LA VIOLENCE DE LA CONVICTION

 

par Jean leDuc

 

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«Et ayant fait un fouet de cordes, il les chassa tous du temple, et les brebis et les taureaux;

il répandit la monnaie des changeurs, et renversa leurs tables.» (Jean 2:15)

 

LES IMAGES DU DIEU VIOLENT

LA VIOLENCE DE L'AMOUR DE DIEU

QUAND LA VIOLENCE EST MÉCHANTE

LES OPINIONS ET LES CONVICTIONS

LA VIOLENCE VERBALE

LE COURAGE DE LA VÉRITÉ

 


 

Loin de la paix et de la douceur qui caractérisent généralement la Bible aux yeux du monde chrétien et évangélique, son témoignage sur elle-même est un de fortes agitations, d'agressions, de brutalités, de fureurs et d'oppressions. On n'a pas à le cacher, la Bible détient vraiment toute une réputation de violence. Les passages violents sont nombreux dans la Bible, autant dans l'Ancien que dans le Nouveau Testament, autant de la part de l'homme que de la part de Dieu, même que dans le premier on y voit le sang couler presqu'à chaque page. On aurait tendance à penser l’inverse pour le deuxième, l’Évangile semblerait porter un message de paix et de réconciliation en provenance d'un amour divin qui donne l'apparence d'être contraire à la violence, notion pacifiste, paisible et bonasse qu'on attribue généralement comme étant en accord avec l’image de Dieu révélée en Jésus. Mais une telle image n'est pas celle du Dieu de la Bible, en fait il est grand temps que les gens réalisent que le Dieu de l'Ancien Testament qui envoya massacrer sans pitié des villes entières, dans lesquelles des hommes, des femmes, et des enfants périrent atrocement, et qui occasionna le génocide de la race des géants, est le même Dieu du Nouveau Testament, à savoir le Seigneur Jésus-Christ. Notre Dieu n'est pas le Dieu d'un amour bonasse, il n'est pas le Dieu apathique et naïf qui tolère toutes les affections moelleuses de tous et chacun, il n'est pas un Gros Toutou Divin que l'on minouche avec de belles paroles mielleuses; il est un Dieu de conviction violente, de nature ferme, dynamique, dur, brutal, intolérant, inflexible et d'une sévérité inimaginable qui impose son respect, et ceux qui refusent de le reconnaître ainsi subiront de ses foudres éternellement, qu'ils le croient ou non, qu'ils le veulent ou non.

 

Toutefois, les choses ne sont pas si facilement tranchées que cela. L'Ancien Testament détient aussi des chapitres d’une douceur étonnante, tandis que le Nouveau ne manque pas de textes durs et de violence verbales, physiques et morales, même dans les Évangiles. Et s’il y a bien un livre biblique dont les pages sont jonchées de la violence des hommes et surtout de Dieu, c’est l’Apocalypse de saint Jean. Ce n'est pas d'aujourd'hui que le christianisme associe faussement l'amour de Dieu à un sentiment de paix, de douceur, de calme et de tranquillité. On ne peut blâmer les gens qui pensent ainsi, car personne n'aime les frictions et les tensions, les agressions et les conflits, les oppressions et les guerres. Tous désirent, du moins ceux qui sont sain d'esprit, vivre en paix, dans le bonheur et la sécurité, autant que possible. Mais une telle utopie de la société idéale n'est pas réalisable en ce monde, pas plus pour le chrétien que pour le non chrétien, elle appartient au domaine du rêve et jamais elle ne verra la lumière du jour, même pas dans le royaume millénaire fictif des évangéliques.

 

Plusieurs objecterons que Dieu est un Dieu d'amour et qu'il abhorre la violence. Or il faut comprendre que la violence a différente formes et n'est pas nécessairement négative en tout temps. Le mot violence est un terme péjoratif dans notre société dite civilisée, mais il n'en est pas toujours ainsi et ne fut pas compris de cette façon chez les anciens hébreux et les grecs. Ce mot ne joue pas en faveur de notre façon de penser, mais Dieu ne s'accorde pas avec nos raisonnements. Si la violence serait défavorable en tout temps, aucun de nous ne serait sauvé. Autant que nous pouvons détester ce mot, autant il est nécessaire pour que nous obtenions la grâce du salut. Nous ne pouvons le renier et mettre notre tête dans le sable comme l'autruche, la violence fait partie de la vie et sans elle Christ n'aurait jamais été crucifié sur la croix. Même que Dieu l'avait déterminé ainsi depuis avant la fondation du monde.

 

L'amour de Dieu n'est pas un sentiment comme se l'imaginent les gens du monde, il est un amour qui transforme et toute transformation implique une violence. Cette caractéristique, selon Jean 3:16, est reliée essentiellement au terme «sacrifice» qui nous est indiqué par les paroles «Dieu... a donné son Fils», et ces paroles se rapportent directement au sacrifice de Christ sur la croix. En d'autres mots l'amour (Agapé, Agapao) est un sacrifice et inversement le sacrifice c'est l'amour, mais non l'amour comme un sentiment ou une émotion comme se l'imaginent faussement un grand nombre de personnes. Dans le Grec le mot «Agapao», que nous traduisons regrettablement par «amour» ou par «charité», est un mot décomposable en deux termes qui se complètes ou «Aga» et «Pao». Le Dictionnaire Grec-Français de J. Planche vient à notre aide en nous indiquant que «Aga» signifie «fort, très puissant» et que «Pao» signifie «fouler, action de fouler, pressoir, fouler la vendange, qui pressure.» Agapao se traduit donc littéralement par «fouler fortement» ce qui indique une pression puissante dans le but de faire sortir le jus des raisins afin d'en faire du vin. Sa signification primaire est de renoncer à soi-même, de se sacrifier, de se dévouer, et cela nous indique clairement que l'amour de Dieu est une violence extrême. Lorsqu'on renonce à soi-même on se fait violence, lorsqu'on se sacrifie pour un autre on se fait violence, et lorsqu'on est dévoué à une personne ou à une cause on se fait violence à l'avantage de cette personne ou de cette cause.

 

L'amour de Dieu est l'ultime violence, elle détruit, blesse, déchire, s'impose et provoque. Elle détruit la nature du péché et détruira tous les pécheurs et les réprouvés dans un feu éternel, elle blesse les consciences de ceux qui réclament leur indépendance et les force à admettre leur défaite, elle déchire en pièces toutes les notions préconçues que nous avons sur nous-mêmes et sur Dieu, elle s'impose à ceux qui voudraient résister à l'appel de sa grâce d'entre ceux qui ont été choisis selon son bon plaisir, et elle provoque le croyant à la repentance. Ainsi l'amour de la vérité est nul autre que la violence de la vérité, elle est intolérante envers le mensonge et la duplicité, elle est franche, honnête, ardu, brutale, draconienne et inflexible en exposant ses déformateurs et ne fait aucune concession à la contrefaçon. Mais elle est comme un bistouri dans la main du Divin Docteur envers ses élus. L'amour de la vérité ne perd jamais sa notion de contrainte, car sans cette pression extrême qui nous force à quitter nos voies tortueuses et à venir à la grâce en nous attirant d'une manière irrésistible, nul ne serait sauvé. Il importe de le répéter de nouveau, notre Dieu n'est pas le Dieu bonasse des évangéliques, un Dieu qui a bon caractère et qui se montre par simplicité d'esprit très complaisant dans ses relations avec tous les pécheurs, un Dieu d'une nature accommodante jusqu'à l'excès, un Dieu qui aime l'homme pécheur mais qui déteste son péché, un Dieu qui tolère toutes les aberrations doctrinales et les excuse sur le fait que les gens sont imparfaits. Un tel Dieu est un faux dieu créer par l'homme à son image, un Christ chimérique qui n'a aucune puissance pour enlever les péchés. Ainsi lorsque nous disons que Dieu est amour, nous déclarons en effet que Dieu est violent, et cela ne doit pas nous surprendre, la Bible en témoigne abondamment et à maintes reprises.

 

Or, qui songerait à nier que la complexité de la vie est due en bonne partie à la violence ? La violence fait partie de la vie de tous les jours, depuis le début des temps et il en sera ainsi jusqu'à la fin. Notre naissance même est une violence et tous nos agissement le reflètent à un certain degré. L'être humain est une créature violente par nature et chacun de nous doit apprendre à s'y adapter et à la contrôler de crainte de périr, car nous vivons dans un monde où la loi du plus fort domine. La violence choque les plus sensibles, elle ébranle leur conscience et froisse leur cœur, et autant ils désirent le calme et la tranquillité, autant ils récoltent le tonnerre et les éclairs. En ce monde détraqué en lequel nous sommes, on n'a pas de paix sans friction et on n'a pas de calme sans bruit, l'un est toujours nécessaire à l'autre. Ainsi en montrant abondamment la violence, en légiférant à son propos, l’Ancien Testament ne fait que refléter la réalité humaine et divine. Mais il le fait en tournant et retournant en tous sens cette violence souvent tragique, comme s’il voulait inviter le lecteur à oser la regarder en face, et à tenter de la voir intérieurement en lui-même. Au fil des histoires qu’il raconte, il lui apprend à découvrir ses ressorts cachés, à démonter ses mécanismes complexes, à mesurer ses conséquences de mort, dans l’espoir de le voir inventer des moyens de déjouer ses ruses. Il ne craint pas d’y mêler Dieu, ne serait-ce que pour obliger le lecteur à se poser la question du rapport entre Dieu et la violence, et pour lui apprendre à connaître un Dieu qui serait aussi l’allié de la mort autant que de la vie. Mais un allié de la vie ne doit-il pas déployer parfois une certaine violence ? Car, la Bible l’enseigne aussi, toute violence n’est pas négative. Cependant, la plupart du temps, nous préférerions que la Bible donne l’image d’un Dieu qui incarne les valeurs que nous jugeons importantes – un Dieu à l’image de notre idéal, en quelque sorte. Mais l’homme est-il la mesure de Dieu ? N’est-ce pas là une forme de l’idolâtrie que la Bible s’ingénie à démasquer ? Les images bibliques de Dieu que nous n’aimons pas ou que nous refusons viennent à notre secours, et nous empêchent de prétendre détenir un savoir absolu sur Dieu. Elles contestent nos certitudes tranquilles et nous mettent en marche vers une vérité toujours plus vaste et insaisissable. Ainsi en va-t-il des images d’un Dieu violent qui est notre Créateur, notre Roi et notre Sauveur, images qui ne sont pas appréciées des imposteurs et des réprouvés qui néanmoins en connaîtrons la réalité.

 

Nous l'avons dit, toutes formes de violence n'est pas nécessairement négative, elle est souvent le contraire. Nous pouvons dire que la violence est positive quand elle vient de Dieu et négative quand elle vient de l'homme. Lorsqu'elle vient de Dieu, elle est constructive et juste, mais lorsqu'elle vient de l'homme elle est destructive et injuste. La violence se rapporte toujours à la loi, qu'elle soit naturelle, spirituelle ou morale. Elle fait partie des lois fondamentales de la nature et suit les principes de cause et effet (action et réaction) établies par Dieu pour créer et régir l'univers. Depuis le début des temps l'homme est pleinement conscient de ces lois, il en réalise les merveilles et la nécessité et s'est donné à en étudier tous les aspects pour en trouver des applications pratiques dans sa vie. Les résultats n'ont pas toujours été plaisants, plus que souvent ils ont été désastreux, et cela à cause de la nature déchue de l'homme qui est soumise à la corruption de la chair et du péché. Ainsi entre les mains de l'homme la violence devient une force négative qu'il utilise envers la nature et son prochain. Il ne peut faire autrement car la violence est l'essence même de son cœur tortueux qui réclame son indépendance de Dieu. Mais il est conscient de ce désordre dans sa propre nature, et pour sa sécurité il cherche à contrôler cette violence en lui afin de vivre dans une société moyennement équilibrée, car autrement ça serait l'anarchie et la destruction de la race humaine. Ceux d'entre les hommes qui en obtiennent le meilleur contrôle et peuvent la manipuler à leurs avantages deviennent des dirigeants, autant au niveau de la politique que de la religion.

 

Spirituellement la violence se rapporte à la loi de Moïse qu'il reçut des mains de Dieu. Ce que les juifs appellent la «Loi» est un ensemble de 613 commandements qui s’appliquent à tous les domaines de la vie quotidienne ou sociale pour réglementer la violence dans le cœur de l'homme. Les détails les plus intimes comme les plus officiels sont prévus, codifiés, réglementés par la loi. Parmi ces 613 commandements, il y en a 10 qui sont considérés comme essentiels. Ils sont souvent nommés «le cœur de la Loi», ceux qu’il faut absolument respecter, sans négociation, sans discussion possible. Ainsi 10 commandements absolus d’un côté, et 603 qu’il est possible d’interpréter librement de l’autre. Littéralement il s'agit dans la Bible non de 10 commandements mais de 10 paroles (Hébreu = DABAR = déclarer, ordonner, commander, avertir), mais des paroles qui détenaient une autorité souveraine de la part du Dieu Tout-Puissant et qui demandaient une obéissance absolue sous peine de mort. Le but de la loi était de montrer à l'homme qu'il lui était impossible de l'observer parfaitement dans toutes ses prescriptions, car la loi est la puissance du péché (1 Cor. 15:56). Elle dirigeait donc son regard vers la nécessité d'un Sauveur qui accomplirait toute la loi comme leur substitut, et ce Sauveur était Christ, le Messie promit depuis la Chute en Éden et prédestiné depuis avant la fondation du monde.

 

Moralement la violence se rapporte à la loi de notre conscience. La Bible dit que nous faisons notre loi nous-mêmes, selon notre propre conscience (esprit de vie) en laquelle est écrit depuis le début des temps (Genèse 2:7) les principes de la loi de Dieu qui régissent notre comportement (Romains 2:14,15). Sans loi interne pour guider notre conscience, quoique la lumière de celle-ci est profondément obscurcie, nous n'aurions aucune restreinte et serions pire que les animaux, même que ces derniers ont souvent plus de sens que les êtres humains.

 

Dans ses rapports avec la loi, la violence détient toujours un aspect positif car la loi vient de Dieu, elle est sainte, juste, et honorable (Rom. 7:12), tout en étant la puissance du péché car elle manifeste ses déviations pour nous rendre conscient que nous avons besoin d'en être délivré. Or c'est dans cette manifestation du péché que la violence prend son aspect négatif et devient un fléau pour l'homme, envers l'homme et envers Dieu. Ceci nous amène inévitablement à un autre aspect de la violence qui concerne tous les vrais chrétiens. Qu'en est-il de la violence sous la grâce ? Puisque la violence est l'essence même de la loi, il est évident qu'elle est abrogée sous la grâce car le prix de l'ultime violence a été payé sur la croix lorsque Christ a accomplit la loi pour chacun de nous. Sous la grâce la violence reprend son aspect positif, mais il y a conflit, car sous la grâce le chrétien détient deux natures, humaine et divine. Dans son esprit il est libéré de l'aspect négatif de la violence, mais dans sa chair il subit encore son aspect négatif, quoique spirituellement il est délivré de ses résultats néfastes. Toutefois la violence n'a plus de pouvoir sur lui et du temps qu'il regarde à la croix vers Celui qui l'a délivré, elle perd sa puissance et il en obtient le contrôle dans sa chair, mais non dans un but de la manipuler à son avantage comme le font les païens et les réprouvés. Ceci ne signifie aucunement que le chrétien n'a pas de violence en lui ou qu'il serait incapable de violence. Au contraire, si sa vie est menacée ou celle de sa femme et de ses enfants, il est très capable de tuer celui ou celle qui ferait un tel attentat, ou de prendre les armes pour protéger lui et sa famille. Mais par la confiance en la présence de l'Esprit de Christ en lui, il est dirigé à utiliser la violence dans son aspect positif pour la gloire de Dieu dans la proclamation de la vérité.

 

On entend souvent dire qu'il faut avoir le courage de ses convictions et, surtout, ne pas avoir peur de les afficher. Il faut comprendre que le mot «conviction» est un terme à double sens, il détient une signification charnelle qui s'applique à la nature humaine et au monde en général; et une signification spirituelle qui s'applique à la nature divine et particulièrement à la Bible et au christianisme. Il faut être vigilant pour ne pas se tromper dans l'utilisation du terme et l'appliquer là où il ne doit pas l'être. Tous savent, du moins de ceux qui sont consciencieux socialement et qui ont moyennement de savoir vivre, ce qui exclu toutes les nations Islamiques et conséquemment la majeure partie de la race noire, que «le droit d'un être humain à exprimer librement ses convictions religieuses est essentiel dans toute société démocratique». Malheureusement cette section de la Charte des Droits a négligé d'ajouter le mot «chrétienne» à l'expression «convictions religieuses», ce qui était sous-entendu dans sa formulation originale. Cela a ouvert les portes à toutes sortes d'abus et de conflits, et la fin sera inévitablement la destruction de la démocratie, car le christianisme, autant dilué et déformé qu'il l'est, est la base de nos nations et de nos consciences sur lequel repose notre liberté. Toutefois ce n'est pas notre intention d'entrer dans des diatribes politiques ici, nous laissons cela à des gens plus compétents que nous en cette matière, notre domaine est plutôt dans la critique biblique.

 

Les gens ont tendance à confondre les mots «opinion» et «conviction» et cela porte à toutes sortes de confusions. Une opinion n'est pas une conviction, il y a une grande différence entre les deux. Une opinion est une manière de penser sur un sujet ou un ensemble de sujets, un jugement personnel que l'on porte sur une question, qui n'implique pas que ce jugement soit obligatoirement juste. Mais plusieurs ont l'idée qu'une opinion est un principe considéré comme fondamental lorsque cela est clairement le contraire. Cette façon de penser porte souvent à l'extrémisme, comme nous le voyons avec les dérèglements psychiques et occultes que nous retrouvons chez les Pentecôtistes et les Charismatiques.

 

Dans le Grec le mot «opinion» est «phroneo» et ce terme signifie: «avoir de la compréhension, être sage; réaliser ce qui est avantageux; détenir un intérêt particulier, avoir une idée distincte et personnelle; sentir, ressentir, penser ou raisonner». La notion de «détenir un intérêt particulier, ou avoir une idée distincte et personnelle» est généralement la façon dont le mot est compris. Mais cela ne garantie pas la certitude d'un fait, au contraire on voit que le sens de «phroneo» ou «opinion» se base sur le «sentir et ressentir», c'est à dire qu'il s'agit ici de la perception d'une sensation, un sentiment ou une émotion, la conscience qu'on a de soi et du monde extérieur. Nous savons tous que les sentiments et les émotions changent constamment, ils n'ont aucune stabilité, aucune certitude. Or la vérité ne se base pas sur les fluctuations émotionnelles des caprices de tous et chacun. En d'autres mots, il n'y a pas de conviction dans une opinion, la force ou violence qui produit la solidité d'un fait ne s'y trouve point, car la conviction est une violence d'esprit que Dieu impose à ses élus afin de produire la certitude de ses promesses en eux.

 

Nous pouvons être plus ou moins prisonniers de notre histoire, de nos habitudes ou de nos expériences personnelles. Fréquenter d'autres chrétiens nous oblige à réfléchir dans des domaines où nous prenons peut-être pour des convictions «bibliques» des opinions toutes faites que nous respectons sans trop savoir pourquoi.

 

Commençons par préciser. Il importe d’abord de savoir ce qu’est l’opinion. Mais qu’est-ce qu’une opinion ? On dit opiner de la tête pour marquer son accord. Une opinion, c’est un avis sur lequel nous sommes d’accord. Nous disons «moi je pense que». L’opinion suppose que je me prononce sur le terrain de la vérité en formulant un jugement. C’est aussi cet avis que nous reconnaissons à titre de désaccord dans l’avis de quelqu’un d’autre. «Je ne suis pas d’accord avec ses opinions». Quand nous disons «avoir une opinion», nous sentons immédiatement nos limites. Nous ne sommes pas très assurés des fondements, des raisons pour lesquelles nous tenons à telle ou telle idée. «Avoir une opinion, c’est affirmer de façon sommaire, la validité d’une conscience subjective limitée dans son contenu de vérité». Nous sentons bien qu’un autre pourrait aussi bien avoir une opinion différente, toute aussi valide. Mieux, en disant «moi je pense que», que mettons-nous en valeur ? Est-ce l’idée que nous avançons, ou bien est-ce nous-mêmes que nous cherchons à faire valoir ? Dans les milieux évangéliques, ont voit clairement que les gens cherchent à se faire valoir à tout prix par leurs opinions, car l'apparence est tout pour eux. Elle est l'arme favorite de ces vermines pour diffamer une personne qui ne serait pas d'accord avec leurs opinions, et ils n'hésitent pas à l'utiliser en tordant les faits dans le but de se donner de l'importance aux yeux de leurs pareils. Ils vont détruire la réputation d'une personne et de sa famille pour arriver à leur but néfaste de la gloire personnelle, et ils le font insidieusement pour dissimuler leurs tromperies en prétendant agir sous la directive de Christ.

 

L’opinion participe du besoin de se faire valoir autant que du besoin de dire quelque chose et de donner un avis. Le plus souvent, dans l’opinion, nous avons conscience du caractère seulement probable, hypothétique de nos affirmations: «Lorsque quelqu’un dit qu’à son avis, le nouveau bâtiment de la faculté a sept étages, cela peut vouloir dire qu’il a appris cela d’un tiers, mais qu’il ne le sait pas exactement, puisqu'il ne l'a jamais vu et ne détient pas les faits». L’opinion trouve son usage correct sur le terrain privilégié de la connaissance par ouï-dire, là où l'incertitude demeure, et utiliser des rumeurs défavorables est le moyen par excellence que les évangéliques utilisent pour attaquer leurs ennemis. L'opinion relève de la croyance. "J’ai entendu dire que", alors je bâtis à partir de ce que j’ai entendu des opinions. Si nous faisons le tour de ce que nous savons par ouï-dire, ce que nous savons sans en avoir l’expérience directe, sans en avoir les raisons précises, nous ferons le compte exact de nos opinions. Il n’y a jamais d’exactitude dans l’opinion, elle n’est pas de l’ordre d’une constatation ni d’une expérience vécue. Elle est encore moins le résultat d’un raisonnement fondé. C'est tout juste si elle permet de se ranger dans le consensus commun. Convenons donc de ce que l’opinion constitue un stade élémentaire du rapport des faux chrétiens à prétendre qu'ils détiennent la vérité, mais un stade qui doit être dépassé par celui de la connaissance par ouï-dire. Son domaine de justification, c’est seulement celui de la probabilité. Là où nous n’avons pas de connaissance de première main, là où nous n’avons pas de raisons solides, là où nous manquons de justification suffisante, s’étend le domaine de l’opinion. Ce dont nous devons avoir une claire conscience, c’est d’être dans un ordre d’affirmation qui reste purement hypothétique. Aussi pouvons nous être capables de prendre conscience de ce que représentent notre pensée quand elle se réduit à des opinions. Une fois que nous en avons conscience, nous devrions pouvoir mettre entre parenthèses nos jugements et avouer aussi notre ignorance, ce qu'un imposteur ne fera jamais de crainte d'être exposé et de perdre face devant la lumière de la vérité.

 

En ce qui concerne la conviction, elle est une preuve, une certitude inébranlable sur l'assurance des promesses de Dieu (Héb. 11:1). Elle ne provient pas d'une connaissance particulière comme l'opinion, mais d'une révélation de l'Esprit de Dieu basée sur les Écritures qui détruit tous les doutes que nous pourrions avoir (Jean 16:7-11; 2 Timothée 3:16,17). En d'autres mots, l'Esprit de Dieu nous fait violence, il anéantit toute incertitude et nous impose la vérité, et cette vérité doit être proclamée de la même façon, c'est à dire avec violence (Matt. 11:12). La violence des convictions est la seule chose qui peut déraciner le mal et éliminer les erreurs, et pour cela elle doit exposer le mensonge et la duplicité et les exterminer. Les prétendus chrétiens n'aiment pas une telle approche violente, il la considère comme une violence verbale qui offense le bon goût parce qu'elle provoque les gens. Pour eux il est possible d'être ferme dans ses convictions sans pour autant être agressif, celui qui proclamerait ses convictions d'une façon ardente serait borné et irrespectueux de la conviction des autres. Or cela est une opinion et non pas une conviction, ce n'est qu'un échappatoire pour éviter de paraître mal aux yeux d'une société indulgente ou d'une église indolente qui a prostituée sa foi. Une conviction sans agressivité n'est pas une conviction, la conviction a toujours pour but de détruire la contrainte afin de confondre et rabaisser ceux qui déforment la vérité et qui s'attaquent à l'assurance de la grâce du salut (Tite 1:9-13). Elle est considérée malveillante par les imposteurs, car elle est combative dans sa proclamation avec des paroles intransigeantes et tranchantes, et nuit à leurs prétentions, et cela ils ne peuvent le tolérer, ils ont ainsi recourt à la vengeance et vont tout faire pour discréditer ses messagers.

 

La proclamation de nos convictions est une proclamation violente, ses paroles brusques et combatives tracent des sillons dans les consciences résistantes, mais malgré cela nous n'avons pas la puissance d'imposer nos convictions à d'autres quoique nous devons avoir la hardiesse de les afficher, cela est réservé au Saint-Esprit qui agit sur les cœurs car la Parole ne revient pas sans effets. Dans certains cas elle a un effet salutaire, dans d'autres un effet désagréable, car la Parole est une épée à deux tranchants, un qui donne l'adoption aux élus, l'autre qui donne la condamnation aux réprouvés. Le Seigneur demande des disciples qui ne craignent pas de se lever pour dire la vérité à tout prix, ils doivent servir d'exemples à d'autres pour les encourager dans le bon combat de la foi. Comment pourrions-nous être dans la vérité et ne rien dire ?, comment pouvons-nous laisser les ennemis de la croix déformer la vérité et s'attaquer à l'assurance de la grâce inconditionnelle de notre salut sans rien faire ? Nous n'avons pas à tolérer de telles aberrations, mais à les condamner et exposer ceux qui le font et de façon rude et sans pitié. Ces gens ne sont pas des païens régulier qui ont besoin de la grâce du salut, ils sont des ennemis qui prétendent être chrétiens et qui détruisent l'essence même de la vie éternelle, nous n'avons pas à être doux avec de telles vipères. Nous devons plutôt être courageux et foncer dans la mêlée et abattre leurs remparts doctrinaux avec toutes les armes de l'Esprit. Nous sommes dans une guerre spirituelle et la victoire nous est assurée, ne craignons point et combattons car Dieu est avec nous.

 

C'est la coutume parmi ceux qui se disent chrétiens de se rencontrer pour exprimer leurs opinions sur les Saintes-Écritures tout en vérifiant ce qu'en dit la Bible. Le partage a sa place et peux être très utile, mais la proclamation de la vérité en détient une autre, elle ne fait pas partie du même cadre. Or nous voulons que les choses soient claires, il ne s'agit pas ici de partager des opinions sur la Parole pour l'édification de la foi, mais de proclamer des convictions dans un monde de ténèbres, et cela est toute une autre chose. Dans un monde où tout chancelle, où à la suite de Nietzsche on "transvalue des valeurs," où non seulement on ne fait plus de différence dans le christianisme même entre ce qui est vrai et ce qui est faux, entre ce qui est saint et ce qui est profane, entre ce qui est impur et ce qui est pur, mais où le bien tend à s’appeler mal, et la vérité erreur; dans des assemblées dites chrétiennes où l’on méprise les faibles pour exalter les forts, où la haine et la récrimination sont glorifiées, et la pitié et le pardon bafoués, il importe de connaître la vérité et de la proclamée hautement et fortement, et cela est souvent à nos risques et périls.

 

La proclamation de la vérité n'est pas sans problèmes de nos jours, elle est souvent encombrée par des principes purement charnels et mondains qui cherchent à la restreindre. Avoir le courage de ses convictions et ne pas avoir peur de les afficher avec des paroles dites violentes, peut nous mener à l'encontre de la liberté d'expression qui est régie par toutes sortes de lois qui n'existaient pas au temps du Seigneur Jésus et ses disciples. Et comme si cela ne serai pas assez, les imposteurs en profitent pour nous accuser de «violence verbale», concept moderne qui était complètement étranger dans le christianisme primitif. Malgré cela ils persistent à nous dire que la violence verbale elle-même est condamnée par Jésus et qu'insulter son frère est déjà pour lui de l’ordre du crime. Ils basent leur notion sur le passage de Matthieu 5:22 qui dit: «Mais moi je vous dis que chacun qui se met en colère contre son frère sans cause, sera punissable par le tribunal; et celui qui dira à son frère: Raca (Vaurien), sera punissable par le conseil; et celui qui lui dira: Insensé, sera punissable par l’angoisse du feu méprisant.» Donc, selon eux, se mettre en colère ne serait pas de Dieu, ni insulter une personne, ces choses seraient plutôt du Diable et ceux qui les pratiquent ne seraient pas de vrais chrétiens. Mais il faudrait peut-être qu'ils changent leur version moderne de la Bible pour une qui est fidèle aux textes originaux, car Jésus dit bien dans ce passage qu'il ne faut pas se mettre en colère «sans cause», et cela défait complètement leurs présomptions malicieuse avec lesquelles ils déforment la vérité.

 

Selon ces sectes excrémentielles de vermines insalubres qui déforment la vérité, Jésus lui-même ne serait pas de Dieu puisqu'il s'est mit en colère lorsqu'il chassa les marchands du temple: «Et ayant fait un fouet de cordes, il les chassa tous du temple, et les brebis et les taureaux; il répandit la monnaie des changeurs, et renversa leurs tables.» (Jean 2:15). Si cela n'est pas de la violence, il nous faudrait changer de Dictionnaire. Dans Matthieu 23:33, Jésus dit aux pharisiens: «Serpents, race de vipères, comment éviterez-vous le châtiment de la géhenne?» Si cela n'est pas de la violence verbale, les poules ont des dents et il existent réellement des dragons avec sept têtes et dix cornes qui volent dans le ciel. Tel que Jésus a fait avec les pharisiens de son temps, tel nous devons faire avec les pharisiens modernes des sectes dites Évangéliques, car ces gens prétendent ce qu'ils ne sont pas et par cela en séduisent un grand nombre. En plus ce même passage de Matthieu nous mentionne clairement qu'il ne faut pas insulter son frère. Or dans le temps de Jésus, tous les Juifs se considéraient frères par rapport à la loi de Moïse, mais il n'en est pas ainsi dans le christianisme, surtout dans sa contrefaçon moderne.

 

Par rapport à la grâce, on ne peut considérer les Évangéliques comme des frères, car ils déforment son essence avec un faux évangile du libre-choix d'une décision personnelle, s'attaquant ainsi au sacrifice de la croix, et maintiennent un grand nombre de fausses doctrines avec lesquelles ils séduisent les crédules; même que plusieurs d'entre eux, surtout au niveau des Pentecôtistes et des Charismatiques, blasphèment contre la grâce du salut, se remettent sous l'observance de la loi, et se donnent à des pratiques occultes et mystiques dans lesquelles nous voyons toutes sortes de dérèglements de consciences au niveau psychique et moral. Il est évident que ces gens sont des faux frères et des ennemis de la croix auxquels il faut fermer la bouche par tous les moyens possibles et à tous prix, et cela inclue la violence verbale qu'ils détestent car ces pharisiens modernes ont une très haute opinion d'eux-mêmes et se pensent mieux que n'importe qui d'autre. Quelques mots juteux bien choisi contribuent à les rabaisser dans la poussière de leurs aberrations et forcent l'esprit adversaire en eux à se manifester. Ainsi nous pouvons leur trancher la tête avec l'Épée de la vérité afin d'exposer leurs duplicités. Même que l'insulte est passée au niveau de l'art de nos jours, ceux qui connaissent les livres de Tintin et les expressions colorées du capitaine Haddock savent très bien de quoi nous parlons. Quoiqu'il existent des manières draconiennes et très efficaces pour fermer la bouche à des ennemis, pour un chrétien authentique la meilleure façon de faire cela est des les exposer et les condamner fortement avec des paroles durs et intransigeantes. Cela sert d'avertissements aux autres qui seraient assez insensé pour persister dans leurs blasphèmes. Sur ces choses l'apôtre Paul nous dit: «Car il y en a plusieurs, principalement parmi ceux de la circoncision, qui ne veulent point se soumettre, qui parlent de choses vaines et qui séduisent les âmes, auxquels il faut fermer la bouche... c'est pourquoi, reprends-les vivement.» ou comme le dit une autre version: «reprends-les sévèrement» (Tite 1:9,13); et comme il nous dit dans 2 Corinthiens 11:26: «J'ai été souvent... en danger parmi les faux frères»; et dans Galates 2:4,5 Paul ajoute: «Et cela à cause des faux frères qui, par négligence, s'étaient infiltrés subtilement, et qui vinrent secrètement pour épier la liberté que nous avons en Jésus-Christ, afin de nous enlacer dans l'esclavage de la loi; nous n'avons consentis, pas même un seul moment, de nous soumettre à eux, afin que la vérité du message de la grâce fût maintenue parmi vous.»

 

Tôt ou tard pourtant, il faut bien se rendre à l’évidence: la Bible ne s’embarrasse pas de nos scrupules et n’hésite pas à associer à Dieu et au christianisme des images particulièrement violentes. L’image de Dieu qui se dégage de tout l’Ancien Testament est en fait si peu ironique que les auteurs du «Vocabulaire de Théologie Biblique» notent que «dans l’Ancien Testament, les termes de colère sont employés pour Dieu environ 5 fois plus que pour l’homme.» A longueur de pages, la Bible nous montre cette colère divine qui s’abat, telle une sanction du péché, sur le peuple (Osée 5:10; Ésaïe 9:11; Ézéchiel 5:13) mais aussi sur les nations orgueilleuses (Ésaïe 10:5-15) et qui ne manquera pas de semer la terreur au jour du jugement, «jour de colère» (Amos 5:18; Sophonie 1:15-2,3).

 

Impressionnés par ce débordement de violence jusqu’en Dieu même, certains, on le sait, ont cru pouvoir rejeter le Dieu de l’Ancien Testament qu'ils considèrent méchant et vengeur pour lui opposer le Dieu plein de bonté révélé par le Nouveau Testament. Cette présentation simpliste des choses, dans laquelle le christianisme authentique ne s’est jamais reconnue, sauf parmi les évangéliques, ne fait droit ni à la complexité de la Bible ni à l’unicité de Dieu qui se révèle à travers l’un et l’autre Testaments. Quiconque serait tenté de faire sienne cette ruineuse opposition ne tardera d’ailleurs pas à retrouver, au fil de sa lecture du Nouveau Testament, des images dont il croyait s’être débarrassé en congédiant l’Ancien Testament: le feu et la géhenne (Matt. 3:12; 13:42; 22:7; 25:41), le sang et les supplices (Matt. 18:34; Luc 12:47; 19:27) ainsi que les pleurs et les grincements de dents (Matt 13:42; 22:13). Il y rencontrera un Jésus dont la colère (Marc 3:5) semble atteindre jusqu’aux végétaux (la malédiction du figuier en Marc 11:21) et s’exprimer en quelques gestes violents hautement symboliques (le célèbre récit des vendeurs chassés du temple en Jean 2:23). Et lorsqu’il aura lu l’Apocalypse, il se devra d’apporter des correctifs à l’image quelque peu mièvre qu’il se faisait d’un Jésus «doux comme un agneau» (Apoc. 6:16,17) !

 

Lorsque des chrétiens sont choqués de trouver dans la Bible - et notamment dans le Nouveau Testament - des textes qui évoquent de la violence en Dieu, ils réagissent en fonction d’une certaine image qu’ils se font de notre Dieu, le Seigneur Jésus-Christ. Cette image leur provient d'instructions qu'ils ont reçu dans leur enfance, des prédications qu’ils ont pu entendre, des ouï-dire de tous et chacun, des films qu’ils ont pu voir sur Jésus, mais probablement plus encore, de toutes les nobles aspirations humaines qu’ils partagent avec leurs contemporains et qu’ils projettent de manière plus ou moins consciente sur Jésus: la tolérance, la tendresse, le respect, la justice, la patience, etc... C’est ici que la lecture de la Bible se révèle particulièrement utile, surtout en la comparant aux originaux hébreu et grec, pour contester chacune de ces images que nous nous faisons du Seigneur Jésus et qui, à n’être jamais contestées, finiraient par nous faire croire que nous connaissons parfaitement le Dieu insondable.

 

Les passages de Luc 16:16,17 nous donnent un aperçu très intéressant à propos de la violence: «La loi et les prophètes vont jusqu'à Jean; depuis ce temps-là le royaume de Dieu est annoncé, et chacun y entre par la violence.» (Bible Ostervald) Dans ce contexte, le terme grec pour le mot «violence» est «biazo» et il nous indique que chacun qui entre dans le royaume de Dieu, y entre par «la force» ou plus précisément par «courage». En d'autres mots, le courage de la vérité est ce qui ouvre la porte du ciel afin que ceux d'entre les pécheurs qui sont appelés à la grâce du salut puissent entrer dans sa gloire en Jésus-Christ. Les lâches qui veulent y entrer avec la mollesse de la douceur seront jetés dehors avec tous les fraudeurs, là où sont les pleurs et les grincements de dents: «Alors vous direz: Nous avons mangé et bu en ta présence, et tu as enseigné dans nos places publiques. Et il répondra: Je vous dis que je ne sais d'où vous êtes; retirez-vous de moi, vous tous qui faites métier de fraudeur. Là seront les pleurs et les grincements de dents, quand vous verrez Abraham, Isaac, et Jacob et tous les prophètes dans le royaume de Dieu, et que vous serez jetés dehors.» (Luc 13:26-28) Ainsi nous voyons que courage et violence sont associés dans un même but pour la gloire de Dieu, en fait ils sont même identiques. Nous devons donc être courageux dans notre proclamation de la vérité pour le salut des âmes et pour la destruction des forces de l'ennemi, qui dans notre cas sont les évangéliques modernes avec toutes leurs prétentions.

 

Dans son dernier cours au Collège de France, édité sous le titre «Le courage de la vérité», M. Foucault développe longuement une figure antique du diseur de vérité, le parrèsiaste, celui qui pratique la parrêsia, «terme grec qui s'écrit proprement «parrhesia» (Code Strong 3954) et qui signifie: liberté dans les paroles, discours sans réserve; ouvertement, franchement, c'est à dire sans dissimulation; sans ambiguïté ou circonlocution; sans l'usage de figures ou de comparaisons; confiance libre et intrépide, courage joyeux, hardiesse, assurance; le maintien par lequel on se met en évidence et que l'on assure sa publicité. Se traduit généralement par: ouvertement, librement, franchement, hardiment, publiquement, avec assurance, liberté, confiance, libre, et tous les termes connexes.»

 

La parrhesia «consiste à dire, sans dissimulation ni réserve ni clause de style ni ornement rhétorique qui pourrait la chiffrer et la masquer, la vérité. Le “tout-dire” est à ce moment-là: dire la vérité sans rien en cacher, sans la cacher par quoi que ce soit». Traductible selon lui par “franc-parler”, la parrêsia est un dire-vrai qui constitue une vertu essentiellement politique. Mais il existe également un sens apostolique et spirituel de la parrêsia, trait fondamental de la parole du prophète. La notion apparaît assez souvent dans le Nouveau Testament où elle est plutôt traduite dans le vocabulaire de la confiance, de l’assurance et de la parole ouverte. Cette manière de “tout dire” avec justesse et sans crainte (mais pas n’importe quoi comme les insensés qui parlent que pour s'entendent parler et dont les paroles n'ont aucune substance ni vérité), recèle cependant l’ambiguïté fondamentale attachée à la notion même de vérité, déjà rencontrée dans la figure du messager: la parrêsia peut devenir une menace pour la démocratie en y introduisant des différences de légitimité, et elle peut aussi franchir les limites psychiques de l’acceptable en se muant en franchise perverse.

 

La parrêsia, les risques de la parole

M. Foucault précise dans «Le courage de la vérité» que dire le vrai n’est pas suffisant pour qu’il y ait parrêsia: «[…] il faut que le sujet, en disant cette vérité qu’il marque comme étant son opinion, sa pensée, sa conviction, sa croyance, prenne un certain risque, risque qui concerne la relation même qu’il a avec celui auquel il s’adresse». Et c’est de ce risque que vient, en termes éthiques, la valeur de ce dire vrai: «D’où ce nouveau trait de la parrêsia: elle implique une certaine forme de courage, courage dont la forme minimale consiste en ceci que le parrèsiaste risque de défaire, de dénouer cette relation à l’autre qui a rendu possible précisément son discours». M. Foucault peut alors donner de la parrêsia une définition synthétique, qui présente la notion dans le cadre d’un contrat de parole: «La parrêsia est donc, en deux mots, le courage de la vérité chez celui qui parle et prend le risque de dire, en dépit de tout, toute la vérité qu’il pense, mais c’est aussi le courage de l’interlocuteur qui accepte de recevoir comme vraie la vérité blessante qu’il entend».

 

M. Foucault insiste sur la vertu de courage qu’il présente comme véritablement structurelle à la parrêsia, courage qu’il associe également à la noblesse: «Un homme par conséquent qui parle pour des motifs nobles, et qui, pour ces motifs nobles, s’oppose à la volonté de tous, celui-là... s’expose à la mort»... Pour le messager dans sa fonction d’éclaireur, on emploie le mot grec «kataskopos», qui a un sens précis dans le vocabulaire militaire: ce sont des gens qu’on envoie un peu en avant de l’armée pour regarder aussi discrètement que possible ce que fait l’ennemi. Ainsi le messager est envoyé comme éclaireur en avant, au delà du front de l’humanité, pour déterminer ce qui, dans les choses du monde, peut être favorable à l’homme ou peut lui être hostile.

 

Après cette marche en avant toujours solitaire, l’éclaireur, explique Foucault, revient parmi les hommes pour “annoncer la vérité, annoncer les choses vraies sans... se laisser paralyser par la crainte”. Cette pratique du dire vrai est articulée à un mode de vie, un mode de vie qui a éliminé “toutes les conventions inutiles “et “toutes les opinions superflues”, une philosophie qui réduit la vie à elle-même... Parrêsia ou précisément parrhesia, est également un mot important dans le lexique de la Bible, qui reçoit des traductions un peu différentes de “franc-parler” ou “dire vrai”. Les équivalents appartiennent plutôt au champ de la confiance, qui, quand elle se fait parole publique, correspond à la franchise ou la liberté de parole. La traduction du mot n’est pas stable dans la Bible, et il est donc difficile de repérer le mot dans le texte en français. Norbert Adeline rédige un article sur le mot parrêsia dans lequel il décrit cette situation lexicale: «Dans le Nouveau Testament les attestations de ces deux mots sont nombreuses: parrêsia et parrêsiazomai se rencontrent une quarantaine de fois et nous noterons que la répartition de ces attestations est irrégulière. Aucun emploi chez Matthieu. Un seul emploi chez Marc. Mais des emplois dans l’Évangile selon Jean et le reste dans les Actes et les Épîtres. Rien d’étonnant à ce qu’on rencontre souvent, dans les textes centraux de la proclamation apostolique, un mot qui exprime l’assurance et la force de la conviction.»

 

Il cite ensuite plusieurs passages où apparaît, derrière ses traductions, le mot de parrêsia. Par exemple, dans l’Évangile selon Saint Jean, Jésus répond à des contradicteurs avec “hardiesse” lors de la fête des Tentes et impressionne les habitants de Jérusalem qui n’osent cependant, par crainte, “parler ouvertement” de ce diseur de vérité: “Personne ne parlait librement de Jésus“ (Jean 7:13). Il s’adresse alors à la foule, et se décrit lui-même en parrèsiaste: Quelques habitants de Jérusalem disaient: «N’est-ce pas celui qu’ils cherchent à tuer ? Le voilà qui parle librement, et les Juifs ne lui disent rien.» (Jean 7:26).

 

Dans les Actes des apôtres, cette qualité de parole attribuée à Jésus touche aussi Pierre et Jean, qui comparaissent devant le Sanhédrin, accusés de diffuser les enseignements de Jésus. Les chefs de Juifs, les anciens et les scribes sont étonnés devant “l’assurance” des apôtres: «En voyant l’assurance de Pierre et de Jean, ils étaient étonnés, car ils se rendaient compte que c’étaient des gens du peuple sans instruction. Ils reconnaissaient en eux ceux qui étaient avec Jésus. Mais comme ils voyaient debout auprès d’eux l’homme guéri, ils n’avaient rien à répliquer.» (Actes 4:13-14).

 

Norbert Adeline conclut “en présentant un des passages les plus riches du Nouveau Testament sur les valeurs de la conviction, de l’assurance, de la parrêsia”. Ce sont les dernières paroles de Jésus à ses disciples: «Je vous ai dit tout cela en discours figurés. L’heure vient où je ne vous tiendrai plus de discours figurés, mais où je vous annoncerai ouvertement ["en toute clarté" dans une autre version] ce qui concerne le Père. En ce jour-là vous demanderez en mon nom, et je ne vous dis pas que c’est moi qui demanderai au Père pour vous; en effet le Père lui-même est votre ami, parce que vous, vous avez été mes amis et vous avez acquis la conviction que, moi, je suis sorti de Dieu. Je suis sorti du Père et je suis venu dans le monde; maintenant je quitte le monde et je vais vers le Père (Jean 16:25-28). Et les disciples reprennent les paroles de Jésus: «Maintenant tu parles ouvertement et tu ne tiens plus des discours figurés. Maintenant nous savons que tu sais tout et que tu n’as besoin que personne t’interroge; c’est pourquoi nous croyons que tu es sorti de Dieu (Jean 16:29).

 

On voit donc, à partir de ces deux traditions, la philosophie cynique et la naissance du christianisme, que la parrêsia appartient à un type de vérité hétérodoxe, qui va à l’encontre des pratiques langagières habituelles et reconnues d’une société ou d’un groupe. Le diseur de vérité n’est pas un simple locuteur; c’est un prophète, audacieux et combatif, marginal et condamné (parfois à mort), qui assume toutes les ambiguïtés du discours de vérité quand il prend une dimension politique et religieuse.

 

Les ambiguïtés de la vérité dite

Le parrèsiaste ou messager de la vérité est donc un locuteur muni de cette vertu de courage qui est... une vertu politique mais aussi religieuse, celle de l’homme libre, et qui sera d’ailleurs considérée la première des vertus, celle qui permet les autres. En même temps, il est aussi porteur d’une menace politique et religieuse, la démocratie et la religion se trouvant considérablement fragilisée par le dire vrai, qui introduit une hiérarchie de valeur dans les différents discours. M. Foucault formule très clairement cette ambiguïté de la vérité publiquement et donc politiquement et religieusement dite. D’un certain côté, la parrêsia empêche la folie totalitaire qui repose sur la soumission silencieuse des citoyens et des membres d'une église ou d'un groupe quelconque qui se dit chrétien.

 

A partir du moment où on n’a pas la parrêsia, le courage de la vérité, la violence du franc-parler, on est [...] obligé de supporter la sottise des maîtres ou des prétendus dirigeants dits chrétiens. Et rien de plus dur que d’être fou avec les fous, d’être sot avec les sots. Cette mention du fait que, sans parrêsia, on est en quelque sorte soumis à la folie des maîtres et des dirigeants spirituels, cela veut dire quoi et montre quoi ? Eh bien, cela montre que la parrêsia a pour fonction justement de pouvoir limiter le pouvoir des maîtres et de ces prétendus dirigeants. Quand il y a de la parrêsia, et que le maître est là – le maître et le dirigeant qui sont fous et qui veulent imposer leur folie et leurs fausses doctrines, que fait le parrèsiaste, que fait celui qui pratique la parrêsia ? Eh bien justement, il se lève, il se dresse, il prend la parole, il dit la vérité avec hardiesse et sans crainte. Et contre la sottise, contre la folie, contre l’aveuglement du maître et des dirigeants qui veulent le monopole de la foi et des consciences, il va dire le vrai, et par conséquent limiter par là leur folie. A partir du moment où il n’y a pas de parrêsia, alors les hommes, les citoyens, les chrétiens, tout le monde est voué à cette folie du maître et des dirigeants qui s'élèvent sur nous comme des petits dieux.

 

A tous les messagers de la vérité, nous vous disons avec l'apôtre Paul: «annoncer la parole plus hardiment et sans crainte.» (Phil. 1:14); «Le Seigneur est fidèle, qui vous affermira et vous préservera du malin. Et nous avons à votre égard cette confiance dans le Seigneur, que vous faites et que vous ferez les choses que nous vous recommandons.» (2 Thes. 3:3,4)

 

«Ne pensez pas que je sois venu apporter la paix sur la terre: JE SUIS venu apporter, non la paix, mais l'Épée.»

Matthieu 10:34

 

 

A Christ seul soit la Gloire