aussi à lutter contre les hérésies d'Anus et d'Apollinaire; modéré dans ces débats, il s'attira les inimitiés de quelques orthodoxes; mais il finit par se les concilier à force de douceur et de patience. f 1er janvier 379, après 9 ans d'épisco-pat, pleuré et regretté de tous, des païens comme des chrétiens. Basile est le fondateur du plus ancien des ordres religieux, celui qui porte son nom. Il l'avait établi et organisé en 358 dans les solitudes du Pont, sur le fleuve Iris, en face d'une communauté de religieuses fondée par sa sœur. La règle qu'il y établi tétait, eo thèse générale, moins sévère que celle de Benoît en occident; il n'établit pas la perpétuité des voeux; il n'admettait les enfants qo'avec l'autorisation de leurs parents, et les esclaves avec celle de leurs maîtres; les personnes mariées ne pouvaient entrer dans la communauté qu'avec le consentement des deux conjoints; l'étude et le recueillement y étaient strictement observés; les travaux manuels, moins recommandés qu'en occident, étaient surtout ceux de l'agriculture; quant à la nourriture et aux vêtements, ils devaient être de la plus grande simplicité. Basile fit aussi une règle pour les communautés de femmes. Malheureusement l'ordre déclina pendant les ténèbres du moyen âge et Grégoire XIII dut le réformer en 1579. Plusieurs savants en sortirent, entre autres Bessarion et Barlaam. Basile a beaucoup écrit, mais plusieurs de ses ouvrages sont perdus. Ceux qui restent dénotent un talent rare. U a du charme, du coloris, de l'élégance, de l'imagination. Ses Lettres sont particulièrement intéressantes; il y en a 428; puis viennent ses Homélies (l'Hexamèron), ses traités ascétiques (Moratia), des Comment, sur les Écritures, et divers écrits contre les hérésies. H. B.

2® Basile, médecin, fut appelé par l'influence d'Eusèbe, à l'évéché d'Ancyre 336, et devint l'un des chefs des semi-ariens, qui prirent de lui le nom de basiliens. Les ariens stricts le firent déposer 360. Ses écrits, contre Marcellus d'Ancyre et sur la virginité, sont perdus. Il était instruit et éloquent.

3° Basile, év. de Séleucie en Isaurie, connu surtout par ses hésitations dans les controverses eutychiennes. Au concile de Constantino-ple 448, il fut contre Eutyches; il fut pour au concile des brigands, Éphèse 449; le concile de

Chalcédoine 451 le déposa pour ce fait, mais il obtint le retrait de cette sentence en assurant qu'à Éphèse il avait dû céder à la violence. Il reste de lui 40 sermons, une Vie de Thécla et une Notice sur ses miracles; impr. Heidelberg 1596 et 1605, Paris 1622. Il n'est cependant pas sûr que les écrits sur Thécla soient de lui.

4° Basile, le Bogomile, v. Cathares.

 

BASILIDES, gnostique célèbre, né dans le l«r siècle, vécut sous Adrien et t vers 125 ou 130. Épiphane le fait originaire de Syrie. U enseigna en Égypte et en Perse. C'est à Alexandrie qu'il se forma et qu'il conçut l'idée de son système. Isidore, son fils, chercha à le compléter par ses écrits. Sa doctrine nous est surtout connue* par Clément d'Alex., Irénée, Épi-phanes et Hippolyte, l'auteur des Philosophou-mena. A la base de son système se trouvent le dualisme et une doctrine d'émanations. Dieu et la matière sont éternels. Le Dieu suprême, ineffable, est un abîme incompréhensible; il se manifeste par 7 forces, dont 4 intellectuelles: l'esprit (noûs), le verbe, l'intelligence, la sagesse; une force effective, la force, dynamis; et 2 forces morales, la justice et la paix. Dieu et ses 7 Eont forment l'octave parfait. De ce premier royaume des esprits, il en émane un second, un peu inférieur, et ainsi de suite jusqu'au 365«ne, tous habités par des intelligences de différents degrés; notre monde a été créé par des intelligences du dernier ordre, ce qui explique la présence du mal au milieu de nous. C'est le Dieu manifesté de cette manière que Basilide explique par le symbole, ou talisman d'Abraxas, dont les lettres additionnées font 365. Du mélange de l'esprit avec la matière naquit la disharmonie, et partout « la rouille est attachée au fer. > Il n'y a rien de mort dans la nature, pas même les pierres. L'âme sera purifiée en passant successivement de la pierre dans la plante, puis dans l'homme jusqu'à Dieu. Le premier ange du 365®e ciel, VArchôn est le créateur du monde. Les créatures auraient pu s'élever jusqu'à lui, mais le Dieu souverain voulant nous élever plus haut encore et nous rapprocher de lui, le noûs s'unit au baptême dans l'homme Jésus. Quand l'archôn le vit pour la Ire fois il fut effrayé; il avait cru être le plus grand sur la terre et il voyait des hommes capables de s'unir au noûs; il les laissa librement sortir de son royaume. Tout péché doit être expié et l'homme Jésus dut mourir pour les siens. Quant à la morale, Épiphane et Irénée le font ennemi de la vertu, en lui attribuant l'abus que quelques-uns de ses disciples ont fait de sa doctrine; il semble au contraire, d'après Clément d'Alex, qu'il se faisait de la vertu un idéal très élevé, mais dont l'ascétisme n'excluait pas nécessairement le mariage. Basiiides regardait l'homme comme un petit monde, réunissant toutes les qualités et tous les défauts du grand. Mais il lui donnait trop de force pour résister au mal. Il admettait 2 états de vie intérieure, la prière avant le combat, et l'action de grâces après la victoire. Il avait rédigé un évangile, qui est perdu. Il eut beaucoup de disciples, qu'on appela basilidiens; le plus célèbre fut Marcion.

 

BASILIENS, v. Basile.

 

BASILIQUES io Collection d'ordonnances publiées à diverses époques par les empereurs romains et destinée d'abord à l'orient. La première fut faite par Justinien 528-535, en latin, puis traduite en grec. Les traductions et les abrégés qui en furent faits altérèrent peu à peu le texte, et il fallut aviser à une rédaction authentique. L'emp. Basile le Macédonien s'en occupa, pour fixer la législation 878; puis Léon VI le Philosophe 886 y mit la dernière main, en s'entourant de savants autorisés. Ce dernier recueil, divisé en 60 livres, comprend en outre tout le corps du droit romain, les Institutes, le Digeste, le Code, etc. On sait, mais sans autres détails, que Constantin Por-phyrogenitus fit procéder vers 911 à une nouvelle re vision.

2<> L'antiquité désigna longtemps sous ce nom, qui signifie royal, tous les monuments publics d'une étendue considérable et d'un aspect grandiose, quelle que fût d'ailleurs leur destination; ainsi les palais où se rendait la justice, les constructions couvertes destinées aux marchés et au monde des affaires. Il y en avait à Rome un grand nombre. Leur architecture était en général fort simple; à l'extérieur une longue suite de fenêtres à plein cintre; à l'intérieur deux rangées de colonnes dans le sens de la longueur; à l'extrémité un hémicycle où siégeait le président. Lorsque les chrétiens furent admis à célébrer leur culte en public, avec la protection des empereurs, ils s'emparèrent des basiliques dont la forme était appropriée à leur culte et qui n'avaient pas été profanées par l'adoration des faux dieux, et depuis le jusqu'au 9m« siècle, l'architecture chrétienne ne s'éloigna guère de ce style emprunté aux Grecs et aux Romains. L'hémicycle devint naturellement le chœur; l'espace compris entre les colonnes fut la grande nef; à droite et à gauche, les bas côtés. En souvenir de la croix on ajouta deux nefs transversales, le transept ou les croisées. Des galeries supérieures furent ajoutées, appelées travées, pour augmenter le nombre des places, plutôt que comme ornement, quoiqu'elles servent aussi à l'ornementation. En face de l'autel, les places des membres du clergé, ou presbyterium. Les néophytes non baptisés, qui n'avaient pas le droit de pénétrer dans l'église, se tenaient dehors sous le porche (atrium ou narthex), sur une petite place que l'on appelait, et que l'on appelle encore parvis, et où étaient primitivement le bénitier et le baptistère, aujourd'hui transférés à l'entrée de l'église. Au moyen âge on réserva plus particulièrement le nom de basiliques pour des églises desservies par des moines, ou pour des monuments royaux.-Aujourd'hui on l'emploie surtout en parlant de grandes cathédrales, celles de Saint-Pierre, de Saint-Paul, etc.; le mot appartient au style élevé.

 

BASNAGE, famille noble de Normandie, qui a fourni à l'Église plusieurs illustrations:

1° Basnage, pasteur à Norwich, puis à Ca-rentan, Normandie.

2° Son fils, Benjamin Basnage, né 1580, pasteur à Carentan, représentant de sa province à la plupart des synodes de son époque. Il avait été délégué en Angleterre et en Hollande 1621 pour « avertir les pays étrangers de la persécution. > Louis XIII ne l'aimait pas et essaya, mais en vain, d'empêcher son admission à l'assemblée de La Rochelle. Modérateur au synode d'Alençon 1637, il résista énergiquement au commissaire du roi, Saint-Marc, qui voulait l'obliger à mettre en tête du cahier des plaintes les mots de religion prétendue réformée, f 1652. Il a laissé un traité: De l'état visible et invisible de l'Église, etc., contre la fable du Purgatoire. La Roch. 1612.

3° Antoine, son fils, sieur de Flottemanville, né 1610, pasteur à Bayeux 1637, arrêté 1685, emprisonné au Havre, déporté en Hollande. Nommé pasteur à Zutphen, f 1691. Il eut deux fils; François, le plus jeune, suivit la carrière des armes et f 1685; l'autre fut

4° Samuel, né à Bayeux 1638, desservit cette église avec son père jusqu'en 1685, l'accompagna en Hollande, lui succéda à Zutphen, et f 1721. Il a laissé des Exercices critico-historiques, in-4° qui sont une critique ingénieuse et savante des Annales de Baronius; des Annales politico-ecclésiastiques depuis Auguste jusqu'à Phocas, un peu diffus, mais recommandable par son exactitude; enfin une Morale théol. et politique sur les vertus et les vices de l'homme, Amst. 1703, 2 vol. in-12, où il essaie de séparer la morale de la dogmatique, sans arriver toutefois à des conclusions bien satisfaisantes; son analyse des vices et des vertus est la meilleure partie de l'ouvrage.

5° Henri, oncle du précédent, second fils de Benjamin, et frère d'Antoine; né 16 oct. 1615, t à Rouen 20 oct. 1695: avocat distingué du barreau de Rouen, généralement estimé, fut en 1677 commissaire pour les affaires de la religion, montra beaucoup de zèle, et cependant ne fut nullement inquiété lors de la Révocation. A écrit un Traité des hypothèq. et des Comment, sur les contâmes du pays et duché de Normandie. Il eut une fille qui épousa Paul Bauldri, prof, d'hist. eccl. à Utrecht, et 2 fils:

6® L'alné, Jaques, né à Rouen le 6 ou 8 août 1653, dit de Beau val, étudia la théologie successivement à Saumur, Genève et Sedan. Nommé pasteur à Rouen 1676, il fut chargé en 1679 du sermon d'ouverture du synode de Saint-Lô. En 1684 il épousa Suzanne Du Moulin, fille du pasteur de Chateaudun et petite fille du célèbre Pierre Du Moulin. Travailleur infatigable il s'occupait surtout d'études historiques et acquit bientôt la réputation d'un savant consommé. Son église ayant été supprimée en 1685, il obtint par la grâce du roi la permission de s'exiler en Hollande, où il fut nommé pasteur de Rotterdam 1691, et en 1709 pasteur de Lia Haye. II avait de grandes aptitudes comme homme d'État: l'observation est de Voltaire; il réussit dans plusieurs négociations importantes dont il fut chargé par le grand pensionnaire Heinsius, et rendit des services signalés à l'abbé Dubois 1716 quand celui-ci vint à La Haye pour y négocier le traité de la triple alliance; il en fut récompensé par la restitution de ses biens. Historiographe attitré des États-Généraux il écrivit les Annales des Provinces-Unies, 2 vol. f°, auxquelles on ne reproche que son ardent patriotisme pour la France. Il eol plusieurs fois à intervenir par ses conseils dans les affaires des religionnaires français; il blâma l'insurrection des camisards, ce qui acheva de le mettre mal avec son ancien professeur et beau-frère Jurieu. Il recommanda Antoine Court au cabinet du Palais-Royal, et adressa à ses coreligionnaires une instruction pastorale qui fut imprimée à Paris par ordre de la cour et répandue à profusion dans les prorinces. Accablé par les fatigues encore plus que par l'âge, il dut dans ses dernières années concentrer toute son activité sur ses fonctions d'historiographe et sur la correspondance qu'il entretenait avec les princes, les magistrats et les savants de toutes les parties de l'Europe, f 22 déc. 1723, ne laissant qu'une fille, mariée au conseiller de La Sarraz, et dont le petit-fils était naguère ministre d'État du roi des Pays-Bas. D'un caractère affable, généreux et plein de droiture, il fut aimé et regretté même de ceux dont il était l'adversaire politique ou religieux. Il a laissé de nombreux ouvrages, Sermons, Entretiens sur la religion, Traité de la conscience, Lettres pastorales, livres de controverse, Notes sur lfA. et le N. T. etc. Les plus considérables sont, outre les Annales des Prov.-Unies, son examen des méthodes proposées pour la réunion des protestants avec l'Égl. rom.; son Traité des préjugés, son Traité de la communion, très apprécié même des catholiq.; son Hist. deségl. réformées, Rotterd. 1690; son Hist. de l'Égl. depuis J.-C. jusqu'à présent, etc. Enfin la Biblioth. nationale de Paris possède un mss. de lui, en latin, sur la République et cité de Genève, intéressant pour l'histoire des réfugiés. V. Haag.

7<> Henri, second fils d'Henri (5°) né 7 août 1656 à Rouen, f 29 mars 1710 à La Haye; reçu avocat à 20 ans, se fit une brillante réputation à Rouen, mais dut quitter la France à la Révocation et se rendit en Hollande 1687. Il a laissé un Dictionn. universel, 3 vol. f&; un livre sur la Tolérance des religions, et plusieurs écrits polémiques, notamment contre Jurieu, avec qui il ne se réconcilia que sur son lit de mort. — La maison des Basnage est marquée par un marbre à Rouen, rue de l'Écureuil.

 

BASTHOLM, Dr en théol. né 1740, t pasteur à Copenhague, prédicateur de la cour, et inspecteur de l'académie des cadets; auteur de plusieurs écrits sur l'histoire juive, les doctrines philosophico-religieuses des anciens peuples, l'amélioration du culte public, la religion naturelle, etc. Une certaine indécision dogmatique l'a empêché d'exercer l'influence à laquelle ses talents et son érudition lui auraient donné des droits.

 

BATH-KOL, fille de la voix, c.-à-d. de la voix de Dieu, mode de révélation que les talmu-distes rattachent à certaines manifestations de l'A. et même du N. T. Ce serait comme l'écho d'une voix venue du ciel. Les rabbins admettent qu'entre les temps des prophètes et leur époque, il y a une différence, et que cette différence se traduit aussi et surtout par une révélation moins distincte de la volonté de Dieu; ils n'ont plus la prophétie, mais il reste encore une certaine voix, un esprit, un souffle, quelque chose d'analogue à ce qui est mentionné Deut. 4, 12. 36. 1 Rois 19, 13. Matt. 3, 17. 17, 5. On pourrait l'appeler intuition, pressentiment, seconde vue, ou voix intérieure: ce n'est plus la prophétie proprement dite, mais c'est l'accomplissement de cette parole: Dieu, ne s'est jamais laissé sans témoignage, Act. 14, 17. A chacun de comprendre quand Dieu lui parle, et de saisir les appels les plus indirects, qui peuvent être pour lui, sous une apparence fortuite, la voix du ciel. Ainsi quand Augustin entendit à Milan les enfants chanter: Prends et lis.

 

BAUER, Bruno, né 6 septembre 1809 à Ei-senberg, Saxe-Altenbourg, fils d'un peintre sur porcelaine, étudia à Berlin où il professa quelque temps, puis fut nommé 1839 prof, extraordinaire à Bonn, où il brilla comme un des coryphées de la gauche hégélienne. Sa critique négative, dirigée en 1840 contre l'évang. de

Jean9 puis contre les synoptiques, lui valut l'interdiction de continuer son enseignement. II ne voyait dans les récits bibliques que des inventions arbitraires, sans fondement et pleins de contradiction. 11 revint à Berlin en 1842, fit imprimer à Zurich en 1843 son christianisme dévoilé, qui fut poursuivi même par le gouvernement libéral de ce canton. Il s'oppose à l'émancipation des juifs, et se montre partisan en politique du système césarien. En 1850 il publie sa critique des Lettres de Paul, et va plus loin que l'école de Tubingue en niant l'authenticité de ses principales épîtres. Schwartz voit en lui la victime d'une logique enragée, f à Rixdorf 10 avril 1882, à peu près oublié de ses contemporains, qu'il méprisait.—Outre son frère Edgar, qui partageait les mêmes idées, il faut nommer encore Aurel-Reinhard-Egin B. qui, après avoir été pasteur catholique-allemand à Dresde, rentra en 1849 dans l'église protestante; auteur d'écrits populaires sur les réformateurs; et Georges-Laurent B., prof, de théol. à Altdorf et Heidelberg, rationaliste, auteur d'une Théol. de l'A. T., d'une Mythologie de l'A. et du N. T., d'Antiquités hébraïques, etc.

 

BAUMGARTEiV, Sigismond-Jaques, né 1706 à Wollmirstâdt, f à Halle 1757, théologien allemand qui peut être considéré comme formant la transition entre l'école de Spener et de Franke et le rationalisme moderne, sans qu'on puisse toutefois lui reprocher ni hésitation, ni tergiversation, ni abandon de la foi chrétienne. Mais il maintint les droits et la nécessité de la science, contre les disciples successeurs de Spener et de Franke, qui paraissaient en faire bon marché. Élevé dans la maison de Halle, dont son père avait été directeur, il fit toute sa carrière à Halle, comme maître de latin, puis vicaire, professeur suppléant, pasteur et enfin professeur de théologie. Il obtint en cette qualité d'immenses succès et ne compta jamais moins de 3 à 400 élèves. Doué d'une grande facilité de travail et d'une vaste érudition, il a composé beaucoup d'ouvrages dont la plupart n'ont été publiés qu'après .«a mort: les 16 premiers volumes d'une Hist. univ., un abrégé de l'Hist. de l'Église, une Dogmatique chrétienne en 3 vol.; une Dissertation sur la conversion non instantanée, en réponse à quelques exagérations, etc. Sa vie a été écrite par Semler. — Son frère plus jeune, Gottlieb, 1714-1762, se distingua dans la philos, et les beaux-arts.

 

BAUMGARTEN - CBUSIUS, Louis - Fréd. -Ot-ton, né 31 juilL 1788 à Mersebourg, fils du pasteur et surintendant de la ville, qui avait joint à son nom celui de son beau-père. Élevé dans la crainte de Dieu, il étudia d'abord à Grimma, puis à Leipzig, où il prit ses grades comme philologue, philosophe et théologien, et fut appelé en 1812 à léna, où il parcourut une brillante carrière. Il professa sur presque toutes les branches de la théologie, sauf l'histoire ecclésiastique, et exerça une bonne influence sur le séminaire. Il écrivit en faveur de la liberté religieuse et combattit vivement le rationalisme vulgaire. 11 se rapprochait des idées de Schleier-macher, et sur plusieurs points de Schelling. Ses travaux sur l'Hist. des Dogmes ont fait époque 1832-1840. f 31 mai 1843, d'une attaque d'apoplexie, laissant plusieurs ouvrages inachevés sur Jean, les synoptiques, les Romains, etc., qui furent cependant publiés 1844 par les soins de ses collègues et de ses élèves. Hase acheva son Hist. des Dogmes 1845. Sans avoir pris une position dogmatique bien tranchée, il resta toujours sur la base de l'Évangile, comme seule puissance de Dieu à salut.

 

BAUMGiERTNER, Augustin, ou Paumgart-ner, d'une famille noble de Bavière, né à Munich 1531, f chancelier à Landshut le 18 avril 1599; fit ses études à Ingolstadt et fut reçu docteur en droit. Il se distingua surtout au concile de Trente 1562, où il fut envoyé par l'archiduc Albert avec le jésuite Cavillon. Après avoir témoigné de tout son zèle pour la défense de l'Église catholique, il énuméra les dangers que lui faisait courir < la peste des novateurs, » et il entra dans le vif de son sujet en montrant comment les vices du clergé étaient la principale cause du succès des évangéliques. < Sur cent prêtres bavarois, une enquête récente Ta prouvé, il en est à peine 3 ou 4 qui n'aient pas de concubine, etc. » On lui répondit par des compliments et de vagues promesses; l'influence de Cavillon l'emporta au concile et dans le pays, où les jésuites regagnèrent bientôt le terrain qu'ils avaient cru perdu.

 

BAUR, Ferd.-Christian, le chef de l'école de Tubingue, né 21 juin 1792 à Cannstadt, étudia au séminaire de Blaubeuren où il passa en 1817 comme professeur; appelé à 1826 à Tubingue comme prof, de théol., il y resta jusqu'à sa f 2 déc. 1860. D'abord disciple de Schleierma-cher, il subit peu à peu l'influence de Hegel, et après avoir défendu la révélation, la résurrection de J.-C. et les faits évangéliques, il en vint à ne plus voir dans le christianisme qu'une des formes du développement religieux de l'humanité. Dans sa Symbolique et Mythologie 1824 on voit percer déjà cette tendance à rattacher la doctrine du Christ aux religions païennes, et dans le christianisme lui-même il distingue, dès son apparition, deux courants distincts, l'un judéo-chrétien, représenté par Pierre; l'autre gnostique, représenté par Paul. De là aussi une critique de tendance, qui lui fait classer les écrits du N. T. d'après le parti auquel ils appartiennent. Mais par la force des choses le conflit cesse, la Intte prend fin; les partis s'unissent pour résister au paganisme; il se fait entre eux une conciliation, un compromis, qui devient le catholicisme vers 170, et qui plus tard sera le protestantisme. Si les 4 grandes épîtres de Paul condamnent le judaïsme, l'Apocalypse prend sa défense, et les Actes cherchent à tenir la balance égale entre les uns et les autres; d'où il résulte, selon Baur, que les Actes appartiennent à une époque plus récente. Logicien impitoyable, Baur a pu faire l'expérience qu'en religion la logique ne suffit pas- Ses disciples eux-mêmes avouent qu'il a dû forcer certains textes pour les adapter à son système historique, et après l'avoir suivi avec enthousiasme dans son travail de démolition, ils se divisèrent quand il fut question de reconstruire. On peut dire que cette école a duré de 1842 à 1857; Strauss pour sa part concourut à la discréditer en exagérant ou en précipitant ses conclusions, mais si Baur a désavoué Strauss, qui faisait de Jésus un mythe, il s'est exposé lui-même au reproche de l'avoir pour ainsi dire laissé dans l'ombre, et d'avoir donné plus d'importance aux discours de ses disciples. On n'en doit pas moins reconnaître qu'il a rendu de grands services à la science théologique en élargissant ses cadres et en lui frayant des voies nouvelles. Son principal ouvrage est l'Histoire de l'Église dans les 3 premiers siècles. Il a publié en outre une revue, Theol. Jahrbucher, one dissertation sur le Parti de Christ (1 Cor. 1,12), le Manichéisme, la Gnose chrétienne, les soi-disant Épîtres pastorales, Doctrine de la Rédemption, Doctr. de la Trinité, Recherches critiques sur les Évang. canoniques, et une foule d'autres ouvrages, sans parler de plusieurs écrits posthumes qui ont de la valeur. Parmi ses disciples on compte Zeller et Schwegler, qui l'un et l'autre finirent par abandonner la théologie. C'est le prof. Beck qui inaugura la réaction contre l'intellectualisme pur de Baur.

 

BAVIÈRE. Cette contrée, encore presque déserte du temps de César, connue d'Auguste sous les noms de Norique et de Vindélicie, mais avec des frontières mal déterminées; peuplée au 5®e siècle de Boïes, ou Boïares, venus de Bohême, conquise par les Francs sous Dago-bert, se constitua en royaume indépendant 743 sous Odilon. Après une histoire des plus accidentées, tour à tour empire et duché, elle prit une certaine consistance homogène en 1507 sous Albert H, duc et électeur, et ne fut de nouveau érigée en royaume qu'en 1806. L'établissement du christianisme y date environ du 3m« ou du 4me siècle. Constantius y prêcha l'Évangile au commencement du 5*»©, et quand Séve-rin y arriva, vers 454. il trouva partout des temples et le culte organisé; il fut l'ange gardien de l'Église contre les barbares et contre l'arianisme. Au 8m* siècle c'est Boniface qui évangélise, et déjà de nombreux couvents et des évêchés prouvent que le christianisme a poussé de profondes racines. La Réformation fut d'abord bien accueillie du peuple, du clergé, des États du pays et du prince lui-même. Mais après la Diète de Worms, le duc Guillaume, réconcilié avec l'empereur, se tourna contre Luther et introduisit dans le pays l'inquisition avec toutes ses rigueurs; nombre de personnes furent brûlées; en quelques endroits, par humanité, on se contenta de les noyer; à Munich 29 d'un coup. Si quelques parties de la Bavière durent attendre le 19me siècle pour avoir un peu de liberté religieuse, certaines villes, comme Nuremberg. Augsbourg, Ratisbonne, Spire, furent plus privilégiées et adoptèrent la réforme, en tout ou partie, avec l'agrément ou par la protection spéciale des princes évangéliques. En 1549 le duc Guillaume appela les jésuites à son aide. Son successeur, Albert V, 1550-79, se montra d'abord assez modéré; il aurait voulu une réforme et appuya à Trente la communion sous les deux espèces et le mariage des prêtres, mais ne l'ayant pas obtenue il s'inclina devant les décrets du concile et devint un des plus ardents persécuteurs des protestants; il introduisit l'inquisition malgré les protestations des États du pays. Maximitien II obtint de l'empereur, après la guerre de Trente ans, le titre d'électeur, comme récompense de l'énergie qu'il avait déployée contre la réforme. Sous les princes suivants il y eut des alternatives de rigueur et de tolérance, jusqu'à ce qu'enfin, sous • Joseph II et le ministère de Monpélar la tolérance devint la règle, et qu'en 1818 la charte consacra les droits des protestants, tout en leur refusant le titre d'évangéliques. La Constitution actuelle de l'Eglise reconnaît le roi comme èvêque suprême, avec un synode général et des synodes diocésains. Erlangen possède une faculté de théologie protestante qui a parfois brillé d'un vif éclat.

 

BAVON, ou Bav, ermite, patron de la ville de Gand, + vers 650, avait mené d'abord une vie mondaine. Ayant reconnu plus tard un homme qu'il avait fait vendre comme esclave, il n'eut de repos que lorsque cet homme eut consenti à le punir de son crime en le battant, et en le faisant Conduire en prison après lui avoir rasé la tête.

 

BAXTER, Richard, né à Rowdon, Shrop-shire, le 12 nov. 1615, + à Londres le 8 déc. 1691; auteur du Repos éternel des saints, du Pasteur réformé, d'un Appel aux inconvertis, et de divers autres ouvrages. Son éducation fut incomplète, par suite de sa pauvreté et de sa mauvaise santé. Pasteur à Kidderminster 1640,

il se joignit, malgré son affection pour la famille royale, à l'armée parlementaire et devint 1642 le chapelain de Cromwell, cherchant à inspirer aux chefs et aux soldats un esprit dç modération. Il blâma sévèrement l'exécution du roi et le bannissement de sa famille. A la restauration il intervint pour amener une réconciliation entre les épiscopaux et les presbytériens, mais il échoua. L'acte d'uniformité fut promulgué en 1662, et Baxter dut quitter l'Église avec 2000 autres non-conformistes. Il se retira à Àcton, Middlesex, où il se consacra surtout à des travaux littéraires. L'Acte d'indulgence 1672 lui ayant rendu le droit de prêcher, il s'établit à Londres, mais fut de nouveau en butte aux tracasseries du pouvoir, et en 1685 il fut condamné par le lord chef de justice Jeffries à une amende et à la prison. En nov. 1686, après 18 mois de prison, il fut gracié par l'intercession de lord Powis, et termina en paix ses jours.

 

BAXTERIANISME. On désigne sous ce nom en Angleterre le calvinisme mitigé, dont Baxter était le représentant. C'est moins une école proprement dite, ou une secte, qu'une tendance. Dieu a bien élu un certain nombre d'hommes pour le salut, mais il n'en a point déterminé pour la condamnation.

 

BAY (Michel de), ou Bains, né à Mélin, Hai-naut, 1313, étudia à Louvain, où il se distingua par son zèle, son sérieux et sa piété. D'abord directeur d'un établissement de bienfaisance, il fut nommé en 1551 docteur et prof, provisoire de théologie à Louvain. Il substitua k la scolas-tique pélagienne des scotistes la doctrine de la Bible, des pères et de saint Augustin en particulier, sur la grâce, préludant ainsi aux controverses jansénistes. Le professeur titulaire, à son retour de Trente, s'écria que le diable seul avait pu introduire de pareilles nouveautés dans l'enseignement, et il obtint de la Sorbonne la condamnation de 18 de ses thèses. De Bay répliqua vivement et prouva par l'Écriture l'incapacité de l'homme pour faire le bien et l'impossibilité du salut par les œuvres. Ce qui rendait la lutte plus sérieuse, c'est que ces deux doctrines étaient précisément celles qui caractérisaient la Réformation. En dépit du légat papal, De Bay fut envoyé à Trente par Philippe II, ou plutôt par Granvelle, 1563, comme délégué du roi, et il se fit remarquer au concile par son éloquence et par son caractère, mais sans avoir eu l'occasion de mettre en avant ses vues particulières. A son retour la dispute commença. Ses adversaires ne purent obtenir sa condamnation par l'université de Louvain, mais après plusieurs tentatives ils réussirent à faire condamner par Pie V, bulle du 1** oct. 1567, 76 propositions tirées de ses ouvrages, comme reproductions adoucies des doctrines d'Augustin. En 1569 il publia un mémoire justificatif et prouva que les propositions qu'on lui imputait n'étaient pas de lui. La bulle n'en fut pas moins publiée, mais l'université de Louvain refusa de la recevoir, conserva à De Bay sa position, le nomma doyen, puis chancelier, quoiqu'il maintint que les évêques tirent leur pouvoir directement de Dieu. II fut même nommé inquisiteur général. Sixte Y lui fut plutôt favorable et se borna à imposer silence aux 2 partis, f 16 sept. 1589. universellement respecté. Ses ouvrages, presque tous polémiques, ont été publiés après sa mort par le bénédictin Gerbéron, 2 vol. 4°.

 

BAYLE, Pierre, né 18 nov. 1647, au Carlat, comté de Foix, d'une honorable famille de Montauban. Son père, Jean, Guillaume, ou Jacob, était pasteur au Carlat; + 30 mars 1685, laissant 3 fils: Jacob, qui fut le collègue de son père et fut enfermé dans un cachot où il mourut le 12 nov. 1685; Pierre, dont il est ici question, et Joseph, qui, après avoir étudié à Puy Laurens et à Genève, précepteur chez le marquis de Benac à Paris, f le 9 mai 1684. — Pierre, jusqu'à 19 ans, n'eut d'autre maître que son père. Il tomba deux fois malade, à Puy Laurens et à Saverdun. pour avoir trop travaillé. En février 1669 il se rendit à l'université de Toulouse, où, sous l'influence d'un jésuite, il abjura le protestantisme le 19 mars; mais au bout de 18 mois, comprenant qu'il avait fait une œuvre précipitée, ne pouvant admettre le culte de la créature, ni le mystère de la transsubstantiation; cédant aux raisons de son cousin Naudis de Bruguières et de son frère Jacob, il quitta Toulouse le 19 août 1670, abjura le 21, et partit pour Genève où il arriva le 2 sept. Nommé régent de seconde en 1671, puis précepteur à Rouen d'abord, et ensuite à Paris, il fut appelé comme professeur à Sedan en nov. 1675, et y resta jusqu'au moment où l'université fut fermée par arrêt du conseil, 9 juillet 1681. La ville de Rotterdam fonda immédiatement pour lui et pour Jurieu. deux chaires réunies sous le nom d'École illustre. Il venait de publier des Pensées diverses k l'occasion de la Comète qui parut en 1680, pour combattre le préjugé vulgaire qui voyait dans ces météores des présages effrayants. En 1682, il publiait à Amsterdam sa remarquable Critique de l'Hist. du calvinisme par Maimbourg. Il entreprenait en 1684 sa célèbre revue littéraire: Nouvelles de la républ. des Lettres, qui lui fit tant d'admirateurs et tant d'ennemis, et qui inaugura la véritable critique française. Enfin il parut en 1690 à Amsterdam, sans nom d'auteur un Avis important aux réfugiés sur leur prochain retour en France, qu'on attribua à Bayle quoiqu'il le désavouât, et qui était une fine et spirituelle critique du travail de Jurieu qui avait prédit pour 1689 la fin des persécnlions. Jnrieu irrité s'en prit à Bayle, et après trois années de répliques, de dupliques et de disputes peu édifiantes, Jurieu qui avait eu le dessous, mais qui avait pour lui la majorité du Consistoire, les préventions de Louis XIV et les terreurs chimériques de Guillaume d'Orange, obtint le 30 oct. 1693 que Bayle fût privé de sa charge et de son traitement, et qu'il lui fût interdit d'enseigner. Bayle qui avait des goûts modestes et à qui ses livres fournissaient le nécessaire, ne s'émut pas beaucoup de ces loisirs forcés, et des offres très avantageuses lui ayant été faites d'autre part, il les refusa, ne se souciant plus de s'exposer à ces « entremangeries professorales. » A partir de ce moment il se consacra tout entier à ses travaux littéraires, et notamment à la composition de son grand Dictionnaire historique et critique, dont il avait déjà publié le Projet en 1692, et dont la ire édition parut 1695-97. Il en a paru onze éditions, sans parler des abrégés, et des traductions en anglais et en allemand. Cet ouvrage aussi remarquable par la sagacité critique et par l'étendue des connaissances, que par l'agrément du style, par son bon sens et par son esprit plein de saillies, eut un immense succès et concilia à Bayle de nombreux admirateurs. Mais d'un autre côté certains passages obscènes, la recherche de la vulgarité, l'affectation d'an scepticisme outré, la complaisance avec laquelle l'auteur semblait mettre en relief les objections soulevées contre la Providence, la révélation, le christianisme et la doctrine évan-ffélique, lui suscitèrent des ennemis acharnés. A l'instigation de Jurieu, le Consistoire de Rotterdam chargea une commission de voir Bayle et de lui demander des explications. L'entrevue fat courtoise, et Bayle, après s'être justifié d'une manière générale, surtout quant à son intention d'attaquer les dogmes chrétiens, s'engagea à tenir compte des observations qui lui étaient faites, soit par des changements d'expressions, soit par des retranchements ou des additions. C'est ce qu'il fit en quelque mesure dans sa 2e éd. 1702, 3 vol. f°, mais, comme on le comprend, certaines modifications de détail ne pouvaient pas changer l'esprit général du livre, qui reste aujourd'hui, avec tout ce qu'il renferme de richesses, l'un des arsenaux les mieux fournis de la critique négative. Il semble que Bayle, se rappelant la double abjuration de sa jeunesse, ait voulu se mettre en garde contre toute affirmation prématurée et qu'il se soit infligé comme pénitence le Que sais-je? de Montaigne, dont il avait fait ses premières lectures, et dont il avait si mal profité. Il se défendit toute sa vie d'être un incrédule ou un athée; il ne cessa de remplir ses devoirs religieux; quelques-unes de ses pages trahissent une foi simple et vraie à l'Évangile, et c'est par l'esprit, et non par le cœur, qu'il se laissa entraîner souvent à faire ressortir les difficultés incontestables que présentent, pour la raison, certains faits ou certaines doctrines que l'Église elle-même déclare être des mystères incompréhensibles. Quoi qu'il en soit, et comme il touchait à tous les sujets, ses ennemis eurent beau jeu à détacher des fragments de son travail et à en poursuivre la condamnation. Jurieu, en particulier, après l'avoir dénoncé comme impie au Consistoire et au synode de Delft (qui n'y fit aucune attention), le dénonça au prince d'Orange, devenu roi d'Angleterre, comme ennemi de l'État et comme partisan secret de la France; il ne fallut rien moins que la protection de lord Shaftes-bury pour le mettre à l'abri de nouvelles persécutions. Bayle continua donc ses travaux, développant et complétant son Dictionnaire, et comme il lui restait un grand nombre de notes et de notices littéraires, historiques ou autres, qui ne pouvaient entrer dans son cadre, il les publia à part sous le titre de: Réponse aux questions d'un provincial, Rotterd. 1703-06. Le 28 déc. 1706 on le trouvait mort tout habillé dans son lit; il soufTrait depuis plusieurs mois d'une affection de poitrine, mais n'avait rien voulu faire pour la guérir; toujours sceptique. — La révocation de l'Édit de Nantes et les persécutions religieuses furent le seul point sur lequel il manifesta clairement ses opinions. Indigné de ces mesures iniques, auxquelles il dut en partie la mort de son frère, il écrivit en 1685: Ce que c'est que la France toute catholique sous le règne de Louis-le-Grand; et en 16186: Comment, philosophique sur ces paroles de J.-C.: Contrains-les d'entrer, ou Traité de la tolérance universelle. Il niait la compétence de l'État dans les questions religieuses, ce qui fit bien vite mettre son livre à l'index chez les catholiques; mais ses idées ne trouvèrent pas même grâce chez certains protestants, comme Jurieu, qui ne voyaient dans la tolérance qu'une indifférence déguisée. Ses œuvres diverses, presque toutes inédites, ont été publiées à La Haye 1727, par Des Maizeaux, 4 vol. f°. L'édition la plus récente de son Dictionn. est celle de Beuchot, 16 vol. 8°. 1820-24.

 

BÉÀRN (Le), province de France enclavée auj. dans le département des Basses-Pyrénées, faisait autrefois partie du royaume de Navarre. C'est sous le règne de Henri II d'Albret et de Marguerite sa femme, sœur de François que la Réforme s'y introduisit. Marot, Calvin, Mé-lanchthon, Lefèvre d'Étaples, Gérard Roussel trouvaient au château de Pau un accueil empressé et une retraite sûre. Marguerite, sans avoir franchement embrassé la religion réformée, écoutait cependant le prêche, chantait les

psaumes, et tolérait l'exercice du culte huguenot; les gens de la cour pouvaient y assister; les nouvelles doctrines se répandirent peu k peu de la cour dans la ville et de celle-ci dans les campagnes. Mais Antoine de Bourbon et Jeanne d'Albret, fille de Marguerite, favorisèrent d'une manière plus énergique le développement de la Réforme dans leurs États. Antoine s'était déclaré l'adhérent du calvinisme. Des ministres zélés, Vignaux, David, Boisnormant venu de Genève sur la demande expresse du roi, prêchaient publiquement, élevaient des temples nombreux; beaucoup de jeunes gens partaient pour la Suisse afin de s'y former aux fonctions du ministère. Lorsque Antoine, circonvenu par les intrigues de Catherine de Médicis, eut abandonné son parti, Jeanne d'Albret ne faiblit pas. Grâce à une sage administration, grâce aux efforts des prédicateurs toujours plus nombreux, un grand changement s'opéra dans le Béarn. L'Évangile se répandit comme une traînée de poudre d'un bout à l'autre de la province, sauf chez les Basques qui ne voulurent pas répudier leurs anciennes traditions. Mais dans le reste du pays, des districts entiers passèrent au protestantisme; les curés durent abandonner leurs par roisses. Un changement moral correspondit à ce changement religieux; par des lois souvent un peu sévères, Jeanne réprima la paresse, l'ivrognerie et la mendicité qui en est la conséquence. En 1566 fut fondée une Académie célèbre, d'abord à Lescar, puis à Orthez, où, sous les yeux de maîtres illustres, Viret, Nicolas des Gallars, Lambert Daneau, les jeunes Béarnais purent recevoir une éducation classique complète; la théologie, la philosophie, leur étaient enseignées aussi bieu que le latin et le grec; celte académie forma de nombreux pasteurs. Deux révoltes successives des seigneurs catholiques, 1569 et 1570, faillirent compromettre la é cause de la Réforme. Jusque-là les deux cultes avaient été tolérés et avaient vécu paisiblement côte à côte, et, chose inouïe au 16^ siècle, ils se célébraient parfois dans le même édifice. Mais Jeanne crut sa sécurité compromise, etaprèsavoir vaincu la révolte, elle interdit l'exercice public delà religion catholique; les revenus des prêtres et des moines furent affectés à des œuvres de charité et aux frais du culte; les couvents transformés en hôpitaux et en établissements d'instruction. Toutefois, cette interdiction dura peu. A la mort de Jeanne, son fils Henri, plus tard Henri IV, lui succéda, et sous son règne, même après qu'il fut monté sur le trône de France en abjurant, les huguenots n'eurent rien à craindre. Il n'en fut plus de même sous Louis XIII son fils et successeur. Malgré les protestations des notables et en particulier de Lescun, il proclama l'édit de réunion qui annexait le Béarn à

la France 1617, et à la tête d'une armée il entra dans sa nouvelle province, fit fermer les lieux de culte, chassa les pasteurs et rétablit le culte catholique. Ces mesures de rigueur ne suffirent cependant pas; car sous Louis XIV on voit Foucault dragonner le Béarn. La plupart des gentilshommes abandonnèrent la foi de leurs ancêtres ou s'expatrièrent. Cette foi se conserva pourtant de famille en famille dans mainte humble cabane, jusqu'au moment où elle put relever la tête, en recouvrant ses temples et ses pasteurs, 1789. Dans ce pays autrefois presque tout réformé il ne reste plus auj. que 4 à 5000 protestants, 8 églises et 16 annexes, qui composent la consistoriale d'Orthez. L. B.

 

BÉAT, ou Beatus, diacre d'Osma, au 8®e siècle, qui avec l'év. Etherius, s'opposa le plus énergiquement aux erreurs de l'Adoptianisme q. v., professées par l'archev. de Tolède.

 

BÉATIFICATION, v. Canonisation.

 

BEATON, David, né 1494, de la famille des comtes de Fife; élevé en France. Il remplaça son oncle, l'archev. de Saint-André, Écosse, quand celui-ci f 1539. Jaques V le nomma son garde des sceaux; il avait négocié le mariage de ce prince, d'abord avec Marguerite de France 1533, puis avec Marie de Lorraine 1538. Nommé cardinal la même année. A la mort du roi 1542, il se fit nommer légat du pape et grand chancelier de Marie Stuart, sous le nom et en l'autorité de laquelle il commit beaucoup de cruautés. Il est connu par la part qu'il prit au supplice de Wishart. A la fin sa tyrannie étant devenue insupportable, une conspiration se forma contre lui et il fut assassiné de nuit dans son château ✓ de Saint-André, 1546 ou 1547, peu de mois après Wishart.

 

BEAUMONT, François (de), baron des Adrets, né 1513 en Dauphiné, fit ses premières armes en Italie sous Lautrec, et fut nommé 1555 colonel des légionnaires du Dauphiné. Engagé dans une capitulation qu'il n'avait pas consentie, il réclama de d'Ailly auprès de François II la restitution du prix qu'il avait dû payer pour sa rançon, mais il fut débouté de sa demande par l'influence des Guise, qui n'aimaient pas en lui le protestant. Des Adrets, de son côté, tenait contre les Guise et pour la famille çoyale, Catherine et François; comme religionnaire il était surtout en rapports avec le prince de Condé, et c'est de lui qu'il prétendait tenir ses pouvoirs. Ayant appris les cruautés commises k Valence par le gouverneur de cette ville, la Motte-Gon-drin, et le soulèvement du peuple indigné de tant d'horreurs, 1562, Des Adrets accourut de Lyon avec une troupe d'insurgés, assiégea Gon-drin, mit le feu k l'hôtel où il s'était réfugié, et fit mettre à mort tous ceux qui essayèrent de s'enfuir. Le baron fit ensuite de Valence son

quartier-général; il reçut de Condé le titre de son «lieutenant en l'armée chrétienne, assemblée pour le service de Dieu, » interdit l'exercice du culte catholique dans le Dauphiné et commença pour la délivrance des églises opprimées une série d'expéditions où il se signala par la vigueur et la vertigineuse rapidité de ses manœuvres, par la hardiesse de ses entreprises, par Theureuse chance qui les couronna, non moins que par le caractère implacable de ses représailles. Il avait sous ses ordres des soldats qui avaient à venger leurs pères, leurs frères, leurs femmes, leurs amis, impitoyablement massacrés, volés ou déshonorés depuis des années, pt il ne lui fut pas toujours facile de calmer cette soif de vengeance. Il avait d'ailleurs coutume de dire que « le seul moyen de faire cesser les barbaries des ennemis est de leur rendre des revanches, » et que « pour réduire les catholiques aux lois de la bonne guerre, il fallait leur faire voir que les réformés savaient faire la mauvaise aussi bien qu'eux. » Personne sans doute ne songera à justifier Des Adrets des cruautés qui ont déshonoré ses victoires, mais il faut, pour le juger, se placer au point de vue de son temps et des circonstances où il se battait, se rappeler qu'il avait contre lui le féroce bourreau Montluc, se rappeler aussi qu'il ne faussa jamais sa parole, et que lorsqu'il avait promis à une garnison la vie sauve, il ne se crut pas, comme Montluc, autorisé par sa religion à violer les engagements pris. «Après Valence, Des Adrets entra à Lyon, où il proclama la liberté de conscience, et plaça la ville sous la garde de 2000 protestants; puis à Grenoble, où le culte réformé fut célébré le 3 mai 1562; puis à Vienne, avec le concours du magistrat Gabet. A la nouvelle des massacres d'Orange (5 juin), dont Varillas dit « qu'on n'avait jamais eu pareil exemple chez les chrétiens, » Des Adrets quitte Grenoble, se rend à Montélimar et à Pierrelatte où il rassemble en bâte 3 à 4000 hommes, dont 300 échappés aux massacres, et il fond sur la ville. La garnison épouvantée se réfugie dans le château et demande à capituler; mais ceux d'Orange, dit Brizard, furieux du massacre de leurs concitoyens, enfoncent les portes, fondent sur l'ennemi et ne font aucun quartier; les uns sont précipités du rocher, les autres passés au fil de l'épée. Des Adrets marche ensuite sur Bourg et Pont-Saint-Esprit, où il met des garnisons; sur Boulène, qui résiste et est mis à mort. Il revient sur Grenoble qui s'est soulevée, qui capitule à son approche, et qu'il épargne sans qu'il y ait eu ni sang versé, ni aucun désordre commis. Il traverse Lyon, dont il change le gouverneur, et marche sur Montbrison qu'il enlève avec sa furie ordinaire, 16 juillet. La garnison ayant tenté de résister, est passée par les armes; ceux qui ont échappé sont contraints de se précipiter du haut de la citadelle et Des Adrets s'amuse de ce jeu infâme. De retour à Lyon il apprend que le seigneur de Soubise vient d'y arriver, 19 juillet, comme lieutenant-général du prince de Condé. A cette première mortification s'en ajoute une seconde sous la forme d'observations sur sa conduite. Des éloges exagérés n'empêchent pas le baron de sentir l'amertume des reproches qui lui sont adressés; on lui recommande un peu plus de douceur envers les vaincus. Dissimulant son irritation il se prépare à rentrer en campagne, et remporte de nouveaux succès sur les bords du Rhône, jusqu'à Sorgues, mais il échoue devant Carpentras et doit ramener à Valence ses troupes harassées. Il laisse succomber Siste-ron, vole au secours de Montpellier, mais sans succès; veut courir au secours de Vienne, de Grenoble et de Lyon, mais se laisse surprendre par Nemours, et comprend que son étoile a pâli. Lui-même, froissé peut-être dans son amour-propre, n'a plus le feu sacré. Il s'abouche avec Nemours, et sous prétexte qu'il a toujours été au service du roi contre les Guise, il cesse d'être le chef des protestants pour n'être plus que le serviteur de la monarchie. Nemours attise dans son cœur le mécontentement en exagérant la sévérité avec laquelle il est jugé dans son propre parti, et après de longues et laborieuses négociations, après une courte captivité à Montpellier et à Nîmes, il rompt avec les protestants, reconnaît qu'il a traité avec Nemours, non par cupidité, mais « par vengeance et après l'ingratitude redoublée, « et se retire dans sa terre de La Frette 1563, où il abjure en apparence le protestantisme. Sa carrière comme chef huguenot avait à peine duré une année. Il reprit du service en 1567, mais les catholiques n'eurent jamais pleine confiance en lui; il fut même emprisonné comme suspect, et l'édit de pacification le tira seul du danger; le roi même lui rendit sa faveur. De Thou le vit à Grenoble en 1571, vieux, maigre, mais vigoureux et l'air d'un véritable homme de guerre. Après la Saint-Barthélemy, Des Adrets qui était resté protestant de cœur demanda sa retraite: il refusa 1577 d'entrer dans la Ligue, et f 1586 après avoir fait acte de catholicisme, ayant perdu la confiance des uns sans réussir à gagner celle des autres. Il fut enterré dans une chapelle de l'église paroissiale. Il avait survécu à ses 3 fils et ne laissa que 2 filles.

 

BEAUSOBRE, Isaac, né à Niort 1659, f à Berlin 1738. Savant ministre protestant, élève de Saumur, il était pasteur à Châtillon-sur-Indre quand la persécution éclata. Son église fut fermée; il brisa les sceaux qui y avaient été apposés, et dut s'enfuir. Il se rendit d'abord en Hollande, puis à Dessau auprès de la princesse d'Auhalt, où il écrivit sa Défense de la doctrine des réformés (contre des attaques luthériennes), et eniin à Berlin où il exerça pendant 46 ans les fonctions pastorales, également recommandable par sa piété et par son éloquence qui lui avait valu l'admiration du grand Frédéric. Il cumulait à la tin de ses jours tous les titres et fonctions compatibles avec son ministère. Il fut chargé avec son collègue Lenfant de reviser le recueil des Psaumes 1701, mais ce travail devenu nécessaire fut d'abord mal reçu des réfugiés; plusieurs regardaient comme inadmissible que des ministres berlinois sussent mieux le français que le roi David lui-même. Il publia ensuite, aussi avec Lenfant, une nouvelle version du N. T. 1718; les Remarques historiques qui devaient l'accompagner ne parurent qu'après sa mort, La Haye 1742. Il s'occupa surtout de Thist. de la Réformation, dont 4 vol. furent publiés en 1783, comprenant les années 1517-1530. Ce volumineux ouvrage devait être précédé d'une hist. des précurseurs de la Réforme, c.-à-d. de toutes les sectes qui dans tous les temps avaient nié l'autorité de Rome, pauli-ciens, bogomiles, vaudois, etc. Lenfant s'était chargé des hu sites. Beausobre n'a mené à bonne lin que l'Hist. du manichéisme, 2 vol. 4<> Ams-terd. 1734-39. ouvrage encore aujourd'hui très estimé. Un de ses (ils, également pasteur à Berlin, a publié à Lausanne 1755, 4 vol. des serinons de Beausobre. L'autre, Louis, a écrit Le Pyrrhonisme du sage, Berlin 1754.

 

BEBEL, Henri, né à Justingen en Souabe vers 1472 ou 1480, étudia à Cracovie la théologie et le droit, fut professeur à Bâle, puis curé dans sa ville natale, enfin 1497 prof, d'éloquence et de poésie à Tubingue. Il fut, avec Erasme, Reuchlin et Mélanchthon, un des restaurateurs de la culture classique. 11 flagella les vices de son temps, sans ménager le clergé, et reçut de Maximilien 1er, pour ses poésies latines, la couronne de laurier, 1501. Malgré le caractère licencieux de quelques-uns de ses écrits, entre autres du Triomphe de Vénus, qui le faisait assez bien venir dans les couvents, il appartient par sa science et par ses études critiques à cette phalange d'hommes distingués qui préparèrent les voies à la Réforme en faisant la guerre aux légendes, aux superstitions et aux mensonges. Il a écrit encore un Comment, sur la langue latine, un Traité sur l'Antiquité des Germains, un Éloge des Suéves, et des Facéties en 3 livr. f 1516.

 

BEBENBURG, Léopold (de), est un des hommes du 14®e siècle qui ont le mieux compris les droits de l'Etat. Destiné à la carrière ecclésiastique, il étudia à Bologne surtout le droit canon, et après avoir pris ses grades il fut appelé à Mayence, à WUrzbourg, comme chanoine et enfin à Bamberg comme évêque 1352. f 1363. Il prit le parti de Louis de Bavière dans sa lutte contre Jean XXII et Benoît XII, et le représenta à la diète de Francfort 1338. Il soutenait, non par des abstractions philosophiques, mais par l'histoire, que les rois et les empereurs tenaient leurs pouvoirs, non de l'évêquede Rome, mais du choix des électeurs. Ses motifs n'avaient aucun caractère de rébellion, et il resta par là dans les meilleurs termes avec Innocent VI, qui lui donna à Avignon la consécration épisco-pale.

 

BECCARELLI, v. Quiétistes.

 

BECCUS, v. Jean X, patriarche de Constan-tinople.

 

BECK 1° Jean, missionn. au Groenland, né 7 juin 1706 à Kreuzendorf, Silésie supérieure. Converti par la lecture du N. T., mis en prison pour ses convictions, il s'échappa et se réfugia à Herrnhut, où Christian David l'encouragea à aller dans le Groenland. Il y alla en effet en 1734 avec Frédéric Bohnisch. Ses premiers succès datent de 1738, lorsque le 3 juin il reçut à Neu-Herrnhut quelques Groënlandais du sud, parmi lesquels Kajarnak qui se convertit avec toute sa famille. II y eut encore un réveil en 1742. f au Groenland 19 mai 1777.

2° Jaq.-Christophe, né 1711 à Bâle, f 1785, prof, d'histoire et de dogmatiq., auteur d'un Dict. bibliq., d'une Synopsis sur les différentes branches de la théol., et de plusieurs dissertations et traités sur le Déluge, le Séparatisme, etc. Orthodoxe, mais sans raideur et avec une tendance libérale.

 

BECKET, Thomas, figure énergique et remarquable, plutôt que noble et sympathique. Né 1119 à Londres, cet homme élevé par des parents peu aisés, fut l'artisan de sa propre fortune, et ne dut la grandeur de sa brillante carrière qu'à ses talents, à sa souplesse et à sa force de volonté. Il fit ses études à Paris; de retour à Londres, il attira l'attention de Théo-bald, archev. de Cantorbéry, qui se l'attacha, l'emmena avec lui à Rome, l'y envoya seul une seconde fois avec une missiou de confiance, et le récompensa par le titre d'archidiacre et par le bénéfice de Beverley. C'était l'époque où les rapports étaient le plus tendus en Angleterre entre le pouvoir civil et le pouvoir spirituel sur les limites respectives de leurs attributions. Becket se consacra entièrement à son ministère et se rendit si recommandable que Henri II, sur la recommandation de Théobald, le nomma grand chancelier du royaume et précepteur de son fils. Dans ses nouvelles fonctions, Becket fit tout pour plaire au roi; il fut courtisan, politique, mondain, complaisant, et quand l'archevêché de Cantorbéry fut devenu vacant..

Henri II intima au chapitre l'ordre de porter ses voix sur son favori. Le chapitre obéit en mnrmurant, et Becket fut nommé, 1162. Mais immédiatement, par une métamorphose que rien ne faisait pressentir et qui fut un scandale pour le royaume et pour le roi, il se tourna contre son souverain, lui contesta toute compétence ecclésiastique, se rendit à Tours ou le pape se trouvait 1163, pour lui remettre le pal-lium, ne voulant tenir que de lui son archevêché, revint à Londres, où dans une assemblée du clergé il refusa lui seul, de reconnaître les anciens droits de la couronne, à moins qu'on y ajoutât une réserve en faveur des droits de l Église. Il se fait condamner comme rebelle par le parlement, s'enfuit le 2 nov. 1164, se rend à Sens où était le pape, puis au couvent de Pon-tigny, et se fait bienvenir de Louis-le-Jeune. Mais le pape a compris qu'il fallait faire des concessions; Becket, qui les condamne avec violence en profite cependant pour rentrer en Angleterre, mais il y rentre en ennemi bien résolu de reconquérir le terrain abandonné par le pape. Il recommence à attaquer les statuts de Clarendon qu'il avait jurés; il attaque les droits d'Henri, et 4 gentilshommes, fondant îur lui dans la cathédrale, le percent de leurs ^pèes, 29 déc. 1170. On a voulu faire le roi complice de ce crime, mais il l'a formellement désavoué. Becket fut canonisé par Alex, qui l'avait poussé à la résistance, et Henri dut faire pénitence sur son tombeau, mais Henri VIII le raya de son calendrier.

 

BÉDE, surnommé le Vénérable, né à Wear-mouth, Durham, 672, f 26 mai 735 dans son couvent de Jarrow, fut par sa vie, ses talents et sa piété, une des gloires de l'Angleterre et de son époque. Ses parents l'envoyèrent dès l'âge de 7 ans étudier dans le monastère du célèbre Benoit. On a peu de détails sur sa vie- Il fut ronsacré diacre à 19 ans, et fut bientôt si considéré que le pape Serge l'appela à Rome, mais il refusa. Il ne quitta son couvent qu'une seule fois dans les dernières années de sa vie. Il passait son temps à enseigner et à lire la Bible; des rois lui faisaient la cour, ses élèves devenaient évêques et archevêques, et il resta toujours un simple frère. Sa fin fut aussi paisible que sa vie; souffrant et malade, il chantait et priait pendant ses insomnies; le jour, dans son lit, il donnait encore ses leçons. Il avait entrepris la traduction de l'Évangile de Jean; le jour de l'Ascension il n'avait plus qu'un chapitre à dicter; après qu'il eut fini le dernier verset, il expira en disant: « Gloire soit au Père, au Fils et au Saint-Esprit. » Il a laissé une foule d'ouvrages sur presque toutes les branches, grammaire, exégèse, physique, histoire, astronomie, poésie, biographies, etc. Les principaux sont: son Hist. ecclésiastique de l'Angleterre, en 5 livres; sa Chronique, ou les Six Ages du monde; son Martyrologe, son Manuel de dialectique, des Psaumes et Cantiques, et ses Commentaires. Ses œuvres ont été souvent réimprimées, Paris 1544, Bâle 1563, Cologne 1612 et 1688, Londres 1843, par Giles. Son surnom ne lui fut donné qu'après sa mort.

 

BEETHOVEN, Louis (van), né 29 déc. 1770 à Bonn, d'une famille hollandaise, protestante et musicienne; le plus grand des symphonistes depuis Bach, il appartient à la musique religieuse par son: Christ au Mont des Oliviers 1800; une Messe 1810, et sa Missa solemnis 1818; peut-être aussi par son Hymne à la joie, de Schiller. Patronné par le prince Lichnowski, il se fixa dès 1787 à Vienne, où il f 24 mars 1827. Sa surdité avait influé sur son caractère, mais ses amis lui pardonnaient son humeur farouche à cause de son génie et de ses souffrances.

 

BEGGARS, Beghards, ou Béguins, religieux des deux sexes, qui parurent vers la fin du 12rae siècle et qui, sans faire de vœux proprement dits, s'associaient pour vivre ensemble et pratiquer les vertus chrétiennes. Il y avait plus d'agglomérations de femmes, ce qui s'explique par les croisades qui avaient fait beaucoup de veuves ou de filles délaissées, notamment dans les hautes classes; c'était aussi une bonne époque pour la vie contemplative. Peu à peu ces religieux s'affilièrent aux tiers ordres, les uns des dominicains, les autres surtout des franciscains; ils apprirent à mendier, à vagabonder, à former ci et là des relations faciles, ne craignirent pas de s'aboucher même avec des hérétiques, si bien qu'à la longue leur nom devint un sobriquet et fut pris comme synonyme d'hypocrites, d'hérétiques, et parfois de sorciers. Clément V lança contre eux deux bulles, 1311. Jean XXH protégea les béguines fidèles, et Grégoire XI étendit la même protection aux beghards qui offraient des garanties. On ne sait d'où vient leur nom; les uns le dérivent de beg, ou beggen, demander, mendier; les autres de sainte Bègue, sœur de sainte Gertrude et fille de Pépin; les autres enfin, avec Moréri, de Lambert-le-Bègue, prêtre de Liège vers 1180, qui aurait été leur fondateur. On nomme béguinage un ensemble de petites maisons indépendantes, réunies dans un enclos commun, où vivent ces religieuses, chacune conservant sa liberté personnelle, la plupart faisant de petits ouvrages pour accroître le bien-être de la communauté, et se réunissant pour les repas ou pour les exercices du culte. Il existe encore beaucoup de béguinages en Allemagne, en Hollande et en Belgique.

 

BEKKER, Balthasar, né 1634 à Metslaurier,

Frise occidentale, + juin 1698 à Amsterdam, cartésien, fut pasteur dans plusieurs églises de la Hollande, combattit l'astrologie et notamment la crainte des comètes 1682 et 1685, la foi aux possessions, aux démons, à la sorcellerie, à la magie; expliqua par l'accommodation les histoires de la Bible qui supposent l'existence du diable, rapporta à Néron le lion rugissant de 1 Pier. 5, 8., et se montra par la hardiesse de ses affirmations et par la frivolité de quelques-unes de ses pensées un des précurseurs du rationalisme moderne. Il fut d'abord suspendu, puis destitué. Son principal ouvrage a pour titre: Le Monde ensorcelé, 1691, trad. en franc. 1694.

 

BELGIQUE. Ce pays, qui n'existe comme royaume que depuis une cinquantaine d'années, mais qui a toujours eu son individualité distincte et dont la population se compose d'éléments celtes, germains et même romains, semble avoir été évangélisé déjà par les disciples immédiats des apôtres; on nomme Eucharius, l'un des 70 disciples qui serait arrivé l'an 42 de Rome à Trêves, avec Valerius et Maternus. Ce dernier, que la tradition identifie avec Je jeune ressuscité de Naïn, et qui serait ressuscité une seconde fois en Belgique, aurait fondé les églises de Tongres, de Maastricht, de Namur et de Dinant. + 130. Après Constantin, on trouve dans la Belgique orientale 4 évêchés: Trêves, Metz, Toul et Verdun; et dans la Belgique occidentale 10 évêchés, dont Cambrai, Tournai, Morin ou Thérouenne, avec Reims pour archevêché. Sous les Mérovingiens de nombreux prélats se distinguent par leurs talents et leurs vertus, saint Éloy, saint Médard, saint Hubert. Les églises et les couvents se multiplient sous les premiers Carlovingiens. Les irruptions normandes font des martyrs, et les reliques doivent être transportées de monastère en monastère, jusqu'au moment où les Normands bien installés se civilisent et se convertissent à leur tour. Puis viennent les luttes de la noblesse contre les bourgeois, et celle, des évêques contre les communes. Les croisades rallient les familles désunies, et l'on voit à Jérusalem Gode-froy de Bouillon, Robert de Flandres et Baudouin du Hainaut. L'évêché souverain de Liège brille par son ambition, mais aussi par les talents de ses titulaires et par leur libéralité dans les moments difficiles, ainsi dans la famine de 1045. Les beggars d'abord, puis, au 14™e siècle, les lollards trouvent dans la Belgique une terre hospitalière. Des sectes panthéistes travaillent à ruiner l'Église, mais les Jean de Ruysbrœck, les Gerhard Groot, les frères de la vie commune, les Érasme préparent de diverses manières les voies à la Réformation. La doctrine de Luther est saluée avec joie par le peuple, et quand les controverses deviennent trop violentes, les magistrats croient tout calmer en demandant qu'on se borne à prêcher l'Évangile. Avec Charles-Quint s'ouvre l'ère des martyrs. Henri Boes et Jean Esch sont brûlés les premiers le 1er juill. 1523. La persécution se poursuit sous Philippe II qui, lorsque les calvinistes lui présentent 1562 leur confession de foi, Con-fessio belgica, leur répond par un renvoi pur et simple aux articles du Conc. de Trente. Le duc d'Albe compte par milliers ses victimes, mais sa politique aboutit à la révolte et à la perte définitive des sept Provinces-Unies. L'université de Louvain maintient encore la doctrine augus-tinienne en opposition au semi-pélagianisme catholique; Baïus et le jansénisme reslent fidèles. Les jésuites sont la ruine dy pays, mais les savants travaux des bollandistes sauvent un peu l'honneur de la Société. L'édit de tolérance de Joseph H, 13 oct. 1781, permet aux prolestants de se bâtir un temple à Bruxelles, En 1783 introduction du mariage civil et suppression des ordres purement contemplatifs. Mais Léopold II rétablit les choses dans l'état où elles étaient sous Marie-Thérèse. En 1795, annexion à la République française. Après la chute de Napoléon, la Belgique est réunie aux provinces hollandaises, sous le nom de royaume des Pays-Bas et la liberté des cultes est garantie. Le parti catholique s'agite et par son alliance momentanée avec les libéraux il obtient en 1830 l'indépendance du royaume. La Belgique compte aujourd'hui près de 5 millions d'habitants, tous catholiques, sauf 25 à 30,000 protestants, juifs ou libres-penseurs déclarés tels. L'Église ne lient à l'Etat que par le salaire, mais elle a réussi à prendre pour un temps la haute main dans les affaires publiques. L'archev. de Ma-lines est l'autorité suprême, ne relevant que du pape. Le nonce a des fonctions exclusivement politiques. Il y a des évêques à Liège, Namur, Tournay, Gand et Bruges, chacun indépendant dans son diocèse. Les ordres religieux foisonnent, les couvents se multiplient et d'immenses richesses s'accumulent dans leurs mains. L'Église protestante officielle est régie par un synode. A côté d'elle, et faisant des progrès chaque année, la Société évangélique, ou Église missionnaire belge, travaille par la presse et par des prédications à répandre l'Évangile dans les villes et dans les campagnes, au milieu de populations que le catholicisme ne satisfait plua et qui cependant tiennent encore au christianisme. Les juifs ont 5 synagogues.

 

BELLARMIN, Robert-François-Romulus, nè 4 oct. 1542 à Montepulciano, Toscane, f 27 sept. 1621 au collège de Saint-André à Rome. Son père était d'une famille noble, mais ruinée; sa mère, Oynthia Cervina, sœur du pape

Marcel II, très distinguée par sa piété, exerça ooe grande influence sur Robert, le 3m« de ses iils qui, tout enfant, s'essayait déjà à la prédication, et qui, après un an passé à l'université de Padoue, se décida à entrer dans Tordre des jésuites et commença son noviciat à Rome en 1560. Sa tendance était plutôt scolastique et intellectuelle que mystique. Après avoir complété ses études de latin et de sciences par deux années de théologie à Padoue, il fut envoyé à Louvain 1569 où il enseigna la scolastique et l'hébreu, où il étudia à fond les Pères et où il passa 7 ans. Consacré prêtre 1570 par Jansenius laîné, év. de Gand, il fut chargé de réfuter Bains, mais il le fit avec d'autant plus de modération qu'il n'était pas loin de partager les idées qu'il combattait. Il eut aussi l'occasion de voir de près le protestantisme. A l'approche de (Jnillaume d'Orange, il s'enfuit à Douai, d'où Grégoire Xlil le fit venir à Rome pour y enseigner la conlroverse dans le Collège romain nouvellement fondé. Ce cours dura 12 ans et fat publié sous le titre de: Disputationes de cmtroversiis christianœ fidei, 3 vol. f° Rome 1581, 1582 et 1593; réimpr. 4 vol. f° Paris 1688; Prague 1721. C'est l'arsenal le plus complet de la foi catholique, et il a la même importance pour l'élude du dogme, que les Annales de Baronius pour l'histoire. Il y fut répondu de divers cotés, entre autres par Martius Chem-nifa, Jean Gerhard et Charnier. Une grande clarté dans le plan et dans l'exposition, une foule de citations des pères et des docteurs du moyen âge forment les principaux mérites de cet immense ouvrage; ajoutoos-y la loyauté scrupuleuse avec laquelle il reproduit les arguments des protestants, exactitude telle qu'elle a inspiré des doutes sur la coovenance de répandre ce live. A partir de 1590 il cessa d'être professeur et devint un homme public, chargé demissioos plus ou moins considérables. Sixte V l'envoya à Paris comme adjoint au légat H. Gaétan, pour conférer avec les chefs de la ligue et fiire de la controverse avec les protestants; il vit le siège de Paris. Grégoire XIV l'employa pour la revision de la Yulgate. Clément VIII le nomma son théologien et le créa cardinal 1598, en le priant de ne pas lui déguiser la vérité; en 1602 il lai donna l'archev. de Capoue, où Bel-larmin, pendant trois ans, chercha à faire prévaloir dans le clergé et les couvents les principes d'une réforme morale qu'il avait déjà recommandés à Clément. En 1605 il fut deux fois sur le point d'être nommé pape, en concurrence avec Léon XI et avec Paul V; la crainte qu'inspirait la puissance croissante des jésuites empêcha seule son élection. Nommé par Paul V bibliothécaire du Vatican, il renonça à son archevêché par fidélité à ses principes; il avait toujours prêché la résidence. Il écrivit contre Blackwell, l'archev. catholique d'Angleterre qui, malgré la défense du pape, avait prêté le serment d'allégeance exigé de Jaques à la suite de la conjuration des poudres. Il prit parti contre le doge et le sénat de Venise dans les affaires italiennes et fit valoir avec une grande puissance le droit des papes contre le pouvoir temporel des princes. L'abondance de ses arguments, une certaine logique, et même sa modération apparente font de lui le principal théologien de l'ultramontanisme. Il fut amené peu à peu à développer davantage encore son système et en vint jusqu'à dire, dans sa controverse avec Barcley à l'occasion de la Ligue, que les papes ont le droit de prescrire aux princes les lois quils doiveot faire ou abroger. Sixte-Quint aurait même voulu davantage, mais il fallut se contenter de cela. Il soutenait en outre que les rois tiennent leur pouvoir du peuple, en ajoutant que les peuples ne peuvent voter que sous la direction du pape. Les catholiques les plus fervents ne voient plus dans ces idées qu'une doctrine du temps passé. Les conséquences naturelles de celte confusion du temporel et du spirituel sont la persécution religieuse. Cepeodant Bellarmin ne paraît pas être allé jusque-là; on dit même qu'il fit prévenir Sarpi, son adversaire, des embûches qui lui étaient dressées pour le tuer, et dans le collège des cardinaux il opina toujours plutôt dans un sens pacifique. Après avoir encore administré 4 ans le diocèse de Montepulciano, il se démit de cet emploi, son âge ne lui permettant plus d'en remplir les devoirs, et il se retira dans le couvent de Saint-André, où il passa ses dernières années, ne s'occupant plus que de recueillement, d'édification et de préparation à la mort. Il laissa une réputation incontestée de piété, de zèle et de désintéressement. 11 fut plus d'une fois question de le canoniser, mais on recula devant la crainte de froisser les cours catholiques, peu amies des jésuites. Sa vie a été écrite par plusieurs, en vue de sa canonisation. Il lavait aussi écrite lui-même 1613 à la demande de son généra), mais elle est presque introuvable. Outre ses Disputations, on a encore de lui un Catéchisme, ou Doctrine chrétienne, le plus connu de ses ouvrages: un traité Depotestate summi Ponlif.; un ouvrage historique de controverse: De Iranslatione imperii Romani a Grœci$ ad Francoet plusieurs livres d'édification sur les Sept paroles, l'Élévation du cœur à Dieu, le Bonheur éternel des saints, l'Art de bien mourir, les Plaintes de la colombe, où il déplore l'abaissement moral des ordres religieux, etc. Il a laissé aussi des hymnes religieux. — Condamné en France comme ultramontain, on lui fit sentir plus d'une fois à Rome qu'il était trop modéré.

 

BÉNÉDICTINS, ordre religieux fondé par saint Benoît de Nursie, q. v. Dans sa vie solitaire Benoît avait appris à connaître les dangers de l'isolement et d'un ascétisme exagéré; à Vicevaro, les dangers d'une vie contemplative sans contrepoids, poussant par l'oisiveté à l'indiscipline et aux désordres. Il comprit que ce qui pouvait se faire en Orient n'était pas bon en Occident, et il s'occupa d'organiser la vie monacale dans des conditions nouvelles. Il esquissa pour son couvent un ensemble de règles qui furent complétées plus tard, qui portent son nom, et qui, par leur sagesse, ont traversé les siècles et font encore autorité aujourd'hui dans plusieurs congrégations. Les meilleures éditions sont celles de dom Martène, Paris 1690, et de dom Calmet, Paris 1734, 2 vol. 4°. En voici les principales dispositions. L'abbé d'un couvent est choisi par les moines eux-mêmes, qui lui doivent une obéissance absolue; il porte le titre de père et doit le justifier par son gouvernement. Si les moines, qui ont le titre de dom (dominas) sont nombreux, chaque dizaine est sous la direction d'un doyen, par lequel ils communiquent avec le père; c'est celui-ci qui nomme le prieur. Les néophytes s'engagent à la stabilité, c'est-à-dire à persévérer dans leur vocation; à la conversion des mœurs, c'est-à-dire à renoncer à la vie mondaine; et à l'obéissance. Le vêtement et la nourriture seront austères, mais sans excès. Trois heures par jour sont consacrées à la lecture et à la méditation, mais sept au travail manuel. Chaque couvent doit avoir sa vie propre et se suffire à lui-même, pour n'avoir avec le monde extérieur que le moins de rapports possibles; de là la règle qui permet d'admettre comme novices de jeunes enfants et de les préparer pour devenir moines. De là aussi l'admission de prêtres, et les privilèges qui rendent les couvents indépendants du clergé séculier, au moins du clergé inférieur. Comme l'ordre répondait à des besoins et qu'il rendait de réels services, il se répandit rapidement et couvrit bientôt l'Europe entière; il était civilisateur sans être agressif ou militant. Chacun suivant ses aptitudes avait sa tâche spéciale; ils furent défricheurs, agriculteurs, éleveurs, copistes, prédicateurs, missionnaires, compilateurs, et ils se sont fait une telle réputation que le nom même de bénédictin est devenu synonyme de travailleur. Parmi leurs principaux couvents on peut nommer Glanfeuil et Le Bec, Corbie, Saint-Denis, Saint-Germain-des-Prés, Lérins, Cluny, Einsiedeln, Reichenau, Fritzlar, Fulda, la nouvelle Corbie, etc. Grégoire II leur prêta le puissant appui de son influence en Italie, et le fait qu'ils introduisirent les premiers la vie monacale parmi les Angles et les Saxons, leur assura dans le nord une prépondérance longtemps sans rivale. Ils recherchaient volontiers les jeunes gens riches et de noble naissance, et leur donnèrent une brillante éducation dans les lettres, les arts et les sciences. C'est aux 12®* et 13»© siècles que se place l'époque de leur plus grande prospérité, mais leurs richesses mêmes leur furent fatales, non seulement en leur attirant des envieux et des ennemis, mais encore en faisant de la charge d'abbé un poste et un bénéfice recherché par les ambitions mondaines. Des gens qui n'y avaient aucun titre furent souvent appelés à ces fonctions; quelquefois de riches laïques s'en emparaient comme d'une sinécure à exploiter, et les rois en faisaient la récompense de services rendus ou espérés. Cependant ils se soutinrent, grâce au tiers-ordre des laïques, et quelques réformes partielles leur conservèrent en partie leur crédit. Des hommes éminents en grand nombre illustrèrent cet ordre: Cassiodore, Bè-de-le-Vénérable, Elfric, Ethelwold, Sturm, Bo-niface, Ansgar, Adalgar, Dunstan, Damien, Innocent III lui-même, etc. Grâce à l'indépendance réciproque des couvents, si les uns perdaient de leur vie intellectuelle ou religieuse* les autres maintenaient les traditions; si quel-ques-uns éprouvaient le besoin d'une réforme, ils y procédaient librement, et ceux qui désiraient une centralisation plus forte s'organisaient en congrégations, ce qui amena peu à peu la création d'ordres, ou de sous-ordres nouveaux. Déjà Benoît d'Aniane avait commencé: Bernon fit la même chose en fondant Cluny. Les cisterciens, les camaldules, la Vallom-breuse, et beaucoup d'autres encore ne sont que des variétés de l'ordre principal qui se distingua toujours par son costume (d'où le nom de moines noirs donné aux bénédictins). La formation des ordres mendiants, plus mobiles, plus bruyants, plus en vue, leur porta préjudice, et le concile de Trente (session 25), en les obligeant à se réunir en congrégations, leur ôta quelque chose de leur indépendance, mais les amena à s'adonner toujours plus aux travaux qui ont fait leur gloire, à l'enseignement et aux recherches scientifiques. Parmi ces congrégations les plus connues sont celles des Flandres, de Bourgogne, des Pays-Bas, de Saint-Vannes, de Verdun, et surtout de Saint-Maur. q. v. Leurs ramifications furent innombrables, et plusieurs luttèrent avec succès contre les jésuites, v. Montalembert, Guizot, etc. — Il y eut aussi des bénédictines, que l'on fait remon* ter à tort à Scolastique, la sœur de saint Benoit: celui-ci n'avait pas pensé à elles, et Héloïse s'en plaint dans plusieurs lettres. La décadence de cet ordre de religieuses fut rapide: plusieurs de leurs couvents ne furent bieiitôt plus que des retraites avantageuses pour des dames nobles, sans qu'il y eût de vœux prononcés; d'autres se réformèrent sous l'impulsion de vigoureuses abbesses, ou se transformèrent en d'autres congrégations.

 

BÉNÉDICTIONS. A côté du sens général et scripturaire de ce mot, l'Église romaine a conservé, notamment depuis le concile de Trull, 692, certains usages religieux, signes, cérémonies, prières, par lesquels elle implore sur les personnes et même sur les choses une bénédiction particulière de Dieu. Ce ne sont ni des consécrations proprement dites, ni des dédicaces de temples, ni des confirmations, ni des actes sacramentels, mais des invocations dans des circonstances qui appartiennent plutôt à la vie privée; on bénit une maison nouvellement construite, un four, une barque, un vaisseau. L'Élise protestante ne connaît pas cette cérémonie comme telle, mais elle donne à ces actes religieux le nom ordinaire de prière. Le prêtre, chez les catholiques, peut bénir le peuple, mais il ne peut pas bénir l'évêque, à cause de Hébr. 7, 7.

 

BÉNÉFICES. On comprend d'une manière générale sous ce nom certains revenus et avantages temporels correspondant à certaines charges et fonctions ecclésiastiques, les deux choses étant si intimément unies que le mot peut désigner indifféremment l'une ou l'autre, ou toutes les denx à la fois. Le revenu peut affecter toutes les formes, rentes, dîmes, fruits, vignobles, chasse, pèche, maison d'habitation. Son institution repose sur le droit de chacun de vivre de son travail, Luc 9, 7; 1 Cor. 9, 14; elle est donc à la fois juste et naturelle, et du jour où l'Église s'organisa civilement, il fut pourvu à ce que ses ministres, réguliers ou séculiers, eussent leur existence assurée. Dans le principe, l'évêque seul était possesseur de biens ou de bénéfices, et il donnait à chacun de ses prêtres on moines le nécessaire; mais dans un diocèse an peu étendu, c'était un mode de faire qui, à la longue, devenait impraticable, et dès le 6me siècle on voit les évêques procéder à des dotations de paroisses, de fabriques ou de monastères, fixes, mais toutefois révocables, choisissant en même temps les hommes les plus méritants pour remplir les fonctions et en percevoir les revenus. Plus tard, ce sont quelquefois les princes, ou de riches et pieux particuliers, parfois de grands pécheurs désireux d'expier un crime, qui font à certaines paroisses ou couvents, des dotations, en stipulant des conditions qui varient d'un endroit à l'autre, mais qui supposent presque toutes le droit de nommer le titulaire, toute réserve faite quant à l'approbation épis-copale. De là le patronage tel qu'il existe encore pour beaucoup d'églises en Angleterre. On distinguait alors la nomination ou désignation, qui appartenait au fondateur et à sa famille, et la collation ou institution proprement dite, qui appartenait à l'évêque. Malgré ce qu'il y a de juste et de simple en théorie dans ce mode de procéder, les nombreux abus qui en résultèrent ne tardèrent pas à ouvrir les yeux sur les inconvénients de ces propriétés ecclésiastiques. Souvent on les adjugeait à des gens incapables ou indignes, uniquement comme prix de services rendus; parfois aussi on les multipliait entre les mains d'un seul bénéficiaire, qui trouvait lk un moyen facile d'accroître rapidement sa fortune, mais qui ne pouvant desservir ses nombreuses paroisses, les négligeait, ou les faisait desservir au rabais, par des hommes peu qualifiés. Des règles durent être posées, soit aux patrons, soit aux autorités ecclésiastiques, pour déterminer les conditions de l'élection, mais elles furent facilement éludées par ceux qui avaient intérêt à le faire, et à l'époque de la réformation ce fut une des traditions avec lesquelles les princes purent rompre sans exciter le moindre mécontentement. Il va sans dire aussi que les bénéficiaires n'ayant que l'usufruit, et non la propriété, ils étaient tenus de rendre terres et maisons en bon état et de faire à leurs frais les réparations nécessaires. On a longtemps discuté la question de savoir si le surplus d'un bénéfice, et par conséquent les économies réalisées, appartenaient de droit au titulaire et s'il pouvait en disposer par legs ou donation en faveur de ses proches; la conscience et les circonstances influeront nécessairement sur la réponse à faire, et il est impossible de fixer une règle uniforme.

— On appelle bénéfice de compétence, en droit canon, le privilège accordé à un débiteur de ne pouvoir être condamné à une amende plus forte que ce qu'il possède au moment de sa condamnation. On a compris aussi sous ce nom le droit du débiteur, s'il est condamné à une amende, de réserver ce qui lui est strictement nécessaire pour vivre; cela s'applique en particulier à la saisie des traitements; dans plusieurs pays la loi a précisé les chiffres et le maximum des saisies suivant les cas et les individus.

 

BÉNÉZET. lo Jeune pâtre de 12 ans, qui en 1177, un jour d'éclipsé de soleil, eut une vision du Christ qui lui ordonnait de construire le pont d'Avignon, f 1184. — 2° Antoine B., né 31 janvier 1713 à Saint-Quentin, réfugié en Hollande, quaker en 1727, passa en Amérique où il se fixa. S'occupa le premier des sourds-muets, et surtout de l'abolition de l'esclavage et de la traite; exerça une gr. influence par ses lettres et ses écrits, sur Clarkson, l'abbé Raynal, et les reines d'Angl., de France et de Portugal, f 17 mai 1784. — 3° François, né 1726 à Montpellier, assista Rabaut comme proposant et fut arrêté 30 janv. 1752 près du Vigan. Convaincu d'avoir prêché l'Évangile, il fut condamné à mort et pendu le 27 mars; il f en chantant le Ps. 51. Une complainte en vers a célébré son martyre.

 

BENGEL, Jean-Albrecht, célèbre théologien wurtembergeois. Né 24 juin 1687 à Winnenden, t à Stuttgard le 2 nov. 1751. Il perdit de bonne heure son père, qui était diacre à Winnenden, et peu de temps après, les Français ayant incendié et détruit sa ville natale, il fut emmené à Stuttgard et y fit ses études au gymnase 1699-1703. Il partit de là pour Tubingue, où il se distingua bientôt comme théologien et comme prédicateur. Élevé dans l'amour et le respect des choses saintes, il eut toujours une prédilection pour les théologiens qui donnaient à la piété la place principale, Spener, Arndt, Chemnitz, Franke, etc. Mais la piété n'est pas incompatible avec la science; Bengel suffirait à le prouver. La direction du séminaire de Denkendorf, qu'il prit en 1713 après un long et fructueux voyage en Allemagne, l'appela naturellement à une étude approfondie de la Bible dans les textes originaux. Il ne négligeait pas les classiques, ni les Pères de l'Église, comme le montrent ses premières publications, sur Cicéron 1719, sur Grégoire le Thaumaturge 1722, sur Chrysostome 1723, mais il faisait passer avant tout le reste l'étude de l'Écriture, et sans se douter de l'importance de ses travaux, il donna à la science biblique une direction toute nouvelle qui le fit presque passer pour un révolutionnaire. Il avait remarqué dans une édition du N. T. d'Oxford les variantes qui accompagnaient le texte, et pour se rendre compte de la nature et de l'importance de ces variantes, il résolut de recourir aux mss. originaux. Il en collationna au moins une trentaine, de différentes familles, il en apprécia la valeur respective, et publia en 1734 son Apparatus criticus où il expose les principes qui, selon lui, doivent être prépondérants dans le choix des variantes. La leçon la plus difficile, dit-il, doit généralement être préférée à la leçon plus facile; lorsqu'il y a accord entre les mss. latins et celui d'Alexandrie, le texte doit être considéré comme authentique; les mss. et les pères latins présentent en général un texte plus ancien que le texte grec ordinaire, etc. Des observations très variées et de nombreuses réserves adoucissaient ce qu'il y avait d'un peu absolu dans ses principes. Néanmoins une clameur immense accueillit le travail du modeste savant; protestants et catholiques réclamèrent contre la prétention de changer l'œuvre d'Érasme par une nouvelle étude des textes originaux, pendant que, de son côté, Wettstein reprochait à Bengel de n'avoir pas été aussi loin que ses prémisses le requéraient. Bengel compléta son œuvre en publiant 1742, en latin, un Commentaire sur tout le N. T., le Gnomon Novi T., qui a été dès lors réimprimé plusieurs fois et traduit en plusieurs langues. Il ne se proposait pas d'expliquer lui-même la Parole, mais simplement d'inspirer à tous le désir de la lire, en leur fournissant quelques indications sommaires et en élucidant des textes obscurs. Il avait publié en 1741 son Ordo temporum, une suite des périodes de l'histoire, d'après les chiffres nombreux qui se trouvent dans les prophètes, et par une série de calculs plus ingénieux que solides, il était arrivé à conclure que notre terre avec sa constitution actuelle durerait 7777 ans; le millénium devait commencer en 1836. Des Discours édifiants sur ÏApocau nombre de 60, destinés à populariser ses vues, parurent 1747. et obtinrent un immense succès; ils furent réimprimés souvent, et traduits en anglais, en danois, en suédois, etc. Les chiffres se sont trouvés faux, et cela devait être; lui-même l'avait pressenti. Mais il avait fait preuve d'une modération, et en même temps d'une sagacité remarquable dans la manière presque prophétique dont il annonçait le développement social dont nous sommes aujourd'hui les témoins. Le temps vient, dit-il, où l'adultère se masquera sous le nom de galanterie. Nous marchons vers le règne du scepticisme et du naturalisme. La nature et la raison seront bientôt élevées à une telle hauteur, qu'on ne saura plus distinguer ce qui est surnaturel. Les hommes qui attaqueront avec la plume la religion chrétienne recevront de riches pensions et feront fortune; les grands et les petits seront moqueurs et libres-penseurs. Qui sait si dans 60 ans la France n'aura pas échangé ses rois pour des empereurs? La carte de notre globe sera entièrement remaniée. La religion naturelle et le fanatisme se donneront la main contre la Bible, et ceux qui n'auront pas en eux-mêmes le critère de la vérité se rejetteront dans le papisme. C'est une grande faute que l'Église protestante n'ait pas entrepris pins tôt l'œuvre des missions, etc. — Bengel écrivit encore en latin et en allemand quelques autres ouvrages dans le même sens, puis une Harmonie des 4 Évangiles, et quelques traites de polémique et de controverse. Il entretint avec Zinzendorf d'excellents rapports, ainsi qu'avec les moraves et les dissidents en général; il s'opposa à toutes les mesures administratives qu'on aurait essayé de prendre contre eux, les défendit au besoin, et par son esprit de tolérance, sa piété, son amour, exerça sur eux une influence salutaire en les mettant en garde contre leurs propres exagérations. Nommé prélat d'abord à Herbrechtingen 1741, puis à Alpirsbach avec residence à Stuttgard 1749, il reçut en 1751 le titre de docteur en théol. de 'université de Tubingue, qui ne fut pour lui qu'un encouragement de plus à travailler sans se lasser. Il touchait d'ailleurs au terme de sa carrière: une fluxion de poitrine l'enleva à l'âge de 65 ans. Sa fin fut ce qu'avait été sa vie, paisible, calme et sans ostentation; ses dernières paroles furent: Seigneur Jésus, je suis à toi à vivre et à mourir. Il avait épousé en 1714 Jeanne-Bégina Seeger, qui lui donna 12 enfants, dont 6 moururent jeunes; ses 4 filles contractèrent d'heureux mariages; son fils aîné, Victor, étudia la médecine et ne survécut que 7 ans à son père; le plus jeune, Ernest, fut doyen à Tubingue. Bengel avait demandé à Dieu de lui conserver sa compagne jusqu'à la fin de son pèlerinage et il fut exaucé. Sa vie a été écrite par son élève et ami Oetinger, par son fils, par Moser, par Fresenius, et enfin par son arrière-petit-fils Burk, archidiacre à Stuttgard 1831. Le nom de Bengel reste un des plus purs, des plus populaires et des plus vénérés de la théol. allemande.

 

BENIGNUS aurait été, d'après la tradition, au disciple immédiat de Polycarpe; il aurait préché l'Évangile à Autun, Langres et Dijon, et aurait souffert le martyre. Une abbaye porte son nom à Dijon.

 

BENJAMIN de Tudela, rabbin espagnol, f 1175, auteur d'un Itinéraire (Mazaloth) en Palestine, qui ne brille pas par l'exactitude des renseignements.

 

BENNO, né 1010 à Goslar d'une famille noble; fut moine en 1028, diacre en 1035, prêtre en 1040. Il fut appelé en 1051, à la fois par Henri et Léon, à la direction du couvent-sémi -naire de Goslar, jusqu'en 1066. En 1067, év. de Meissen, par la protection d'Henri IV. Il joua an rôle équivoque dans la révolte des Saxons 1073, fut mis en prison et ne fut relâché qu'en 1076 après avoir de nouveau prêté serment de fidélité à l'empereur. Toutefois ses intrigues politiques ne cessèrent qu'en 1088, et tout en restant fidèle aux maximes ecclésiastiques de Grégoire VII, il se consacra dès lors presque exclusivement aux devoirs de sa charge, à l'administration de sa paroisse et à l'évangélisation des Slaves, + le juin 1106. Canonisé en 1523; ses prétendus restes furent, après de longues pérégrinations, transportés à Munich dont il devint le patron, 1576.

 

BENOIT. Quatorze papes de ce nom: 1® Benoit Ier, surnommé Bonose, 574-578. Inconnu.

2* Benoit II, romain, 684-85.

3° Benoît IH, élu malgré les envoyés impériaux de Lothaire et de Louis, qui veulent en vain lui substituer Anastase. Il succéda à Léon IV 855, ou à la papesse Jeanne 857, si l'épisode de cette femme est authentique.

4* Benoit IV, romain, 900-903, gouverna sagement. Il couronna Louis de Provence emp. de Rome.

5° Benoît V, romain, 964-965, élu par le parti opposé à Léon VIII, que l'emp. avait fait nommer en remplacement de Jean XII. Othon irrité le fait détenir à Hambourg, où il meurt.

6° Benoît VI, romain, élu 972 concurremment avec son successeur Boniface VII; sa conduite scandaleuse le fait jeter en prison, où il périt d'une manière cruelle, empoisonné ou étranglé, par ordre de son rival.

7o Benoit VU, 975-983, parent d'Albéric, eut à lutter contre Boniface VII l'antipape.

8° Benoît VIII, pape 1012-1024, en concurrence avec Grégoire VI qui le contraignit à sortir de Rome, mais il remonta sur son siège a l'aide de l'emp. Henri II. Il combattit 1016 les Sarrasins qui avaient envahi ses États, et le> extermina.

9° Benoît IX, abominable petit garçon de 10 à 12 ans, nommé Théophylacte, élu 1033 en qualité de neveu ou cousin des deux papes qui l'avaient précédé. Il était fils d'Albéric, comte de Tusculum. Pape, il vécut dans la plus crasse dissolution et se livra à toutes les infamies, adultères, etc. Il commit de sa propre main plusieurs assassinats. Les Romains dégoûtés 1<> chassèrent; Conrad le rétablit, mais en 4044 il fut de nouveau chassé et remplacé par Sylvestre II. Il réussit à revenir encore, mais se voyant si fort haï du peuple, il vendit sa papauté à un homme de bien nommé Gratien, qui prit le nom de Grégoire VI; puis, cela fait, il garda l'argent et la papauté, jusqu'au moment où, forcé par un concile convoqué par Henri III. il donna plus ou moins volontairement sa démission, 1048.

10* Benoît X, Jean de Velletri, élu 1058 par le parti épiscopal, malgré l'opposition de Da-miani et d'autres. Il fut chassé quelques mois après par les Romains qui, avec le concours de l'Allemagne et l'appui d'Hildebrand, élurent Gérard de Florence, Nicolas II. Benoît s'humilia et f 1059.

11° Benoît XI, oct. 1303-6 juillet 1304; fils d'un berger de Trévise, il fut d'abord maître d'école, puis général des frères-prêcheurs.Homme d'un caractère doux, appelé à remplacer Boni-face VIII, il trouva bien des fautes à réparer; il annula les bulles de son prédécesseur contre Philippe-le-Bel, mais il mourut bientôt, empoisonné dans des figues, à ce que l'on dit, et sans avoir pu achever ce qu'il avait commencé. Son successeur fut le premier pape d'Avignon.

12o Benoît XH, 1334-1342. Jacques Fouruier, fils d'un boulanger de Saverdun, a plus de bonnes intentions que de puissance. Un des papes d'Avignon. Il se porta comme arbitre pour terminer les contestations de plusieurs princes. Il aimait à récompenser le mérite. Il s'attira de violents ennemis en voulant réformer son clergé. Commentateur des Écritures, il passa pour ignorant parce qu'il était modeste et qu'il n'était pas juriste. La procession du saint sacre* ment s'établit.

13o Benoît XIII; Pierre de Lune, né en Aragon d'une famille distinguée, passa successivement de la carrière du droit à celle des armes, puis il reprit l'enseignement du droit dans l'université de Montpellier. Nommé cardinal 1375 par Grégoire XI, le dernier des papes d'Avignon, il fut élu pape 1394 à la mort de Clément VII par les cardinaux avignonnais, en concurrence avec Boniface IX. Avant son élection, il s'est engagé à abdiquer au besoin, dans l'intérêt de la paix, ses titres et ses droits provisoires. Une fois pape, il oublie ses serments; il amuse Charles VI, roi de France, et les autres princes de l'Europe par de belles promesses, et finit par leur déclarer qu'il garde la tiare. Dès lors il n'est plus qu'un schismatique, on l'assiège dans Avignon 1398; il s'échappe et s'enfuit, d'abord à Château-Renard, près d'Avignon, puis à Peniscola dans le royaume de Valence. La France lui retire son obéissance. II est même question d'offrir la papauté k Charles V, mais cela n'aboutit pas, et le parti français le reconnaît de nouveau. Benoît continue de garder son titre et de lancer ses foudres sur la terre, pendant qu'Alexandre V lui fait concurrence k Bologne et Grégoire XII à Rome. A la fin le concile de Constance les renvoie tous, et Benoit, le plus opiniâtre de tous, cède à son tour, abdique et f 1424, âgé de 90 ans.

14<> Benoît XIII bis; romain, de la famille des Ursins (Orsini) pape 1724-30. Ne reconnaissant pas la papauté de Pierre de Lune (ci-dessus), il garde pour son nom le chiffre XIII. Dominicain, successivement év. de Manfredonia, de Césène et de Bénévent. Il confirme le rappel de Bitschi concédé par son prédécesseur et refuse au roi de Portugal de nommer son nonce cardinal avant qu'il ait quitté Lisbonne; les relations entre Rome et le Portugal sont ainsi interrompues 1725; la rupture s'accentue en 1729. Il se montre zélé pour la discipline et bien intentionné, mais d'un esprit un peu étroit et sans intelligence des besoins de son temps. Il autorise l'enseignement de la doctrine de saint Thomas sur la grâce et la prédestination, et confirme par une bulle la Constitution Unigenitus. Il tient un concile à Latran 1725 pour la réforme de l'Église, mais il s'y fait peu de chose. Il a le tort de nommer au cardinalat un homme indigne, son domestique Nicolas Coscia. Il veut canoniser Grégoire Vil, 1729, mais toute l'Europe s'alarme, et il f 1730. Auteur d'Homélies sur l'Exode.

15o Benoît XIV, 1740-1758. Prosper Lamber-tini, né k Bologne 1675, évêque d'Ancône, puis archev. de Bologne. Homme instruit, éclairé, conciliant, k idées libérales, convaincu que les principes de la papauté ne pouvaient plus 9e produire dans toute la rigueur du moyen âge, il montra par sa conduite qu'il renonçait k des prérogatives surannées, vécut en bonne harmonie avec toutes les cours, pourvut k une meilleure éducation du clergé, fonda 4 académies à Rome, veilla à ce que les places vacantes fussent consciencieusement repourvues et chercha à répandre dans les missions l'espoir du véritable christianisme. C'est par la charité, dit-il, et en leur faisant du bien, qu'il faut amener k la foi les infidèles. Il voulut diminuer le nombre des fêtes, mais il se heurta k trop de résistances. Il lâcha de calmer les querelles religieuses, adoucit les rigueurs que l'on exerçait à l'occasion de la bulle Unigenitus, réforma les jésuites du Portugal, et cultiva lui-même les lettres et les sciences. Voltaire lui dédia son Mahomet, qui est une apologie de la tolérance, et reçut en retour ses éloges et sa bénédiction. Il + au moment où il allait s'occuper de la suppression de l'ordre des jésuites, réclamée par le Portugal, v. Pombal, et les jésuites alarmés firent tous leurs efforts pour acquérir une influence décisive dans l'élection du nouveau pontife; ils y réussirent et Clément XIU fut nommé. Benoît a laissé de nombreux ouvrages, entre autres: De la Béatification, de la Messe, des Synodes, etc.

Autres personnages de ce nom:

1° Benoît de Nursie9 fondateur de l'ordre des bénédictins; né 480 k Nursie, dans la Sabine; envoyé de bonne heure à Rome pour ses études, mais dégoûté de la vie licencieuse qu'il y trouva, il s'enfuit déjà en 494 pour aller vivre dans la solitude, n'ayant auprès de lui qu*un moine, Romanus, qui pendant 30 ans pourvut à son austère nourriture. Il occupait à Subiaco une grotte presque inaccessible. Sa vie à partir de ce moment est peu connue; écrite par Gré-goire-le-Grand sur le rapport de 4 de ses disciples, elle est pleine de légendes et de miracles; il fait flotter la hache qu'un Goth a laissée tomber au fond du lac; il permet à son ami Maur de marcher sur les eaux pour aller sauver Placide qui se noie, etc. Ce qui subsiste comme authentique, c'est que les paysans païens des environs, effrayés de son apparence peu soignée, le prirent souvent pour une bête fauve. Mais les chrétiens admirèrent sa sainteté, et les moines de Vicovaro le choisirent pour leur abbé. Us s'en repentirent bientôt, trouvant sa discipline trop sévère, et ils cherchèrent à l'empoisonner; mais il fit le signe de la croix sur la coupe qu'il allait boire et elle se brisa en morceaux. II se rendît alors au Mont-Cassin, au nord de Naples, cime escarpée dominant de fertiles plaines et de sombres vallées, et il y passa les 14 dernières années de sa vie. Il permit à d'autres solitaires de se joindre à lui, mais à la condition de se soumettre à ses directions et de travailler. Ils évangélisèrent autour d'eux, démolirent un ancien temple d'Apollon, construisirent de leurs propres mains le monastère qu'ils devaient habiter et qu'ils ont rendu si célèbre au moyen âge, et protégèrent les populations du voisinage, une fois contre la famine, une autre fois contre les attaques des barbares. Benoît eut en 548 une rencontre avec Totila, le vaincu de Bé-lisaire et de Narsès,et lui annonça ses prochains triomphes, ses revers et sa mort. Lui-même f 21 mars 543, en prière devant sa fosse qu'il avait fait préparer. — V. Bénédictins.

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2° B. d"Aniane. Witiza, fils du comte Goth Ai-jmlfe de Maguelone, naquit en Languedoc 750. Jouissant de la faveur de Pépin et de Gharlemagne, il voyait un brillant avenir s'ouvrir devant loi, lorsque, pendant un voyage en Italie, son frère étant sur le point de se noyer, il fit le vœu, s'il était sauvé, de renoncer à tous les intérêts terrestres. Il tint parole 774, et se jeta dès lors dans la vie monastique avec tout le zèle et tonte l'ardeur dont il était capable. Il résolut d'égaler et si possible de surpasser le patriarche des ordres religieux latins; il prit son nom de Benoit, et après quelques années passées au couvent du Saint-Sequanus, près deLangres, qu'il travailla à réformer, il résolut, pour être plus libre dans son action, de fonder un monastère snr les domaines paternels, sur les bords de YAniane en Languedoc 780. Il en fut l'abbé naturel et y introduisit la règle de saint Benoît, mais avec quelques changements empruntés à Pàcome et à Basile. Le respect du peuple et la reconnaissance des moines firent bientôt de lui une des personnalités les plus considérables de l'Aquitaine. Charles et son fils Louis-le-Débon-naire le comblèrent de faveurs; Alcuin l'employa pour combattre l'adoptianisme, concile de Francfort 794, mais la dogmatique n'était pas son fort, et les écrits qu'il a laissés sur ce snjet n'ont guère de valeur. Ses ouvrages sur la vie monastique sont plus importants, Codex regularum, Concordia regularum, etc. lia écrit de même un recueil sur les différents modes de pénitences. Louis, qui l'établit chef de tous les monastères de son empire, sut exploiter aussi la puissance et la popularité de Benoît en vue de sa succession au trône paternel, et c'est bien lui qui décida Gharlemagne, malgré les efforts contraires d'Adalbert et de Wala. Le règne de Lonis fut l'apogée de son pouvoir, mais malgré les avantages de sa position politique il ne cessa jamais de se préoccuper des intérêts du mona-chisme; il les fit valoir entre autres à la diète d'Aix-la-Chapelle 817. Après sa mort, 12 févr. 821, ses adversaires politiques reprirent le dessus, et la vie religieuse dont il avait été le réformateur et le représentant perdit beaucoup de sa ferveur, de son prestige et de son crédit.

3° B. le Lévite, ou le diacre, de l'archevêché de Mayence, sous Autgar ou Otger, 825-847; auteur d'un recueil de capitulaires publiés sous les noms de Pépin, Charlemagne et Louis, donnés comme la suite (chap. 5, 6 et 7) des capitulaires d'Anselgis, longtemps acceptés comme authentiques, dénoncés comme suspects par Blondel, défendus par Baluze, et maintenant, depuis Savigny, reconnus comme l'œuvre d'er-clé iastiques faussaires, aux gages des archev. Riculphe 786-813 et Autgar. On ne peut dire si Benoît fut lui-même le complice de ces fraudes, ou s'il ne fut que le rédacteur innocent, mais dans tous les cas malhabile, de cette compilation dont les procédés et la tendance rappellent les fausses décrétales. Le but immédiat fut peut-être de relever par ce travail la réputation compromise du diocèse et de faire rendre à l'archevêque le titre de primat; mais il était surtout de revendiquer les droits du clergé contre le pouvoir civil et temporel. Ce but ne fut réellement pas atteint, l'œuvre du faux Isidore étant survenue pour faire plus et mieux dans l'intérêt de la hiérarchie, et si deux siècles plus tard quelques évêques mentionnent encore les Capitulaires de Benoît, leur effet ne fut que local et momentané.

René B., prêtre, docteur en Sorbonne, publia en 1566, avec des réflexions, une trad. française de la Bible, pour laquelle il utilisa la version de Genève. Plusieurs passages soulevèrent des plaintes; l'ouvrage fut mis à l'index et condamné; l'auteur lui-même fut renvoyé de la Sorbonne, et ne fut réhabilité qu'au bout de 20 ans et après sêtre rétracté.

Élie B., né à Paris 20 janv. 1640; jeunesse agitée, étudia à Montauban, fut consacré en 1664 et successivement nommé pasteur dans la Beauce et à Alençon. Son zèle et ses talents lui valurent la haine des jésuites. La Révocation le força de quitter la France; il fut appelé à Delft comme prédicateur et f 15 nov. 1728. Il avait épousé une mégère qui le tourmenta pendant 47 ans. Son principal ouvrage est une Hist. de l'édit de Nantes, un peu lourde, mais riche en documents officiels, pleins d'intérêt. Il a laissé aussi divers mélanges et lettres de circonstance, sans parler de 12 ou 15 dissertations en mss. encore inédits.

Jean, prof, de grec à Saumur entre 1630 et 1650, auteur de quelques travaux sur les Psaumes et le Cantique.

Marc-Antoine, pasteur à Montauban 1610, eut des difficultés avec sou collègue Beraud, et tous les deux furent condamnés par le synode d'AIais à changer de résidence.

80 N. Benoît, ouvrier en soie, réfugié en Angleterre, auteur d'un Avis à Archippe, où il professe et défend les vues baptistes.

 

BENTLEY, Richard, théol. anglais, né 1662 à Oulton. Yorkshire, doyen du collège de la Trinité à Cambridge, 1700, et prof, de théol. 1716. Connu comme critique et philologue, il s'occupa de comparer les meilleurs mss. du N. T., ainsi que les meilleures versions. II en avait déjà annoncé la publication, mais il y renonça en présence des attaques violentes soulevées par son projet. On a de lui des Sermons et un ouvrage apologétique contre Collins. f 1742.

 

BÉRENGER 1° de Tours, né à Tours vers 998, f 1088, élève de Fulbert de Chartres, esprit indépendant, nommé en 1030 scolas tique, ou maître d'école et professeur dans sa ville natale, étudia d'abord les classiques latins, puis la Bible, les pères et surtout Augustin. Son enseignement obtint un grand succès, parce qu'il amenait ses élèves à penser par eux-mêmes et à examiner avant d'accepter les paroles du maître. Archidiacre d'Angers 1039, il revint à son école l'année suivante comme principal directeur, et par sa science, ses manières et son mode d'enseignement, il se concilia l'amour et le respect de ses élèves à un degré qui tenait de l'enthousiasme. Vers cette époque Paschase Radbert travaillait à faire prévaloir la nouvelle doctrine de la transsubstantiation; Scot Erigène la combattait, et Bérenger, dans une lettre à son ami Lanfranc, prieur du couvent de Bec, soutint que le pain et le vin ne changeaient pas de nature dans l'eucharistie, mais conservaient leurs qualités essentielles et n'étaient que le symbole du corps et du sang de Christ. Cette lettre tomba en d'autres mains à Rome, et un concile fut convoqué aussitôt, 1050, où Lanfranc, ami de Bérenger, mais mécontent d'être compromis par cette lettre, se porta lui-même comme son accusateur. Bérenger fut condamné sans avoir été ni entendu, ni même cité. Un second concile convoqué le sept, de la même année à Vercelli, et auquel Bérenger eût assisté si Henri 1er de France ne l'eût fait mettre en prison à Paris, le condamna également. Le pape fit même saisir deux de ses amis, ecclésiastiques d'Angers, qui avaient essayé de le défendre, et le livre de Ratram fut lacéré. Hil-debrand vint à Tours comme légat du pape; il ne tenait pas beaucoup à la transsubstantiation, il aurait voulu qu'on se bornât à une définition générale, sans s'arrêter au comment; il s'entendit avec Bérenger dans ce sens, et Bérenger, pour l'amour de la paix, signa que le pain et le \in étaient le corps et le sang du Sauveur; c'étaient les paroles mêmes de l'institution et il ne s'aventurait pas. Mais Henri, malgré la protection du comte Gaufried d'Anjou, ne lui rendit ni ses biens, ni son bénéfice, ni aucune indemnité. En 1059, sous Nicolas II, Bérenger vint à Rome, comptant sur l'influence et la bonne volonté d'Hildebrand, mais le parti contraire était devenu si puissant et si audacieux qu'Hildebrand lui-même n'osa pas résister, et sous la pression de l'év. Humbert, Bérenger fut contraint d'anathématiser son opinion. Dans une lettre à Lanfranc il compare sa rétractation au reniement de saint Pierre. De retour en France il continua d'enseigner, en appelant la transsubstantiation une folie du pape. Il a toujours des amis et des partisans, mais son protecteur Gaufried meurt, Eusèbe Bruno d'Angers se retire de lui; on lui recommande tout au moins plus de modération, puisque à Rome même on use de ménagements à son égard; mais Lanfranc ayant écrit contre lut, il lui répond, vers 1069, par sa Dèfevse, qui a été longtemps perdue et que Lessing a retrouvée dans la biblioth. de WolfenbUtiel (publ. par Vischer, 1834). Au concile de Poitiers 1076, les passions étaient si excitées qu'on faillU se battre. Grégoire Vif, fatigué de celte discussion qui entravait ses plans et son activité, chercha à terminer la chose un peu à l'amiable. Bérenger ayant reconnu que le pain après sa consécration était le vrai corps de Christ, sans dire comment, Grégoire dît que cela suffisait; il prétendit même qu'un jeune prêtre avait eu une vision de la Vierge et qu'elle lui aurait dit qu'il fallait s'en tenir aux Écritures autenthiques, contre lesquelles Béranger ne disait rien. Ce dernier avait oflert d'en appeler au jugement de Dieu, à l'épreuve du fer rouge, mais le pape ne le permit pas. Dans un nouveau concile 1079 il dut confesser que le pain est substantiellement changé en la vraie chair de Christ; il prit le mot dans le même sens que Luther, c'est-à-dire salvâ sua substantiâ, et signa, mais les évêques acharnés après leur proie, exigèrent qu'il prit le mot dans le même sens qu'eux; Grégoire effrayé l'exigea de même, et le pauvre vieillard dut s'exécuter. Grégoire leva l'excommunication. Bérenger rentra en France, pleurant sa faiblesse et ce qu'il appelait son sacrilège. Las d'une lutte qu'il ne se sentait plus la force de poursuivre, il se retira dans l'île de Saint-Côme près de Tours, où il passa ses dernières années dans la prière, le jeûne et le repentir, persévérant dans ses convictions jusqu'à la fin, et laissant dans l'esprit du peuple l'impression d'une sainteté extraordinaire. Sa doctrine sur la cène, sur la messe, sur l'Église et sur l'autorité des Écritures est celle des Églises évangéliques.

2° Jean, né 1730 au hameau des Ferrands

près Valence, proposant en 1749, étudiant à Lausanne 1750-1752, dès lors pasteur en Dau-phiné sous le nom de Colombe (allusion à Can-tiq. 2, 14), consacré avril 1758, condamné à mort 7 sept. 1759, exécuté à Mens en effigie, condamné de nouveau et rependu en 1766 à Grenoble. 11 lui naquit à Mens 8 avril 1767 un fils Jean, qui devint médecin, député, comte et en6n pair de France. Bérenger fut modérateur-adjoint du synode de 1777, il assista à celai de 1783, et il eut le bonheur de connaître l'édit de nov. 17S7 par lequel Louis XVI permettait aux protestants de naître, de se marier et de mourir. Le Concordat de Tan x leur donna davantage. Enfin un décret du 25 fructidor an xm (sept. 1805) accorda une consistoriale à Mens, et Berenger en fut nommé président; mais il était âgé, et il donna bientôt sa démission. Après an court séjour à Paris, auprès de son fils, il revint à Mens où il + 1813.

 

BERGIUS, Jean, prédicateur du Brandebourg, né 1587 à Stettin, étudia à Heidelberg *t Strasbourg, voyagea avec des élèves en France, Angleterre et Pays-Bas, puis en Pologne, fut nommé professeur de théol. réformée à Francfort s. 0. 1616, et prit part avec Calixte an colloque de Thorn 1642. Il était plutôt unioniste que calviniste rigide, et se montra fraternel enrers les luthériens, malgré leurs attaques passionnées. Ses sermons se distinguent avantageusement par le tact, le goût et la modération, f 1658. — Son frère Conrad lui succéda 1624 à Francfort, et passa en 1629 à Brème comme directeur du Collège illustre. L'un et l'autre jouirent de la faveur des princes. Ils étaient oniversalistes et prétendaient même que c'était là la doctrine réformée.

 

BERLEBURG (Bible de). Édition, version et commentaire de la Bible, qui parut à Berle-burg, Westphalie, de 1726-39. C'est l'œuvre d'auteurs inconnus, évangéliques, mais ennemis de l'Église établie et de l'orthodoxie courante, avec une tendance mystique très prononcée et la prétention, sans une connaissance suffisante des textes originaux, de donner une traduction meilleure et une explication plus claire et plus profonde des passages difficiles. A côté d'un littéralisme parfois heureux, parfois ridicule à force d'être exagéré, on y remarque un excès de spiritualisme qui n'a pas môme le mérite de l'unité; les tendances de M"»e Guyon y coudoient les hardiesses d'Origène, et l'on reconnaît facilement que les divers auteurs, d'accord sur certains points sans doute, ne l'étaient pas sur d'autres, môme des plus importants. En général ils rejettent la prédestination, ils voient la rédemption dans le fait de la solidarité plus que dans l'expiation; ils admettent le rétablissement de toutes choses, ils ont un chiliasme très prononcé, ils méconnaissent la doctrine du péché; ils placent l'homme primitif à une hauteur immense, ils prouvent qu'Adam n'avait point de sexe, eic. Les questions les plus puériles sont traitées avec le même sérieux que les plus graves, et l'incohérence de ce travail, au milieu d'excellents fragments, explique le prompt discrédit dans lequel il est tombé. Cette version est presque introuvable. Slier a de nouveau attiré l'attention sur le travail des anonymes de Berleburg.

BERNARD, ou Bemhardt. 1<> de Menthon. fondateur de l'hospice du Saint-Bernard, à la fois forteresse et maison hospitalière; créateur de la route destinée à franchir le col qui abouti! aux plaines de l'Italie; son nom fut donné en signe de reconnaissance au Grand et au Petit-Saint-Bernard qui dominent le passage de l'hospice. Né 923 au château de Menthon, près d'Annecy; archidiacre d'Aoste, f 1008. On a sur lui plusieurs notices, mais qui ne concordent pas; les unes le font fils d'un noble et d'une mère pieuse; d'autres le font fils du duc de Savoie. Il fut élevé par son oncle ecclésiastique, et il s'éprit d'une vive admiration pour Nicolas de Myra qui avait détruit un temple païen de Lycie. La légende lui prête une foule de miracles.

2<> Bernard deClairvaux, né 1091 à Fontaine en Bourgogne; 3®« fils d'une famille noble, chevaleresque et pieuse, subit plus que ses frères l'influence bénie de sa mère Aletb, qui l'avait consacré h Dieu déjà avant sa naissance. Il se distingua à Châtillon, où il étudiait, par une intelligence vive, mais il était recueilli, silencieux, et frayant peu avec ses camarades. Sa résolution était prise de se faire moine; sa famille essaya en vain de lui montrer dans la théologie, comme dérivatif, une carrière analogue, offrant plus d'avantages et moins d'inconvénients. Il persista, se persuadant à lui-même que c'était le dernier vœu de sa mère, et il réussit si bien à faire des prosélytes à sa cause, que bientôt, en 1113, n'ayant que 22 ans, il se présenta à la porte du couvent de Cîteaux avec une trentaine d'amis, dont 4 de ses frères et un oncle, tous demandant d'être reçus comme novices. L'abbaye, fondée en 1098 près de Dijon, effrayait par la sévérité de sa règle; elle n'en attirait pas moins grand nombre de religieux, et il fallut penser à s'étendre. Deux ans après, Bernard, qui avait scrupuleusement rempli tous ses devoirs de novice et de moine, se transportait 1115 à quelques lieues de là dans une claire vallée de la Haute-Bourgogne, clara vallis, Clairvaux, et fut le premier abbé du nouveau monastère. Il vivait de rien, de racines et de feuilles d'arbres, ne dormait presque pas, et portait jour et nuit un cilice qu'il dut cependant abandonner quand la chose fut découverte. Il consacrait son temps à la prière et à la lecture. La Bible était son étude favorite, et il avait coutume de dire qu'il aimait mieux puiser à la source que plus bas dans des canaux latéraux. Il finit par tomber malade à force de macérations ascétiques; son ami, l'év. de Châlons-sur-Marne, Guillaume, d'accord avec le chapitre de Tordre, le condamna à un an de repos, et lui-même ne comprit que plus tard, quand il se vit prématurément affaibli et vieilli, que s'il y a un devoir dans la sobriété, c'est aussi un devoir que de soigner ses forces et sa santé. Il savait si bien vivre en dehors des choses visibles, absorbé dans la contemplation, qu'il longea, dit-on, pendant tout un jour le lac de Genève, sans en avoir rien aperçu. Mais à côté de la vie intérieure il y avait en lui une grande activité pratique, et il se consacrait tour à tour tellement à l'une et à l'autre qu'il ne savait plus, disait-il, s'il était ecclésiastique ou laïque. Ses sermons, sa nombreuse correspondance, les 160 couvents qu'il fonda et organisa, la règle de l'ordre qu'il réforma, ses écrits sur différents sujets, sur Malachie, la Vie contemplative, les Erreurs d'Abélard, les Devoirs de la papauté, sont une preuve du zèle avec lequel il savait au besoin payer de sa personne, mais il y en a d'autres preuves encore et pendant plus de vingt années on le vit sur la brèche, mêlé aux plus graves événements de son temps, parlant avec la même hardiesse aux rois, aux peuples et aux papes, prenant le parti des petits et des opprimés, et s'opposant au moine Raoul, qui ne demandait rien moins que le massacre de tous les juifs. Parmi les faits les plus saillants de sa carrière publique il faut noter son intervention dans l'élection simultanée d'Innocent II et d'Anacletll à la papauté, 1130. Appelé à donner son avis, il se prononça sans hésiter pour le premier, et pendant cette lutte qui dura 8 ans et qui se termina par la mort d'Anaclet, il ga-}ïna de nombreux adhérents au pape qu'il protégeait. Dans les voyages qu'il fit à cette occasion en Italie, en Allemagne et en France, il électrisait les populations, et ses biographes racontent de lui des faits qui tiennent du miracle. Puis vinrent ses luttes contre Abélard. Ces deux grandes natures devaient nécessairement entrer en conflit, mais leur terrain n'était pas le même, et le conflit ne pouvait aboutir. Bernard l'emporta, mais il n'eut pas toujours le beau rôle. Il poursuivit de même de toute sa fougue Pierre de Bruys, Arnold de Brescia, et ceux de leurs disciples qui, sous une forme quelconque, tentaient uue réforme de l'Église. C'est lui enfin qui prêcha, à Pâques Hi6, au concile de Véze-lay, la croisade à laquelle prirent part Louis-le-jeune et Conrad IÛ, et qui, malgré ses glorieux pressentiments, finit d'une manière si malheureuse. Il prit parti aussi 1147 et 1148 contre les albigeois, mais sans grand succès. Il attaqua l'évêque de Poitiers, Gilbert de la Porée, au concile de Reims, sous prétexte de trithéisme 1148, mais Gilbert ne put être convaincu de ce dont il était accusé. Enfin épuisé de fatigue, Bernard tomba malade et fut emporté en quelques jours. Il vit venir la mort avec sérénité et f 20 août 1153. Il fut canonisé 20 ans après par Alexandre III, 1173. Ses Œuvres ont été publ. par Mabillon 1690, 2 vol, f°. — Bernard était aussi poète, et c'est comme tel, aussi bien que comme orateur, qu'il a mérité le surnom de mellifluus; parmi ses hymnes, l'une des plus connues est celle qui commence par: Salve ca-put cruentatum, que Paul Gerhard 1659 a si bien reproduite dans son: O Haupt voll Blut und Wunden.

3« Bernard, dit de Tolède, né à Agen, f 1125; d'abord soldat, puis bénédictin, abbé du couvent de Sahaguneen Castille, 1080, contribua plus que personne à faire prévaloir en Espagne les doctrines absolutistes de Grégoire VII et d'Alphonse VI. Après la prise de Tolède sur les Maures, il fut nommé archev. de cette ville, puis en 1187 cardinal et primat d'Espagne. Le roi et une partie du clergé finirent par trouver qu'il allait trop loin dans sa revendication de l'autorité papale. Il se proposait de se mettre à la tête d'une nouvelle croisade, mais Pascal II s'y opposa.

4° Bernard de Botone, né à Parme d'une famille considérée, étudia à Bologne, devint professeur et chanoine, enseigna à Rome et à Bologne, et f 1288. Il a surtout étudié les Décrétâtes, qu'il a commentées dans sa Glotsa ordinaria.

5° Bernard de Compostelle, archidiacre, chargé à Rome sous Innocent III de recueillir les décrétâtes de ce pape, mais comme son travail renfermait quelques pièces qui ne convenaient pas à la curie, il fut supprimé. — Un autre B., aussi de Compostelle, a commenté les décrétâtes d'Innocent VI et de Grégoire IX.

6° Bernard de Pavie, évêque vers 1190, a recueilli sous le nom d'Extravagantes des lois et décrets publiés après Gratien, et qui sont hors du cours du droit.

7<> Bernard, espagnol, se rendit de Rome en Poméranie pour évangéliser ce pays, 1122. Il arriva en pauvre état à Julin et fut mal reçu par les habitants; on le traita de gueux parce qu'il était mal mis; de fou parce qu'il offrait de rester dans une maison à laquelle on mettrait le feu. Il essaya d'abattre l'arbre sacré de Joui, alors on le chassa et il se sauva à Bamberg où il passa la fin desès jours à prier pour lesPomé-raniens. Il désigna, pour reprendre son œuvre, l'év. Otton, qui réussit en effet mieux que lui.

8* Bernard, Claude, surnommé le Pauvre prêtre, un des hommes les plus pieux de son Église. Né à Dijon 1588, lils d'un magistrat distingué; après une jeunesse orageuse, il raconte qu'à la suite d'une vision dans laquelle son père l'exhortait à se convertir, il changea de vie, entra dans les ordres, se fixa à Paris, et se consacra pendant 20 ans aux malades, aux pauvres, aux condamnés et à la prédication. Il distribua en libéralités immédiates un héritage de 400,000 fr. f 164* d'une maladie dont il fut atteint en accompagnant au gibet un scélérat endurci.

9° Samuel, célèbre comme peintre sur émail, né8 nov. 1615, f 24 juin 1687. Un des fondateurs de l'Acad. de peinture de Paris; abjura. Son fils Samuel, joaillier, fut un financier célèbre et abjura aussi. Ses nombreux enfants s'allièrent à la noblesse dont ils redorèrent les blasons; lesMolé, Lamoignon, Clermont-Tonnerre en descendent.

10° Jaques B. né 1 sept. 1658 à Nyons, pasteur à Venterol, puis à Vinzobres, proscrit en 1683, s'enfuit à Lausanne où il donna des leçons, et de là en Hollande, oii il rédigea la Bibl. Univ. et la suite des Nouvelles de la républ. des Lettres; pasteur et prof, à Leyde depuis 1705; t 27 avril 1718; publiciste plus laborieux que distingué.

— V. aussi Bernon et Bernward.

 

BERNARDIN 1* le saint, né 1380 à Massa Carrara, d'une famille distinguée de Sienne, entra dans l'ordre des franciscains de l'étroite observance, après avoir fait ses preuves auprès des malades, et montré pendant la peste de 1400 un admirable dévouement. Il se fit aussi une réputation comme prédicateur, devint vicaire-général de son ordre, qu'il travailla à réformer, et refusa successivement les évêchés de Sienne, Ferrare et Urbin. Il f 1444 pendant une mission dans les Abruzzes, et fut canonisé déjà 1450 par Nicolas Y. Ses œuvres, d'un caractère mystique, 5 vol. ont été publ. à Venise 1591, Paris 1636, Venise 1745.

2° Bernardin Ocbino, v. Ochino.

 

BERNARDINS, nom des religieux de Cîteaux depuis les nouvelles règles que leur donna saint Bernard; ils sont cependant plus connus sous le nom de cisterciens, q. v.

 

BERNE. Les tendances conservatrices de la population agricole de ce puissant canton n'offraient pas à la Réforme un terrain facile, mais les désordres des dominicains 1507-1509, puis la vente scandaleuse des indulgences par Jetzer 1518 éveillèrent l'attention. Un certain nombre de prêtres pieux protestèrent, Kolb, Séb. Meyer, Berthold et Jean Ilaller. Déjà Luther et Zwingle en avaient appelé aux Écritures, et si la majorité des magistrats et du clergé bernois étaient hostiles aux nouvelles idées, une minorité respectable commençait à penser qu'il y avait quelque chose à faire. La conférence de Bade 1526 s'était prononcée catégoriquement contre toute réforme et la cause semblait perdue, mais plusieurs prêtres évangéliques, Berthold Haller en tête, refusèrent de se soumettre, et pour différents motifs le gouvernement s'abstint de les inquiéter. La controverse s'envenima. Les 7 cantons catholiques ayant eu l'imprudence d'intervenir d'une manière comminatoire. Berne en prit ombrage et décida de liquider seul la question pour son propre compte. Le Grand Conseil, séance du 17 nov. 1527, convoqua pour les premiers jours de l'année suiv ante une conférence ecclésiastique, à laquelle les évêques de Constance, Valais, Bàle et Lausanne furent invités à se rendre, sous peine, s'ils ne venaient pas, de perdre tous les droits et bénéfices qu'ils possédaient dans ce canton. Il était convenu qu'on discuterait sur la seule base de l'A. et du N. Testament; que d'ailleurs la discussion serait libre, que personne ne serait inquiété pour ses opinions, ni nationaux, ni étrangers, et que les résolutions ne seraient imposées à personne. Cette conférence connue sous le nom de Dispute de Berne s'ouvrit le 7 janv. 1528 dans l'église des franciscains. Les évêques avaient refusé d'y paraître, mais ils y étaient représentés par des amis et des savants de leur bord. Cependant les partisans d'une réforme y possédaient la majorité numérique, et en outre une supériorité morale et intellectuelle incontestable. On y remarquait entre autres le bourgmestre de Zurich. Rœust, Zwingle avec une quarantaine de prêtres. Œcolampade de Bàle, Blaarer de Constance, Bucer et Capiton de Strasbourg. Six des cantons catholiques, s'en référant à la conférence de Bade blâmèrent vivement cette nouvelle tentative; Eck et Cochlâus la condamnèrent, et Charles-Quint en témoigna par lettre du 27 déc. 1527 son mécontentement, mais ces difficultés n'arrêtèrent ni le gouvernement, ni les partisans d'une amélioration, bin thèses furent successivement introduites par Haller ou par Kolb, et discutées par les hommes les plus marquants des 2 partis. 1° Christ seul chef de l'Eglise, 2° l'Église n'a pas le droit d'imposer d'autres commandements que ceux qui sont dans la Bible; 3° Christ est notre seule justice et sanctification; 4° Le corps et le sang de Christ ne se trouvent pas en substance dans le sacrement; 5° La messe est contraire à l'Écriture, un blasphème contre le sacrifice de Christ et une abomination par ses abus; 6° Christ est le seul médiateur et intercesseur; 7° contre le purgatoire; 8° contre les images; 9° contre le célibat forcé; 10° les péchés contre la chasteté ne sont préjudiciables à aucune classe autant qu'aux ec-désiastiques. Ces dix points furent adoptés en 20 séances et le 26 janv. Haller prononça le discours de clôture. Le 7 févr. un édit de l'autorité civile donnait force de loi à l'œuvre de la conférence, la Réformation était proclamée; le 13 févr. les paroisses étaient consultées et se prononçaient presque toutes affirmativement; les vallées bernoises ne se décidèrent que plus tard. Bâle, Bienne, Schaffouse et d'autres villes ressentirent le contre-coup de celte paisible et sérieuse discussion; plus tard Genève 1535 et Lausanne 1536 devaient suivre le même exemple. Les actes originaux, avec les signatures, sont encore à la biblioth. de la ville en double exemplaire. Mais il ne suffisait pas d'avoir décrété la Réforme, il fallait encore l'organiser, la régulariser, la faire pénétrer dans les mœurs, et ce n'est pas l'affaire d'un jour. Longtemps on vit les paroisses réformées, surtout à la campagne, conserver les traditions anciennes; le clergé lui-même n'était pas à la hauteur de sa mission. Les désordres dans l'Oberland 1528, et les deux guerres de religion de 1529 et 1531, retardèrent le travail d'organisation, dont la nécessité se faisait cependant sentir de jour en jour davantage. Enfin après la paix du 24 nov. 1531 on décida de se mettre à l'œuvre, et le 9 janv. 1532 le synode se réunit; 230 ou 240 pasteurs étaient présents, et Capiton qui venait d'arriver de Strasbourg, fut inûté à diriger les débats. Après avoir réduit au silence la faction trop belliqueuse du clergé et rappelé dans quel esprit Christ doit être prêché, il introduisit le grave et principal sujet pour lequel le synode était convoqué, l'organisation de l'Église, sa discipline et ses rapports avec les magistrats. Capiton lui-même rédigea les articles, et il montra tant de lumières et de sagesse qu'il entraîna même des hommes encore opposés à la Réformation. Il suffit de 4 à 5 jours pour s'entendre (du 9 au 14 janv.) et pour élever un monument qui demeurera toujours cher à l'église de Berne. Les Actes du synode de Berne sont le toit sous lequel cette église s'est abritée, la règle qui a fait sa gloire et sa prospérité. Ils forment, avec les dix conclusions de la dispute, ses livres symboliques, et pendant plus de 3 siècles ils ont été vénérés comme la bannière et comme l'un des plus beaux monuments de l'époque de la Réformation. C'est un vrai chef-d'œuvre, même pour notre temps, dit Hundeshagen. Et Vulliemin ajoute: Ne nous figurons pas une aride et froide ordonnance; c'est une œuvre d'inspiration, toute vivante de la piété de ses auteurs, de la sage modération de Capiton, de l'onctueuse douceur de Haller. — Ces Actes du synode reçurent la sanction du Grand Conseil le jour même où le synode eut achevé son travail, 14 janvier et ils furent imprimés officiellement à Bâle la même année, puis 1728 et 1775.

 

BERNIS, François-Joachim De Pierre (de), cardinal français, né 1715 à Saint-Marcel, Ar-dèche, archev. d'Albi, + * Rome 1794, connu par ses petits vers, sa galanterie, la protection de Mad. de Pompadour, et la part qu'il prit à l'expulsion des jésuites et à l'alliance autrichienne. Ses poésies affectées le firent surnommer par Voltaire Babet la Bouquetière. Son poème la Religion vengée ne fut publ. qu'après sa mort et n'a pas réussi. Bernis avait été reçu de l'Acad. franç. à l'âge de 29 ans à cause des grâces de son esprit et de sa personne.

 

BERNON 1° noble bourguignon, premier abbé de Cluny et réformateur de plusieurs autres monastères, f 927. — 2° Bernon, appelé aussi Bern, ou Bernard, moine d'un couvent de bénédictins près Trêves, nommé 1008 par Henri II abbé de Reichenau, géra cette abbaye pendant 40 ans et lui rendit son lustre compromis par Immo son prédécesseur. Il était savant, poète et musicien. Il enrichit sa bibliothèque, releva le niveau des études, travailla à l'amélioration du chant sacré, + H a écrit quelques livres sur les fêtes chrétiennes et quelques biographies.

 

BERNWARD, ou Bernard, 13e évêque de Hildesheim, près Hanovre, d'une famille noble, neveu de l'électeur palatin Adalberon. Après de brillantes études il devint 987 précepteur du jeune Otton III et chapelain impérial. Nomme évêque 993, il protégea sa ville contre les invasions des Normans par un ensemble de tours et de murailles et mérita d'être appelé le second fondateur de Hildesheim. Il défendit pendant 7 ans et avec succès les droits de son évêché contre l'archev. de Mayence, et eut le bonheur, dans un voyage à Rome, de calmer une émeute contre le pape. Il possédait une riche bibliothèque et s'intéressait à la théol., à la philosophie, aux mathématiques et aux beaux-arts. Après l'an 1000, quand on eut cessé de croire à la fin du monde, il fit bâtir à ses frais une magnifique abbaye des bénédictins, qu'il plaça sous le vocable de saint Michel, et il f 1022, peu après avoir fait la dédicace de son église. Canonisé 1193.

 

BERQUIN, Louis (de), gentilhomme artésien, né 1490, brûlé à Paris le 22 avril 1529 pour cause de religion. Aussi remarquable par la pureté de ses mœurs que par son amour de l'étude, Berquin avait adopté avec ardeur les principes de la Réforme et publia entre 1523 et 1529 un certain nombre de petits ouvrages de controverse qui lui valurent l'amitié d'Erasme, un peu la faveur du roi, et beaucoup la haine des moines et de la Sorbonne. Arrêté une première fois le août 1523 à la suite d'une descente de la police dans sa maison et de la saisie de ses livres et papiers, il fut relâché le 8 par l'intervention de François 1er. La Sorbonne lai en voulait surtout à cause du mépris avec lequel il parlait de l'ignorance des docteurs et des subtilités de l'école. Arrêté une seconde fois, mai 1523, sur la plainte de l'év. d'Amiens, il est condamné comme hérétique par les délégués du pape, sur des traductions falsifiées de quelques-unes de ses propositions; le parlement hésite avant de confirmer cette sentence, et le roi attirant la cause à lui, le fait relâcher, nov. 1526. Erasme lui écrivait de se modérer, de se foire donner une ambassade royale qui lui permit de s'éloigner, de ne pas se fier davantage à la protection du roi, de « laisser bourdonner les frôlons et de se renfermer dans les douceurs de l'étude; » conseils inutiles. Ber-quin resta sur la brèche, traduisant Erasme, Luther et Mélanchthon. Une image de la vierge ayant été mutilée dans un des carrefours de Paris, les sorbonnistes s'emparèrent de l'incident pour émouvoir le peuple, le parlement et le roi. Quoique Berquin n'y fût pour rien, on affecta de voir en lui le chef des hérétiques et des briseurs d'images. Douze juges commissaires, délégués par le parlement, le condamnèrent à être étranglé, puis brûlé sur la place de Grève. Il ne s'attendait pas à une sentence aussi rigoureuse, mais il n'en parut point ému, refusa toute rétractation et se rendit au supplice avec une entière et chrétienne sérénité. Sa voix fat étouffée sur l'échafaud par les clameurs d'hommes apostés par les moines. Le religieux qui l'accompagnait tâcha de faire croire qu'en mourant Berquin avait reconnu son erreur.

 

BERRUYER, Joseph-Isaac, né à Rouen 1681, t à Paris 1758, jésuite, élève du paradoxal Har-douin; auteur d'une Hist. du peuple de Dieu, qui parut en 3 fois, 1728, 1753 et 1758, et qui reproduit en les paraphrasant de la manière la plus frivole, et parfois la plus licencieuse les principaux événements racontés dans J'Écri-ture. Ce livre, surtout la partie, obtint un succès de scandale, digne du 18^ siècle. Il fut blâmé par l'Église et même par les jésuites; plusieurs évêques le condamnèrent, Benoît XIV le mit à l'index, et l'Inquisition, sous Clément XIV, condamna deux écrits qui essayaient de le justifier. Il n'en eut pas moins de chauds partisans à une époque où il était de mode d'attaquer le christianisme. Berruyer avait peut-être pour but de discréditer la Bible pour en empêcher la lecture.

 

BERTHIER, Guill.-François, né à Issoudun 1704, f à Bourges 1782, jésuite, successivement professeur à Blois, Rennes, Rouen et Paris, continua l'Hist. de l'Église gallicane, commencée par Longueval 1730, puis par Fontenay et

Brumoy, et y ajouta 6 vol. qui vont jusqu'à 1529. Il rédigea depuis 1745 le Journal de Trévoux, dirigé contre l'incrédulité, et eut de vifs démêlés avec Voltaire et les encyclopédistes. Après la suppression de son ordre, il se retira à Offenbourg d'abord, puis à Bourges, où il écrivit une réfutation du Contrat social et diverses œuvres théologiques et spirituelles. En 1762 il avait été nommé garde de la bibliothèq. royale et précepteur de Louis XVI.

 

BERTHOLD 1° abbé d'un couvent de la Basse-Saxe, appelé comme missionnaire en Li-vonie, homme dévoué et résolu, mais trop belliqueux, organise une espèce de croisade pour la conversion des Lives, remporte sur eux une victoire; mais est tué dans la bataille, 1198.

2° Archev. de Mayence, 1485-1504, comte de Henneberg, exerça une grande influence dans l'empire, et s'occupa avec zèle de rétablir la discipline et l'ordre dans les couvents.

3° Célèbre prédicateur franciscain. Berthold Lechs, né à Ratisbonne vers l'an 1220, enterre le 19 déc. 1272, étudia la théologie sous le pieux frère David, qui en fit son ami et qui, lui ayant reconnu des talents remarquables, l'engagea à se consacrer à la prédication. Il visita comme frère prêcheur l'Allemanie, les Grisons (Pfeffers), Augsbourg, l'Autriche, la Moravie, la Thuringe. Sa parole était puissante; on raconte que pendant qu'il parlait il semblait qu'il eût sur le front des couronnes resplendissantes; ses auditoires étaient immenses; la statistique du temps parie de 60, de 100, même de 200 mille auditeurs. Quelques-uns de ses sermons, qui ont été conservés, publiés par Kling en 1824, puis par Stolz, et plus complètement par Gœbel, d'après les mss. de la biblioth. de Hei-delberg, se font remarquer par une grande simplicité pratique, par leur onction, l'amour de Dieu et des âmes, la pureté de la doctrine et de fréquents appels à la conversion.

4o Berthold de Rohrbach, prédicateur laïque du 14m<5 siècle, prétendait avoir reçu de Dieu des révélations particulières. Après avoir été arrêté une première fois à Wtlrzbourg 1356, et s'être rétracté, il tomba une seconde fois entre les mains de l'Inquisition à Spire et fut brûlé; il souffrit courageusement le supplice. C'était un mystique, selon les uns un beghar. selon les autres un ami des vaudois. U prêchait contre les abus et la corruption de l'Église, et disait qu'un laïque pieux peut faire plus de bien qu'un prêtre qui n'a pas l'esprit de Dieu.

4° Un des fondateurs de l'ordre des carmélites, q. v.

6° Berthold Pirsbinger, né à Salzbourg 1465, év. de Chiemsee sur l'Isar 1508, s'occupa sérieusement de la réformation de l'Église. On lui attribue le Onus eccleêiœ, la charge de l'Église, qui parut à Landshut 1521, et qui par la vigueur avec laquelle il dénon;a la corruption de TÉglise et la nécessité de la réformer dans son chef et dans ses membres, produisit une grande sensation parmi les catholiques et parmi les protestants. Il résigna 1525 ses fonctions épis-copales, peut-être à cause du bruit que son livre avait fait et se retira dans la solitude où il se consacra à l'étude. Il écrivit entre autres une Théologie allemande, qui parut à Munich 1528, mais qui était plutôt un recul. En présence de la Réforme commencée, craignant d'être compromis, il rétracta quelques-unes de ses anciennes thèses et parla durement des évangéli-ques. f 19 juillet 1543 à Saalfelden. Son Onu* a été réimprimé, mais falsifié 1620; Gerhard en a rétabli le vrai texte dans sa Confessio catho-lica. Longtemps oublié, Berthold a été comme exhumé vers 1850 pour les besoins de la controverse.

 

BERTI, Jean-Lorenzo, né 1696 à Saravezzo, Toscane, f à Pise 1765, ermite de l'ordre des petits-augustins, puis professeur de dogmatique, auteur d'une Théologie historique, dogmatique et scolastique, 10 vol. fo, Rome 1739-47, Munich 1749; abrégé, Bamberg 1770. Il fut assez disciple de saint Augustin pour avoir dû se disculper à plusieurs reprises d'être janséniste.

 

BERTRAM, v. Ratram.

 

BÉRLILLE. Pierre (de), né 1575 au château de Sérilly, près Troyes, fondateur de l'ordre des carmélites et de la congrégation de l'Oratoire. jouit de la confiance de Louis XIII et de la reine-mère, fut chargé de plusieurs missions importantes, sollicita à Rome la dispense pour le mariage d'Henriette de France avec le prince de Galles, fut nommé cardinal 1627, et f subitement 1629 en célébrant la messe. Homme éclairé, il encouragea Descartes, et favorisa la publication de la Bible polyglotte de Lejay. Ses œuvres ont été publ. par le père Bourgoing, 1644.

 

BÉRYLLE, év. de Bostra, Arabie, vers 240; gouverna son égl. avec autant de zèle que de talent. Il pencha un moment vers le sabellia-nisme, disant que J.-G. n'existait pas avant l'incarnation; mais Origène le ramena à la foi 244.

 

BESOLD, Christophe, né à Tubingue 1577, prof, de droit, étudia aussi la théol. et l'hébreu. Il connaissait 8 langues. Après la bataille de NOrdlingen 1634, quand la cause évangélique paraissait perdue, il abjura publiquement le protestantisme, qu'il avait déjà abjuré en secret le 12 août 1630, et il mit au service de la Bavière et de l'Autriche toute sa science et son intelligence, pour revendiquer en faveur de ces pays les biens des couvents wurtembergeois sécularisés à l'époque de la réformation. Son retour au catholicisme, très exploité, trouva peu d'imitateurs. Il fut récompensé de sa défection par une place de professeur à Ingolstadt, et il venait d'être appelé par le pape en cette même qualité à Bologne, avec un traitement de 4000 ducats, lorsqu'il f le 15 sept. 1633. * Il est pourtant dur de mourir, » dit-il en sentant sa fin prochaine.

 

BESSARION, Jean, né 1395 à Trébizonde, de parents pauvres, étudia à Constantinople, puis dans le Péloponèse, entra 1423 dans l'ordre de saint Basile où il quitta son nom grec pour celui de l'anachorète égyptien dont il a écrit la légende. Nommé archev. de Nicée 1437 par l'emp. Jean VII Paléologue, qui ne voyait plus contre les Turcs d'autre remède qu'une alliance étroite avec l'Occident et qui désirait à cause de cela la réunion des deux Églises, il accompagna son souverain en Italie avec quelques autres savants théologiens de son pays. L'union fut prononcée au concile de Florence, grâce à l'esprit conciliant de Bessarion, qui reçut d'Eugène IV pour sa récompense le chapeau de cardinal. Mais celte union factice n'eut d'autre résultat que d'aliéner à l'empereur la sympathie de son peuple et de compliquer par des dissensions intestines l'état déjà critique de l'empire. Bessarion resta dès lors en Italie où, par son goût et ses connaissances variées, il devint le centre de ceux qui cultivaient les lettres, et l'un des précurseurs de la Renaissance. 11 fut deux fois sur le point d'être nommé pape; la jalousie de l'év. d'Avignon le fit seule échouer. Il ne cessa d'ailleurs de travailler au bien de son pays, soit à Mantoue et en Allemagne en essayant d'organiser une croisade contre les Turcs, soit en acceptant le titre de patriarche de Constantinople qui lui paraissait devoir étendre sa bienfaisante influence sur son ancienne patrie. Chargé de plusieurs missions importantes, il réussit dans presque toutes et revint comblé d'honneurs. Mais il échoua dans sa tentative pour réconcilier Louis XJ avec le duc de Bourgogne; il en conçut un tel déplaisir qu'il f à son retour, en passant à Ravenne, 19 nov. 1472. II légua à Venise sa bibliothèque, l'une des plus riches de l'Europe. Son mausolée est à Rome dans l'église des Saints-Apôtres. Ses écrits, qui sont nombreux, n'ont pas encore tous été publiés; on ne possède encore, en latin, que son livre: Contre le calomniateur de Platon, ses Discours en faveur d'une croisade contre les Turcs, une trad. du Socrate de Xéno-phon, et une trad. de la Métaphysique d'Aristote. Il avait travaillé à réveiller en Italie le goût pour la philos, de Platon. Sa position, ses talents, son caractère font de Bessarion le lift» naturel entre l'Orient et l'Occident, comme entre le moyen âge et le monde moderne.

 

BESSEL, une des gloires de l'ordre des bénédictins , savant, de manières agréables et d'une éloquence insinuante; né 5 sept. 1662 à Buchheim, il entra au couvent 1692, prononça ses vœux en 1693, fut reçu docteur en théol. à Vienne 1696, et f 1749, trois ans après avoir célébré le jubilé de son professorat. Il est connu surtout comme ayant décidé l'abjuration du duc Antoine-Ulrich de Brunswick, 10 janv. 1710. Auteur de plusieurs ouvrages d'Hist. eeclésias-tiq. et de controverse.

 

BETHLÉHÉMITES, moines anglais du 13** siècle, peu importants. Ceux d'Amérique, du même nom, sont une confrérie de franciscains, fondée surtout en vue du soin des malades et de l'éducation de l'enfance, par Pierre de Béthen-court vers 1660. Innocent XI 1687, et Clément XI 1707, reconnurent cette congrégation et lui assurèrent des privilèges; elle compte auj. 40 maisons, presque toutes dans les îles Canaries; le général et la maison-mère sont à Guatimala. Une branche féminine s'est formée aussi sous le patronage de Marie-Anne del Galdo.

 

BETKINS, Joachim, né à Berlin 1601, pasteur à Linnen où il resta 30 ans, f 1663. Son histoire est importante surtout au point de vue du piétisrne, dont il fut une des manifestations les plus énergiques et les plus décidées. Elle sert aussi à faire connaître l'état des esprits pendant et après la guerre de 30 ans. Il appelait la chrétienté un anti-christianisme, parce que tout était anti-chrétien, et il en rejetait la responsabilité sur le clergé, qui prêchait la justification comme s'il n'y avait pas de sanctification. Ses écrits sont pleins de fougue et d'originalité; il faut nommer surtout, malheureusement en latin, 1° Christianismus ethnicus, Berlin 1633; 2° le Mystère de la croix 1637; 3° le Sacerdoce, ou la Sacrificature royale du N. T. comparée à l'absence actuelle du vrai Sacerdoce, 1640; 4<> la Mesure vraie du Christianisme et du pastoral en Allemagne; 5° l'Anti-christianisme; 6® Irenicum, ou le Courage de la paix, exhortation aux chrétiens à l'occasion de la guerre des Turcs; 7° la Participation des chrétiens aux souffrances de Christ leur chef; 8° La perte de l'Allemagne, Excidium Germaniœ, publ. après sa mort, 1666, par Breckling qui s'appelle son fils spirituel.

 

BEVERIDGE, Guill., né 1638 à Barrow, Lei-cester, f 5 mars 1708, comme év. de Saint-Asaph. distingué par sa science et par sa piété; auteur de plusieurs livres d'hist. ecclésiastique, de chronologie et de droit canon.

 

BÈZE (Théodore de), ou plutôt Besze, né 24 juin 1519 à Vézelay, Nivernais, d'une famille riche et considérée; son père était bailli. Un de ses oncles, conseiller au parlement de Paris, se chargea de son avenir, le prit auprès de lui, lui donna pour maître Melchior Wolmar, qu'il suivit à Orléans, puis à Bourges, mais que son père ne lui permit pas de suivre quand il fut appelé en Allemagne 1535. Il fit son droit à Orléans, prit son grade de licencié à Paris 1539, et obtint bientôt par la protection d'un autre oncle, l'abbé de Froidmont, le prieuré de Long-jumeau et un autre bénéfice. Tout en étudiant les Pandectes, il lisait Catulle et Ovide; il alla jusqu'à tenter de les imiter et ses essais ne tardèrent pas à lui faire une réputation. Il cultiva la poésie légère, dans un temps où elle était à la mode et où des reines même ne reculaient pas devant une littérature hazardée et licencieuse. Ses ennemis lui reprochèrent plus tard ces péchés de jeunesse, Juvenilia, et voulurent en tirer des conclusions contre la pureté de ses mœurs; ils exploitèrent entre autres une Dubia et une Candidu qu'il a chantées, mais qui n'ont jamais existé, ainsi qu'une charmante pièce la-line préconisant la supériorité de l'amitié sur l'amour, où ces pudiques censeurs crurent trouver l'éloge des crimes de Sodome. Sans nier qu'un jeune homme riche, beau, spirituel, abandonné à lui-même sur le pavé de Paris, ait pu se laisser entraîner au libertinage, on peut dire que rien ne le prouve, attendu que les assertions du p. Maimbourg ne sont pas des preuves, et que Bèze repousse avec toute l'énergie d'une âme honnête ces ignobles accusations. Le seul fait à sa charge et que l'on a dénaturé, c'est le prétendu enlèvement de la femme d'un tailleur nommé Claude, qu'il aurait séduite et épousée à Genève du vivant de son mari. Or voici l'histoire vraie. Violemment épris d'une jeune fille d'une condition inférieure, mais chaste et vertueuse, Claudine Denosse, il la décida à un mariage de conscience, s'engageant à ne jamais prendre les ordres, ce qui compromettait ses bénéfices, et à légitimer leur union dès que ce serait possible. C'était en 1544, il avait 25 ans. Il recula longtemps, mais en 1548 pendant une maladie dangereuse, il se rappela les leçons de Wolmar, sa piété se ranima et il résolut de vivre à l'avenir selon les préceptes de l'Évangile. C'était se condamner à l'exil, mais il n'hésita pas. Abandonnant ses bénéfices et sa fortune particulière, il partit avec sa femme pour Genève où ils arrivèrent le 24 oct. 1548. Après avoir fait légaliser son mariage, il s'occupa de se procurer des moyens d'existence. Il pensa d'abord à monter une imprimerie avec Crespin, mais à la suite d'un voyage à Tubin-gue auprès de son ami Wolmar, il accepta une place de prof, de grec dans la nouvelle académie de Lausanne, et se trouva par là en relations ordinaires avec Viret, Merlin, Hotman, Mathurin Cordier. Il se mit aussi à foire des lectures sur le N. T. pour l'instruction des réfugiés qui affluaient de France, et à publier des écrits de théologie, de controverse et d'édification. Mais dès 1557 il fut appelé à intervenir autrement que par la plume ou par la parole dans la grande guerre de l'époque. Il dut se rendre avec Farel auprès des cantons évangéli-ques et des princes protestants de l'Allemagne, pour plaider la cause des vaudois persécutés. Il refit encore deux fois le même voyage pour demander l'intervention des princes en faveur des prisonniers protestants de Paris. Dans un de ces voyages il avait fait à Worms la connaissance de Mélanchthon, et il s'était engagé vis-à-vis de quelques docteurs luthériens, quant à ia Cène, dans un système de concessions qui lui fut vivement reproché. De retour à Lausanne il eut à intervenir dans le débat soulevé contre Viret par l'État de Berne; il prit parti pour le réformateur, et pour éviter une destitution il donna sa démission et vint à Genève, où Calvin l'attirait 1548. Il fut d'abord nommé bourgeois, puis pasteur, professeur et enfin recteur de l'académie naissante. En 1560 il dut se rendre auprès de l'électeur palatin, pour l'intéresser au sort du malheureux Dubourg, puis immédiatement après à Nérac, à la demande de Condé, pour tâcher de rattacher le roi de Navarre au parti protestant. En 1561 il assiste au Colloque de Poissy, dont il est le principal orateur, et sur les instances de la reine de Navarre, il prolonge de 3 à 4 mois son séjour à Paris, mais sans que la conciliation des deux Églises fasse aucun progrès. Il y est encore quand a lieu le 1er mars 1562 le massacre de Vassy; il est délégué avec Francour à Monceaux où étaient les princes; assez bien reçu par la reine, il l'est très mal par le roi de Navarre qui lui dit que tout c?la est de la faute des protestants, et que lui-même, Bèze, mériterait d'être pendu. Ce fut la guerre. Condé se mit à la tête des protestants; Bèze lui servit de chancelier à Meaux et à Orléans, parcourut les bords de la Loire pour secouer les tièdes, revint à Paris pour le 3e synode national, partit pour l'Allemagne et les cantons suisses afin de justifier la prise d'armes des protestants, passa à Genève au mois de septembre, mais en repartit bientôt comme aumônier de l'armée huguenote, assista à la bataille de Dreux et ne rentra à Genève qu'après la paix. Calvin étant mort, il fut nommé à sa place modérateur de la Vén. Compagnie des pasteurs, et conserva ces difficiles fonctions jusqu'en 1580, cumulant ses fonctions pastorales avec celles de professeur, recevant les réfugiés, correspondant avec toutes les Églises, intervenant dans les luttes théologiques, multipliant ses écrits de toute nature. Il avait à peine 45 ans. En 1571, sur la demande de Coligny, il assista au synode de La Rochelle, dont il fut élu président; puis à Nimes à un nouveau synode national, et à peine de retour à Genève il vil accourir en foule les victimes de la Saint-Barthélémy et dut aviser à les recevoir, les loger, les nourrir et les consoler. Le 21 mars 1586 il était à Montbéliard, appelé par le prince Frédéric pour tenter un rapprochement entre les deux Eglises protestantes, et si les discussions n'aboutirent pas, Bèze eut du moins, grâce à son esprit de conciliation, la joie de voir avant son départ les luthériens et les réformés prendre la Cène en commun. Il fit encore beaucoup d'autres voyages, en Bourgogne dans l'intérêt de ses neveux, à Strasbourg pour s'entendre avec Henri de Condé, en Allemagne pour faire comprendre aux princes la solidarité qui liait leurs intérêts à ceux des réformés français; à Berne pour faire prévaloir des idées de paix et d'union 1588. Mais les affaires, à Genève, n'allaient pas; le trésor était à sec, l'académie menaçait ruine. Bèze se chargea de tous les cours pendant 2 ans, sans négliger ses autres devoirs, malgré son âge et les vertiges dont il souffrait. Il quitta l'enseignement en 1600, à l'âge de 81 ans, fit encore une visite à Henri IV à l'Eluiset, Savoie; il eut le bonheur de célébrer la journée de l'Escalade, 12 déc. 1602, et f le 13 oct. 1605. Sa femme étant morte de la peste en 1588, après 40 ans d'une heureuse union, ses amis le décidèrent à se remarier avec Catherine del Piano, veuve d'un Génois. Il ne laissait pas d'enfants. Il fut enterré non à Plainpa-lais, mais dans le cloître de Saint-Pierre, par crainte des Savoyards qui avaient menacé de l'exhumer et d'envoyer son corps à Rome. — Quand on pense à la richesse de cette vie si agitée, si remplie d'occupations de tous genres, missions diplomatiques, enseignement, prédications, voyages, conférences, on se demande comment un seul homme a pu suffire à tant de travaux; mais l'étonnement augmente quand on ajoute à ces preuves d'une activité extérieure prodigieuse tout ce qu'il a fait encore comme homme de cabinet, les volumes nombreux et considérables qu'il a composés La liste seule ne prend pas moins de 20 colonnes dans Haag, et nous ne la reproduirons pas; mentionnons seulement ses Poèmes, odes, sylves, épigram-mes, élégies, etc.; sa tragédie d'Abraham sacrifiant; sa comédie du Pape malade; son édition du N. T. grec, revue d'après de nombreux mss. originaux (entre autres le fameux codex qui porte son nom et qu'il donna à l'université de Cambridge), ses trad. du N. T. en latin et en français; ses Notes ou Comment, sur le N. T. (folio, 6 éditions de son vivant); ses écrits sur la Cène, ses essais de Confessions de foi, sa trad. des Psaumes, ses Discours ou Harangues prononcées en divers lieux; ses traités contre Castalion, Baudouin, Brentius, Gentilis, Xain-tes, Andreâ, etc.; sa Vie de Calvin, son Hist. des égl. réf. de France; divers comment, sur l'A. T., et une quantité innombrable de lettres, dont les unes sont conservées à Genève (3 ou 4 vol.), d'autres à Berne, Saint-Gall, Paris, et dans une foule d'autres biblioth. publiques et particulières. M. Baum, dans son Thêod. de Bèze, a reproduit un choix fort bien fait et assez complet des principales brochures, d'ailleurs presque introuvables, de ce riche et fécond écrivain; plusieurs auraient suffi à faire une réputation. Le caractère satyrique, et même sarcastique, de quelques-uns de ses écrits s'est adouci avec l'âge, mais rien ne dépasse les limites de ce que se permettaient les controversistes d'alors. Quant à sa trad. des Psaumes, v. Marot. — Si Bèze a soutenu le droit de l'État d'intervenir dans les questions d'hérésie, c'est une inconséquence qu'il a partagée avec tous les hommes de son temps; il n'avait pas encore entièrement rompu avec toutes les traditions romaines.

 

BIBERÀCH, Nicolas (de), témoin inconnu de la vérité; vécut dans la 2« moitié du 13me siècle, visita Rome et séjourna quelque temps à Erfurt. Il a écrit dans un mélange de vers et de prose contre la corruption du clergé (De aver-tendomato, et: Occultus), mais rien contre les erreurs de l'Église.

 

BIBIANA, sainte, martyre à Rome sous Julien. Le préfet Apropianus ayant perdu un œil l'attribua aux sortilèges des chrétiens et les persécuta cruellement; il tomba surtout sur la famille du chevalier Flavien dont tous les membres furent mis à mort; Bibiana, attachée à un poteau, fut tuée lentement à coups de verges. Une église fut érigée au 5®e siècle sur son tombeau, près la porte Saint-Laurent; Urbain VIII la fit restaurer 4625 par Bernini; la statue de la sainte passe pour le chef-d'œuvre de ce maître.

 

BIBLIANDER (l'homme du livre), Théodore, né à Bischofzell, Thurgovie, vers 1505, collègue de Myconius à Zurich, puis successeur de Zwingle comme professeur de l'A. T.; très versé dans l'hébreu et dans les langues sémitiques, ce qui lui amena de nombreux élèves, entre autres Bullinger. Il combattit les doctrines calvinistes sur la prédestination, et attaqua Pierre-Martyr avec une aigreur si passionnée 1356, qu'il s'aliéna les esprits et reçut sa démission 1560. f de la peste 26 nov. 1564.

 

BïCKELL, Jean-Guill., né 2 nov. 1799 à Marbourg, prof, de droit en 1826, juge et président de la cour d'appel à Cassel, ministre de la justice en 1846, et l'un des soutiens les plus décidés du ministère Hassenpflug. f 1848. Conservateur en politique, il prit une part active aux luttes ecclés. de la Hesse, demanda le régime synodal et combattit le rationalisme. Auteur d'une Hist. du droit ecclésiastique.

 

BIDDLE, ou Bidelle. premier chef d*s unitaires anglais, né 1615 à Watton. écrivit 1647 douze arguments contre la déité du Saint-Esprit, se rétracta, puis recommença ses attaques contre la Trinité, en s'appuyant de témoignages des Pères, fut condamné à la prison par la cour presbytérienne de Westminster, fut relâché 1651, publia de nouveau 2 catéchismes hétérodoxes qui furent brûlés par la main du bourreau, et lui-même enfermé par ordre de Cromwell dans une des Sorlingues. De retour à Londres il reprit ses petites réunions, mais la Restauration le renvoya en prison 1662, où il mourut dans le courant de l'année. Sa moralité était irréprochable. Il admettait la personnalité, mais non la divinité du Saint-Esprit.

 

BIEL, Gabriel, né à Spire, f P*ss»

pour le dernier des scolastiques; il étudia à Er-furt 1442, fut prédicateur à Mayence. concourut à la fondation de l'université de Tubingue 1477, fit un voyage à Rome, et après avoir enseigné quelques années la philos, et la théologie à Tubingue, obtint d'Eberhard un canonicat dans le nouveau couvent de Saint-Pierre à SchSnauerwald où il mourut. Il approuvait les décrets du conc. de Bâle, mettait les conciles au-dessus du pape, condamnait la corruption de l'Église, et prétendait que c'est Dieu, et non le prêtre, qui donne l'absolution. Dailleurs très catholique, comme le prouvent ses Sermons et son Exposition du canon de la sainte messe.

 

BILLICAN, Théobald. dont le vrai nom était Gerlach, né à Billigheim, près Landau, à la fin du 15m® siècle; reçu bachelier à Heidelberg 1512, se convertit k la réforme après le congrès du 26 avril 1518, présidé à Heidelberg par Luther. Il se maria et l'université lui refusa le titre de docteur; il prêcha contre le purgatoire et sur Christ seul médiateur et il dut quitter la ville. Après une douzaine d'années passées à Nôrdlingen, qu'il amena à la foi évangélique, il se décida 1535 à retourner à Heidelberg, où il y avait un milieu intellectuel plus approprié à ses besoins. L'université ne le vit pas revenir avec plaisir, et des démarches furent faites pour le forcer à s'éloigner, mais le prince s'y refusa en alléguant que Billican ne revenait pas comme théologien, mais comme juriste. Il donna en effet des cours sur les Décrétales et le Droit féodal, mais ne fut pas reconnu comme prof, régulier. Le nouveau duc, Frédéric II, lui fut encore moins favorable. Après quelques mois de prison, sans jugement, 1544, il fut relâché, et finit ses jours à Marbourg comme prof, de rhétorique, f 8 août 1554. Il a laissé des travaux sur Michée, Aris-tote et la Communion sous les deux espèces. Il était très luthérien.

 

BINGHAM, Joseph, né 1668 à Wakefield, élève d'Oxford, bachelier 1687, maître ès arts 1690, pasteur d'abord près de Winchester, puis 1712 à Havart, près Portsmouth, où il f 1723. Il est connu par 2 vol. de Sermons et par ses Origines ecclés. ou Antiquités de l'Égl. .chrétienne 1708-1722; la 2e éd. 1724 forme 2 v. R Cet ouvrage, d'une grande valeur pour le temps, fut bientôt traduit en plusieurs langues. 11 conduit le lecteur jusqu'à lafde Grégoire-le-Grand.

 

BLAARER, Ambroise, d'une famille patricienne, né 12 avril 1492 à Constance. Plac£ de bonne heure en Souabe dans un couvent de bénédictins, il se rendit ensuite à Tubingue où il se lia avec Mélanchthon et fit de bonnes études classiques. De retour au couvent 1515 il fut nommé prieur et prédicateur. Il essaya d'introduire dans le culte la lecture de la Bible; mais cela déplut à l'abbé, et le 8 juin 1521 il dut quitter le couvent et retourna à Constance. Il ne parait pas être intervenu activement dans les premiers essais de réforme, mais déjà en 1524, à la demande du Conseil, il prêche contre le culte de Marie et il est nommé pasteur. Sa tendance était modérée; à plus d'une reprise il intervint comme conciliateur entre Luther et les théologiens suisses à propos de la Cène, des images, des autels et des orgues. Il se maria en 1533 et fut appelé l'année suivante comme pré-dicateui à Stutlgard, après avoir fait adopter le 2 août 1534 une formule de concorde, qui satisfaisait également les Suisses et les luthériens et qui introduisit en Wurtemberg une Église unie plus de 2 siècles avant que la Prusse en fût dotée. Il s'établit ensuite à Tubingue d'où il rayonna dans la partie méridionale du pays. Les difficultés qu'il rencontra de la part des catholiques, et surtout de la part des luthériens stricts, l'entravant dans son œuvre, il retourna 1538 à Constance, où l'attiraient un frère et une sœur bien-aimés. Il avait servi le Wurtemberg 4 ans sans rien recevoir; à bout de ressources, ayant sacrifié tout son patrimoine, il fut obligé à cause de sa famille de demander un modeste traitement, et le Conseil lui alloua 75 livres. Il evangélisa le sud de la Bavière, de Lindau à Augsbourg, prit part à de nombreuses conférences, se rendit en 1548 à Winterthour, prêcha à Bienne et en Thurgovie de 1551-1559, et revint à Winterthour où, après avoir refusé de bonnes positions à Bâle, Berne et Gemmingen, il f le 6 déc. 1564. Il a composé en vers et en prose plusieurs petits ouvrages d'édification, de controverse et d'actualités. C'était un homme de cœur, un penseur et un excellent prédicateur; il s'attachait plus à l'essentiel qu'aux choses secondaires.

 

BLAIR, Hugh, célèbre prédicateur, profess. d'éloquence sacrée et de rhétorique. Né 2 avril 1718 à Édimbourg, membre de l'église presbytérienne, il fut après un court ministère dans le comté de Fife, rappelé dans sa ville natale où il fut successivement pasteur à Canon-gate, dans la Cité, et enfin de 1758-1800, à la cathédrale. En 1757 il avait aussi été nommé docteur, et en 1762 prof, d'éloquence et de belles-lettres, fonctions qu'il conserva jusqu'en 1783. Ses 5 vol. de Sermons, publiés à Londres 1777 sont très bien travaillés, de vrais morceaux de rhétorique, mais froids, et l'on n'y sent pas le christianisme vivant; ils obtinrent un immense succès, et furent trad. en allemand, français, hollandais, italien et slavon. Ses Lectures sur la rhétorique et les belles-lettres, 3 vol. 8°, sont pleines d'observations fines sur la véritable éloquence; il blâme sévèrement l'usage anglais de lire les sermons. Il avait aussi publié en 1763 une Dissert. crit. sur les poèmes d'Ossian.

 

BLAISE, saint, év. de Sébaste en Arménie, martyr sous Dioclétien 316. Par ses prières, il sauva un enfant qui avait une arête dans le cou, et dès lors, le jour de sa fête, 3 févr., les catholiques font des cérémonies qui doivent les préserver des maux de gorge. Comma le martyr fut déchiré avec des peignes de fer, les cardeurs. l'ont pris pour leur patron.

 

BLANDINE, vierge martyre à Lyon, sous Marc-Aurèle 177. Après avoir été torturée un jour entier par des bourreaux qui s'en fatiguèrent, elle fut exposée aux bêtes féroces, mais celles-ci, plus humaines, l'épargnèrent. Au bout de quelques jours elle fut ramenée dans le cirque, assista au supplice de ses frères dans la foi, fut de nouveau fouettée de verges, puis assise sur la chaise ardente et enfin livrée aux taureaux de l'arène qui mirent un terme à ses souffrances en la lançant en l'air avec leurs cornes. Les païens eux-mêmes avouèrent n'avoir jamais vu une femme subir tant de cruautés avec autant de constance.

 

BLANDRATA, Georges, ital. Biandrata; né 1515 d'une famille noble de Saluces, qui avait toujours marqué parmi les adversaires de l'Égl. de Rome. Il étudia la médecine, mais bientôt devenu suspect de protestantisme, il s'enfuit en Pologne, puis vint à Genève où il eut avec Calvin pendant plusieurs années des entretiens, qui ne réussirent pas à dissiper ses doutes sur la Trinité. Calvin, fatigué d'un scepticisme qui ne lui paraissait pas sérieux, cessa de le voir.

Biandrata se rendit à Zurich auprès de Vermi-gli, mais sans plus de succès. Il se décida enfin à retourner en Pologne 1558, où il trouva, outre la clientèle du roi Étienne Bathori, des amis partisans de ses doutes et de ses idées religieuses. Mais toujours poursuivi par Calvin et par les théologiens suisses, il renonça à la lutte, se retira en Transylvanie 1563 auprès de Jean Si-gimond, fut accusé, probablement à tort, d'avoir favorisé l'établissement des jésuites dans le pays, et f vers 1590, étouffé dans son lit, dit-on, par un neveu qui convoitait son héritage.

 

BLASIE (Sainte-), célèbre abbaye de bénédictins dans la Forêt-Noire, fondée au 8"" siècle sur les bords de l'Âlbe et sous le patronage du couvent de Rheinau, qui lui fit don d'abord des os de saint Biaise, mais qui se les fit restituer plus tard, sauf un bras. Enrichie par le comte Régimbert de Seldenburen, elle devint indépendante, eut son propre abbé 945 et se construisit un couvent 948. Sa prospérité ne cessa d'aller croissant; son abbé était prince de l'empire en 1746. Après la paix de Presbourg, l'abbaye fut sécularisée et donnée au duché de Bade. Elle a toujours eu un renom scientifique, mais plus histoire qu'en théologie. Plusieurs de ses tûoines sont devenus célèbres, Herrgott, Chuno, Ekhhorn, Neutgart, etc.

 

BLASTARÈS, prêtre, puis moine de l'ordre de saint Basile, auteur vers 1335 d'un Gompen-diam de toutes les lois et règles ecclésiastiques et civiles, rangées par ordre alphabétique des matières sous 303 titres, d'après le recueil de Photius et les Gomment, de Zenaras et Balsa-ffloo. Ce travail répondait à un besoin et fut reço avec reconnaissance par le clergé d'orient.

 

BLEEK, Fréd., 1793-1859. Originaire du Holstein, il étudia à Kiel et à Berlin, fut pri-vat-docent sous Schleiermacher 1818, et prof, de critique sacrée à Bonn depuis 1829. Auteur dune Introd. à l'ép. aux Hébreux, id. à l'A. et auN. T., Essais de critique évangélique, Explication des trois évang. synoptiques, Comment. sttrl'Apocal. Esprit sagace et lucide, il défend les droits de la science, mais n'abandonne pas le terrain de la foi.

 

BLEMMYDÉS, savant grec du 13™ siècle, qui travailla avec ardeur à la réunion des Églises grecque et romaine. Il était moine et prêtre en Macédoine, lorsque l'emp. Ducas Batazès, 1222-1255 convoqua une discussion religieuse à Nicée, résidence des empereurs grecs, pendant que les latins occupaient Constantinople. Blem-mydès y prit part 1233 et défendit avec érudition le dogme latin de la procession du Saint-Esprit. Il fut nommé plus tard patr. honoraire de Constantinople, mais il resta et f dans son coivent. Il a laissé 2 Traités sur la doctrine la-line.

 

BLONDEL, David, né 6avril 1591 à Châlons-sar-Marne, fit de brillantes études et fut nommé 1614, pasteur à Hou dan, Seine-et-Oise, où il resta une trentaine d'années, très considéré, quoique sans talents bien remarquables pour la prédication. Il assista, presque toi^jours comme secrétaire, à une vingtaine de synodes provinciaux et à 4 synodes nationaux, refusa en 1631 la place de professeur à Saumur, fut autorisé en 1644 à venir résider à Paris, où il pouvait rendre plus de services à l'Église par ses écrils que par sa prédication; accepta en 1650 la chaire de prof, d'histoire à Amsterdam, vacante par la mort de Vossius, mais perdit bientôt la vue sous la double influence d'un travail excessif et d'un climat trop humide. 11 n'en continua pas moins ses études, dictant puisqu'il ne pouvait plus écrire, et f le 6 avril 1655. Suspecté tour à tour de latitudinarisme, d'universalisme et d'arminianisme, il n'a mérité ces reproches que parce qu'il a blâmé l'aigreur ou la violence des controverses sur ces questions. L'importance de ses travaux historiq. et critiques lui valut du synode de Castres un don de mille francs pour achat de livres; du synode national de Charen-ton 1645 un supplément de traitement de mille francs, et de la cour de France, mais dans In dernière année de sa vie, une pension de 3000 livres, dont il jouit peu. Ses ouvrages, qui sont en général lourdement écrits, les phrases incidentes s'enchevêtrant les unes dans les autres, sont en revanche appréciés pour leur excellenle •méthode, la sûreté des renseignements, la profondeur de la science, la clarté de la critique et l'impartialité des jugements. Il y en a une vingtaine, d'étendue et de valeur diverses. Le premier fut une Modeste déclaration de la sincérité et vérité des égl. réf. de Fr. Sedan 1619, 8° en réponse à l'év. de Luçon, qui fut depuis Richelieu. Vint ensuite, Genève 1628, 4°, son Pseudo-Isidorus, où il démontre contre le jésuite Torrès, d'Espagne, l'imposture des Fausses décrétâtes. Son traité folio, Genève 1641, De la primauté en l'Église, est une réfutation magistrale du liv® du cardinal Du Perron 1620, revendiquant contre Jaques 1er d'Angleterre la suprématie absolue du pape. En 1646 il prouve dans son Apologie, que les mots de prêtre et d'évêque désignaient à l'origine les mêmes fonctions. Mentionnons encore son Familier éclaircissement, dans lequel il combat l'un des premiers, l'histoire de la papesse Jeanne, Amst. 1647-1649-1657, souvent réimpr. et trad., combattu par Coignard, Des Marets et Spanheim, approuvé par Charnier et Du Moulin, et accueilli avec joie par les catholiques; son livre contre les oracles Des Sibylles: son Convnoni -torium en faveur de la liberté de conscience, et ses Généalogies de France, en latin, 2 vol. contre Chifflet, sur les généalogies des rois de France; c'est pour ce livre, composé lorsqu'il était déjà aveugle, que la cour lui aurait faitune pension de 3000 livres. Il a publié aussi un recueil des Actes authentiq. des égl. réf. de

France, Germanie, etc. Amst. 1655, in-4<> et un certain nombre de dissertations sur des points particuliers. — L'aîné de ses frères, Moïse, fut pasteur à Meaux, puis à Londres; le second, Aaron, à Etaples et & Imécourt. — Un autre Blondel, né à Paris 1665, f ^ Londres 4 oct. 1734, médecin distingué, ne paraît pas avoir appartenu à la même famille.

 

BLOUNT, Charles, déiste anglais, qui fit grand bruit et obtint un succès de scandale par quelques-uns de ses écrits. Né 1654; se suicida 1693, parce que, devenu veuf, il ne put obtenir la main de sa belle-sœur. Ses principaux ouvrages sont: Anima mundi, traitant de l'état des âmes après la mort, 1679; la Vie d'Apollonius de Thyanes, avec notes, 1680; Origine de l'idolâtrie 1680; la Religion des laïques 1683; les Oracles de la raison, et le Manuel des Déistes, posthumes.

 

BLUMHARDT i<> Chrétien-Gottlieb, né 1779 k Stuttgard; il eut une enfance et une jeunesse matériellement difficiles, réussit cependant à achever ses études à Tubingue, vint à Bâle 1803 comme secrétaire de la Société chrétienne allemande, concourut 1804 à la fondation de la Soc. biblique; rappelé chez lui en 1807, il fut jusqu'en 1816 pasteur à Burg, mais il revint à Bâle comme directeur de la maison des missions, qui venait de se fonder et il sut leur donner une énergique et bonne impulsion, réveillant en même temps dans toute l'Allemagne l'intérêt missionnaire, et multipliant les sociétés auxiliaires. Il établit des rapports réguliers avec la Church Missionary Society de Londres, qui se chargea des élèves formés à Bâle, et il décida son Comité à se créer aussi une mission indépendante, en Russie d'abord et dans le Caucase. Mais les missionnaires ayant été bannis en 1836, elle tourna son activité vers les Indes orientales et vers la côte occidental^ d'Afrique, f 19 déc. 1838. On lui doit le Magasin des Missions, revue trimestrielle très bien rédigée et une Hist. génér. des missions, dont la trad. franç. mieux ordonnée, a pour titre Hist. de l'établissement du christianisme, etc. 4 vol. Genève 1838.

2o Jean-Christophe, né 1805 à Stuttgard, fils d'un boulanger, maître à la maison des missions de Bâle, puis pasteur à Môttlingen, près Calw. En 1852 il acheta les bains de Boll, près de Goppingen, dont il fit un établissement de santé pour le traitement des maladies physiques, mentales et morales par le repos, le régime, la prière et une cure d'âme attentive. Il a obtenu des résultats remarquables et a été pour beaucoup d'âmes le messager du salut, pour beaucoup de malades l'instrument de leur gué-rison. f à Boll, 25 févr. 1880.

 

BOCHART, ou Bouchard, famille de robe,

originaire de Bourgogne, mais établie à Paris.

1<> Jean, avocat au Parlement sous François

2° Son fils Etienne, avocat général à la chambre des comptes et conseiller au Parlement, épousa en secondes noces Jaqueline Luillier, dont il eut 7 enfants, entre autres Christophe, avocat, père du pasteur Matthieu, et René, père de Samuel.

3° René, pasteur, d'abord en Angleterre, puis à Dieppe 1590 et depuis 1594 à Rouen, où il fait construire un temple pouvant contenir 7 à 8000 personnes. Il épouse 1595 Ester Du Moulin, sœur de Pierre, dont il a une fille et un fils, le célèbre Samuel, + 1614 après un ministère de 23 ans.

4<> Samuel, né à Rouen 30 mai 1599, fait ses premières études avec son père, puis à Paris, â Sedan, à Saumur; accompagne Caméron à Oxford, se rend à Leyde où il étudie encore la théol. sous André Rivet et les langues orientales sous Erpénius, et rentre en France où il ne tarde pas à être nommé pasteur à Caen. Le jésuite Véron l'ayant provoqué à une discussion publique, Bochart dut accepter et choisit comme assistant son collègue Baillehache (pasteur de Caen 1626-1664). La conférence dura 9 jours, du 22 sept, au 3 oct. 1628, et roula sur tous les points controversés. Véron en ayant publié une relation tronquée, Bochart rétablit les faits dans ses Actes de la Conférence, 1630, 2 vol.. et le jésuite lui ayant répondu par des libelles diffamatoires, le parlement indigné lui imposa silence. Bochart put reprendre en paix ses savantes recherches, et publia 1646 la partie de sa Geographia sacra, le Phaleg, qui traite de la dispersion des peuples à la suite de la confusion des langues; la 2®o, intitulée Chanaan, parut en 1651 et traite surtout des Phéniciens et de leurs colonies. Son enthousiasme pour les langues orientales lui faisant voir de l'hébreu ou du phénicien partout, il se laissa entraîner à des étymoiogies et k des hypothèses chimériques; son livre est aujourd'hui dépassé sous plusieurs rapports et doit être rectifié sous d'autres, mais il était pour le moment un immense progrès et il obtint un succès tel que Christine de Suède, désirant en connaître l'auteur, l'invita à venir à Stockholm. Il fit ce voyage en 1652, avec son élève Huet, le futur évêque d'Avran-ches, mais revint bientôt à Caen pour y reprendre ses modestes fonctions. En 1660 il fut délégué par la Normandie au synode de Loudun. Il faisait partie de l'académie de Caen fondée en 1652; c'est pendant une de ses séances, en dis-cutant avec Huet, qu'il fut frappé d'une attaque d'apoplexie, et f le 16 mai 1667. Sa réputation était immense comme théologien, naturaliste, philologue et géographe. Outre les ouvrages cités, il faut mentionner encore sa Lettre à tf. Morley, chapelain du roi d'Angleterre sur 3 questions controversées, Vendôme 1650; sa Réponse au P. La Barre, jésuite, Genève 1662; son Hierozdcon. suite de monographies sur les divers animaux nommés dans la Bible, vrais ou allégoriques, Londres 1663, 2 vol. f<>: 3 vol. de sermons, publ. après sa mort. Dans la collection de ses œuvres, Leyde 1675, on trouve aussi de curieuses dissertations sur des sujets bibliques, et une Lettre à Segrais, 1663, pour prouver qu'Énée n'est jamais venu en Italie.

5° Matthieu, petit-fils d'Etienne, par Christophe sieur du Ménillet, donc cousin-germain de Samuel; pasteur à Alençon, auteur de plusieurs ouvrages de controverse estimés, f 20 fév. 1662.

 

BOCKHOLD, ou Bockehohn, Jean, plusconnn sous le nom de Jean de Leyde, était originaire de La Haye. Né vers 1510. Après avoir visité l'Angleterre, le Portugal et Lubeck, comme ouvrier tailleur, il s'établit en cette qualité à Leyde, où il se maria et où il ouvrit en outre aux portes de la ville une petite taverne. Il avait bonne façon, chantait bien, faisait des vers, composait au besoin des comédies-bouffes, et donnait de l'entrain au métier. C'était un libre-penseur à la mode de son temps. Il se rendit deux fois en 1533 à Munster, Westphalie, où les anabaptistes enthousiastes de la Hollande s'étaient réfugiés à cause des persécutions: il fit la connaissance de Matthiesen, qui le décida à se joindre! eux comme apôtre. 1534. Il avait alors de 21 à 30 ans. Matthiesen ayant expié par sa mort une folle imprudence commise à Pâques contre l'Église, Bockhold, en vertu d'une prétendue révélation, réclama sa charge, sa succession et sa femme; il établit dans la ville une constitution théocratique avec un conseil de douze anciens, chassa l'év. Waldeck. se fit proclamer prophète et roi, reconnut la polygamie et tous les désordres, plongea Munster dans l'anarchie, et quand, après un siège de 6 mois la ville fut prise par trahison et retomba entre les mains de Waldeck, Jean fut livré au supplice des tenailles rougies 1535, et ne se montra pas dans la torture à la hauteur de ce qu'il avait été dans la victoire. Il est difficile de faire la part exacte de ce qu'il y eut de conviction et d'impasture chez ce fanatique, mais l'imposture semble dominer.

BOECE lo Anicius Manlius Torquatus Seve-rmus Bo&tius, né à Rome entre 470 et 475, d'une des familles les plus illustres du pays, étudia à Athènes chez Proclus et cultiva avec succès les lettres et la philos, grecques. Nommé consul vers 508, comme son père l'avait été avant lui, il se montra le digne représentant des grandes traditions romaines. Il fut témoin des événements politiques de l'Italie et y joua même un certain rôle. Théodoric et ses Ostrogoths surent l'apprécier et le consultèrent souvent. Il ne se servit de son influence que pour faire du bien, mais la considération dont il jouissait finit par lui attirer des envieux, et sous prétexte de haute trahison il fut dépouillé de ses charges et honneurs, emprisonné à Pavie et finalement mis à mort au milieu de cruels supplices, 524. Les catholiques, par une singulière méprise, en ont voulu faire un saint et un martyr, croyant que c'était par son orthodoxie qu'il s'était attiré la haine de l'arien Théodoric. Sans nier qu'il ait pu se trouver sous des influences chrétiennes, il est resté païen. La tendance de son esprit le poussa toujours à chercher dans la philosophie une trêve aux maux qui suivent les invasions des barbares. Son ouvrage le plus remarquable est intitulé: De consolatione philosophiœ; nous le possédons encore. Il a traduit aussi quelques ouvrages de Porphyre, d'Aristote. etc. La vieille division des Arts et sciences en Trivium et Quadrivium, si fort à la mode au moyen âge, se réclame de lui. 11 avait quelque tendance au néo-platonisme, quoique du reste il fut plutôt péripatéticien.

2° M. Sébastien, théologien allemand, né 1515 à Guben, f à Halle 1573; recteur à Eisenach 1536, étudia à Wittenberg, et fut successivement pasteur à Mulhouse, puis diacre et surintendant à Halle, où H s'occupa avec soin des écoles et fonda ia biblioth. de Sainte-Marie. Il appartenait avec Chemnitz, au parti strict luthérien, et eut une bonne part dans la conversion de l'archev. Sigismond. Il a écrit un Index de quelques erreurs de Zwingle.

 

BŒHME, Jacob, théosophe chrétien protestant, né 1575 à Altseidenberg, près de Gôrlitz. Silésie. Fils de paysans, il apprit à lire et à écrire, fit un apprentissage de cordonnier, voyagea comme tel jusqu'en 1594, s'établit à Gor-litz, épousa la fille d'un charcutier dont il eut

4 fils, fut banni en mai 1624 à l'instigation du pasteur Richter, se rendit à Dresde où il tomba malade et fut ramené à Gôrlitz, où il f le 17 nov. de la même année. Richter était mort, son successeur refusa de célébrer les funérailles de Bœhme; ce fut un diacre qui s'en chargea, en ayant soin de dire qu'il aurait mieux aimé faire

5 lieues que d'avoir à présider à ce service funèbre. — Bœhme rechercha de bonne heure la

vie en Dieu, et sa piété, intime mais pleine de •

force, lui valut souvent les moqueries de ses camarades et les censures de ses maîtres. Les discussions théologiques dont il fut témoin dans ses voyages le poussèrent à la conquête de la vérité. Ce fut la grande affaire de sa vie. Il étudia Paracelse, des astrologues, des mystiques, des chimistes; il se lia avec Balthasar Walter qui venait de passer 6 ans en Orient à la recherche de la sagesse et qui déclara l'avoir enfin

trouvée dans l'échope du cordonnier; Walter appelait Bœhme le philotopkus teutonicus. Mais après tout on peut dire que Bœhme n'eut d'autre maitre que la Bible. Sa faculté de s'absorber était si puissante que 4 fois il eut des extases touchant à la vision, qui le transportèrent dans un autre monde. Une première fois ce fut pendant ses voyages: il se vit entouré d'une lumière divine et demeura 7 jours dans cette contemplation céleste. Le seconde fois, en 1600, la même lumière lui apparut et il put lire jusqu'au fond des cœurs et déchiffrer les secrets de la nature. En 1612 et 1619 nouvelles vivions. Il parlait peu, ne s'en glorifiait pas, mais elles déteignaient sur toute sa théologie, si même elles n'en étaient pas le produit, et tous ses livres s'en ressentent. Dans son premier, l'Aurore, il raconte comment il a appris à connaître toutes ces choses, et comment il a été amené à les écrire; il ne voulait pas jeter sur le saint mystère un coup d'œil indiscret; il voulait seulement connaître le cœur de Jésus et s'y cacher entièrement. C'est alors, ajoute-t-il, que les portes se sont ouvertes pour moi, tellement que j'en ai plus vu et appris en un quart d'heure que je n'en eusse appris pendant des années dans les plus hautes écoles de ce monde. » Outre l'Aurore il a écrit dans les 5 dernières années de sa vie: Les trois principes de l'essence divine, la Triple vie de l'homme, Quarante questions sur l'âme (ou Psychologia vera), le Miroir de l'éternité, la Contemplation de Dieu, l'Incarnation de Jésus-Christ, et plus de 20 autres traités ou dissertations sur des sujets de vie intérieure. Il n'a du reste rien publié lui-même; c'est son disciple Abr. de Frankenberg qui a réuni et édité ses œuvres complètes pour la première fois, Amsterd. 1682, 10 vol. Plusieurs de ses écrits ont été trad. en français par Saint-Martin dès 1669. Les idées mystiques.de B. avaient fait de rapides conquêtes, surtout en Hollande et en Angleterre. Un fils de Richter, chose curieuse, s'en fit l'ardent propagateur. Charles 1er, 1646, fit traduire ses œuvres en anglais. Elles trouvèrent aussi de violents adversaires et la discussion en vint un moment à passionner le public, au point qu'à Hambourg en 1690 il y eut des troubles populaires contre trois pasteurs suspects de bœhmisme. Parmi ceux qui lui ont rendu un beau témoignage, malgré quelques réserves, il faut nommer Spe-ner et Fréd. Schlegel. On ferait une longue liste des livres écrits à son sujet dans la plupart des langues de l'Europe.

 

BOGATSKY, Ch.-Henri (de), né d'une famille russe de la Basse-Silésie le 7 sept. 1690; élevé par une mère pieuse qui lui communiqua sa foi en la prière, il apprit jeune encore à cher-cher en Dieu sa force et le bonheur. Son père voulut lui faire embrasser la carrière militaire, niais il ne se sentait pour les armes aucune vacation; il se rendit à Iéna en 1713 pour faire ses études de droit, et dans une courte visite à Halle il eut l'occasion de voir et d'entendre Francke, Freylinghausen et d'autres piétistes, contre lesquels il avait des préventions, mais qui exercèrent sur sa vie une influence décisive. Il résolut d'abandonner le droit et de se consacrer entièrement au service de Dieu; il quitta Iéna, se rendit à Halle 1715 pour y faire sa théologie et comprit toujours mieux ce que c'est que la justification d'après l'Écriture: t Je lisais avec foi la Bible, dit-il, pour y trouver sa pure morale, et j'y trouvai de plus en plus Christ et son doux Évangile. > Mais sa mauvaise santé le contraignit d'abandonner les études, 1718; il retourna en Silésie, et sans brevets ni parchemins exerça pendant le reste de sa vie l'humble et paisible ministère d'un témoignage fidèle rendu en temps et hors de temps, prêchant Christ dans les familles nobles qui le recevaient, le prêchant encore dans ses promenades et dans ses voyages. Il épousa en 1726 sa cousine Eléo-nore de Felss, dont il eut deux fils, mais qui mourut déjà en 1734. Ses fils ayant été placés dans des établissements d'éducation, il accepta en 1740 la charge de pasteur et directeur spirituel à la cour du duc de Saalfeld, et à la mort du duc, 1746, il revint à Halle où le jeune Francke lui offrit l'hospitalité dans la Maison des Orphelins. Il y passa en paix ses 28 dernières années jusqu'à sa f 15 juin 1774, se rendant utile à la maison par son influence et ses cultes domestiques, aux étudiants de l'université par ses conférences et ses conseils, à l'église par ses cantiques et ses ouvrages d'édification. Le Dr Knapp de Halle a publié sa Biographie 1801, et plusieurs de ses livres ont été plusieurs fois réimprimés, entre autres son Trésor pour chaque jour. Son travail le plus considérable, ce sont ses Considérations sur le N. T. 7 vol. 1755-1761. Ses cantiques, fort nombreux, sont plutôt faits pour le culte privé que pour le culte public.

 

BOGOMILES, hérétiques de Bulgarie; v. Cathares.

 

BOGORIS, roi des Bulgares, q. v.

 

BOHÈME. Grande contrée du centre de l'Europe, habitée en partie par des Slaves, ou Tschè-ques. Elle fut évangélisée au 9®* siècle, sous l'influence grecque, par Cyrille et Méthodius, et conserva longtemps le culte en langue vulgaire. Mais à partir de Boleslaw 1er rinfluence romaine se fit sentir, l'évêché de Prague fut détaché de l'arche v. de Ratisbonne; la Bohême elle-même, séparée de la Bavière, fut rattachée à la Saxe, et Jean XIII y établit définitivement la hiérarchie romaine 967, avec tous les abus de son Église. Les protestations ne manquèrent jamais d'autant plus que la question religieuse je compliquait d'une question de race, et l'on vit successivement Militsch, Stickna, Janowsky et d'autres, préparer les voies à Jean Huss et à ses compagnons. Les supplices de Constance excitèrent les passions au lieu d'arrêter le mouvement de réforme. La suppression de la wape dans la Cène devint un signe de ralliement. Les hussites prirent les armes et se divisèrent bientôt en calixtins ou utraquistes, plus modérés, qui ne réclamaient que le rétablissement du calice et quelques réformes de détail, et taborites, qui insistaient pour l'abolition de loates les erreurs de doctrine, ou autres, non justifiées par l'Écriture. Le concile de Bâle en faisant par ses Compactata certaines concessions aux calixtins 1433, assura pour un siècle environ une paix relative. Les taborites en revanche s'unirent davantage aux chrétiens de la Moravie; ils formèrent avec eux une alliance fraternelle. Des penseurs distingués, des prédicateurs, des savants, des nobles illustrèrent ce petit troupeau des frères de Bohême (c'est le nom qu'ils prirent), et ils comptèrent bientôt jusqu'à 200 lieux de culte. L'avènement de Luther les trouva prêts, et en 1519 ils ont déjà leurs églises et leurs docteurs luthériens, saus qu'on puisse préciser le moment oit ils passèrent d'une confession dans l'autre, la transition ayant té en quelque sorte toute naturelle. Un grand nombre d'églises réformées existaient aussi en Bohême vers 1620. Mais les jésuites, qui étaient a Vienne depuis 1551, furent lâchés contre la Bohême pour la ramener à l'unité romaine, et ils y réussirent en partie, grâce à l'appui de Ferdinand II. À force de vexations ils exaspérèrent les protestants et leur firent commettre des fautes qui devaient être durement châtiées. Rodolphe 11 avait publié en faveur des frères des Lettres patentes de tolérance, qui leur garantissaient le libre exercice de leur culte; les catholiques tirent en sorte que cet édit resta à l'état de lettre morte, et quand le comte de Thurn réclama au nom de l'édit royal, les catholiq. lui firent une réponse dérisoire, qui mit le feu aux poudres; les mécontents montèrent au château de Prague et suivant, parait-il, un vieil usage de la Bohême, ils jetèrent les gouverneurs par la fenêtre. C'était le 23 mai 1618; ce fnt le commencement de la guerre de Trente ans, qui aboutit aux traités de Westphalie et à la proclamation de la liberté religieuse. Malheureusement la Bohême profita peu; elle avait perdu par la mort, l'exil ou l'émigration, un grand nombre de ses habitants et des meilleurs, qui avaient été porter en Saxe et dans les pays libres de l'Allemagne leur travail, leur intelligence et leur industrie. La contre-réfjrmation décrétée par Ferdinand continua son œuvre de proscription, de confiscations, d'enlèvements d enfants, de dragonades. et ce n'est que lorsque Joseph II eut rendu un nouvel édit de tolérance. 13 octobre 1781, que les protestants recommencèrent à se montrer, d'abord timidement, puis plus nombreux; ils restaurèrent leur culte, firent venir des pasteurs à leurs frais, mais, ruinés comme ils l'étaient, ils ne purent, et ne peuvent encore aujourd'hui pourvoir qu'à grand'peine au strict nécessaire de leurs conducteurs spirituels. — v. Morans, et Palacky, Hist. de Bohême.

 

BOISSARD, Georges-David-Fréd., né 16 août 1783 à Monlbéliard, pasteur réformé à Lillr* 1805, à Nancy 1807, appelé à Paris 1809 comme premier pasteur et fondateur de l'égl. de la Conf. d'Augsbourg. f subitement 1836. Auteur d'une Hist. de la Bible, estimée; d'un Précis de l'hist. de l'égl.; d'un recueil de Prières pour le culte domestiq., livres de chants, catéchismes; Observations sur la Loi du sacrilège; divers articles et biographies dans l'Encyclop. des gens du monde, et dans le Musée des protestants célèbres. Son caractère large, éloigné de tout esprit de secte, lui valut ce quatrain du pasteur Marron:

Qui neqne Calvinum, nec te, Luthere, wsgistros Invocat; o puro et aacro fonte petit,

Unius in Christi jura tua verba, tabellâ

BoisôàrduB carnm spirat in h&cce eaput.

Son fils unique, né Ie»* mars 1811, a été successivement pasteur dans le Loiret et la Marne. — Un pasteur de la même famille, Louis B., f 1872 à Glay, a laissé 2 vol. sur l'Égl. de Russie, 1867.

 

BOLINGBROCKE. Henri Saint-Jean (de), né 1672 à Battersea, f 1751, célèbre ministr d'État-anglais sous la reine Anne 1704, conclut la paix d'Utrecht 1713, combattit dix ans le ministère Walpole 1725-1735, mais n'a rien fond.' de stable; son caractère mobile y prêtait peu. Il fit plusieurs séjours en France, il épousa même en secondes noces une française, nièce de Mme de Maintenon. Il a écrit un certain nombre d'ouvrages sur la politique et la philosophie: dans ses derniers écrits en français, il afficha un déisme sans réserve qui lui valut les éloges et l'amitié de Voltaire. Sa position élevée, ses talents et sa tournure d'esprit l'avaient mis en relation avec les plus grands écrivains de son époque, Prior, Swift, Pope à qui il donna l'idée de son Essai sur l'homme, etc. Ses œuvres, réunies par Mallet 1754, ont été réimpr. en 1809, 8 vol. 8o.

 

BOLIVIE, État de l'Amérique du Sud, compris entre le Pérou, le Brésil, la Plata et le Paraguay; c'est l'ancien Haut Pérou devenu libre depuis la déclaration d'indépendance du 6 août 1825; doit son nom au général Bolivar qui l'affranchit. Population, environ deux millions. La religion officielle est le catholicisme, mais sans exclusion d'aucun culte; les couvents y pullulent; des novices y sont reçus, avec la seule réserve, malheureusement illusoire, qu'ils seront libres de rentrer dans le monde quand ils voudront. Le sénat est chargé des affaires religieuses. Le peuple est très dévot, les mœurs très relâchées; le mariage est peu respecté, les incestes sont fréquents; l'ivrognerie et le jeu ruinent les santés et les familles.

 

BOLLÀNDISTES, v. Acta Martyr.

 

BOLSEC, Jérôme-Hermès, né à Paris, d'abord carme vers 1543, puis médecin, attaché au service du seigneur de Falais, demeurait à Veigy, Chablais, sur les terres de Berne, à 3 lieues de Genève. Il avait embrassé la réforme, s'était marié, et s'occupait un peu de théologie. En 1551 il rompit en visière avec Calvin au sujet de la prédestination, fut cité devant la Vén. <x>mpagnie le 8 mars, puis ayant récidivé en public le 16 oct., fut conduit en prison par J. de la Maisonneuve, et une procédure fut instruite contre lui. Après une discussion publique entre lui et Calvin, le Conseil décide de consulter les églises suisses, et après leurs réponses qui penchent en général pour la modération, Bolsec est condamné le 22 déc. au bannissement. Plus tard, il fut aussi expulsé des terres bernoises. En avril 1562 il confessa ses erreurs et ses torts devant le synode d'Orléans, dédiant à Charles IX son Mirouer de Vérité, avec son autobiographie en vers; puis il rompit de nouveau avec l'Egl-, qui ne lui avait pas rendu sa confiance et rentra dans le giron romain. Pour se venger et pour plaire au clergé de Lyon, il composa 1577 une Vie de Calvin et 1582 une Hist. de la vie et des débordements de Théod. de Bèze, deux pamphlets infâmes et sans aucune valeur historique. Il f à Annecy vers 1584. v. Haag, la France l>rotart. de H. Bordier.

 

BONA, Jean, né 10 oct. 1609 ù Mondovi, Piémont de la même famille que le connétable François de Bonne. Entré 1624 dans un couvent de cisterciens, il fut nommé général de l'ordre en 1661, et cardinal en 1669. C'était un homme pieux et très instruit. Après la mort de Clément IX, 1670, plusieurs espéraient qu'il serait élu à sa place; le poète Daugières composa même à ce sujet une poésie où l'on trouve entre autres ce vers: Esset papa bonus, si Bona papa foret. Mais ce vœu ne se réalisa pas. f 27 oct. 1674. Outre sa collaboration au recueil des hollandistes, on a de lui un grand nombre de traités ascétiques; ils ont été publiés à Turin 1747 en 4 vol. f°. Les principaux sont (en latin), un Guide vers le ciel, l'Horloge ascétique, les Principes de la vie chrétienne, un Traité de la divine Psalmodie, deux livres sur les Liturgies et sur les Pains azymes, etc. Plusieurs ont été trad. en français.

 

BONAVENTURE, de son vrai nom Jean Fi-denza, né 1221 à Bagnarre, Toscane, d'une famille distinguée et pieuse. A l'âge de 4 ans il tomba gravement malade; sa mère le recommanda à l'intercession de saint François, et l'enfant guéri s'écria: 0, la bonne aventure ! De là son surnom, qui en grec correspond au nom d'Eutyches. Il entra chez les franciscains en 1243, et devint général en 1255. Il avait été nommé prof, de scolastique à Paris 1253, et rivalisait (le science avec Thomas d'Aquin, mais sa réputation de sainteté l'emportait encore sur sa renommée comme savant. Haies disait de lui: Il ne semble pas qu'Adam ait pu pécher en Bonaventure. Il gouvernait avec tant de prudence que son opinion était recherchée de tout le monde. Le docteur et chanoine Guill. de Saint-Amour, ayant écrit contre les ordres mendiants au nom de l'université de Paris, Bon. para le coup et fit condamner le livre. Appelé à l'archevêché d'York, il refusa. A la mort de Clément IV, les cardinaux divisés sur le choix de son successeur, s'engagèrent à nommer celui qu'il désignerait; son choix se fixa sur Thibaut, qui devint Grégoire X, et qui par reconnaissance le nomma cardinal 1272, et év. d'Albano. f le 15 juillet 1274 à Lyon, où il avait été suivre les discussions d'un concile relatives à la réunion de l'Égl. de Rome avec l'Égl. grecque. Il fut canonisé 1482 par Sixte IV, et Sixte V lui décerna le titre de docteur sèraphi-que. Bonaventure essaya, comme ses contemporains, de concilier la mystique qui doit fournir la matière, avec la scolastique qui doit donner la forme. Son idée dominante était celle d'un renoncement absolu pour se livrer entièrement à Dieu et pour vivre de la vie en Christ en détruisant tous les penchants naturels. Il a écrit des commentaires sur le maître des sentences de P. Lombard, et plusieurs autres ouvrages et comment, sur divers sujets, surtout mystiques. Ses œuvres compl. publ. à Rome 1586-1596, forment 6 vol. fo.

 

BONIFACE lo pape 418-422, nommé en concurrence avec Eulalius. Augustin lui dédia ses 4 livres contre le pélagianisme.

2<> Boniface II, goth, et nommé sous l'influence des Ostrogoths, 530-532. On a de lui une Lettre à saint Césaire d'Arles, dans les Epist. rom. Pontif. de D. Constant.

3<> Boniface III, romain, élu et f 607, obtient de Phocas que le patr. de Constantinople ne prendra plus le titre d'évéque universel, réservé à l'év. de Rome seul, ce qui, d'après l'opinion de son antéprédécesseur Grégoire, faisait de ce dernier un précurseur de l'Antéchrist.

4° Boniface IV, 608-614. Ayant reçu de Phocas le Panthéon, il l'appelle Sainte-Marie de la Rotonde, le consacre à Dieu sous l'invocation de la Vierge et de tous les saints, et y fait porter 28 voitures d'ossements sacrés extraits des catacombes.

5o Boniface V, 617-625. Il défend aux juges de poursuivre ceux qui ont cherché dans les églises un droit d'asile. Sous son pontificat, Édouard, roi de Northumberland, devient chrétien, gagné par les missionnaires de l'Évangile. Cantorbéry devient siège métropolitain.

60 Boniface VI, romain, fils d'un évêque, 896, ne régna que 15 jours. Quelques-uns en font un antipape; la majorité le tient pour un vrai pape. Comme il ne fit rien, c'est peu important.

7o Boniface VII, 974-985; Francon; regardé par quelques-uns comme un antipape. Il fit mourir son prédécesseur Benoît VI, et s'enfuit a Constantinople après avoir volé l'Église. Domnus II, Benoît VII et Jean XIV le remplacent successivement, bien qu'il n'ait pas donné sa démission. Après la mort d'Othon II, il revient 985, tue son collègue Jean XIV et conserve quelque temps encore le saint-siège. Après sa mort 985, son corps fut traîné par les pieds et abandonné sur une place publique.

80 Boniface VIII; Benoît Cajetan d'Anagni, d'abord avocat et notaire du pape à Rome, cardinal en 1281, élu pape 1294 en remplacement deCèlestin V démissionnaire. Accusé d'incrédulité, d'un caractère impérieux et violent, il eut pour ennemis les gibelins, et à leur tête les Colonne; il eut des démêlés avec l'Allemagne, l'Angleterre et la France. Arbitre entre Édouard I®' et Philippe IV, le Bel, il prononce en faveur de ce dernier et unit les deux rois par des mariages. Philippe, pour faire face aux frais de la guerre, ayant levé des contributions sur les biens ecclésiastiques et souvent abusé du droit de régale, Boniface se brouille avec lui. En 1296 le pape publie sa bulle CleHcis Idkm, mais Philippe l'ayant repoussée, Boniface cède. En 1298, il prend une décision qui déplaît au roi; celui-ci s'unit aux Colonne et fait arrêter l'év. de Pamiers qui avait répandu dans son 'diocèse des propos séditieux sur son compte. Boniface convoque un concile à Rome, Philippe défend à ses prélats de s'y rendre. Le pape lui écrit une première lettre, courte et sèche, mais qu'il rétracte bientôt; puis une seconde, plus longue, Ausculta, fiH, que Philippe furieux fait brûler, d'accord avec les États du royaume réunis le 10 avril 1302. Le pape y répond par sa bulle Unam sanctam, dans laquelle, sous prétexte que le corps de l'Église ne peut avoir deux têtes, il revendique pour lui toute l'autorité. Il excommunie Philippe le 13 avril 1303. Les États de Paris sont convoqués une seconde fois; ils appellent le pape un hereticus perfcctui, parce que, dit-on, il ne croyait pas même à l'immortalité de l'âme, et

Boniface s'enfuit à Anagni, où bientôt il est arrêté et fait prisonnier par le chancelier de France Guill. de Nogaret, assisté de Sciarra Co-lonna, qui frappe le vieillard au visage de son gantelet de fer. Le pape se montre grand dans son malheur: Prêt à mourir, dit-il, du moins je mourrai pape. Le roi voulait le faire juger par un concile, mais 4 jours après son arrestation, Boniface est délivré par le peuple d'Anagni. Un mois après, il meurt à Rome, des suites de son saisissement et de la colère qu'il avait éprouvée, mais après avoir de nouveau délié les sujets du roi du serment de fidélité. 11 oct. 1308. Il avait 86 ans. Avec lui s'accentua la lutte de l'esprit laïque qui veut s'affranchir, contre l'autorité spirituelle dont on commence a moins s'effrayer.

9û Boniface IX, noble napolitain, cardinal 1381, pape 1389, + 4404. Il se signale par de nombreuses exactions, par son avarice, et par sa complaisance pour les dérèglements de sa famille. Il établit des annates perpétuelles, et se fait payer la promesse de charges et de bénéfices non encore vacants.

10° Boniface, ou Winfried, né 683 à Kir ton, De-vonshire, reçut de bonne heure des impressions religieuses et renonçai une haute position pour entrer successivement dans plusieurs monastères. C'est là que, vers l'âge de 35 ans, il se sentit intérieurement poussé à prêcher l'Évangile en Germanie. L'échec de ses travaux en Frise, suite de guerres qui désolaient ce pays, le conduisit à chercher l'appui de Rome, d'où muni d'une recommandation du pape Grégoire II il se rendit en Thuringe, ou l'Évangile avait été précédemment prêché par Willibrord et quelques autres missionnaires. Dans un second voyage que B. fit à Rome, Grégoire parvint à l'engager, quant à son œuvre et à l'organisation des églises de Germanie, à une dépendance complète vis-à-vis du siège papal. Investi par là d'une sorte de position officielle, il parcourut la Hesse, la Thuringe, la Franconie, affrontant toutes sortes de périls au milieu de populations presque sauvages, renversant une multitude d'idoles et fondant partout des églises et des monastères, entre autres le célèbre couvent de Fulda, élevé sous sa direction en 744 par un de ses compagnons d'œuvre du nom de Sturm. Favorisé d'ailleurs par quelques-uns des chefs du pays il obtint de magnifiques succès, en même temps que par l'influence du christianisme, la civilisation s'introduisait dans toute cette contrée où plus de cent mille habitants embrassèrent la foi. En Bavière où le christianisme était déjà professé, il organisa l'Église, rétablit la discipline et fonda plusieurs évê-chés. Par sa nomination comme archev. de Mayence, Boniface était devenu le vrai chef des églises de l'Allemagne, quand, à l'âge de 73 ans, il voulut reprendre ses travaux au milieu des païens. Il remit sa charge et ses fonctions d'archev. à Lullus son disciple favori, et se rendit de nouveau au milieu des Frisons, pour y travailler comme simple missionnaire. Déjà il y avait obtenu de remarquables succès quand en 755 il fut massacré par une troupe de païens au moment où il allait célébrer un service religieux. Par son zèle apostolique et les fruits merveilleux de sa prédication, Boniface a mérité d'être appelé l'apôtre des Allemands. Il a été en même temps par sa soumission au siège de Rome, et la rigueur avec laquelle il lit prévaloir son organisation ecclésiastique, un des plus puissants auxiliaires de la papauté. Mais tout en participant sur ce point aux erreurs de son temps, il fit constamment preuve quant à sa personne d'une courageuse indépendance, par exemple vis-à-vis du pape Zacbarie, et par son humilité, sa piété intime et la sainteté de sa vie, il reste une des plus grandes figures missionnaires de l'Église au moyen âge. «V. Bost, Hist. de l'établ. du christianisme, torne II. Néander. La vie chrétienne dans les premiers siècles de l'Église). H. N.

11°, v. Bruno.

 

BONIVARD, ou Bonnivard, François, né 1493 à Seyssel, fut élevé par un oncle, chanoine de Saint-Pierre et prieur de Saint-Victor à Genève, qui lui destinait tous ses bénéfices et qui, f 1514, lui laissa en effet le riche prieuré de Saint-Victor, fondation très ancienne, dépendante de C!uny,et possédant plusieurs villages. Bonivard avait visité l'Italie, où il avait gagné le titre de poète lauréat; il avait appris l'allemand et étudié le droit à Fribourg-en-Brisgau; un séjour à Rome l'avait prédisposé en faveur d'une rèfor-mation. D'un naturel inquiet, agité, d'un caractère généreux, facile, primesautier, Bonivard prenait volontiers le parti des faibles contre les puissants. Il prit parti pour les libertés ae la république genevoise contre les évêques et les notables de la Savoie, et porta un jour un toast: • A Genève libre ! • qui lui valut pour réponse ces paroles prophétiques de Phil. Berthelier: « A ce jeu vous perdrez vos bénéfices et moi ma tête. » Emprisonné 1519 par le duc de Savoie, qui le trouvait surtout incommode, il ne fut relâché qu'au bout de 2 ans; mais comme son opposition ardente et parfois tracassière continua de se manifester d'autant plus que le duc détenait son prieuré, il fut de nouveau arrêté 1530, malgré son sauf-conduit,, et mené garrotté au château de Chillon où il passa 6 ans. H fat délivré en 1536 quand les Bernois, après avoir conquis le pays de Vaud, firent le siège de Chillon avec une flottille genevoise. Dans l'intervalle la réforme avait été proclamée à Genève, mais le cloître et l'église Saint-Victor, ainsi que tous les faubourgs, avaient dû être démolis par mesure de sûreté. Bonivard fut reçu bourgeois et nommé membre du Conseil des CC; en outre on lui donna comme indemnité 800 écus d'or et une pension viagère de 140. Il fut marié 4 fois, mais ne fut pas heureux avec ses femmes; la dernière, convaincue d'adultère, fut noyée. Ses dernières années fu- }; rent solitaires et pénibles, f 1570, instituant j pour ses héritiers le collège, la ville et la biblio- j thèque. Si son nom a été rendu populaire en Suisse par son patriotisme et sa capacité, il n'a pas acquis des titres moins durables par ses travaux historiques et littéraires. Ses Chroniques de la ville de Genève, commencées en 1542, sur la demande des magistrats, étaient trop pleines d'esprit, de malice et de satires contemporaines, pour qu'on osât les publier; on craignait de froisser tout le monde, mais surtout Berne et Fribourg; il en parut un résumé dans la Cosmographie de Munster, mais le mss. original s'égara et ne fut rendu à la ville qu'eu 1724. M. G. Revilliod en a enfin publié le texte. Bonivard a encore écrit contre les Libertins son livre sur l'Ancienne et la nouvelle police de Genève; ses études d'hist. générale, sous le titre de: Avis et devis de noblesse; puis: Avis et devis de la source de l'idolâtrie et tyrannie papale, contre les faux miracles; enfin: Amarti-génée, étude des origines du péché dans le monde.

 

BONNET, Charles, né 13 mars 1720 à Genève, f 1793; d'abord naturaliste, puis philosophe; fils de réfugiés, d'une famille riche et distinguée. Une surdité précoce l'obligea de quitter les écoles publiques pour prendre des leçons particulières. Le Spectacle de la nature, de l'abbé Pluche, fut pour lui une révélation; il lut ensuite Newton, Fontenelle, Malebranche, les Mémoires de Réaumur sur les Insectes; il se mit à observer lui-même, d'abord les chenilles 1738, et en 1740 les pucerons et leur mode de reproduction, travail qui lui valut, à l'âge <ft 20 ans, le titre de correspondant de l'Acad. des sciences. Son père lui permit alors de renoncer à l'étude du droit. En 1745 parut son Insecto-logie, dont l'idée-mère est que tous les êtres font partie d'un même système et forment une chaîne immense qui relie toutes les parties de l'univers. En 1754, Recherches sur l'usage des feuilles, quant à la nutrition des plantes et au rôle de l'air et de la lumière. Mais des ma«s d'yeux le forcent à abandonner la loupe et le microscope; il se retire en lui-même et se tourne vers la philosophie. Son Essai de psychologie date aussi de 1754, puis vient en 1760 son Essai analytique sur les facultés de l'âme, où il se rencontre avec Condillac pour imaginer

une statue qui recevrait successivement les différents sens. Il accorde une grande place aux fibres, au cerveau, à l'organisation, et il s'expose à Are regardé comme un sensualiste ou un matérialiste, mais il s'en défend avec énergie dans m Considérations sur les corps organisés 1762, *t dans sa Contemplation de la nature 1764. Ce dernier ouvrage obtint un immense succès dans toute l'Europe. Sa Palingénésie, 1769, traite de la vie à venir, non seulement pour l'homme, mais pour les animaux eux-mêmes; c'est en quelque sorte le résumé de tous ses travaux et l'expression mûrie de ses convictions et de ses croyances. C'était une protestation contre l'esprit du siècle et de l'Encyclopédie; elle lui valut les sarcasmes de Voltaire et les éloges de Haller, d'Euler, et d'autres grands esprits. Enfin en 1770 il publia son dernier ouvrage: Recherches philos, sur les preuves du christianisme, insistant sur les données de la tradition évan-eelique. « Les miracles, dit-il, sont le langage de Dieu. • Il suivait avec attention les moindres opuscules de Voltaire et mettait ses amis en garde contre le • poison fernésien, » criblant des traits les plus acérés le nouveau Lucien, le Brochurier, le grand faiseur de si et de mais, tout eu lui rendant justice quand il faisait le bieû. —Œuvres compl. Neuchâtel 1779, 8 vol.

ou 18 vol. 8°.

 

BONOSE, év. de Sardique, Illyrie, soutint que Marie aurait eu plusieurs enfants après la naissance de Jésus, son fils premier-né. Condamné pour ce fait au synode de Capoue 391, pois par le pape Siricius, il fut déposé de ses fonctions, et f peu de temps après. Ses partisans allèrent plus loin que lui et furent condamnés comme ariens et comme photiniens au eone. d'Arles 4i5, qui cependant reconnaissait encore leur baptême comme valable. Plus tard les passions s'en mêlèrent; Gennadius et Grég.-le-Grand ne reconnurent plus leur baptême, et ceux-ci en firent autant de leur côté.

 

BONSHOMMES, Boni homines, surnom de plusieurs ordres religieux q. v.; 1° les moines de Grammont, et surtout les minimes; 3<> des chanoines portugais se rattachant aux bénédictins 1433, et envoyés comme missionnaires aux Indes et en Ethiopie; 4° des cordeliers anglais; 5® les cathares et les vaudois.

 

BOOS, Martin, un des prêtres les plus évan-géliques du mouvement réformateur qui, vers la ân du siècle dernier, semblait annoncer un réveil au sein du catholicisme et la continuation de l'œuvre dont Fénelon d'une part, et de l'autre, mais avec plus de courage, les jansénistes avaient pris l'initiative. Il naquit la nuit de No« 1762 à Huttenried, sur la frontière de la Bavière et de la Souabe, d'une famille de paysans aisés; il était le 14™ de 16 enfants. Son père et sa mère furent emportés par une épidémie, comme il n'avait que 4 ans. Un oncle, conseiller ecclésiastique à Augsbourg, se chargea de lui, l'envoya à l'école, et lui donna le choix entre la carrière de curé et l'état de cordonnier. Le jeune garçon qui avait appris tout seul les éléments du latin n'hésita pas; il fit d'excellentes études à Dillingen, où les jésuites auraient bien voulu l'empêcher d'aller entendre Sailer, Zimmer et Weber, et le jour où il dit sa première messe, son oncle célébra cet heureux événement en organisant un tir à la cible qui dura 3 jours et qui parut au jeune prêtre n'avoir aucun rapport avec le sérieux de la situation. Il raconte ainsi dans son journal le travail qui s'était fait en lui: c Je me suis donné énormément de peine pour devenir pieux; je me couchais souvent, même en hiver, sur le sol froid à côté de mon lit; je me flagellais jusqu'au sang, j'étais criblé de cilices, je jeûnais et donnais mon pain aux pauvres; je me confessais et je communiais presque tous les 8 jours; bref j'étais si dévot que les étudiants d'Augsbourg me nommèrent à l'unanimité préfet de la congrégation. Mais... M. le préfet, la tête basse, devenait tous les jours plus triste et plus angoissé. Il s'écriait: Qui rne délivrera ? Et il n'y avait personne pour lui répondre; la grâce d»* de N. S. Jésus-Christ. Personne pour luirappe 1er que: Le juste vivra parla foi. » Ces paroles qu'il apprit à connaître et h comprendre à Dillingen, devaient être et furent en effet le text*1 de toute sa vie. L'idée ne lui vint pas de quitter son église, mais il n'hésita jamais h fraterniser avec les chrétiens d'autres communions. Sans donner prise à aucune accusation d'hérésie, il fut toujours suspect; on lui saisit ses papiers, on lui fit subir de nombreux interrogatoires, il fut mis en prison, déplacé, suspendu de ses fonctions, tracassé de mille manières, et enfin exilé, sans que jamais sa douce nature se révoltât. Il fit cinq places en Bavière et dut s'enfuir en 1799. L'év. Gall de Linz, Autriche, le reçut fraternellement et lui assura onze années de tranquillité; mais les persécutions recommencèrent en 1812, et malgré la protection avouée de Femp. François, il fut enfermé en février 1816 dans un couvent de carmélites et ne put obtenir la paix qu'en quittant le pays. Le gouvernement prussien lui offrit une place 1817 dans les environs de Cologne, et c'est là qu'après plusieurs années d'un travail difficile, mais abondamment béni, il f 29 août 1825. Il n'a pas toujours moissonné où il avait semé, mais son œuvre n'a pas été vaine.

 

BORA, Catherine (de), femme de Luther. Née 29 janv. 1499, de l'ancienne famille des Bora de Stein-Laussig, elle avait été mise au couvent de Nimptseh, mais pour échapper à la corrup-tiou de cette maison, elle s'enfuit avec 8 de ses amies dans la nuit du samedi avant Pâques, du 4 au 5 avril 1523, et arriva à Wittenberg le 7. Elles furent placées par les réformateurs dans des maisons honnêtes et tranquilles; Catherine chez Phil. Reichenbach, secrétaire puis bourgmestre de la ville. Deux ans plus tard, après avoir essayé vainement de la marier à d'autres, Luther se décida à l'épouser. Le mariage eut lieu le 13 juin 1525; ce fut Bugenhagen qui le bénit, Kranach était un des témoins. Malgré les épreuves ordinaires de la vie, cette union fut heureuse. Ils eurent six enfants: Hans, ou Jean, né 7 juin 1526; Élisabeth, née 10 déc. 1527, f 3 août 1528; Magdeleine, née le 4 mai 1529, f 20 oct. 1542; Martin, 7 nov. 1531; Paul 28 janv. 1533, médecin distingué, f 8 mars 1593; enfin en 1534, Marguerite. La mort de Magdeleine fut une de leurs plus cruelles épreuves; l'enfant avait 14 ans, et se distinguait par ses qualités de cœur et d'esprit. Catherine survécut 7 ans à Luther et vit des jours difficiles; la guerre de Smalcalde supprima un moment toutes ses ressources, et souvent elle dut réclamer pour elle et ses enfants les secours de ceux qui devaient tant à son mari. Elle f à Torgau 20 déc. 1552. C'était une femme de cœur et de foi, qui en plus d'une circonstance releva le courage de son mari, et qui se montra toujours digne de lui par l'élévation de son caractère, par son dévouement et par sa soumission. Sans être une beauté accomplie, les portraits de Kranach la représentent comme une belle personne, distinguée de traits et de tenue.

 

BORBORITES, ou Borborien*, gnostiques, une des sous-divisions des nicolaïtes, dont les restes subsistaient encore au temps d'Épipha-nes. Ils passaient pour se vautrer dans la fange afin de bien établir leur inépris pour le corps. Us se vantaient de posséder des livres saints tout particuliers, un évangile d'Ève, un livre de Noria femme de Noé, des révélations d'Adam, etc. Ils ne comptaient pas moins de huit ciels; le 7« avait pour chef l'Eternel Zebaoth, le Créateur, sous la forme d'un âne ou d'un cochon; dans le 8* étaient Barbelo, la mère des vivants, le Père de toutes choses, le Dieu souverain et le Christ. Leur morale était ignoble.

 

BORDELUM, petite secte du Schleswig-Hol-stein, excroissance malsaine du piétisme, qui se forma en 1739 à Bordelum, près de Flensburg, et se constitua au nombre de 15 à 20 personnes, sous la direction d'un candidat saxon du nom de Bâhr. Ils méprisaient l'Église établie, qu'ils appelaient la maison du diable; ils ne voulaient ni du dimanche, ni de la cène, ni du baptême, ni du mariage. Bâhr s'enfuit avec la femme d'un de ses amis, Borbenius avec la femme d'un autre, et finit cependant par se marier pour son compte. Ils furent persécutés en Danemark, non pour cause de religion, mais pour immoralité. Bâhr f misérablement à Bred-stâdt dans l'hiver de 1743, sans que le pasteur Schonborn ait pu le ramener à de meilleurs sentimenls. La secte s'éteignit bientôt.

 

BOREL, ou Borrel, Adam, né 1603 dans le Séeland, f 1667, hébraïsant distingué, non moins connu comme prédicateur, donna sa démission de pasteur, estimant que l'Église officielle avait perdu son caractère chrétien, et réunit à Amsterdam 1645 le petit troupeau de ses adhérents en assemblées religieuses. Son principal écrit; Ad legern et testimonium fit sensation; c'était un appel à l'autorité absolue des Écritures. II publia en 1664 un Traité de la religion des frères, et 1667 un livre sur la Vérité de Thist. évangélique.

 

BORGIA, famille romaine, originaire de Borja, en Espagne, figure à plus juste titre dans l'histoire profane que dans l'histoire de l'Église, bien que plusieurs de ses membres aient porté la pourpre ou la tiare. Nous mentionnerons les suivants: 1° Alphonse-Borgia, v. Calixte III. 2° Roderic-Lenzuoli, v. Alexandre VI. 3° César, fils du précédent et frère de Lucrèce, nommé cardinal 1493, puis sécularisé et redevenu laïque; épousa une fille de Jean d'Albret, prit 1501 le titre de duc de la Romagne, et après une vie très accidentée, fut tué au siège de Viana, Espagne, 1507. Modèle du tyran, d'après Machiavel. 4° François, duc de Gandie, grand d'Espagne, né 1510 à Gandie, Valence, vécut d'abord dans le monde, puis jouit de la faveur de Charles-Quint, qui le nomma vice-roi de la Catalogne. Ayant perdu sa femme qui lui avait donné 8 enfants, il renonça au monde, entra dans l'ordre des jésuites, en fut nommé 3m* général, malgré sa résistance 1565, et se distingua des Borgia par ses vertus. Canonisé par Clément IX. Le duc de Lerme, ministre de Philippe III, était son petit-fils.

 

BORRHAUS, v. Cellarius.

 

BORRI, ou Borro, Burrhus, François-Joseph, alchimiste, enthousiaste et aventurier; né à Milan 1627, étudia à Rome chez les jésuites, entra au service de la cour et se mit à chercher la pierre philosophale. Puis, changeant de carrière, il dénonça la corruption romaine et annonça une réforme dont il serait le promoteur, sous la direction du pape. Il raconta des visions qu'il aurait eues et prêcha de nouvelles doctrines sur la divinité de Marie, l'incarnation du Saint-Esprit, etc. Mais quand il vit que l'Inquisition commençait à s'occuper de lui, il ne se sentit plus en sûreté à Rome et retourna à Milan; il réunit en congrégation un certain nombre d'adhérents, leur imposa le vœu de pauvreté, prit leur argent et ne rêva rien moins que de s'emparer de ta ville et d'en devenir le dictateur. Son projet ne réussit pas, il dut s'enfuir, et comme il était condamné au feu, il se rendit chez la reine Christine en Suède, puis chez Frédéric III de Danemark, et enfin en Turquie, se taisant richement payer des souverains qui l'employaient. Arrété par ordre de l'empereur il fut conduit à Vienne, extradé sur la demande du nonce, condamné à se rétracter 1673, et enfermé pour la vie au château Saint -Ange, où on lui fit la vie facile, f 1695.

 

BORROMÉE, Charles (comte de), né 2 oct. 1538 à Arona, d'une famille distinguée de la Lombardie, f à Milan le 3 nov. 1584. Sa mère était une Médicis, sœur de Pie IV. Tout jeune il montra du goût pour le sacerdoce. Après ses premières études, faites à Arona, il passa à l'université de Pavie, prit son grade de docteur en droit à 22 ans, et fut nommé la même année 1560 arehev. de Milan et cardinal, par le pape son oncle. Il n'était pas même prêtre. Cette élévation rapide d'un cardinal imberbe fit beaucoup crier, mais sa modestie et ses vertus désarmèrent les envieux. Il resta encore 6 ans à Rome, chargé de l'administration des Romaines, de la marche d'Ancône, des provinces étrangères (Portugal, Suisse et Pays-Bas), et de l'inspection générale des franciscains, des carmélites et des chevaliers de Malte. Il se fit ordonner prêtre en secret 1562, pour échapper aux obsessions de ses parents et même de son oncle, qui le pressaient de se marier et de donna- des héritiers à une famille menacée de s'éteindre. En 1565 il prit possession de son diocèse, dut retourner un moment à Rome pour tecevoir le dernier soupir de son oncle, et revint à Milan pour s'y consacrer tout entier. Ses biographes ne tarissent pas en éloges sur ses talents, son zèle, son activité pratique et son dévouement; il paya non pas de sa fortune seulement, mais de sa personne, lors de la famine de 1570 et de la peste de 1576. Il chercha partout à ranimer la vie religieuse, et travailla avec une grande énergie à réformer les ordres qui s'étaient écartés de leur règle. L'ordre des Humiliés, peu reconnaissant de tant de discipline, aposta des hommes pour l'assassiner, le 25 oet. 1569, devant l'autel, mais la balle ne fit qu'effleurer la peau. Il visitait lui-même, quelle que Ait la saison, les villages les plus éloignés de sa paroisse, et fonda des séminaires pour l'instruction de son clergé. Son temps se partageait entre l'étude, les exercices de dévotion et les soins de son diocèse. Malheureusement il eut les défauts de ses qualités, et son zèle catholique l'inspira mal dans ses campagnes contre les protestants et contre les libertés suisses. Il foada à Milan un séminaire helvétique pour doter la Suisse de prêtres imbus des doctrines ul-tramontaines; il fit en 1570 un voyage en Suisse, parcourant à pied les hameaux des montagnes, recommandant et faisant adopter les décrets du conc. de Trente, installant un nonce à Lucarne; les jésuites à. Porrentruy, à Fribourg, à Sion, à Brigue; les capucins à Lugano, Lu-cerne, Uri et Unterwald. Il posait enfin les bases d'une ligue réactionnaire, qui ne se réalisa qu'après sa mort, et qui prit le nom de Ligue d'or, ou Ligue Borromée, par laquelle les cantons catholiques s'engageaient, 1er oct. 1586, à prendre les armes contre ceux qui toléreraient l'hérésie sur leur territoire; c'était la guerre civile. Borromée mourut à 46 ans, épuisé de fa-tignes et d'austérités. Son tombeau est dans la cathédrale de Milan, sa statue de bronze à Arona. Canonisé par Paul V, 1610. Ses œuvres forment 5 vol. f». Milan 1747. — Son neveu Frédéric 1564-1631, aussi cardinal et archev. de Milan, fut plus tolérant et plus éclairé; il fonda à Milan la biblioth. ambroisienne.

 

BOSSUET, Jaques-Bénigne, né 27 sept. 1627 à Dijon, d'une famille de robe. Il est appelé par La Bruyère le dernier des pères de l'Église, et occupe incontestablement une des premières places parmi les orateurs et les écrivains du 17me siècle. Ambitieux et égoïste, il fut le flatteur de Lonis XIV, de ses maltresses et de ses confesseurs; le champion de toutes les causes du roi et l'ennemi de tous ses ennemis. Il combattit l'ultramontanisme parce que Louis ne voulait pas d'autorité au-dessus ou à côté de la sienne; il combattit le protestantisme, le jansénisme et le quiétisme, parce que le roi ne voulait qu'une religion dans le royaume. Son caractère fut loin d'être à la hauteur de son talent, mais en constatant les vices du premier, cela n'empêche pas de reconnaître l'ampleur et la richesse du second. Après avoir étudié d'abord chez les jésuites à Dijon, Bossuet entra au collège de Navarre à Paris, se rattacha en philos, à la méthode de Descartes, en théol. au système de Thomas d'Aquin et à la doctrine d'Augustin. Il soutint sa première thèse à 16 ans, et son talent était déjà si remarquable qu'on le pria un soir d'improviser un sermon dans les salons Rambouillet. En 1648 il soutint sa seconde thèse devant le prince de Condé à qui elle était dédiée. En 1652 il fut ordonné prêtre et passa docteur en théol. Il travailla quelques mois à Saint-Lazare sous la direction de Vincent de Paule, puis il vint à Metz où il avait des parents et un bénéfice, et où il fit ses premières armes contre les protestants, sous la forme d'une: Réfutation du catéchisme du pasteur P. Ferry, 1655. Il allait souvent à Paris, où la cour le faisait prêcher, pour entendre de belles paroles plutôt que de bonnes vérités. Turenne et Dan-geau mirent leur conversion sur le compte de son éloquence, et sa réputation grandit d'autant. Il fît presque coup sur coup l'oraison funèbre d'Anne d'Autriche, de la reine d'Angleterre et d'Henriette, duchesse d'Orléans, et fut dans l'intervalle, appelé à l'évêché de Condom 1669. En 1670 il fut chargé de la tâche ingrate d'élever le dauphin, et écrivit pour ce jeune prince un de ses chefs-d'œuvre, le Traité de la connaissance de Dieu et de soi-même, Paris 1709; un autre chef-d'œuvre, malgré ses défauts, le discours sur l'Hisl. univ., et sa Politique tirée de l'Écriture sainte, qui n'a presque pas de valeur. Il continuait en même temps sa guerre de plume, de controverse, d'intrigues et de négociations contre les protestants. En 1671 il publie son Exposition de la doctrine de l'Égl. cathol.; en 1682 son Traité de la communion sous les deux espèces; en 1688 son Hist. des variations de l'Egl. prot. en réponse au pasteur La Bastide qui lui avait reproché, non sans raison, d'avoir varié lui-même et d'avoir présenté la doctrine catholique sous une forme que l'Église ne pouvait pas reconnaître; c'était aussi l'opinion du p. Maimbourg et d'autres. Il eut en 1678 une conférence avec Claude, à la demande d'une dame De Duras, qui voulait au moins colorer sa conversion; les deux adversaires en publièrent le compte rendu, 1682 et 1683. Enfin en 1681, après l'achèvement de l'éducation du dauphin, Bossuet reçut pour sa récompense l'évêché de Meaux, et il inaugura son entrée en fonctions par une Lettre pastorale et par son Catéchisme de Meaux, qui ne parurent que plus tard, 1686 et 1687. En 1682, à l'assemblée du clergé qui eut lieu k l'occasion des prétentions du pape, il dirigea les débats et rédigea les 4 propositions, qui sont la plus fidèle expression de ce qu'on appelle les Libertés gallicanes; il les défendit plus tard sur la demande du roi, dans sa Defen-sio declarationis, qui ne parut qu'après sa mort. Il eut à répondre aussi à Jurieu et à Basnage, et il le fit dans plusieurs écrits entre 1689 et 1701. Il prit une part active à la Révocation de l'édit de Nantes, mesure impolitique autant qu'injuste, où il voit « le plus bel usage de l'autorité. » Il correspondit plusieurs années avec Leibnitz, lui dans l'espoir de ramener les protestants au catholicisme, Leibnitz dans le désir impossible de fondre les deux communions en une seule Église universelle, 1690. Ses dernières années furent consacrées à poursuivre le quié-tisme dans la personne de Mad. Guyon et dans celle de Fénelon. Son Instruction contre les erreurs des faux mystiques, 1697, est ecrite avec une aigreur qui fut dépassée encore dans sa Relation sur le Quiétisme, 1698, et sa conduite envers Fénelon, même après que celui-ci eut eu la faiblesse de se rétracter, fut blâmée par plusieurs de ses amis comme trop personnelle et peu généreuse. Le roi le nomma conseiller en 1697, et aumônier de la dauphine en 1698. En 1700, dans l'assemblée du clergé, il s'éleva avec la même énergie contre la morale relâchée des jésuites et contre le jansénisme qui apparaissait de nouveau. Il écrivit encore contre la version du N. T. de Richard Simon 1703, et une explication de Es. 7, 14, sur l'Enfantement de la Vierge 1704. f à Paris le 12 avril 1704. Ses Oraisons funèbres sont ce qu'il a fait de mieux, au point de vue littéraire, mais au point de vue religieux on y sent plus le courtisan que If chrétien. Quant à ses sermons et discours, La Harpe estime avec raison qu'on en a exagéré la valeur, mais il s'y trouve des morceaux, entre autres le Panégyrique de saint Paul, qui appartiennent aux plus belles productions de la chaire chrétienne. Bossuet est embaumé dans un caveau de la cathédr. de Meaux; il a été exposé il y a quelques années k la vue des fidèles. Ce grand champion du catholicisme n'a pas éh* canonisé. Sa Vie a été écrite par le cardinal de Bausset. Son éloge (il avait élé reçu de TAcad. française en 1671) a été prononcé ou écrit par de nombreux panégyristes, Saint-MaroGirardin. Patin, etc. Ses Œuvres complètes ont eu de nombreuses éditions. — Il avait un neveu, du même nom, qui fut év. de Troyes, et qui a publié après sa mort plusieurs de ses ouvrages inédits.

 

BOST 1» Paul- Ami-Isaac - David, né 10 juin 1790 à Genève; après 4 années passées k Neu-wied, il fit ses études à Genève et fui consacré en 1814. Encore étudiant il s'était attaché an réveil religieux de son église, et ne cessa de lui rester fidèle, sans toutefois en accepter complètement ni les doctrines, ni l'organisation. Il fut 2anssuffragant àMoutiers-Grandval, Berne, et 7 ans agent de la Soc. continentale de Londres, comme missionnaire en France ot en Allemagne. De retour en 1825 il accepta successivement une place de pasteur dissident à Genève et k Carouge; fut condamné pour attaques contre la Compagn. des pasteurs, qu'il accusait d'avoir peu k peu dénaturé la foi de l'Église, et continua de se livrer à des courses missionnaires et à des travaux littéraires considérables. En 1840 il rentra dans l'Égl. nationale et prit du service en France, d'abord pasteur à Bourges, puis aumônier à Melun. En 1848 il se retira à Paris, et quelques années après à Laforce où il f 24 déc. 1874, quatre mois après avoir célébré ses noces de diamant. Parmi les nombreux ouvrages qu'il a laissés, on remarque: Hist. des Fr. de Bohême et de Moravie; Hist. de l'établissement du christianisme, d'après Blumhardt; Mémoires pouvant servir à l'histoire relig. des égl. etc.; Christianisme et théologie; Recherches sur la Constitution de l'Égl.; Genève religieuse;

Défense des fidèles; Procès: plusieurs traités de «controverse, et un recueil de Chœurs et cantiques, dont plusieurs sont devenus rapidement populaires. Il avait eu une fille et dix fils, dont six pasteurs. Le plus connu est

2° John (Jean-Marc) né 4 mars 1817 à Mou-tiers-Grandval; d'une constitution délicate, d'une àme ardente, il tenta à plusieurs reprises de faire des études régulières, mais sa santé ne le lui permit pas. Les médecins l'obligèrent à se îiiettre à des travaux manuels, et il se lit relieur, l u grand talent pour la musique lui ouvrit cependant une autre carrière; il vint à Paris, accepta un préceptorat très avantageux en Irlande; mais toujours désireux de se vouer au ministère, il voulut essayer de nouveau des études et vint à Montauban, où il passa 18 mois. Encore une fois il fut arrêté par la maladie. L'égl. évangélique de Laforce, Dordogne, l'ap-l>ela tel qu'il était; ses professeurs l'engagèrent accepter, et il fut consacré à Orléans, 1844. C'est là, pendant un ministère de 35 années, qu'il a fondé les 9 établissements qui aujourd'hui portent son nom. et qui lui valurent, en 1861 le prix Monthyon de 3,000 fr. et en 1866 la croix d'honneur. Une grande charité, un remarquable talent d'administration et une volonté énergique, lui ont permis de vaincre les difficultés nombreuses qu'il a rencontrées sur sa route, et de s'assurer des aides bien qualifiés et dévoués, f 1er n0v. 1881 à Paris; enterré à Laforce. Notice par Bouvier.

 

BOUHOURS, Dominique, jésuite né à Paris 1628,11702, connu seulement par une traduction aussi médiocre que prétentieuse du N. T. d'après la Vulgate; il y mit 15 ans.

 

BOURBONNAIS, ancienne province correspondant au département actuel de l'Allier. Il y avait déjà des luthériens à Moulins en 1562, et le 6 avril le ministre Cougnat était emprisonné, ainsi que le seigneur de Foulet dans le château duquel il avait prêché. De nombreuses persécutions eurent lieu pour cause de religion par le gouverneur Mon taré, qui appelait le bourreau son compère et le faisait manger à sa table. Après l'édit de Nantes plusieurs égl. se constituèrent, Moulins, Hérisson, Saint-Amand, formant un colloque avec le Berry et le Nivernais. La difficulté était toujours de se procurer des lieux de culte, et c'est dans les faubourgs qu'ils etaient ordinairement relégués, grâce au mauvais vouloir des populations et des gouverneurs. Des mesures vexatoires, notamment sous Marie de Médicis, les ruinèrent peu à peu, même avant la révocation, qui ne trouva plus rien à détruire. Avec germinal on put constater qu'il était resté du feu sous la cendre; de modestes assemblées reparurent. Aujourd'hui le Bourbonnais forme une paroisse protestante officielle, rattachée au Consist. de Bourges et à la 3mc circonscription synodale. Il y a des tem pies à Vichy, à Moulins et à Montluçon, avec des écoles prospères, d'importantes annexes à Commentry et Bézenet, et un culte régulier en été aux stations thermales de Vichy et de Néris.

 

BOURDALOUE, Louis, né à Bourges, 20 août 1632, f 13 mai 1704, entra de bonne heure dans la Société des jésuites, se fit remarquer par des talents oratoires hors ligne, et ne tarda pas à être envoyé à Paris, où il obtint un immense succès. Il prêcha dix fois le Carême ou l'Aven t devant Louis XIV et sa cour. Après la révoc. de l'édit de Nantes, il fut chargé d'éclairer les protestants du Languedoc, et montra dans cette mission un tact et une modération qui lui font honneur. Il n'avait du reste d'un jésuite que le nom. De retour à Paris, il consacra ses dernières années aux pauvres, aux hôpitaux et aux prisons. Moins sublime que Bossuet, moins onctueux que Massillon, il est plus dialecticien et meilleur logicien; ses plans sont meilleurs et plus clairs. On peut le considérer comme le restaurateur de la chaire catholique française; il est le premier qui ait rompu avec le mauvais goût des anciennes trivialités et avec le goût plus moderne d'une afféterie prétentieuse; il est grave, sérieux, simple et instruit. Son sermon sur la Passion est particulièrement estimé.

 

BOURDIN. Maurice, v. Grégoire VIII.

 

BOURGES, v. Pragmatique Sanction.

 

BOURIGNON, Antoinette, née à Lille 1616; laide et contrefaite; sa famille eut un moment l'idee de l'étouffer comme un monstre. Elle se jeta dans des dévotions déréglées, faillit se marier à 20 ans, mais se sauva au moment où la noce allait être célébrée, fut recueillie dans un couvent de Cambrai, mais s'enfuit encore, toujours poursuivie par des visions. On lui confia à Lille la direction d'un hôpital, et cette activité pratique mit un terme momentané à ses divagations. Mais ses accès recommencèrent; elle ne voyait partout que démons et possédés. Elle partit pour la Hollande, puis pour une île du Holstein où elle monta une imprimerie et publia une foule de traités mystiques en allemand, français et flamand. Après beaucoup de tribulations et d'aventures elle revint à Frane-ker où elle f 1680, laissant son bien à l'hôpital de Lille. Les adeptes qu'elle avait recrutés disparurent avec elle. Ses traités ne forment pas moins de 21 vol. 8°. Amsterd. 1679. Son idée fixe était de réformer l'Église, mais les moyens qu'elle employait compromirent son œuvre. Malgré sa laideur elle fit plusieurs passions. Ses principaux écrits sont: Traité de l'aveuglement des hommes, Traité du nouveau ciel, Renouvellement de l'esprit évangélique, l'Innocence reconnue, etc.

 

BOWER, Archibald, né 1686 à Dundee, étndia à Douai, entra à Rome dans l'ordre des jésuites, fut successivement professeur d'histoire, de philos, et de rhétorique, et en même temps conseiller du saint-office; s'enfuit tout k coup en Angleterre 1726, se joignit à l'Église anglicane, devint en 1747 bibliothécaire de la reine par la protection de lord Littleton, et consacra ses dernières années à des travaux littéraires et historiques. Il avait épousé une femme riche et de bonne famille, f 6 sept. 1766. Son principal ouvrage est une Hist. des papes, 7 vol. 4° dont la publication commença en 1750. Les motifs de sa conversion n'ont jamais été tirés au clair, et sa personne n'a pas inspiré une grande confiance à ses nouveaux coreligionnaires.

 

BOYLE 1° Richard, 1566-1643, né à Gantor-béry, s'éleva par son seul mérite d'une position médiocre aux plus hautes dignités de son pays sous Élisabeth et fut nommé comte de Cork. Il eut 15 enfants, dont 7 fils, presque tous distingués. Le plus jeune fut

2o Robert, né 25 janv. 1626 à Lisborn, Irlande; naturaliste distingué, aussi pieux que savant, l'un des fondateurs de la Soc. royale des sciences de Londres, 1645, primitivement Collège philosophique. Si les sciences physiques lui doivent de nombreuses observations et d'intéressantes découvertes, il ne travailla pas avec moins de zèle k la propagation et à la défense du christianisme. Président de la Société fondée en 1647 pour l'évangélisation de la Nouvelle Angleterre, il rendit de grands services k l'œuvre des missions; il fit imprimer k Oxford à 500 ex. une traduction des Evangiles et des Actes en langue malaise, des Bibles en celte vulgaire pour l'Irlande et le pays de Galles, le N. T. en arabe, ainsi que le traité de Grotius sur la Vérité de la relig. chrét. Il écrivit lui-même plusieurs ouvrages d'apologétique contre les déistes, entre autres des Considérations phy-sico-théol. sur la possibilité de la résurrection, 1675, un Résumé (summa) de la théol. chrét. 1682, Conciliation de la raison et de la religion, le Chrétien naturaliste, le Virtuose chrétien, etc. Œuvres compl. Londres 1744, 5 vol. f°, t 26 sept. 1691. Par testament il laissait sous le titre de Fondation Boyle une somme suffisante pour donner chaque année une rémunération de 50 livres à un prédicateur désigné par ses exécuteurs testamentaires, qui ferait dans une église désignée 8 conférences sur les vérités de la religion révélée ët contre les non-croyants, comprenant sous ce titre aussi bien les déistes et tes athées, que les païens, les juife ou les musulmans.

 

BRADWARDINE, Thomas (de), né vers 1290 k Hartfield, Suffolk, fit ses études k Merton-

College, Oxford, et se distingua en mathématiques, en philos, et en théologie. Il composa des. tables astronomiques, et 3 ouvrages sur l'arithmétique, la géométrie et les proportions. Mais c'est surtout comme théologien et comme réformateur qu'il s'est fait connaître. Après avoir enseigné comme docteur à l'univ. d'Oxford, il fut nommé chancelier de Saint-Paul à Londres, puis chapelain et confesseur d*Édouard III qu'il accompagna dans ses campagnes en France. Il fut ensuite nommé archev. de Cantorbéry, mais f avant d'avoir pris possession de son siège, 22août 1349. La simplicité presque rustique de ses manières lui avait valu les moqueries dédaigneuses des prélats romains k Avignon où il avait été consacré. Il fut k son époque un des rares témoins qui défendirent contre les pélagiens la doctrine de la grâce. Son livre: De causé Dei contra Pelagium, Londres 1344, publié 1618 par Savilius, est une éloquente revendication des droits de Dieu dans le salut de l'homme et de sa souveraineté absolue, contre ceux qui font t de la volonté de l'homme la maîtresse, et de la volonté de Dieu la servante. »

 

BRAINERD, David, missionnaire auprès des Indiens de New-Jersey; plein de zèle et d'abnégation. f 1747.

 

BRANDEBOURG, ancien état de l'emp. germanique, sans frontières naturelles et dont les limites varièrent souvent. Occupé d'abord par les Varins, puis par les Wilzes, il fut conquis par Charlemagne qui en prit la capitale, la peupla de colons allemands, et en confia la garde k une famille célèbre de chevaliers. Ceftit l'origine de l'introduction du christianisme dans ce pays. Un siècle plus tard on y trouvait encore une église chrétienne, mais les païens la détruisirent plusieurs fois. Le culte y fut rétabli sous Henri l'Oiseleur, vers 932, par Bernard Ier, margrave de la contrée; Otton y met un évêché, qui devient un centre missionnaire, 948. Après beaucoup de vicissitudes territoriales, religieuses et politiques, le margraviat est vendu par le duc de Luxembourg 1415 au hur-grave de Nuremberg, Frédéric, de la branche cadette des Hohenzollern, qui dès lors ne l'ont plus lâché et l'ont successivement agrandi. Jean-Sigismond 1618 en fit le duché de Prusse; en 1700 Fréd. III en fit un royaume et prit le nom de Fréd. Ier; dès lors l'histoire de Brandebourg se fond dans celle de la Prusse. — La réformation y trouva un terrain bien préparé; déjà dès le 14m® siècle les vaudois, puis les bohèmes et les hussites avaient travaillé les esprits; l'autorité du pape n'y était pas solide, et si le prince-électeur Joachim ne se montra pas dès l'abord favorable à Luther, ce fut plutôt par la crainte des excès que par crainte d'une réforme; la guerre des paysans le fit encore reculer davantage. Cependant les villes se prononçaient les unes après les antres, et les jeunes princes qui avaient appris à connaître Luther, qui l'avaient vu à Worms, qui avaient correspondu avec lui, étaient entrés dans le mouvement, ainsi que leur pieuse mère. Aussi, lorsque Joachim II monta sur le trône en 1535, son parti était pris, mais il ne voulut rien faire à la légère, ni user de violence. Les communes furent consultées, des conférences eurent lieu, des prédicateurs distingués furent appelés, Mélanchthon intervint avec ses tendances conciliatrices, et Luther lui-même se montra modéré, accordant aux scrupules du savant, évangélique et un peu timoré prédicateur George Buchholz, tout ce que celui-ci pouvait désirer, un crucifix d'argent et même d'or, s il le voulait; un surplis ou une chasuble de lin, de soie ou de velours; « et si le prince trouve qu'une procession autour de l'église ne suffise pas, qu'on en fasse sept, pourvu qu'on se rappelle que cela n'a rien à faire avec le salut. » Après de nouvelles négociations et quelques changements proposés par Bugenhagen et Mélanchthon, les États examinèrent de nouveau en 1540 la constitution de réforme ecclésiastique, qui fut enfin définitivement adoptée en 1542.

 

BRANDT 1° v. Struensée. 2° plusieurs pasteurs arminiens de ce nom, à Amsterdam; ainsi Gérard B., auteur d'une Vie de Buyter, 1690; Gaspard B., auteur d'une Vie de Grotius et d'une Vie d'Arminius, 1724.

 

BRANT, Sébastien, né 1458 à Strasbourg dans un cabaret; prof, de droit à Bâle où il demeura 30 ans, puis syndic à Strasbourg sous Maximilien 1er. Auteur d'une satire la Nef des fous <Narrenschiff), 1494, qui donne une juste idée de l'état des mœurs de son temps. Pour lui la société est un carnaval où tous les vices agitent leurs grelots, et les hommes sont assez fous pour s'y laisser prendre. Il y a aussi des traits contre l'Église, mais il n'est pas irréligieux.

 

BRECKLING. Fréd., né 1629 en Schleswig, 11711 à La Haye, eut une vie assez agitée; il étudia la théologie successivement à Rostock, Kônigsberg, Helmstâdt, Wittenberg, Leipzig, Iéna, Giessen. C'est à Hambourg qu'il reçut les plus vives impressions religieuses et cela d'un marchand herboriste. Après avoir servi quelque temps l'Église du Danemark, sans vouloir rien recevoir, il publia contre le relâchement du clergé une brochure qui lui valut des ennemis et des persécutions. Il dut fuir, accepta une place de pasteur en Hollande 1660, mais la quitta bientôt pour être entièrement libre, et se fixa à Amsterdam où il se lia avec tous les enthousiastes et sectaires, bons ou mauvais, qui s'y donnaient volontiers rendez-vous, sans toutefois tomber lui-même dans les excès des visionnaires; on lui reproche surtout ses opinions chiliastes. Il gagnait sa vie comme correcteur d'imprimerie. Il eut de puissants protecteurs, entre autres la princesse Marie, femme de Guillaume III, qui lui lit une pension de 400 florins, à condition qu'il se fixerait à La Haye. La princesse de Saxe lui fit aussi plus tard une pension de 80 fi. Enfin Spener, Reimar. Elsner et d'autres notabilités évangéliques ne cessèrent jusqu'à la fin de lui témoigner leur sympathie. Il s'était marié en Hollande et laissa plusieurs enfants. Son neveu Jean Moller a publié sa Vie et la liste de ses 64 ouvrages, qui respirent tous un bon esprit, mais dont le style lâche et diffus rend la lecture difficile.

 

BREF. Ce mot qui rappelle le latin brevis, court, et selon d'autres étymologistes, l'allemand Brief, lettre, s'emploie en style de chancellerie papale pour désigner certaines communications, moins développées que les Bulles, d'un intérêt local ou temporaire, écrites sur du papier ou du parchemin ordinaire, en caractères cursifs, comme moins solennels et visant moins à la postérité. Au lieu du sceau et de la signature du pape, ils ne sont signés que du secrétariat. On trouve les principales de ces pièces dans les Bullaires publiés à diverses époques par les deux Cherubini, Barbora, Guerra, et plus récemment par Eisenschmidt 1831.

 

BREITHAUPT, Joachim-Juste, le premier professeur de Funiv. naissante de Halle, celui qui lui a donné la direction évangélique à laquelle elle n'a cessé dès lors d'être fidèle. Né en février 1658 à Nordheim,orphelin de bonne heure, il fut appelé 1680 à la sous-direction de l'école de Wolfenbuttel, continua en 1681 ses études de théologie à Kiel, lit à Francfort la connaissance de Spener avec qui il se lia pour la vie, puis fut successivement prof, d'homilé-tique à Kiel, pasteur à Meiningen, pasteur et professeur à Erfurt en 1687. Il déploya une activité extraordinaire, se multipliant pour subvenir à tous les devoirs officiels et inofficiels de ses fonctions, prêchant, donnant des conférences, tenant des assemblées religieuses, et ameutant contre lui, non seulement les catholiques qui plus d'une fois mirent sa vie en danger, mais encore les protestants froids, et surtout les tièdes, qui désapprouvaient son zèle. L'arrivée de son ami Francke 1690 lui fut un précieux encouragement, mais déjà en 1691 Francke était destitué. Breithaupt protesta du haut de la chaire contre cette mesure, et accepta l'appel qui lui fut adressé de Halle, pomme prof, de théologie et directeur du séminaire à fonder. Il commença ses cours en nov. 1691, se fit bientôt adjoindre Francke comme prof, de langues orientales, puis en 1695 Paul Antoine. A eux trois ils firent la réputation de l'université, n'étant qu'un cœur et qu'une âme, des hommes de prière, des chrétiens de la Bible, donnant aux étudiants des soins paternels et leur faisant connaître la vraie théologie, celle de la foi, de la science et de la vie. Appelé en 1705 il Magdebourg comme surintendant général des églises du duché, et en 1715 comme abbé du cloître de Bergen, il conserva toujours sa place et une résidence à Halle. Sa correspondance était immense, et il remplissait avec un soin scrupuleux tous ses devoirs de pasteur et de surintendant. La consécration d'un ministre était surtout l'objet de préoccupations qui allaient jusqu'à l'angoisse; rien n'aurait pu le décider à imposer les mains à nn candidat non croyant ou douteux. Bien que souffrant, il travailla jusqu'à la lin, toujours actif et consciencieux, et f à Bergen 16 mars 1732. — Parmi ses ouvrages, on cite surtout ses: Institutiones theologicœ, 2 vol. 4°, et ses Poemata-miscella-nea, Magdeb. 1720.

 

BREITINGER, Jean-Jaques, né 19 avril 1575 à Zurich; après quelques années passées dans l'enseignement, il fut appelé 1609 comme pasteur à Zurich, se distingua par son dévouement pendant la peste, par son courage à censurer les autorités quand elles manquaient à leurs devoirs, par son zèle et sa générosité à secourir les persécutés de la religion et les réfugiés de la guerre de Trente ans. Il représenta Zurich au synode de Dordrecht, et se prononça contre les Remontrants. Eloquent, évangélique, patriote, il fut le digne successeur de Zwingle et de Bullinger. f 1645.

 

BRÈME, v. Anschar.

 

BRENZ, Jean (latin Brentitis), le réformateur de la Souabe et du Wurtemberg. Né 24 juin 1499 à Weil, en Souabe, f H sept. 1570 à Stuttgard. II étudia à Heidelberg, où il se lia avec Mélanchthon, OEcolampade, Bucer, Billi-can, dont quelques-uns furent ses maîtres, les autres ses condisciples. En avril 1518 il entendit les conférences de Luther, dont les 95 thèses étaient déjà connues de toute l'Allemagne, et il se joignit à lui, ainsi que ses amis, sans que personne soupçonnât encore la grandeur et l'avenir de ce mouvement réformateur. Consacré par l'év. de Spire, il donna quelques cours à Heidelberg, mais bientôt devenu suspect à cause de la franchise de son enseignement, il fut heureux d'accepter l'appel de l'église de Hall, Souabe; c'est le 8 sept. 1522 qu'il y fit son premier sermon; et il y resta 25 années, avec un traitement de 80 florins, ayant refusé plusieurs places plus avantageuses. On le consultait de toutes parts; son instruction, son tact, sa modération, sa fermeté, faisaient rechercher et apprécier ses conseils. Luther le tenait en haute estime à cause de sa profonde piété et de l'équilibre remarquable de ses facultés. Lors de la révolte des paysans, Brenz réussit à préserver la ville, faisant comprendre aux révoltés leur péché, aux grands et aux riches leur responsabilité et leur devoir. Infatigable comme théologien et comme écrivain (plus de 8 vol. f°), il savait se multiplier aussi comme organisateur, et si son pays lui doit la Confemo wirtembergica, il travailla également, et d'une manière décisive, à doter d'une (institution ecclésiastique d'autres États de l'Allemagne, notamment le Brandebourg^ lâche d'autant plus difficile, que tout était à créer et qu'il fallait tenir compte des habitudes et des mœurs de chaque pays. Il s'attachait à l'essentiel et savait au besoin céder sur les détails secondaires. Luthérien sur la doctrine de la Cène, il était cependant moins absolu que plusieurs de ses contemporains; les concessions qu'il crut devoir faire, ou les explications qu'il donna, l'ont fait considérer comme nn de* chefs des Ubiquitaires. La guerre de Trente an* le força de fuir en grande hâte, déc. 1546; il se rendit à Bâle, où il apprit la mort de sa femme,. Marguerite Grâter, dont il avait eu 6 enfants. Inquiet sur le sort de ces derniers, et protège par les ducs Ulrich et Christophe, il rentra à Stuttgard, mais dut pendant plus d'un an se-cacher pour échapper aux recherches. Il raconta lui-même que dans le grenier d'une maison oîi il avait trouvé un refuge, mais rien déplus, une poule vint chaque jour pondre un œuf auprès de sa cachette, seule ressource dont il ait vécu pendant une semaine. En sept. 1550 il se remaria avec Catherine, fille de son amr le pasteur Isenmann, dont il eut 12 enfants. Envoyé en mission auprès du Concile de Trente, il revint sans seulement avoir été entendu, et le duc Christophe le nomma recteur de l'égl. paroissiale de Stuttgard. C'est là qu'il passa ses. dernières années, soignant les intérêts généraux de l'Église, en Suisse et en France, comme en Allemagne, mais sans négliger sa propre paroisse à laquelle il se devait avant tout. Sa fin fut édifiante comme avait été sa vie, à la foi* modeste, désintéressée et bien remplie.

 

BRÉSIL. La population de cet empire s'éiè\>v à environ douze millions d'âmes; la grande majorité est catholique, mais d'un catholicisme puéril, matériel et grossier, comme partout où des conversions en masse se sont produites sous l'influence des jésuites. La liberté des cultes date de 1810. Depuis 1820 les privilèges des couvents et du clergé ont été successivement réduits, et le gouvernement a montré une grande fermete contre les usurpations de pouvoir des évêques. Il y a un archevêché à Bahia ou San-Salvador, avec 11 évêchés, 12 vicariats généraux, H séminaires et environ 1300 paroisses. Le cierge est ignorant, peu moral et mal payé. Le nombre des couvents a été réduit à 20, et aucun novice ne peut être admis, sans l'autorisation de l'empereur. La population protestante défasse le chiffre de 60 mille, mais ne peut être exactement fixée; un certain nombre de communautés se sont fondées sous le protectorat de la Prusse; il y en a aussi de hollandaises, d'anglaises, de suisses et de vaudoises du Piémont.

 

BRETSCHNEIDER, Charles-Gottlieb, théol. allemand, né à Gersdorf 11 févr. 1776, f à Gotha 22 janv. 1848; connu par son Dictionn. grec-latin du N. T., par plusieurs travaux sur les Apocryphes, par son édition des œuvres des réformateurs, par divers essais dogmatiques, par des brochures de circonstance, par des articles de journaux, et par sa collaboration au Dictionn. de la conversation de Brockhaus. Sa tendance était plutôt rationaliste que mystique, sans aller cependant jusqu'à rejeter le surnaturel. Un des premiers il éleva quelques doutes *or l'authenticité de l'Évangile de Jean. Il entra dans le ministère sans en avoir la vocation, comme il l'avoue lui-même, et ne céda qu'aux conseils de Reinhard qui n'y regardait pas de m près. Consacré à Dresde, il professa quelques temps à l'univ. de Wittenberg. La guerre de 1806 le décida à prendre une paroisse, et il finit par accepter en 1816 la place de pasteur-surintendant à Gotha, qu'il ne quitta plus. Il a rendu pins de services par ses travaux exégétiques et historiques que par sa prédication un peu sèche et qui ne touchait pas au fond de la vie religieuse; on eût dit qu'il ne regardait la théologie que du dehors, et qu'il en parlât comme si elle ne le concernait pas. Son autobiographie, publiée par son fils en 1848, laisse l'impression d'une âme droite, qui a fait le bien dans la mesure de ses aptitudes.

 

BRÉVIAIRE, c.-à-d. abrégé; recueil de prières qui dans l'origine, c.-à-d. vers le 91»® siècle, était écrit à l'usage de tous, par opposition au plenarium, ou pléniaire, qui était le missel, ou livre de messe, à l'usage des prêtres seuls. Sa rédaction a beaucoup varié suivant les temps et les lieux; les papes sont intervenus à plusieurs reprises, mais aussi longtemps qu'il ne s'agissait que d'extraits copiés à la main, il était difficile d'arriver à une uniformité même relative. Chacun faisait plus ou moins son choix. Le bréviaire renferme ordinairement 4 parties: «les Psaumes pour les différentes heures du jour; des fragments pour les fêtes relatives à Christ; des prières pour les fêtes des Saints; ^nfin une partie d'édification générale. Puis viennent les Appendix: l'office de Marie, les psaumes des degrés, les psaumes pénitentiaux, des bénédictions, etc. Si l'apôtre a dit: Priez sans cesse, l'Écriture semble indiquer spécialement certaines heures pour la prière, Dan. 6, 10. 13. Ps. 53, 18. Act. 2, 15. 3, 1. 10, 9. 16, 25.; c'est en vue de satisfaire à ce devoir et à ce besoin que l'Église a eu l'idée d'un livre de ce genre. La lecture journalière en est imposée à tous les prêtres, et à tous ceux qui possèdent des bénéfices ou qui ont fait des vœux.

 

BRIÇONNET, 1° Guillaume, cardinal, év. de Saint-Malô, puis archev. de Reims et premier ministre de Charles VIII, inspira la malheureuse campagne de ce roi contre l'Italie; il fut excommunié par Jules II, et f 1514. Avant d'entrer dans les ordres il avait été marié et avait eu 2 fils, qui furent évêques:

2o L'un à Toulouse,

3° L'autre, le plus célèbre, aussi Guillaume, d'abord à Lodève, puis à Meaux. Il fut envoyé par Louis XII comme ambassadeur auprès de Jules II, et il assista 1511 au conc. de Pise, qui avait surtout pour mission de limiter les pouvoirs des papes. Mis par son père en possession de l'abbaye de Saint-Germain-des-Prés, il essaya, 1514, mais sans succès, d'y faire revivre les anciennes règles de l'ordre. Il se consola de son échec en accordant une paisible hospitalité à des savants et à des hommes pieux, tels que Lefèvre d'Étaples, Vatable, Pontanus, Farel, etc. Nommé 1516 à l'évêché de Meaux, il fut envoyé la même année comme ambassadeur à la cour de Léon X. A son retour, deux ans après, il voulut essayer aussi de réformer son diocèse, mais il se heurta contre la violente opposition de ses curés qui voulaient continuer de vivre à Paris, et des cordeliers dont il troublait la paresseuse oisiveté. Il cessa d'agir en public, mais il poursuivit, surtout avec Lefèvre et Farel, l'étude des Écritures. 11 leur offrit un asile en 1521, quand ils se virent menacés de persécutions, et il leur permit même de monter en chaire et de distribuer des Bibles. Il entretenait avec la sœur du roi, Marguerite, la future reine de Navarre, une correspondance, dont quelques fragments ont été publiés par M. Génin, et qui jette une singulière lumière sur les dispositions de la cour d'alors. Mais Farel allant toujours plus loin dans ses affirmations évangt* liques et dans la guerre aux abus, Briçonnet déjà suspect d'hérésie prit peur, d'autant plus que le mouvement s'accentuait davantage en Allemagne. Farel, le premier, dut quitter Meaux, où la réforme comptait déjà de nombreux adhérents, et le faible prélat, voyant l'orage s'avancer, fit tout pour le conjurer. Il rendit coup sur coup plusieurs décrets pour rétablir sa réputation d'orthodoxie, 15 oct. et 13 déc. 1523; et comme cela ne suffisait pas, il demanda que le parlement nommât une commission d'enquête et fit visiter son diocèse. La Bible de Lefèvre fut condamnée au feu, et plusieurs personnages considérables furent décrétés de prise de corps; ils réussirent à gagner Stras* bourg ou Bâle. Briçonnet se justifia de son mieux, laissant persécuter ses anciens amis, et f 25 janvier 1534. Ses ouvrages se réduisent à quelques discours dans lesquels, désirant une réforme, il ne la veut pas au prix d'un schisme. II était pieux, mais n'était pas à la hauteur des besoins de son temps.

 

BRIDAINE, Jaques, célèbre prédicateur catholique, né 21 mars 1701 près d'Uzès, avait toute la fougue méridionale, une foi vivante, l'amour des âmes, une imagination colorée, une éloquence populaire. Il fit jusqu'à 256 missions et fut même appelé à Paris, où il prêcha à Saint-Sulpice quelques-uns de ses meilleurs sermons, un entre autres sur l'éternité, qui fit une immense impression et dont La Harpe cite l'exorde comme un chef-d'œuvre; de môme son sermon sur l'aumône. L'abbé Carron en a publié quelques fragments, avec une Notice sur sa vie, intitulée Le modèle des Prêtres, Paris 1804. Cinq volumes de sermons ont paru dès lors, 1823. qui rappellent comme genre les sermons de Spurgeon; mais le catholicisme s'y fait sentir, + 22 sept. 1767 à Roquemaure.

 

BRIGITTE 1° ou Brigide, sainte irlandaise, née 467 à Fochard, Ârmagh, fondatrice de Kil-dare et de plusieurs couvents dont elle fut l'abbesse. Patronne de l'Irlande, f 523.

2° Fille de Birger, prince suédois, de la vieille famille royale des Brahé. Née 1302, elle se sentait appelée à la vie ascétique, mais à l'âge de 16 ans, pour obéir à son père, elle épousa Wulpho-Gudmarson, prince de Néricie, qui avait les mêmes penchants qu'elle. Ils se firent recevoir du tiers-ordre des franciscains, et vécurent religieusement. Ils eurent 8 enfants, s'adonnèrent aux œuvres de bienfaisance, fondèrent un hôpital et visitèrent eux-mêmes les malades. Son mari + 1344, ayant voulu faire un voyage à Saint-Jacques de Compostelle, et étant entré en Suède dans un couvent de cisterciens. Elle partagea alors ses biens à ses enfants, fonda 1363 à Wadstena, Linkô-f>ing, un couvent pour 60 religieuses, avec 13 moines pour directeurs, et partit en 1365 pour Rome, où elle fonda une maison pour les étudiants et les pèlerins suédois. Elle fit ensuite à 69 ans le pèlerinage de Jérusalem, et revint mourir à Rome 1373, après avoir dicté ses Révélations à ses deux confesseurs, Pierre, prieur d'Alvastre, et Mathias, chanoine de Linkôping. Son corps fut transporté & Wadstena. Elle fut béatifiée 7 octobre 1391 par Boniface IX, et canonisée 1419 par Martin V, malgré Gerson. Son recueil de Révélations, suspect dès le premier jour, fut déclaré authentique par le conc. de Bâle, sur le rapport du cardinal Turrecre-inata, et il a été souvent réimprimé, mais il porte en lui-même le cachet des prêtres, l>eau-coup plus que celui de la religieuse. On y voit jusqu'au fanatisme le culte de la Vierge immaculée, et l'éloge du célibat, avec des détails puérils mis dans la bouche du Sauveur.

L'ordre de sainte Brigitte, appelé aussi Ordre du Sauveur, fondé par la sainte suédoise, fut reconnu par Urbain VI, 1370. Il se compose de moines et de nonnes, sous la conduite d'une abbesse qui est censée représenter Marie* Il se répandit surtout dans le nord, mais eut aussi quelques maisons en France et en Italie. OEco-lampade fit partie d'un de ces couvents, près d'Augsbourg, 1520-1522. Au commencement du 17m* siècle quelques maisons de cet ordre furent fondées en Espagne sous le nom de Recol-lecti, ou les Recueillis.

 

BRILL, Jacob, né 21 janv. 1639, f à Leyde, 28 janv. 1700. Philos, et théol. mystique et plus ou moins panthéiste, auteur d'une quarantaine de petits écrits où, à force de chercher la vie cachée avec Christ en Dieu, il finit par oublier le Christ mort pour nous; le renoncement qu'il rêve aboutit presque à l'anéantissement de l'âme par son absorption en Dieu.

 

BRITTINIENS, variété des ermites augustins, ainsi nommés de leur établissement à Brittini, marche d'Ancône. Ils furent reconnus par Grégoire IX.

 

BROGNI, Jean (de), év. d'Ostie, cardinal de Viviers, natif d'un village des environs d'Annecy, présida le concile de Constance, en l'absence des papes déposés ou en fuite, dans la séance où Jean Huss fut condamné au* bûcher.

 

BROMLEY, Thomas, né 1er féy. 1629 à Worcester, f 13 avril 169i. II vécut à l'époque des grandes agitations politiques et religieuses de l'Angleterre, lit sous Cromwell d'excellentes études à Oxford, où il obtint même un bénéfice au collège de Toutes-Ames; mais il le perdit sous Charles II, ayant refusé de signer la liturgie anglicane. Disciple de Bôhme, il forma avec Pordage, Jeanne Leade, et quelques amis, une société d'amour fraternel, recherchant la sanctification et proscrivant jusqu'au mariage. Ils attendaient, mais sans impatience, la seconde venue de Christ, ayant des visions célestes, et quelques-uns même le don de prophétie. Son écrit le plus important a pour sujet les Progrès de l'âme chrétienne depuis sa nouvelle naissance jusqu'à son entière sanctification, sujet qu'il a traité encore dans son livre du Voyage des enfants d'Israël dans le désert, où le non) de chaque campement et les événements qui s'y rattachent lui fournissent l'occasion de rapprochements spirituels et mystiques. Sans avoir été consacré il remplit jusqu'à la lin le ministère actif de la parole, et s'endormit en paix, en répétant: Veillez ! veillez !

 

BROSSE, Salomon (de), architecte soi»

Henri IV et Louis XUI; né à Verneuil-sur-Oise, f 9 déc. 1626 à Paris, laissant un fils et 5 filles. Ses descendants retournèrent au catholicisme. On lui doit entre autres le Palais du Luxembourg, et il avait bâti pour ses coreligionnaires le temple de Charenton.

 

BROUSSON, Claude, né à Nîmes 1647, y fit ses premières études et y fut reçu avocat. Il s'établît en cette qualité à Castres, puis à Cas-telnaudary et à Toulouse, où les protestants trouvèrent toujours en lui un défenseur dévoué. Il reçut dans sa maison les seize directeurs des églises, et se compromit au point qu'il fut obligé de s'enfuir 1683. Il vint d'abord à Nîmes, mais dut se réfugier en Suisse. Il fut pendu en effigie le 3 juillet 1684. Il exerçait en paix sa profession d'avocat à Lausanne, avec ss femme N. Combeile, et son fils unique, Barthélémy; mais souffrant de savoir ses frères exposés k toutes les horreurs des persécutions, il revint dans les Cévennes sous le pseudonyme de Beausocle, et sans autre consécration que celle que lui avaient donnée les prophètes en *ept. 1695, il fit de nombreuses tournées missionnaires, inaugurant le culte du Désert, prêchant le jour et la nuit, dans les cavernes et dans les bois. Sa tête fut mise à prix, d'abord pour ÎOO, puis pour 500 et 600 louis; pourchassé par les hommes de Basville, il changeait >ans cesse de résidence. Après plusieurs voyages et missions en Suisse et en Hollande, il revint encore visiter les églises du midi, et finit par être arrêté à Oléron, Béarn, le 19 sept. 1698; il fut transféré à Pau, puis dans la citadelle de Montpellier le 30 oct. Basville, dans la crainte d'un soulèvement, le traita avec une douceur relative et lui accorda la grâce d'être pendu avant d'être roué, le 4 nov. 1698. Bouil-let répète après d'autres, quoique le fait ait été exagéré et dénaturé, qu'il avait préparé avec Schomherg un projet d'invasion contre la France. — On a de Brousson 3 vol. sur l'État des réformés de Fr., plusieurs Lettres au clergé, aux catholiq. etc.; la Manne mystiq. du désert, collection d'homélies, et un certain nombre d'opuscules.

 

BROWN, Robert; théol. anglais, né vers 1550 à Northampton, fit de bonnes études à Cambridge, mais s'y distingua déjà par le caractère inquiet qui fit le malheur de sa vie, et par ses attaques contre la hiérarchie anglicane qui furent le fond de sa théologie. Il se joignit aux anabaptistes hollandais de Norwich dont il ne tarda pas à devenir le chef, et sa prédication fougueuse grossit bientôt le nombre de ses partisans. A ses vues sur l'Église et sur les sacrements se mêlaient des tendances républicaines, qui lui valurent la prison. Relâché en 1580, par la protection de lord Burleigh son parent, il s'enfuit à Middlebourg avec un certain nombre de ses adhérents; il y publia un volume intitulé La réformation sans concessions, demandant le retour pur et simple au christianisme primitif. A la longue la division se mit dans son troupeau, qui s'était considérablement accru, et il retourna en Angleterre, où après des alternatives de soumission, de révoltes, d'excommunication et de prison, il obtint une petite paroisse dans son comté natal. Il f 1630, à l'âge de 80 ans, se vantant d'avoir été arrêté 32 fois, et plusieurs fois mis dans des cachots où il ne pouvait pas même voir sa main en la plaçant devant ses yeux. Ses sectateurs voyaient en lui un saint, sans que rien explique ou justifie cet enthousiasme. En tout cas ils restèrent plus fidèles que lui à ses doctrines, et sous le nom de — Brownistes — bravèrent les persécutions, s'établirent en Angleterre, en Hollande et en Amérique, et repoussèrent toute espèce d'organisation ecclésiastique, presbytérienne aussi bien qu'épiscopale, ne connaissant d'autre église que la réunion des chrétiens d'un même endroit, la majorité faisant la loi et exerçant la discipline.

— Il ne faut confondre ce Brown, ni avec le ministre du même nom, James, écrivain distingué 1715-1764, ni avec le docteur Jean Brown, médecin écossais 1736-1788, qui fit école et qui eut aussi des disciples appelés brownist&s expliquant tout par sa théorie de l'excitabilité.

 

BRUCIOLI, Antonio, né à Florence vers la fin du 15m« siècle, banni à la suite d'une conspiration contre les Médicis. visite la France et l'Allemagne, étudie les Écritures et peut rentrer à Florence 1527. Arrêté en 1529 comme luthérien, il réussit à s'enfuir à Venise, où il publie sa traduction du N. T., faite avec l'aide de ses cousins Francesco et Alessandro, et dédiée à Anne d'Esté; en 1536 il publie aussi l'A. T. Après quelques années de tranquillité il fut recherché de nouveau, et trois procès troublèrent sa vieillesse. Il fut incarcéré et signa une rétractation, le 22 juin 1555, sous l'influence de sa nombreuse famille, f 4 oct. 1566 dans la misère. Il avait composé contre le clergé des Dialogues, dédiés à Max. Sforza.

 

BRUEYS, famille languedocienne, dont le nom s'écrit aussi Bruès, Bruex, Brueix. Elle se composait de plusieurs branches, et a produit quelques hommes distingués. Malheureusement elle a produit aussi 1° un traître, Alexandre, qui feignit de se jeter dans le parti des cami-sards, qui surprit leurs secrets et les dénonça à Basville. Il mourut aux galères 1707, pour avoir tué sa femme; 2° un renégat, David-Augustin, né à Aix 1640, qui étudia d'abord le droit, puis la théologie; il se fixa à Montpellier, écrivit contre Bossuet 1681 une Réponse remarquable, se laissa ensuite convertir par Bossuet 1682, puis essaya de se réfuter lui-même, mais sans succès, 1683; se fit ordonner prêtre pour plaire à Louis XIV; entreprit de prouver aux protestants qu'ils avaient tort de se plaindre dn régime paternel auquel les soumettait le roi, et quittant définitivement la théologie, il se mit à faire des comédies, de compte à demi avec Palaprat. On lui doit entre autres l'Avocat Patelin, le Grondeur, la Force du sang, le Concert ridicule, etc. f à Montpellier le 27 nov. 1723.

 

BRUNO 1* appelé aussi Brun; 3™ fils de Henri l'Oiseleur et frère d'Othon I«r, né 925, fut destiné à la carrière ecclésiastique et envoyé de bonne heure à Utrecht, où il reçut une éducation soignée. Ses dispositions religieuses et morales étaient à la hauteur de ses talents, et il ne cessa d'employer son influence pour le bien. Son frère Othon fut à peine monté sur le trône qu'il le fit venir auprès de lui 939; il le fit son chapelain et le mit à la tête d'une école palatine, à laquelle furent appelés les professeurs les plus célèbres. Bruno eut aussi, comme chancelier, la surveillance des églises et des couvents, et il y fit observer les règles des différents ordres. En 951 il accompagna Othon en Italie, où il se montra négociateur habile. Il eut plusieurs fois à apaiser des révoltes contre l'autorité royale, qu'il estimait venue de Dieu. Wigfried, archev. de Cologne, étant mort en juillet 953, Bruno lui succéda et son frère lui donna en même temps les pouvoirs et le titre d'archiduc, afin d'humilier ou d'affaiblir le parti ducal, en le subordonnant à un ecclésiastique prince du sang. Bruno prit encore une part active aux complications du règne de son frère, vis-à-vis de l'Italie, de la Hongrie, de la Lorraine et du pape lui-même. U fut à diverses reprises envoyé en France, tantôt seul, tantôt avec une armée. pour y défendre les droits des rois mérovingiens. Les contestations entre les cousins rivaux ayant recommencé, Bruno se mit en route pour Compiègne, mais il tomba malade à Reims, où il f 11 oct. 965. Son corps fut transporté à Cologne, dans l'égl. de Saint-Panta-léon. 11 avait reçu de ses contemporains le titre de Grand et de Pacificateur; l'Eglise y ajouta celui de Saint, mais ce ne fut pas sans quelques difficultés, car on lui reprochait d'avoir trop cultivé les lettres et surtout la philosophie; l'intervention de l'apôtre Paul auprès de Christ, aurait seule vaincu la résistance.

2° Bruno, l'apôtre de la Prusse, plus connu sous son nom adoptif de Boniface; né 970, d'une famille considérable de la Saxe, de laquelle devaient sortir plus tard l'emp. Lothaire III, fut destiné à l'état ecclésiastique, pour lequel il avait une vocation sérieuse. Nommé chanoine de Saint-Maurice à Magdebourg, il vit la cour de près, accompagna Othon III en Italie, s'enthousiasma des souvenirs de Boniface, et à son retour, ayant appris la mort d'Adalbert, il ne rêva plus que le martyre, se retira du monde, se fit moine, vécut dans les bois avec quelques amis, et accepta l'appel qui lui fut adresse d'aller évangéliser la Pologne. Il s'y rendit en 1004, ayant reçu du pape et d'Henri II le titr* d'archevêque; après une visite en Hongrie, il retourna en Pologne, avec 18 de ses amis, écrivit une vie d'Adalbert, et entreprit d'évangéli-ser aussi la Prusse, pendant que ce pays était en guerre avec Boleslav. Faits prisonniers, lui et ses amis, ils eurent la tête tranchée 14 févr. 1009. Boleslav réclama leurs corps. La ville d* Braunsberg (mont de Brun) s'éleva plus tard à l'endroit où les martyrs avaient péri.

3° Bruno, fondateur de l'ordre des Chartreux; né à Cologne vers 1030, t en Calabre 6 oct. 1101. Entré dans le sacerdoce et revêtu de plusieurs dignités ecclésiastiques, il se sentit attire par la vie monastique, refusa i'archevéché de Reims 1080, et se rendit avec six de ses amis dans les solitudes montagneuses des environs de Grenoble, en un désert appelé la Chartreuse, où il fonda un monastère soumis à une règle rigoureuse 1084. Appelé à Rome 1089 par son ancien disciple, Urbain II, il l'assista de ses conseils, sans exercer toutefois une grande influence, refusa toute récompense, entre autres l'archev. de Reggio, et se retira 2 ans après dans la Calabre, où il fonda une nouvelle Chartreuse, sou* le nom de Saint-Étienne, et où il finit ses jours dans les exercices de la piété. Il a laissé quelques écrits de théol. Canonisé en 1514. Sa vie a été écrite par le p. de Tracy, 1786.

4o Bruno d'Asti, né à Soleria, év. de Segui, f 1125. Auteur de quelques ouvrages de théol.^ traités, commentaires, etc.

5° Bruno le Saxon, écrivit vers 1082 une histoire des guerres que les princes saxons eurent à soutenir contre Henri IV; il prend chaudement le parti de son pays, mais ne peut être accusé d'avoir sciemment altéré les faits. Le style est coloré, rapide, vivant. Il n'eu reste plus qu'un seul mss. connu, mais de nombreux fragments dans la Chronique de Magdebourg. L'original a été impr. en 1600, et dès lors plu -sieurs fois.

6° Jordano Bruno, v. Jordano.

 

BRUYS ou Brueys, Pierre (de), prêtre languedocien, répandit la vérité dans plusieurs contrées du midi de la France, notamment dans le Dauphiné. la Provence et le Languedoc; il travailla courageusement pendant 20 ans, 1104-1124, combattant les vieilles cérémonies romaines et les doctrines contraires à l'Écriture. Il alla un peu loin, et manqua de modération et de prudence. Il s'élevait contre léchant, contre le baptême des enfants, contre la construction de temples matériels; il n'admettait pas que le corps de Christ fût dans la Cène; il fit brûler publiquement des crucifix, mangeait de la viande en carême, etc. Il fut brûlé à Saint-Gilles, Gard, par le peuple furieux excité par les prêtres 1130. Ses disciples, appelés de son nom Pétrobruriens, demeurèrent après lui; le plus célèbre fut Henri de Lausanne, avec lequel on Ta quelquefois confondu, et qui eut ses propres partisans.

 

BUCER, Martin, de son vrai nom Butzer, \u il traduit quelquefois en latin par emunctor; né 1491 à Schlestadt; le plus célèbre des réformateurs de l'Alsace, non par ses talents ou par sa science seulement, mais aussi par son caractère et l'équilibre de ses facultés. A 15 ans il entra comme élève chez les dominicains; puis, lorsqu'il eut prononcé ses vœux, on l'envoya à Heidelberg oii il se passionna pour le grec et rhébreu, et finit par étudier la théologie. Il acheva ses études k Mayence, oti il reçut l'ordination, et revint à Heidelberg comme surveillant des jeunes frères qui suivaient les cours. Mais il devint bientôt suspect; non seulement il était fort en grec et en latin, mais il recommandait à ses élèves l'étude de la Bible; il approuva publiquement les doctrines de Luther à la conférence de Heidelberg 1518. Sa dispute contre Cochlâus, Francfort 1520, son enthousiasme pour Érasme, son admiration pour Luther à Worms, achevèrent de le perdre. Une enquête fut ordonnée contre lui, en même temps qu'il demandait à Léon X la permission de quitter wn ordre. Il s'enfuit d'abord à Louvain, puis *hez l'électeur palatin Frédéric qui le nomma son chapelain, puis chez François de Sickingen qui lui donna la cure de Landstuhl. C'est alors que, rompant définitivement avec Rome, il épousa une religieuse, Élisabeth Pallass, qui avait quitté son couvent, 1522. Mais la guerre le força de partir; il se rendit à Wissembourg où l'appelaient les partisans de la réforme, et à la fin de mai 1523, chassé de nouveau par la guerre et par l'excommunication de l'év. de Spire, il arriva à Strasbourg où déjà Zell, Capiton et d'autres prêchaient hardiment l'Évangile. H était dans un état complet de dénûment. Après bien des difficultés il fut reçu bourgeois de la ville, autorisé à prêcher et à faire des lectures publiques, et en 1524 nommé par l'Église et confirmé par le Sénat comme pasteur de Sainte-Aurélie. En 1528 il assista à la dispute de Berne, en 1529 au colloque de Mar-wurg; en 1530 il fut élu à la place de saint Thomas, et en 1531 nommé président du Consistoire. Il ne réforma le culte que successivement, avec beaucoup de prudence, au fur et à mesure que l'occasion s'en présentait, et autant que possible, d'accord avec la majorité de ses paroissiens. Il eut fréquemment à intervenir auprès des théologiens étrangers à propos des différends sur la Cène; tout en étant à peu près luthérien quant à la doctrine, il n'attachait pas la même importance que Luther à l'unité de vues sur ce point, et il fit ses efforts pour maintenir l'union. C'est lui qui rédigea, pour être présentée à Charles-Quint à la diète d'Augs-bourg, la fameuse confession dite tètrapolitaine, des 4 villes de Strasbourg, Constance, Memmin-gen et Lindau: il obtint ainsi pour ces villes qu'elles fussent admises provisoirement dans la ligne de Smalcalde 1531. Il fut appelé à presque toutes les conférences qui eurent pour but d'amener une entente entre les théologiens réformés suisses et les allemands, à Leipsic, Ha-guenau, Spire, Worms, Ratisbonne, mais ses tentatives de conciliation échouèrent contre l'obstination des luthériens; elles n'eurent d'autre résultat, grâce aux formules vagues qu'il proposait, que de le faire accuser de faiblesse par les uns, de duplicité par las autres. Nommé doyen du chapitre de Saint-Thomas, 1544, après avoir passé 3 ou 4 aqs à Bonn et à Cologne, cherchant à y établir la Réforme, il refusa en 1548 de signer l'Intérim et dut quitter secrètement Augsbonrg. La colère de l'emp. le poursuivit à Strasbourg et obtint sa déposition, ainsi que celle de son ami et collègue Fagius; après avoir hésité entre Wittenberg et Genève, où ils étaient appelés par Mélanchthon et Calvin, les deux amis se décidèrent pour l'Angleterre, où Cranmer leur offrait du travail et une position. Ils quittèrent Strasbourg le 5 avril 1549, arrivèrent le 25 à Londres, et se mirent à reviser la version de la Bible et la liturgie anglicane. Bucer nommé prof, k Cambridge et docteur de l'université, ne pouvait cependant se faire ni au climat, ni à la langue, ni aux habitudes du pays; il se disposait à repartir pour Strasbourg, quand la maladie l'enleva, 28 févr. 1551, peu de mois après la mort de Fagius. La duchesse de Suffolk le soigna dans sa maladie. Il fut enterré avec une pompe extraordinaire. Marie la Sanguinaire le fit exhumer en 1554, ainsi que Fagius, et brûler leurs os, mais Élisabeth, en 1560, répara cet indigne outrage en faisant recueillir pieusement les cendres de ces illustres étrangers. Bucer avait eu d'Élis. Pallas 13 enfants, dont 5 moururent de la peste eu 1541, ainsi que sa femme; il se remaria en 1542 avec la veuve de son collègue Capiton. Les anabaptistes troublèrent un moment l'église et la ville de Strasbourg, 1533-1539; des conférences et des mesures de rigueur ne produisirent aucun bien; le calme ne se rétablit que lorsqu'un synode eut décidé que les parents ne seraient pas obligés de faire baptiser leurs enfants.

pourvu qu'il les élevassent chrétiennement. Bu-cer a laissé beaucoup de livres, la valeur de

10 in-f°, mais on n'en a aucune édition complète, et c'est à peine si l'on en a une liste un peu exacte; v. Haag. Le plus important est son: De regno Christi, dédié au roi Édouard; le reste se compose de commentaires, de sermons, dissert, sur la Gène, Lettres, etc.

 

BUCHANAN, Claudius, missionnaire aux Indes, né 12 mars 1766 à Cambuslang, près Glasgow. Fils de parents pieux, il eut cependant une jeunesse dissipée et vagabonde. A Londres ses souvenirs d'enfance se réveillèrent; il eut le bonheur d'entendre et de voir de près le célèbre prédicateur John Newton; il se convertit; un ami lui fournit les moyens de se rendre à Cambridge, où il fit de brillantes études, mettant toujours la Parole de Dieu au-dessus de toute autre science. Après 4 années il fut nommé chapelain de la Compagnie des Indes à Barrack-pore, près de Calcutta, où il arriva le 11 mars 1797. C'était une sinécure; au bout de 18 mois

11 n'avait pas encore pu prêcher une seule fois; les officiers aimaient mieux employer leurs dimanches à des courses (Je chevaux. 11 appelle néanmoins cette station son Patmos, à cause de sa solitude spirituelle, et surtout parce qu'il put se livrer à son étude favorite des Écritures dans les langues originales; il profita également de ce temps pour apprendre l'indoustani et le persan. En 1800 il fut envoyé à Calcutta comme chapelain et comme professeur au collège de Fort-William, dont il devint ensuite vice-prévôt. Lord Wellesley, plus tard Wellington, était alors gouverneur-générai, et exceptionnellement bien disposé en faveur de l'Evangile. Buchanan écrivit un Mémoire sur la convenance de donner aux Indes une constitution ecclésiastique, réclamant pour la première fois la division du pays en diocèses, avec des évéques et des ministres. Il ne cessa de travailler par tous les moyens à obtenir ce résultat. Il visita en mai 1806 les églises syriennes de Malabar, et fut très satisfait de son voyage; il le fut moins de son passage à Goa, où il vit le grand inquisiteur portugais et la dernière retraite des autodafés. Il fraternisa en route avec les missionnaires luthériens, baptistes, et autres, qu'il rencontra. De retour à Calcutta en 1807, il vit avec regret lord Minto remplacer lord Wellesley, et la Compagnie devenir toujours plus hostile à tout essai d'œuvre religieuse. Il comprit que c'était en Angleterre môme qu'il devait venir plaider cette cause et il y arriva au printemps de 1808. La lutte fut longue et difficile, mais enfin en 1813 le parlement décida que l'Inde aurait son évêque, assisté de trois archidiacres; Mid-d le ton fut le premier élu, puis vinrent Heber, James, Turner, Wilson, etc. L'œuvre de Buchanan était achevée; il f en paix 9 février 1815.

 

BUCHLEIN, Paul, plus connu sous sou nom latin de Fagiu*; né 1504 à Rheinzabern où son père était instituteur, montra d'étonnantes dispositions pour l'étude, mais eut à lutter longtemps contre la pauvreté. A 11 ans il partit pour Heidelberg, à 18 pour Strasbourg où il trouva en Capiton un bon professeur et en Bu-cer un ami, mais en 1527 il dut renoncer à la vie universitaire et accepter une place de maître d'école à Isny, Souabe, où il se maria et où, en exerçant le ministère depuis 1537, il put monter une imprimerie hébraïque qui ne publia pas moins de 15 ouvrages en 2 ans, réimpr. de Kimhi, travaux originaux de Fagius et de son ami Élie Levita. La peste de 1541 prouva que le savant était aussi un pasteur dévoué. Un triple appel qui lui fut adressé en 1542 montre la réputation dont il jouissait; il refusa la place de prof, à Marbourg, accepta pour 2 ans celle de pasteur à Constance, puis définitivement celle de prof, à Strasbourg en remplacement de Capiton. Il y arriva en 1544, et y resta (sauf une courte absence en 1546 pour réorganiser l'université de Heidelberg) jusqu'en 1549. époque à laquelle, ayant refusé de signer l'Intérim, il fut déposé et se rendit avec Bucer en Angleterre. A peine nommé prof, d'hébreuà Cambridge, il f le 13 nov. 1549, probablement empoisonné. V. Bucer. Ses écrits, au nombre de 18, intéressent plus la science que la religion; le style en est sobre, plus exact qu'élégant.

 

BUDDÉE (Buddœus), Jean-François, ne 25 juin 1667 à Anclam, Poméranie, où sou père était pasteur, fut un des thèol. les plus universels de son temps, ce qui dit à la fois son côté fort et son côté faible. D'une piété vivante qui en fit l'ami de Spener et de Zinzendorf. il avait un tempérament éclectique, qui le rendit quelquefois suspect et lui causa des difficultés a Halle. Les langues orientales, la philologie, la philos., la théol., le droit, lui étaient également familiers. Il enseigna successivement à Witten-berg, Iéna, Cobourg, Halle 1693-1705, et enfin de nouveau à Iéna jusqu'à sa f 19 nov. 1729. Quelle que fût la branche qu'il enseignât, il prêchait volontiers et fréquemment. Il regardait la pratique de la foi comme le but et la fiu de toute théologie. Ses écrits, dissertations, programmes universitaires, etc., dépassent la centaine: mentionnons seulement ses Éléments de philos, pratique, 1697; Institutions de philos. éclectique 1705; Instit. de théol. morale 1711; Hist. ecclés. de l'A. T. 1715; Thèses sur l'athéisme et la superstition; Introductions, Église apostolique, etc.

 

BUDE, Guillaume (de), né 1467 à Paris, f 1540; le plus célèbre humaniste et helléniste de s«n temps, ami d'Érasme qui l'appelait le Prodige de la France à came de sa vaste érudition. Apprécié par Louis XII, il fat nommé par François Ier son bibliothécaire et maître des requêtes; il décida la fondation du Collège royal, aujourd'hui Collège de France. Ses divers écrits ne lui assignent aucune place dans l'hist. ecclésiastique; il n'y figure que comme ami d'Érasme, et parce que différents indices ont Eut supposer que cet émiuent jurisconsulte serait mort protestant. En tout cas sa femme et la plupart de ses enfants embrassèrent la réforme. Une partie de ses descendants se fixèrent à Genève. où quelques-uns occupèrent des places éminentes dans l'enseignement et la magistrature.

 

BUGENHAGEN, Jean, surnommé Pomera-**s, le Poméranien, de son lieu d'origine. Né à Wollin, 24 juin 1485. Après de bonnes études a Stettin et à Greifswald, il entra dans l'enseignement, à Treptow comme recteur en 1805, à Bel bac k en 1517 comme prof, de théol. chargé de faire connaître aux moines l'Écriture sainte. 11 composa pour eux une Harmonie des Év., qoi fat imprimée en 1530. Il fut chargé par Frèdéric-le-Sage de visiter les villes, les châteaux et les couvents de la Pomèranie, et le résolut de ses recherches fat pnblié en 1528 sons le titre de Pomerania; k côté d'un grand talent d'observation, et dans un style remarquable pour l'époque, on reconnaît dans ce travail le penseur chrétien, nourri de la Bible dès sa jeunesse. Le livre de Luther sur la Captivité de Babylone, 1520, le scandalisa d'abord, comme l'œuvre d'un hérétique, mais an bout de peu de jours il revint sur cette impression, se déclara poor la réforme, et y décida môme son abbé, Jean Bolduan. En 1521 il vit à Wittenherg Lather et Mélanchthon, et leur plut tellement qu'ils le retinrent et lui confièrent un enseignement public. Ses leçons sur les Psaumes, qui n'ont encore rien perdu de leur valeur, parurent en 1524. En 1523 il était nommé pasteur et prof, et en 1536 surintendant. C'est lui qui bénit le mariage de Luther, dont il était devenu l'ami le plus intime. Il refusa dès lors toutes les places qui lui furent offertes, même en 1514 l'évêché de Pomèranie; mais, tout en continuant de résider à Wittenberg, il ne recula pas dans les fort nombreuses missions dont il fut chargé sa dehors: à Brunswick, sept. 1528 pour or-puiser la nouvelle église; à Hambourg, à Lu-beck, en Pomèranie; en Danemark, dont il couronna le 12 août 1537 le roi Christian III et la reine, et où il passa, sauf quelques interruptions, presque 5 années; dans le Schleswig-Holstein, etc. Savant distingué, il était encore organisateur et administrateur, et rendit comme tel de grands services k la réforme. Son nom se trouve mélé aux principaux événements de son temps et toujours dans le sens de la modération: k la controverse avec les Suisses, à la rédaction des 17 articles d'AufBbonrg, k la formule de Concorde de Wittenberg, aux discussions de Smalcalde, et surtout k la trad. de la Bible: en allemand d'abord avec Luther, puis seul en bas-saxon pour la Pomèranie. Ses dernières années furent douloureuses; la mort de Luther fat pour lui un coup terrible. Puis vint la guerre de Smalcalde; pendant le siège de Wittenberg, et malgré toutes les menaces, il resta fidèle k son poste et mérita l'estime de ses ennemis eux-mêmes. Pendant l'Intérim de Leip-sig il refusa de rien changer à l'organisation du culte: Le pays, dit-il, peut avoir un autre maître, mais l'Église reste la même. Il prit aussi peu de part que possible aux controverses religieuses, et quand il fut trop affaibli pour pouvoir encore prêcher, il continua de se rendre au culte voulant prier jusqu'à la fin pour son église. Il s'éteignit en paix le 20 avril 1558. Outre ceux de ses écrits qui ont été déjà mentionnés, il faut citer divers écrits de circonstance, et des réflexions pratiques sur Job, le Deutéronomp, les Rois, Samuel, les Actes, les Épîtres, etc.

 

BULGARES, peuple scythique ou tartare d'origine, mais qui, ayant quitté au 5"»® siècle les bords du Volga pour s'établir le long de la mer Noire et sur les rives de la mer d'Azof, finit par adopter la langue slave et un peu les mœurs de sa nouvelle patrie. Son territoire fut longtemps indéterminé et ses limites varièrent. Au 9rae siècle les Bulgares occupaient l'ancienne Dacie, la Mésie inférieure et une partie de la Hongrie. Un grand nombre d'entre eux s'étaient faits mahométans, mais ceux qui émigrèrent du côté du Pruth et du Danube, mis en contact avec le christianisme, se convertirent peu à peu sous l'influence des missionnaires grecs et romains. La lutte dura trois siècles entre les Bulgares et l'empire d'Orient. En 811 ils arrivèrent jusqu'aux portes de Constantinople, firent périr Nicéphore, prirent Andrinople, massacrèrent des milliers d'habitants, et en emmenèrent une foule d'autres comme esclaves, entre autres le pieux archev. Manuel, qui paya de sa vie la tentative qu'il fit d'évangéliser autour de lui. Mais en 842 Bogoris monta sur le trône des Bulgares, en môme temps que Théodora sur celui de Constantinople; obligé de demander la paix, il la conclut avec un échange de prisonniers, et il recouvra ainsi sa sœur, qui était devenue chrétienne pendant sa captivité. Menacé d'une famine et d'une guerre en 845, il écouta les conseils de sa sœur, s'adressa au Dieu des chrétiens et fut délivré de ses dangers. L'arrivée de Cyrille et de Méthodius, vers 860, concourut à décider sa conversion. On raconte en particulier que Mélhodius, ayant fait un tableau saisissant qui représentait le jugement dernier, le roi, déjà ébranlé dans sa conscience, se fit instruire et demanda le baptême. Il fut baptisé de nuit et reçut le nom de Michel qui régnait alors à Constantinople 861. En 866, soit ignorance de la rivalité qui régnait entre les grecs et les latins, soit crainte d'être placé trop directement sous la dépendance de Constantinople, il fit demander au pape Nicolas des docteurs chrétiens; celui-ci envoya Paul et Formose, et c'est ainsi que la Bulgarie se trouva engagée dans le grand conflit ecclésiastique du siècle. — Le nom de Bulgare ayant fini par prendre le sens d'hérétique ou de schismatique, le moyen âge l'appliqua aux cathares et aux albigeois; puis en altérant le mot dans sa forme (boulgres ou bougres) on en fit le synonyme ou le symbole des plus grossiers péchés; les vieilles versions de la Bible l'emploient quelquefois dans cette acception. \. Lombard, Les Pauliciens.

 

BULL, Georges, né 1637 à Wels, f 1710, év. de Saint-David, docteur d'Oxford, auteur d'une Défense de la foi de Nicée, qui lui valut les éloges de Bossuet, et d'une Harmonie apostolique où il prouve l'accord de Paul et d^ Jacques.

 

BULLE (de l'italien bollare mettre un sceau, ou de la forme même du sceau), nom donné aux lettres et communications officielles du pape à la chrétienté, quand elles ont une certaine importance et un intérêt général, par opposition aux Brefs q. v., dont l'importance est moindre. La bulle est rédigée en chancellerie, en latin, sur parchemin, en lettres gothiques, souvent avec la traduction en grec ou en italien; elle se termine par la date, marquée en vieux < style, calendes, ides, etc. et mentionne Tannée du pape. Elle est signée du pape et de quelques cardinaux. En tête figure le nom du pape et son chiffre, ou le titre en latin de: Serviteur des serviteurs de Dieu. Le sceau est en plomb et pend à un cordon de chanvre, ou de soie rouge et jaune, suivant le contenu de la bulle; il porte l'empreinte de lap. Pierre jetant le filet. Le s;eau est en or dans certaines circonstances particulières, et dans ce cas la bulle est appelée une Bulle d'or. Les bulles portent en général le nom des mots par lesquels elles commencent; ainsi Ausculta, fili, et Clericis laïcos, contre Philippe le Bel; Exsurge, Domine, contre Luther; Unige-nitus, contre le p. Quesnel. Une des plus célèbres est la B. In cœna Domini, qui se lit habituellement le Jeudi-Saint à Rome contre les hérétiques et tous ceux qui sont rebelles au saint-siège, protestants, usuriers, pirates, faussaires, juifs, etc. L'excommunication sous sa forme actuelle date d'Urbain II, 1627. Clément XIV l'avait momentanément suspendue, 1770. On appelle BuUaires les recueils de bulles; le plus complet, B. magnum, n'a pas moins de 20 vol. f° et va de Léon 1er à Benoît XIII.

 

BULLINGER, Jean-Henri, né 1504 à Brern-garten, d'un père curé qui avait fait dans sa jeunesse un mariage, dit de conscience, qu'il régularisa plus tard. L'enfant échappa trois fois miraculeusement à la mort. 11 étudia à Emme-rich, puis à Cologne; la lecture de P. Lombard le conduisit à lire les Pères, puis les Écritures, et quand parurent les premiers écrits de Luther, il les dévora. Nommé maître au couvent de Cappel 1523, il enseignait le latin, Virgile, Cicéron, les Loci communes de Mélanchthon, le N. Testament; fidèle au culte il cessa bientôt d'assister à la messe; le couvent se réformait peu à peu. En 1528 il fut consacré au saint-ministère: il avait fait la connaissance de Zwingle et de Pellican et assisté à la dispute de Berne-Il épousa en 1529 Anna Adlischweiler, dont il eut onze enfants. En nov. 1531, après la bataille où Zwingle perdit la vie, Bullinger dut quitter Bremgarten où il avait remplacé son père comme pasteur. Il vint à Zurich et après une première prédication à la cathédrale, il fut le 9 déc. nommé d'emblée pasteur-antistès (président) de l'église de la ville, en même temps que Bibliander remplaçait Zwingle comme professeur. Sa réputation grandissait; sans être un homme de luttes, il eut longtemps à lutter: contre les Conseils du canton, qui voulaient empiéter sur les droits de l'Église; contre les catholiques, contre les luthériens extrêmes (î! refusa de signer la Formule de concorde de Wittenberg, 1536); il apaisa par le Consensus tigurinus, mai 1549, la mésintelligence qui menaçait de diviser Genève et Zurich au sujet de la Cène; il fut modéré dans son préavis sur l'affaire de Bolsec, mais très catégorique dans celle de Servet, donnant raison à Calvin. Il accueillit avec une affectueuse sympathie les proscrits de Marie d'Angleterre et ceux de Lo-carno. Il s'entremit pour calmer l'agitatiou produite à Genève par le parti des Libertins. En un mot, pasteur fidèle dans sa paroisse, il rayonna comme une lumière bienfaisante partout où on fit appel à son dévouement. L'arrivée de Ver-migli à Zurich, en 1556, lui fut un grand secours et un précieux renfort, f le sept 1575, et enterré dans le cloître de la cathédrale. — Ses principaux ouvrages sont ses Décades, recueil de sermons; cent discours sur l'Apocalypse, Chronique sur l'hist. de la Suisse jusqu'en 1532, beaucoup de lettres, et enfin la deuxième Confession helvétique, rédigée par lui de concert avec Vermigli 1562, chef-d'œuvre de clarté, de force et de modération.

 

BUNGENER, Félix, né 1814 à Marseille d'une funille allemande, étudia la théol. à Genève et s'y fixa, se livrant d'abord et surtout à l'enseignement. Régent de première en 1843, il fut destitué en 1848 par le gouvernement radical, niais il continua, soit par des cours publics, soit fu particulier, de donner des leçons, tantôt sur des sujets d'histoire, tantôt et de préférence sur h littérature. Sans ministère régulier, il a toujours servi l'Église; il prêchait souvent, et ne reculait pas devant une controverse incisive. Écrivain distingué, fécond, il a publié des ouvrages dans les genres les plus divers, romans, fermons, biographies, histoire, qui ont presque tous obtenu un grand et légitime succès (saint Paul, Calvin, Lincoln; Conc. de Trente; Rome et la Bible; Récits de Noël, etc). Les plus remarquables sont: Un sermon sous Louis XIV, et Trois sermons sous Louis XV. Julien, ou la Fin d'un siècle a moins bien réussi. — Nature sobre, froide et sévère, B. avait une grande facilité de travail, de l'initiative et de l'originalité. 114 juin 1874.

BUNSEN, Chrétien-Ch.-Josias (de), né 25 août 1791 à Corbach, Waldeck, d'une famille modeste, étudia la théol. àMarbourg, la philologie a Gôttingue, donnant des leçons, et il se chargea de l'éducation du jeune américain Astor. Après avoir visité le Danemark et la Hollande, il vint à Paris pour étudier le persan et l'arabe sous S. de Sacy. A Rome, où il épousa Frances Waddington, il retrouva Niebuhr qu'il avait connu à Berlin, fut son secrétaire d'ambassade, puis son successeur comme chargé d'affaires, et en 1834 ministre plénipotentiaire de Prusse. Il eut à négocier avec la cour papale la question des mariages mixtes, qui ne réussit pas, et qui aboutit le 1er avril 1838 à son rappel, et à l'emprisonnement de l'archev. Droste de Vischering. En 1839 il fut nommé ambassadeur à Berne, puis à Londres où il travailla à l'érection de l'évêché protestant de Jérusalem. Il fut rappelé en 1854 à l'occasion de la guerre de Crimée, pour avoir trop insisté sur l'alliance de l'Allemagne avec l'Angleterre. Ce fut la fin de sa carrière diplomatique. Il passa ses dernières années à Heidelberg, Cannes et Bonn où il f 28 nov. 1860. L'influence que Bunsen a exercée est considérable; son caractère, ses talents, son activité, sa piété l'expliquent suffisamment. On lui doit l'érection d'une chapelle protestante à l'ambassade de Rome; des hôpitaux évangéli-ques à Rome et à Londres; la création de l'Institut archéologique; des études sur Rome et les anciennes basiliques. La littérature chrétienne lui doit surtout un Recueil liturgique, une notice sur Élis. Fry, une Constitution pour • Égl. de l'avenir, deux volumes sur l'Égypte, m ouvrage sur les lettres d'Ignace, Hippolyte et sou époque, un article sur Luther, les Signes des temps, Dieu dans l'histoire, plusieurs brochures de circonstance, enfin son Bibelwerk, trad. et comment, de la Bible, qu'il n'a pu achever lui-même. Nature éminemment sympathique, il a eu d'illustres amitiés (entre autres Fréd.-Guill. IV), et il a soulevé d'ardentes inimitiés; on lui a reproché tour à tour de pencher vers le catholicisme et de fournir des armes au rationalisme; c'était un cœur large et un esprit chrétien.

 

BUNYAN, John, né 1628 à Elston près Bed-ford, fils de pauvres chaudronniers, dont il apprit le métier. Il entra dans l'armée parlementaire et combattit Charles 1er. Sa jeunesse fut misérable, moralement et matériellement; quand il se maria pour la première fois, ils n'avaient ni écuelle, ni cuiller; sa femme ne lui apporta en dot que 2 livres de dévotion, mais ils suffirent pour réveiller en lui les enseignements pieux qu'il avait reçus de ses parents, et ces souvenirs de jeunesse le ramenèrent dans le chemin du devoir et de la piété. Il se joignit à l'église baptiste 1655, et ne tarda pas à s'y faire une position considérable par sa connaissance des Ecritures et par son éloquence d'un caractère éminemment populaire. Nommé pasteur, il vit sa congrégation s'accroître de jour en jour, et sa réputation grandir et arriver jusqu'aux oreilles de Charles II. Il fut, avec Howe et Baxter, un des prédicateurs les plus courus; aussi fut-il un des premiers atteints par la persécution: arrêté en 1660, il ne sortit de prison qu'après 12 V* ans, en 1672, par l'intercession de l'év. Barlow de Lincoln. C'est pendant sa captivité qu'il composa son admirable allégorie du Voyage du Chrétien (et de la chrétienne, 2»»e partie), aujourd'hui trad. dans presque toutes les langues. Il reprit le cours de ses prédications, sans cesse harcelé et menacé par l'autorité, jusqu'au moment où l'Acte d'indulgence du catholique Jacques U, 18 mars 1687, lui garantit une entière liberté. C'est par milliers qu'il comptait les membres de sa paroisse. L'argent afflua quand il s'agit de construire une église plus vaste. Bunyan refusa les avances du roi qui aurait voulu enrôler les non-conformistes dans sa campagne contre l'Égl. anglicane, f 31 août 1688, des suites d'un refroidissement survenu pendant un voyage dans le Berkshire pour réconcilier un fils avec son père.

 

BURGONDES, peuple germanique, primitivement campé entre l'Oder et la Vistule, parent des Goths et des Vandales, très diversement jugé par Ammien Marcellin, Socrate, Sidoine Apollinaire, qui n'avaient pas les éléments pour bien juger. Poussés par le torrent de l'invasion, ils s'avancèrent vers la fin du 3®* siècle jusque dans le voisinage des Allemani, passèrent le Rhin, et s'établirent, avec des frontières qui variaient continuellement, dans les contrées situées entre la Forêt-Noire, les Vosges, l'Aar et le Jura, détendant parfois à l'ouest jusqu'à Dijon, au sud jusqu'à Lyon et Arles, avançant ou reculant suivant le sort de la guerre et les besoins de la vie. Leur grand-prêtre, ou sinnist, était chef absolu; leur roi, ou hendin, pouvait être renvoyé d'un jour à l'autre, pour une bataille perdue, ou pour une mauvaise récolte. Ils furent amenés à la foi chrétienne vers 413, et vécurent dès lors comme des frères avec les Gaulois vaincus. Valentinien III leur permit de s'établir dans les pays du Rhône supérieur, et même des Alpes jusqu'en Provence. Leur royaume dura plus d'un siècle dans ces conditions. Après Gundioc ses 4 fils régnèrent, Godegi-sel, à Lausanne et Besançon, Gondemar à Vienne, Gondebaud à Lyon, et Chilpéric II à Genève. Mais l'empire romain croulait et Gondebaud s'empara du pouvoir et fit périr ses frères. Clo-vis épousa la fille de Chilpéric, Clotilde, chrétienne fervente, et s'en fit un appoint pour s'assurer l'appui des papes. Il semble en effet qu'une partie des Burgondes se soit laissé entraîner à l'arianisme depuis la fin du 5®* siècle, sans que cependant ce soit prouvé de la nation tout entière. Mais Clotilde exploita les haines religieuses contre les meurtriers de son père, et se fit de l'asservissement de ce peuple un devoir de conscience. Gondebaud resta arien jusqu'à sa f 516. Son fils Sigismond embrassa franchement le christianisme, et convoqua le concile d'Epaone 517, sous l'influence d'Avitus. Vers 534 la Bourgogne fut réunie à l'empire des Francs.

 

BURIDAN, Jean, né à Béthune, Artois, vers 1300, f vers 1360, ardent nominaliste, plus philos, que théologien, prof, et recteur à l'université de Paris. Persécuté par les réalistes, il se retira en Allemagne, et fonda l'univ. de Vienne. Il était préoccupé surtout des mystères de la volonté et de la liberté, qui lui suggérèrent la célèbre allégorie de l'âne, attiré également par une mesure d'avoine et par un seau d'eau. Une légende sans valeur le compromet dans les débordements de la tour de Nesle.

 

BURNET, Gilbert, né 13 sept. 1643 à Édim-bourg, f 17 mars 1715 à Salisbury; fils d'un juriste, il étudia le droit et la théol. avec succès et se décida enfin pour la carrière ecclésiastique. Après un voyage en France et en Hollande, il fut nommé pasteur à Salton, puis prof, à Glas-cow. Épiscopal, il blâmait les persécutions dirigées contre les non-conformistes; le véritable ennemi était pour lui le catholicisme, et quand Charles H l'eut appelé à Londres comme son chapelain, il résista aux séductions de la cour et du roi, qu'il voyait engagés dans les filets de la réaction papiste, et donna sa démission. Sa disgrâce augmenta encore sous Jacques U dont il combattit l'accession au trône; il courut de grands dangers et dut s'enfuir sur le continent; il visita la France, la Suisse, l'Italie, se fixa en Hollande où il fut parfaitement reçu par le prince d'Orange, et travailla de toutes ses forces à le faire monter sur le trône d'Angleterre; il y réussit et Guillaume III par reconnaissance le nomma év. de Salisbury. Peu de révolutions furent aussi paisibles que celle-là; il n'y eut ni réaction, ni violences, ni vengeances; l'Égl. épiscopale garda ses droits en Angleterre, la presbytérienne en Écosse; les dissidents et les catholiques furent protégés. Burnet a écrit l'histoire des Hamilton, une Hist. de la Réform. en Angleterre, 1679,1715, trad. en fr. par Ro-semond 1683, et une Hist. de mon temps, depuis Charles II, ouvrage posthume publié par son fils 1724. Notice par Guizot.

 

BURSFELD, non loin de Minden et près de Gôttingue; abbaye de bénédictins fondée 1093, complètement déchue en 1430, se releva entre 1439 et 1469 parles soins de Busch,f 1479, qui la réunit à quelques autres couvents en décadence et les soumit à la stricte observance des statuts bénédictins. A Fépoque du concile de Bâle ils étaient réunis en congrégation au nombre de 36 couvents d'hommes et plusieurs de femmes, et Pie H les reconnut. La Réforme mit fin à leur existence comme cloîtres.

 

BUSCH, Jean, v. Bursfeld.

 

BUSENBAUM, Hermann, célèbre jésuite et casuiste, né 1600 en Westphalie, f 31 janv. 1668; auteur des Lys entre les Épines, des Vierges consacrées à Dieu, et d'une Moélle (ilfe-dulla) de théol. morale qui, malgré ses 15 éditions, ne fit pas d'abond beaucoup de bruit, mais qui, commentée par le p. Lacroix, attira l'attention publique. Sans qu'elles y fussent clairement contenues, on pouvait en déduire sur le mariage, sur l'assassinat, et surtout sur le régicide des maximes dangereuses. La chose était d'autant plus grave que la publication de ces commentaires coïncidait avec l'assassinat de Damiens. Le parlement de Paris condamna le livre; celui de Toulouse le fit brûler, et le p. Zacharia, italien, ayant essayé de le défendre, ce fut le point de départ de l'orage qui finit par éclater sous Choiseul et qui aboutit à la suppression de l'ordre 1762.

 

BUTTLAR, Eva (de), née 1670 à Eschwege, liesse; ses parents étaient âgés quand elle vint au monde; sa mère avait 52 ans, et la jeune fille en profita plus tard pour dire qu'elle était née non selon la chair, mais selon l'esprit. Mariée à 17 ans à un Français réfugié, de Vérins, maître de danse à Eisenach, elle l'abandonna au bout de 10 ans, 1697, pour s'attacher au mouvement piétiste qui commençait à remuer les populations dans les environs de Gotha. De piétiste elle devînt séparatiste, pnis chiliaste, visionnaire, et finit par tomber dans les excès les plus hideux. Après avoir tenu quelque temps des réunions religieuses où l'on chantait encore des cantiques de Néander et de Lampe, admirée, adulée par des enthousiastes qui voyaient en elle l'incarnation de la sagesse divine, de la sophia éternelle, et qui appréciaient sa beauté autant que son esprit, elle se laissa entraîner à fonder, 2 janv. 1702, la société chrétienne et philadelphique, qu'on appela aussi de son nom: les Éviste*, ou les Buttlaristo, qui rejetait le mariage et la propriété, mais qui permettait la communauté des femmes et celle îles biens. Poursuivis pour des actes criants et publics d'immoralité, les buttlaristes, qui ne dépassaient guère le chiffre de 40 personnes, furent obligés de s'enfuir. A Cologne ils se firent catholiques pour échapper à la juridiction civile et se plongèrent de plus en plus dans un dévergondage d'excès de tous genres. Le c papa » Winter fut appelé le Père; mais le 2 janv. 1706 commença le règne du fils en la personne d'Ap-penfeller ou Léander; Ichtershaufen devint bientôt la Colombe ou le Saint-Esprit, et Eva qui appartenait tour à tour à chacun, et à d'autres encore, fut déclarée le centre, le résumé, ou la Sainte-Trinité. Arrêtés le 22 févr. 1706, ils forent condamnés à différentes peines, mais réassirent à s'évader et se rendirent à Wetzlar, pais à Altona, où Léander sous le nom de Brach-feld s'établit comme médecin, après avoir préalablement éponsé Eva, qui n'en continua pas moins de fanatiser son entourage. La date exacte de sa mort est inconnue; elle vivait encore en 1717. Cette petite secte, malgré son peu d'importance, a compromis un moment le réveil de la piété et même l'œuvre des moraves, que les incrédules et les indifférents affectaient de rendre solidaire des folies hystériques d'Éva.

 

BUTTMANN, François, théol. hollandais, né à Leyde 1632, f 12 nov. 1679. Fils d'un pasteur réfugié du Palatinat, il fut successivement prof, à Leyde et prédicateur à Utrecht. Tête bien organisée, disciple de Cocceius, modéré dans ses opinions, il a publié des Comment, sur l'A. T. et Synopsù theologiœ, etc. 1661.

 

BUXTOBF (Bockstrop), famille distinguée d'hébraïsants, originaire de Westphalie. — Ie Jean, né 25 déc. 1564 à Camen, où son père était pasteur. Il étudia dans plusieurs universités, Marbourg, Heidelberg, etc., entendit Pisca-tor à Herborn, Grynâus à Bâle, Bullinger à Zurich, Bèze à Genève; revint à Bâle comme précepteur des enfants de Léon Curione, fet promu maître ès arts, fut nommé prof, d'hébreu, épousa en 1592 Marguerite, fille de Curione, qui lui donna 5 fils, dont 3 en une fois, et 6 filles, et mérita de nombreux honneurs académiques. Il refusa des places à Saumur et à Leyde, et f de la peste 13 sept. 1629. On le compte parmi les plus célèbres hébraïsants du protestantisme; il lisait tons les livres hébreux et rabbiniques et fut en relations suivies avec une quantité de notabilités juives, ce qui le rendit même un peu suspect à des protestants scrupuleux. Ayant assisté comme témoin à la circoncision d'un petit juif, il fut condamné pour ce fait à une amende de 100 florins. Sa profonde connaissance de la langue et des traditions juives lui permit de parler avec autorité du texte sacré et d'en défendre l'origine, l'authenticité et l'intégrité. Il fit ressortir le soin minutieux avec lequel les copistes l'avaient reproduit, puisqu'ils en respectaient même les irrégularités déformé, et il en tira contre les Septante et contre la Vulgate la conclusion que l'hébreu seul pouvait faire autorité en cas de besoin. C'était une thèse importante, à une époque où la Béforme en appelait à l'Écriture dans toutes ses controverses, et Buxtorf exerça sous ce rapport une grande influence. Sa collection de livres juifs, encore augmentée par ses fils et petits-fils, fut achetée en 1705 par la biblioth. de Bâle pour la somme de 1000 écus, avec une masse de lettres de savants juifs et chrétiens à lui adressées. Ses principaux ouvrages sont: le Manuel hébraïque 1602; la Synagogue juive, 1603; Lexi-con hebr. et chald. 1607; les Abréviations de l'hébreu, 1613; Biblia hebr. 1618; Tiberias,ou Comment, masorétique, 1620, etc.; tous souvent réimprimés. Il a laissé inachevés une Concordance hébr. de la Bible, et un Dictionn. chald. talmudique et rabbinique, que son fils Jean a continués et publ. en 1632 et 1639.

2<> Jean, son fils, né 13 août 1599; prodige de science dès son enfance, maître ès arts à 16 ans; se rendit en 1617 à Heidelberg, assista au synode de Dordrecht. visita de là, avec les députés de Bâle, la Hollande et l'Angleterre, revint par la France et publia à 23 ans son Dictionn. chaldéen et syriaque, 1622. En 1623 il vint à Genève, où il entendit Turretin, Diodati et Tronchin. Il refusa une place de prof, de logique à Lausanne, et remplit de 1624-1630 les fonctions de diacre à régi, de Saint-Pierre à Bâle. Il accepta alors la chaire de prof, d'hébreu, vacante par la mort de son père. Pour le remercier d'avoir refusé un double appel à Gro-ningue et à Leyde on créa pour lui une nouvelle chaire des Lieux communs et des Controverses, et en 1654 on lui donna l'exégèse de l'A. T. Il fut marié 4 fois; deux de ses enfants lui survécurent seuls, Jean du 3me mariage, et Jean-Jaques, du 4m«, qui lui succéda comme prof, d'hébreu, f 17 août 1664. Relevant et accentuant encore les idées de son père, Jean Buxtorf défendit avec énergie contre Louis Capelle la haute antiquité et l'autorité des points-voyel-)es du texte hébreu, les faisant remonter à Moïse, ou tout au moins à Esdras, tandis que Capelle les faisait remonter seulement au 6me siècle de l'ère chrétienne, et niait môme l'antiquité des lettres carrées de l'alphabet hébreu. Ces deux questions, qui sont aujourd'hui vidées dans le sens de Capelle ou à peu près, passionnaient les savants de l'époque, parce qu'elles touchaient à l'inspiration de la Bible, et donnèrent naissance pendant plus de 20 ans à toute une littérature. Buxtorf en particulier se fit remarquer par sa vivacité, dans son Traité de l'origine des points-voyelles, 1648, et si les savants allemands ne prirent que faiblement son parti, il eut la consolation de voir le Con-sensu* helvétique, rédigé en 1675 par Heidegger, consacrer ses idées dans son 2®* canon.

3o Jean-Jaques, fils du précédent, né 4 sept. 1645. A 8 ans il savait l'hébreu; à 16 ans il était étudiant en théologie; à 19 ans il était nommé prof, suppléant à la chaire d'hébreu, ce qui lui assurait la succession de son père, et la même année en effet, 1664, son père étant mort, il fut chargé de le remplacer. Il consacra 3 ou 4 ans à des voyages, visita la France, la Hollande, Londres, Oxford et Cambridge, et fut reçu partout avec la sympathie due à un grand nom. En 1669 il revint à Bâle, où il cumula avec ses fonctions de prof, d'hébreu, celles de bibliothécaire de l'université. D'une santé délicate, il f l«r avril 1704, aimé et considéré de tous. Travailleur infatigable et excellent professeur, il a peu écrit; on n'a de lui qu'une préface au Tiberias de son grand-père, et une nouvelle édition de la Synagogue juive du même, avec quelques corrections et développements, 1680.

4° Jean, neveu du précédent, fils de Jean, le fils de la 3m« femme de Jean (2o), né 8 janv. 1663, f 1732. Après avoir été quelque temps pasteur dans les environs de B&le, il fut nommé prof, d'hébreu en 1704 et conserva ces fonctions toute sa vie. Aucune de ses publications n'a une importance particulière; la plus intéressante, ce sont ses Catalecta philol. theologica, avec l'indication des principales lettres d'hommes célèbres adressées aux deux premiers Buxtorf.